Conseil de sécurité: après deux ans de guerre en Ukraine, les voix convergent pour appeler la Russie à respecter la Charte et le droit international
À la demande de l’Ukraine, le Conseil de sécurité s’est réuni, cet après-midi, au niveau ministériel pour marquer le deuxième anniversaire de l’invasion à grande échelle du pays par la Russie. En présence des 15 membres et d’une dizaine de dignitaires européens invités, le Secrétaire général a appelé de ses vœux une paix juste, fondée sur le respect de la Charte des Nations Unies, du droit international et des résolutions de l’Assemblée générale, non sans qualifier l’agression russe de « dangereux précédent ». Une position partagée par une large majorité des délégations, à l’exception de la Russie, qui a assuré n’avoir jamais refusé de négocier, contrairement au « régime de Kiev ».
Rappelant que cette semaine marque également le dixième anniversaire de la tentative d’annexion illégale par la Russie de la République autonome de Crimée et de la ville de Sébastopol, M. António Guterres a constaté que le conflit en Ukraine reste une « plaie ouverte au cœur de l’Europe ». Alors que s’opère une « transition mouvementée vers un monde multipolaire encore très incertain », il a jugé qu’il n’y a pas lieu de régler les différends hérités de l’histoire par la guerre. À cet égard, il a rendu hommage aux dirigeants africains de la période postindépendance, qui ont compris qu’essayer de modifier les frontières ouvrirait une « boîte de Pandore qui entraînerait une effusion de sang et nourrirait toujours plus d’animosité ».
Face à la « brutalité généralisée » à l’œuvre en Ukraine, le chef de l’ONU a exhorté à cesser les attaques contre le personnel humanitaire et les infrastructures civiles, en appelant à financer intégralement l’appel de 3,1 milliards de dollars destiné à mettre en œuvre le plan de réponse humanitaire de l’ONU pour l’Ukraine. Il a d’autre part assuré que l’ONU continuera de tout faire pour faciliter la navigation en mer Noire afin que les denrées alimentaires et les engrais ukrainiens et russes puissent atteindre le marché international.
À l’instar des États-Unis, bon nombre des délégations ont souligné « l’absurdité de cette guerre », qui entre dans sa troisième année avec son cortège de morts et de destructions. « Pourquoi? » a demandé le chef de la diplomatie du Royaume-Uni, avant de dénoncer le ridicule des explications avancées par la Russie pour justifier son agression. « Combattez-vous les voyous de l’OTAN ou des nazis? » Le seul acteur à se comporter comme un nazi est « le régime de Putin », a-t-il martelé.
Considérant lui aussi que la Russie porte seule la responsabilité de cette guerre, son homologue de la France a observé que Moscou viole les résolutions du Conseil en recourant à des drones achetés à l’Iran et à des missiles fournis par la République populaire démocratique de Corée (RPDC). Une accusation reprise par le Ministre d’État aux affaires étrangères du Japon, qui a jugé inacceptables l’acquisition par la Russie de missiles balistiques nord-coréens et leur utilisation sur le théâtre ukrainien. S’il s’avère que la RPDC reçoit en retour des technologies militaires avancées ou des livraisons de pétrole dépassant les limites fixées par les résolutions du Conseil, cela aurait des conséquences sur la capacité de ce pays à menacer la sécurité dans la péninsule coréenne et au-delà, a mis en garde le Ministre des affaires étrangères de la République de Corée.
« Nous n’épargnerons aucun effort pour que les responsables de la liste douloureusement longue d’atrocités et d’autres crimes internationaux soient pleinement tenus de rendre des comptes », a averti la Vice-Première Ministre de la Slovénie, appuyée par son homologue du Luxembourg. Saluant le travail mené à cette fin par la Cour pénale internationale (CPI), il a exhorté la Russie à se conformer à l’ordonnance de la Cour internationale de Justice (CIJ) du 16 mars 2022, qui lui enjoint de suspendre immédiatement ses opérations militaires en Ukraine. De même, Malte a réitéré son soutien aux processus d’établissement des responsabilités, appelant à ce que les responsables rendent des comptes.
Si la plupart des pays se sont engagés à soutenir l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra, plusieurs ont aussi plaidé pour une reprise du dialogue. Appuyant l’appel de M. Guterres à donner une chance à la paix, l’Équateur a estimé qu’il est temps de revenir à la table des négociations. Un dialogue responsable et authentique est le seul moyen viable de résoudre ce conflit, a abondé le Mozambique, tandis le Ministre des affaires étrangères de la Macédoine du Nord plaidait pour une solution diplomatique afin d’éviter de « nouvelles escalades ».
« La paix est dans l’intérêt de toutes les parties », a souligné la Chine, tout en insistant sur le caractère indivisible de la sécurité collective et, par voie de conséquence, sur l’importance de prendre en compte les préoccupations sécuritaires de chaque pays. Face aux répercussions mondiales de cette guerre, la Sierra Leone a souhaité une solution pacifique qui tienne compte des préoccupations légitimes de chaque partie.
La Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne a toutefois rappelé à ceux qui veulent « négocier avec Putin » que la volonté du Kremlin est de faire renoncer un État souverain à son droit d’exister. « Où en serions-nous si ce principe prévalait? » s’est-elle interrogée, estimant que céder à cela signifierait « la fin de la Charte des Nations Unies ». Si nous échouons, l’ordre fondé sur des règles s’effondrera, a renchéri son homologue de la Lituanie, qui s’exprimait aussi au nom de la République tchèque, de l’Estonie et de la Lettonie. La Russie est la « source du problème », a résumé le chef de la diplomatie ukrainienne en présentant l’invasion à grande échelle de l’Ukraine et de la Crimée il y a 10 ans comme le résultat de l’impunité découlant de sa présence injustifiée et illégale au Conseil de sécurité.
Après avoir averti, à l’occasion d’une motion d’ordre préalable, qu’il n’écouterait pas les « déclarations rituelles » des représentants des capitales européennes apportant leur soutien inébranlable au « régime de Kiev », le délégué de la Fédération de Russie s’est livré à un long réquisitoire contre la politique occidentale consistant à injecter des armes en Ukraine, au profit du complexe militaro-industriel américain. Accusant l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni de n’avoir jamais pris au sérieux les accords de Minsk, il a affirmé que, fin 2021, Moscou a présenté des garanties de sécurité à l’OTAN, qui les a rejetées « avec arrogance ». L’Occident ne nous a tout simplement pas laissé le choix, a-t-il conclu, jurant que son pays « n’a jamais refusé de négocier alors que le régime de Kiev se l’est interdit ».
MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ DE L’UKRAINE
Motion d’ordre
Le représentant de la Fédération de Russie a constaté que la salle du Conseil de sécurité est bondée et que la liste des orateurs regorge de personnes se faisant appeler ministres des affaires étrangères de pays de l’Union européenne (UE). Or, a-t-il fait valoir, à de rares exceptions près, il n’existe pas au sein de l’UE de politique étrangère indépendante spécifique à un pays. Il n’y a donc pas de ministres des affaires étrangères, mais seulement des fonctionnaires se faisant passer pour tels, a-t-il analysé, affirmant que toute la politique étrangère de l’UE est entre les mains de Bruxelles, laquelle est à son tour entre les mains de Washington. De fait, s’est interrogé le représentant, quelle est la valeur ajoutée de ces déclarations qui ne sont que du « copier-coller », si ne n’est la possibilité de s’afficher sur les écrans de télévision de leur pays en exprimant leur soutien « inconditionnel et inébranlable » à Kiev.
Il a dès lors estimé que le représentant de l’UE auprès de l’ONU à New York aurait pu parler au nom de tous ces ministres, à qui il a demandé de parler des armes qu’ils fournissent au « régime criminel de Kiev » et avec lesquelles celui-ci cible la population civile de villes russes. Il a également souhaité que le représentant du Royaume-Uni explique comment son ancien Premier Ministre Boris Johnson avait dissuadé les autorités de Kiev de conclure un accord de paix avec la Russie, déjà paraphé en avril 2022. S’étonnant par ailleurs de l’absence du Secrétaire général lors des récentes discussions du Conseil sur Gaza, il a rappelé qu’aucun pays de l’UE, « ni même de l’Occident en général », n’a jamais pris l’initiative de convoquer une seule réunion sur cette situation, qui est le fruit des violations flagrantes du droit international humanitaire par Israël. Cela témoigne selon lui de l’hypocrisie et du « deux poids, deux mesures » des Occidentaux. Il ajouté qu’il n’écouterait pas les « déclarations rituelles » des représentants des capitales européennes. « Ils n’ont qu’à se raconter tout cela entre eux. »
Déclarations
M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a constaté que, deux ans après le début de l’invasion à grande échelle menée par la Russie et 10 ans après sa tentative d’annexion illégale de la République autonome de Crimée et de la ville de Sébastopol, la guerre en Ukraine reste une « plaie ouverte au cœur de l’Europe ». Appelant de ses vœux une paix juste, fondée sur la Charte des Nations Unies, le droit international et les résolutions de l’Assemblée générale, il a rappelé que les différends internationaux doivent être réglés par des moyens pacifiques et que tous les États doivent s’abstenir de recourir à la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout autre État.
Alors que s’opère une « transition mouvementée vers un monde multipolaire encore très incertain », le chef de l’ONU a estimé que, si de nombreuses communautés sont divisées par les frontières héritées de l’histoire, il n’y a pas lieu de régler ces divisions par la guerre. À cet égard, il a rendu hommage aux dirigeants africains de la période postindépendance, qui ont compris qu’essayer de modifier les frontières ouvrirait une « boîte de Pandore qui entraînerait une effusion de sang et nourrirait toujours plus d’animosité ». Plutôt que de s’entendre sur le passé, mieux vaudrait s’accorder sur l’avenir, le droit international et les principes énoncés dans la Charte, notamment le respect de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique des États, a-t-il plaidé, qualifiant l’invasion russe de l’Ukraine de « dangereux précédent ».
M. Guterres a ensuite évoqué les souffrances du peuple ukrainien, rappelant que plus de 10 500 civils, hommes, femmes et enfants, ont été tués –un bilan vraisemblablement sous-évalué– et que les dégâts et la destruction d’hôpitaux, d’écoles, d’établissements de santé et d’infrastructures civiles sont fréquents et s’intensifient. Dénonçant une « brutalité généralisée », il a relevé que la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine a fait état de civils et de prisonniers torturés, ainsi que de plus de 200 cas de violences sexuelles, principalement imputables aux forces russes. Tous les auteurs doivent être tenus responsables, a-t-il dit, avant d’appeler au retour dans leurs familles de tous les enfants déportés. Il a également souligné que plus de 14,5 millions de personnes à l’intérieur du pays ont besoin d’une aide humanitaire, mais que l’accès à environ 1,5 million d’entre elles reste extrêmement restreint. Cela doit changer, a-t-il martelé, souhaitant que les attaques contre le personnel humanitaire et les infrastructures civiles cessent et que les donateurs financent intégralement l’appel de 3,1 milliards de dollars destiné à mettre en œuvre le plan de réponse humanitaire de l’ONU pour l’Ukraine.
La guerre fait également du mal à la population russe, a poursuivi le Secrétaire général, pour qui le risque que le conflit s’aggrave et se répande est bien réel. D’ores et déjà, cette guerre a entraîné une flambée des prix alimentaires, des chocs économiques et une crise mondiale du coût de la vie, frappant de plein fouet les pays en développement qui sont encore en train de se relever de la COVID-19, s’est-il indigné, ajoutant que la possibilité d’un accident nucléaire « glace le sang du monde entier ». Après avoir enjoint les deux parties au conflit à tout faire pour empêcher cela, avec le concours de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), M. Guterres a assuré que l’ONU continuera à pousser en faveur de la liberté et de la sûreté de la navigation en mer Noire, afin que les denrées alimentaires et les engrais ukrainiens et russes, dont le monde a tant besoin, puissent atteindre le marché international. En conclusion, il a jugé que réaffirmer l’attachement à la Charte et faire preuve d’un respect renouvelé pour le droit international est la voie de la paix et de la sécurité, en Ukraine et dans le monde entier.
Mme TANJA FAJON, Vice-Première Ministre et Ministre des affaires étrangères et européennes de la Slovénie, a rappelé qu’outre les deux années de mort et de destruction pour l’Ukraine et son peuple, cette semaine marque aussi le dixième anniversaire de l’annexion illégale de la Crimée. Malgré le risque de « répétition », elle a dit profiter du fait que son pays siège depuis le 1er janvier dernier au Conseil de sécurité pour condamner « une fois de plus » l’agression russe commise en violation flagrante de la Charte des Nations Unies et de l’Acte d’Helsinki sur l’inviolabilité des frontières en Europe. La Ministre a aussi exprimé le plein soutien de la Slovénie à l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine, avant de confier que son pays a été « pris au dépourvu » par cette guerre qu’il n’avait pas vu venir.
« Nous avons refusé de croire que cela allait arriver, qu’une guerre majeure à nos portes était possible, violant de manière flagrante les frontières d’un État souverain, déstabilisant toute la région et modifiant le paysage géopolitique mondial. » Elle a cependant assuré que la Slovénie n’était pas fatiguée de dénoncer cette agression et d’exiger qu’elle cesse. « Nous n’épargnerons aucun effort pour que les responsables de la liste douloureusement longue d’atrocités et d’autres crimes internationaux soient pleinement tenus de rendre des comptes », a-t-elle dit en conclusion, saluant l’Ukraine pour son courage et affirmant croire en la possibilité d’une paix juste et durable.
