9535e séance – matin
CS/15571

Conseil de sécurité: appel unanime au déploiement rapide de la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti sur fond de crise générale

Alors qu’Haïti reste en proie à la violence toujours croissante des gangs, qui affecte les moyens de subsistance de la population et mine les activités humanitaires, les membres du Conseil de sécurité ont plaidé, ce matin, pour un déploiement rapide de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), opération non onusienne destinée à soutenir la Police nationale d’Haïti (PNH), tout en appelant les acteurs politiques du pays à trouver un terrain d’entente sur la transition et l’organisation d’élections libres, régulières et transparentes.   

Faisant le point sur les derniers développements, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour Haïti et Cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), a fait état d’une augmentation sans précédent des enlèvements, des viols et d’autres crimes commis par des gangs armés.  Mme María Isabel Salvador a précisé que, l’an dernier, le BINUH a recensé plus de 8 400 victimes directes de cette violence, soit une augmentation de 122% par rapport à 2022.  Si Port-au-Prince a concentré 83% des meurtres et des blessures, la violence s’est propagée à d’autres zones, en particulier dans l’Artibonite, a-t-elle indiqué, s’alarmant de la progression des violences sexuelles, des actions de mouvements d’autodéfense et de la vulnérabilité des enfants susceptibles d’être recrutés par les gangs.

Face à cette détérioration, le BINUH a continué de travailler au renforcement des capacités de la PNH en mettant un accent particulier sur les performances et la formation en matière de renseignement, a indiqué Mme Salvador, en saluant le soutien apporté à la police par le Gouvernement haïtien et la communauté internationale.  Elle a ajouté que le BINUH est engagé dans des consultations avec les autorités nationales haïtiennes sur l’impact potentiel que pourrait avoir le déploiement de la MMAS, autorisée en octobre dernier par la résolution 2699 (2023) du Conseil de sécurité. 

Les membres du Conseil et les autres États Membres invités à la séance se sont unanimement prononcés pour un déploiement sans délai de la MMAS.  Appelé à diriger cette mission, le Kenya a assuré que les préparatifs sont en bonne voie grâce aux contributions nationales en matière de fonds, d’équipements et de personnel.  Des évaluations opérationnelles ont été entreprises en collaboration avec les autorités haïtiennes et les différents partenaires, a-t-il précisé, ajoutant que le statut juridique national de la Mission reste en évolution dans l’attente d’un procès intenté par un citoyen sur la légalité du déploiement en Haïti de la police kenyane. 

Très impliqués dans ces préparatifs, les États-Unis ont insisté sur la nécessité d’équiper de façon adéquate la Mission, afin qu’elle ait un impact tangible sur le terrain, tandis que la France plaidait pour que le déploiement soit en adéquation avec les « standards » des Nations Unies.  La République de Corée a, elle, souligné la nécessité de tirer les leçons du passé et de prévoir une formation des contingents et un mécanisme de reddition de comptes afin de prévenir toute violation des droits humains et la propagation de maladies. 

Tout en rappelant que de grands espoirs sont placés dans cette mission, la Fédération de Russie a regretté pour sa part que, plus de trois mois après l’adoption de la résolution 2699, les informations demandées sur les paramètres clefs de l’opération manquent toujours.  S’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), Sainte-Lucie a exhorté les États Membres à accélérer le déploiement de la MMAS, appuyée par la République dominicaine, selon laquelle chaque jour de retard permet aux organisations criminelles de renforcer leur emprise sur le pays.

Impatient de voir ce déploiement se concrétiser, le Ministre des affaires étrangères d’Haïti a argué que « chaque jour qui passe sans cet appui tant espéré est un jour de trop que nous vivons dans l’enfer des gangs ».  Remerciant à nouveau le Kenya d’accepter le commandement de la future Mission, il s’est félicité de la tenue, les 14 et 15 décembre derniers, de la conférence de pré-planification entre les délégations du Kenya, des États-Unis, de la Jamaïque et de son pays. 

La Représentante spéciale a invité les États Membres à contribuer généreusement à cette mission pour garantir son déploiement en temps opportun.  Elle a toutefois estimé que la stabilité à long terme ne pourra être obtenue que grâce à un processus politique inclusif et mené par le pays.  Mme Salvador a été rejointe dans cette analyse par un grand nombre de délégations, qui ont regretté l’impasse actuelle, malgré les efforts de facilitation du BINUH et de la CARICOM.  La Chine a ainsi averti que sans gouvernement légitime et redevable, il sera difficile pour des acteurs extérieurs de trouver un dénouement à cette crise.  Déplorant l’extrême lenteur des préparatifs pour le lancement du processus électoral, la Fédération de Russie a déploré que l’accord de consensus national, signé il y a plus d’un an, n’ait toujours pas été mis en œuvre, faute d’une entente politique large.  À l’instar d’une majorité de pays, la Suisse a recommandé de poursuivre le dialogue politique afin de permettre la tenue d’élections.

