Première Commission: les armes légères et de petit calibre dominent le début de l’examen du chapitre « armes classiques » du débat thématique
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La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a entamé ce matin l’examen du chapitre de son débat thématique consacré aux « armes classiques » après avoir achevé celui consacré aux « autres armes de destruction massive ». Les délégations ont amplement débattu de la lutte contre le trafic illicite des armes légères et de petit calibre (ALPC), évoquant également les mines antipersonnel et les systèmes d’armes létaux autonomes.
La Présidente de la Première Commission a lancé le débat sur les armes classiques en sa qualité de Présidente de la quatrième Conférence des Nations Unies chargée d’examiner les progrès accomplis dans l'exécution du Programme d'action en vue de prévenir, combattre et éliminer le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects (RevCon4), tenue à New York du 18 au 28 juin dernier. Chaque jour, a relevé Mme Maritza Chan Valverde, près de 700 vies sont perdues à cause des ALPC, de jeunes hommes pour la plupart. Le Programme d’action est plus pertinent encore alors que nous célébrons le cinquantième anniversaire du mandat sur les violences sexuelles en lien avec les conflits, a-t-elle estimé, relevant qu’entre 70% et 90% des cas de violences sexuelles liées aux conflits impliquent des armes légères.
ALPC: les délégations saluent le succès de la RevCon4
Détaillant les résultats clefs de la RevCon4, Mme Chan Valverde a évoqué la création d’un groupe d’experts à composition non limitée pour élaborer des recommandations sur les développements technologiques en lien avec les ALPC, mais aussi des mesures de renforcement de la coopération et de l’assistance internationales, de nouvelles mesures pour prévenir le détournement des ALPC et des engagements en faveur de l’intégration des questions de genre et de la jeunesse. Dans ce cadre, elle a lancé un appel aux États Membres pour collaborer à la mise en place du groupe d’experts.
La Présidente de la quatrième Conférence d’examen s’est aussi félicitée de l’obtention d’un consensus, « non sans difficulté », dans un contexte ardu, où les priorités des États Membres sont divergentes. Ce succès a été souligné par plusieurs délégations, dont le Nigéria, qui s’exprimait au nom du Groupe des États d'Afrique. Ce dernier a lancé un appel à la mise en œuvre des recommandations émises au terme de la Conférence, tout particulièrement le renforcement de la coopération internationale, l’assistance technique et financière, le renforcement des capacités et la création d’un programme de bourses dédiées aux ALPC pour les pays en développement.
Rappelant que l’Afrique est en première ligne du commerce illicite des ALPC, le délégué nigérian a rappelé que ces armes sont produites principalement en dehors du continent, avant d’être acquises par des groupes non autorisés. Dans ce cadre, il a préconisé la mise en place d’un mécanisme de contrôle sur la propriété privée des ALPC, notamment à travers l’obligation pour tous les États de contrôler que la possession de ces armes soit restreinte au gouvernement ou à des entités dûment autorisées, mais aussi en appliquant des restrictions juridiques pour en prévenir le commerce illicite.
D’autres délégations ont évoqué les risques de prolifération d’ALPC que font planer certaines avancées technologiques. Au nom de la Communauté des pays de langue portugaise, Cabo Verde a ainsi mentionné l’impression 3D des armes à feu. La déléguée a relevé que cette technologie permet à quiconque de produire ses propres armes en contournant les systèmes de licences et de contrôle, un défi de taille pour la sécurité publique.
Le Groupe des États arabes, par la voix de la Mauritanie, et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), par celle du Cambodge, ont toutefois attiré l’attention sur le fait que l’application d’instruments internationaux –dont le Programme d’action sur les armes légères– doit respecter le droit des États à la légitime défense, conformément à la Charte des Nations Unies. Et donc leur droit souverain à acquérir des armes. La Mauritanie a aussi souligné le lien entre la lutte contre le flux illicite des ALPC et la réalisation du développement durable, un lien explicité dans le libellé de l’objectif de développement durable no 16.4.
La représentante d’Israël a rappelé les attaques du 7 octobre 2023, qui ont déclenché une guerre au Moyen-Orient toujours en cours. Voilà ce qu’entraînent la prolifération et l’acquisition d’ALPC par des terroristes, a-t-elle averti. À propos du Programme d’action, dont elle a salué l’importance, elle a indiqué qu’Israël avait présenté son rapport national en tant que partie contractante responsable. La communauté internationale doit agir dès à présent pour annuler le risque de détournement des armes classiques vers des groupes terroristes, ce péril ne menaçant pas simplement le Moyen-Orient mais le monde entier, a-t-elle ajouté.
Mines antipersonnel: alarme en Ukraine
D’autres délégations ont insisté sur le problème du déminage, dont le Cambodge au nom de l’ASEAN. Cette organisation régionale a déployé un centre de déminage, qui joue un rôle important dans la lutte contre les restes explosifs de guerre et la sensibilisation aux dangers dans les communautés concernées, s’est félicité le délégué. À ce titre, il a dit attendre avec intérêt la cinquième conférence d’examen de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, fin novembre.
Pour sa part, l’Union européenne a réitéré son engagement en faveur de l’interdiction universelle des mines antipersonnel, sa déléguée s’alarmant de leur utilisation par la Russie en Ukraine, qui fait de ce dernier le pays le plus contaminé par ce type d’armes au monde. Elle a également cité de nouveaux lieux de contamination –Iraq, Libye, Syrie, Myanmar et pays du Sahel– appelant tous les acteurs, étatiques et non étatiques, à s’abstenir de produire, stocker ou faire commerce de ces mines. Elle a enfin évoqué les répercussions humanitaires de l’usage de mines autres que les mines antipersonnel, se félicitant à ce titre de l’adoption de la déclaration politique visant à réduire les répercussions sur les civils, à l’initiative de l’Irlande.
