Le Conseil de sécurité examine de nouvelles approches pour restaurer la confiance « érodée » dans un système international « sous tension »
À l’initiative de sa présidence suisse, dont c’était le premier événement phare de ce mois de mai, le Conseil de sécurité a tenu aujourd’hui un débat public consacré aux moyens de « Renforcer la confiance pour établir une paix durable ». Pour la Suisse, entrée à l’ONU il y a 20 ans et qui assume pour la première fois la présidence du Conseil, il s’agissait d’examiner et renforcer les approches du Conseil de sécurité en matière d’instauration de la confiance, afin de favoriser une paix durable. Le débat intervenait aussi en prélude aux délibérations que devraient bientôt entamer les États Membres de l’ONU, sur la proposition du Secrétaire général relative à un « Nouvel Agenda pour la paix », qui s’appuiera sur les principes de confiance, d’universalité et de solidarité.
Les quelque 70 délégations qui sont intervenues ont donc cherché à identifier des pistes de réflexion pour restaurer une confiance « mise à l’épreuve » entre les différents acteurs et institutions qui œuvrent pour la paix tout en s’accordant sur la nécessité d’un nouveau « contrat social » ancré sur les droits humains. L’instauration de la confiance a été examinée sous trois angles: l’inclusion, les cadres normatifs et les faits.
Les « droits humains sont essentiels à chaque étape des processus de paix », a plaidé le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, M. Volker Türk, renvoyant à l’ histoire qui « nous met en garde, mais qui nous montre également la voie à suivre » . Dans son intervention liminaire, le responsable onusien a mis en avant la résolution 2171 (2014) sur la prévention des conflits armés en vue d’initier des actions préventives ciblées, insistant sur la nécessité de restaurer la confiance, principe qu’il a eu l’occasion de vérifier sur le terrain aussi bien en Haïti, en Colombie et plus récemment au Soudan.
De fait, a reconnu Mme Funmi Olonisakin, Vice-Présidente du King’s College de Londres et professeure de sécurité, leadership et développement, l’avenir n’est pas linéaire, mais en comprenant la complexité de cadres temporels convergents, on conçoit la paix et la guerre comme deux éléments d’un même continuum , jugeant utile à ce propos de garder à l’esprit la « réalité empirique » des régions et des personnes situées en périphérie des processus décisionnels.
Le Nouvel Agenda pour la paix a été souvent mentionné. Pour les Philippines, il devrait être centré sur les personnes et renforcer l’inclusion des femmes, des jeunes et de la société civile dans le cadre du droit international. L’Union africaine a, pour sa part, souligné l’importance d’optimiser la mise en œuvre des efforts d’intérêts mutuels de l’UA et de l’ONU, y compris dans le cadre du Nouvel Agenda. En effet, a acquiescé l’Autriche, l’ONU doit s’appuyer beaucoup plus sur les organisations régionales et sous-régionales, notamment grâce au financement durable des actions des partenaires régionaux. Plusieurs délégations ont aussi mis en avant, au sein du système des Nations Unies, la Commission de consolidation de la paix (CCP), et ont souhaité lui voir jouer un rôle plus important.
C’est pourquoi ce débat arrive à point nommé, a estimé, Mme Cynthia Chigwenya, jeune ambassadrice de la paix pour l’Afrique australe, pour qui, avec la guerre en Ukraine et la reprise des combats entre factions au Soudan, le Conseil de sécurité est confronté à des difficultés de taille, mais a aussi la possibilité de changer de cap. De nombreux intervenants ont mis en avant l’importance d’associer les jeunes, ainsi que les femmes et les populations locales, afin de rétablir la confiance de ces groupes dans les institutions, en particulier l’ONU et le Conseil de sécurité.
Oui, a reconnu le Conseiller fédéral et Ministre des affaires étrangères de la Suisse, le système multilatéral est sous tension, « mais non, il n’est pas en faillite! ». À ses yeux, c’est ne rien faire qui constituerait le véritable échec.
Nombre d’intervenants ont insisté sur le fait que c’est d’abord aux États Membres de bâtir la confiance par des institutions et des processus inclusifs, mais aussi par le respect des engagements pris, comme l’ont rappelé tant la Suisse que la France, laquelle n’a pas manqué de dénoncer la violation de ces principes par la Russie à l’occasion de sa guerre d’agression contre l’Ukraine. La Fédération de Russie a répliqué en se demandant comment parler de confiance dans les circonstances actuelles, face aux actes « perfides » de l’« Occident Global » et à « la guerre par procuration » que mène contre elle l’OTAN.
La Chine a ainsi expliqué la « grave crise de confiance » que traverse le monde par le mépris pour la Charte des Nations Unies, les politiques de deux poids, deux mesures et l’application sélective du droit international, tous comportements qui nuisent à la confiance dans le système international. L’Espagne a regretté cette méfiance croissante entre les États Membres, qui transparaît dans les débats et qui nuit à la crédibilité des Nations Unies lorsqu’elles cherchent à faire face aux défis auxquels se heurtent les sociétés actuelles.
Le Conseil de sécurité a été le premier à être prié de respecter ses propres engagements en mettant en œuvre ses propres résolutions. Que peuvent attendre du Conseil les populations de Palestine, du Sahara ou encore les Rohingya du Myanmar, se sont demandé certaines délégations. Pour plusieurs délégations, dont le Portugal, l’Inde, le Liban et le Brésil, la meilleure façon de restaurer la confiance et l’efficacité du Conseil réside dans l’amélioration effective de sa représentativité et de sa transparence. Pour la délégation brésilienne, une telle réforme globale doit être un élément essentiel du Nouvel Agenda pour la paix.
Quant aux faits, le Haut-Commissaire aux droits de l’homme a appelé à contrer la désinformation et les récits mensongers, qui alimentent l’hostilité et la peur. L’Union européenne a quant à elle mis en avant le lien « puissant » qui existe entre la paix durable et la protection de la liberté d’expression et s’est montrée extrêmement préoccupée par les menaces qui pèsent sur la liberté de la presse et les journalistes, qui sont de plus en plus discrédités et menacés.
CONSOLIDATION ET PÉRENNISATION DE LA PAIX
RENFORCER LA CONFIANCE POUR ÉTABLIR UNE PAIX DURABLE (S/2023/283)
Déclarations
Mme CYNTHIA CHIGWENYA, jeune ambassadrice de la paix pour l’Afrique australe, figure parmi les cinq jeunes sélectionnés par l’Union africaine (UA) pour représenter les cinq régions géographiques du continent africain.
La jeune ambassadrice a d’abord évoqué les différentes actions menées dans le cadre du programme africain « jeunes pour la paix », citant une étude sur les migrations des jeunes et la sécurité en Afrique qui a formulé plusieurs recommandations ensuite incluses dans le compte-rendu du Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine. De même, elle a défendu l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan d’action sur les « Jeunes, la paix et la sécurité » dans les différentes régions.
Cependant, a nuancé Mme Chigwenya, malgré les progrès réalisés, notamment dans l’application d’instruments normatifs et de politique comme la résolution 2250 (2015), qui reconnaît le rôle des jeunes comme artisans de la paix, la Charte africaine pour la jeunesse de 2006 et le cadre continental sur les « Jeunes, la paix et la sécurité », la participation des jeunes dans la consolidation de la paix se heurte à plusieurs obstacles. Elle a notamment cité l’insuffisance des ressources financières et un manque de coordination entre les acteurs. De plus, a-t-elle regretté, les approches empiriques sont très limitées. Se basant sur sa propre expérience, elle a déploré que les stéréotypes présentant les jeunes comme inexpérimentés limitent également leur participation aux processus de médiation en cas de conflit. Pire, certains préjugés présentant les jeunes comme violents compliquent, voire empêchent, la collaboration entre les générations.
Au regard de sa présidence suisse et du Nouvel Agenda pour la paix à venir, l’intervenante s’est néanmoins dite convaincue que le Conseil de sécurité a la possibilité de fixer un programme de travail qui permettra de revoir, amender et modifier les normes existantes. Ce débat public lui est apparu de bon augure pour adopter de nouvelles orientations.