La question du trafic d’armes illégales et des flux financiers illicites a également été abordée par les intervenants. Invitée par le Conseil, la Directrice de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a averti que les gangs continueront à répandre la terreur parmi la population tant qu’ils auront accès à des armes, lesquelles sont le plus souvent achetées aux États-Unis et trafiquées dans des ports maritimes en République dominicaine avant d’être importées en Haïti.  Dans l’optique des échéances politiques qui se profilent, Mme Ghada Waly a appelé à empêcher les flux financiers illicites qui déstabilisent le pays et à soutenir les capacités haïtiennes en matière de contrôle et de saisie des armes à feu, une position partagée notamment par le Guyana et le Royaume-Uni. 

Elle aussi favorable à un renforcement de la lutte contre les armes et les flux financiers illicites, la Directrice exécutive de Human Rights Watch a rappelé que c’est la corruption qui explique les agissements des gangs et les souffrances des Haïtiens.  Face à une situation de violation endémique des droits humains, Mme Tirana Hassan a souligné le besoin de déploiement de la MMAS, notamment dans des lieux tels que Cité-Soleil.  Elle a également évoqué les violations commises par le passé par des Casques bleus, ainsi que l’épidémie de choléra, expliquant que « les Haïtiens n’ont pas oublié mais sont convaincus de l’urgence de la situation ». 

LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI S/2024/62 S/2024/79

Déclarations

Mme MARÍA ISABEL SALVADOR, Représentante spéciale pour Haïti et Cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), a indiqué qu’Haïti reste en proie à une violence croissante en raison d’une augmentation sans précédent des enlèvements, des viols et d’autres crimes commis par des gangs armés qui affectent les moyens de subsistance de la population et sapent les activités humanitaires.  Parlant de « point critique », elle a précisé que, l’an dernier, le BINUH a recensé plus de 8 400 victimes directes de la violence des gangs, soit une augmentation de 122% par rapport à 2022.  La capitale Port-au-Prince a concentré 83% des meurtres et des blessures, et la violence s’est également propagée dans d’autres zones, en particulier dans l’Artibonite.  Au sud de la capitale, a-t-elle relevé, des gangs ont mené des attaques à grande échelle pour contrôler des zones clefs et continuent de recourir systématiquement à la violence sexuelle dans les zones qu’ils contrôlent.  La haute fonctionnaire a également signalé que, depuis son dernier exposé, au moins 75 personnes auraient été tuées par des mouvements d’autodéfense civile apparus comme un moyen de combattre les gangs. Elle a ajouté que la violence, les déplacements et la perte des moyens de subsistance ont rendu des milliers d’enfants vulnérables au recrutement par les gangs.

Dans ce contexte, a poursuivi la Représentante spéciale, le BINUH a continué de travailler au renforcement des capacités de la Police nationale d’Haïti (PNH) en mettant un accent particulier sur les performances et la formation en matière de renseignement.  Si 795 nouvelles recrues rejoindront la PNH une fois diplômées de l’Académie de police en mars, le déficit d’effectifs reste préoccupant étant donné qu’environ 1 600 policiers ont quitté la police en 2023, a-t-elle expliqué, citant les données recueillies par le BINUH.  Mme Salvador a néanmoins salué le soutien apporté à la PNH par le Gouvernement haïtien et la communauté internationale, notamment une augmentation de 13% du budget de l’État pour 2023-2024 alloué aux forces de police, ainsi que la fourniture d’équipements de protection individuelle, de véhicules blindés et d’armes.  Grâce aux bailleurs multilatéraux et aux conseils techniques du BINUH, des moyens de transport, du matériel de bureau, du matériel d’enquête et des formations de renforcement des capacités ont aussi été fournis à plus de 400 agents de la PNH, a-t-elle indiqué. 

En outre, le BINUH est étroitement engagé dans des consultations avec les autorités nationales haïtiennes sur l’impact potentiel que pourrait avoir le déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) autorisée par le Conseil de sécurité, a indiqué la haute fonctionnaire, avant d’encourager toutes les parties prenantes haïtiennes à préparer efficacement le déploiement de cette mission en créant les mécanismes de coordination nécessaires. 

Pour Mme Salvador, il est essentiel que la Mission adhère à la politique de diligence raisonnable en matière de droits humains et qu’il mette en place des mécanismes solides pour prévenir l’exploitation et les abus sexuels. La Mission doit aussi participer avec des experts à l’unité de liaison récemment créée par l’équipe de pays pour l’action humanitaire, a-t-elle affirmé, appelant à nouveau les États Membres à contribuer généreusement pour garantir le déploiement en temps opportun de cette mission en Haïti.  Elle a toutefois estimé que la stabilité à long terme ne peut être obtenue que grâce à un processus politique inclusif et mené par le pays.  À cet égard, elle a salué les efforts du Groupe de personnalités éminentes de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), qui visent à rapprocher les différentes positions politiques en vue de l’organisation d’élections crédibles.  Alors que le dialogue et les consultations interhaïtiens se poursuivent, certaines divergences subsistent sur les modalités de gouvernance, a-t-elle déploré, s’inquiétant du rôle potentiellement déstabilisateur de nouveaux acteurs violents, qui pourrait éroder davantage les institutions haïtiennes et diviser la population haïtienne. 

