En cours au Siège de l'ONU

9390e séance – matin
CS/15373

Le Conseil de sécurité tient sa soixante-sixième réunion sur l’Ukraine depuis février 2022, la Russie voulant débattre des « méthodes terroristes de Kiev »

Réuni à la demande de la Fédération de Russie qui souhaitait discuter de « l’utilisation systématique de méthodes terroristes par le régime de Kiev comme facteur aggravant la crise autour de l’Ukraine et retardant son règlement politique », le Conseil de sécurité a entendu ce matin le témoignage d’un civil estonien se disant victime d’un acte de terrorisme à Saint-Pétersbourg ainsi qu’une déclaration de M. Raffi Gregorian, Administrateur du Bureau de lutte contre le terrorisme.  Ce responsable onusien a estimé ne pas pouvoir contribuer à la réunion quant au fond mais a saisi cette occasion pour rappeler que le respect du droit international constitue le socle de la lutte antiterroriste.  De nombreux membres du Conseil ont balayé d’un revers de la main les arguments présentés par la Russie pour tenir cette séance, certains regrettant une perte en efficacité pour le Conseil, qui se réunissait aujourd’hui pour la soixante-sixième fois sur l’Ukraine depuis février 2022.

M. Gregorian a rappelé que lorsque l’Assemblée générale a créé le Bureau de lutte contre le terrorisme, en 2017, son intention était d’aider les États Membres à mettre en œuvre la Stratégie antiterroriste mondiale adoptée en 2006.  Mais l’Assemblée n’a pas donné de mandat au Bureau pour déterminer un cas d’acte de terrorisme qui serait commis par un État ou un groupe, ou encore un individu, a-t-il expliqué. 

La Fédération de Russie a voulu justifier sa demande de réunion sur « la nature terroriste du Gouvernement ukrainien formé après le sanglant coup d’État anticonstitutionnel de 2014 » en citant « un des idéologues du régime de Kiev » selon lequel la tâche des forces armées ukrainiennes est de prendre en otage les habitants de la Crimée, « un stratagème terroriste ».  Le délégué russe a mentionné à cet égard « deux attentats terroristes » qui ont frappé le pont de Crimée le 8 octobre 2022 et le 17 juillet de cette année. 

Toute l’Ukraine est devenue une « organisation terroriste suicide », a encore affirmé le représentant accusant en outre ce pays d’utiliser des armes, des équipements et des renseignements occidentaux pour mener des attaques terroristes.    Allant plus loin, il a estimé que « les États-Unis et leurs satellites » partagent l’entière responsabilité des actes terroristes déjà commis et en train d’être commis par l’Ukraine.  « Quelle est la prochaine étape?  Le terrorisme nucléaire, chimique ou biologique?  Allez-vous aussi garder le silence ou tout rejeter sur la Russie? » a questionné le délégué. 

« L’affirmation de la Russie est absurde », a commenté le Royaume-Uni pour qui la Russie est le seul agresseur dans cette guerre, un agresseur qui mène des attaques incessantes contre les infrastructures civiles et commet de graves violations à l’encontre des enfants.  Son homologue de la France n’a pas dit autre chose en accusant la Russie de violer les principes de la Charte des Nations Unies et d’agresser son voisin, et même de commettre des crimes de guerre en Ukraine. 

Les États-Unis ont regretté qu’en demandant cette réunion, la Fédération de Russie ait voulu dénigrer l’important travail accompli par le Bureau de lutte contre le terrorisme.   « La Russie continue d’abuser de sa position au Conseil de sécurité pour mentir, distraire et induire en erreur la communauté internationale. »   Pour le Japon, la Russie semble avoir demandé cette réunion afin de blâmer l’Ukraine pour son incapacité à mettre politiquement fin à la guerre d’agression injustifiée qui est menée contre elle.  Contestant à son tour « le prétexte sous lequel la réunion d’aujourd’hui a été convoquée », la Suisse s’est plainte que cela pèse sur l’efficacité des travaux du Conseil.

Des délégations comme le Brésil ont noté que le Conseil s’est réuni à 66 reprises pour discuter de la situation en Ukraine depuis février 2022 au détriment d’autres situations urgentes, telles que le Soudan, le Sahel et la Palestine.  Si nous pensons que la situation justifie une telle attention du Conseil, il est perturbant de constater que notre réponse collective se limite à la répétition d’arguments opposés au sujet des événements sur le terrain et de positions connues de tous, a déploré le représentant brésilien. 

