En cours au Siège de l'ONU

9320e séance – matin
CS/15280

Conseil de sécurité: en Libye, la nouvelle stratégie du Procureur de la CPI semble porter ses fruits, s’est félicité M. Karim Khan

La nouvelle stratégie du Bureau du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) en Libye a permis de réaliser des avancées tangibles, s’est félicité ce matin, devant le Conseil de sécurité, le Procureur de cette juridiction, M. Karim Asad Ahmad Khan KC, pour qui la prochaine étape est d’ouvrir un bureau de liaison à Tripoli. 

Ce « plan d’action » repose sur une approche ciblée, dynamique et axée sur le terrain, a expliqué le Procureur.  Au cours des six derniers mois, plus de 500  éléments de preuve ont été ainsi recueillis et le Bureau a activement contribué aux enquêtes menées dans six États parties sur les crimes commis en Libye.  En outre, la visite officielle du Procureur en novembre 2022, la première depuis plus de 10 ans, a permis de s’entretenir avec les autorités nationales, les communautés touchées et les organisations de la société civile, a-t-il relevé, en s’enorgueillissant de ce rapprochement avec le peuple libyen, salué également par le Ghana.

De son côté, la mission indépendante d’établissement des faits des Nations Unies sur la Libye, avec laquelle coopère le Bureau du Procureur, a directement soutenu l’identification de témoins supplémentaires pour ses enquêtes.  Parallèlement, la transition vers Relativity a été menée à bien.  Il s’agit d’un nouveau programme de gestion des preuves qui repose sur l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique.

Plusieurs membres du Conseil de sécurité, du Japon au Royaume-Uni, en passant par l’Albanie et la Suisse, se sont félicités de ce nouvel élan, qui s’est traduit par la délivrance de quatre nouveaux mandats d’arrêt par la Chambre préliminaire de la CPI au cours de la période considérée, auxquels s’ajoutent deux autres ces deux dernières semaines.  M. Khan a assuré qu’il œuvrait avec les États parties en vue de procéder à l’arrestation des individus visés.  Les États-Unis et le Brésil ont toutefois demandé la levée des scellés sur les mandats d’arrêt, ce à quoi le Procureur a répondu que « ce sont les juges qui en décident », même s’il en a fait la demande.

Les partenariats sont un autre domaine dans lequel il a estimé que des progrès avaient été accomplis.  Ainsi, en janvier 2023, un Érythréen âgé de 39 ans, suspecté de crimes commis contre des migrants, a été arrêté au Soudan lors d’une opération de police internationale dirigée par les Émirats arabes unis, ce dont cette délégation s’est félicitée.  En outre, le partenariat avec le Procureur général, le procureur militaire et le Ministre libyen de la justice a permis d’identifier un certain nombre de domaines de coopération, dont la criminalistique et l’identification des restes humains, a ajouté M. Khan.

Citant des témoignages de survivants qu’il a rencontrés en novembre, le Procureur a toutefois expliqué au Conseil qu’ils se sentent abandonnés et estiment que les promesses de justice du Bureau et du Conseil sont restées lettre morte jusqu’à présent.  Reste que grâce à la nouvelle approche stratégique, nous commençons maintenant à obtenir les résultats que ces familles exigent à juste titre, a assuré le Procureur. 

Mais où sont-ils? s’est interrogé la Libye, en rappelant que le Bureau du Procureur en est à son vingt-cinquième rapport.  Pour cette délégation, l’administration de la justice sur le sol libyen est la prérogative souveraine de l’État libyen et la coopération avec la CPI ne peut se substituer à la justice libyenne, a-t-il rappelé.  S’agissant des migrants, l’État libyen s’emploie à les protéger contre toute violation à leur encontre et à les rapatrier sur une base volontaire avec l’accord des États concernés, a-t-elle ajouté, en invitant la communauté internationale à examiner les faits en dehors de toute politisation.  La délégation libyenne a appelé la CPI à se coordonner avec les autorités de son pays pour « aller plus vite » et retrouver les auteurs de ces crimes, qu’il s’agisse d’individus, d’entités ou d’États.

La CPI est une institution profondément politisée qui n’a rien à voir avec la justice, a tranché quant à elle la Fédération de Russie, arguant que la Cour ne s’intéresse même pas à l’élimination extrajudiciaire d’« indésirables » comme le Président Kadhafi.  Pour elle, cette juridiction « marionnette » est devenue un simple paravent pour les États-Unis, qui ne sont pas parties au Statut de Rome de la CPI.  La Chine a de son côté espéré qu’elle continuerait à respecter le principe de complémentarité judiciaire et la souveraineté des pays concernés par ses enquêtes, loin de tout « deux poids, deux mesures ».

