9384e séance - matin
CS/15365

Le Conseil de sécurité débat des moyens de renforcer la sécurité en Afrique de l’Ouest et au Sahel

Le Conseil de sécurité a, ce matin, examiné la situation politique, sécuritaire et humanitaire en Afrique de l’Ouest et au Sahel, en écoutant le Représentant spécial du Secrétaire général pour ces régions et le Président de la Commission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDAO), MM. Leonardo Santos Simaõ et Omar Alieu Touray, qui ont dressé un bilan mitigé pour les six derniers mois. 

Si les deux responsables onusiens, qui se sont appuyés sur le rapport relatif aux activités du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) pendant la période à l’examen, ont salué la tenue dans le calme de plusieurs élections, ils ont exprimé leur préoccupation quant à l’aggravation de l’insécurité et de la situation humanitaire.  Sur ce dernier point, le rapport indique que le nombre de personnes déplacées dans le Sahel et les pays côtiers a atteint 6,3 millions. 

Les membres africains du Conseil ont fait entendre leur voix, tandis que les pays occidentaux et la Fédération de Russie ont affiché leurs divergences de vues sur les solutions à privilégier pour sécuriser le Sahel, cela dans le contexte de préparation du retrait, fixé à la fin de l’année, de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), à la demande de Bamako. 

M. Simaõ a estimé que les élections qui se sont déroulées au Bénin, en Gambie, en Guinée-Bissau, en Mauritanie, au Nigéria et en Sierra Leone sont autant d’avancées vers le renforcement de la démocratie représentative dans ces pays.  Indiquant que l’UNOWAS a soutenu ces différents processus électoraux par ses activités de médiation et, qu’aux côtés de la CEDEAO, il améliore ses partenariats dédiés au renforcement de l’état de droit dans la région, le Représentant spécial a toutefois regretté la sous-représentation des femmes dans la vie politique des pays concernés.  Ainsi a-t-il appelé leurs autorités politiques à promouvoir l’application des instruments en vigueur sur l’autonomisation des femmes et l’égalité des sexes. 

Pour la CEDEAO, le retour à l’ordre constitutionnel est urgent dans les pays de la région dirigés par un régime militaire, le Conseil de sécurité devant les accompagner sur cette voie.  M. Touray a mis l’accent sur le fait que cette militarisation régionale va de pair avec l’accroissement de l’insécurité.  Selon lui, devant l’expansion des activités terroristes et le nombre croissant de victimes, les initiatives pour répondre aux défis de l’insécurité en Afrique de l’Ouest et au Sahel devraient être regroupées dans les actions de la CEDEAO. 

Il a indiqué à ce propos que les chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO viennent de décider de faciliter ce processus en remaniant le mandat de la Force en attente de la Communauté et en actualisant leur plan d’action 2020-2024 pour la lutte contre le terrorisme. Les acteurs concernés de la CEDEAO comptent renforcer le mandat de la Force en attente par le déploiement d’une brigade de 5 000 hommes et de « troupes à la demande », ces options ayant été discutées avant les décisions du Conseil de sécurité concernant le retrait de la MINUSMA, a-t-il précisé. 

M. Simaõ a soutenu cette approche, en ajoutant que l’action de la Force multinationale mixte déployée dans le bassin du lac Tchad a permis d’améliorer de façon significative la situation dans une zone particulièrement vaste.  À cette aune, il a demandé le soutien du Conseil à l’Initiative d’Accra, laquelle vise à intensifier les efforts régionaux pour faire face à la menace croissante des violences. Concernant le retrait de la MINUSMA, le Représentant spécial a assuré qu’en attente d’un plan opérationnel détaillé du Conseil, l’UNOWAS continuera, aux côtés de la CEDAO, d’aider à la préparation de la clôture de la Mission. 

Sur ce dernier point, la France a souligné l’importance d’un retrait en bon ordre et en toute sécurité des Casques bleus, issus pour près de moitié des États membres de la CEDEAO, et la nécessaire coopération du Mali avec l’ONU pour y parvenir.  Dans son rapport, le Secrétaire général indique qu’au mois de mars, le Bureau a effectué des visites techniques au Mali –où pas moins de 126 attentats ont été commis en début d’année– pour, en coopération avec la Mission, l’équipe de pays des Nations Unies et les institutions publiques, « nouer le dialogue avec des acteurs travaillant sur les questions de la cohésion sociale, de l’autonomisation des femmes et de l’accès aux terres ». 

