En cours au Siège de l'ONU

9457e séance – après-midi 
CS/15468

Ukraine: à la demande de la Fédération de Russie, le Conseil de sécurité débat à nouveau du transfert d’armes occidentales à l’Ukraine

Réuni une nouvelle fois à la demande de la Fédération de Russie pour discuter des transferts d’armes vers l’Ukraine, le Conseil de sécurité a entendu cet après-midi un exposé du Haut-Représentant adjoint pour les affaires de désarmement, M. Ededji Ebo, ainsi que celui d’un journaliste américain venu rendre compte de ce qu’il a vu lors de ses voyages de terrain à Moscou et dans le Donbass.  Les délégations occidentales ont contesté le bien-fondé de cette réunion, accusant la Fédération de Russie de chercher à faire diversion. 

C’est notamment ce qu’ont déclaré les États-Unis en rappelant que le Kremlin mène une guerre sans merci sur le terrain, et le Royaume-Uni qui a accusé la Russie d’avoir engagé un partenariat militaire avec la République populaire démocratique de Corée (RPDC), un pays lourdement sanctionné.  Le transfert d’armes de la RPDC vers la Russie est « absolument inacceptable », a renchéri le Japon pour qui aucun soutien ne devrait être prêté à un État qui viole le droit international et la Charte des Nations Unies. À « tous les États Membres », le délégué japonais a demandé de s’abstenir de soutenir « directement ou indirectement » l’agression menée par la Russie.

Cette réunion, la deuxième en deux semaines sur ce sujet, ne réussira pas plus que les précédentes à faire accepter une réécriture de l’histoire, a fait remarquer la France pour qui elle ne peut pas faire oublier la responsabilité de la Russie dans le déclenchement du conflit.  Elle ne détournera pas non plus l’attention des frappes conduites par Moscou contre les infrastructures civiles ukrainiennes, en violation du droit international humanitaire, a tancé le délégué français.

M. Ebo a quant à lui expliqué que, depuis sa dernière intervention devant le Conseil, les transferts signalés d’armes et de munitions aux Forces armées ukrainiennes se sont multipliés, selon les informations disponibles auprès de sources ouvertes. On y retrouve des armes classiques lourdes (chars de combat, véhicules blindés de combat, avions de combat, hélicoptères, systèmes d’artillerie de gros calibre, systèmes de missiles et véhicules aériens de combat sans équipage), ainsi que des munitions et des armes légères et de petit calibre.

Le haut fonctionnaire a également partagé des signalements sur des États qui transfèrent ou envisagent de transférer aux forces armées russes des armes telles que des véhicules aériens sans équipage et des munitions, y compris en vue d’une éventuelle utilisation en Ukraine. Il a réaffirmé, avec force, que tout transfert d’armes doit avoir lieu dans le cadre juridique international applicable, y compris les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. M. Ebo s’est aussi inquiété des informations relatives à l’utilisation de mines terrestres antipersonnel ainsi qu’à l’utilisation et au transfert d’armes à sous-munitions en Ukraine.  Selon les chiffres du Haut-Commissariat aux droits de l’homme, entre le début de la guerre, le 24 février 2022, et le 8 octobre 2023, environ 27 768 victimes civiles avaient été comptabilisées en Ukraine, dont 9 806 morts et 17 962 blessés.  La grande majorité des victimes civiles ont été touchées par des engins explosifs à large rayon d’action (des tirs d’artillerie, de chars et de lance-roquettes multiples, des missiles de croisière et balistiques et des frappes aériennes).

Le représentant de la Fédération de Russie, au début de son long discours, a montré aux membres du Conseil plusieurs fragments de munitions d’origine occidentale, dont l’une présentée comme étant de fabrication française.  Découvertes le 16 septembre 2022 sur un théâtre de frappes dans la région de Kherson, ces munitions avaient fait de nombreuses victimes civiles, a-t-il déploré. 

Le journaliste américain, M. Randy Credico, a lui aussi fait part de ce qu’il a vu lorsqu’il s’est rendu dans le Donbass, à Rostov et à Marioupol: une université frappée deux fois dans la même journée, ainsi qu’un marché aux fleurs et une église orthodoxe, par un missile américain de type HIMARS livré à l’Ukraine.