Les efforts pour promouvoir l’obligation de rendre des comptes pour les crimes les plus graves au regard du droit international ne doivent pas être entravés par la polarisation politique, mais renforcés par l’objectif de rendre justice aux victimes, a tempéré le Brésil.  La France et le Japon se sont engagés à poursuivre leur appui politique, financier, opérationnel et humain auprès de la Cour.  La délégation japonaise a cependant regretté qu’il n’y ait pas encore de progrès majeurs dans l’enquête relative aux violences de 2011, notamment s’agissant des poursuites ouvertes contre M. Saïf Al-Islam Kadhafi.  Aussi a-t-elle invité la CPI à accélérer ce processus.

LA SITUATION EN LIBYE

Déclarations

Dans une déclaration liminaire, Mme MARIA ZABOLOTSKAYA (Fédération de Russie) a dit ne pas comprendre la présence du Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) au Conseil de sécurité ce matin, se demandant pourquoi il avait été invité.  La CPI s’est transformée en jouet aux ordres des pays occidentaux, en se fixant des objectifs politiques et en n’appliquant pas les résolutions du Conseil de sécurité.  Sa présence à cette séance est non seulement absurde, mais constitue une insulte à l’Organisation, a ajouté la représentante.

M. KARIM ASAD AHMAD KHAN KC, Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), a rappelé que la nouvelle stratégie de son bureau en Libye pour enquêter repose sur une approche ciblée, dynamique et axée sur le terrain.  Les progrès sont mesurés à l’aune d’objectifs clairs.  Au cours des six derniers mois, des avancées tangibles ont été réalisées, a-t-il fait valoir.  Plus de 500 éléments de preuve ont été recueillis dans le cadre d’une vingtaine de missions, y compris du matériel vidéo et audio, des informations médicolégales et de l’imagerie satellite.  La justice a été rendue dans les tribunaux nationaux et le Bureau a activement contribué aux enquêtes dans six États parties sur les crimes commis en Libye, s’est-il encore félicité.  En novembre 2022, il a effectué la première visite officielle d’un procureur de la CPI en Libye depuis plus de 10 ans, où il s’est entretenu avec les autorités libyennes, les communautés touchées et les organisations de la société civile.  De son côté, la Mission indépendante d’établissement des faits des Nations Unies sur la Libye a directement soutenu l’identification de témoins supplémentaires pertinents pour les enquêtes de la CPI.  Le Bureau a désormais recours aux technologies de pointe pour la cause de la justice, notamment le nouveau système de gestion des preuves, qui permet d’utiliser l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique pour accélérer les enquêtes et les analyses.

S’agissant de la délivrance de mandats d’arrêt, les nouvelles demandes ont été examinées par la Chambre préliminaire de la CPI et quatre délivrés au cours de la période considérée.  Le Bureau du Procureur travaille aujourd’hui avec les États parties en vue de procéder à l’arrestation des individus visés.  En outre, ces dernières semaines, deux mandats d’arrêt supplémentaires ont été délivrés, a mentionné M. Khan.  Pour lui, la délivrance de mandats d’arrêt n’est pas une fin en soi mais démontre la détermination à établir les responsabilités pour les crimes les plus graves.  Évoquant les partenariats, le Procureur a précisé qu’en Italie et aux Pays-Bas, grâce au soutien du Haut-Commissariat et d’Europol, plusieurs individus suspectés de s’être livrés à la traite humaine font l’objet d’enquêtes et de poursuites grâce à une étroite coopération internationale.  En janvier, un Érythréen âgé de 39 ans, suspecté de crimes commis contre des migrants, a été arrêté au Soudan lors d’une opération de police internationale dirigée par les Émirats arabes unis. 

Le partenariat avec le Procureur général, le procureur militaire et le Ministre de la justice de Libye a permis d’identifier un certain nombre de domaines de coopération, y compris la criminalistique et l’identification des restes, a ajouté le Procureur, qui a annoncé une autre mission en Libye destinée à poser les fondations d’un éventuel bureau du Procureur à Tripoli.  Cette équipe a besoin de soutien continu et compte sur l’appui du Conseil de sécurité, des États parties au Statut de Rome ou non, et des communautés auprès desquelles la CPI est engagée.  Le Procureur a ensuite énuméré les résultats obtenus grâce à l’appui des États au cours de l’année écoulée. 

M. Khan a également mentionné des récits de survivants qu’il a rencontrés lors de son voyage en Libye en novembre dernier, comme celui d’un homme qui a perdu 15 membres de sa famille et d’une femme dont les deux fils ont été enlevés devant elle en pleine nuit.  Elle n’a plus jamais entendu parler d’eux.  Le message des survivants, c’est qu’ils se sentent abandonnés et que les promesses de justice du Bureau et du Conseil, sont restées lettre morte.  Il a toutefois déclaré que grâce à la nouvelle approche stratégique, en travaillant avec précision et en continuant à nouer des partenariats avec tous les acteurs, nous commençons maintenant à obtenir les résultats que ces familles exigent à juste titre.  « Si nous pouvons maintenir ce cap, si nous pouvons continuer à compter sur votre soutien, nous pourrons peut-être enfin regarder ces survivants dans les yeux.  Nous pourrons leur dire que nous faisons de notre mieux, qu’il y a de l’espoir, qu’ensemble, nous pouvons faire quelque chose pour honorer la mémoire de ceux qu’ils ont perdus.  Ensemble, nous pouvons défendre la vie de ceux qu’ils aimaient », a exhorté M. Khan.