M.  Simaõ a annoncé qu’il se rendra dans les plus brefs délais à Bamako afin d’échanger avec les autorités, les partenaires et les représentants de l’ONU sur ces thèmes.  « La crise au Sahel est la somme de circonstances complexes, et sa résolution nécessite un appui concret, réaliste et à long terme à la région et au-delà pour que puisse être instaurée une paix durable », a-t-il déclaré.  La France, rejointe par les États-Unis et le Royaume-Uni, a exprimé sa conviction que les mercenaires du groupe Wagner représentent une menace déstabilisatrice au Sahel, dénonçant les graves violations des droits humains dont ils se rendent coupables « sous couvert de lutte contre le terrorisme ». 

La Russie n’a pas réagi à ces propos, se contentant de réaffirmer son engagement à aider les pays de la région à trouver des « solutions africaines à des problèmes africains ».  S’agissant du retrait de la MINUSMA, elle a estimé que le transfert prévu de certaines responsabilités politiques de la Mission à l’UNOWAS devra s’effectuer selon les conditions identifiées par le Mali, les autorités du pays continuant selon elle à faire tout leur possible pour y restaurer l’ordre constitutionnel. 

Enfin, la Suisse, en tant que co-porte-plume avec le Ghana, a annoncé la poursuite des efforts des deux délégations en vue de l’adoption d’une déclaration présidentielle dans les meilleurs délais, « afin de souligner l’intérêt fort que ce Conseil apporte à cette région ».

CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE DE L’OUEST (S/2023/490)

Déclarations

M. LEONARDO SANTOS SIMAÕ, Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, a d’abord tenu à saluer la tenue d’élections dans plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest et du Sahel au cours des derniers mois, notamment au Bénin, en Gambie, en Guinée-Bissau, en Mauritanie, au Nigéria et en Sierra Leone.  Ces élections ont marqué des étapes importantes vers la consolidation de la démocratie, offrant aux citoyens de ces pays la possibilité de choisir leurs dirigeants et leurs représentants, a-t-il ajouté, notant qu’au Nigéria, les électeurs, « en particulier les jeunes », ont insufflé un nouveau dynamisme au processus électoral.  « En Guinée-Bissau, l’opposition a obtenu la majorité absolue après des élections législatives pacifiques, dont les résultats ont été acceptés par tous. »  M. Simaõ a indiqué que le Bureau régional a soutenu les différents processus électoraux non seulement par le biais de ses activités de médiation mais aussi en accompagnant les dialogues interpartis préélectoraux et les initiatives de renforcement de la confiance entre parties prenantes, au Bénin et au Nigéria notamment.  Il a également rendu hommage à la manière avec laquelle le Bureau, aux côtés de la CEDAO, améliore ses partenariats avec les partenaires régionaux dédiés au renforcement de l’état de droit dans certaines zones de la région.  Toujours sur le volet politique, M. Simaõ a regretté la sous-représentation persistante des femmes dans les processus politiques des pays de la région, appelant les gouvernements et les partis politiques à promouvoir activement l’application des instruments en vigueur sur l’autonomisation des femmes et l’égalité des sexes.  De plus, avec plus de 60% de la population âgée de moins de 25 ans, les jeunes constituent un groupe important dont la voix n’est pas encore pleinement entendue dans les efforts de consolidation de la paix, a-t-il souligné avant de rappeler les efforts précieux du Bureau en faveur d’une plus grande inclusion des jeunes dans les différents processus électoraux. 

Le Représentant spécial a ensuite indiqué aux membres du Conseil que lors de sa visite au Burkina Faso, il avait été marqué par la détermination des autorités de transition de rétablir la sécurité sur l’ensemble du territoire.  « J’ai également pris bonne note des processus en cours en Guinée et au Mali en vue du retour à l’ordre constitutionnel dans les temps impartis, et je considère que nos efforts doivent converger vers cet objectif majeur », a-t-il dit.  M. Simaõ a insisté sur le fait qu’au Mali, le retrait prochain de la MINUSMA pose des défis majeurs en vue d’une transition qui s’annonce d’ores et déjà difficile.  C’est pourquoi il a annoncé qu’il se rendra dans les plus brefs délais à Bamako afin d’échanger avec les autorités, les partenaires et les représentants des Nations Unies.  Pour M. Simaõ, la crise au Sahel est la somme de circonstances complexes, et sa résolution nécessite un appui concret, réaliste et à long terme à la région et au-delà pour que puisse être instaurée une paix durable.  « Les populations de la région nous rappellent sans cesse à notre obligation collective d’appuyer les efforts de leurs pays dans la résolution de ces crises pour en finir avec le fléau du terrorisme qui rythme leur quotidien depuis trop longtemps, a-t-il poursuivi.  À cet égard, il a tenu à témoigner de l’engagement des États de la région en faveur d’un retour à l’ordre, engagement réitéré lors du soixante-troisième sommet ordinaire des Chefs d’État et de gouvernements de la CEDEAO.  « La décision d’organiser un sommet extraordinaire de la CEDEAO à la fin du mois d’aout, précédé par une réunion des Ministres de la défense et des finances permettra à la région de se pencher davantage sur les dossiers brulants de l’insécurité, y compris dans les pays en transition », a-t-il encore déclaré. 