M. STÉPHANE SÉJOURNÉ, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a qualifié la guerre d’agression à grande échelle menée par la Russie contre l’Ukraine d’injuste, d’injustifiable et d’illégale. Notant que cela fait 10 ans que la Russie cherche à envahir son voisin et à lui prendre son territoire, il a déclaré que ni les mauvais prétextes déployés par la Russie, ni la propagande et la désinformation massive sur les réseaux sociaux ne résistent à ce constat clair et sans appel: la Russie continue d’agresser son voisin. Après avoir dit que la Russie porte seule la responsabilité de cette guerre, il a fait remarquer qu’elle pourrait choisir d’y mettre un terme en retirant ses troupes du territoire ukrainien, mais qu’« elle ne le fait pas ». Cette guerre est illégale, a tranché M. Séjourné en précisant qu’elle est en tout point contraire à la Charte des Nations Unies et aux règles et aux principes qui fondent l’ordre international, un ordre dont le Conseil doit rester le garant comme du respect de la souveraineté, de l’indépendance, de l’intégrité territoriale des États. « Il ne faut pas y renoncer. »
Le Ministre a relevé que la Russie viole les résolutions du Conseil, notamment en utilisant des drones achetés à l’Iran et des missiles fournis par la RPDC et en occupant illégalement la centrale nucléaire de Zaporizhzhia. Ses troupes violent massivement le droit international humanitaire et les droits de l’homme, a-t-il renchéri en condamnant les massacres de civils, les viols et la torture utilisés comme armes de guerre, ainsi que les déportations d’enfants ukrainiens. Ces crimes ne doivent pas rester impunis, a-t-il exigé en rappelant que c’est le sens des deux mandats d’arrêt émis par la Cour pénale internationale (CPI) l’an dernier. Pour sa part, la France continuera de soutenir les juridictions ukrainiennes et internationales en ce sens et maintiendra sa solidarité aussi longtemps qu’il le faudra avec l’Ukraine et son peuple, a assuré le Ministre. Il a tenu à souligner que l’Ukraine exerce sa légitime défense et, ce faisant, propose la paix. Il a conclu en invitant le Conseil à souhaiter la victoire de l’Ukraine, qui serait une victoire de la Charte.
M. DAVID CAMERON, Secrétaire d’État pour le Commonwealth, les affaires étrangères et le développement du Royaume-Uni, a indiqué qu’il avait une question très simple à poser au Président Putin. « Pourquoi? » Il s’est demandé comment la Russie pouvait encore s’acquitter de ses responsabilités de membre permanent du Conseil, avant de dénoncer le ridicule des explications avancées par la Russie. « Combattez-vous les voyous de l’OTAN ou des nazis? » Le seul acteur à se comporter comme des nazis est « le régime de Putin », a-t-il avancé en relevant que « Putin pense qu’il peut s’emparer de territoires, faire usage de la force et bâtir un empire ».
M. Cameron a ensuite salué le courage du Président ukrainien et la persévérance du peuple ukrainien. « Ils ne fléchiront pas. » Le Kremlin s’attendait à ce que les Ukrainiens se rendent mais ils se sont élevés pour défendre leur liberté, a-t-il dit. Il a détaillé le soutien apporté par le Royaume-Uni, en rappelant qu’il a été le premier pays à signer un pacte de sécurité avec l’Ukraine. Le Royaume-Uni ne fléchira pas dans son soutien, a-t-il assuré. Enfin, il a salué l’extraordinaire courage d’Alexeï Navalny, avant d’appeler le monde à se lever contre le Président russe, « parce que ses actions en Ukraine sont dangereuses ». « Rien ne devrait nous importer davantage que de voir Putin échouer. »
M. IGNAZIO CASSIS, Conseiller fédéral et Chef du Département des affaires étrangères de la Suisse, a regretté que le Conseil de sécurité n’ait pas pleinement assumé sa responsabilité dans le maintien de la paix et de la sécurité pour l’Ukraine et son peuple. Les pertes humaines se chiffrent par milliers, les personnes déplacées par millions et les familles déchirées sont innombrables, a-t-elle constaté. Quant aux répercussions en Europe et dans le monde, elles sont évidentes sur les plans alimentaire, énergétique et sécuritaire. Toutefois, nous ne devons pas céder au pessimisme mais agir. Ainsi, en janvier dernier, en marge du Forum économique mondial de Davos et à la demande de l’Ukraine, a informé M. Cassis, la Suisse a exprimé son engagement à organiser une « conférence de haut niveau sur la paix en Ukraine ».
La mission est complexe et sinueuse mais la Suisse travaille sans relâche pour initier une dynamique à la fois pragmatique et inclusive, a ajouté le Conseiller fédéral, convaincu de l’importance d’écouter toutes les parties et de comprendre les grammaires respectives de la paix des uns et des autres. Il s’est dit également persuadé de la nécessité d’éviter les pièges de la rhétorique qui alimentent les oppositions. « Unissons nos forces pour démarrer un processus avant l’été: la Suisse est prête à y mettre toute son énergie », a-t-il insisté. Même si la demande vient d’une seule partie, l’Ukraine, et alors que mon pays condamne l’agression militaire russe, c’est aujourd’hui notre effort collectif qui est demandé. Une conférence de haut niveau sur la paix en Ukraine est un premier pas: insuffisant à lui seul, mais indispensable pour commencer. Il s’agit de commencer avec pragmatisme à trouver le dénominateur commun de nos nations, et réalisme, pour trouver le moyen d’embarquer à terme l’Ukraine et la Russie sur ce chemin.
M. CHO TAE-YUL, Ministre des affaires étrangères de la République de Corée, a jugé « presque surréaliste » de se trouver dans la salle du Conseil de sécurité pour évoquer l’agression illégale de l’un de ses membres permanents. Il a regretté que, deux ans après l’entrée des chars russes en Ukraine, en violation de la Charte des Nations Unies, nous ne voyions aucun signe de ralentissement des actions illégales de la Russie mais plutôt un « désastre humanitaire ». Notant que l’impact de cette guerre s’est répercuté dans le monde entier, il a appelé au respect par toutes les parties des normes et obligations internationales, notamment du droit international humanitaire. Le Ministre a ajouté qu’en tant que nation connaissant les conséquences atroces des conflits armés, la République de Corée éprouve une profonde empathie à l’égard du peuple ukrainien. C’est pourquoi, a-t-il dit, dans le cadre de son initiative de paix et de solidarité en Ukraine, Séoul a fourni 140 millions de dollars d’aide humanitaire à ce pays, notamment du matériel de déminage et des véhicules médicaux d’urgence. À partir de cette année, nous fournirons une aide globale de 2,3 milliards de dollars répartie sur plusieurs années, a-t-il précisé, avant d’exprimer son trouble face à la coopération militaire naissante entre la Russie et la République populaire démocratique de Corée (RPDC).