M. KIMIHIRO ISHIKANE (Japon) a rappelé qu’en tant qu’institution centrale du système de justice pénale internationale, la CPI est en première ligne de la lutte mondiale contre l’impunité.  Le Japon soutient fièrement la Cour en lui fournissant des ressources humaines et financières, a-t-il souligné, avant de prendre note des progrès réalisés dans les enquêtes menées en Libye sous la direction du Bureau du Procureur.  Selon lui, la délivrance de nouveaux mandats d’arrêt conduira à la réalisation de la justice si un processus approprié s’ensuit sans délai. Le représentant s’est réjoui à ce propos que la collaboration positive avec les autorités nationales compétentes commence à porter des fruits tangibles dans la lutte contre les crimes contre les migrants.  Il s’est d’autre part félicité de la mise en œuvre de la stratégie d’action renouvelée annoncée en avril 2022 et jugé encourageants la coopération continue des autorités libyennes et l’engagement accru de la Cour auprès des victimes et de la société civile.  Il a en outre pris note avec satisfaction des efforts de la CPI pour établir un bureau de liaison à Tripoli. 

Le délégué a cependant regretté qu’il n’y ait pas encore de progrès majeurs dans l’enquête sur les violences de 2011, y compris dans la poursuite de M. Saïf Al-Islam Kadhafi.  Invitant la Cour à accélérer ce processus, il a rappelé que le succès de cette dernière dépend également de la coopération des États.  Sans leur aide, la CPI ne peut pas fonctionner efficacement, a-t-il fait valoir, avant de rappeler que c’est le Conseil de sécurité qui, à l’unanimité de ses membres, a décidé de renvoyer la situation en Libye à la Cour.  Estimant que l’adoption d’une résolution « n’est pas un objectif mais plutôt un point de départ », il a souhaité que le travail du Conseil « ne se limite pas à entendre le Procureur tous les six mois et à faire rapport aux capitales ».  Tout en nous assurant de la pleine mise en œuvre de nos résolutions, nous devons laisser la Cour remplir son mandat, a-t-il conclu. 

Mme DIARRA DIME-LABILLE (France) a assuré que la France continuera à soutenir le travail de la CPI au travers d’un appui politique, financier, opérationnel et humain.  Les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la nouvelle stratégie du Bureau en ce qui concerne la situation en Libye, présentée au Conseil par le Procureur il y a un an dans son vingt-troisième rapport, constituent des signaux positifs, a-t-elle relevé.  Selon elle, la lutte contre l’impunité pour les crimes commis en Libye ne peut être possible que grâce à une coopération active entre la Cour et les autorités nationales.  La France se félicite en outre que l’assistance renforcée de la CPI en Libye ait permis un engagement accru du Bureau du Procureur auprès des victimes, des témoins et des communautés touchées.  La déléguée a encouragé les autorités libyennes à coopérer pleinement avec le Bureau, en particulier en ce qui concerne l’accès à la documentation nécessaire aux enquêtes ou les demandes d’assistance adressées par le Bureau.  Elle a souligné que les crimes les plus graves commis en Libye depuis 2011 doivent tous faire l’objet d’enquêtes et de poursuites, y compris ceux commis par Daech et ceux visant les migrants et les réfugiés.  À cet égard, l’aide apportée au Bureau du Procureur par les organisations internationales et régionales, ainsi que par la société civile libyenne, reste précieuse.  En outre, les disparitions forcées et les violences sexuelles dont le Bureau fait état sont tout aussi inacceptables.  Elle a conclu en exhortant toutes les parties prenantes en Libye à s’engager en faveur d’une Libye souveraine, unie, stable et démocratique. 

M. MARK A. SIMONOFF (États-Unis) a estimé que le rapport le plus récent, soumis par le Procureur au Conseil, reflète des progrès considérables au cours des six derniers mois.  La politique de coopération active avec les autorités libyennes, les organisations régionales et les partenaires internationaux a posé les jalons de la reddition des comptes, en dépit des difficultés en Libye et d’un environnement difficile plus particulièrement les nombreux mandats d’arrêt dont certains restent sous scellés.  S’il a salué l’approche stratégique privilégiée par le Procureur, le délégué s’est dit toutefois préoccupé par le sort des migrants, y compris des femmes et des enfants, victimes de violences sexuelles et qui continuent à faire l’objet de violation de leurs droits.  Il a encouragé les autorités libyennes à prendre des mesures crédibles pour démanteler les trafics.  S’agissant des discussions entre la CPI et les autorités libyennes, y compris la création d’un bureau de liaison en Libye pour renforcer la collaboration avec la population et les victimes, il a demandé aux autorités libyennes de renforcer la coopération avec la CPI en garantissant que ceux qui font l’objet de mandats d’arrêt soient traduits en justice le plus rapidement possible. 