S’agissant du régime de sanctions, essentiel pour lutter contre l’impunité et perturber les ressources financières et les flux opérationnels associés aux gangs criminels, Mme Salvador a dit sa confiance dans les efforts continus du Groupe d’experts pour englober toutes les personnes appartenant et soutenant des gangs.  Elle s’est par ailleurs déclarée encouragée par les efforts des autorités haïtiennes pour améliorer le système judiciaire et lutter contre la corruption.  Elle a ainsi noté que l’unité anti-corruption continue de faire pression pour que les hauts fonctionnaires présumés impliqués dans la corruption soient tenus responsables.  Beaucoup reste cependant à faire et le BINUH continue d’être profondément engagé, a-t-elle assuré, rappelant que le Conseil a renouvelé le mandat du Bureau en juillet dernier avec des capacités accrues.  Malgré cela, elle a signalé que la situation de liquidité de l’ONU a un impact très sérieux sur le BINUH et a dit compter sur le soutien des États Membres.

Mme GHADA WALY, Directrice de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a présenté, une mise à jour sur la situation relative au trafic d’armes et aux flux financiers illicites en Haïti.  Les gangs dans les rues continueront à répandre la terreur parmi la population tant qu’ils auront accès à des armes, a-t-elle mis en garde.  Le rapport paru hier corrobore les conclusions du premier rapport, paru en octobre 2023, qui faisait état de flux illicites d’armes à l’intérieur et à l’extérieur des frontières, y compris des trafics aériens, a-t-elle expliqué.  Onze pistes aériennes clandestines ont été identifiées mais il est difficile de surveiller le trafic aérien de petits avions entre les États-Unis et Haïti, a-t-elle regretté.  Le rapport identifie également un certain nombre de gangs haïtiens spécialisés dans l’achat, la distribution et le stockage d’armes à feu. 

Les dynamiques régionales jouent un grand rôle, a-t-elle poursuivi, expliquant que les États des Caraïbes ont souligné la nécessité de tarir le flux d’armes à feu dans la région.  Le rapport a également démontré que les armes achetées aux États-Unis étaient trafiquées dans des ports maritimes en République dominicaine avant d’être importées en Haïti.  Depuis le renforcement des mesures, le trafic passe par des points de passage dans des zones encore plus reculées.  Le rapport mentionne aussi la nécessité de réduire la corruption et les flux financiers illicites qui affaiblissent les institutions judiciaires et favorisent le crime organisé.  Des enquêtes sont en cours mais les ressources restent insuffisantes, a regretté Mme Waly. 

Elle a ensuite rappelé que plusieurs échéances politiques se profilent, appelant à empêcher les flux financiers illicites qui déstabilisent le pays et à soutenir les capacités haïtiennes en matière de contrôle et de saisie des armes à feu.  Des mécanismes de contrôle et de partage de renseignements, des lignes directrices en matière de justice et davantage de supervision des petits avions, notamment, permettraient de réduire le trafic, a-t-elle assuré.  Elle a assuré que l’ONUDC collabore avec les autorités haïtiennes pour améliorer les équipements pour la gestion des frontières et la sécurité maritime, combattre la corruption et le blanchiment d’argent, et soutenir le rétablissement de la sécurité.  « La communauté internationale doit se tenir aux côtés du peuple haïtien en ces temps difficiles », a-t-elle exhorté.  Contrer les flux illicites et le trafic d’armes à feu sont des étapes essentielles pour ouvrir la voie à un processus politique inclusif et viable qui reste le seul moyen de parvenir à la paix et à la sécurité en Haïti, a-t-elle conclu. 

Mme TIRANA HASSAN, Directrice exécutive de Human Rights Watch, a indiqué que la situation des Haïtiens empire, les violations des droits humains étant toujours endémiques dans un contexte de violences accrues entre gangs.  Elle a rappelé que c’est la corruption qui explique les agissements des gangs et les souffrances des Haïtiens.  Elle a souligné le besoin de déploiement de la MMAS, notamment dans des endroits tels que Cité-Soleil.  « Les Haïtiens sont en train de suffoquer », a-t-elle mis en garde.  Mme Hassan a aussi évoqué les violations commises par le passé par des Casques bleus, notamment des violences sexuelles, ainsi que l’épidémie de choléra.  Les Haïtiens n’ont pas oublié mais ils sont convaincus de l’urgence de la situation, a-t-elle relevé, en demandant une formation rigoureuse des contingents avant leur déploiement dans la nouvelle mission.  Elle a exigé que soit adoptée une politique de tolérance zéro et que toute allégation de violence sexuelle fasse l’objet d’une enquête. 

L’experte a demandé également un renforcement de la lutte contre les flux d’armes et les flux financiers illicites qui bénéficient aux gangs. « Ne refoulez pas les Haïtiens qui fuient les violences », a-t-elle enfin lancé à l’adresse des membres du Conseil.  Quant à l’ONU, elle a estimé qu’elle avait commis des erreurs en Haïti, mais qu’elle avait maintenant l’occasion de rectifier le tir et de briser enfin le cycle des violences.