Des munitions et des missiles nord-coréens ont été aperçus en Ukraine, ce qui non seulement aggrave les souffrances humaines, mais risque également d’aggraver et de prolonger la guerre en Ukraine, a mis en garde le Ministre. S’il s’avère que la RPDC reçoit en retour des technologies militaires avancées ou des livraisons de pétrole dépassant les limites fixées par les résolutions du Conseil de sécurité, cela aurait des conséquences sur la capacité de la RPDC à menacer la sécurité dans la péninsule coréenne et au-delà, a-t-il observé, estimant que ces deux éléments constituent des violations sans équivoque de plusieurs résolutions du Conseil et sapent le régime mondial de non-prolifération. Il a donc exhorté vivement la Russie et la RPDC à se conformer aux résolutions du Conseil, rappelant qu’elles ont « toutes été adoptées à l’unanimité dans cette salle ».
La représentante des États-Unis a déclaré que le monde continue d’être le témoin de la cruauté russe, deux ans après le début de la guerre. Elle a rendu hommage à Alexeï Navalny, avant de dénoncer les violations commises par les forces russes en Ukraine. La liste des violations de la Russie est interminable, a-t-elle tranché, en soulignant « l’absurdité de cette guerre ». Elle a rappelé que le peuple ukrainien n’a pas courbé l’échine et continue de se battre, malgré la volonté du Président russe. Elle a milité pour une paix juste dans le respect de la souveraineté de l’Ukraine. Si la Russie dépose les armes, alors la guerre est finie, a déclaré la déléguée, en soulignant qu’il n’y a ici « qu’un seul agresseur ».
M. TSUJI KIYOTO, Ministre d’État aux affaires étrangères du Japon, a condamné dans les termes les plus fermes l’agression lancée voilà deux dans par la Russie contre l’Ukraine, estimant que cette violation flagrante du droit international, notamment de la Charte des Nations Unies, ne peut être justifiée. Dans le cadre de cette guerre, l’acquisition par la Russie de missiles balistiques auprès de la République populaire démocratique de Corée et leur utilisation contre l’Ukraine sont absolument inacceptables, a-t-il déclaré, avant de rappeler que tout transfert d’armes ou d’équipements et de technologies connexes entre ces deux pays constitue une violation flagrante des résolutions du Conseil de sécurité. Le Ministre s’est par ailleurs alarmé d’éventuels transferts de technologies liées aux missiles nucléaires et balistiques vers la République populaire démocratique de Corée.
Revenant au conflit en Ukraine, le Ministre a salué les efforts menés pour rechercher la paix, tout en jugeant inapproprié d’assimiler l’agresseur et la victime et d’exiger des efforts diplomatiques des deux côtés, « comme si les deux parties étaient en faute ». À cet égard, a-t-il insisté, le Japon soutient les efforts du Président Zelenskyy pour mettre en œuvre sa formule de paix. Après avoir rappelé son déplacement à Kyïv en novembre dernier et la visite à Tokyo, le 19 février, du Premier Ministre ukrainien pour la Conférence Japon-Ukraine sur la promotion de la croissance économique et de la reconstruction, il a indiqué que les secteurs public et privé du Japon allaient soutenir davantage l’Ukraine, en tenant compte de ses besoins. Enfin, exhortant une fois de plus la Russie à se retirer immédiatement et sans condition de tous les territoires internationalement reconnus de l’Ukraine, il a assuré que son pays et ses alliés resteraient aux côtés de l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra.
La représentante de Malte a déclaré que cette guerre constitue un affront à la Charte des Nations Unies, aux travaux du Conseil de sécurité et à l’architecture de la paix et de la sécurité internationales. En dépit de l’horreur et du traumatisme que beaucoup ont vécu au cours des 24 derniers mois, des millions d’Ukrainiennes jouent un rôle crucial dans l’acheminement de l’aide humanitaire, a salué la représentante, en réitérant son soutien aux processus d’établissement des responsabilités en cours pour les crimes commis en Ukraine, y compris la Cour internationale de Justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CIJ). Les responsables de ces crimes doivent rendre des comptes. En mettant fin à l’Initiative céréalière de la mer Noire, la Russie a pris en otage la population mondiale en bloquant les exportations de céréales ukrainiennes. Elle vole des céréales dans les territoires ukrainiens occupés et détruit les installations ukrainiennes, a accusé la représentante. L’Union européenne continuera d’aider l’Ukraine à exporter 67 millions de tonnes de céréales, d’oléagineux et de produits connexes. La Russie doit cesser immédiatement ses hostilités et retirer sans condition ses forces et ses équipements militaires de l’ensemble du territoire ukrainien, a ajouté en conclusion la déléguée.
Pour le représentant de la Fédération de Russie, la réunion d’aujourd’hui a un air de déjà-vu. Il y a un an, il était de bon ton pour le bloc occidental de vanter ses initiatives de « pseudo-paix », qui se résumaient essentiellement à l’oxymore orwellien sournois « la guerre, c’est la paix ». L’Occident endoctrinait ouvertement Zelenskyy, « qui manquait manifestement de pensée stratégique », en lui donnant l’illusion dangereuse et absurde qu’avec le soutien de ses alliés, il serait en mesure de vaincre la Russie alors que l’UE lui fournissait des armes. Depuis, l’Ukraine a totalement échoué dans sa contre-offensive, mais l’Occident continue à « injecter des armes » dans le régime de Kiev, l’encourageant à sacrifier de plus en plus de vies ukrainiennes. Le représentant a ironisé sur le fait qu’aux États-Unis, ce conflit est désormais qualifié de projet commercial rentable pour le complexe militaro-industriel. S’agissant du processus de discussion d’une « pseudo-formule de paix », il a noté que les pays du Sud et de l’Est y ont été entraînés, que ce soit à Copenhague ou à Davos, en utilisant toutes sortes d’astuces, afin de faire croire à un « large soutien international », mais, a-t-il relevé, il est inutile de discuter de quoi que ce soit sans la Russie.
