Quatrième Commission: la « campagne de désinformation » lancée par Israël contre l’UNRWA sous le feu des critiques
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Les délégations qui se sont exprimées ce matin devant la Quatrième Commission, chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation, ont dénoncé la « campagne de désinformation » menée par Israël contre l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) ainsi que la législation adoptée récemment par la Knesset afin de mettre un terme à ses activités.
Présidente du Groupe de travail sur le financement de l’UNRWA, la Türkiye a dénoncé l’aggravation de la situation financière déjà précaire de l’Office du fait de cette « campagne de diffamation », jugeant inacceptable qu’une institution de l’ONU soit soumise à des mesures arbitraires motivées par des raisons politiques. Ces mesures violent selon elle les obligations juridiques internationales d’Israël, dont les mesures conservatoires ordonnées par la Cour internationale de Justice (CIJ) concernant la prévention du génocide de la population gazaouite.
La République arabe syrienne a réaffirmé sa solidarité avec l’UNRWA face à cette campagne de désinformation et aux tentatives d’Israël de « liquider » la question palestinienne, lesquelles s’incarnent aujourd’hui dans « l’agression barbare », les crimes et les déplacements forcés perpétrés au vu et au su de tous à Gaza ainsi que dans les pays de la région, dont la Syrie.
Comme l’ont clairement affirmé tant le Bureau des services de contrôle interne (BSCI) que le rapport Colonna, les mensonges « extrémistes » proférés par la délégation israélienne à l’encontre de l’UNRWA sont dénuées de tout fondement, selon la Jordanie, ce rapport indiquant au contraire que l’Office jouit d’un niveau élevé de neutralité par rapport à d’autres entités onusiennes.
Pour Bahreïn, les conclusions du groupe d’examen indépendant chargé d’évaluer la neutralité de l’UNRWA, dont est issu le rapport Colonna, constituent plutôt un « certificat international » délivré par l’ONU aux pays donateurs pour qu’ils continuent de s’acquitter de leurs obligations financières et humanitaires en appui à l’Office et au peuple palestinien.
Les mesures adoptées par l’Office pour garantir la transparence de ses opérations permettent, selon l’Inde, d’assurer le respect des normes de l’Organisation en matière de services humanitaires, services dont le peuple de Palestine a désespérément besoin. L’Allemagne a néanmoins souhaité que l’UNRWA engage des réformes destinées à mettre en œuvre les recommandations du rapport Colonna.
Devant ces critiques, Israël a rappelé ses demandes de longue date à l’ONU pour qu’elle fasse cesser les abus commis par le Hamas au sein de l’UNRWA à Gaza. L’ampleur de l’infiltration de l’Office par les terroristes du Hamas n’a d’égal, selon lui, que l’échec de l’UNRWA à défendre les valeurs de neutralité et de responsabilité. Un échec qu’a mis en lumière le massacre du 7 octobre, auquel ont pris part des employés de l’Office. Des données partagées avec le BSCI confirment d’ailleurs l’implication de terroristes au sein de l’organigramme de l’UNRWA concernant plus de 100 membres du personnel qui se livraient à des atrocités, selon la délégation israélienne.
À Gaza, 32 installations de l’UNRWA ont été utilisées par le Hamas, selon Israël, une infiltration qui compromet l’intégrité des efforts humanitaires ainsi que la sécurité de personnes innocentes, sans que ces violations du principe de neutralité aient fait l’objet d’une enquête. Bien qu’Israël soit déterminé à appuyer des efforts humanitaires « véritables », « nous n’accepterons pas que l’aide passe par une organisation complice d’actes de terrorisme », a martelé la délégation, en ajoutant que des centaines de terroristes sont toujours à l’emploi de l’UNRWA aujourd’hui.