Sans qu’il soit question de renoncer aux principes de base, la souplesse des politiques et pratiques qui seront adoptées sera un élément fondamental pour revoir notre approche en matière de pérennisation de la paix, a plaidé la jeune ambassadrice. Certes, a-t-elle reconnu, avec la guerre en Ukraine et les conflits entre les différentes factions au Soudan, le Conseil de sécurité est confronté à des difficultés de taille, mais il a la possibilité de changer de cap.
Enfin, Mme Chigwenya a préconisé la mise en œuvre du principe de l’inclusion, avec une participation plus significative basée sur des données scientifiques. Elle a insisté sur la nécessité d’investir dans la participation des jeunes au niveau des institutions et de la prise de décisions. Sa présence ici le prouve, car, a-t-elle conclu, c’est par vos efforts que les jeunes, à travers le monde, doivent comprendre qu’ils ne sont pas uniquement inclus mais qu’ils doivent être des artisans du façonnement du programme de travail de la communauté internationale.
M. VOLKER TÜRK, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a déclaré que « l’histoire nous met en garde, mais elle nous montre également la voie à suivre », avant d’estimer que les droits humains sont essentiels à chaque étape des processus de paix. Tout d’abord, comme l’a reconnu le Conseil de sécurité dans sa résolution 2171 (2014), ce prisme permet d’alerter rapidement sur la détérioration d’une situation donnée et d’initier des actions préventives ciblées. Le Haut-Commissariat a développé à cet égard des indicateurs solides sur les meurtres et les violences perpétrés contre les défenseurs des droits humains, la société civile et les médias, ainsi que sur les décès liés aux conflits. Ce travail s’appuie également sur l’accès et l’analyse d’informations en provenance de sources ouvertes, par exemple pour suivre les blocages d’Internet, a précisé le Haut-Commissaire.
M. Türk a cité l’exemple d’Haïti, où les signaux d’alerte précoce ont mis en évidence de manière persistante l’impact profondément destructeur des inégalités, de la corruption et de la marginalisation sur la confiance et la stabilité. L’an dernier, le Conseil a pris des mesures à l’égard d’Haïti, notamment un embargo sur les armes et des sanctions ciblées, a-t-il rappelé avant de juger urgent d’en prendre d’autres. Le Haut-Commissaire a expliqué s’être rendu dans le pays en février et l’avoir trouvé « au bord du gouffre. L’incapacité de l’État à respecter les droits humains a complètement érodé la confiance de la population. Le contrat social s’est effondré. L’anarchie actuelle est une situation d’urgence qui exige une réponse énergique ». Pour lui, il est nécessaire de soutenir immédiatement les institutions haïtiennes en déployant une « force de soutien spécialisée » et respectueuse des droits, assortie d’un plan d’action complet et limitée dans le temps. Le défi à plus long terme consiste à mettre en place des institutions solides qui respectent les humains, a-t-il insisté.
La surveillance des droits humains, fondée sur des informations et des analyses fiables et objectives, permet également d’établir les faits et de contrer la désinformation et les récits mensongers qui alimentent l’hostilité et la peur, a poursuivi le Haut-Commissaire. La valeur de la surveillance des droits et de l’établissement de rapports pendant et après les conflits est bien reconnue par ce Conseil, notamment par le biais des 11 composantes des droits humains des opérations de paix qu’il mandate.
Le dernier pays en date à s’être engagé dans un conflit à part entière est le Soudan, où l’impact des combats actuels sur les droits humains est catastrophique, a poursuivi M. Türk. « N’oublions pas qu’en 2019, le peuple soudanais s’est soulevé pour défendre ses droits et renverser la dictature, avant d’être à nouveau réprimé par le coup d’État militaire d’octobre 2021 », a-t-il relevé. Le Haut-Commissaire a toutefois affirmé que l’espoir de la population soudanaise n’a pas été anéanti. Il a dit avoir été ému par son courage lorsqu’il s’est rendu dans le pays le mois dernier, alors qu’elle s’efforçait une nouvelle fois d’assurer la transition vers une gouvernance civile. « Il n’était pas question que les droits humains soient un concept étranger ou élitiste: l’universalité et la puissance de l’appel à la liberté, à l’égalité et à la justice étaient palpables », a-t-il assuré.
L’ensemble des normes relatives aux droits humains sont tout aussi cruciales pour mettre fin aux conflits et instaurer une paix durable, a affirmé le Haut-Commissaire, qui a rappelé que les principes fondamentaux des droits humains que sont la responsabilité, la non-discrimination et la participation à un espace civique permettent d’instaurer et de maintenir la confiance entre les citoyens et l’État. La responsabilité permet de répondre aux griefs, à la fois par la justice et la lutte contre l’impunité, et par la promotion d’une gouvernance réactive et responsable, qui réponde aux besoins réels des populations.
L’égalité et la non-discrimination s’attaquent aux inégalités persistantes, en veillant à ce que personne ne soit laissé de côté. Le Conseil a pu constater que la lutte contre la discrimination à l’égard des minorités et des personnes privées de leurs droits peut contribuer à la réconciliation et à l’édification de sociétés plus résistantes, a fait observer M. Türk. La participation à un espace civique ouvert –en particulier des femmes et des filles, des groupes minoritaires et de la jeunesse- permet quant à elle d’instaurer une confiance plus profonde et plus large dans les institutions. Les femmes doivent également participer à la mise en œuvre des accords de paix, a-t-il ajouté. En cette Journée mondiale de la liberté de la presse, il a insisté sur l’importance de la protection des journalistes dans la mise en place d’une gouvernance responsable.
M. Türk a cité la Colombie comme un exemple du rôle essentiel de la participation et d’autres principes fondamentaux des droits humains pour instaurer la confiance, en rappelant que le processus de La Havane comportait de solides éléments de dialogue et d’inclusion. Ces éléments ont permis de faire en sorte que les accords de 2016 ne soient pas simplement les termes d’un cessez-le-feu entre acteurs armés, mais qu’ils constituent un plan détaillé pour une paix durable. M. Türk a dit avoir constaté les efforts continus déployés pour en faire une réalité, notamment en s’attaquant à des problèmes structurels profondément enracinés tels que la réforme agraire, la discrimination et les inégalités. En Colombie, comme ailleurs, les droits humains et la justice, y compris la justice transitionnelle, seront les meilleurs guides sur le long chemin de la réconciliation et de la paix durable, a conclu le Haut-Commissaire.
Mme FUNMI OLONISAKIN, Vice-Présidente du King’s College de Londres et professeure de sécurité, leadership et développement, a fait valoir que renforcer la confiance pour une paix durable implique d’adopter une approche inclusive et de disposer des connaissances et des cadres normatifs pour envisager la paix. Les normes doivent définir les conditions du vivre-ensemble et promouvoir l’accès à des connaissances transparentes, a-t-elle souligné, avant de faire état de plusieurs risques inhérents à la période actuelle et portant sur la perception du monde, à commencer par la déconnexion entre la science et la population.
Pour la professeure, les avancées scientifiques, techniques et technologiques sont importantes pour la paix. Elle a cependant reconnu que le développement de l’intelligence artificielle augmente davantage les capacités de différents systèmes que les capacités que nous avons à les contrôler. Dans ce cadre, il est nécessaire selon elle d’envisager un avenir de guerre et de paix, de sorte à ne pas être dépasser par les changements.
Faisant état d’un programme de recherches sur les perspectives de paix et les modifications apportées aux États d’ici à 2050, qu’elle dirige au King’s College en collaboration avec l’Université de Nairobi, Mme Olonisakin a affirmé que ces travaux permettent d’envisager l’avenir de manière progressive en vue de renforcer la confiance et de consolider la paix. « L’avenir n’est pas linéaire, mais en comprenant la complexité de cadres temporels convergents, on conçoit la paix et la guerre comme deux éléments d’un même continuum », a-t-elle expliqué, jugeant utile à ce propos de garder à l’esprit la « réalité empirique » des régions et des personnes situées en périphérie des processus décisionnels.