Le représentant des États-Unis a regretté la situation alarmante en Haïti, où le taux d’homicides a doublé en 2023 et les kidnappings ont augmenté de 80% par rapport à l’année précédente.  Les gangs, gagnant en influence, ont étendu leurs opérations dans des zones autrefois sûres et bloquent l’accès aux infrastructures essentielles.  Quant à la Police nationale d’Haïti (PNH), elle perd continuellement des recrues, malgré les nouvelles formations, ce qui accentue la crise, s’est inquiété le délégué. Il a insisté sur l’importance cruciale de rétablir la démocratie en Haïti, appelant tous les acteurs politiques à s’unir pour trouver une solution durable, en mettant l’accent sur le dialogue et le compromis.  Dans ce contexte, il a mis en avant le rôle de la communauté internationale pour soutenir et accompagner ce processus de réconciliation et de stabilisation.

Le représentant a aussi présenté les efforts de son pays pour mettre en application la résolution d’octobre 2023 du Conseil de sécurité, qui a autorisé une mission d’appui à la sécurité.  Les États-Unis, en coopération avec le Kenya et d’autres partenaires, ont fait des progrès significatifs dans la préparation de cette mission multinationale, a-t-il assuré. Le délégué a encouragé un soutien accru à cette mission essentielle, qui permettra d’éviter de nouvelles violations des droits humains, notamment l’exploitation et les abus sexuels.  Il a insisté sur la nécessité d’équiper de façon adéquate la mission, afin qu’elle ait un impact tangible sur le terrain, en particulier pour aider la PNH à restaurer la sécurité à Port-au-Prince.

Le représentant a également souligné l’urgence d’un soutien humanitaire accru pour Haïti, face à une situation humanitaire dégradée.  Il a enfin rappelé les sanctions récemment imposées par le Conseil de sécurité à plusieurs chefs de gangs, responsables de la détérioration de la paix et de la sécurité, et a insisté pour que les activités illégales ne restent pas impunies.

Le représentant de l’Équateur a encouragé le Comité 2653 concernant Haïti à poursuivre ses efforts d’analyse pour inscrire des personnes et des entités sur la liste des sanctions.  Il a ensuite jugé essentiel de parvenir à des accords pour la restauration des institutions démocratiques haïtiennes, ainsi qu’à l’établissement d’une feuille de route permettant la tenue d’élections libres et équitables.  Le représentant a par ailleurs appelé à progresser dans le renforcement des domaines judiciaire, pénitentiaire et policier, afin de pouvoir intensifier les opérations de la Police nationale d’Haïti (PNH) contre les gangs criminels.  Exprimant sa préoccupation face au taux alarmant de désertion des policiers, il a préconisé de poursuivre l’allocation de ressources pour garantir leur professionnalisation.  Il s’est également alarmé des informations de l’ONUDC concernant le trafic d’armes et de munitions qui finissent entre les mains de gangs et d’acteurs non étatiques. Cette situation aggrave la violence non seulement en Haïti mais dans toute la région de l’Amérique latine et des Caraïbes, a-t-il affirmé, plaidant pour un renforcement de la coopération régionale et sous-régionale sur ces questions. 

Le représentant s’est ému de l’augmentation des homicides, des enlèvements et des cas de violence sexuelle liés aux gangs en Haïti.  Il a également noté que la détérioration de la sécurité amène près de la moitié de la population haïtienne à connaître des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë, relevant en outre que la persistance de l’épidémie de choléra démontre l’urgence d’une réponse internationale coordonnée.  Enfin, après avoir encouragé la poursuite des enquêtes sur l’exploitation et les abus sexuels commis par d’anciens membres du personnel de la MINUSTAH, il s’est dit convaincu que le processus interne au Kenya se terminera bientôt en vue de lancer le déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en Haïti. 

La représentante de Malte s’est dite alarmée par la situation en Haïti. Elle a appelé au déploiement rapide de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), rappelant que cette mission doit être équipée de mécanismes de discipline et de bonne conduite appropriés, ainsi que de protocoles de respect des droits humains. Toutefois, cette mission ne sera pas suffisante, a-t-elle mis en garde, préconisant la création d’une feuille de route politique par les parties haïtiennes qui permettra la tenue d’élections crédibles et inclusives une fois les conditions de sécurité réunies.  Elle a salué la nouvelle liste de sanctions établie par le Conseil en décembre et a appelé à l’appliquer afin de tarir les flux illicites d’armes. 

La représentante a ensuite constaté que les violations des droits humains continuent sans relâche, particulièrement les violences envers les enfants et les femmes qui sont particulièrement vulnérables aux recrutements et aux violences sexuelles par les gangs.  Les victimes de violences sexuelles ont besoin d’un accompagnement psychosocial et médical, a-t-elle exhorté.  Il est également nécessaire de renforcer le système judiciaire afin de lutter contre l’impunité, un objectif auquel la Mission devrait contribuer.  L’insécurité alimentaire et le manque d’hygiène qui sévissent doivent également rester des priorités, a-t-elle ajouté.  Appelant la communauté internationale à accroître l’aide humanitaire et à soutenir le processus politique, elle a estimé que « 2024 doit être un tournant pour Haïti ». 