Le Représentant spécial a constaté que si la situation sécuritaire au Sahel central s’est encore détériorée, marquée par de multiples attaques contre les civils et les forces de défense et de sécurité, -« notamment dans la province burkinabè de Gourma »-, l’action de la Force multinationale mixte déployée dans le bassin du lac Tchad a permis d’améliorer très nettement la situation dans une zone particulièrement vaste. À cette aune, il a plaidé pour un soutien accru et un financement adéquat de l’Initiative d’Accra, laquelle vise à intensifier les efforts régionaux pour faire face à la menace croissante des violences. 

Concernant le retrait prochain de la MINUSMA, M. Simaõ a assuré qu’en vue de la présentation d’un plan détaillé par le Conseil de sécurité, le Bureau régional continuera, aux côtés de la CEDAO notamment, d’aider la préparation de la clôture de la Mission jusqu’à la fin de l’année. 

Enfin, abordant le volet humanitaire de son intervention, il a déclaré que les 6,3 millions de personnes déplacées à travers le Sahel constituent une autre conséquence grave des crises sécuritaire, alimentaire et climatique dans la région.  « Un nombre croissant de ces populations contraintes au mouvement trouve refuge dans les pays côtiers, y compris la Côte d’Ivoire et le Ghana », a-t-il indiqué, lançant un appel à toutes les parties prenantes pour « la mise en commun de nos efforts en vue de préserver la dignité des personnes réfugiées et la sécurité des pays d’accueil ou de transit ».

M. OMAR ALIEU TOURAY, Président de la Commission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a commencé par déplorer que 3 des 15 pays de la région soient actuellement dirigés par un régime militaire, ce qui est révélateur selon lui d’une régression des acquis démocratiques à ce niveau.  « Pour la CEDEAO, le retour à l’ordre constitutionnel est nécessaire pour ces pays, le Conseil de sécurité devant les accompagner en ce sens ».  M. Touray a mis l’accent sur le fait que cette militarisation accrue de la région va de pair avec l’accroissement de l’insécurité, insécurité à laquelle l’Afrique de l’Ouest et le Sahel sont confrontés depuis trop longtemps. Il a cité à cet égard l’extension à d’autres pays du terrorisme, la multiplication des rébellions armées, la hausse du crime organisé comme des activités maritimes illégales, l’intensification des crises environnementales ou encore de la désinformation.  Alarmé par le nombre de victimes de l’insécurité dans les pays de la région, il a noté que la perpétration d’attentats terroristes au Bénin et au Togo est une indication frappante de l’expansion de ces crimes aux États riverains, une situation, a-t-il dit, « qui constitue une menace réelle pour notre sécurité collective ». 