Washington s’oriente délibérément vers une escalade du conflit, a alors accusé le représentant russe, ajoutant que les Américains et leurs alliés ne veulent pas de la paix en Ukraine.  Le « régime de Kiev leur est un outil » pour affaiblir la Russie, a-t-il dit.

De plus, la corruption a rongé toute la société ukrainienne: entre 15 et 20% de tous les produits militaires reçus par Kiev au cours des deux à trois dernières semaines étaient destinés aux marchés « gris » et « noir », a poursuivi le délégué russe.  Il a encore affirmé que des structures intermédiaires, notamment européennes, organisent la livraison, via la République de Moldova et les Balkans, aux principaux consommateurs que sont les groupes terroristes et antigouvernementaux du Moyen-Orient, d’Afrique centrale et d’autres régions du monde.  Tous les médias locaux en parlent ouvertement et seuls les « parrains occidentaux » de Kiev ne veulent pas le voir, s’est impatienté le représentant.

D’autres membres du Conseil se sont déclarés inquiets des conséquences de ces transferts d’armes aux parties belligérantes.  Cela suscite bien des inquiétudes, a exprimé le Mozambique, tandis que le Ghana soulignait le risque de les voir exploitées par des individus mal intentionnés.  La seule manière de renverser la tendance est d’arrêter la guerre, a plaidé la représentante du Gabon.  L’Équateur a abondé en appelant la Fédération de Russie à œuvrer à l’instauration d’un cessez-le-feu, afin de parvenir à une paix juste et durable en Ukraine.

Les Émirats arabes unis ont également mis en garde contre les risques majeurs posés par ces transferts d’armes, notamment de détournement. Leur délégation a encouragé à prendre les mesures adéquates pour les atténuer, par le biais de la coopération, du partage d’informations et de pratiques optimales.  Toutes les parties devraient agir en toute transparence et s’abstenir de toute transaction susceptible de constituer une violation des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, a conclu le Brésil.

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations

M. EDEDJI EBO, Haut-Représentant adjoint et Directeur du Bureau des affaires de désarmement, a fait remarquer que, depuis son dernier exposé devant le Conseil il y a deux semaines, la fourniture d’une assistance militaire aux Forces armées ukrainiennes s’est poursuivie dans le contexte de l’invasion à grande échelle de ce pays, lancée par la Fédération de Russie le 24 février 2022, en violation de la Charte des Nations Unies et du droit international, et que les transferts signalés d’armes et de munitions aux Forces armées ukrainiennes se sont multipliés.  Une grande partie de l’information sur les transferts de systèmes d’armes et de munitions par les gouvernements est disponible par le biais de sources ouvertes, a-t-il indiqué, en détaillant les armes ainsi livrées: des armes classiques lourdes (chars de combat, véhicules blindés de combat, avions de combat, hélicoptères, systèmes d’artillerie de gros calibre, systèmes de missiles et véhicules aériens de combat sans équipage), ainsi que des munitions et des armes légères et de petit calibre.

M. Ebo a aussi pris note des informations relatives au transfert de munitions à l’uranium appauvri pour des chars, aux Forces armées ukrainiennes.  Il a également partagé des signalements sur des États qui transfèrent ou envisagent de transférer aux Forces armées russes des armes telles que des véhicules aériens sans équipage et des munitions, y compris en vue d’une éventuelle utilisation en Ukraine.  Il a réaffirmé, avec force, qu’il faut que tout transfert d’armes ait lieu dans le cadre juridique international applicable, y compris les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.