S’appuyant sur les conclusions de la mission d’établissement des faits, le délégué a constaté qu’il y a des motifs crédibles de croire que des crimes contre l’humanité ont été perpétrés contre les Libyens.  Saluant les contacts pris avec les organisations de la société civile et les victimes en Libye, il a dit que cela est essentiel pour rendre justice à ces dernières, qui patientent depuis bien trop longtemps d’être entendues.  Selon le représentant, résoudre les incertitudes politiques et établir les responsabilités en Libye sont des moyens de réagir à l’instabilité chronique à laquelle continue d’être confrontée la Libye, y compris la mobilisation des groupes armés, les violations des droits humains et des atteintes aux droits humains.  Pour rétablir la paix et la liberté, il faut retirer tous les groupes mercenaires de la Libye sans plus tarder, a exhorté en conclusion le représentant.

M. SOLOMON KORBIEH (Ghana) a salué les efforts déployés par le Bureau du Procureur pour établir un dialogue renforcé avec les autorités libyennes dans la mise en œuvre du principe de complémentarité, notamment en contribuant activement aux enquêtes menées par les forces de l’ordre nationales de six États parties sur les crimes internationaux commis en Libye.  Cette approche renforcera les capacités des institutions libyennes en vue des procès nationaux des inculpés, a-t-il dit, se félicitant également de l’arrestation et de la poursuite par les autorités nationales compétentes des principaux suspects liés aux crimes commis contre des migrants en Libye.  Le représentant s’est d’autre part réjoui du partenariat renforcé entre le Bureau du Procureur et la Libye, avant d’insister sur l’excellente coopération de Tripoli avec la mission indépendante d’établissement des faits des Nations Unies sur la Libye. Tout en applaudissant ces « relations positives », il a appelé le Gouvernement d’unité nationale libyen à assurer la pleine coopération de toutes les autorités nationales compétentes avec le Bureau du Procureur, conformément à la résolution 1970 (2011) du Conseil de sécurité, notamment en fournissant des documents pertinents aux enquêtes de la CPI. 

Le délégué s’est par ailleurs réjoui de l’engagement accru du Bureau du Procureur auprès des victimes, des témoins et des communautés touchées, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays.  À ses yeux, cette stratégie renouvelée enrichira l’enquête, fournira un accès aux preuves et aux témoins potentiels, et garantira un suivi des développements actuels.  En appui de ces efforts, il a souhaité que la communauté internationale fournisse une aide psychologique et de réhabilitation efficace aux victimes à travers la Libye. Enfin, notant avec satisfaction que l’étroite coopération avec d’autres pays et agences a conduit à l’arrestation et à l’extradition récentes de deux suspects de crimes contre des migrants et des réfugiés d’Éthiopie, il a remercié Europol et Interpol pour leur soutien et a appelé les autorités libyennes à respecter les droits humains des migrants et à les protéger conformément au droit international. 

M. SUN ZHIQIANG (Chine) a dit soutenir le dialogue politique afin de parvenir à l’organisation d’élections le plus rapidement possible en Libye.  Selon lui, c’est l’ingérence étrangère qui est une cause majeure de la situation actuelle en Libye.  Le représentant a appelé la communauté internationale à apporter une aide au développement du pays, tout en se gardant d’essayer d’imposer des solutions venues de l’extérieur.  La position de la Chine par rapport à la CPI n’a pas changé, a affirmé son délégué, qui a dit espérer qu’elle continuera à respecter le principe de complémentarité judiciaire et la souveraineté des pays concernés par ses enquêtes, loin du « deux poids, deux mesures ».

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a dit qu’en s’efforçant d’établir les responsabilités des auteurs de génocide et de crimes contre l’humanité en Libye, la CPI apporte une contribution majeure à la promotion de la paix et de la sécurité dans ce pays.  C’est pourquoi la réflexion du Conseil doit être orientée vers les résultats en matière de promotion d’une paix durable dans le pays, a insisté le représentant. Pour le délégué, les enquêtes menées par la CPI visent à amener les responsables de crimes contre l’humanité à répondre de leurs actes, un processus qui doit être dirigé et pris en charge par les Libyens eux-mêmes, a demandé le représentant, en exhortant à accorder un rôle pertinent au système judiciaire national et des mécanismes de réconciliation de Libye.  À cet égard, la CPI peut jouer un rôle complémentaire à celui du système judiciaire libyen, afin que les auteurs de crimes contre l’humanité soient tenus pour responsables de leurs actes, a-t-il ajouté en conclusion.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) s’est félicité du rythme accéléré de l’enquête de la CPI et des progrès accomplis dans la mise en œuvre de sa nouvelle stratégie pour la Libye, en particulier la délivrance de nouveaux mandats d’arrêt par la Chambre préliminaire de la CPI au cours de la période considérée.  Voyant dans ces efforts des étapes importantes pour rendre justice au peuple libyen, il s’est aussi déclaré reconnaissant au Gouvernement d’unité nationale de la Libye d’avoir facilité la première visite officielle d’un procureur de la CPI dans le pays depuis plus de 10 ans.  Pour que l’enquête se poursuive avec succès, il est selon lui essentiel qu’un soutien supplémentaire soit apporté à l’enquête par toutes les autorités libyennes compétentes, notamment en matière de fourniture de documents. 