M. Touray a ensuite souligné que la multiplication des initiatives pour répondre aux défis de l’insécurité sous toutes ses formes, y compris humanitaire et alimentaire –30 millions de personnes ayant besoin d’une aide alimentaire en Afrique de l’Ouest– pose des problèmes sérieux de coordination.  C’est pourquoi, a-t-il ajouté, la CEDEAO propose de les intégrer dans son plan d’action régional.  Il a indiqué à ce propos que les chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO ont décidé de faciliter un tel processus en commençant par revoir le mandat de la Force en attente, en envisageant la constitution d’un mécanisme de financement propre aux besoins régionaux en matière de sécurité et en actualisant le plan d’action de la CEDEAO pour la lutte contre le terrorisme pour la période 2020-2024.  M. Touray a notamment précisé que la Communauté compte renforcer le mandat de la Force en attente par le déploiement d’une brigade de 5 000 hommes et de « troupes à la demande », ces options ayant été discutées avant la décision du Conseil de sécurité concernant le retrait de la MINUSMA.  D’autre part, il a attiré l’attention du Conseil sur la tenue d’une réunion, la semaine dernière, des chefs d’État du Nigéria, du Bénin, de la Guinée Bissau et du Niger, lesquels se sont engagés à permettre un retour rapide à l’ordre constitutionnel, « conformément aux protocoles pertinents de la CEDEAO et aux chartes de transition de chacun des pays concernés ».  Ses dirigeants, et la CEDEAO au sens large, appellent la communauté internationale, en particulier le Conseil de sécurité, à soutenir l’accord de paix issu du processus d’Alger ayant scellé le cessez-le-feu entre les rebelles indépendantistes du Nord et le Gouvernement malien, a encore indiqué le Président de la Commission.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) qui s’exprimait au nom du Gabon, du Mozambique et du Ghana (A3), a salué la consolidation démocratique au Nigéria, en Sierra Leone ainsi qu’au Bénin, en Guinée-Bissau, en Mauritanie et en Gambie.  Il a demandé un appui international pour rétablir l’ordre constitutionnel dans les trois pays en transition, en particulier au Mali, où le référendum tenu en juin 2023 devrait ouvrir la voie à de nouveaux efforts fondés sur un processus inclusif.  Le représentant a exhorté les autorités maliennes et les groupes signataires à rester engagés dans la mise en œuvre des Accords de paix d’Alger.  Les A3 restent toutefois préoccupés par la situation sécuritaire dans la région, en particulier dans les pays sahéliens, où la perte de territoire au profit des groupes terroristes et armés entraîne de nouvelles vagues de déplacements et des conséquences humanitaires. Soulignant la nature complexe des crises en cours et la nécessité d’une approche globale pour les résoudre, le délégué a encouragé les pays de la région à respecter le Protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance.  Les rivalités géopolitiques, les fragilités des pays de la région devraient être gérées par une approche participative de la gouvernance, impliquant les jeunes, les femmes et les groupes minoritaires. 

S’agissant de la situation sécuritaire, le représentant a condamné les attaques perpétrées par des groupes terroristes contre les personnels civils et sécuritaires dans la région.  Pour ce qui est du retrait de la MINUSMA du Mali, il a demandé une action coordonnée avec les pays voisins afin de minimiser tout nouvel impact négatif sur la sécurité du Mali et de la région. Il a dit attendre avec intérêt le rapport du Secrétaire général au Conseil en août sur le rôle de la CEDEAO et d’autres organismes des Nations Unies après le retrait de la MINUSMA.  Le soutien logistique, opérationnel et financier aux mécanismes régionaux est essentiel.  En Libye, le représentant a demandé de suivre de près la crise en Libye et adopter une approche coordonnée pour éviter le retour des combattants terroristes étrangers et la prolifération des armes légères et de petit calibre.  Il a exhorté la communauté internationale à appuyer les efforts en cours dans la région, notamment les consultations menées par le Groupe dirigé par Issoufou dans le cadre de l’élaboration d’un rapport d’évaluation sur le Sahel. 

Sur le plan humanitaire, le délégué a appelé l’attention de la communauté internationale sur les plus de 6 millions de personnes déplacées et environ 10 000 écoles fermées.  Il faut dépasser le statu quo pour régler le problème et donner la priorité à la mise en œuvre de plans d’intervention humanitaire pour les pays d’Afrique de l’Ouest et du Sahel en aidant à atteindre l’objectif de 3,5 milliards de dollars requis pour répondre aux besoins humanitaires croissants.  Pour relever les défis en Afrique de l’Ouest et au Sahel, il faut combler les déficits de gouvernance et de développement et faire en sorte que femmes et jeunes prennent part à tous les processus de prise de décisions et de gouvernance.  Concernant les changements climatiques, le Groupe souligne la nécessité pour la région d’exploiter les dividendes positifs de son rôle d’intervenant, y compris dans les questions de paix et de développement liées au climat ainsi que dans la promotion de mécanismes communautaires de règlement des différends. 

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) s’est félicitée que les scrutins tenus dans la région ces derniers mois se soient déroulés jusqu’à présent de manière pacifique.  Elle a salué à cet égard l’engagement continu du Bureau régional en faveur d’une gouvernance démocratique et de processus électoraux pacifiques dans la région.  C’est un travail de longue haleine, basé sur la confiance et sur un dialogue régulier, a-t-elle ajouté avant d’appeler à la participation pleine et significative des femmes dans tout le cycle du processus électoral. 