La Suisse a, quant à elle, appelé à l’universalisation de la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, rappelant avoir accueilli la « Ukraine Mine Action Conference » la semaine dernière à Lausanne. Son délégué a également déploré qu’un État partie se soit retiré de la Convention sur les armes à sous-munitions, « un instrument qui a prouvé son impact humanitaire positif ». Plusieurs délégations ont appelé cet État –la Lituanie, qui s’était justifiée lors du débat général– à revenir dans la Convention.
Systèmes d’armes létaux autonomes et drones armés
L’Indonésie, au nom du Mouvement des pays non alignés (MNA), a souligné les questions éthiques, juridiques, humanitaires, morales et technologiques soulevées par les systèmes d’armes létaux autonomes (SALA). Les pays de son groupe « plaident pour de nouvelles dispositions juridiquement contraignantes afin de répondre aux défis humanitaires et de sécurité internationale posés par les technologies émergentes dans le domaine des SALA », a signalé la représentante. Par ailleurs, le MNA réaffirme que le droit international humanitaire continue de s’appliquer pleinement à tous les systèmes d’armes, y compris les SALA. Sur ces mêmes armes, la Nouvelle-Zélande, en tant que principale autrice du texte, a indiqué qu’elle présentera le projet de résolution intitulé « Systèmes d’armes létaux autonomes », un document qui souligne les risques et les défis qu’ils posent à tous les membres de l’ONU. La Nouvelle-Zélande, par ce texte, appelle à la poursuite des discussions sur les SALA dans un cadre global et inclusif.
Un autre type d’armement « émergent » a commencé de susciter des interrogations sur ses conséquences humanitaires et ses enjeux éthiques: les drones armés. Constant que ces derniers ont « nettement modifié la dynamique de la guerre et continuent à proliférer car les technologies sont facilement accessibles », un groupe d’États emmené par le Portugal a proposé la création au sein de la Première Commission d’un espace de discussion qui permettrait d’échanger avec les États mais aussi les organisations régionales, la société civile, le milieu universitaire, les entreprises et autres parties pertinentes. Comme ils l’ont rappelé, il n’existe pas actuellement de volet de discussions dédié à cette question dans les organes de désarmement de l’ONU, mêmes si des rapports ont été publiés par le Bureau des affaires de désarmement, notamment en 2015 et 2017, lesquels ont besoin d’être actualisés.
Fin du débat sur les « autres armes de destruction massive »
Avant d’examiner les questions liées aux armes classiques, la Première Commission a achevé ses discussions sur les autres armes de destruction massive. Soulignant les risques que ce type d’armes ne finisse entre les mains d’organisations terroristes, l’Inde a indiqué être dotée d’un système de contrôle national robuste des matières sensibles, la législation du pays en matière de sécurité ayant intégré de longue date les dispositions de la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité sur la prévention de la prolifération des armes de destruction massive. Le représentant a jugé important que le mandat de cette résolution soit prorogé pour faire aux défis contemporains dans le domaine de la lutte contre le terrorisme sur le plan régional. Il a annoncé que sa délégation déposerait un projet de résolution demandant des mesures supplémentaires pour empêcher les terroristes d’acquérir des armes de destruction massive.
L’Inde a aussi plaidé pour la mise en place d’un financement pérenne de la Convention sur les armes biologiques (CIABT), estimant que celle-ci gagnerait en outre en efficacité si le nombre de réunions et de délibérations qui y sont organisées était plus important. Un appel relayé par Cuba, qui a également assuré que sa politique étrangère s’appuie sur le système multilatéral existant qui interdit ces armes inhumaines. Sa déléguée a par ailleurs appelé à éviter toute politisation des secrétariats techniques des conventions pertinentes et souhaité que la Première Commission renoue avec la pratique du consensus en ce qui concerne l’adoption du principal projet de résolution sur la Convention sur les armes chimiques (CIAC). L’Algérie a lancé le même appel, relevant une polarisation croissante au sein de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et la dépendance croissante au vote plutôt qu’au consensus dans les processus décisionnels. À ce titre, son délégué a estimé symptomatique l’incapacité d’adopter un document commun lors de la dernière Conférence d’examen de la CIAC.
Pays victime de l’utilisation d’armes chimiques sur son territoire, l’Iran a estimé que la mise en œuvre de la CIAC, essentielle, dépend de la capacité des États parties à bénéficier de leur statut de membre. Dans ce cadre, son délégué à lancé un appel à l’abandon des sanctions unilatérales, lesquelles empêchent les pays d’exercer leurs droits au nom de la Convention.
L’Iran a de même déploré le manque d’un mécanisme de vérification de la Convention sur l’interdiction des armes biologiques (CIABT). À ce titre, elle s’est félicitée que la neuvième Conférence d’examen de la CIABT ait abouti à la création d’un groupe de travail en vue de développer des mesures effectives, dont un protocole juridiquement contraignant. Son délégué a émis l’espoir que ces progrès mènent à la création d’un processus de vérification, accusant les États-Unis d’en bloquer le déploiement en vue de se réserver le droit d’user d’armes biologiques, en violation de la Convention. Les problèmes relatifs à l’absence d’un mécanisme de vérification de la CIABT ont également été soulevés par le Myanmar et l’Algérie, cette dernière lançant un appel aux pays membres afin de lancer, dans ce but, un protocole juridiquement contraignant.
La Première Commission poursuivra demain, jeudi 24 octobre, à 10 heures, son débat thématique consacré aux armes classiques.
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