Le représentant a également salué l’engagement accru auprès des témoins et des survivants, remerciant la mission indépendante d’établissement des faits d’avoir partagé son expertise avec le Bureau du Procureur.  Dans la perspective de la fin de cette mission, il a souhaité que la MANUL et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) poursuivent leur coopération pour aider à documenter et à sauvegarder les preuves de crimes graves.  La justice transitionnelle est vitale pour la sécurité et la stabilité à long terme et doit être intégrée au processus politique libyen, a-t-il ajouté.  Pour finir, il a exhorté toutes les parties à travailler ensemble pour protéger les droits humains et veiller à ce que justice soit rendue lorsque des crimes sont commis, notamment par la coopération avec la CPI et la remise des personnes faisant l’objet de mandats d’arrêt. 

Mme MARIA ZABOLOTSKAYA (Fédération de Russie) a noté que le Conseil de sécurité s’est réuni aujourd’hui pour se saisir du dernier rapport en date du soi-disant Procureur de la soi-disant Cour pénale internationale.  Selon elle, cette structure a une fois de plus manqué de respect envers le Conseil en se présentant ici avec des réponses vides maquillées en rapport d’enquêtes.  En tant qu’institution profondément politisée qui n’a rien à voir avec la justice, la CPI n’applique pas la résolution 1970 (2011), a-t-elle clamé.  Pour elle, cette juridiction sert les intérêts de l’Occident, dans une complicité totale avec l’agression militaire menée par l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) contre la Libye.  Les pays de la région souffrent encore de la menace terroriste qui découle directement de ces événements, a-t-elle noté.  La représentante a évoqué des manipulations de la CPI en vue de couvrir l’agression militaire non provoquée et injustifiée de l’OTAN.  Elle a rappelé comment cette tâche fut entamée par l’ancien Procureur Moreno-Ocampo, qui avait fait preuve de créativité en accusant le dirigeant libyen de l’époque d’avoir fourni du viagra à des unités avançant sur Tripoli pour les encourager à commettre des viols collectifs.  Comme nous le savons, ces accusations se sont avérées mensongères, a-t-elle dit.  La CPI s’est empressée de créer une commission d’enquête interne dont on ignore toujours les résultats, a-t-elle déclaré.

La déléguée a ensuite ironisé sur le fait que la CPI ne s’intéresse pas à l’élimination extrajudiciaire des « indésirables » comme le Président Kadhafi.  Elle a aussi mentionné que la Cour a subi des pressions américaines et a été contrainte d’abandonner les enquêtes visant les soldats américains et britanniques en Afghanistan et en Iraq.  Cette Cour est une véritable championne du « balayage sous le tapis » des atrocités de leurs patrons, a-t-elle lancé.  Notre intervenant d’aujourd’hui, a-t-elle dit, un citoyen britannique, a même inventé un terme spécial pour cela: « dépriorisation ».  Selon elle, les pays occidentaux, qui font d’énormes dotations financières à la CPI, lui envoient également des équipes entières d’enquêteurs et de procureurs pour collecter des preuves. La CPI est ainsi devenue un simple paravent dont se servent les États-Unis qui ne sont pourtant pas parties au Statut de Rome.  C’est parce que la CPI n’a pas été à la hauteur des aspirations idéalistes de ses créateurs que les pays en développement commencent sérieusement à envisager de se retirer du Statut de Rome, a-t-elle souligné, précisant que la Russie avait pris cette décision dès novembre 2016. 