Si la Russie et le Ghana ont fait le même constat de l’éloignement des perspectives de paix, les Émirats arabes unis ont déploré que la dynamique de guerre continue de prévaloir avec des conséquences potentiellement inimaginables pour la stabilité géopolitique.  Les appels à la cessation des hostilités ont été nombreux en avançant que, comme l’ont fait remarquer les États-Unis, cette guerre prendrait fin aujourd’hui si la Russie retirait ses forces du territoire de l’Ukraine et cessait ses attaques incessantes et brutales contre les villes et les infrastructures civiles ukrainiennes. Dans le cadre d’une solution à ce conflit, le Brésil comme la Chine ont demandé de tenir compte des préoccupations légitimes des parties en matière de sécurité. 

La déléguée de l’Ukraine a, quant à elle, tenu à rappeler les bombardements par l’« État agresseur », ce matin même, des villes de Kryvyi Rih et Kherson. Elle a dénoncé le ciblage de biens civils tels que des logements et un bâtiment universitaire.  Mais « cette terreur ne nous effrayera pas, ni ne nous brisera », a-t-elle lancé en paraphrasant son président, M. Volodymur Zelenskyy. Chaque nouvel acte de terreur russe n’augmente que le montant des réparations que la Russie devra payer pour ses crimes, pas les chances de l’occupant de rester sur notre terre, a-t-elle ajouté en concluant que l’Ukraine ne fait qu’exercer son droit naturel de légitime défense en vertu de la Charte des Nations Unies. 

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES

Déclarations

M. RAFFI GREGORIAN, Adjoint du Secrétaire général adjoint et Administrateur chargé du Bureau de lutte contre le terrorisme, a rappelé le consensus qui prévalait auparavant au sein du Conseil de sécurité s’agissant de la lutte contre le terrorisme, y compris les résolutions de 1998 et de 2001, notamment sur Al-Qaida.  « Le monde entier doit remercier le Conseil pour ses mesures. » Malheureusement, a-t-il regretté, l’Assemblée générale n’est pas parvenue à un tel consensus sur le projet de convention générale sur le terrorisme international, et même sur la définition du terrorisme qui devrait être appliquée dans les situations de conflit armé.  L’ Adjoint du Secrétaire général adjoint a rappelé que lorsqu’elle a créé le Bureau de lutte contre le terrorisme, en 2017, l’Assemblée générale avait pour intention d’aider les États Membres à mettre en œuvre la Stratégie antiterroriste mondiale adoptée en 2006 ainsi que d’autres de ses résolutions et celles du Conseil de sécurité.

Rappelant les cinq fonctions du Bureau, M. Gregorian a dit que l’Assemblée ne lui a pas donné le mandat de mener des enquêtes ou de déterminer la conduite des États ou d’autres acteurs sur ce qui constitue un acte de terrorisme par un État ou un groupe ou un individu.  De ce qui précède, l’adjoint du Secrétaire général adjoint a conclu, et regretté, qu’il ne pouvait pas contribuer, quant au fond, à la réunion du Conseil de ce matin.  Toutefois, il a rappelé que le Conseil et l’Assemblée avaient à plusieurs reprises insisté sur le respect du droit international, y compris les droits humains et le droit international humanitaire, comme socle de la lutte contre le terrorisme.  Cela comprend le plein respect de toutes les obligations découlant de la Charte des Nations Unies, a-t-il précisé.

Pour l’adjoint du Secrétaire général adjoint, toute action commise en violation de ces obligations juridiques et morales sape la lutte mondiale contre le terrorisme.  Mais comme l’a montré le huitième examen consensuel de la Stratégie antiterroriste mondiale par l’Assemblée générale le mois dernier, lorsque les États Membres parlent d’une seule voix, ils peuvent faire des progrès réels et significatifs dans la lutte contre le terrorisme, a-t-il fait remarquer. 