Il s’est ensuite inquiété des informations relatives à l’utilisation de mines terrestres antipersonnel ainsi qu’à l’utilisation et au transfert d’armes à sous-munitions en Ukraine.  Selon certains rapports, a-t-il expliqué, de grandes superficies de terres ont été contaminées par des restes explosifs de guerre de différents types.  Le processus de cartographie de cette contamination et de déblaiement des terres en toute sécurité sera long et nécessitera des ressources et le soutien de la communauté internationale, a-t-il prévenu. « J’appelle à la fin immédiate de l’utilisation de ces armes aveugles et horribles, qui ont un impact durable et dévastateur sur des civils innocents longtemps après la fin des conflits. »

Le Directeur du Bureau des affaires de désarmement a demandé à tous les États qui ne l’ont pas encore fait d’envisager d’urgence d’adhérer à la Convention sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, ainsi qu’à la Convention sur les armes à sous-munitions.  Il a réitéré son appel à toutes les parties concernées pour qu’elles respectent leurs obligations en vertu de la Convention sur l’interdiction ou la limitation de l’emploi de certaines armes classiques qui peuvent être considérées comme produisant des effets traumatiques excessifs, ou comme frappant sans discrimination, et qu’elles ne transfèrent ni n’utilisent aucune mine interdite par son Protocole II modifié.

La fourniture d’armes et de munitions dans toute situation de conflit armé suscite de vives inquiétudes quant à l’escalade potentielle de la violence et aux risques de détournement, a-t-il fait savoir, ajoutant que les mesures visant à contrecarrer le détournement potentiel d’armes et de munitions seront essentielles au relèvement après un conflit, et essentielles à la sécurité et à la stabilité régionales, ainsi qu’à la prévention des conflits dans d’autres régions.

Il a réitéré l’appel du Secrétaire général dans le « Nouvel Agenda pour la paix », exhortant les États Membres à prendre des mesures concrètes pour relever les défis liés au détournement aux niveaux régional, sous-régional et national.  La prévention des flux illicites d’armes et des détournements d’armes, comme le stipule la cible 6.4 des objectifs de développement durable, ne peut être efficace que lorsqu’elle est réalisée par une coopération et une coordination solides de la part de la communauté internationale, a-t-il insisté.

La transparence en matière d’armement est une mesure de confiance fondamentale susceptible de contribuer à la réduction des tensions et aux ambiguïtés entre États, a encore voulu souligner M. Ebo, qui a ensuite exhorté les États à utiliser divers instruments onusiens pour accroître la transparence, tels que le Registre des armes classiques des Nations Unies, et à empêcher le détournement par le biais d’instruments tels que le Traité sur le commerce des armes, le Protocole sur les armes à feu, le Programme d’action sur les armes légères et de petit calibre et son Instrument international de traçage.

Il a en outre dit attendre l’approbation par l’Assemblée générale du Cadre mondial pour la gestion des munitions classiques tout au long de leur cycle de vie et de son opérationnalisation pour lutter contre le détournement de munitions classiques de tous types, du petit calibre au plus gros calibre.

Le Haut-Représentant adjoint a ensuite indiqué que, du 24 février 2022 au 8 octobre 2023, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme a enregistré 27 768 victimes civiles en Ukraine, dont 9 806 morts et 17 962 blessés, soulignant que les chiffres réels sont probablement beaucoup plus élevés.  La grande majorité des victimes civiles ont été touchées par des engins explosifs à large rayon d’action, notamment par des tirs d’artillerie, de chars et de lance-roquettes multiples, des missiles de croisière et balistiques et des frappes aériennes.  L’utilisation de drones armés contre des civils et des infrastructures civiles n’a pas cessé, a enfin déclaré M. Ebo, qui a rappelé que de telles armes ne doivent pas être utilisées d’une manière contraire au droit international humanitaire.

Toutes ces attaques doivent cesser immédiatement, a-t-il martelé.  Il a conclu, en redisant que l’ONU est bien décidée à appuyer tous les efforts réels déployés pour ramener une paix durable en Ukraine.

M. RANDY CREDICO, qui s’est présenté comme un satiriste politique, imitateur, comédien et journaliste de la radio WBAI, a déclaré se sentir en sécurité aux Nations Unies, mais que ce ne sera plus le cas une fois qu’il sera sorti du bâtiment. « Mon nom a été ajouté, il y a cinq mois, à une liste noire d’assassinats, après mon séjour dans le Donbass. »  S’adressant aux membres du Conseil, il leur a demandé s’ils avaient lu, dans le journal The Washington Post, un récent article relatant que 22 personnes inscrites sur cette liste par les autorités ukrainiennes avaient été liquidées, dont une fille de 14 ans.  S’adressant cette fois au Gouvernement américain, il a déclaré: « Vous savez ce qu’il se passe et pouvez l’arrêter. »