Dans certaines cultures qui représentent la majorité du monde, la direction des opinions dans les domaines de la paix et de la guerre ne sont pas directement aux mains des élites mais dans celles de dirigeants religieux ou culturels, a relevé la professeure, justifiant ainsi l’analyse de données pour mesurer la nature complexe de la paix et du conflit, de façon à mieux comprendre les changements et à s’y préparer. À cette aune, la confiance entre la population et les institutions est essentielle pour assurer la consolidation de la paix, a poursuivi la Vice-Présidente du King’s College, selon laquelle les hiérarchies de pouvoir s’accompagnent souvent de risques car elles renforcent les inégalités entre les réels détenteurs de la paix et les titulaires distants.
Mme Olonisakin a relevé que le rapport du Groupe consultatif de haut niveau sur un multilatéralisme efficace créé par le Secrétaire général des Nations Unies, contient des principes spécifiques en matière de renforcement de la confiance. Il insiste notamment sur les mesures anticipatives et invite à plus de transparence dans le domaine de la paix, a-t-elle précisé, avant d’appeler les institutions pertinentes en matière de paix à envisager « différents avenirs » et à établir un lien entre la science et la population future.
M. IGNAZI CASSIS, Conseiller fédéral et Ministre des affaires étrangères de la Suisse, a dit être récemment retourné dans son ancienne école pour parler de politique étrangère. Il a regretté que toutes les questions aient porté sur la guerre, rappelant que, quand il y était lui-même élève, à la fin des années 70, ses camarades et lui étaient convaincus qu’il n’y aurait plus jamais de guerre en Europe et que leurs parents et leurs professeurs, qui avaient vécu la Seconde Guerre mondiale, leur juraient que la communauté internationale avait compris la leçon. « Comment en sommes-nous arrivés là? Comment éviter que nous soyons ceux qui n’ont pas su réagir aux crises actuelles? » a-t-il demandé. Rappelant qu’il y a 77 ans, des nations « unies », cimentées par la confiance et la volonté de se reconstruire avaient affirmé:« Plus jamais ça! » il s’est demandé si elles n’avaient pas pêché par prétention.
« Oui le système multilatéral est sous tension, mais non il n’est pas en faillite! » a estimé le Ministre, ajoutant que le véritable échec consisterait à ne rien faire. Rappelant que la Suisse avait organisé ce débat pour « reconstruire les ponts qui nous relient », il a appelé le Conseil de sécurité à se saisir de ses responsabilités et à consolider une paix durable. Évoquant la règle Pacta sunt servanda -les conventions doivent être respectées- sur laquelle est fondée le droit international, M. Cassis a affirmé que ce principe incarne la confiance réciproque des parties qui engagent leur parole, et la respectent. « Si nous parvenons à restaurer cette confiance, je suis convaincu que nous pourrons retrouver durablement le cap de la paix », a-t-il estimé.
Tout en appelant à se concentrer sur les domaines dans lesquels le multilatéralisme apporte une véritable valeur ajoutée, le Ministre a insisté sur l’application d’un cadre normatif commun, basé sur les droits humains et le droit international. « C’est la prédictibilité, et non l’arbitraire, qui est le terreau de la confiance », a-t-il insisté.
Appelant de ses veux une « architecture de paix inclusive » intégrant celles et ceux que la population a désignés comme démocratiquement légitimes, M. Cassis a souligné la nécessité de respecter les différences culturelles. « Une paix imposée n’est pas une paix durable », a-t-il résumé. Le Conseiller fédéral a également appelé les participants à améliorer le système ensemble. Il a salué l’initiative du Secrétaire général qui proposera, le mois prochain, un « Nouvel Agenda pour la Paix ». Rappelant que le débat était une occasion de recueillir les idées des États Membres, il a conclu son intervention en affirmant:« La confiance se gagne dans les actions, pas dans les intentions. »
M. OMAR BIN SULTAN AL OLAMA, Ministre pour l’intelligence artificielle des Émirats arabes unis, a souligné que l’inclusion est un élément essentiel à la consolidation de la paix, celle-ci devant être envisagée à la fois pour tous et par tous. À cet égard, il a ajouté que les décideurs politiques ne sont pas les seuls moteurs du progrès, plaidant pour la participation pleine, égale et significative des femmes et des jeunes aux processus de prise de décisions répondant aux besoins réels des populations. L’intégration de leur vision contribue à établir et à consolider la confiance, a poursuivi le Ministre, qui a précisé que le déploiement des efforts de consolidation de la paix aux niveaux municipal, national, régional et international permet d’impliquer profondément les communautés à ces différentes échelles niveaux. De surcroît, les acteurs de la société civile, les universitaires et le secteur privé apportent tout leur potentiel multiplicateur de solutions et d’innovation aux efforts de consolidation de la paix, a-t-il encore dit.
Pour le Ministre, en renforçant l’architecture de consolidation de la paix, « nous nous donnons les moyens de relever un plus large éventail de défis à long terme, comme ceux liés aux changements climatiques, à l’extrémisme et aux urgences mondiales de santé publique ». Cela implique aussi de lier plus efficacement le travail des institutions de consolidation de la paix et des institutions financières. Il a notamment jugé crucial de s’attaquer au discours de haine, au racisme, à l’intolérance, à la désinformation et aux autres manifestations de l’extrémisme. Ces forces sont des multiplicateurs de menaces, a-t-il formulé, qui sèment les graines de la division, érodent le tissu social des communautés, engendrent l’instabilité et sapent tous les efforts de consolidation de la paix.
En revanche, la promotion de la tolérance et de la fraternité humaine renforce la confiance mutuelle et favorise la cohésion sociale, « qui sont des fondements essentiels de la paix », a poursuivi le Ministre. Il a donc plaidé pour une gouvernance éthique et communément organisée, encadrant l’usage des outils numériques susceptibles de renforcer la connexion entre communautés. Il a insisté sur la nécessité d’exploiter ces outils et les technologies innovantes pour construire et maintenir la paix. Les données, pourvoyeuses d’informations précieuses sur les causes profondes des conflits, sont par exemple essentielles à cette fin. Bien utilisées, les données pourraient fonctionner comme de vrais catalyseurs de la paix en stoppant les conflits dans leur élan, par le biais de modèles prédictifs des flambées de violence ou de surveillance des cessez-le-feu, a-t-il expliqué. Il a conclu son intervention en exhortant l’ONU à utiliser les systèmes d’alerte précoce à une plus grande échelle.
M. AKIMOTO MASATOSHI, Secrétaire parlementaire du Ministère des affaires étrangères du Japon, a estimé que le Conseil de sécurité doit servir de modèle à la communauté internationale, l’exhortant à superviser la mise en œuvre de ses résolutions et à intégrer les divers agendas relatifs à la paix, les jeunes et la sécurité. Il a également recommandé au Conseil d’approfondir les discussions sur l’état de droit, la sécurité humaine, la protection des droits humains et la prévention des conflits. De fait, a insisté le dignitaire, le Conseil devrait refléter les résultats de ces discussions dans les mandats des opérations de paix. Le représentant a aussi recommandé au Conseil de renforcer ses interactions avec la CCP. En utilisant pleinement ses conseils, le Conseil renforcera le fonctionnement de l’ensemble des Nations Unies, a-t-il affirmé.
M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a déclaré que la consolidation de la paix est un élément crucial pour maintenir la paix et la stabilité pour les générations actuelles et futures. Mais alors que nous nous efforçons de construire une paix durable, nos efforts doivent porter sur les causes profondes des conflits et de l’instabilité. L’instauration de la confiance est un autre facteur important pour le maintien de la paix et de la stabilité, qui nécessite une approche globale et inclusive, a poursuivi le représentant. Selon lui, l’inclusion devrait orienter les actions collectives et coordonnées pour résoudre les défis multiples et complexes auxquels le monde est confronté aujourd’hui, tels que les guerres entre États, les conflits internes, le terrorisme international, la criminalité organisée, et les défis liés aux changements climatiques. Dans ce contexte, a-t-il mis en garde, les approches unilatérales ne serviront pas la paix. Aussi le délégué a-t-il plaidé pour une réforme du Conseil de sécurité, afin de rendre cet organe plus inclusif, équitable, juste et démocratique. Il a également appelé de ses vœux une réforme des institutions financières internationales pour servir la cause de l’équité et de la justice entre les nations. Si l’esprit d’entreprise privée est important, des gains économiques à courte vue aux dépens des pays les moins développés ne peuvent que perpétuer l’instabilité et les troubles au niveau mondial, a prévenu le délégué en conclusion.