L’Occident n’est pas du tout intéressé par l’aide à l’Ukraine, a affirmé le délégué, en s’appuyant sur un article récent de Zanny Minton Beddows de The Economist, qui confirme que l’essence de la politique occidentale à l’égard de l’Ukraine se résume à lui donner de l’argent, comme moyen le moins coûteux pour les États-Unis de renforcer leur sécurité. Ce sont en effet les Ukrainiens qui se battent, ce sont les Ukrainiens qui se font tuer, tandis que les États-Unis et l’Europe leur fournissent des armes. Or, il est évident aujourd’hui que l’Ukraine est en train de perdre cette « guerre par procuration » des États-Unis, de l’UE et de l’OTAN contre la Russie, a-t-il assuré. Et même si « nos collègues européens » ne veulent pas l’accepter, l’Ukraine n’est pas la seule perdante de ce conflit, l’Union européenne aussi. Le délégué a fait remarquer que le conflit en Ukraine exacerbe en fait les problèmes migratoires des États européens et frappe de plein fouet leur secteur énergétique. Il est dommage que les Européens aient oublié que les États-Unis et la Grande-Bretagne ont toujours été les principaux bénéficiaires de tout conflit sur le territoire de l’Europe continentale, a-t-il relevé, et qu’ils ont délibérément attisé les tensions dans l’espace européen afin d’empêcher l’émergence d’un autre concurrent géopolitique – une Europe unie vivant en paix et en coopération avec son voisin, la Russie.
Revenant à l’Ukraine, il a rappelé que dès qu’elle a obtenu son indépendance officielle, elle s’est vu attribuer le rôle « peu enviable » de « tête de pont antirusse ». Évoquant le « coup d’État » raté de 2004, puis celui de 2014, tous deux fomentés par l’Occident, il a affirmé qu’après celui de Maïdan en 2014, l’arrivée au pouvoir des nationalistes et des néonazis occidentaux soutenus par les russophobes a marqué un tournant dans l’histoire récente de l’Ukraine. Ce fut le début de l’implication forcée de Kiev dans des projets risqués visant à infliger une « défaite stratégique » à la Russie, a affirmé le représentant, expliquant que c’est alors que la voie a été tracée pour violer les droits des habitants du sud-est de l’Ukraine. Une soi-disant « opération antiterroriste » brutale et inhumaine a été lancée contre ceux qui cherchaient à préserver leur identité et leurs racines historiques et culturelles, au cours de laquelle l’armée et les bataillons nationaux ont été utilisés en violation de la Constitution ukrainienne.
Pour ce qui est des accords de Minsk, le délégué a rappelé qu’il y a environ un an, le monde a entendu les confessions de Porochenko, François Hollande, Angela Merkel et Boris Johnson selon lesquelles ni la France, ni l’Allemagne, ni le Royaume-Uni n’avaient pris ces accords au sérieux, et n’avaient aucune intention de pousser les autorités ukrainiennes à les mettre en œuvre. Ils ne les utilisaient que pour gagner du temps et donner à Kiev le temps de se préparer à la guerre avec la Russie. Y voyant un véritable « mea culpa » des dirigeants de ces États, le délégué a constaté que cela n’empêche pas les représentants de ces mêmes pays de s’exprimer aujourd’hui au Conseil, « comme si de rien n’était », et de donner des leçons aux autres en invoquant l’importance du respect du droit international. Ce n’est qu’après de multiples et vaines tentatives d’obtenir de la partie ukrainienne une mise en œuvre consciencieuse et cohérente des accords de Minsk que la Russie a décidé de lancer son opération militaire spéciale pour protéger les habitants du Donbass, conformément à l’Article 51 de la Charte des Nations Unies.
Persuadé que tout conflit prend fin tôt ou tard, y compris celui en Ukraine, le représentant a estimé qu’à long terme, les conclusions que le bloc occidental tirera de ce conflit seront d’une importance fondamentale. Va-t-il imposer son prétendu ordre fondé sur des règles unilatérales au reste du monde en essayant de le diviser entre « vassaux et ennemis »? s’est-il interrogé. Ou va-t-il s’engager dans un dialogue constructif pour trouver des moyens jeter les bases d’un ordre mondial véritablement juste, où les intérêts de tous les États sont garantis? Jusqu’à présent, a-t-il regretté, l’Europe semble être frappée de « cécité stratégique », en alimentant ses propres craintes d’une supposée menace russe contre laquelle elle doit se défendre. Elle persiste à refuser à la Russie ses intérêts légitimes en matière de défense. Qualifiant cette approche de vaine et d’erronée, le représentant a fait valoir qu’un débat sur un système de sécurité euro-atlantique juste et indivisible prend de plus en plus son sens. Dans sa forme actuelle, le système ne fonctionne que dans l’intérêt des États-Unis et de leurs alliés de l’OTAN qui se sont arrogés le droit d’intervenir dans toutes les questions internationales et dans les affaires intérieures des autres États, a-t-il constaté. Leurs bases sont situées à nos frontières, en violation des accords clefs qui ont mis fin à l’ère de la guerre froide, a dénoncé le délégué, et les dirigeants occidentaux ont trompés la Russie à l’époque et veulent continuer à le faire aujourd’hui en transformant pratiquement n’importe quel coin du monde en « zone de responsabilité » de l’Alliance. Il a également tenu à rappeler que la Russie avait proposé une conversation de fond sur les garanties de sécurité dès la fin de l’année 2021 et qu’elle a présenté des propositions concrètes à l’OTAN et aux États-Unis, mais qu’elles ont été rejetées « avec arrogance ». L’Occident ne nous a tout simplement pas laissé le choix, a-t-il tranché. Dans le même temps, la Russie n’a jamais refusé de négocier alors que le régime de Kiev se l’est interdit. Il est encore possible de préserver l’Ukraine sous une forme ou une autre, a affirmé le délégué, mais pour cela, il faut que l’Ukraine soit pacifique et neutre, sans discrimination ni russophobie, et qu’elle soit un pays à partir duquel la Russie n’est pas menacée. « C’est donc à l’Occident collectif de choisir s’il nous faudra nous battre jusqu’au bout, ou à Washington, Londres et Bruxelles. »
Le représentant de la Chine a appelé à une profonde réflexion sur ce dossier. La paix doit prévaloir, a-t-il dit, en soulignant les dégâts incalculables causés par la guerre en Ukraine. « La paix est dans l’intérêt de toutes les parties », a-t-il dit. Aussi leur a-t-il demandé de promouvoir détente et désescalade, avant de saluer les efforts déployés par l’ONU à cette fin. Le délégué a rappelé que la sécurité collective est indivisible, en insistant sur l’importance de prendre en compte les préoccupations sécuritaires de chaque pays. La crise en Europe est liée à l’expansion de l’OTAN, a analysé le délégué, en exhortant l’OTAN à se débarrasser d’une mentalité héritée de la guerre froide. Il a dénoncé les sanctions imposées contre des entreprises chinoises par l’UE, les États-Unis et le Royaume-Uni au prétexte de la guerre en Ukraine. Tous les pays doivent respecter les principes de la Charte des Nations Unies et accepter un multilatéralisme véritable, en évitant tout deux poids, deux mesures, a exigé le délégué. La Chine, a-t-il ajouté, regarde le conflit de loin, et il a réclamé une solution pacifique.