Sur le plan sécuritaire, la représentante a noté que l’investissement dans la prévention de la violence et la construction de la paix requièrent un engagement sur les diverses causes sécuritaires, politiques, économiques, culturelles et sociales.  Ceci a été rappelé en février lors de la conférence « Grand Rendez-vous pour la prévention de l’extrémisme violent », organisée par le Bureau, la Suisse et le Sénégal à Dakar, a-t-elle fait savoir, jugeant impératif que les États et les organisations régionales, en particulier l’Union africaine et la CEDEAO, fassent du plan d’action contre ce fléau une réalité.  La déléguée a déclaré que cette conférence avait démontré que le dialogue, « y compris avec les extrémistes violents », est indispensable pour aboutir à une paix durable. 

Estimant ensuite que la situation humanitaire dans la région est due à l’instabilité, aux conflits, aux déplacements forcés, à l’insécurité alimentaire et aux changements climatiques, elle a salué le travail que mène courageusement le Bureau sur les changements climatiques, la paix et la sécurité dans le cadre de l’Appel à l’action de Dakar.  Afin de renforcer la résilience de plus de 700 000 personnes au Burkina Faso, la Suisse soutient un programme qui vise à apaiser des conflits entre agriculteurs et éleveurs, en adaptant les méthodes d’élevage et les moyens de subsistance aux défis climatiques, a-t-elle en outre signalé. Enfin, la représentante a assuré le Conseil que la Suisse se tient prête à favoriser le dialogue pour évaluer la possibilité de confier certaines tâches effectuées par la MINUSMA au Bureau.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) s’est dit préoccupé par les revers en Afrique de l’Ouest et au Sahel, avant d’assurer l’UNOWAS du soutien de son pays dans ses efforts pour renforcer les processus démocratiques dans la région.  Il a notamment fait part de ses préoccupations face au manque de transparence dans le processus électoral en Sierra Leone et exhorté le Gouvernement de transition au Mali à pleinement coopérer avec l’ONU dans le retrait coordonné de la MINUSMA.  Une fois le plan de transition achevé, il faudra peut-être envisager davantage de ressources pour l’UNOWAS, a-t-il fait valoir.  Préoccupé par l’instabilité et la violence en Afrique de l’Ouest et au Sahel, où les menaces croissantes causent les déplacements forcés de population, le représentant a accusé le groupe Wagner d’entraver le travail des Casques bleus. Les États-Unis demandent donc aux membres du Conseil de revitaliser leur action en vue de résoudre les problèmes transfrontaliers de la région, a-t-il expliqué, avant de saluer les efforts de la CEDEAO, de l’ONU et de l’UA.  Le délégué a en conclusion espéré que la déclaration présidentielle en cours de négociation sera prochainement finalisée. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a rappelé le double défi posé par l’insécurité et les changements climatiques dans la région subsaharienne pour mieux souligner la nécessité de concevoir une approche sécuritaire multidimensionnelle et durable, laquelle passerait par le renforcement de la résilience des communautés et de la coopération régionale, a-t-il ajouté.  Tous les États doivent respecter le droit international humanitaire, a poursuivi le représentant, en appelant aussi à faciliter un accès sans entrave aux nécessiteux.  Les acteurs humanitaires doivent pouvoir fournir les services nécessaires et les responsables d’entraves à leur liberté de mouvement être tenus pour responsables de ces actes. 

S’agissant des impacts des changements climatiques, des efforts concertés seront nécessaires pour comprendre les interactions entre sécurité et changements climatiques, a indiqué le représentant, en estimant que la résilience implique des élections libres et justes avec la participation des femmes et des jeunes.  Évoquant le retrait de la MINUSMA, il a plaidé pour la poursuite du dialogue avec les autorités maliennes en vue de parvenir à un retrait coordonné, les exhortant à mettre en œuvre les Accords de paix d’Alger.  Le représentant a terminé en disant que la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel aidera à régler en profondeur les crises régionales, exhortant le Conseil à l’unité sur cette question. 