M. FERIT HOXHA (Albanie) a rappelé qu’aujourd’hui est célébrée la Journée internationale de la liberté de la presse, avant de rendre hommage aux journalistes qui sont souvent menacés, harcelés et attaqués en effectuant leur travail. Il a également pensé aux centaines de millions de personnes qui vivent encore dans des pays où la liberté des médias reste un souhait et où la répression est la règle. Face aux défis complexes auxquels fait face l’humanité, il importe selon lui de renforcer la confiance, qui est le ciment unissant les gens et les sociétés. La confiance donne aux institutions une légitimité durable et aide les individus et les groupes à rester engagés dans le processus long et ardu de construction d’une paix durable, a fait valoir le représentant. Son absence, en revanche, peut entraîner des perturbations, de la violence et des conflits, a-t-il ajouté, estimant que les récents événements au Soudan montrent où peut mener la rupture de la confiance. De même, a poursuivi le délégué, le manque frustrant de progrès sur la voie politique en Libye est le résultat direct du manque de confiance entre les principaux acteurs, tandis que l’absence d’unité entre les parties prenantes en Haïti a mis le pays dans les griffes des gangs.
Pour le représentant, le Conseil de sécurité ne sera pas en mesure de s’acquitter de ses responsabilités avec succès sans la confiance, sans un travail de bonne foi et une coopération continue entre ses membres. « Ce n’est pas le cas lorsque le Conseil est, malheureusement, utilisé à des fins de propagande ou au profit d’intérêts étroits, comme nous le constatons sur un certain nombre de questions importantes, notamment la guerre d’agression en cours en Ukraine ». Le Conseil ne contribue pas davantage à rendre le monde meilleur en refusant de reconnaître le lien entre les changements climatiques et la sécurité, en niant que des violations graves des droits humains conduisent à des conflits et en protégeant des régimes totalitaires qui oppriment leurs propres citoyens et sapent la paix, a renchéri le délégué, pour qui notre capacité à respecter ce que nous avons convenu d’un commun accord, dans le respect du droit international et de la Charte des Nations Unies, déterminera la forme du monde à l’avenir. Il a enfin jugé qu’instaurer la confiance dans les situations de postconflit et les processus de consolidation de la paix nécessite des efforts et des investissements continus dans le capital humain par le biais de l’inclusion et de la participation, en particulier celle des femmes, des jeunes et de la société civile.
Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a rappelé que le nombre de conflits était le plus élevé depuis la Seconde Guerre mondiale et que, selon les estimations, plus de deux milliards de personnes vivaient dans des zones de conflit, s’inquiétant en outre du risque élevé d’un conflit nucléaire. Plaidant pour une « approche intersectorielle » pour améliorer la coordination entre les nombreux organes et instances du système multilatéral, elle a appelé le Conseil de sécurité à s’appuyer sur d’autres organes, tels que la CCP, l’ECOSOC et l’Assemblée générale, pour mieux comprendre les situations spécifiques. Elle a demandé à mettre en œuvre en priorité les résolutions jumelles de 2016 du Conseil de sécurité (2282) et de l’Assemblée générale (70/262), qui ont élargi le concept de consolidation de la paix pour englober la prévention des conflits et les situations de postconflit. Elle a également prôné le dialogue afin d’éviter les erreurs d’appréciation et la concurrence malsaine, notamment entre les grandes puissances militaires.
La déléguée a aussi proposé au Conseil d’établir des partenariats stratégiques adossés à des accords régionaux au titre du Chapitre VIII de la Charte des Nations Unies, afin de mieux prévoir les conflits et de renforcer les systèmes d’alerte rapide. Cette approche permet de mieux répartir les ressources consacrées à la consolidation de la paix, a-t-elle estimé, saluant notamment le soutien apporté aux systèmes nationaux et régionaux d’alerte précoce, tels que le Système continental d’alerte rapide de l’Union africaine de 2002 et le Réseau d’alerte précoce et de réponse de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Elle a aussi appelé à s’attaquer aux causes profondes des conflits, notamment en mettant en œuvre les programmes pour la paix et la sécurité dédiés aux jeunes et aux femmes. Se prononçant en faveur d’investissements plus importants dans la prévention et la consolidation de la paix, elle a plaidé pour que le Fonds pour la consolidation de la paix bénéficie d’un financement cohérent par le biais de contributions recouvrées par les Nations Unies, saluant au passage l’aspiration du Secrétaire général à une affectation annuelle de 100 millions de dollars au Fonds du 1er juillet 2022 au 30 juin 2023.
M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a estimé que la CCP peut et doit assumer la responsabilité principale de superviser le processus de transition du conflit vers le développement, ce qui permettrait au Conseil de sécurité de consacrer toute son attention et ses ressources à l’examen des situations de menaces à la paix et la sécurité internationales. Pour le représentant, la collaboration entre les deux organes ne peut toutefois prospérer que si le Conseil considère la Commission comme un partenaire à part entière, en qui il a confiance, qu’il apprécie et qu’il accompagne de manière constructive. Ainsi le Conseil de sécurité devrait-il soutenir de façon plus franche les processus de consolidation de la paix en favorisant notamment une plus grande participation à ces processus des organisations sous-régionales. Leur légitimité, leur connaissance de première main du terrain et leur compréhension culturelle des causes profondes des conflits sont des atouts importants pour créer les conditions propices au dialogue et à une paix durable, a fait observer le représentant. Après avoir souligné l’importance de rendre plus inclusifs les processus de consolidation de la paix, cela en tenant compte des points de vue de toutes les parties prenantes à la résolution des conflits, le délégué brésilien a déclaré que la meilleure façon de restaurer la confiance et l’efficacité du Conseil de sécurité réside dans l’amélioration effective de sa représentativité et de sa transparence. Une telle réforme globale doit être un élément essentiel du Nouvel Agenda pour la paix, a-t-il dit.
Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a estimé que le renforcement des synergies et l’élargissement de la coopération entre la CCP et le Conseil de sécurité rendront le travail de la communauté internationale plus efficace. Elle a rappelé l’appel du Conseil pour une participation pleine, égale, significative et effective des femmes à tous les stades et à tous les niveaux de la prévention et du règlement des conflits, ainsi que dans les processus de paix et la mise en œuvre des accords de paix. Cet appel doit être mis en œuvre et sauvegardé, a-t-elle souligné.
La déléguée a appelé à s’attaquer à la rhétorique de la haine, qui précède souvent les conflits, et a recommandé d’investir dans des systèmes d’alerte précoce, qui permettent d’identifier les éléments qui fragilisent la stabilité et érodent la confiance au sein des communautés fragiles. Il s’agit là d’un autre domaine dans lequel le Conseil peut renforcer sa coopération avec la CCP, a-t-elle estimé. De même, les risques de sécurité liés au climat étant une réalité pour de nombreuses communautés, en particulier celles en situation de conflit, les efforts d’adaptation et d’atténuation devraient constituer des points d’entrée pour la consolidation de la paix, en contribuant à renforcer la confiance au sein de la société, a plaidé la déléguée.
Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) s’est réjouie que le « pays de Rousseau » entame sa présidence du Conseil de sécurité par un événement sur l’importance de la confiance et du contrat social. En effet, a-t-elle développé, la confiance dans les institutions nationales et internationales est aujourd’hui gravement mise à l’épreuve. Alors que nous sommes confrontés à des défis complexes et interconnectés pour la paix, la sécurité et le développement, nous devons reconstruire cette confiance pour les surmonter, a plaidé la représentante, pour qui cela passe par davantage d’inclusion, de normes pour un ordre pacifique et de transparence.