Le représentant de l’Équateur a relevé que 729 jours se sont écoulés depuis le début de l’agression militaire russe contre l’Ukraine, en violation flagrante de la Charte des Nations Unies et du droit international. Au cours de ces deux années, a-t-il dit, nous avons été témoins des ravages que le conflit a infligés au peuple ukrainien, ainsi que de ses répercussions négatives au niveau mondial. Évoquant la crise humanitaire « incommensurable » provoquée par ce conflit, il a salué le travail inlassable des organisations humanitaires tout en appelant à une aide accrue qui tienne compte des besoins de reconstruction du pays. Il s’est également dit inquiet du danger que représentent les attaques à proximité d’installations nucléaires, réitérant la nécessité pour les parties de respecter les sept piliers de la sécurité nucléaire.
Le représentant a ensuite rappelé que le veto opposé par la Russie le 25 février 2022 n’avait pas réussi à empêcher l’Assemblée générale de s’exprimer avec force et d’adopter, lors de sa onzième session extraordinaire d’urgence, six résolutions qui, entre autres, réaffirment son attachement à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine, appellent à la cessation des hostilités et réitèrent l’exigence d’un retrait des forces russes. Appuyant l’appel du Secrétaire général à donner une chance à la paix, il a estimé qu’il est temps de revenir à la table des négociations et d’explorer toutes les possibilités d’un règlement pacifique des différends. Dans l’immédiat, il a appelé la Russie à suspendre ses opérations militaires, comme l’a ordonné la CIJ le 16 mars 2022.
Pour le représentant du Mozambique, le temps est venu pour la diplomatie d’assumer enfin son rôle, les parties devant reconnaître les limites de l’approche actuelle fondée sur la confrontation et le recours à la force. Le délégué a exhorté les parties au conflit à un règlement négocié sous l’égide du Conseil de sécurité et dans le respect de la Charte des Nations Unies. Un dialogue responsable et authentique est le seul moyen viable de résoudre ce conflit, a-t-il réitéré, plaidant en faveur d’une solution politique comme seul moyen viable de mettre fin à ce conflit et de jeter les bases d’une paix durable entre ces deux pays voisins. La Fédération de Russie et l’Ukraine doivent cesser les hostilités sans plus tarder et reprendre les négociations directes sans conditions préalables, en engageant un dialogue de bonne foi. La cause de la paix nous oblige à encourager les parties à revenir à la table des négociations et à accepter les imperfections d’un compromis au nom de la paix et de la sécurité en Ukraine, en Europe et dans le reste du monde.
Le représentant de l’Algérie a jugé qu’il est temps de déployer les efforts nécessaires afin de parvenir à une désescalade des tensions et à la fin des souffrances et des pertes humaines. Les parties doivent faire montre de volonté afin de s’engager dans un dialogue constructif et inclusif, a préconisé le délégué. Il a exhorté lesdites parties à agréer à une paix juste et durable dans le respect de la Charte des Nations Unies et des préoccupations sécuritaires légitimes de chacune d’entre elles. Enfin, il a plaidé pour une action plus coordonnée de la communauté internationale, en appelant notamment à une action cohérente du Conseil en ce qui concerne la protection des civils.
Le représentant de la Sierra Leone a déploré le fait que la guerre en Ukraine soit aujourd’hui dans une impasse, avec des conséquences dévastatrices pour les civils et les infrastructures civiles en Ukraine et des effets considérables sur le paysage géopolitique et l’économie mondiale. Dénonçant le coût « excessivement élevé » de ce conflit, notamment pour les enfants, il a appelé toutes les parties à respecter le droit international applicable, en particulier le droit international humanitaire.
Le représentant a ensuite rappelé que la guerre en Ukraine a des effets négatifs sur les marchés alimentaires et énergétiques, le commerce et les chaînes d’approvisionnement. Ces perturbations ont contribué à des hausses de prix et à des pénuries d’approvisionnement qui se sont répercutées sur tous les secteurs, a-t-il relevé, soulignant l’importance d’un règlement du conflit pour permettre le redressement et la stabilisation non seulement de la région mais aussi du monde dans son ensemble. Face à ces retombées mondiales multidimensionnelles, il a prôné des efforts diplomatiques de bonne foi en vue de parvenir à une solution pacifique tenant compte des préoccupations légitimes de chaque partie.
La représentante du Guyana a condamné l’invasion de l’Ukraine par la Russie il y a deux ans, y voyant une violation des principes les plus fondamentaux de la Charte des Nations Unies. Elle a relevé que les pays ont tous ressenti, à des degrés divers, les conséquences de cette guerre, non seulement en termes de défis croissants pour l’ordre fondé sur des règles, mais aussi en termes de flambée des prix alimentaires et énergétiques, de perturbation des chaînes d’approvisionnement et d’aggravation de la faim dans les régions les plus vulnérables du monde, qui peinaient déjà à se remettre de la pandémie de COVID-19.
En tant que petit État en développement dont la souveraineté et l’intégrité territoriale sont protégées par des normes et instruments juridiques, le Guyana déplore la menace ou le recours à la force dans la conduite des relations internationales et condamne l’agression militaire déclenchée contre le peuple ukrainien, a affirmé la représentante, avant de réitérer son appel à une cessation immédiate des hostilités et à un retour à la diplomatie. Saluant les efforts menés à cette fin par certains États Membres, elle a regretté que le Conseil de sécurité soit toujours incapable de trouver une solution significative et de minimiser l’impact de la guerre sur l’érosion des normes internationales.
M. DMYTRO KULEBA, Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, a informé qu’alors que le Conseil de sécurité parle de négociations, une autre frappe aérienne russe a visé un bâtiment résidentiel dans son pays, tuant une personne. Avant que cette réunion ne se termine, une autre personne décédera encore en Ukraine, a-t-il anticipé en déplorant que la Russie tue des gens tous les jours, avec des drones et des missiles. Cette invasion à grande échelle de l’Ukraine et de la Crimée il y a 10 ans, est le résultat de l’impunité russe découlant de sa présence injustifiée et illégale au Conseil de sécurité, a-t-il accusé. Il a demandé de corriger cette erreur historique qui a eu des conséquences meurtrières. Le « régime de Putin » a déjà détruit des millions de vies en menant trois guerres en 24 ans, s’est-il emporté. La Russie veut tuer de plus en plus de personnes, a prévenu le Ministre en demandant de remettre l’agresseur à sa place et de rétablir la paix et la sécurité internationales. M. Kuleba a exhorté les Nations Unies de poursuivre leurs efforts en ce sens.
