En cours au Siège de l'ONU

9612e séance - matin
CS/15673

Conseil de sécurité: la Cheffe de la MINUK se dit « insatisfaite » face au manque de dialogue politique et aux conséquences sécuritaires au Kosovo

Ce matin, la Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) a reconnu devant le Conseil de sécurité être « insatisfaite » face au manque de dialogue politique dont les conséquences se font sentir sur le plan sécuritaire au Kosovo.  Présentant le rapport du Secrétaire général retraçant les activités de la Mission entre le 19 septembre 2023 et le 15 mars 2024, Mme Caroline Ziadeh a appelé les parties à inverser cette tendance alors que les membres du Conseil, dans l’ensemble, les ont encouragées à poursuivre le dialogue facilité par l’Union européenne (UE). 

Malgré la poursuite des consultations avec les acteurs politiques à Pristina et à Belgrade pour renforcer la confiance, la Représentante spéciale a constaté un manque de progrès dans le dialogue politique ainsi qu’une méfiance entre les communautés en matière des droits humains et la propagation de discours de haine.  Elle a dénoncé l’incapacité des deux parties à résoudre les problèmes de longue date. Elle s’est toutefois réjouie d’une étape franchie hier s’agissant de la légitimité de l’administration locale dans les quatre municipalités à majorité serbe, le processus visant à réduire les tensions s’étant déroulé sans aucun incident de sécurité, même si seuls 253 des 46 556 électeurs inscrits ont voté. 

Selon Mme Ziadeh, les divers accords conclus jusqu’à présent dans le cadre du processus de dialogue fournissent « une feuille de route claire » vers le règlement de nombreuses questions en suspens.  L’une des solutions est la création de l’association/communauté des municipalités à majorité serbe qui devra englober des garanties financières et institutionnelles durables pour la communauté serbe du Kosovo, dont les questions d’administration locale, l’éducation et les soins de santé.  Pour la Cheffe de la MINUK et de nombreux membres du Conseil, la mise en œuvre intégrale des accords facilités par l’UE est une urgence.  Les deux parties doivent trouver des compromis à ce sujet.

Saluant les avancées sur la validité des plaques d’immatriculation des véhicules et les questions liées aux douanes, Mme Ziadeh a assuré que la MINUK continuera d’aider les communautés à surmonter la méfiance, citant notamment le travail du centre Barabar, qui a mené plus de 70 activités en moins d’un an, avec plus de 4 000 personnes représentant toutes les communautés du Kosovo. Elle a aussi parlé du deuxième Forum des Nations Unies sur l’instauration de la confiance au Kosovo, tenu en novembre 2023, où les participants se sont mis d’accord sur 27 recommandations en matière d’autonomisation économique, de protection de l’environnement, de droits linguistiques, de médias et de désinformation, de participation, d’inclusion et de renforcement de l’état de droit.  De plus, les réunions du Groupe de travail sur les personnes disparues ont repris le 31 janvier 2024, pour faire avancer la justice transitionnelle. 

Pour réaliser des progrès au Kosovo, Mme Ziadeh a suggéré de s’attaquer aux problèmes dans le cadre d’un contexte régional plus large.  Elle a mis en garde contre les actions unilatérales ou les appels à la division.  Le dialogue de bonne foi, la communication et la compréhension mutuelle sont la voie à suivre.

Commentant le rapport du Secrétaire général, le Président de la Serbie, M. Aleksander Vučić, l’a jugé « incomplet ».  Il a donné des détails sur des attaques planifiées contre les Serbes et dénoncé l’imposition de l’euro comme monnaie pour les transactions en espèces dans le nord du Kosovo au détriment du dinar serbe.  Il a surtout dénoncé les attaques systématiques contre les populations serbes et non albanaises et s’est impatienté en constatant qu’en dépit de ses exactions, « le régime de Pristina continue d’être récompensé ». Le Président serbe a demandé à la Représentante spéciale de présenter les mesures prises pour « mettre un terme à la persécution ethnique des Serbes » ou alors d’expliquer les raisons de son incapacité.  Il ne saurait y avoir de réconciliation sans la libération de tous les prisonniers politiques, a-t-il mis en garde avant d’assurer être engagé en faveur du dialogue avec Pristina. 

La Chine a exhorté Pristina à révoquer ses décisions « déraisonnables » qui ne font qu’exacerber les tensions et l’a exhortée à garantir la sécurité du personnel et des locaux de la MINUK.  De l’avis de la Fédération de Russie, c’est Pristina qui a clairement indiqué son intention de saboter le dialogue avec Belgrade jusqu’à ce que la Serbie reconnaisse le « quasi-État du Kosovo ».  Rappelant « l’agression de l’OTAN contre la Yougoslavie », il y a 25 ans, la délégation russe a pourfendu les pressions des États-Unis et de l’UE sur la Serbie et a accusé le Kosovo de mener une véritable politique de nettoyage ethnique, des attaques contre l’Église orthodoxe serbe et « l’albanisation » du patrimoine spirituel serbe. La Russie a également déploré que le rapport du Secrétaire général ne dise rien sur les violations de la résolution 1244 (1999) par les membres de l’OTAN qui injectent des armes au Kosovo.

Mme Vjosa Osmani-Sadriu, du Kosovo, qui s’est adressée au Conseil en tant que « présidente », a défendu une approche de paix fondée sur l’humain et le dialogue.  Le Kosovo est devenu un partenaire fiable, a-t-elle fait remarquer avant de rejeter les allégations de la Serbie s’agissant d’un soi-disant nettoyage ethnique des Serbes du Kosovo.  Elle a promis de bâtir un Kosovo inclusif où « personne n’a à connaître ce que les Kosovars ont enduré ».  La Serbie a pour sa part une attitude agressive depuis plus d’un an en amassant des troupes et des drones d’origine iranienne le long de la frontière, a-t-elle dénoncé.  De plus, elle a estimé que la Serbie n’avait honoré aucun des engagements pris dans l’accord de 2013 sur l’association/communauté des municipalités à majorité serbe.