M. GENG SHUANG (Chine) a noté les avancées positives dans le maintien de la paix, la sécurité et l’appropriation de certains processus régionaux par les pays d’Afrique de l’Ouest et du Sahel au cours des six derniers mois, plaidant pour un soutien plus ciblé afin de les aider à conserver ce cap.  Saluant les résultats des processus électoraux dans la région, il y a vu la preuve de l’avancée des processus politiques en cours, encourageant les pays concernés, la communauté internationale et la CEDEAO à aider ces pays à se relever.  La Chine est favorable à ce que la CEDEAO joue un rôle de premier plan dans le maintien de la paix et de la sécurité dans la région, a expliqué le représentant, avant de féliciter le Burkina Faso, le Mali et d’autres pays de la région pour avoir relancé la Force du G5 Sahel et Force prépositionnée, en espérant que ces instruments permettront de renforcer les opérations de lutte antiterroriste.  La communauté internationale devrait soutenir ces efforts par des équipements et des financements, a souhaité le représentant, en appelant également à soutenir les actions climatiques régionales.  Le délégué chinois s’est enorgueilli des relations excellentes que Pékin cultive depuis toujours avec l’Afrique de l’Ouest et la Sahel, annonçant que sa coopération régionale se poursuivrait. 

Mme SHINO MITSUKO (Japon) a réitéré l’importance d’un retour à l’ordre constitutionnel dans la région, appelant notamment le Mali à continuer de déployer tous les efforts requis en vue de la tenue d’élections, conformément aux engagements pris auprès de la CEDEAO.  Nous encourageons le Bureau régional et l’équipe de pays des Nations Unies à aider le Mali en ce sens, a-t-elle ajouté.  La représentante a également souligné l’importance de progrès rapides en matière de transition politique en Guinée et au Burkina Faso, la sécurité dans ces pays ne pouvant être garantie sans une gouvernance responsable et inclusive. En outre, elle a regretté que la MINUSMA doive se retirer après une décennie de travail dévoué.  Ainsi a-t-elle exhorté les autorités de transition maliennes, aux côtés de leurs voisins et partenaires régionaux, à empêcher le développement de tout vide sécuritaire après le retrait de la Mission.  À cet égard, elle a plaidé pour une approche de sécurité « collective, holistique et transnationale » pour mettre en échec les extrémistes violents et les terroristes qui opèrent au-delà des frontières maliennes. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a souligné l’importance d’un cadre institutionnel solide et stable pour améliorer les conditions de vie de la population et s’attaquer aux causes premières de la violence.  À cet égard, le représentant a salué la tenue d’élections, notamment au Nigéria, en Sierra Leone, au Bénin, en Guinée-Bissau et en Mauritanie.  Il a souhaité que les processus électoraux en Côte d’Ivoire, au Libéria et au Togo se déroulent de manière pacifique et transparente.  Il a aussi salué les efforts de la CEDEAO, avec l’appui de l’ONU, pour rétablir l’ordre constitutionnel au Burkina Faso, en Guinée et au Mali où il faut respecter engagements et échéanciers.  Il a ensuite exprimé sa préoccupation face à la détérioration de la situation sécuritaire au Burkina Faso et au Mali, et au danger persistant d’une expansion de la violence terroriste vers le Sud, le représentant a rappelé que les mesures prises par les États pour lutter contre ce fléau doivent être conformes au droit international et au droit international humanitaire. 

Il a ensuite appelé les pays de la région pour qu’ils intensifient leur coopération dans la lutte contre le terrorisme, y compris dans le cadre de l’Initiative d’Accra.  S’agissant des conséquences humanitaires de l’insécurité, il a dit que les efforts de l’UNOWAS pour atténuer les souffrances de ceux qui ont été touchés sont une étape très importante pour briser le cercle vicieux du mécontentement et de la violence.  À cette fin, il est essentiel de poursuivre le travail de coordination entre les gouvernements et le système des Nations Unies, en tenant compte de tous les facteurs interdépendants qui affectent la région.

Mme FRANCESCA MARIA GATT (Malte) a souligné l’importance de 2023 pour la démocratie en Afrique de l’Ouest et au Sahel, saluant à cet égard les récentes élections qui se sont tenues dans la région.  Après avoir plaidé en faveur d’une approche holistique pour dissuader toute expansion de la violence, en s’attaquant aux causes profondes de l’extrémisme violent et des conflits, la déléguée a souligné que l’éducation, les droits humains, le développement durable, la justice et l’état de droit doivent aller de pair avec les opérations de lutte antiterroriste.  Inquiète de la situation sécuritaire au Mali, la déléguée a constaté que le retrait de la MINUSMA comporte des risques tant pour ce pays que pour ses voisins.  Profondément préoccupée par la situation humanitaire désastreuse dans la région, en particulier au Sahel, où des millions de personnes supplémentaires ont besoin d’assistance, elle a annoncé le soutien continu de Malte à l’UNOWAS dans son plaidoyer en faveur des pratiques optimales visant à renforcer la résilience et l’adaptation aux changements climatiques sur le terrain et dans la promotion d’une compréhension de ces pratiques au sein des communautés locales. 