L’orateur a ensuite dénoncé la désinformation et la russophobie qui frappent les médias, alimentées par la Central Intelligence Agency (CIA), le Pentagone et la Maison-Blanche.  Il a expliqué qu’il s’était rendu à Moscou, dans le cadre de son travail de journaliste, pour vérifier les informations relayées par la presse occidentale.  Il a dit avoir constaté que, contrairement à ce qui est écrit dans la presse occidentale, l’économie ne s’est pas effondrée, mais qu’au contraire, les étals des supermarchés sont pleins et les gens attablés aux terrasses de cafés.  Par la suite, avec un journaliste français et un interprète, il s’est rendu dans le Donbass, à Rostov, a-t-il encore informé.

La première journée sur place, il a visité une université qui venait d’être frappée à deux reprises par un missile américain de type HIMARS.  Le même jour, un marché aux fleurs a lui aussi été touché par ces mêmes missiles, tuant de très nombreuses personnes, dont des vieilles femmes. Une église orthodoxe a connu le même sort, a-t-il encore rapporté.  À Marioupol, il a dit avoir vu les importants dégâts causés par les fanatiques du bataillon Azov, qui se comportent de manière brutale en tirant des tirs de missiles sur les civils et les zones peuplées de civils.

M. Credico a ensuite dit avoir été choqué par les récentes déclarations du Président Joe Biden, de retour de son voyage en Israël.  Selon l’orateur, ce dernier a voulu convaincre le peuple américain et la classe politique de continuer de livrer des armes à l’Ukraine, au motif que cela créerait des emplois.  « Mais comment osez-vous utiliser le conflit de Gaza pour demander plus de livraisons d’armes vers l’Ukraine et quelles sortes d’emplois créez-vous avec des morts civils, Monsieur le Président? »  Concluant, le journaliste a dit abonder dans le sens de l’appel lancé par le Président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva: les États-Unis doivent arrêter de promouvoir la guerre et doivent promouvoir la paix.  La meilleure manière de le faire c’est d’arrêter les transferts d’armes vers l’Ukraine, a-t-il tranché.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a commencé son intervention en brandissant de la main droite plusieurs fragments de munitions d’origine occidentale, dont l’une, qu’il a décrite de fabrication française, découverte sur un théâtre de frappes dans la région de Kherson, le 16 septembre 2022, ayant fait de nombreuses victimes civiles. Il a interpellé le délégué britannique, lui expliquant qu’il s’agissait d’armes du « régime de Kiev » ayant attaqué des infrastructures civiles, livrées par des armées occidentales. La semaine dernière, a-t-il poursuivi, le « régime de Kiev » a, une fois de plus, démontré qu’il violait délibérément le droit international humanitaire en frappant des cibles recevant de l’aide humanitaire.  Dans la région de Kherson, les Forces armées ukrainiennes ont utilisé des missiles américains pour mener des frappes ciblées contre le bâtiment d’une clinique et d’un hôpital.  « Qu’est-ce là, sinon une volonté de priver les civils de recevoir des soins médicaux d’urgence? », s’est indigné le délégué russe, selon lequel les malades et les blessés devraient se vider de leur sang sans aucune chance de salut à cause du « régime de Kiev ».  Les premières attaques contre les hôpitaux des Forces armées ukrainiennes ont commencé en 2014, a rappelé le délégué, estimant que tout cela est une conséquence tragique de l’introduction massive, en Ukraine, d’armes meurtrières produites par des pays de l’OTAN.  Le délégué a mentionné d’autres frappes, dont certaines avec des munitions équipées de sous-munitions à fragmentation, particulièrement dangereuses pour la population civile.