Dans cet esprit, il importe, selon la représentante, que le Conseil et le système des Nations Unies anticipent mieux les risques et mobilisent plus tôt l’aide multilatérale. L’exploitation des nouvelles technologies révolutionnera la façon dont nous comprenons la dynamique des conflits, nous permettant d’anticiper les crises et d’atténuer les souffrances humaines, a-t-elle affirmé, souhaitant que l’on entretienne la confiance et la coopération nécessaires pour y parvenir.
La représentante a également appelé à exploiter toute la gamme des outils de consolidation de la paix pour produire des réponses plus intégrées et cohérentes. Ainsi, le Fonds pour la consolidation de la paix et la Commission de consolidation de la paix peuvent soutenir les stratégies de prévention menées au niveau national et donner aux pays les moyens d’établir la confiance et les partenariats nécessaires à leurs trajectoires de paix et de développement. Elle a enfin jugé crucial de renforcer l’inclusion pleine et significative des femmes dans la prise de décisions et les processus de paix et de développement.
M. RICHARD M. MILLS, JR. (États-Unis) a déclaré que les membres du Conseil devraient privilégier une collaboration plus ambitieuse avec la Commission de consolidation de la paix (CCP) et a exprimé un soutien vigoureux à l’expansion du rôle de cet organe dans les contextes régionaux et sur les questions transversales, y compris les droits humains et les risques que fait peser le réchauffement climatique. Il s’agit notamment de tirer un meilleur parti du rôle consultatif de la CCP auprès du Conseil pour veiller à ce que les activités de consolidation de la paix soient intégrées, coordonnées et adaptées à la dynamique actuelle, a-t-il préconisé.
Pour le représentant, les femmes, les jeunes, les acteurs locaux, les groupes marginalisés et la société civile dans son ensemble doivent participer activement aux processus de prise de décisions visant à instaurer la paix. Les efforts de consolidation de la paix sont plus efficaces et ont beaucoup plus de chances d’aboutir à des résultats durables et inclusifs pour l’ensemble de la société lorsque les femmes y sont associées, a-t-il indiqué. Il a également souligné l’importance de rétablir la confiance des jeunes dans les institutions, en particulier l’ONU et le Conseil de sécurité.
« Le moment est particulièrement propice à une réflexion ambitieuse et originale, et le Nouvel Agenda pour la paix est l’occasion d’y répondre », a estimé le représentant. La stratégie des États-Unis à cet égard comprend une dimension coopérative avec les nations partenaires pour prévenir la violence et promouvoir la stabilité dans les zones vulnérables aux conflits, a-t-il ajouté.
M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a estimé que la confiance ne peut être durable que si l’application des solutions s’avère efficace, ce qui implique de garantir l’appropriation nationale lors de l’identification des causes fondamentales des conflits. Selon lui, la promotion de la confiance entre les parties prenantes est indispensable pour prévenir l’intensification, la poursuite et la récurrence des conflits car un tissu social affaibli est plus vulnérable à la violence. De même, a-t-il poursuivi, dans les contextes de postconflit, la paix durable trouve ses fondements dans le processus de réconciliation, lequel ouvre la voie au renforcement et à la pérennisation de la culture de paix et de la confiance. À cette aune, le représentant a jugé nécessaire d’approfondir les synergies en matière de missions de paix, dans la phase la plus précoce de planification intégrée et de coordination des transitions, avec tous les acteurs sur le terrain. Il a aussi insisté sur l’importance de l’accès aux données vérifiées, saluant à cet égard le travail effectué par le HCR, qui fournit des statistiques sur les déplacements forcés dans le monde depuis 1951.
Appelant d’autre part à la participation pleine, équitable et significative des femmes dans tous les domaines sociaux et politiques, le représentant a souhaité que le Conseil de sécurité et le système des Nations Unies mettent en œuvre la résolution 1325 (2000), notamment l’inclusion des femmes dans les mécanismes et processus de négociation. Il importe aussi, selon lui, de faciliter la participation des jeunes à la prévention et à la résolution des conflits à tous les niveaux de décision, conformément à la résolution 2419 (2018). Le délégué a aussi jugé essentiel que le Nouvel Agenda pour la paix tienne compte de l’importance d’inclure la relation entre la paix, la sécurité et la confiance comme base pour la consolidation de la paix.
M. ZHANG JUN (Chine) a estimé que, sans confiance, le monde serait régi par la loi du plus fort. Constatant que « le monde traverse une grave crise de confiance », le représentant a affirmé que rien ne sapait plus la confiance dans le domaine de la sécurité que la création de « blocs militaires exclusifs » qui font monter les tensions régionales en recherchant une sécurité absolue au détriment de celle des autres. Déplorant la création de « hauts remparts » nuisant à la confiance socioéconomique et la volonté d’aucuns « d’obtenir un monopole », il a dénoncé le mépris pour la Charte des Nations Unies, les politiques de deux poids, deux mesures et l’application sélective du droit international, tous comportements qui nuisent à la confiance dans le système international. Fustigeant « l’état d’esprit de ceux qui refusent de se voir dépassés » et « l’arrogance de ceux qui se considèrent comme en position de force et s’appuient sur leurs intérêts nationaux », il a estimé que ces attitudes entravaient les efforts en vue de bâtir la confiance mutuelle, une paix pérenne et promouvoir le développement et les progrès mondiaux.
Le représentant a estimé que « les ingérences externes inappropriées » dans les pays sortant d’un conflit ne faisaient que mettre de l’huile sur le feu. Il a aussi dénoncé les ingérences de « certaines forces externes, sous prétexte de droits humains », dans les affaires internes d’autres États, en vue d’imposer leurs propres système et idéologie et de monter des factions les unes contre les autres.
Constatant que l’interdépendance entre pays caractérise plus que jamais le monde actuel, le représentant a appelé à s’appuyer sur le concept de « communauté d’avenir partagé pour l’humanité », à mettre en œuvre un multilatéralisme réel et à promouvoir des partenariats mondiaux. Il a également appelé « les grands acteurs mondiaux à faire office de chefs de file » en ce sens, à mener de vastes consultations et à être exemplaires afin de renforcer la confiance et d’établir une paix et une sécurité pérennes.
Le représentant a aussi appelé à respecter les trajectoires et systèmes de développement choisis par les différents peuples du monde, à régler de manière pacifique tout différend et à s’abstenir d’appliquer des mesures coercitives unilatérales de manière indiscriminée. Estimant que le développement durable était le fondement même d’une paix pérenne ainsi qu’un important outil de promotion des droits humains, le représentant a appelé la communauté internationale et les Nations Unies à mettre l’accent sur l’augmentation des investissements dans ce domaine.
Avertissant du « grave déficit moral » dont souffrent selon lui les institutions internationales, le représentant s’est inquiété de les voir « perdre la confiance mondiale » et a souhaité la promotion d’un système multilatéral plus juste et plus inclusif, en particulier dans le domaine financier, qui bénéficie aux populations des pays en développement.
Le représentant a également accusé certains pays d’utiliser les nouvelles technologies de l’information et de la communication, notamment les réseaux sociaux, pour voler des données confidentielles d’autres pays, y compris des alliés et des responsables d’organisations internationales. Il a appelé les gouvernements à réglementer ces technologies afin de défendre l’intérêt public, estimant que l’ONU devrait accompagner ces démarches et créer une plateforme intergouvernementale pour élaborer des règles et normes communes.
M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a considéré que pour que la paix soit durable, « il est fondamental que nous puissions reparamétrer le contrat social entre nations indépendamment de leur taille ou de leur envergure ». Ainsi, la force ou la puissance ne doivent-elles pas, selon lui, être les déterminants du vivre-ensemble de la communauté internationale. Le représentant a ajouté que la confiance nécessaire pour parvenir à une paix durable passe par une véritable transformation structurelle de l’architecture de paix et de sécurité de l’ONU ainsi que par l’adaptation des mécanismes de promotion de la paix et de la sécurité à un contexte global de crises et de conflits en constante mutation. Si les efforts fournis par les Nations Unies sont remarquables, force est de constater que les menaces à la paix et à la sécurité internationales sont de plus en plus nombreuses, et imparables, prenant très souvent des formes inédites, ce qui alimente parfois le sentiment de défiance à l’égard de notre volonté collective, de nos institutions internationales, de nos mécanismes, a-t-il relevé. Dans ce contexte, le délégué a appelé à soutenir les mécanismes de prévention et de consolidation de la paix des Nations Unies par un financement adéquat et prévisible, à renforcer la synergie entre le pilier développement durable et le pilier paix et sécurité des Nations Unies et à s’attaquer aux causes profondes des conflits, notamment les inégalités, la pauvreté et le chômage des jeunes. Par ailleurs, le représentant a demandé que le financement adéquat de l’Agenda 2063 de l’Afrique et son premier plan décennal de mise en œuvre ainsi que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 soient perçus comme une nécessité pour consolider et pérenniser la paix.