Les États-Unis, qui ont désapprouvé les actes des deux parties ayant conduit à l’escalade, les ont exhortés à privilégier le dialogue afin de trouver une solution liée à l’utilisation du dinar serbe et d’avancer vers la création de l’association/communauté des municipalités à majorité serbe. 

Un souhait partagé par les membres du Conseil comme la France pour qui « il y a urgence à progresser vers la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo ».  L’absence de progrès sur ce point demeure un obstacle à la mise en œuvre effective des droits des personnes appartenant à la minorité serbe au Kosovo, et donc à la perspective européenne, a prévenu la délégation française.

RÉSOLUTIONS 1160 (1998), 1199 (1998), 1203 (1998), 1239 (1999) ET 1244 (1999) DU CONSEIL DE SÉCURITÉ S/2024/282

Déclarations 

Mme CAROLINE ZIADEH, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), a présenté le rapport du Secrétaire général qui couvre les principaux développements survenus entre le 19 septembre 2023 et le 15 mars 2024.  Elle a indiqué que les consultations avec les acteurs politiques à Pristina et à Belgrade, avec des chefs religieux, des organisations de la société civile et des partenaires internationaux se sont poursuivies. L’une des principales observations communes, a-t-elle relayé, est l’insatisfaction quant au niveau de progrès réalisés par le dialogue politique et aux conséquences sur la situation sécuritaire.  Elle a souhaité voir inverser le niveau de méfiance qui reste encore élevé.  Au cours des derniers mois, les tensions se sont exacerbées à cause de l’incapacité de résoudre les problèmes de longue date entre Pristina et Belgrade, ou entre les communautés serbes du Kosovo et l’autorité centrale de Pristina, a-t-elle rappelé. 

S’agissant de la question de la légitimité de l’administration locale dans les quatre municipalités à majorité serbe, dans la partie nord du Kosovo, Mme Ziadeh a indiqué que, depuis plusieurs mois, les Serbes du Kosovo de Leposavić/Leposaviq, de Mitrovica-Nord, de Zubin Potok et de Zvečan/Zveçan ont recueilli plus de 20% requis de l’électorat inscrit pour entamer le processus de révocation des maires élus en avril 2023.  Ce processus visant à réduire les tensions s’est déroulé hier sans aucun incident de sécurité, s’est-elle réjouie tout en notant que seuls 253 des 46 556 électeurs inscrits ont voté. 

En 2023, les efforts de renforcement de la confiance par le biais du dialogue politique ont été marqués à de nombreux revers alors que la communauté internationale s’était focalisée sur l’incident de sécurité dans le village de Banjska/Banjskë en septembre dernier.  Les responsables de cet incident doivent rendre des comptes et une enquête doit être menée, a exigé la Représentante spéciale.

Toujours en 2023, de nombreux événements ont alimenté la méfiance entre les communautés en matière des droits humains et des discours de haine, a-t-elle poursuivi, regrettant ces développements alors qu’ils auraient pu être évités par un dialogue de bonne foi.  Elle a exhorté à y répondre par des mesures correctives. 

Selon Mme Ziadeh, les divers accords conclus jusqu’à présent dans le cadre du processus de dialogue fournissent une feuille de route claire vers le règlement de nombreuses questions en suspens.  Elle a toutefois dit être préoccupée quant à la manière dont le nouveau règlement sur les transactions en espèces a été communiqué et mis en œuvre, et à la manière dont il a affecté les segments les plus vulnérables des communautés non majoritaires.  L’une des solutions à cette question est selon elle la création de l’association/communauté des municipalités à majorité serbe qui devra englober des garanties financières et institutionnelles durables pour la communauté serbe du Kosovo, dont les questions d’administration locale, l’éducation et les soins de santé.  Cette mesure constituera une étape importante vers le renforcement de la confiance entre la communauté serbe et les autorités centrales, a-t-elle assuré.

Selon Mme Ziadeh, la mise en œuvre intégrale des accords facilités par l’Union européenne (UE) est une urgence afin d’atténuer la série de crises qui continuent d’émerger au Kosovo.  Elle a appelé les deux parties à trouver des compromis à ce sujet.  Elle a salué les avancées sur la validité des plaques d’immatriculation des véhicules et sur les douanes.  La MINUK, a déclaré la Représentante spéciale, continuera d’aider les communautés à surmonter la méfiance existante, à coopérer afin de créer un nouvel espace où les communautés peuvent travailler ensemble. Dans ce contexte, elle a cité le centre Barabar, qui a mené plus de 70 activités en moins d’un an, avec plus de 4 000 personnes représentant toutes les communautés du Kosovo.  Il a organisé en novembre le deuxième Forum des Nations Unies sur l’instauration de la confiance au Kosovo, auquel ont participé toutes les communautés et toutes les professions, qui se sont mises d’accord sur 27 recommandations en matière d’autonomisation économique, de protection de l’environnement, de droits linguistiques, de médias et de désinformation, de participation, d’inclusion et de renforcement de l’état de droit. 

Elle a aussi indiqué que les réunions du Groupe de travail sur les personnes disparues ont repris le 31 janvier 2024, pour faire avancer la justice transitionnelle.  Elle a rappelé qu’il faut renforcer la coopération entre les gouvernements, la société civile et les organisations internationales sur la question des violences sexuelles et basées sur le genre, soulignant que la Mission continue de donner la priorité au programme de la jeunesse, de la paix et de la sécurité. À cet égard, la sixième Assemblée de la jeunesse des Nations Unies, qui se tiendra au Kosovo en mai prochain, servira de plateforme pour rassembler de jeunes militants et dirigeants de toutes les communautés du Kosovo et de toute la région, l’occasion de soutenir le dialogue intercommunautaire et l’entrepreneuriat pour aider à relever les défis et à saisir les opportunités dans un monde dominé par l’intelligence artificielle.