Le représentant de la République de Corée s’est inquiété de la détérioration de la situation sécuritaire en Haïti et a appuyé le déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), saluant dans la foulée l’engagement du Kenya à la diriger.  Il a souligné la nécessité de tirer les leçons du passé et de prévoir une formation des contingents et un mécanisme de reddition de comptes afin de prévenir toute violation des droits humains et la propagation de maladies.  Le délégué a appelé de ses vœux le déploiement le plus tôt possible de la Mission, avant de demander l’application des sanctions du Conseil à l’encontre des chefs de gangs.  Il a encouragé le dialogue politique et souhaité la tenue le plus tôt possible d’élections libres et transparentes.  Le représentant a également souligné que l’aide humanitaire et l’aide au développement de la communauté internationale sont nécessaires de toute urgence pour Haïti.

La représentante de Guyana, intervenant au nom des A3+1 (Algérie, Mozambique, Sierra Leone et Guyana), a souligné la situation humanitaire précaire en Haïti, exhortant la communauté internationale à renforcer son soutien au plan de réponse humanitaire, actuellement sous-financé à hauteur de 33%. Elle a également appelé au déploiement le plus rapidement possible de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) afin de créer des conditions sécuritaires propices à la tenue d’élections libres et équitables et de répondre à la violence des gangs. 

Préoccupée par l’escalade de la violence des gangs, la déléguée a insisté sur l’importance de freiner le transfert d’armes illicites et de mettre en place un cadre réglementaire robuste pour restaurer la stabilité en Haïti et permettre aux autorités haïtiennes de reprendre le contrôle de la situation sécuritaire.  De même, elle a appelé à continuer de soutenir les mesures de lutte contre le trafic et la prolifération d’armes illégales et les flux financiers illicites, saluant l’expansion récente du régime de sanctions.

La représentante a par ailleurs souligné la nécessité d’une solution politique haïtienne pour atteindre une stabilité et un développement durables, mettant en avant l’implication significative des femmes et des jeunes.  De plus, elle a appelé les parties prenantes à œuvrer rapidement pour un consensus national, ouvrant la voie à des élections démocratiques dans des conditions favorables. 

Le représentant de la Chine a constaté qu’en dépit des mesures prises par la communauté internationale pour enrayer la violence des gangs en Haïti, la situation humanitaire dans le pays ne cesse d’empirer.  Pour inverser la tendance, il a jugé essentiel que le processus politique haïtien se poursuive.  Il a averti que sans gouvernement légitime et redevable, il sera difficile pour des acteurs extérieurs de trouver un dénouement à cette impasse.  Le représentant a donc appelé les parties haïtiennes à œuvrer de concert, se réjouissant que, grâce à la facilitation du BINUH et de la CARICOM, elles aient dégagé un consensus sur plusieurs axes de la transition et exprimé leur volonté de poursuivre les discussions.  Dans ce cadre, il a formé le vœu que les autorités nationales et les différentes factions placeront les intérêts de la population au-dessus de tout et réuniront les conditions propices au processus politique afin d’achever la transition et organiser des élections crédibles, libres et régulières.  

Soucieux que se fassent jour des moyens efficaces de contrôle des activités des gangs, le représentant a enjoint la communauté internationale à appuyer la Police nationale d’Haïti (PNH) et a espéré que le régime de sanctions jouera son rôle.  À cet égard, il a plaidé en faveur de mesures plus vigoureuses pour mettre à jour ou alourdir la liste des sanctions et instaurer un embargo sur les armes.  Il a d’autre part exhorté les États-Unis à contrôler davantage le trafic d’armes à feu et à mettre en place des mécanismes de coordination et de partage de renseignements avec les pays de la région.  De même, il a souhaité que la MMAS pourra être déployée le plus rapidement possible et adoptera un plan d’action concret afin de stabiliser la situation.  Le représentant a enfin appelé à redoubler d’efforts pour atténuer la crise humanitaire et réduire les conséquences du chaos sur la population qui a perdu espoir.  La Chine, a-t-il conclu, appuie le principe d’une solution pilotée par les Haïtiens pour qu’ils puissent nourrir de plus grands espoirs dans l’avenir de leur pays.  

La représentante de la Slovénie a déclaré qu’Haïti semble un « gouffre sans fond de souffrances humaines ».  Les violations commises par les gangs ont atteint un niveau effarant, s’est-elle alarmée, en pointant le manque de mécanismes de responsabilité.  Elle a également dit être consternée par le recours systématique à la violence sexuelle, s’inquiétant en outre du recrutement et de l’exploitation d’enfants par des gangs, notamment en raison du manque de possibilités d’éducation dans le pays.  Elle a appuyé le déploiement de la MMAS, avant de souligner la nécessité de renforcer le système pénal et pénitentiaire du pays.  Elle a également rappelé que plus de 40% des Haïtiens souffrent d’insécurité alimentaire.  La situation sécuritaire et humanitaire ne pourra pas s’améliorer sans perspective politique, a-t-elle souligné avant d’appeler toutes les parties à parvenir à un consensus en vue de la tenue d’élections crédibles et inclusives. 