La déléguée a aussi rappelé que les États-Unis ont déclaré au Conseil de sécurité que la CPI ne peut poursuivre des citoyens américains, puisque Washington n’est pas partie au Statut de Rome.  Elle s’est étonnée de voir qu’ils semblent changer de posture en soutenant la poursuite de ressortissants d’États non parties au Statut de Rome.  Elle a souligné que la CPI, en tant que « marionnette politisée », créée sur la base d’un traité entre un nombre limité de pays, ne devrait en principe pas interférer avec le fonctionnement normal de l’ONU et de ses organes.  De ce fait, pas un seul centime du budget ordinaire de l’ONU ne devrait être alloué à ce « tribunal fantoche ».  Elle a demandé au Secrétaire général de l’ONU de veiller à ce que cela n’arrive pas.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a salué le renforcement de la coopération du Bureau du Procureur avec les autorités nationales libyennes, notamment le projet de création d’un bureau de liaison à Tripoli.  La coopération entre les États parties est de la plus haute importance pour permettre à la Cour de s’acquitter de son mandat en Libye, étant donné que la Cour ne dispose pas de son propre organe d’exécution, a insisté le représentant.  Il a exhorté tous les États, organisations régionales et autres entités concernées à coopérer pleinement avec la Cour et le Procureur s’agissant de la situation en Libye.  Les efforts pour promouvoir l’obligation de rendre des comptes pour les crimes les plus graves au regard du droit international ne doivent pas être entravés par la polarisation politique, mais renforcés par l’objectif de rendre justice aux victimes. Bien qu’il n’y ait pas eu de jugement sur la situation libyenne jusqu’à présent, le représentant a salué les efforts déployés par le Bureau du Procureur pour recueillir des preuves et donner la priorité aux situations renvoyées par le Conseil de sécurité.  Il a exhorté le Procureur à lever les scellés sur les mandats d’arrêt existants, dans un souci de transparence. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) s’est félicité que les mesures prises par le Bureau du Procureur pour poursuivre la mise en œuvre des quatre éléments de la stratégie d’action renouvelée en Libye aient contribué à la réalisation de plusieurs des objectifs énoncés dans la résolution 1970.  Il a souligné l’importance de maintenir une présence continue dans le pays, pour collecter des preuves avec diligence et optimiser la durée des enquêtes, en s’engageant d’avantage avec les victimes et les organisations de la société civile. 

Après avoir salué la possibilité d’établir un bureau du Procureur à Tripoli, et le recours à la technologie pour améliorer et accélérer les processus de collecte de preuves, le représentant a jugé essentiel de disposer d’experts dans le cadre de l’instruction des dossiers.  Il s’est par ailleurs félicité de la collaboration accrue entre le Bureau du Procureur et les autorités nationales libyennes, conformément au principe de complémentarité.  « À cet égard, nous nous félicitons qu’il soit disposé à contribuer au renforcement des capacités nationales en matière de criminalistique et espérons qu’il continuera à le faire également dans le domaine judiciaire », a-t-il précisé. 

Le délégué a noté avec inquiétude que l’un des principaux défis identifiés par le Procureur dans son rapport pour l’accomplissement de son mandat est celui des contraintes budgétaires auxquelles il est confronté.  Aussi a-t-il demandé qu’il dispose des ressources nécessaires, appelant le Conseil de sécurité à réfléchir aux mécanismes qui pourraient être utilisés pour renforcer sa coopération avec la Cour pénale internationale (CPI), en particulier s’agissant des affaires qui lui sont renvoyées. 

Mme FRANCESCA GATT (Malte) a jugé que le renvoi par le Conseil de sécurité de la situation libyenne à la CPI est essentiel non seulement pour la responsabilité des crimes internationaux, mais aussi pour la paix et la stabilité à long terme dans le pays.  À cette aune, elle s’est félicitée des progrès accomplis dans la mise en œuvre de la stratégie d’action renouvelée pour la Libye, notamment de l’accélération de la collecte de preuves et de la délivrance de mandats d’arrêt.  Elle a également salué l’engagement accru du Bureau du Procureur auprès des victimes, des associations et représentants de victimes, d’autres organisations de la société civile et des militants des droits humains à l’intérieur et à l’extérieur du pays.  La représentante a par ailleurs estimé que l’ajout au sein du Bureau d’experts ayant une expérience dans les enquêtes sur la traite des êtres humains et les crimes sexuels et sexistes est un pas dans la bonne direction.  De même, elle a appuyé l’assistance fournie par la MANUL au Bureau, ainsi que les échanges du Bureau du Procureur avec la mission indépendante d’établissement des faits sur la Libye. 

Notant que les efforts du Bureau pour coordonner les activités d’enquête avec les États tiers et les agences internationales ont abouti à des enquêtes et des poursuites en Libye, la déléguée a encouragé ces actions ainsi que celles à l’appui des enquêtes nationales.  Elle a aussi salué la première visite officielle du Procureur en Libye en novembre 2022 et les progrès accomplis depuis, remerciant les autorités libyennes d’avoir facilité ces efforts.  Elle a toutefois estimé qu’une coopération plus poussée sera nécessaire lors de la prochaine mission opérationnelle et logistique, notamment pour l’établissement d’un bureau de liaison à Tripoli.  Cela renforcera la responsabilité, la complémentarité et rapprochera la justice des victimes, a-t-elle souligné. 

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a rappelé que la réunion d’information organisée par le Procureur depuis Tripoli, l’an dernier, aura été d’une grande importance, car elle a permis de renforcer et d’améliorer la stratégie d’enquête et son déroulement, ainsi que renforcer la coopération avec les autorités libyennes.  Il a félicité le Bureau du Procureur qui a maintenu un cap dans la mise en œuvre de sa nouvelle stratégie axée sur l’accélération des activités d’enquêtes et du plan d’action concernant la situation en Libye, ce qui a donné lieu à la délivrance de nouveaux mandats d’arrêt sous scellés.  Le délégué a salué la mise en place d’une plateforme de gestion des éléments de preuve recourant à l’intelligence artificielle et à l’apprentissage automatique, qui contribuera de manière significative à améliorer les aspects quantitatifs et qualitatifs des bases de données.  Il a ensuite souligné l’impérieuse nécessité de créer les conditions d’une justice réparatrice pour le peuple libyen.  Cela implique de faire aboutir le processus politique, conformément aux résolutions pertinentes de ce Conseil, notamment la résolution 2570 (2021), en vue d’un règlement pacifique et durable de la crise en Libye.  De même, le Gabon s’associe au projet de déclaration à la presse qui sera lue au nom des États membres qui siègent au Conseil de sécurité et sont parties au Statut de Rome, a—t-il précisé en conclusion. 