S’attardant sur la situation de la ville d’Avdiivka, le Ministre a dénoncé la propagande russe qui prétend avoir libéré la ville. La réalité est que l’armée russe a fait sortir les populations de leurs résidences et ont fait pleuvoir les bombes. La Russie a laissé au moins 17 000 soldats depuis octobre 2023 à Avdiivka, a précisé le Ministre. Il a appelé à rendre justice à toutes les victimes de cette guerre russe et à faire rendre des comptes aux responsables russes. M. Kuleba a aussi répondu aux mensonges de la Russie concernant l’arrêt rendu le 31 janvier par la Cour internationale de Justice. Il a prévenu qu’en dehors de l’Ukraine, d’autres villes peuvent devenir comme Avdiivka si la conquête impériale de la Russie continue.
Pour M. Kuleba, c’est le fait de rester les bras ballants face à la crise depuis deux ans qui a conduit à la situation actuelle. Le choix aujourd’hui est soit d’arrêter la Russie et d’expulser l’envahisseur, soit de faire face à l’incendie qui pourrait se propager dans d’autres régions du monde. Les générations futures jugeront nos actions aujourd’hui parce qu’elles se poseront la question de savoir pourquoi le monde n’a pas agi lorsqu’un pays se faisait voler en éclats, a prédit le Ministre. « Nous pouvons rétablir la paix si nous agissons de façon déterminée et résolue plutôt que de regarder Moscou créer des problèmes. » Le Ministre a repoussé la solution proposée par la Russie « parce que la Russie elle-même est la source du problème ». Il a réitéré la détermination de son pays en faveur d’une paix juste et durable fondée sur la Charte des Nations Unies et sur la formule de la paix proposée par l’Ukraine. Enfin, il a déclaré que l’Ukraine n’acceptera jamais toute offre de reddition et n’abandonnera jamais ses espoirs de liberté.
M. XAVIER BETTEL, Vice-Premier Ministre, Ministre des affaires étrangères et du commerce extérieur et Ministre de la coopération et de l’action humanitaire du Luxembourg, a mis l’accent sur les enfants, qui sont les premières victimes de la guerre d’agression russe. À cet égard, il a rappelé que, depuis l’an dernier, les forces armées russes et les groupes armés affiliés sont listés dans le rapport annuel du Secrétaire général sur les enfants et les conflits armés en raison des attaques perpétrées contre des écoles et des hôpitaux et du meurtre d’enfants. Constatant que l’utilisation continue d’armes explosives a eu pour conséquence d’endommager ou de détruire des milliers d’écoles dans toute l’Ukraine, il a déploré que plus de 5 millions d’enfants ukrainiens aient vu leur éducation interrompue. Il a ensuite appelé à mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité sur la protection des infrastructures civiles, notamment à la résolution 2601 (2021) qui appelle à prendre des mesures pour protéger les écoles contre les attaques, ainsi que la Déclaration sur la sécurité dans les écoles.
De l’avis du Ministre, la lutte contre l’impunité pour les atrocités commises en Ukraine est cruciale pour prévenir la commission de crimes à l’avenir, en Ukraine et ailleurs. Saluant le travail mené à cette fin par la Cour pénale internationale (CPI), il a aussi exhorté la Russie à se conformer à l’ordonnance de la Cour internationale de Justice (CIJ) du 16 mars 2022, qui lui enjoint de suspendre immédiatement ses opérations militaires sur le territoire de l’Ukraine. Il a ajouté que le Luxembourg soutient la formule de paix présentée par le Président Zelenskyy et appuie l’exercice par l’Ukraine de son droit à la légitime défense, en vertu de l’Article 51 de la Charte des Nations Unies.
Mme ANNALENA BAERBOCK, Ministre fédérale des affaires étrangères de l’Allemagne, a évoqué le sort de trois Ukrainiennes victimes de la guerre d’agression lancée il y a deux ans par la Russie: Anastasiia, une jeune mère qui a perdu le bas de sa jambe lorsqu’elle a marché sur une mine russe et qui veut retourner au front dès que possible; Oksana, une chirurgienne qui a décidé d’opérer son propre père lorsqu’il a été blessé à Bucha; et Valeriia, une fillette de 10 ans qui récolte des fonds pour l’armée ukrainienne. Elle a rendu hommage au courage et à la résilience de millions d’Ukrainiens qui, comme Anastasiia, Oksana et Valeriia, « savent que s’ils cessent de défendre leur pays, l’Ukraine finira ». Selon la Ministre, ces résistants voient ce que la réalité brutale de l’occupation russe signifie pour leurs compatriotes des territoires de l’est de l’Ukraine, où des milliers d’enfants ont été déportés vers la Russie et où des femmes et des hommes sont brutalement violés, arrêtés et torturés.
À ceux qui appellent à négocier avec le Président Putin, la Ministre a rappelé que le souhait de la Russie, membre permanent du Conseil de sécurité, c’est qu’un État souverain renonce à son droit d’exister. « Où en serions-nous si ce principe prévalait? » s’est-elle interrogée, estimant que céder à cela signifierait « la fin de la Charte des Nations Unies ». C’est pourquoi, a-t-elle ajouté, nous ne cesserons pas notre soutien à l’Ukraine, « ni maintenant ni demain ». Pour preuve de cet engagement, elle a signalé la signature par le Gouvernement allemand d’un accord de sécurité bilatéral qui offre à l’Ukraine un soutien fiable et durable.
M. RADOSLAW SIKORSKI, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a contredit point par point la déclaration du représentant russe dans laquelle la communauté internationale est décrite comme « prisonnière de la russophobie ». Oui, a dit le Ministre. Quand la Russie nous menace d’une guerre nucléaire, nous la prenons au sérieux et il n’y a rien d’irrationnel là-dedans. Nous ne nions pas les intérêts sécuritaires de la Russie mais nous avons commencé à nous réarmer quand elle a commencé à envahir ses voisins. Le Ministre s’est dit surpris que le représentant russe ait parlé de l’attaque de la Pologne contre son pays pendant la Deuxième Guerre mondiale alors que les histoires disent que c’est l’Union soviétique qui a attaqué la Pologne avec l’Allemagne nazie, le 17 septembre 1939. Une telle démagogie est indigne d’un membre permanent du Conseil de sécurité, a tranché le Ministre. Ce que le représentant russe vient de faire, a-t-il dit, c’est de nous rappeler pourquoi nous avons résisté à la domination soviétique et pourquoi l’Ukraine résiste aujourd’hui à la domination russe. Ils ont échoué à nous soumettre et ils échouent encore en Ukraine, a conclu le Ministre.