M. SERGEY IVANOVICH CHAULIN, venu s’exprimer en tant que représentant de la société civile, a indiqué être un chauffagiste estonien, engagé dans son temps libre dans des activités de défense des droits humains.  Il a dit avoir notamment lutté pour les droits à la liberté de réunion, à la liberté d’expression, à l’éducation dans sa langue maternelle ainsi que pour la défense des valeurs familiales traditionnelles que ses parents lui ont enseignées à l’époque soviétique.  Pour toutes ces raisons, a-t-il déclaré, il a été expulsé d’Estonie le 14 février 2023, sans pouvoir contacter un avocat, ni ses parents ou encore ses amis.  « Les autorités estoniennes, en violation de toutes les normes, règles et accords internationaux, ainsi que de la Constitution, m’ont expulsé de force vers le territoire de la Russie. » 

M. Chaulin a précisé que les autorités de Saint-Pétersbourg l’ont aidé à rédiger des documents définissant son statut en Russie et l’ont également aidé à obtenir de l’argent, de la nourriture, des vêtements et un logement. C’est à Saint-Pétersbourg, a-t-il relaté, qu’il a été victime d’un attentat terroriste visant un correspondant militaire russe, Vladlen Tatarsky, venu parler dans un cyber-café le 2 avril 2023.  Après avoir décrit en détail ce qui s’est passé, il a déclaré que le meurtre de « Vladlen » a été organisé en raison de ses activités professionnelles. Tatarsky était un journaliste honnête qui essayait d’apporter aux gens la vérité sur ce qui se passait sur le front au Donbass depuis 2014, a-t-il affirmé avant de souhaiter que les auteurs de cet attentat, ainsi que leurs commanditaires, soient traduits en justice.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a proposé de discuter de la nature terroriste du Gouvernement ukrainien formé après le « sanglant coup d’État anticonstitutionnel de 2014 » parrainé par Washington et Bruxelles.  C’est tout à fait évident, mais pas pour les collègues occidentaux qui vivent dans un monde où la vérité ne joue plus aucun rôle et pour qui le noir est devenu blanc, et vice-versa, a-t-il ironisé, en ajoutant que ce n’est pas à eux qu’il s’adresse mais à ceux qui n’ont pas encore perdu la capacité de penser et d’analyser. Le délégué a cité un des « idéologues du régime de Kiev » pour qui la tâche des forces armées ukrainiennes est de prendre en otage les habitants de la Crimée, « un stratagème terroriste classique ».  La Crimée prospère depuis la réunification avec la Russie, a-t-il estimé en soulignant le désir de l’Ukraine de punir les habitants de la péninsule.  Il a mentionné les deux attentats terroristes qui ont frappé le pont de Crimée -le 8 octobre 2022 et le 17 juillet de cette année- en précisant que ce pont est une installation civile qui assure la communication routière et ferroviaire de passagers et de marchandises avec la Crimée. Il a aussi dénoncé le bombardement de villages dans les régions frontalières de la Russie et l’emploi par l’Ukraine de tactiques employées par les groupes terroristes, comme les boucliers humains.

Le délégué russe a déclaré que toute l’Ukraine est devenue une « organisation terroriste suicide », tandis que les champions occidentaux se confortent dans l’illusion de garder les mains propres.  « L’Ukraine utilise des armes, des équipements et des renseignements occidentaux pour mener des attaques terroristes. »  Ainsi, ses parrains, les États-Unis et ses satellites, partagent l’entière responsabilité des actes terroristes déjà commis et en train d’être commis par l’Ukraine, a-t-il tranché.  « Il ne faut pas se faire d’illusions à ce sujet. »  Pour le représentant, la cause profonde de la crise en Ukraine réside dans les ambitions géopolitiques exorbitantes du « camp occidental », qui a organisé un coup d’État dans un pays voisin de la Russie, portant au pouvoir des nationalistes agressifs qui détestent tout ce qui est russe et ne reculent devant aucune méthode pour mettre en œuvre leur politique extrémiste.  Il a aussi accusé l’ONU de tout imputer à la Russie.  « Quelle est la prochaine étape - le terrorisme nucléaire, chimique ou biologique?  Allez-vous aussi garder le silence ou tout rejeter sur la Russie? » a-t-il lancé en conclusion, en pointant l’éloignement de toute solution pacifique.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a rejeté la vision déformée de la réalité concernant l’Ukraine donnée une fois de plus par la Russie, dont les demandes de réunions s’inscrivent selon lui dans la même logique de propagande que d’habitude. Le représentant s’est demandé pourquoi Moscou avait donné l’ordre de tirer des missiles en pleine nuit sur des immeubles résidentiels ukrainiens sinon pour semer la terreur.  « Comment qualifier cette obstination à détruire les installations énergétiques d’un pays en plein hiver? » a-t-il aussi fait remarquer en remontant dans le temps Il ne fait aucun doute sur l’identité de celui qui viole la Charte des Nations Unies et le droit international, a estimé le représentant.