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a salué les progrès concrets réalisés par le Bureau du Procureur pour revitaliser les enquêtes en Libye.  Elle s’est notamment félicitée de la délivrance de nouveaux mandats d’arrêt et des avancées dans la collecte de preuves sur la commission de crimes graves.  Tout en constatant que la protection des témoins et des victimes de crimes d’atrocité reste difficile, elle a encouragé le Bureau à continuer de recueillir des preuves des crimes présumés commis pendant le conflit.  À cet égard, la représentante s’est déclarée choquée par les crimes commis en Libye contre des migrants.  Ces personnes vulnérables continuent de subir de graves violations en toute impunité, en particulier la torture, la détention dans des conditions dégradantes et des atteintes contre les femmes et les enfants, a-t-elle dénoncé, avant d’appeler la CPI et les autorités libyennes à enquêter sur ces crimes atroces et à traduire les auteurs en justice.  La déléguée a par ailleurs exprimé son appui à l’ouverture d’un bureau de liaison du Bureau du Procureur à Tripoli, y voyant un moyen d’aider au renforcement de la coopération.  Après avoir une nouvelle fois salué ce partenariat, elle a regretté l’insécurité constante et le déni d’accès aux documents et aux scènes de crimes qui nuisent aux enquêtes.  Elle s’est néanmoins félicitée de la feuille de route des autorités libyennes pour la reddition de comptes et a invité le Bureau du Procureur à continuer de renforcer ses programmes d’aide aux victimes et aux témoins. 

M. SAOD RASHID ALMAZROUEI (Émirats arabes unis) s’est dit encouragé par les mesures prises par la CPI pour poursuivre une coopération étroite avec les autorités libyennes, y compris dans le cadre de l’équipe conjointe sur les crimes commis contre les migrants.  Il a salué les efforts visant à renforcer la stratégie renouvelée du Bureau du Procureur, notamment les partenariats avec les acteurs nationaux.  Des partenariats qui ont contribué à l’arrestation d’un Érythréen au Soudan, l’un des principaux suspects de crimes commis contre les migrants, dans le cadre d’une opération de police internationale dans laquelle les Émirats arabes unis ont joué un rôle de premier plan, s’est enorgueilli le représentant.  Pour lui, ces efforts internationaux pour démanteler les réseaux de criminalité transnationale organisée doivent se poursuivre, y compris dans les pays d’origine, de destination et de transit.  S’agissant de la visite du Procureur en novembre en Libye, le délégué a estimé qu’il faut poursuivre les réunions et les contacts avec les autorités nationales, pour les aider à prendre des mesures concrètes.  Il a rappelé l’importance de respecter le principe de complémentarité énoncé dans le Statut de Rome et la responsabilité de chaque État en matière de justice transitionnelle.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a félicité le Bureau du Procureur pour les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la stratégie d’action renouvelée pour la Libye, notamment l’usage de la technologie dans la gestion des preuves et les efforts visant à rendre la justice accessible aux victimes.  En dépit des défis politiques et sécuritaires dans le pays, de nombreuses missions sur le terrain ont pu être effectuées, aboutissant à des résultats concrets, à savoir la délivrance de nouveaux mandats d’arrêt dans le cadre des enquêtes en cours, a-t-elle applaudi, avant d’encourager les autorités libyennes à poursuivre leur coopération pleine et entière avec le Bureau du Procureur.  La représentante a exprimé le soutien de son pays aux efforts menés en vue de l’ouverture d’un bureau de liaison en Libye et salué la politique proactive de coopération du Bureau du Procureur avec les États tiers. À cet égard, elle a souligné le rôle important joué par les Émirats arabes unis et les Pays-Bas dans l’arrestation d’un suspect de crimes commis à l’encontre de migrants.  Elle a ensuite appelé tous les États à faire usage du principe de compétence universelle pour poursuivre les crimes internationaux les plus graves, alors que le dernier rapport de la mission indépendante d’établissement des faits sur la Libye fait état de possibles crimes contre l’humanité contre des migrants et des personnes placées dans des centres de détention.  Enfin, affirmant que la mission de la CPI demeure cruciale pour rendre la justice, en Libye et ailleurs, la déléguée a souhaité que la Cour reste indépendante et impartiale, et dispose des ressources humaines et financières nécessaires à l’exécution de son mandat. 