Washington, a accusé le délégué, s’oriente délibérément vers une escalade du conflit. À ses yeux, les Américains et leurs alliés ne veulent pas de la paix en Ukraine.  Le « régime de Kiev leur est un outil » pour affaiblir la Russie; les guerres leur sont un « investissement » judicieux, puisqu’elles ne se déroulent pas sur leur sol.  Les États-Unis et leurs alliés, depuis au moins 2014, ont donné carte blanche à leurs alliés ukrainiens pour tous ces crimes, a-t-il formulé. Les services secrets ukrainiens sont aussi une « créature américaine », a-t-il dit, en citant des journalistes américains.  « Tout cela, évidemment, ne dérange pas les parrains occidentaux du régime de Kiev », a constaté le délégué.  Il a accusé ces derniers, dans leur « frénésie antirusse », de fermer les yeux sur le fait que leurs protégés, « à la mode de Daech », commettent des attaques terroristes contre des civils, et tout cela par appât du gain.  « Comme toujours avec Washington: certains font la guerre, d’autres s’enrichissent. »

Le représentant a estimé que 15 à 20% de tous les produits militaires reçus par Kiev au cours des deux à trois dernières semaines étaient destinés aux marchés « gris » et « noir », notamment sur le « darknet » - autant dire en accès libre.  Pour une charge de plastique C4, comptez 800 dollars, a détaillé le délégué. Il a affirmé que des structures intermédiaires, notamment européennes, organisent la livraison, via la République de Moldova et les Balkans, aux principaux consommateurs, à savoir les groupes terroristes et antigouvernementaux du Moyen-Orient, d’Afrique centrale et d’autres régions du monde.  La corruption a, selon lui, rongé toute la société ukrainienne: « les médias locaux en parlent ouvertement ».  Seuls les « parrains occidentaux » de Kiev ne veulent pas le voir, pour des raisons évidentes, à son avis: contagieuse, la corruption va « dans les deux sens » et les atteint eux aussi. L’« aventure ukrainienne de l’Occident » entrera dans l’histoire au même titre que celle de l’Afghanistan, de la Syrie ou du Viet Nam, et souilleront de honte ces pays, a-t-il conclu.  Tous ceux prétendant aider de manière désintéressée l’Ukraine, en tant que victime présumée d’une agression non provoquée, auront des comptes à rendre, a-t-il enfin prédit.

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a réitéré que l’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine constitue une grave violation du droit international, réaffirmant aussi le droit de l’Ukraine à assurer sa sécurité et à défendre son intégrité territoriale et sa souveraineté.  La Suisse condamne toutes les violations du droit international humanitaire et des droits humains, a poursuivi le délégué demandant à toutes les parties au conflit d’assurer la protection de la population civile et de respecter les règles relatives à la conduite des hostilités. Il a mis en exergue la nécessité de poursuivre des efforts sérieux pour parvenir à une paix globale, juste et durable en Ukraine, conformément aux principes de la Charte des Nations Unies, ce qui, selon lui, passe par la reddition de comptes.

Intimant une fois de plus la Russie de désescalader la situation, de cesser toutes les opérations de combat et de retirer toutes ses troupes du territoire ukrainien, le représentant lui a rappelé: « La Cour internationale de Justice l’ordonne.  L’Assemblée générale le demande ».  La Suisse attend toutefois que les États respectent leurs obligations relatives aux livraisons d’armes, notamment les résolutions pertinentes de ce Conseil, a-t-il poursuivi, insistant sur le fait que dans une période où l’architecture globale de non-prolifération est déjà sous une pression énorme, cette architecture devrait être renforcée et non affaiblie.  À cet égard, le représentant a regretté que la Russie ait décidé de révoquer sa ratification du Traité d’Interdiction complète des essais nucléaires (TICE).