Pour réaliser des progrès au Kosovo, a suggéré Mme Ziadeh, il faut s’attaquer aux problèmes dans le cadre d’un contexte régional plus large.  La MINUK continuera d’apporter son soutien au dialogue plutôt qu’aux actions unilatérales ou aux appels à la division. Face à l’affaiblissement de la confiance, la Mission reste un partenaire déterminé pour tous ceux qui partagent la vision d’un avenir meilleur.  Le dialogue de bonne foi, la communication et la compréhension mutuelle sont la voie à suivre, a conclu la Représentante spéciale. 

M. ALEKSANDER VUČIĆ, Président de la Serbie, a rappelé que le très important Accord de Bruxelles a été signé il y a 11 ans, avant de déplorer que la création de l’association/communauté des municipalités à majorité serbe ne soit pas devenue réalité.  Onze ans de promesses non tenues et de mensonges qui ont conduit au harcèlement physique et aux violences contre la population serbe au Kosovo.  Il a estimé que le rapport à l’examen est incomplet, en rappelant que la Serbie a détaillé les attaques planifiées contre les Serbes du Kosovo lors de la réunion d’urgence du Conseil, le 8 février dernier. Le but du « régime nationaliste » en place à Pristina est de créer des conditions de vies insupportables pour la population serbe. 

Le Président a fermement dénoncé l’imposition de l’euro dans le nord du Kosovo au détriment du dinar serbe, ce qui a pour effet de priver la population serbe d’un accès aux services publics.  Il a également déploré le fait que la décision d’imposer l’euro a été mise en œuvre immédiatement.  Les populations serbes et non albanaises du Kosovo sont systématiquement attaquées, a dénoncé le Président, avant d’affirmer que la Serbie mise sur le dialogue et de dénoncer les ambitions d’une grande Albanie de Pristina qui sapent toute coexistence avec la Serbie.  Pristina a aggravé sa répression brutale avec 16 attaques contre les Serbes du Kosovo, au cours de la période à l’examen.

Regrettant le manque de substance du rapport sur ces incidents, le Président a choisi de les détailler afin que le Conseil saisisse mieux la situation.  Il a parlé de la confiscation de propriétés de l’Église orthodoxe serbe, de la destruction de cimetières et des attaques ethniques.  Malgré ces exactions, le régime de Pristina continue d’être récompensé.  Les Serbes du Kosovo font l’objet d’un harcèlement systématique de la part de Pristina, alors que la MINUK a l’obligation de garantir un certain niveau de normalité dans la vie de toute la population du Kosovo. Le Président a demandé à la Représentante spécial du Secrétaire général de présenter les mesures prises pour mettre un terme à la persécution ethnique dont les Serbes sont victimes ou alors d’expliquer les raisons de son incapacité.  L’attaque de Banjska, a-t-il dit, ne doit pas être utilisée comme un alibi pour persécuter des Serbes. 

Le Président est également revenu sur le référendum relatif à des municipalités dans le nord du Kosovo et le boycott de la population serbe.  C’est un référendum honteux, soutenu par une campagne d’intimidation à l’endroit des Serbes.  Le Président a aussi prévenu qu’il ne saurait y avoir de réconciliation sans la libération de tous les prisonniers politiques.  Nous restons engagés en faveur du dialogue avec Pristina. Nous avons fait des concessions et c’est Pristina qui refuse de mettre en œuvre ses engagements.  La persécution des Serbes du Kosovo entrave le dialogue, a souligné le Président, en mettant en garde contre l’écriture d’un scénario imprévisible.  Il a réclamé la création de l’association/communauté des municipalités à majorité serbe. 

La volonté de paix, a-t-il constaté, ne domine pas au Kosovo.  La demande d’adhésion fallacieuse du Kosovo au Conseil de l’Europe n’est que la poursuite d’une « mascarade » puisque cette demande vient d’un régime d’apartheid niché au cœur de l’Europe. Ce serait offrir à Albin Kurti une nouvelle victoire sur un plateau d’argent.  Le Président a insisté sur l’engagement de son pays en faveur du dialogue. Nous ferons notre possible pour préserver le calme et soyez convaincus de notre sérieux, a-t-il conclu.

Mme VJOSA OSMANI-SADRIU, du Kosovo, s’est adressée au Conseil en tant que « présidente » et a défendu une approche de paix fondée sur l’humain et le dialogue, en soulignant l’effet profond qu’a eu l’union des démocraties sur son pays, le Kosovo, il y a 25 ans, pour bâtir la paix et protéger le caractère sacré de la vie.  Aujourd’hui le Kosovo rayonne et est un fervent défenseur des valeurs démocratiques, a-t-elle déclaré, ajoutant qu’il promeut son caractère multiethnique et l’avancement des droits humains, étant devenu à ses yeux un exemple marquant de la démocratie dans l’action.  La force du Kosovo repose sur ses partenariats, entre autres avec les pays qui étaient à ses côtés pendant les moments les plus sombres, a-t-elle souligné avant de mettre en avant les bons scores de son pays dans les indices internationaux, ainsi que son caractère pro-européen.  Avec une croissance économique à deux chiffres et des perspectives économiques prometteuses, le Kosovo est également devenu un partenaire fiable, a-t-elle fait remarquer, se réjouissant qu’il ne soit plus « juste un pays récipiendaire d’aide ».  Elle a aussi revendiqué le rôle de chef de file du Kosovo dans les programmes mondiaux au bénéfice du bien commun. 

En tant que commandante en chef des forces du Kosovo, Mme Osmani-Sadriu a soutenu le programme « les femmes et et la paix et la sécurité » en plaçant beaucoup d’espoirs dans le rôle du nouveau centre régional sur les femmes et la paix.  « Un Kosovo pour tous et toutes, qui promeut la diversité et l’inclusion, est le Kosovo que nous visons. »  La Présidente a ensuite rejeté catégoriquement les allégations de la Serbie s’agissant d’un soi-disant nettoyage ethnique des Serbes du Kosovo, les qualifiant d’erronées, d’infondées et de motivées politiquement.  Affirmant que les structures juridiques du Kosovo protègent activement leurs droits de citoyens, elle a signalé que le Comité d’Helsinki pour les droits humains et le Parlement européen ont également discrédité le discours serbe.  Faisant remarquer que les Serbes du Kosovo ont fui la Serbie sous le « règne » de M. Vučić, la Présidente a précisé qu’ils disposent d’un droit de veto au sein du Parlement du Kosovo, ce qui leur donne un véritable pouvoir de décision.  En outre la langue serbe est reconnue comme langue officielle au Kosovo et les sites religieux orthodoxes bénéficient d’un haut niveau de sécurité.  À part quelques vols isolés, il n’y a eu aucun ciblage ethnique de ces sites, a affirmé la Présidente dont l’engagement à bâtir un Kosovo inclusif se fonde sur un engagement sans faille à faire en sorte que « personne n’ait à connaître ce que les Kosovars ont enduré ».