Dans ce contexte, le délégué s’est désolé que le Conseil de sécurité reste paralysé, « pris en otage par un de ses membres permanents qui est dans une situation de conflit d’intérêt plus qu’évidente ».  Il s’est demandé si les efforts de la Russie pour empêcher toute exportation de céréales à l’avenir provoquera une nouvelle flambée des prix et rendra la situation encore plus impossible pour les plus démunis.  N’est-ce pas là une tactique terroriste? s’est encore demandé le représentant.

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a rappelé l’adoption de la résolution 2623 (2022) qui a convoqué la onzième session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale sur l’invasion de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, ainsi que l’adoption, en mai 2022, d’une déclaration présidentielle par laquelle le Conseil exprimait sa profonde préoccupation pour le maintien de la paix et de la sécurité en Ukraine.  Il a déploré que d’autres projets de résolution aient fait l’objet d’un veto, relevant que le Conseil a rendu son dernier avis sur ce conflit il y a un an et trois mois.  Il s’est inquiété de la détérioration de la situation et a demandé aux membres du Conseil de remplir leurs obligations.  Toutes les parties doivent s’acquitter inconditionnellement de leurs obligations découlant du droit international humanitaire, axé principalement sur la protection des civils, a-t-il insisté.   

M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a contesté le prétexte sous lequel la réunion d’aujourd’hui a été convoquée, arguant qu’elle pèse sur l’efficacité des travaux du Conseil.  L’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine constitue une violation grave du droit international, a-t-il réitéré en déclarant que la Suisse condamne cet acte avec la plus grande fermeté.  La promotion du droit international humanitaire et du respect de l’ensemble de ses règles est une constante de la politique étrangère Suisse, a souligné le représentant, qui a exigé que toutes les parties respectent les principes de distinction, de proportionnalité et de précaution dans la conduite des hostilités. Il a insisté sur l’obligation de protéger les civils ainsi que les personnes hors de combat, se disant consternée par les graves violations du droit international humanitaire commises dans le cadre de cette guerre. 

Le délégué a tenu à rappeler que la Russie n’est pas seulement à l’origine de l’agression militaire contre l’Ukraine, mais que des rapports crédibles constatent qu’elle est également à l’origine de la grande majorité des violations du droit international humanitaire au cours de ce conflit.  Il a rappelé qu’avec l’adoption d’une résolution de l’Assemblée générale en février dernier, plus de 140 pays ont réitéré leur appel à la Russie de retirer ses troupes du territoire ukrainien et se sont prononcés en faveur de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, ainsi que pour le respect du droit international, notamment de la Charte des Nations Unies. Pour que la recherche d’une solution diplomatique puisse être poursuivie, il a exhorté la Russie à entamer une désescalade de la situation, à cesser toutes ses opérations de combat et à retirer sans délai ses troupes du territoire ukrainien.

M. SÉRGIO FRANÇA DANESE (Brésil) a appelé les parties à s’abstenir de toute action susceptible de faire des victimes et de causer des dommages aux infrastructures civiles.  Il a rappelé que le Conseil s’est réuni à 66 reprises pour discuter de la situation en Ukraine depuis février 2022, et a regretté que d’autres situations urgentes, telles que le Soudan, le Sahel et la Palestine, ne reçoivent pas la même attention.  Si nous pensons que la situation justifie une telle attention du Conseil, il est perturbant de constater que notre réponse collective se limite à la répétition d’arguments opposés sur les événements sur le terrain et de positions connues de tous, a-t-il déploré.  Le représentant a appelé à une solution durable qui respecte la souveraineté de l’Ukraine et prenne en compte les préoccupations sécuritaires de toutes les parties. 