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a estimé qu’à l’heure du profond schisme entre les positions des États Membres de l’ONU et afin de créer les efforts nécessaires pour une nouvelle architecture de sécurité internationale plus pérenne, la question du déficit de la confiance et de l’absence de programmes fédérateurs devient particulièrement pertinente.
En parlant de confiance, le représentant a jugé important de mentionner les actes « perfides » de « nos ex-partenaires occidentaux » qui, au cours de ces 15 à 20 dernières années ont réussi à anéantir toutes les lueurs de compréhension mutuelle et de coopération qui avaient fait leur apparition à la fin de la guerre froide. Il fait référence à la fois aux promesses non tenues de ne pas étendre l’OTAN vers l’est de l’Europe et la promotion des « soi-disant révolutions de couleur », ainsi qu’aux tentatives de destitution de régimes hostiles ou encore à celles d’imposer à tous un « ordre fondé sur des règles » plutôt que sur le droit international et le respect de la Charte des Nations Unies.
Du fait de leur dessein, « nous vivons aujourd’hui dans un monde où la vérité a perdu tout son sens » et où les médias sous le contrôle de « l’Occident global », propagent des récits misanthropiques et complètement mensongers: le blanc devient noir et vice versa, a accusé le représentant. Il a cité en exemple la situation en Ukraine, estimant qu’en raison des desseins des États-Unis et de leurs alliés, le rôle de ce pays avait été réduit à celui d’un pion dans un affrontement géopolitique avec la Russie. Il a ensuite affirmé qu’il y a huit ans est apparue aux frontières de la Fédération de Russie une dictature néo-nazie et russophobe, qui a déclaré la guerre à tout ce qui est russe et à tout ce qui nous unissait objectivement.
Le représentant y a vu une guerre par procuration menée par l’OTAN contre la Russie, ce qui, a-t-il averti, pourrait s’accompagner de conséquences néfastes pour toute l’humanité.
Dès lors, comment parler de confiance dans ces circonstances? s’est interrogé le représentant. Pour lui, il est également évident que les actes des pays occidentaux affectent directement les possibilités de coopération entre les grands acteurs mondiaux pour le règlement de crises régionales. Pour les pays de l’Occident qui appliquent à ces crises le prisme de leur concurrence avec la Russie et la Chine, il s’agit d’un « jeu à somme nulle » et « nous sommes en plein désaccord avec cette approche », a-t-il martelé.
Cette situation à l’échelle internationale affecte le travail du Conseil de sécurité et d’autres instances internationales, en plus des profondes différences s’agissant des nombreuses questions discutées à l’Assemblée générale, a poursuivi le représentant. Tout cela met gravement à l’épreuve le système des Nations Unies et affecte sa capacité à bien s’acquitter de son mandat principal en matière de prévention des conflits et du maintien de la paix, a-t-il déploré.
Cette crise de confiance affecte directement l’institution de la médiation, a poursuivi le représentant, qui en a voulu pour preuve la situation entourant les accords de Minsk sur l’Ukraine et le rôle de l’Allemagne et de la France dans leur adoption. Non seulement Paris et Berlin n’ont pas réussi à faire en sorte que Kiev les respecte, mais ils ont reconnu plus tard que le but de leur signature était de permettre au régime ukrainien le temps de se préparer à la guerre, a-t-il accusé.
Malheureusement, ces tendances ne se limitent pas aux États, mais se reflètent également dans le travail de l’ONU, a encore déploré le représentant, qui a mis en garde contre une dégradation considérable de la confiance à l’égard de l’organisation mondiale, censée représenter les intérêts de tous les États Membres, être un modèle d’impartialité et d’intégrité, et dont les représentants sont tenus d’agir dans le strict respect de l’Article 100 de la Charte des Nations Unies.
Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a estimé que c’est d’abord aux États Membres de bâtir la confiance par le respect des engagements et par des institutions et des processus inclusifs. « Le respect du droit international, le non-recours à la force et le règlement pacifique des différends sont les conditions de la confiance et de la coopération entre les États. La violation de ces principes, comme dans le cadre de la guerre d’agression menée par la Russie en Ukraine, sape l’ordre international fondé sur des règles communes », a-t-elle déclaré. Considérant que le droit international doit être respecté partout, la France défend avec constance son application dans le cadre du conflit israélo-palestinien, a ajouté la représentante, en appelant les parties à restaurer un horizon politique, seul à même de recréer la confiance entre elles et de permettre la mise en œuvre de la solution des deux États.
Pour la représentante, il appartient aussi aux États d’affermir la confiance dans leurs institutions, ce qui passe par le respect des droits humains et de l’état de droit, la lutte contre la corruption et la bonne gouvernance. Mais la confiance doit reposer sur des partenariats fiables et prévisibles, a-t-elle estimé. C’est pourquoi l’Union européenne et ses États membres sont mobilisés dans la réponse aux crises: « collectivement, nous déployons plus de 5 000 personnels dans le cadre des opérations de paix », s’est enorgueillie la représentante. Elle a ainsi rappelé qu’au Moyen-Orient, ce sont 27 milliards d’euros d’aide humanitaire que l’Union européenne et ses États membres ont apportés depuis 2011 aux Syriens les plus vulnérables, en Syrie et dans la région. La France soutient en outre l’opérationnalisation du Fonds africain pour la paix et la montée en puissance des opérations africaines de paix et est prête à reprendre les discussions au Conseil de sécurité pour assurer un financement durable et prévisible de ces opérations, y compris sur la base de contributions obligatoires.
Paris a en outre soumis 20 propositions pour renforcer l’autorité du système de sécurité collective et moderniser ses moyens d’action, en repensant le rôle des Nations Unies pour garantir la paix et la sécurité internationales, a ajouté la représentante en conclusion.
M. DIMITAR KOVACEVSKI, Premier Ministre de la Macédoine du Nord, s’est réjoui d’être le premier chef de gouvernement de son pays à s’adresser au Conseil de sécurité. Revenant au débat, il a estimé que la réussite du Nouvel Agenda pour la paix nécessite de tirer les enseignements de l’agenda de 1992 et de la mission préventive menée entre 1995 et 1999 par l’ONU dans son pays. Il a rappelé à cet égard que le premier Président de la Macédoine du Nord, M. Kiro Gligorov, a permis à cette ancienne république yougoslave d’accéder à l’indépendance en 1991 et d’entrer dans le concert des nations en tant qu’État souverain.
Alors que la guerre faisait rage dans notre voisinage le plus proche, nous avons élaboré notre propre agenda national pour la paix, tout en coopérant étroitement avec l’ONU et les organisations régionales, principalement l’OSCE et l’Union européenne (UE), a rappelé le Premier Ministre. Ce faisant, les conditions ont été réunies pour garantir le succès de la Force de déploiement préventif des Nations Unies , et la paix et la stabilité ont ainsi été préservées, a-t-il ajouté. De cette manière, la confiance s’est instaurée et la culture du dialogue s’est lentement mais sûrement développée, faisant, 30 ans plus tard, de la Macédoine du Nord un exemple pour le règlement des conflits et une source de stabilité, s’est félicité le Premier Ministre, qui a rappelé que son pays est désormais membre de l’OTAN et candidat à l’adhésion à l’UE.