Mme Osmani-Sadriu a reproché à la Serbie d’avoir une attitude agressive depuis plus d’un an, en dénonçant notamment une présence militaire sans précédent, y compris des drones d’origine iranienne, le long de la frontière.  Elle a passé en revue une série d’actes d’intimidation des Serbes du Kosovo déployés par des structures illégales serbes, notamment dans le but de les forcer à quitter des institutions du Kosovo. C’est aussi la Serbie qui les a appelés à boycotter les élections municipales, a affirmé la Présidente, en revenant sur l’accord signé en 2013 sur l’association/communauté des municipalités à majorité serbe.  La mise en œuvre de cet accord dépend de plusieurs conditions pour créer cette association, a-t-elle souligné, dont le démantèlement de structures illégales.  À ce stade, la Serbie n’a honoré aucun des engagements qui la concernent, a affirmé la Présidente, dénonçant l’hypocrisie de demander au Kosovo de respecter cet accord.  « Si Vučić se souciait vraiment des citoyens serbes du Kosovo, il ne s’opposerait pas à l’adhésion du Kosovo au Conseil de l’Europe » puisque cela signifierait plus de droits humains pour tous les citoyens du Kosovo, y compris les Serbes du Kosovo, a fait valoir Mme Osmani-Sadriu.

En guise de conclusion, elle a déclaré que si la guerre est terminée, elle a laissé des cicatrices toujours bien présentes, en évoquant l’histoire de la famille d’une victime du régime de Belgrade, présente à ses côtés. « La seule vérité que défend le régime de Vučić est la sienne », a-t-elle tranché en lui reprochant de n’avoir jamais manifesté un quelconque signe de repentance.  Elle a demandé que justice soit faite enfin sur les dossiers présentés au Tribunal pour l’ex-Yougoslavie et les nombreux cas de violences sexuelles et de disparitions forcées de citoyens du Kosovo. Elle s’est offusquée de l’approche révisionniste de l’histoire du régime serbe.

Dans une motion d’ordre, le Président de la Serbie a dénoncé le fait que la Présidence du Conseil ait fait venir Mme Vjosa Osmani-Sandriu et ses conseillers qui n’ont pas de représentation diplomatique à l’ONU. Nous sommes dans une sorte de pièce de théâtre, s’est-il exclamé.  Alors que je me suis concentré sur le rapport de Mme Ziadeh, le Conseil a assisté à un procès mené par une cour martiale sur des faits remontant à 25 ans, a encore dénoncé le Président, en constatant que Mme Osmani-Sandriu n’a rien dit sur ledit rapport et encore moins sur le viol et le massacre de femmes serbes. Quant aux allégations sur la présence de drones, il n’y a pas un seul drone iranien en Serbie, a affirmé le Président. 

Mme Osmani-Sadriu présente les personnes assises derrière comme des membres de sa délégation, s’est étonné le représentant de la Fédération de Russie. Or, a-t-il fait valoir, Mme Osmani-Sadriu est invitée au titre de l’article 37 du règlement provisoire du Conseil et sa participation ne présume en aucun cas la présence à ses côtés de quelque délégation que ce soit.  Nous sommes devant une violation très claire de la procédure car les personnes présentes derrière l’intervenante auraient dû s’assoir plus loin dans la salle.  Les membres de la société civile peuvent, au titre des articles 37 et 39 du règlement provisoire, venir avec une délégation, a clarifié la Présidente du Conseil.  Ces femmes assises derrière moi, a renchéri la « Présidente » du Kosovo sont des activistes de la justice mais aussi des membres de mon cabinet.  Elles sont ici comme conseillères parce qu’elles travaillent sur des questions comme le soutien aux survivantes de la violence sexuelle et aux familles qui ont souffert de la guerre.  Mme Osmani-Sadriu peut considérer qu’elle a un cabinet, des ministres et des conseillers, mais ce n’est pas le cas, a rétorqué le représentant de la Fédération de Russie.  Elle est invitée au titre de l’article 39, en tant qu’individu et c’est tout.

Le représentant des États-Unis a dénoncé les actes des deux parties qui ont conduit à l’escalade.  Il a appelé la Serbie à travailler avec la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) pour éviter des attaques comme celle du 24 septembre dernier, tout en veillant à ce que les auteurs soient traduits en justice.  Le représentant a aussi déploré les restrictions imposées à la libre circulation des Kosovars, ce qui est une forme d’intimidation et la violation des accords en vigueur.  Il a exhorté les deux parties à privilégier le dialogue afin de trouver une solution liée à l’utilisation du dinar serbe et d’avancer vers la création de l’association/communauté des municipalités à majorité serbe.  On ne peut, a tancé le représentant, décider de démettre des maires élus.  Il a enfin estimé qu’il est temps de revoir le mandat de la KFOR. 

La représentante du Guyana a souligné l’importance du travail effectué par la MINUK en matière de promotion de la paix, de la sécurité, de la stabilité et du respect des droits humains au Kosovo.  Elle a jugé essentiel que la Mission continue à promouvoir l’instauration de la confiance entre les communautés, l’état de droit et la normalisation des relations entre Belgrade et Pristina.  S’alarmant des cas de vandalisme signalés contre des bureaux de la MINUK, elle a appelé les autorités kosovares à assurer la protection des biens de la Mission et son accès à ses locaux dans le nord du Kosovo. 