Le représentant de la Libye s’est à nouveau félicité de la visite du Procureur de la CPI en Libye en novembre dernier.  Il y a vu un moyen de renforcer la coopération entre la Cour et les autorités libyennes, notamment pour l’établissement des faits et les interactions avec les victimes et leurs familles.  La Libye s’engage à demander des comptes et à punir les auteurs de crimes et de violations, comme le prévoit la législation nationale, a réaffirmé le représentant.  Faisant valoir que l’administration de la justice sur le territoire libyen est la prérogative souveraine de l’État libyen, il a assuré que la juridiction judiciaire nationale mène des procès justes et impartiaux. Le représentant a ajouté que si la coopération des autorités libyennes avec la CPI se fait en vertu du principe de complémentarité, cela ne signifie aucunement que la CPI peut se substituer à la justice libyenne.  Il a ensuite indiqué que les recherches de fosses communes se poursuivent dans le pays et que le parquet libyen procède à des enquêtes scrupuleuses pour identifier les corps.  Alors que plusieurs des auteurs de ces crimes ont été identifiés et que des mandats d’arrêt ont été délivrés à leur encontre, beaucoup sont encore en fuite en Libye et dans d’autres pays, a-t-il déploré, appelant la CPI à poursuivre ces personnes et ceux qui les protègent pour tous les crimes commis depuis 2011. 

Le représentant a d’autre part assuré qu’en dépit de ces difficultés, l’État libyen s’emploie à protéger les migrants contre toute violation à leur encontre et s’efforce de les rapatrier sur une base volontaire et avec l’accord des États concernés.  Il a toutefois estimé que les crimes contre les migrants sont des cas essentiellement « individuels » et que ce phénomène n’est le fait de la seule Libye.  Invitant la communauté internationale à examiner les faits sans politisation, il a souligné que la situation des migrants en Libye n’est pas nouvelle et ne peut être isolée des ingérences étrangères dans le pays. Il convient donc, selon lui, de créer des synergies pour aider la Libye à lutter contre les réseaux criminels transnationaux de traite des êtres humains et de traduire les responsables de ces actes en justice.  Le délégué a indiqué à ce propos que le Bureau du Procureur général de Libye a réussi à identifier plusieurs personnes impliquées dans ces réseaux et a souhaité que des poursuites soient engagées par la CPI, ces organisations criminelles internationales relevant de la compétence de la Cour. 

Pour le représentant, faciliter la réconciliation nationale commence par la mise en place d’une justice transitionnelle, laquelle est la seule voie possible pour rétablir la confiance dans les institutions.  Rappelant à cet égard que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles, il a appelé la CPI à se coordonner avec les autorités libyennes pour « aller plus vite » et retrouver les auteurs de ces crimes, qu’il s’agisse d’individus, d’entités ou d’États.  En effet, alors que les enquêtes durent depuis des années et que nous en sommes au vingt-cinquième rapport du Procureur de la CPI, « où sont les résultats concrets? » s’est-il interrogé.  Enfin, il a jugé que le soutien à la stabilité de la Libye et à la recherche d’une solution politique globale est la seule façon de parvenir à la justice et d’édifier l’état de droit.  Il a enfin estimé que la situation actuelle de son pays est aussi le fruit des divisions de la communauté internationale, et notamment du Conseil de sécurité.  « Il s’agit d’une responsabilité commune », a-t-il insisté en conclusion.

Reprenant la parole, M. KHAN, Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), a souligné que la Cour est basée sur le principe de complémentarité et non de concurrence.  Le Statut de Rome n’est pas un effort pour contrôler une juridiction ou invoquer des arguments juridiques astucieux, mais plutôt pour travailler de concert afin de donner moins d’espace à l’impunité et davantage à la justice, a-t-il souligné. Le Procureur a ensuite déclaré que les mandats d’arrêt devraient être rendus publics et qu’ils resteront scellés s’il existe une possibilité d’arrestation immédiate.  Bien qu’il ait déjà demandé la levée des scellés sur les mandats d’arrêt dans le cas de la Libye, ce sont les juges qui en décident.

M. Khan a ensuite parlé du Fonds d’affectation spéciale du Bureau du Procureur, soulignant la nécessité de faire comprendre que la cause de la justice internationale est celle de l’humanité.  Même si la Cour n’est pas une panacée, elle joue néanmoins un rôle important et s’efforce d’avoir plus d’impact.  « Je suis le premier à admettre que la justice internationale est loin d’être parfaite », a-t-il reconnu, en soulignant qu’« il est juste de dire que le visage de l’humanité a été marqué, profondément blessé, par l’application imparfaite du droit international ».  Cela ne devrait toutefois pas constituer une défense ou une justification pour les États Membres, pour la communauté internationale, ni pour les acteurs non étatiques de s’automutiler et de défigurer encore plus « d’autres parties du corps ».  Ce qui est en jeu ici, ce n’est pas la Cour, mais ce que chaque membre du Conseil fait pour soutenir l’humanité, a ajouté le Procureur. 

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