M. GENG SHUANG (Chine) a constaté que la crise ukrainienne n’a pas diminué en intensité et que la situation sur le terrain reste tendue, avant d’appeler toutes les parties à tout mettre en œuvre pour prévenir la prolifération des armes et de munitions et éviter qu’elles tombent entre les mains de terroristes.  La Chine, qui défend les buts et principes de la Charte des Nations Unies, œuvre à la médiation en vue d’un règlement rapide de la crise, a assuré son représentant.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a noté que pour la deuxième fois en l’espace de deux semaines, la Russie demande une réunion du Conseil, afin de blâmer les livraisons d’armes à l’Ukraine pour la guerre dans ce pays.  Une nouvelle réunion sur ce sujet ne réussira pas plus que les précédentes à faire accepter une telle réécriture de l’histoire, a-t-il retorqué. Pas plus que les précédentes, elle ne fera oublier la responsabilité de la Russie dans le déclenchement de ce conflit. Pas plus que les précédentes, elle ne détournera l’attention des frappes conduites par Moscou contre les infrastructures civiles ukrainiennes, en violation du droit international humanitaire. La Russie persiste depuis plus de 20 mois dans une guerre contraire au droit international, destructrice pour les populations civiles et déstabilisatrice pour la sécurité alimentaire du monde entier, a poursuivi le délégué, et face à cette agression illégale, l’Ukraine dispose, aux yeux de la France, et en vertu de l’Article 51 de la Charte des Nations Unies, du droit de se défendre.  La France, avec ses partenaires, a choisi d’apporter à l’Ukraine un soutien militaire pour l’aider à exercer ce droit et à défendre son intégrité territoriale, sa souveraineté et son indépendance, a expliqué le représentant.  Nous soutenons l’Ukraine dans son droit à la légitime défense, avec pour objectif d’aboutir à l’établissement dans ce pays d’une paix juste et durable, a-t-il conclu.

M. DARREN CAMILLERI (Malte) a déclaré qu’en convoquant une nouvelle réunion aujourd’hui pour discuter du transfert d’armes de l’Occident vers l’Ukraine, la Fédération de Russie continue de déformer cyniquement les faits.  Cette réunion est par ailleurs convoquée dans le contexte où Moscou a décidé de retirer sa ratification du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, compromettant ainsi les efforts internationaux de non-prolifération et de désarmement en cours.  Le représentant a ensuite estimé qu’alors que l’Ukraine a le droit à la légitime défense, droit consacré par l’Article 51 de la Charte des Nations Unies, elle n’a, à aucun moment commis, ni même menacé de commettre, une attaque contre la Russie.  Pendant ce temps, cette dernière continue d’être responsable de violations du droit international humanitaire et des droits humains, comme le montre encore la récente attaque « odieuse » perpétré contre le terminal postal de Nova Poshta, cible de missiles.  Les responsables de ces actes doivent rendre des comptes, a menacé le représentant.

M. FERGUS JOHN ECKERSLEY (Royaume-Uni) a relevé que la Russie a justement passé les deux dernières décennies à bafouer ses obligations en matière de contrôle. Sa politique de « destruction systématique » de l’architecture internationale du contrôle des armes n’a fait que s’accélérer depuis son invasion de l’Ukraine, s’est indigné le délégué.  Le retrait de la Russie du Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe en est la nouvelle preuve, tout comme l’annonce de son retrait de la ratification du Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, entre autres traités et conventions que le délégué a énumérés.

S’agissant de la situation en Ukraine, le fait que la Russie s’approvisionne en armes auprès d’États lourdement sanctionnés, tels que la Corée du Nord et l’Iran, montre son mépris pour la coopération internationale visant à empêcher la prolifération des armes.  Il met en évidence le désespoir et l’isolement de M. Putin sur la scène internationale, a affirmé le représentant.  Il montre la volonté de la Russie de violer les résolutions du Conseil, de saper sa crédibilité et de poser un risque sérieux pour la paix et la sécurité internationales.  La Russie a détruit des écoles, des hôpitaux, des silos à grains et des installations énergétiques.  Son utilisation de mines antipersonnel conventionnelles, ainsi que de pièges improvisés -y compris dans des jouets pour enfants- montre son mépris total pour la vie humaine, a-t-il poursuivi.  À l’inverse, la fourniture d’armes par le Royaume-Uni et d’autres États à l’Ukraine sert à soutenir ce pays dans sa défense de son territoire souverain envahi illégalement par la Russie.  Ces armes ne font pas obstacle à la paix: le seul obstacle à la paix est la Russie, a tranché le délégué britannique.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a mis en garde contre le risque que les armes soient exploitées par des individus mal intentionnés.  Il n’y a pas d’autre solution que de faire la paix en Ukraine, d’où la nécessité de redoubler d’efforts et d’ouvrir de nouveaux canaux de communication pour un dialogue débouchant sur un processus de négociation.  La représentante a soutenu la souveraineté, l’intégrité territoriale et le droit à la légitime défense de l’Ukraine, invitant la Russie à retirer ses troupes et à cesser ses hostilités.