La déléguée a ensuite salué la facilitation par l’UE du dialogue entre la Serbie et le Kosovo, qualifiant d’encourageants les progrès réalisés dans ce cadre en 2023.  Elle s’est toutefois déclarée préoccupée par les actions récentes qui ont contribué à une escalade des tensions et par l’absence d’efforts de la part des parties pour mettre en œuvre les dispositions convenues dans l’accord de février 2023.  Appelant à réexaminer les mesures susceptibles de perturber le bien-être économique et social des communautés minoritaires, elle a appelé au respect des droits humains de toutes les personnes vivant au Kosovo.  Elle a enfin invité les parties à réaffirmer leur engagement en faveur du dialogue Belgrade-Pristina mené par l’UE et à sauvegarder les progrès durement acquis. 

Le représentant de la Chine a exprimé sa vive préoccupation face à l’escalade et aux incidents sécuritaires dans le nord du Kosovo.  L’annonce des autorités kosovares d’abolir le dinar serbe et les fouilles « violentes » de personnes d’origine serbe aggravent les tensions.  Dans ce contexte, il a exhorté Pristina à révoquer ses décisions « déraisonnables » et à mettre un terme aux mesures unilatérales qui ne font qu’exacerber les tensions.  La création d’une association/communauté de municipalités à majorité serbe représente une évolution importante, à condition que l’Union européenne conserve sa neutralité et qu’elle fonde ses efforts de médiation sur la justice, a estimé le représentant.  Il a appuyé les échanges entre les parties, dans le cadre de la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité, pour parvenir à des solutions mutuellement acceptables.  Le Conseil doit continuer d’examiner la question du Kosovo et Pristina doit garantir la sécurité du personnel et des locaux de la MINUK, a insisté le représentant. 

Malgré le temps écoulé, cette guerre n’appartient pas encore à l’histoire, s’est-il désolé, en évoquant la tentative infructueuse de la Fédération de Russie de convoquer une réunion du Conseil sur le vingt-cinquième anniversaire des bombardements de l’ex-Yougoslavie par l’OTAN.  Après avoir mené une guerre contre l’ex-Yougoslavie, l’OTAN a invoqué à maintes reprises la protection des droits humains pour justifier ses opérations militaires en Libye et ailleurs, a-t-il noté, ce qui mine tant la souveraineté des États que la protection de ces droits.  La plupart des pays étant multiethniques, le délégué a considéré que la question des communautés locales doit être réglées par les États concernés eux-mêmes. 

Le représentant de la Sierra Leone a salué les progrès accomplis par Belgrade et Pristina dans la mise en œuvre de la feuille de route pour la mise en œuvre de l’accord énergétique de 2022, l’enregistrement des plaques d’immatriculation des véhicules et la liberté de circulation des véhicules entre le Kosovo et la Serbie.  Ces efforts sont essentiels pour désamorcer les tensions, ouvrir le dialogue et tracer la voie vers une paix durable.  Le délégué a dit être préoccupé par les informations faisant état d’une attaque contre le village de Banjska/Banjskë, en septembre 2023, exhortant les autorités de Pristina et de Belgrade à prévenir toute recrudescence du conflit. Saluant les mécanismes de reddition des comptes en place au Kosovo, le représentant s’est félicité de la mise en œuvre de l’arrêt de la Cour constitutionnelle de 2016 concernant les biens du monastère de Visoki Dečani, et des procès en cours pour crimes de guerre. 

La Cour constitutionnelle devrait apporter des éclaircissements sur la récente décision de la Banque centrale de recourir à l’euro en lieu et place du dinar serbe, a-t-il noté, avant de demander au Kosovo de reconsidérer son approche visant à prendre le contrôle des biens des membres de la communauté serbe. Il a condamné toute tentative de la part d’acteurs non étatiques de dissuader l’accès aux propriétés privées, en particulier celles occupées par la MINUK, et les sites religieux et culturels du Kosovo, de les cambrioler, de les dégrader et de les détruire.  L’exercice des droits économiques, des libertés religieuses et culturelles doit être institutionnalisé afin de préserver une société multiethnique, a encouragé le délégué.  Il a enfin regretté la tenue d’élections municipales dans les municipalités du nord du Kosovo.  Belgrade et Pristina doivent finaliser la création de l’association/communauté des municipalités à majorité serbe, a-t-il ajouté. 

Le représentant de la France a estimé qu’il y a urgence à progresser vers la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo.  C’est le sens de l’accord dit de « Bruxelles-Ohrid », conclu il y a maintenant plus d’un an, et le plus ambitieux à ce jour. Si ces avancées récentes sont encourageantes, il faut néanmoins aller plus loin, a estimé le représentant.  Il a rappelé que la création de l’association/communauté des municipalités à majorité serbe est attendue depuis trop longtemps déjà.  L’absence de progrès sur ce point demeure un obstacle à la mise en œuvre effective des droits des personnes appartenant à la minorité serbe au Kosovo, et donc à la perspective européenne.  Nous souhaitons, s’est expliqué le représentant, que des avancées irréversibles soient faites au plus vite, en ligne aussi avec les aspirations du Kosovo à adhérer au Conseil de l’Europe alors que le bon traitement des minorités est au cœur du mandat de cette organisation. 

Il a noté que des élections municipales doivent être par ailleurs organisées rapidement dans le nord du Kosovo, avec la participation active de toutes les communautés.  À cet égard, la France rappelle que la démission des maires élus avec les voix de seulement 3% des inscrits serait l’option la plus rapide pour rétablir une démocratie représentative dans les quatre municipalités du Nord, ainsi qu’un geste de désescalade.  Enfin, le délégué a jugé essentiel que les responsables de l’attaque de Banjska de septembre dernier répondent de leurs actes devant la justice.