M. DOMINGOS ESTÊVÃO FERNANDES (Mozambique) a constaté que le conflit entre la Russie et l’Ukraine alimente la radicalisation et menace de se transformer en un terreau fertile pour d’autres acteurs non étatiques violents.  Il s’est inquiété des répercussions de la hausse des activités terroristes, ajoutant que cette situation est profondément préoccupante pour les États d’Afrique qui font déjà face aux conséquences de crises internationales ayant provoqué une augmentation sans précédent d’actes de terrorisme et d’extrémisme violent.  Il a notamment rappelé que les conflits prolongés en Afghanistan, en Iraq, en Libye et en République démocratique du Congo ont débouché sur une hausse du terrorisme aux répercussions régionales et internationales et a appelé à tout mettre en œuvre pour éviter une « éventuelle exploitation de méthodes terroristes » dans le cadre du conflit entre la Russie et l’Ukraine.  Le représentant a ensuite appelé à envisager l’initiative de paix proposée par les États africains.

M. DARREN CAMILLERI (Malte) a considéré que le monde est à la croisée des chemins.  Nous sommes confrontés à un problème d’insécurité alimentaire d’origine humaine, la faim étant instrumentalisée comme arme, a-t-il noté.  En outre, la Fédération de Russie bloque et bombarde les ports maritimes ukrainiens, empêche la liberté de navigation en mer Noire sans aucune justification, tout en ciblant les civils et les infrastructures civiles, a-t-il rappelé. Le délégué a estimé que ce sont là les questions sur lesquelles le Conseil de sécurité devrait se pencher lorsqu’il discute de l’Ukraine, et non les allégations faites aujourd’hui par la délégation russe, qui selon lui ne reflètent pas la réalité sur le terrain.

Le délégué a vu encore une illustration du mépris de Moscou pour le droit international humanitaire dans les récentes frappes délibérées de missiles sur Kostyantynivka et Odessa, des attaques meurtrières qui violent l’architecture même des traités internationaux.  Malte reste déterminée à faire en sorte que la Russie soit tenue pleinement pour responsable de tous ses crimes, a déclaré le représentant, avant de se dire convaincue que la seule étape vers une paix durable consiste pour la Russie à cesser immédiatement toutes les hostilités et à retirer complètement toutes ses forces et son équipement militaire de l’ensemble du territoire ukrainien, à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues.

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a estimé regrettable que la Russie use des ressources du Conseil en demandant simplement le même nombre de réunions que celles réclamés par les pays qui critiquent la Russie.  La Russie semble avoir demandé cette réunion afin de blâmer l’Ukraine pour son incapacité à mettre politiquement fin à la guerre d’agression injustifiée qui est menée contre elle, a constaté la représentante qui a appelé à ne jamais perdre de vue ce qui est à la racine de la situation actuelle.  Si la Russie n’avait pas agressé l’Ukraine, la tragédie à laquelle nous assistons ne se serait jamais produite, a-t-elle tranché.  Elle a ensuite invité la Russie à mettre un terme à ses tentatives désespérées visant à tromper la communauté internationale.  « Elle doit, en lieu et place, se retirer de l’Ukraine. » 

Mme TRINA SAHA (États-Unis) a regretté qu’en demandant cette réunion, la Fédération de Russie ait voulu dénigrer l’important travail accompli par le Bureau de lutte contre le terrorisme.  « La Russie continue d’abuser de sa position au Conseil de sécurité pour mentir, distraire et induire en erreur la communauté internationale. » Depuis le début de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par Moscou, plus de 140 pays ont condamné à plusieurs reprises la Fédération de Russie pour son agression contre l’Ukraine, a rappelé la représentante en soulignant que ces États Membres ont exigé que la Russie retire ses forces du territoire ukrainien. 

Dénonçant les efforts de Moscou pour détourner l’attention du Conseil des questions fondamentales, elle a mis à nu en l’occurrence « le stratagème de la Fédération de Russie pour détourner l’attention de sa propre agression ».  La représentante a rappelé à cet égard que la Russie avait annoncé le stationnement d’armes nucléaires tactiques sur le territoire du Bélarus.  De l’avis de la déléguée, cette guerre prendrait fin aujourd’hui si la Russie retirait ses forces du territoire de l’Ukraine et cessait ses attaques incessantes et brutales contre les villes et les infrastructures civiles de l’Ukraine.  Les États-Unis continueront à offrir leur plein appui à la légitime défense de l’Ukraine, a dit la représentante en conclusion.

Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a constaté que les perspectives de paix en Ukraine demeurent extrêmement sombres, les parties étant fortement investies dans une compétition militaire féroce.  Elle a appelé au respect du droit international, à prioriser la protection des civils et à assurer un accès humanitaire sans entraves à toutes les zones, « car des millions de personnes ont encore besoin d’une aide vitale ».  La déléguée a également souligné l’importance cruciale du dialogue pour parvenir à un accord mutuellement acceptable sur la voie à suivre pour parvenir à un règlement du conflit, encourageant le recours à la diplomatie.  Elle a exhorté la Russie à tenir compte des nombreux appels au retrait immédiat et inconditionnel de ses troupes d’Ukraine, faisant valoir que l’arrêt de la violence favoriserait un règlement négocié. 

M. XING JISHENG (Chine) a estimé que la persistance de cette crise nous expose au risque d’arriver à un point de non-retour.  Il a demandé aux deux parties de faire preuve de retenue et de s’abstenir de tout acte où discours risquant d’entraîner une nouvelle escalade.  Il est fondamental de préserver les principes de sécurité nucléaire et d’éviter que la situation n’échappe à tout contrôle, a plaidé le représentant, en appelant les parties au conflit à respecter scrupuleusement le droit international humanitaire et à tout mettre en œuvre pour protéger les civils et les infrastructures civiles.  Pour sa délégation, il faut, dans le cadre d’une solution à ce conflit, tenir compte des préoccupations légitimes des parties en matière de sécurité.

Mme ISIS MARIE DORIANE JARAUD-DARNAULT (France) s’est étonnée de la déclaration de son homologue russe qui s’inquiète de l’absence de perspectives de règlement de la guerre d’agression que la Russie a elle-même déclenchée.  Selon la représentante, l’Ukraine n’a pas voulu la guerre, et n’a rien fait pour la provoquer.  La Russie est seule responsable de la situation actuelle, a insisté la déléguée.  Elle a martelé que la Russie a décidé de violer les principes de la Charte des Nations Unies et d’agresser son voisin, et que la Russie commet des crimes de guerre en Ukraine. « Que la Russie retire ses troupes d’Ukraine et la guerre cessera. »  Cela lui a été ordonné par la Cour internationale de Justice il y a déjà plus d’un an, a rappelé la déléguée. 

L’Ukraine veut la paix, mais elle est contrainte de choisir entre son droit légitime à se défendre et son anéantissement, a poursuivi la représentante en expliquant ainsi que la France continuera de soutenir l’Ukraine et le peuple Ukrainien aussi longtemps que nécessaire.  Toute solution conduisant à entériner des annexions illégales ne ferait que récompenser la violation du droit international et encourager le recours à la force, a-t-elle fait valoir.  C’est pourquoi, selon la représentante, il n’y a qu’une seule issue possible: une paix juste, conforme à la Charte des Nations Unies, qui respecte la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

M. HANS MARTIEN DIABA (Gabon) s’est inquiété de l’escalade de la violence en Ukraine où les civils sont pris au piège de la violence à cause de leur appartenance culturelle ou religieuse, et a insisté sur l’obligation de préserver l’intégrité physique et morale de chaque être humain et la nécessité de préserver les infrastructures civiles et culturelles.  Appelant à redoubler d’efforts pour mettre fin à cette guerre, il a plaidé pour des mesures concrètes afin de garantir la sécurité des populations et faciliter l’accès des organisations humanitaires.  Le délégué a également souligné que la prolifération des armes, qu’elles soient conventionnelles ou de destruction massive, présente un danger pour la paix et la sécurité mondiale.  Il a ensuite invité les parties au dialogue et à rechercher une solution diplomatique. 

Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis) a déploré que la dynamique de guerre continue de prévaloir avec des conséquences potentiellement inimaginables pour la stabilité géopolitique.  Elle a exhorté les parties à s’acquitter de leurs obligations en vertu du droit international, les biens et infrastructures civiles ne devant jamais être pris pour cibles.  Le droit prohibe également tout acte dont le but premier est de répandre la terreur au sein de la population civile, a-t-elle rappelé.  Enfin, la déléguée a appelé à des efforts redoublés en vue de parvenir à une paix juste et durable en Ukraine, conforme à la Charte des Nations Unies.