Plaidant pour un renforcement de la confiance dans les institutions, dans l’ONU, dans la justice et dans les objectifs de développement durable afin de bâtir un monde plus pacifique, plus stable et plus juste pour tous, M. Kovacevski a reconnu que cette vision reste actuellement « hors d’atteinte », en raison notamment de la guerre en Ukraine. Cette agression militaire russe a changé les relations mondiales à tel point qu’il est urgent de protéger la Charte des Nations Unies, qui est notre cadre juridique de référence, a-t-il ajouté, assurant que son pays se tient du côté du monde démocratique et libre.
De l’avis du Premier Ministre, le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU est une chance qui doit être utilisée pour créer les conditions d’une action unie et consciente des risques croissants. « Demain nous interrogera sur ce que nous avons fait aujourd’hui, comme aujourd’hui nous nous demandons pourquoi nous n’avons rien fait hier », a-t-il conclu, en appelant à la paix « maintenant et immédiatement ».
Mme ANNA LÜHRMANN, Ministre adjointe chargée des affaires européennes et du climat de l’Allemagne, a estimé que partout dans le monde, les gens avaient confiance dans les Nations Unies, les considérant comme une lueur d’espoir dans les périodes d’obscurité. Partant du constat que la confiance est essentielle à la construction de la paix, elle a appelé à appliquer le dispositif de consolidation de la paix élaboré conjointement par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale dans les résolutions jumelles de 2016. Elle a rappelé le lien qu’il établit entre la sécurité, le développement et les droits humains. Elle a appelé à s’attaquer aux causes et aux conséquences des conflits et à répondre aux besoins des communautés.
Affirmant que les efforts de consolidation de la paix doivent respecter la dignité de toutes les personnes et de tous les groupes, la Ministre a pris l’exemple du Mozambique, où le processus de paix a finalement été couronné de succès grâce à sa nature inclusive et à la reconnaissance de la diversité du pays. Elle a insisté sur l’intégration systématique des femmes, des enfants et des groupes marginalisés dans ces processus, rappelant notamment qu’il avait été prouvé que les femmes contribuaient à rendre les sociétés postconflit plus pacifiques. Elle a rappelé que l’Allemagne soutenait l’initiative « Principes pour la paix » qui préconise l’établissement d’un cadre de référence partagé et de normes communes pour les acteurs de la consolidation de la paix.
Mme Lührmann a également présenté des mesures concrètes pour renforcer la confiance. Elle a affirmé que le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix devraient intensifier leurs échanges afin de mieux relever les défis existants. La Ministre a appelé de ses vœux un accord sur l’introduction de contributions évaluées pour le Fonds de consolidation de la paix des Nations Unies. En tant que vice-présidente de la Commission et principale contributrice volontaire au Fonds, l’Allemagne est déterminée à faire avancer le dispositif de consolidation de la paix, a-t-elle assuré.
Insistant sur l’importance de l’alerte précoce et de l’action anticipée fondées sur des données, notamment concernant l’adaptation aux changements climatiques, la Ministre a cité certains des projets soutenus par son pays, dont le Fonds pour l’analyse des risques complexes des Nations Unies et les initiatives de l’Union africaine en la matière. En conclusion, elle a salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, estimant qu’il offrait une excellente occasion d’élaborer des moyens de renforcer la confiance dans les efforts conjoints en vue d’une paix durable. En tant que cofacilitatrice du Sommet de l’avenir avec la Namibie, l’Allemagne est prête à soutenir activement les discussions visant à définir une approche commune, a-t-elle assuré.
M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a notamment déclaré que pérenniser la paix et résoudre les crises nécessitent préalablement de pérenniser la confiance entre les pays et les peuples. Consolider la confiance est la meilleure manière de pérenniser la paix pour faire face aux conséquences multiples des crises alimentaire, énergétique ou encore climatique, a-t-il dit, ajoutant que contribuer à la reconstruction des pays sortant d’un conflit est une priorité pour l’Égypte, en particulier en Afrique.
Le représentant a appelé le Conseil de sécurité à se concentrer davantage sur la situation dans les pays du continent africain, en tenant compte des besoins réels de ces pays et du point de vue de l’ensemble des acteurs de la paix et de leurs partenaires. Il a également plaidé pour que les États Membres s’attaquent ensemble à la consolidation de la paix « à la lumière des défis actuels », en se montrant inclusifs et en s’appuyant sur des financements pérennes et une meilleure gouvernance.
M. CHRISTIAN WENAWESER (Liechtenstein) a plaidé en faveur de l’édification d’une large coalition pour la paix, notant que les règlements inclusifs sont plus durables et plus respectueux des droits et que les équipes de négociation et les médiateurs qui reflètent la société dans son ensemble sont plus susceptibles de produire des résultats durables. Mais l’inclusion ne concerne pas seulement les personnes consultées, a-t-il fait remarquer, elle concerne aussi la manière dont ces contributions sont reflétées. D’où la nécessité pour que la société dans son ensemble soit non seulement représentée à la table des négociations, mais également en mesure de voir son engagement reflété dans les documents, les processus et les missions qui en résultent.
Selon le représentant, l’inclusion doit également refléter les groupes ethniques, religieux et linguistiques minoritaires, ainsi que les peuples autochtones, entre autres. Le récent rapport du Rapporteur spécial sur les questions relatives aux minorités mérite de faire l’objet d’une réflexion plus approfondie de la part des organes et acteurs concernés, a-t-il recommandé. Le délégué a par ailleurs souligné que l’état de droit est un aspect essentiel d’une paix durable, relevant que c’est l’absence de responsabilité pour l’agression contre l’Ukraine, en 2014, qui a sans aucun doute été l’un des principaux moteurs de l’invasion à grande échelle en 2022.
Mme ANA PAULA ZACARIAS (Portugal) a estimé que les communautés sont plus susceptibles d’avoir confiance dans un processus de paix si le conflit ou la situation qu’il vise à résoudre est identifié à temps comme menace émergente, y compris par le biais de l’alerte précoce et de la prévision stratégique. En outre, les solutions élaborées pour y répondre doivent l’être en consultation avec ces communautés.
À l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, la représentante a rappelé que la confiance requiert un environnement social dans lequel les gens peuvent s’exprimer librement, les droits humains sont respectés et dans lequel des médias libres et indépendants contribuent à promouvoir la démocratie et à faire en sorte que les institutions soient responsables vis-à-vis des citoyens.
Mais pour que le Conseil de sécurité contribue à favoriser cette inclusion et cette participation, il est important que lui-même devienne plus représentatif, en élargissant le nombre de pays qui y siègent, a affirmé la représentante. Elle a ensuite souligné les avantages possibles d’une consultation du Conseil avec le monde universitaire et la communauté scientifique. En effet, a-t-elle dit, le savoir-faire de ces derniers en matière de nouvelles technologies, de collecte et d’analyse de données peuvent aider à mieux comprendre les défis sécuritaires auxquels nous sommes aujourd’hui confrontés, voire d’en anticiper de nouveaux. Citant enfin la note conceptuelle portée à l’attention des participants à la réunion, la représentante a rappelé que « la confiance est une question d’attentes et de prévisibilité ». Dès lors, l’utilisation abusive du droit de veto au sein du Conseil de sécurité peut être très préjudiciable à la prévisibilité, a-t-elle estimé.
M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a relevé qu’au-delà des coûts humains incalculables, les conflits ont des conséquences économiques « stupéfiantes ». Un rapport de la Banque mondiale sur les « voies vers la paix » fait ainsi apparaître que les pays en proie à des conflits violents connaissent une perte de 2 à 8,4% de leur PIB, a-t-il pointé, ajoutant que, selon cette même étude, la prévention des conflits devrait générer des économies comprises entre 5 et 70 milliards de dollars. Il a donc plaidé pour un investissement plus fort et plus soutenu dans la paix, en termes de ressources, de politiques et d’idées. Dans ce cadre, le délégué a appelé à promouvoir les « multiplicateurs de paix », notamment en cultivant les conditions d’une paix durable. Cela impose en premier lieu d’adopter une approche centrée sur l’individu, en veillant à ce que les intérêts et les droits, le bien-être et les opinions des personnes restent au premier plan, a-t-il souligné, jugeant à cet égard que les projets de développement menés localement doivent aller de pair avec des initiatives de paix, comme le pratiquent les Casques bleus thaïlandais au Soudan du Sud.