En cette période de crise pour l’Office comme pour le peuple palestinien, le Japon a réitéré sa profonde inquiétude face à la législation adoptée par le Parlement israélien. Il a exhorté les autorités de ce pays à maintenir un environnement dans lequel l’Office pourra continuer d’apporter son aide humanitaire vitale. Si elle venait à être appliquée, cette loi imposerait de sévères restrictions aux activités de l’UNRWA et entraînerait le déracinement de millions de réfugiés palestiniens, a prévenu la délégation nippone. « Pour la population de Gaza, c’est une question de vie ou de mort. »
La Chine a demandé la révocation de cette loi inique, adoptée en violation de la Charte des Nations Unies et des obligations qui incombent à Israël en vertu du droit international, en arguant que ce texte ne mènerait qu’à davantage de souffrances pour le peuple palestinien et à rendre plus distante encore la perspective de la solution des deux États.
Si rien ne saurait justifier les attentats du 7 octobre 2023, il n’existe aucune justification du « châtiment collectif monstrueux » infligé au peuple palestinien qui a fait plus de 43 000 victimes, a relevé la Fédération de Russie. Des actes qui s’accompagnent d’une campagne de désinformation à grande échelle contre l’UNRWA afin de « forcer » les donateurs à lui refuser leur soutien. Pour Moscou, le Gouvernement israélien n’a fourni aucune preuve convaincante de l’implication de l’Office dans cette attaque. S’agissant de la législation adoptée par la Knesset, la délégation russe s’est indignée que l’État hébreu, fort de l’appui inconditionnel des États-Unis, continue d’ignorer la position de la communauté internationale.
Oman a décelé dans ces derniers développements une politique « claire » de la part d’Israël visant à faire disparaître les souffrances endurées par le peuple palestinien et à abolir ses droits, en marginalisant tout effort international en faveur de la solution des deux États et en perpétuant les conflits dans la région. Or, a-t-il prédit, cette politique échouera tant que la communauté internationale continuera d’y faire obstacle en appuyant l’action de l’UNRWA. À cette fin, la délégation omanaise a fait sien l’appel lancé par le Commissaire général de l’UNRWA en faveur de la création d’un organe d’enquête indépendant chargé de déterminer les responsabilités dans les attaques menées contre les organismes de l’ONU et leur personnel.
La suppression de l’immunité et des privilèges diplomatiques de l’Office n’est qu’une mesure de plus visant à affaiblir l’Organisation, a fait valoir l’Afrique du Sud. « Nous devons prendre position contre ces mesures draconiennes d’Israël car ce ne sont pas seulement les Palestiniens et l’UNRWA qui sont attaqués, mais l’ONU elle-même et le caractère sacré de l’action multilatérale. » Au lieu de paralyser l’Office, comme Israël cherche à le faire, il faut le soutenir davantage, a ajouté la délégation sud-africaine, en évoquant les racines profondes de l’UNRWA dans la région.
Dans cette optique, l’Iraq a rejeté les pratiques de la Puissance occupante ciblant les organisations de secours et d’aide humanitaire, les assimilant à un génocide et à un châtiment collectif à l’encontre du peuple palestinien. « Le fait que cette tragédie se poursuive à ce jour et que l’UNRWA et d’autres membres du personnel de l’ONU continuent d’être victimes de tels actes ne peut être toléré », a dit le Japon.
Malgré le rôle essentiel que joue l’UNRWA dans la stabilisation de la région, les Maldives ont déploré qu’il demeure confronté à une grave crise de financement qui menace le bien-être des 5,9 millions de réfugiés palestiniens. À ses yeux, la crise humanitaire sans précédent qui sévit à Gaza est le reflet de l’échec collectif de la communauté internationale à prévenir les atrocités de masse et à faire respecter les principes consacrés par la Charte.
Un constat que partage l’Algérie, devant l’incapacité de la communauté internationale à assumer pleinement sa responsabilité envers un peuple qui refuse de vivre sous le joug de l’occupation. Dans l’attente de l’avènement d’une paix juste et durable, la Jordanie, comme le Canada, a fait du soutien à l’UNRWA un investissement dans la stabilité, la sécurité et l’avenir du Moyen-Orient dans son ensemble.
L’Arabie saoudite, au nom du Groupe des États arabes, l’État de Palestine, Israël, la République arabe syrienne et la Jordanie ont exercé leur droit de réponse.
La Quatrième Commission terminera son débat général sur l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient demain, vendredi 15 novembre 2024, à compter de 10 heures.
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