Le représentant de la Suisse a estimé nécessaire une série d’actions afin de réaliser des progrès dans la sécurité, le développement, l’aide humanitaire et la politique en Haïti.  Saluant le rapprochement entre le BINUH et les institutions gouvernementales, il a, tout d’abord, réclamé le déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) dans les meilleurs délais.  Le renforcement des capacités de la Police nationale d’Haïti (PNH) et la mise en œuvre intégrale du régime de sanctions doivent également se poursuivre, a-t-il ajouté.  Le délégué a aussi recommandé de continuer le dialogue politique afin de permettre la tenue d’élections, expliquant que le rétablissement d’institutions démocratiques participatives contribuera à la recherche de solutions inclusives.  À ce titre, il a salué les discussions sur la formation d’un gouvernement d’unité nationale, d’un nouveau Conseil électoral provisoire et d’un processus de réforme constitutionnelle. 

Enfin, la communauté internationale doit maintenir son engagement solidaire envers le pays, a exhorté le représentant, appelant à financer davantage le Plan de réponse humanitaire et à accroître la coopération entre les acteurs internationaux, dont la MMAS.  La Suisse continuera à s’impliquer à Port-au-Prince et dans le Grand Sud dans les domaines des changements climatiques, de la réduction des risques de catastrophe, de l’hygiène, de l’eau, et de la prévention des violences sexuelles et de genre.  En conclusion, il a rappelé que la lutte contre la prolifération d’armes et de munitions illégales reste une priorité.

Le représentant du Royaume-Uni s’est inquiété des comptes rendus alarmants sur l’usage de la violence sexuelle par les gangs, y compris des viols collectifs, pour instiller la peur dans la population.  Les gangs recrutent de force des enfants, a-t-il également observé, et utilisent l’accès à la nourriture et à l’eau comme moyen de contrôle. 

Il a exhorté tous les acteurs politiques à mettre de côté leurs différends dans l’intérêt commun du peuple haïtien, et à s’accorder sur une feuille de route permettant le retour à une gouvernance à long terme.  Cette démarche, a-t-il insisté, est la seule capable d’assurer la stabilité et la sécurité des Haïtiens sur le long terme. Le représentant a réaffirmé le soutien de son pays au déploiement rapide de la MMAS.  Il a également accueilli favorablement l’expansion, en décembre 2023, du régime de sanctions ciblant les responsables de la violence armée en Haïti. 

Le représentant de la Fédération de Russie a observé que la situation en Haïti se détériore chaque mois.  Le nombre d’homicides liés aux gangs en 2023 a doublé par rapport à 2022, et les violations des droits humains augmentent également de façon exponentielle, a-t-il constaté, notant que les gangs ont entre les mains des centaines de milliers d’armes légères, qui continuent d’affluer sans entrave dans le pays.  De l’avis du représentant, « le plus grand fabricant d’armes de la région est bien conscient de son implication dans ces projets, mais il ne peut ou ne veut rien faire pour éviter qu’Haïti soit inondé d’armes en provenance du continent américain ».  Face à ce fléau, la Police nationale d’Haïti (PNH) a perdu ces trois dernières années quelque 3 300 agents et ses unités restantes sont souvent mal équipées et insuffisamment préparées.  Alors que de grands espoirs sont placés dans la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti, il a regretté que, plus de trois mois après l’adoption de la résolution 2699 (2023), les informations demandées sur les paramètres clefs de l’opération manquent toujours.  Il a estimé que l’intervention convenue au titre du Chapitre VII de la Charte doit se dérouler dans un cadre clairement défini et être pleinement responsable devant le Conseil.

Le représentant a cependant jugé qu’au-delà des questions sécuritaires, la crise principale est politique.  Notant que, depuis longtemps, pas un seul organe de pouvoir n’a été légitimement élu dans le pays, il a déploré l’extrême lenteur des préparatifs pour le lancement du processus électoral.  Il a également déploré que l’accord de consensus national, signé il y a plus d’un an, n’ait pas été mis en œuvre, faute d’une entente politique large sur l’avenir du pays.  Dans ce contexte, il a appelé toutes les parties à mettre de côté leurs intérêts égoïstes et à parvenir dès que possible à des accords sur la tenue d’élections et la gouvernance du pays pendant la période de transition.  Il a d’autre part regretté l’absence de clarté dans l’enquête sur le meurtre du Président Moise, tout en s’élevant contre l’ingérence extérieure dans ce processus, ainsi que dans les affaires politiques internes d’Haïti en général.  Enfin, après avoir noté l’élargissement de la liste du Comité des sanctions à plusieurs chefs de gangs locaux, il a souhaité que ces mesures ne deviennent pas un outil pour « neutraliser » les personnalités politiques et les hommes d’affaires haïtiens « détestés » par l’Occident. 