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a souligné le rôle important de la CEDEAO et du Bureau régional dans l’aide à la transition politique des pays de la région. Nous exhortons les autorités de transition à renforcer la coopération avec ces instruments afin d’accélérer le retour à l’ordre constitutionnel dans les pays concernés, a-t-il ajouté.  Après avoir salué les mesures prises par le Bénin et le Libéria pour accroître la représentation des femmes dans leurs parlements respectifs, le délégué a appelé les États d’Afrique de l’Ouest et du Sahel à renforcer la coopération transfrontalière, cela en travaillant de manière plus étroite avec l’ONU, l’UA, la CEDEAO et le G5 Sahel au renforcement des efforts de sécurité et de consolidation de la paix.  Le strict respect des droits humains et du droit international humanitaire est crucial dans le cadre des opérations militaires, a-t-il aussi dit. Il a exprimé la vive inquiétude de son pays quant à la présence persistante du groupe Wagner, qui fait peser une menace importante sur les principes fondamentaux précités.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a salué les décisions exemplaires des chefs d’État de la région qui ont fait le choix courageux de l’alternance politique, à l’instar de Mahamadou Issoufou et Muhammadu Buhari.  Saluant également la décision du Président Macky Sall de ne pas se porter candidat à la prochaine élection présidentielle au Sénégal, elle a encouragé l’UNOWAS et les pays de la région à poursuivre son action en appui à la CEDEAO pour que cette dynamique positive se poursuive dans toute la région.  Le Burkina Faso, la Guinée et le Mali doivent achever leur processus de transition et tenir des élections crédibles dans les délais agréés avec la CEDEAO, a rappelé la représentante. Sur le plan sécuritaire, elle a pris note de la décision du sommet de la CEDEAO du 9 juillet de mettre en place un groupe de travail présidentiel pour approfondir les réflexions sur les conséquences de la fin de la MINUSMA, notamment sur le plan sécuritaire.  Elle a souligné l’importance d’un retrait en bon ordre et en sécurité des Casques bleus, issus pour près de moitié des États membres de la CEDEAO, et la nécessaire coopération du Mali avec l’ONU pour y parvenir. 

La représentante a dit qu’elle partage la conviction des chefs d’État que les mercenaires de Wagner représentent une menace déstabilisatrice, dénonçant les graves violations des droits humains dont ils se rendent coupables sous couvert de lutte contre le terrorisme.  Elle a réitéré le soutien de la France aux initiatives des pays de la région pour assurer leur propre sécurité, comme l’Initiative d’Accra et la Force conjointe du G5 Sahel.  Elle s’engage aussi à faire davantage pour soutenir les États côtiers du golfe de Guinée dans le contexte de l’expansion de la menace terroriste venue du Sahel.  La France sera à l’écoute des conclusions du sommet extraordinaire de la CEDEAO prévu le mois prochain au Nigéria, ainsi que des recommandations du panel de haut niveau sur la sécurité et le développement du président Mahamadou Issoufou.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a estimé que les tâches principales de l’UNOWAS sont la diplomatie préventive, les bons offices et la médiation des différends au sein et entre les pays d’Afrique de l’Ouest et au Sahel.  Face à la situation difficile dans la région, notamment sur le plan sécuritaire, il a souligné que les zones frontalières du Mali, du Burkina Faso et du Niger restent l’épicentre de tensions.  Les menées subversives des cellules de Boko Haram et de l’État islamique en Afrique de l’Ouest ajoutent à la situation alarmante dans les pays du bassin du lac Tchad, a-t-elle constaté, tandis que la situation reste alarmante au Burkina Faso et au Tchad, où la déstabilisation du Soudan a entraîné une hausse significative de l’afflux de réfugiés.  Notant la situation extrêmement préoccupante aussi sur le plan humanitaire, elle a estimé, qu’avec 6 millions de personnes déplacées dans le Sahel et 37 millions de nécessiteux, il est clair que les États de la région doivent renforcer leur assistance afin de surmonter les conséquences humanitaires de l’instabilité. 