La représentante de la Suisse a encouragé les dirigeants politiques du Kosovo et de la Serbie à avoir une rhétorique mesurée et un engagement responsable, leur conseillant de poser les bases d’une coopération et d’une compréhension commune.  La déléguée a également appelé à un engagement clair et accru dans le cadre du dialogue facilité par l’UE.  Les questions en suspens, y compris les conséquences de la mise en œuvre des réglementations monétaires au Kosovo, doivent être résolues par ce dialogue, en tenant compte des intérêts des communautés concernées, a-t-elle souhaité avant de demander de renforcer la légitimité et la durabilité des solutions dans le processus de paix, y compris par une participation renforcée des femmes. Plus d’un an après les « décisions prometteuses » prises dans le cadre des accords de Bruxelles et d’Ohrid, la déléguée a estimé qu’il est grand temps de passer des engagements sur papier aux actes.  Elle a donc demandé à la Serbie de lever toute ambiguïté quant à son engagement en faveur des accords et de s’abstenir de s’opposer à l’adhésion du Kosovo à des organisations internationales.  S’adressant au Kosovo, elle l’a invité à établir sans délai l’association/communauté des municipalités à majorité serbe, un engagement pris en 2013.

La Suisse s’engage en faveur de l’instauration de relations constructives entre les parties par des mesures pratiques et discrètes, a assuré la représentante en citant en exemple les réunions qu’elle organise depuis 2015 afin de permettre un contact direct entre les représentants des partis politiques du Kosovo et de la Serbie.  Soulignant que les deux parties partagent la responsabilité de réduire les tensions, elle les a appelés à éviter à l’avenir des escalades comme celle qui s’est produite à Banjska et à traduire leurs responsables en justice.  Enfin, concernant les votes d’hier sur la révocation des maires dans le nord du Kosovo, elle a regretté que la communauté serbe n’y ait pas participé.  Elle a conclu en encourageant le Gouvernement du Kosovo à renforcer ses efforts d’intégration de la minorité serbe dans la société.

Le représentant de l’Algérie a déploré les incidents et décisions unilatérales qui ont eu un impact sur une situation déjà tendue, notamment dans le nord du Kosovo.  Il est important, a-t-il souligné, d’éviter les actes qui pourraient pousser à l’escalade et aux tensions ethniques au Kosovo.  Il a plaidé pour la nomination de Serbes dans les institutions locales et insisté sur la création de l’association/communauté des municipalités à majorité serbe, comme cela a été décidé dans l’Accord de Bruxelles de 2013.  Un dialogue constructif et sincère reste la seule voie pour une sortie de crise, a estimé le représentant.

Le représentant de la République de Corée a regretté que les négociations entre le Kosovo et la Serbie en vue d’une normalisation de leurs relations sur la base de la proposition de l’Union européenne (UE) n’aient pas progressé de manière substantielle.  Au contraire, a-t-il déploré, les tensions entre Belgrade et Pristina se sont accrues et la situation sécuritaire dans le nord du Kosovo reste précaire.  Évoquant l’attaque contre la police du Kosovo, qui a eu lieu dans le village de Banjska le 24 septembre 2023, il a demandé que les auteurs répondent pleinement de leurs actes.  Il a par ailleurs exprimé sa préoccupation quant à la nouvelle réglementation de la Banque centrale du Kosovo sur les transactions en devises, qui risque d’avoir un impact négatif sur la capacité des résidents serbes du Kosovo à mener leur vie quotidienne.  Cette question devrait être selon lui discutée plus avant dans le cadre du dialogue facilité par l’UE afin de réduire les retombées sur les personnes vulnérables. 

Tout en saluant les efforts déployés par l’UE pour rapprocher les points de vue et consolider l’état de droit dans les institutions kosovares, le délégué a appelé le Kosovo et la Serbie à s’abstenir de déclarations provocatrices et d’actions unilatérales, qui pourraient conduire à un conflit inutile. Il les a aussi exhortées à prendre des mesures pour réduire les tensions et instaurer la confiance, et à participer à nouveau activement aux négociations dirigées par l’UE.  Enfin, il s’est prononcé pour une modification du mandat de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK), étant donné que la Force internationale de sécurité au Kosovo (KFOR) et la mission « état de droit » menée par l’UE au Kosovo (EULEX) exécutent actuellement certaines des missions de la MINUK. 

Le représentant de l’Équateur a réaffirmé l’importance d’un dialogue constructif et de bonne foi entre Pristina et Belgrade afin d’aborder les questions politiques sensibles affectant les différentes communautés. Devant la fragilité de la situation sécuritaire dans le nord du Kosovo, il a réitéré sa condamnation de tout acte de violence susceptible de mettre en péril la paix et la sécurité dans la région, ainsi que les progrès réalisés jusqu’à présent.  Le délégué a encore demandé que soient prises en compte les préoccupations légitimes concernant la réglementation des transactions en espèces et son impact sur les droits économiques et sociaux des communautés « non majoritaires ».  L’intégrité des installations de l’ONU doit être pleinement respectée, a-t-il ajouté, et la MINUK doit disposer d’un accès sans entrave à ses locaux du nord du Kosovo. Enfin, le représentant a salué la tenue, en janvier dernier, de la première réunion du Groupe de travail sur les personnes disparues depuis 2021. 

Le représentant de la Slovénie a estimé que, face aux défis persistants, le dialogue facilité par l’UE est le seul forum établi pour la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo.  Il s’est dit préoccupé par l’absence de progrès dans ce cadre, alors que Belgrade et Pristina doivent mettre en œuvre l’accord de Bruxelles.  La normalisation des relations entre les deux capitales doit aller de pair avec la création d’un environnement sûr, sécurisé et prospère pour les Serbes du Kosovo, a précisé le représentant.  La gestion autonome de la communauté serbe du Kosovo devrait être garantie dans le respect des besoins, des intérêts et des préoccupations des deux parties, a préconisé le délégué, qui a demandé une enquête sur l’incident de Banjska survenu en septembre dernier.  Il a ensuite salué la décision de la Cour constitutionnelle du Kosovo d’accorder à l’Église orthodoxe serbe les terres entourant le monastère de Visoki Dečani.  Le représentant a regretté que les déclarations de la Serbie et du Kosovo au Conseil ne les aident pas à se rapprocher alors qu’ils doivent coexister, faire du Kosovo un foyer pour les deux communautés et mettre en œuvre les accords conclus dans le cadre du dialogue facilité par l’UE. 