La représentante du Japon s’est inquiétée de l’augmentation de la violence des gangs, de l’impunité, des nombreuses violations des droits humains et de la situation humanitaire qui se dégrade.  Elle a constaté l’optimisme de certains groupes gouvernementaux et de la société civile quant au déploiement de la MMAS.  Dans ce cadre, elle a encouragé la formation du personnel de la Mission pour qu’il puisse collaborer avec la Police nationale d’Haïti (PNH) et a informé que le Japon apportera une aide d’environ 14 millions de dollars comprenant, notamment, la fourniture de matériel à la PNH.  Ces efforts doivent néanmoins s’inscrire dans la durée, a-t-elle exhorté, espérant qu’ils permettront déjà de renforcer les capacités politiques d’Haïti et les capacités d’action de la PNH.  Les progrès sur la voie de la stabilité politique doivent également aller de pair avec une sécurité pérenne, a-t-elle estimé, demandant des informations sur les projets, les cadres d’élaboration, les calendriers et les structures institutionnelles prévus en vue d’élections futures.  Appelant les dirigeants haïtiens à continuer leurs travaux dans cette voie, elle a félicité les initiatives du pays, ainsi que la collaboration étroite des États-Unis et des pays de la CARICOM, afin de dégager un consensus politique. 

La représentante de la France a réitéré le soutien de son pays au déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité, qui doit être effectif le plus rapidement possible, et en adéquation avec les standards des Nations Unies.  « C’est dans ce but que la France a apporté une contribution de 3 millions d’euros au fonds fiduciaire dédié, ainsi que 850 000 euros destinés à la formation en français et en créole des policiers de la Mission multinationale. »  L’établissement d’un régime de sanctions de ce Conseil relatif à Haïti doit également contribuer à endiguer l’action de ceux qui déstabilisent le pays, a dit la déléguée.  Elle a souhaité que ces sanctions concernent l’ensemble des acteurs qui contribuent à dégrader la situation sécuritaire, notamment ceux qui coopèrent avec les gangs et participent à des trafics illicites.  Seul un dialogue politique inclusif permettra d’apporter une réponse pérenne aux défis que traverse Haïti, a-t-elle estimé en assurant du soutien de la France en vue de la tenue d’élections libres et ouvertes.  Enfin, elle a signalé l’aide humanitaire de 13,5 millions d’euros versés par la France en 2023.

M. JEAN VICTOR GÉNÉUS, Ministre des affaires étrangères d’Haïti, a souhaité que cette séance d’informations du Conseil de sécurité soit la dernière avant le déploiement sur le terrain d’une force multinationale d’appui aux forces de sécurité haïtiennes.  « Le peuple haïtien a assez souffert de la barbarie des gangs armés », a-t-il dit, regrettant que la recherche d’une issue à la crise tarde à atteindre les objectifs visés, malgré le vote « historique » de la résolution 2699 (2023) du Conseil.  Après avoir à nouveau remercié le Kenya d’avoir accepté de prendre le commandement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité en Haïti, le représentant s’est félicité de la tenue, les 14 et 15 décembre derniers, de la conférence de pré-planification entre les délégations du Kenya, des États-Unis, de la Jamaïque et de son pays.  II a également salué l’engagement de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) dans la planification et le pré-déploiement de la Mission. 

Évoquant la situation catastrophique que connaît son pays, particulièrement dans les environs de Port-au-Prince et dans le département de l’Artibonite, le représentant a déclaré que « chaque jour qui passe sans cet appui tant espéré est un jour de trop que nous vivons dans l’enfer des gangs ». À ses yeux, il n’existe aucune différence entre la « bestialité » que subit la population haïtienne et les horreurs et barbaries des guerres et conflits armés ailleurs dans le monde.  De fait, « la solidarité manifestée envers certaines populations doit être la même pour tous », a-t-il plaidé, rappelant qu’en 2023, plus de 5 000 personnes ont été tuées, soit plus d’une dizaine par jour.  Il a aussi fait état de 1 432 blessés, 2 951 personnes enlevées et 37 policiers assassinés, des chiffres vraisemblablement en dessous de la réalité selon lui, ajoutant que cette situation a provoqué le déplacement de plus de 200 000 personnes qui ont fui leurs zones et leurs habitations souvent incendiées par les gangs.  Préoccupés par l’arrivée imminente de la Mission sur le terrain, ces derniers s’affrontent pour augmenter leur emprise sur de nouvelles zones géographiques, a-t-il encore indiqué. 

Alors que le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a lui-même appelé au déploiement sans délai de la Mission, le représentant a jugé urgent que, conformément à la résolution 2700 (2023), qui renouvelle le régime de sanctions imposé par la résolution 2653 (2022), les États Membres prennent toutes les dispositions en vue de freiner, sinon tarir, les flux d’armes et de munitions qui alimentent l’arsenal des gangs.  Il s’est félicité à cet égard de l’appui des États-Unis dans la mise en place de l’unité d’enquête criminelle transnationale en Haïti.  Quant au dialogue politique instauré dans le pays, il a reconnu que des acteurs tardent encore à trouver un accord consensuel minimal sur la formation d’un gouvernement d’unité nationale.  Il a néanmoins salué le travail effectué jusqu’alors par le Groupe de personnalités éminentes de la CARICOM et a invité la communauté internationale à soutenir ce processus interhaïtien.