Le Ministre des affaires étrangères de la Lituanie, M. GABRIELIUS LANDSBERGIS, qui s’exprimait au nom de la République tchèque, de l’Estonie, de la Lettonie et de la Lituanie, a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle se réveille enfin, dans l’intérêt de tous. Si nous échouons, l’ordre fondé sur des règles s’effondrera, a-t-il mis en garde, et la souveraineté de l’Ukraine, la sécurité de l’Europe, le succès des efforts mondiaux en faveur des droits humains, de l’établissement des responsabilités, de la sécurité alimentaire et de la sûreté nucléaire, sera perdu, au profit de ceux qui tirent parti du chaos. L’histoire nous rappelle le coût terrible des mauvais choix, a-t-il mis en garde, et notre attentisme enhardit la Russie, que ce soit en Ukraine, ou en Russie même où on élimine toute opposition et cherche à détruire l’espoir d’un pays différent, normal et pacifique. L’Ukraine peut sembler lointaine et l’attention du monde est divisée, a-t-il concédé, mais il est impératif de comprendre que l’agression de la Russie contre l’Ukraine a un impact sur tous. Cette guerre doit être gagnée, et de manière décisive, a-t-il martelé, car ce n’est pas seulement la guerre de l’Europe, mais bien un défi à l’ordre international qui, bien qu’imparfait, vise à garantir que le droit, plutôt que la puissance militaire, détermine les frontières et la souveraineté des États. Exhortant la communauté internationale à trouver la volonté politique d’apporter une réponse juridique adéquate à la guerre illégale de conquête territoriale menée par la Russie, le Ministre a exigé que les dirigeants russes aient à assumer l’entière responsabilité de l’agression lancée par Vladimir Putin parce qu’à défaut, l’impunité se poursuivra, a-t-il prévenu. Rappelant que les trois pays baltes –Estonie, Lettonie et Lituanie– ont été occupés, colonisés et exploités par le « même agresseur » à plus d’une reprise, le Ministre a assuré qu’ils savent d’expérience que, quels que soient les mots prononcés et les accords signés, « cet agresseur n’a pas l’intention de s’arrêter... tant qu’on ne l’arrêtera pas ».
M. GORDAN GRLIĆ RADMAN, Ministre des affaires étrangères et européennes de la Croatie, a regretté qu’au lieu de mettre fin à cette « guerre insensée », la Russie l’intensifie et mette en danger des sociétés entières à travers le monde en les exposant à l’insécurité alimentaire et aux pénuries d’énergie. Exhortant la Russie à cesser toutes les attaques, en particulier celles qui touchent des civils et causent des dommages aux infrastructures civiles, et à se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité ainsi qu’aux valeurs et principes consacrés dans la Charte des Nations Unies, il a réaffirmé le soutien indéfectible de son pays à l’indépendance, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine.
La Croatie, a souligné le Ministre, a fourni et continue de fournir une aide à l’Ukraine, tout en offrant une protection temporaire à plus de 25 000 de ses ressortissants. Elle a en outre accueilli à Zagreb la toute première conférence internationale de haut niveau des donateurs sur le déminage humanitaire en Ukraine en octobre 2023, a-t-il ajouté, avant d’appeler la Russie à retirer ses troupes des frontières internationalement reconnues de l’Ukraine, à cesser ses achats illégaux d’armes et de munitions et à assumer ses responsabilités en tant que membre permanent du Conseil de sécurité.
Au nom du Groupe des Amis de l’application du principe de responsabilité après l’agression contre l'Ukraine, Mme HANKE BRUINS SLOT, Ministre des affaires étrangères des Pays-Bas, a dit que les 49 membres partagent la conviction selon laquelle « la force ne fait pas le droit ». À maintes reprises, a-t-elle déclaré, les États Membres ont souligné la nécessité d’une paix globale, juste et durable mais la Russie fait la sourde oreille. Appelant à ne pas ignorer cette situation, elle a invité à tout faire pour amener la Russie et les responsables à rendre des comptes pour les crimes commis en Ukraine et contre l’Ukraine. La Ministre a salué les initiatives déjà déployées comme les activités en cours de la mission de surveillance des droits de l’homme en Ukraine, la Commission d’enquête créée par le Conseil des droits de l’homme, et l’équipe d’experts sur l’état de droit et la violence sexuelle du Représentant spécial du Secrétaire général.
Le Groupe soutient également le Procureur général de l’Ukraine, le travail effectué par la Cour pénale internationale, le Centre international pour la poursuite du crime d’agression et le Registre des dommages causés à l’Ukraine. L’acte d’agression de la Russie viole la Charte des Nations Unies, a rappelé Mme Bruins Slot réitérant l’appel à la Fédération de Russie pour qu’elle respecte ses obligations internationales de retirer ses forces et respecte la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.
Mme HELENA CARREIRAS, Ministre de la défense nationale du Portugal, a dénoncé l’invasion de l’Ukraine par la Russie en violation du droit international. L’Ukraine peut toujours compter sur le soutien total du Portugal, a assuré la Ministre. « Nous nous tenons aux côtés de l’Ukraine », a-t-elle assuré. La déléguée a détaillé le soutien de son pays, en mentionnant la formation de soldats ukrainiens et les dons d’équipements militaires. « Au bout du compte, l’objectif reste le même: défendre les règles, principes et valeurs consacrés par la Charte des Nations Unies. » Enfin, elle a exhorté la Russie à cesser ses opérations militaires, à se retirer de l’Ukraine et à respecter le droit. « Ensemble, nous prévaudrons dans notre soutien à l’indépendance, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine. »
M. BUJAR OSMANI, Ministre des affaires étrangères de la Macédoine du Nord, a condamné l’agression de la Russie contre un pays indépendant, y voyant une violente démonstration de force qui menace gravement la paix et la stabilité régionales. Estimant, à l’instar du Secrétaire général de l’ONU, que seule une solution conforme à la Charte des Nations Unies, au droit international et aux résolutions de l’Assemblée générale permettrait d’aboutir à une paix juste et durable, il a appelé à la reprise du dialogue et à l’arrêt par la Russie de toute nouvelle action militaire. Alors que le conflit entre dans sa troisième année, il a exhorté la communauté internationale à œuvrer sans relâche pour trouver une solution diplomatique afin d’éviter de nouvelles escalades.
Le Ministre a également salué le courage et la résilience du peuple ukrainien, rappelant qu’il ne fait que se défendre, conformément à l’Article 51 de la Charte des Nations Unies. Enfin, appelant à ce que cessent les attaques contre les infrastructures civiles essentielles, notamment les écoles, les hôpitaux, les installations énergétiques et les systèmes d’eau et d’assainissement, il a assuré que la Macédoine du Nord continuera à se tenir aux côtés de l’Ukraine et de son peuple, dans l’espoir que la raison prévaudra et que la vie reviendra bientôt à la normale.