Le représentant de la Fédération de Russie a noté qu’il y a exactement 25 ans commençait « l’agression de l’OTAN contre la Yougoslavie », dont les conséquences continuent d’avoir un impact direct sur la situation dans les Balkans.  L’ingérence de l’OTAN dans les affaires d’un État souverain a donné lieu à 78 jours de bombardements, dans ce qui est une violation flagrante de la Charte des Nations Unies, de l’Acte final d’Helsinki et du droit international humanitaire.  L’autorité du Conseil de sécurité, qui n’a jamais approuvé l’action de l’OTAN, a été sapée.  Le représentant a estimé que ce tournant dans l’histoire mondiale a ravivé l’esprit de confrontation dans les relations internationales et les manœuvres des pays occidentaux pour éviter une réunion sur ce sujet ne visaient qu’àglisser sous le tapis les crimes de ces années-là et à cacher les véritables intentions envers Belgrade et le peuple serbe.  Cette situation s’inscrit dans la droite ligne des pressions exercées par les États-Unis et l’Union européenne (UE) sur la Serbie, « l’un des rares États européens qui n’hésite pas à mener une politique indépendante et à défendre ses propres intérêts ».

Il devient de plus en plus difficile pour « l’Occident collectif » de dissimuler la violence systémique à motivation ethnique perpétrée par les autorités provisoires à Pristina, a poursuivi le représentant.  Le « soi-disant Premier Ministre » Albin Kurti cherche à provoquer un exode massif de la population non albanaise et à empêcher le retour des réfugiés issus des minorités nationales. Pristina a clairement indiqué son intention de saboter le dialogue avec Belgrade jusqu’à ce que la Serbie reconnaisse le « quasi-État du Kosovo ».  Cette tactique est pleinement soutenue par les États-Unis et l’UE, a accusé le représentant, ajoutant que les Serbes sont en outre invités à devenir garants de l’intégration des membres des « tribus kosovares » dans le système de gouvernance de Pristina.  Constatant l’absence de progrès dans la création de l’association/communauté des municipalités à majorité serbe, il a accusé les pays occidentaux d’avoir adapté le projet de charte aux besoins des Kosovars, en violation des obligations découlant de l’accord de Bruxelles. 

Les forces spéciales de la police albanaise de souche sont présentes dans le nord du Kosovo peuplé de Serbes et des maires albanais « fictifs » ont usurpé le pouvoir après les « pseudo-élections » d’avril 2023 auxquelles les Serbes ont refusé de participer, a-t-il dénoncé. De plus, le recensement de la population, initié en avril, comprend un questionnaire séparé sur les dégâts subis par les citoyens pendant le conflit.  Or, les données s’arrêtent au mois de juin 1999, soit après le retrait de l’armée et de la police serbes du Kosovo.  Les pertes humaines et matérielles de la population non albanaise ne sont pas incluses dans les statistiques générales, s’est encore indigné le représentant, avant d’accuser M. Kurti et son régime de priver délibérément des dizaines de milliers de personnes de leurs moyens de subsistance et de mener une véritable politique de nettoyage ethnique, sans oublier les attaques contre des sites de l’Église orthodoxe serbe et « l’albanisation » du patrimoine spirituel serbe. 

Contrairement à ce que prévoyait la résolution 1244 (1999) du Conseil, les membres de l’OTAN injectent des armes au Kosovo et l’aident à créer sa propre armée mais le rapport du Secrétaire général ne dit rien de ces faits scandaleux, ni des conséquences humanitaires du blocus commercial et de l’interdiction du dinar serbe.  Pristina continue de considérer l’indépendance du Kosovo comme une étape sur la voie de l’unification avec l’Albanie et plutôt que d’être condamnés, les Kosovars peuvent circuler sans visa dans l’espace Schengen et adhérer au Conseil de l’Europe.  Si les actes des Kosovars et de leurs protecteurs occidentaux ne sont pas stoppés, si nous ne les obligeons pas à respecter le droit international et à rechercher des compromis avec Belgrade, les conflits qui couvent depuis plusieurs décennies dans les Balkans pourraient entrer dans une « phase brûlante », a mis en garde le représentant.  Tous les États Membres doivent se montrer responsables et éviter de cautionner une telle situation, a-t-il conclu. 

Le représentant du Mozambique s’est déclaré préoccupé par l’escalade des tensions entre la Serbie et le Kosovo au cours de la période considérée, ainsi que par la fragilité de la situation sécuritaire dans le nord du Kosovo qui risque de dégénérer en un conflit armé plus large.  Des efforts internationaux soutenus sont nécessaires pour désamorcer le conflit et promouvoir la stabilité régionale, a-t-il argué, en appelant à instaurer un climat de confiance et de dialogue entre les parties, à respecter l’état de droit et à faire en sorte que les auteurs de violations rendent compte de leurs actes.  Le représentant a donc appelé toutes les parties prenantes nationales, régionales et internationales à faire preuve de prudence et de prévoyance dans leurs décisions afin de préserver les progrès durement acquis sur la voie de la paix et de la réconciliation au Kosovo.

À la lumière des événements récents, il a exhorté les dirigeants de la Serbie et du Kosovo à promouvoir activement la réconciliation entre leurs communautés respectives et à s’abstenir de toute action susceptible d’inciter à la violence ou d’exacerber les tensions.  L’instauration d’une paix durable requiert l’engagement, l’inclusion et la tolérance de tous les segments de la société, sur la base des principes de respect mutuel, de justice et de dialogue constructif, a fait valoir le délégué, pour lequel la réconciliation est un effort collectif qui nécessite une contribution égale de toutes les parties prenantes nationales, y compris les dirigeants politiques, les communautés ethniques, les jeunes, les femmes et les acteurs de la société civile, avec le soutien des organisations internationales. À cet égard, il a réitéré le soutien indéfectible de son pays à la MINUK, en estimant qu’elle doit accorder la priorité à la promotion de la sécurité, de la stabilité et du respect des droits de l’homme au Kosovo et dans l’ensemble de la région.