M. ROBERTO ÁLVAREZ GIL, Ministre des affaires étrangères de la République dominicaine, a exprimé sa profonde inquiétude face à la crise humanitaire et sécuritaire en Haïti, soulignant les répercussions désastreuses sur la population civile et la sécurité régionale.  Espérant le déploiement rapide de la MMAS, autorisée par la résolution 2699 d’octobre 2023, il a prévenu que chaque jour de retard permet aux organisations criminelles de renforcer leur emprise sur le pays.  Il a remercié le Kenya et les pays de la CARICOM pour leur engagement dans la Mission, appelant toutes les parties prenantes à lui fournir rapidement les ressources et le soutien financier nécessaires.  Il a également insisté sur l’importance de la participation active et constructive du Gouvernement haïtien ainsi que de sa population, en particulier des élites, pour le succès de cette mission. 

Pointant du doigt la lenteur dans la mise en œuvre de la résolution 2653 (2023), qui vise à désigner les individus ou organisations qui financent les bandes criminelles en Haïti, le Ministre a souligné l’urgence de combattre l’impunité et l’influence croissante de ces groupes.  Par ailleurs, il a mis en lumière les avancées dans la stabilisation d’Haïti, reconnaissant les efforts du BINUH et du Groupe de personnalités éminentes de la CARICOM pour faciliter le dialogue politique.

Le Ministre a également insisté sur la nécessité de lutter contre le trafic illicite d’armes en Haïti, mentionnant les efforts de la République dominicaine pour endiguer ce fléau, et niant fermement les allégations selon lesquelles son pays serait un point de transit pour ce trafic.  Il a ainsi évoqué la coopération de la République dominicaine avec les autorités haïtiennes en matière de sécurité portuaire et de fourniture de carburant pour maintenir certaines opérations essentielles en Haïti. En outre, il a critiqué certains acteurs politiques en Haïti, les accusant de se présenter comme des sauveurs alors qu’ils exacerbent la crise politique.  Dans la mesure où cette situation chaotique affecte sérieusement les relations bilatérales entre Haïti et la République dominicaine, le Ministre a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur de la stabilité.

La représentante de Sainte-Lucie, au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a souligné que les retards dans le déploiement de la MMAS sapent les perspectives de retour de la sécurité en Haïti.  Elle a exhorté les États Membres à appuyer les préparatifs en vue du déploiement de la Mission, avant de souligner le lien entre situation sécuritaire et situation politique et le cercle vicieux dans lequel le pays se trouve.  L’absence d’un cadre politique robuste fait le lit des gangs, tandis que l’insécurité dans le pays entrave les progrès politiques.  Il doit être remédié à ces deux situations de manière pareillement robuste, a-t-elle dit. 

Elle a indiqué que lors de la dernière visite du Groupe de personnalités éminentes en Haïti, les parties prenantes ont pu trouver un consensus sur plusieurs aspects du projet de cadre proposé.  Pour démontrer qu’elles sont prêtes à entamer la phase finale des négociations, les parties prenantes doivent maintenir leur engagement, notamment par le biais de discussions informelles soutenues, a estimé la représentante qui a apporté son soutien à un processus dirigé par les Haïtiens, axé sur des résultats, en vue de faire de la paix une réalité. 

Le représentant du Kenya a estimé que les efforts déployés dans le cadre de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) doivent compléter, et non remplacer, les initiatives du peuple et du Gouvernement haïtiens, en servant de point focal à la société civile et aux Nations Unies.  Le Kenya étant à la tête de la Mission, le délégué a fait état des progrès réalisés en vue de son déploiement en saluant tout d’abord les contributions nationales en matière de fonds, d’équipements et de personnel.  Si le processus administratif et juridique de déploiement de la Mission est entamé, le représentant a expliqué attendre qu’un jugement soit rendu dans le procès intenté par un citoyen sur la légalité du déploiement de la police kenyane en Haïti.  Nonobstant, son pays a entrepris des missions d’évaluation en Haïti, en collaboration avec les autorités et les partenaires, afin de comprendre le contexte sur place, a-t-il signalé en précisant qu’il coopère avec la CARICOM.  Il a également fait état de la préparation de documents pour guider les opérations, tels qu’un code de conduite et de discipline et un accord d’usage de la force.  La sélection, la vérification et la formation du personnel de la Mission a également commencé, a-t-il assuré ajoutant que des mécanismes d’évaluation des risques et de supervision sont en développement, en consultation avec les agences spécialisées de l’ONU.

Le délégué a appelé la communauté internationale à soutenir la Mission, financièrement et logistiquement, signalant la préparation d’une conférence pour mobiliser des fonds.  Si le lancement de la Mission est une étape essentielle, son succès dépendra d’un soutien multisectoriel de la part des programmes et agences spécialisées de l’ONU et d’autres acteurs pertinents, a-t-il prévenu.  Il a recommandé d’aligner ce soutien sur les besoins effectifs et les capacités haïtiennes.  L’expérience des Nations Unies en matière d’aide humanitaire et de développement de la paix doit être mise à profit pour fournir des moyens de subsistance, répondre à la violence sexuelle et développer des réformes pénales, a-t-il estimé.  Il a salué par ailleurs les sanctions du Conseil de sécurité pour freiner la prolifération des armes dans le pays.  Le succès de la Mission dépendra du soutien multinational et régional, des réformes sociopolitiques et économiques, et de la réduction du trafic d’armes et de drogues, a-t-il résumé en conclusion.  

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