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a déclaré que la fourniture d’armes et de munitions aux parties belligérantes au conflit armé russo-ukrainien, comme dans toute autre situation de conflit armé, suscite de vives inquiétudes quant à la probabilité d’une escalade et d’une dispersion.  Son pays déplore aussi que les normes établies, régissant la guerre, sont de plus en plus ignorées, à mesure que les hostilités militaires se prolongent sans perspective claire de règlement.  Il craint aussi que les parties belligérantes ne se rapprochent du seuil redouté, consistant à appeler leurs alliés respectifs à rejoindre le conflit. Là où vont les armes, les instructeurs et les soldats suivront, a-t-il prédit.

Le représentant a ensuite jugé regrettable que le conflit entre l’Ukraine et la Russie soit une source de division et d’indécision au sein du Conseil.  Le refus d’engager un dialogue et une désescalade a de graves conséquences sur la capacité du Conseil à faire face à de graves calamités humanitaires, au terrorisme et aux prises d’otages dans d’autres régions dangereusement proches d’une nouvelle conflagration, a-t-il analysé. Il a alors appelé les membres à cultiver la confiance et au respect du droit international.  C’est la seule voie durable pour parvenir à une paix et une sécurité durables dans le monde entier et en Ukraine, a-t-il conclu.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a accusé la Fédération de Russie d’utiliser la plateforme du Conseil de sécurité pour faire de la propagande alors même qu’elle se procure des armes de la République islamique d’Iran et de la République populaire démocratique de Corée en violation flagrante des résolutions du Conseil. La Russie essaye de détourner l’attention du Conseil en évoquant des fournitures d’armes à l’Ukraine de l’Occident, s’est emportée la représentante avant de rappeler que c’est la Russie qui est à l’origine de la guerre d’agression en Ukraine et qui fait fi de la Charte des Nations Unies et du droit international.  C’est en raison de cet acte d’agression que la communauté internationale aide l’Ukraine alors que cette dernière s’efforce de se défendre, a-t-elle argué.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a insisté sur la nécessité de renforcer les normes d’enregistrement et de traçabilité des armes et des munitions, ainsi que de mettre en œuvre tout moyen destiné à éviter l’escalade du conflit. Il a insisté sur la nécessité de privilégier la protection des civils, qui doit primer sur toute autre considération. Le délégué a aussi insisté auprès de la Fédération de Russie pour qu’elle œuvre à l’élaboration d’un cessez-le-feu, afin de parvenir à une paix juste et durable en Ukraine.

M. HAMAMOTO YUKIYA (Japon) a remarqué que le Conseil s’est réuni, il y a deux semaines, sur la même question et qu’il se limitera à répéter ce qu’il avait dit lors de cette réunion.  Aucun soutien ne devrait être prêté à un État qui viole le droit international et la Charte des Nations Unies, a-t-il argué, et il serait particulièrement inacceptable qu’un soutien soit apporté en violation des résolutions existantes du Conseil de sécurité.  Tous les États Membres devraient s’abstenir de soutenir directement ou indirectement l’agression de la Russie, a exigé le représentant, et, à cet égard, le transfert d’armes par la Corée du Nord à la Russie est absolument inacceptable.  Un tel transfert ne ferait pas qu’exacerber la crise en Ukraine, a-t-il mis en garde, mais saperait également le régime de non-prolifération auquel la communauté internationale est attachée. Il a rappelé à la Russie que cette guerre a été déclenchée par elle et que si cette dernière est réellement préoccupée des risques posés par l’afflux d’armes, elle devrait immédiatement y mettre fin.

M. JOHN KELLEY (États-Unis) a signalé que cela fait à peine deux semaines que le Conseil de sécurité a examiné cette même question à la demande de la Russie, voyant dans la tenue de cette réunion une nouvelle tentative de diversion alors que le Kremlin mène une guerre sans merci sur le terrain.  La Russie ne souhaite un débat ni sérieux ni factuel et sape la crédibilité du Conseil avec la convocation de séances multiples.  Par ailleurs, ce pays est dans un partenariat militaire avec la République populaire démocratique de Corée (RPDC), qui ne fera que contribuer à tuer et blesser des civils ukrainiens supplémentaires, a déclaré le représentant.  En retour, a-t-il regretté, l’aide de la Russie permettra à Pyongyang de poursuivre ses essais nucléaires.  Le délégué a donc encouragé à œuvrer pour contrer les tentatives russes d’acquérir des armes, appelant la Russie à respecter ses obligations en tant que membre permanent du Conseil.

Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon) a déploré le manque de dialogue et de diplomatie dans la guerre entre l’Ukraine et la Fédération de Russie. Il est pourtant fondamental que les membres du Conseil jouent leur rôle et assument leurs responsabilités dans cet organe, qui est, a-t-elle insisté, le Conseil de sécurité et non un conseil de guerre.  La représentante a également déclaré que le meilleur moyen de renverser la tendance actuelle, qui, selon elle, se manifeste par la conclusion de nouvelles alliances militaires et l’utilisation d’armes de destruction massive comme les armes à sous-munitions, est d’arrêter la guerre.  Elle a aussi exprimé des inquiétudes quant à l’utilisation d’armes léthales téléguidées, insistant sur le danger qu’elles représentent.  Pour cette raison, elle a dit rejoindre l’appel du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) en faveur de l’élaboration de lignes directrices claires et de lignes rouges sur l’utilisation de telles armes dans le contexte de la guerre, dans le plein respect du droit international et du droit international humanitaire.

M. AHMED ABDELRAHMAN AHMED ALI ALMAHMOUD (Émirats arabes unisa réitéré son appui aux efforts visant à atténuer tout risque lié au transfert d’armements vers l’Ukraine, sa région et au-delà.  Il faut garantir la sécurité lors des transferts, du stockage et du déploiement de ces armements, a-t-il insisté.  Les Émirats arabes unis continueront à encourager à la mise en œuvre des mesures adoptées pour cette atténuation, a assuré le délégué. Il a aussi souligné la nécessité d’une surveillance adéquate de la part des autorités nationales, particulièrement en cas de conflit armé.  Il a donc encouragé celles-ci à prendre des mesures pour atténuer ces risques.  Le représentant a aussi salué les initiatives visant à éviter tout risque de détournement des armes, via la coopération, le partage d’informations et de pratiques optimales.

Pour M. NORBERTO MORETTI (Brésil), l’ampleur des transferts d’armes et de munitions vers l’Ukraine pourrait laisser un terrible héritage aux générations actuelles et futures.  Gravement préoccupé par l’impact à long terme de la dissémination de mines terrestres dans de vastes portions du territoire ukrainien, ainsi que par les risques de détournement d’armes et de munitions au profit de criminels et de groupes terroristes, le représentant a encouragé les parties à adopter, dans la mesure du possible, des mesures visant à empêcher ce scénario de se produire, conformément aux instruments multilatéraux existants.  La protection des installations nucléaires civiles est cruciale, a-t-il insisté, avant de renouveler l’appel du Brésil aux États Membres pour qu’ils adhèrent au Traité sur le commerce des armes et qu’ils respectent le registre des Nations Unies sur les armes conventionnelles.  Il a également exhorté les parties à agir en toute transparence et à s’abstenir de toute transaction susceptible de constituer une violation des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.  En guise de conclusion, il a réaffirmé l’engagement du Brésil en faveur d’une solution pacifique mutuellement acceptable, et dit qu’il reste disposé à contribuer aux efforts menant à une solution pacifique.

M. SERHII DVORNYK (Ukraine) a répété son opposition à l’utilisation à mauvais escient de la « boîte à outils » du Conseil et a déclaré ne trouver aucun intérêt au débat du jour.  Il a exhorté la Fédération de Russie à faire ce qu’elle dit lorsqu’elle cite une décision de la Cour internationale de Justice (CIJ) sur le droit d’un État à la légitime défense comme elle l’a fait, il y a deux jours, lors de la présentation de sa résolution sur Gaza.  Après avoir souligné que les éléments de la proposition de paix de l’Ukraine sont conformes à la Charte, le représentant a déclaré que la seule solution pour les soldats russes est soit de se rendre soit de se retirer.  Dans l’intervalle, ils seront traités comme des cibles légitimes, a-t-il averti.

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