Le représentant du Japon a salué l’évolution positive du Kosovo, fondée sur l’état de droit, depuis son indépendance ainsi que la relative stabilité acquise dans la région, tout en exprimant son inquiétude quant à la situation sur le terrain, marquée par plusieurs incidents négatifs.  Il a ainsi souhaité que l’attaque de Banjska, en septembre dernier, fasse l’objet d’une enquête approfondie et impartiale, et que les auteurs soient tenus pour responsables.  Il a également souligné l’importance d’une communication complète et transparente et d’un dialogue continu entre les parties concernant les politiques ayant un impact significatif sur la stabilité de la région et sur la vie quotidienne des populations, notamment les mesures liées à la monnaie.

« Toute action unilatérale susceptible de conduire à une nouvelle escalade doit être évitée », a-t-il exhorté, avant de demander aux deux parties de s’engager davantage dans le dialogue Belgrade-Pristina facilité par l’Union européenne (UE).  Se disant convaincu que l’adhésion des Balkans occidentaux à l’UE contribuera à assurer la stabilité et la prospérité dans la région, le représentant a rappelé que son pays avait lancé en 2018 une initiative destinée à promouvoir la coopération régionale.  Il enfin estimé que, compte tenu de l’évolution du Kosovo depuis 25 ans, le rôle de la MINUK devrait être revu en conséquence. 

Le représentant du Royaume-Uni a rappelé qu’il est un partisan de longue date de la souveraineté et l’indépendance du Kosovo.  L’absence d’une normalisation globale et d’un accord concluant entre le Kosovo et la Serbie continue d’avoir des effets négatifs et des implications dans toute la région, a-t-il déploré.  Il a encouragé les deux parties à s’engager de manière constructive dans le dialogue facilité par l’UE, et à s’acquitter de leurs obligations respectives, notamment en établissant une association/communauté des municipalités à majorité serbe.  Pour le Royaume-Uni, cela doit s’accompagner d’un engagement à construire un environnement propice à de nouveaux progrès du dialogue.  Cela signifie, a expliqué le représentant, que le Kosovo devrait exercer ses pouvoirs souverains d’une manière qui reflète sa multiethnicité, démontrant suffisamment de respect pour les communautés non majoritaires du Kosovo. Le représentant a également appelé à identifier des solutions techniques aux défis autour de la mise en œuvre de la nouvelle réglementation sur les devises.  Il a en outre salué le travail de la Représentante spéciale, ainsi que le personnel de la Mission, qui a contribué au travail de la MINUK au cours des 25 dernières années.  Pour lui, c’est le bon moment pour le Conseil de revoir le rôle de la MINUK et ses responsabilités.  Cela garantira, a ajouté le délégué, qu’elle puisse continuer à soutenir efficacement la sécurité, la stabilité et les droits humains au Kosovo d’une manière correspondant aux réalités de 2024.

La représentante de Malte a salué les mesures positives prises ces derniers mois par la Serbie et le Kosovo, dont la résolution des problèmes liés aux plaques d’immatriculation et à la propriété du monastère de Visoki Decani. Elle s’est cependant inquiétée des tensions élevées et des nombreux actes hostiles.  Depuis les attaques terroristes commis contre la police du Kosovo, en septembre dernier, la situation est devenue préoccupante, a-t-elle noté, en pointant un risque accru d’escalade.  La représentante a donc appelé les parties à prendre des mesures concrètes pour assurer la désescalade et la sécurité de la population.  À ses yeux, le dialogue demeure le seul outil dont disposent les parties pour parvenir à une paix durable. 

Tout en prenant acte du référendum local organisé hier sur la destitution des maires des municipalités du nord du Kosovo, la déléguée a regretté les conditions qui ont conduit une nouvelle fois à un boycott.  Malgré l’absence de progrès à cet égard, elle a engagé les parties à respecter leurs obligations découlant de l’accord sur la voie de la normalisation des relations entre la Serbie et le Kosovo.  Malte continue de souligner l’importance du dialogue facilité par l’Union européenne en tant que forum permettant de discuter des questions qui affectent l’ensemble de la population du territoire, telles que la décision d’interdire les transactions en dinar serbe et son impact négatif sur les minorités serbes. 

Le représentant des États-Unis a répondu à la Fédération de Russie et déclaré que l’opération de l’OTAN en 1999 était nécessaire pour mettre un terme à la politique de nettoyage ethnique du régime de Milošević.  Les membres du Conseil se sont opposés à la tenue d’une réunion sur le sujet, d’où la dissatisfaction de la Fédération de Russie, a taclé le représentant.

Dans une deuxième reprise de parole, le Président de la Serbie, a argué que l’intervention de l’OTAN au Kosovo en 1999 était illégitime au motif qu’elle n’était fondée sur aucune résolution du Conseil de sécurité.  Il a regretté que des représentants n’expriment pas leurs préoccupations lorsque ce sont des Serbes qui sont tués.  Sur les processus électoraux qui ont eu lieu hier, il a dénoncé des fraudes: des personnes fictives, notamment des Albanais, ont été ajoutées à la liste électorale, a-t-il avancé.  Le Président a remercié les pays qui respectent la résolution 1244 (1999). 

Réagissant aux propos tenus par le Président de la Serbie, Mme OSMANI- SADRIU du Kosovo a réfuté les faits avancés par M. Vučić, « faux » à son avis, avant d’inviter les membres du Conseil à venir au Kosovo pour y voir de leurs propres yeux ce qui s’y passe et constater les progrès accomplis.  Contrairement à ce qui a été dit par la Serbie et la Russie, elle a dit n’avoir pas parlé du passé dans son intervention mais bien du Kosovo d’aujourd’hui qui est aussi défini par le passé et le manque de justice rendue. Revenant sur sa revendication de justice après les horreurs du conflit, elle s’est adressée à M. Vučić, « qui a soutenu le régime de Milošević et chanté ses louanges », pour lui demander s’il n’avait toujours pas de remords pour les plus de 150 000 civils morts et s’il n’avait toujours pas l’intention de présenter des excuses aux victimes.

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