La représentante a constaté que les tentatives des pays européens de contribuer à la stabilisation au Sahel n’ont pas été couronnées de succès, en citant la réduction unilatérale des activités de l’opération Barkhane par la France et de Tacuba par l’UE au Mali, en estimant que cela a eu pour effet de renforcer le terrorisme dans la région.  Dans le même temps, les « anciennes métropoles » n’ont pas cessé de s’ingérer dans les affaires intérieures des Sahéliens, leur a-t-elle reproché.  S’agissant du retrait de la MINUSMA du Mali, elle a argué que le transfert de certaines responsabilités à assumer dans le domaine politique à l’UNOWAS devrait être pris en étroite coopération avec Bamako, en soulignant que les autorités maliennes continuent à faire tout leur possible pour ramener le pays à l’ordre constitutionnel, conformément aux modalités approuvées par la CEDEAO. 

Le respect des normes démocratiques en Afrique de l’Ouest et au Sahel dépend dans une large mesure de la situation sécuritaire dans la région, a poursuivi la représentante.  Elle a salué les décisions des dirigeants de la CEDEAO de s’engager auprès des pays en transition, en évoquant les visites prévues par le Président du Bénin au Mali, au Burkina Faso et en Guinée.  Convaincue que le dialogue équitable et respectueux de cette organisation africaine contribuera à résoudre les différends, à rétablir la confiance et à promouvoir la coopération dans la région, la représentante a appelé les pays extérieurs à la région à faciliter ces contacts et à s’abstenir de prendre des mesures susceptibles de nuire à ce processus.  La Fédération de Russie reste convaincue que le rôle principal du maintien de la paix et de la sécurité dans la région devrait appartenir à ses États membres, a-t-elle réitéré, et la communauté internationale leur fournir une assistance efficace à cet égard. Pour sa part, Moscou restera engagée à leurs côtés, y compris de façon bilatérale, tant sur le plan de la formation militaire que sous la forme d’aide humanitaire, a-t-elle assuré. 

M. NORBERTO MORETTI (Brésil) a déclaré que son pays, en tant que nation profondément attachée à la prévention des conflits et à la résolution pacifique des conflits, salue les efforts du Bureau régional dans la promotion de la diplomatie préventive et de la médiation politique à ce niveau.  Il a ajouté que le Brésil appuie en outre pleinement l’approche inclusive du Bureau auprès de ses partenaires et des organisations régionales et sous-régionales pour faciliter la recherche de solutions « africaines aux problèmes africains ».  Le délégué a exprimé la profonde préoccupation de son pays quant à la situation sécuritaire au Burkina Faso et au Mali « en raison de la persistance d’activités terroristes ».  Il s’est dit toutefois encouragé par les améliorations en la matière dans la région du bassin du lac Tchad et de la sécurité maritime dans le golfe de Guinée.  En tant que membre fondateur de la zone de paix et de coopération de l’Atlantique Sud, le Brésil attache une grande importance et cherche à contribuer à la sécurité dans le golfe de Guinée, a-t-il ainsi souligné, assurant que son pays se tient prêt à soutenir davantage les efforts de lutte contre la piraterie, par le biais notamment du renforcement de la coopération entre les marines régionales et le renforcement de l’architecture de Yaoundé.  Face à la crise humanitaire qui frappe plus de 6 millions de personnes déplacées en Afrique de l’Ouest et au Sahel, le représentant a en outre appelé les pays concernés à combiner leurs efforts et la communauté internationale de les y aider, « conformément à la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel ».

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a dit être préoccupé par le rétrécissement de l’espace politique et civique au Mali, au Burkina Faso et au Togo, où les progrès ont été trop lents selon lui.  Tout doit être fait pour que la transition se déroule dans les meilleures conditions possibles et les élections prévues se déroulent sans heurts.  Le délégué s’est dit ensuite impatient de connaître le contenu du quatrième plan de transition de la MINUSMA du Secrétaire général et le rôle que l’UNOWAS et la CEDEAO pourraient jouer à cet égard.  Il a dit par ailleurs être préoccupé par la présence du groupe Wagner, qui ne cesse de semer chaos et souffrances parmi les civils de la région.  Maintenant que le Président Vladimir Putin a reconnu, après l’avoir nié des années durant, que c’est le Kremlin qui a créé cette organisation paramilitaire, il est donc essentiel de tenir pour responsables de leurs actes les auteurs d’abus, de viols et d’assassinats.  Quant aux travailleurs humanitaires au Sahel, ils doivent pouvoir acheminer l’aide sans entrave et dans les meilleures conditions possibles, a demandé le délégué britannique.  Il a en conclusion souhaité que les membres du Conseil s’entendent sur une déclaration présidentielle de soutien à l’UNOWAS.

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