M. FERGUS JOHN ECKERSLEY (Royaume-Uni) a rappelé le concept psychologique de la projection qui revient à nier ses propres caractéristiques et comportements négatifs et de les attribuer faussement à d’autres, y voyant une stratégie de rejet de la responsabilité, ou le signe de troubles de la personnalité. Il a qualifié d’absurde l’affirmation par la Russie que l’Ukraine est responsable de la guerre en cours, martelant qu’il n’y a qu’un seul agresseur dans cette guerre.  Le représentant a notamment accusé la Russie d’avoir mené des attaques incessantes contre les infrastructures civiles et commis de graves violations à l’encontre des enfants.  Et c’est également la Russie qui a pris la décision unilatérale de mettre fin à l’Initiative de la mer Noire malgré les nombreux appels pour que cet accord soit renouvelé, a-t-il dénoncé.  De même, il a affirmé que la Russie envoie des milliers de ses propres jeunes hommes à la mort, sans équipements ni formation adéquats, précisant que plus de 200 000 soldats russes auraient été tués ou blessés durant cette « guerre de choix ».  La seule voie vers une paix durable en Ukraine est que « Putin » mette fin à son invasion illégale, retire ses troupes et démontre qu’il est prêt à s’engager sur des conditions de paix qui respectent la Charte des Nations Unies, a tranché le délégué. 

Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) a jugé crucial de rappeler que la mise à l’épreuve du droit international par la Russie est bien antérieure à son invasion de l’Ukraine en 2014.  « L’absence de réponse adéquate du monde à l’invasion russe de la Géorgie en 2008 n’a fait qu’encourager Moscou à intensifier ses hostilités, sur la base de ce dangereux précédent », a-t-elle estimé.  L’échec du monde à faire face à la Russie était alors dû à des croyances erronées en sa puissance et au mythe de la « deuxième armée du monde », selon la représentante.  Aujourd’hui, a-t-elle poursuivi, l’Ukraine dissipe ces mythes, prouvant que le mal ne peut être arrêté que par la force, et non par de simples paroles.  Pour elle, l’agression russe contre l’Ukraine représente la menace la plus grave pour la paix et la sécurité internationales, mais tout aussi dangereuse est la réticence du monde à recourir à la force et aux mécanismes existants pour neutraliser l’agresseur, a-t-elle mis en garde. 

La déléguée a assuré qu’en collaboration avec les structures de l’ONU, la CPI et d’autres organes internationaux réputés, l’Ukraine continuera à rassembler des preuves des crimes russes.  Elle a relaté que ces derniers jours, l’« État agresseur » a attaqué avec obstination des villes, des centres-villes, bombardant des biens civils et des logements, et que ce matin même, des régions d’Ukraine ont de nouveau été bombardées – Kryvyi Rih et Kherson.  Des immeubles résidentiels, un bâtiment universitaire, un carrefour ont été touchés.  Parmi les personnes tuées, une fillette de 10 ans.  Mais comme l’a dit le Président Zelenskyy: « Cette terreur ne nous effrayera pas ni ne nous brisera.  Chaque nouvel acte de terreur russe n’augmente que le montant des réparations que la Russie devra payer pour ses crimes, pas les chances de l’occupant de rester sur notre terre .»

Lorsque le mal est vaincu, il se comporte exactement comme le représentant de la délégation russe dans cette salle, a décrit le délégué: il recourt souvent à la manipulation, essayant de se dépeindre en victime.  Tout cela parce que la Fédération de Russie est en train de perdre la guerre qu’elle a lancée contre un pays souverain, indépendant et démocratique qui tient fermement à se défendre et le fera aussi longtemps que nécessaire.  L’Ukraine, a ajouté le délégué, exerce son droit naturel de légitime défense en vertu de l’Article 51 de la Charte des Nations Unies.  « Reconnaître la faiblesse du mal est crucial, et nous devons résister à la tentation de tendre la main du compromis ».  Nous ne pouvons pas nous permettre de faire preuve de faiblesse ou de nous arrêter à mi-chemin: la Fédération de Russie s’expose à une punition complète et juste, a tranché le représentant en conclusion.

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