Le représentant a ensuite fait valoir que l’inclusivité et la participation sont des catalyseurs importants pour une paix durable et l’instauration de la confiance. Au niveau national, a-t-il préconisé, une approche à la fois inclusive et participative devrait être adoptée afin que toutes les parties prenantes, des femmes et des filles aux personnes handicapées en passant par les groupes vulnérables, soient consultées et activement engagées dans le maintien de la paix ainsi que dans l’élaboration des politiques. À ses yeux, un autre « catalyseur » essentiel est l’engagement actif des acteurs régionaux, en particulier les organisations régionales. Mais plutôt que de reposer sur des arrangements de sécurité collective rigides, une telle interface régionale-multilatérale devrait être plus souple et fondée sur les intérêts et le respect mutuels, a-t-il estimé, se prononçant également pour le renforcement des instruments de règlement pacifique, en particulier la diplomatie. Enfin, il a appelé de ses vœux la promotion d’une culture de la paix, ancrée sur la tolérance et le respect constant du droit international, ce qui selon lui nécessite un système éducatif inculquant cet état d’esprit.
M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a d’abord rappelé que, comme la Suisse, son pays n’est membre d’aucune alliance militaire et a invoqué leur longue tradition de soutien à la prévention des conflits, au dialogue et à la consolidation de la paix. Le représentant a ensuite insisté sur la nécessité d’établir des sociétés justes et inclusives comme condition préalable à la paix, la construction d’institutions multilatérales en réseau et l’état de droit comme garantie de la confiance. Il a plaidé pour l’inclusion des groupes marginalisés et les personnes déplacées dans les processus de consolidation de la paix.
Notant qu’il reste encore beaucoup à faire pour comprendre comment les changements climatiques affectent la paix et la sécurité, le représentant a appelé le Conseil de sécurité à faire avancer le dossier sur le climat, la paix et la sécurité. Il a plaidé en faveur d’une ONU qui s’appuie beaucoup plus sur les organisations régionales et sous-régionales, notamment grâce au financement durable des actions des partenaires régionaux, les opérations de soutien à la paix de l’Union africaine mandatées par le Conseil de sécurité par exemple. Il a aussi salué leur rôle en matière d’établissement de la confiance, prenant en exemple l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), rappelant qu’elle n’avait jamais été un club de pays partageant les mêmes idées, mais avait plutôt servi de plateforme au dialogue pour faire avancer la sécurité collective. « En ces temps difficiles, nous ne devons pas abandonner cette idée fondamentale, même si le chemin est semé d’embûches », a-t-il ajouté.
Abordant « l’éléphant dans la pièce », soit le manque de confiance au niveau international, le représentant a affirmé que le respect du droit international et de l’état de droit garantissait la prévisibilité et renforçait la confiance. Il a également plaidé en faveur du désarmement comme un facteur important pour la construction de la confiance. En conclusion, il a rappelé qu’on célébrait aujourd’hui le trentième anniversaire de la Journée mondiale de la liberté de la presse, et que les médias indépendants et pluralistes étaient des conditions préalables à la promotion de la paix et de la sécurité sur la base de faits et de preuves.
M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie) a rappelé qu’en matière diplomatique, la confiance repose sur le respect des règles et des normes par tous ceux qui y ont adhéré. L’ordre international fondé sur des règles a été établi pour empêcher que les pages les plus sombres de l’histoire du XXe siècle ne se répètent jamais, a-t-il ajouté, rappelant qu’à chaque fois qu’un État tente de s’écarter de cet ordre, la communauté internationale doit réagir.
À ce propos, le représentant a évoqué « l’agression de la Russie contre l’Ukraine », qui constitue une violation flagrante de la Charte des Nations Unies et des autres principes clefs du droit international et du droit international humanitaire. Jugeant impératif que tous les membres du Conseil de sécurité rejettent un tel comportement de la part de la Russie et poursuivent leurs efforts pour mettre fin à son agression afin de préserver la crédibilité du Conseil, il a également noté que la confiance « va de pair avec la confiance dans la capacité de la communauté internationale à gérer et à surmonter avec succès les crises et les défis ».
Aussi le représentant a-t-il indiqué que le renforcement de la résilience doit être une priorité en vue d’améliorer la gouvernance aux niveaux local, régional et mondial, là où peuvent s’absorber les chocs et les perturbations initiaux. En outre, il a appelé au renforcement du rôle de l’ONU en tant que coordonnateur d’efforts de prévention et de consolidation de la paix dans les domaines en plein essor que sont la cybersécurité, l’énergie durable ou encore l’information et la science fondées sur les preuves.
Mme CAROLYN SCHWALGER (Nouvelle-Zélande), qui s’exprimait au nom des pays du groupe CANZ ( Canada, Australie et Nouvelle-Zélande), a constaté que la confiance dans la capacité du Conseil à s’acquitter efficacement de son mandat de maintien de la paix et de la sécurité internationales est faible. De fait, a-t-elle étayé, celle-ci a notamment été érodée par la guerre d’agression illégale de la Russie contre un État souverain, l’Ukraine. Elle a encouragé au respect des engagements en faveur d’une participation et d’un leadership pleins, égaux et significatifs des femmes dans tous les aspects de la paix et de la sécurité. Elle a également mis en avant les efforts continus des pays du groupe CANZ pour promouvoir la participation les Premières nations et des peuples autochtones à leurs propres processus politiques et de paix. De même, elle a préconisé de renforcer l’engagement avec les organisations pertinentes, notamment l’Union africaine, l’Organisation des États américains (OEA), l’Organisation de la coopération islamique, (OCI), l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et le Forum des îles du Pacifique. Alors que le Nouvel Agenda pour la paix prend forme, la déléguée a préconisé d’éviter tout « doublon » et à tirer les leçons des « faux pas » du passé.
M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a déclaré que la construction d’une paix durable exige une approche holistique et inclusive qui va au-delà des simples efforts visant à mettre fin aux conflits. Une consolidation de la paix réussie exige des efforts coordonnés et collectifs pour bâtir des sociétés résilientes. Elle exige aussi de s’attaquer aux causes profondes et de promouvoir la bonne gouvernance et le développement durable, a-t-il affirmé, en soulignant l’importance de la coopération entre l’ONU et les organisations régionales dans le maintien de la paix et de la sécurité.
La Slovénie soutient un financement prévisible et durable, y compris à partir des contributions fixées par l’ONU, pour les opérations dirigées par l’Union africaine et autorisées par le Conseil de sécurité de l’ONU, a déclaré le représentant. Il a estimé que davantage devait être fait pour soutenir le rôle crucial des femmes dans les processus de consolidation de la paix et de prise de décisions, rappelant que son propre pays est le septième le plus pacifique au monde, selon le Global Peace Index 2022.
Après avoir souligné le rôle de la jeunesse comme agent essentiel du changement, le représentant a assuré que la Slovénie reste déterminée à continuer de travailler avec ses partenaires pour construire et favoriser un avenir plus sûr et pacifique pour tous.
M. ENRIQUE JAVIER OCHOA MARTÍNEZ (Mexique) a jugé que la première condition pour instaurer la confiance est la bonne foi, telle qu’établie à l’article 26 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Si les obligations internationales librement convenues ne sont pas remplies de bonne foi, l’échafaudage de règles que nous avons laborieusement construit ensemble « ne sert à rien », a-t-il fait valoir, appelant à un strict respect du droit international, qui reste « la langue commune laissée aux États pour rechercher une solution en recourant à des moyens pacifiques ».
Pour le représentant, le Conseil de sécurité s’est vu confier un rôle privilégié dans la promotion de la confiance car c’est à lui de veiller au respect des obligations juridiques dans les matières relevant de sa compétence et d’exiger que les États s’y conforment de bonne foi. En plus de s’assurer du bon respect de ses résolutions, le Conseil peut aussi faire usage des pouvoirs qui lui sont conférés par la Charte des Nations Unies, par exemple en faisant des recommandations en vue de l’exécution des arrêts de la Cour internationale de Justice (CIJ), lorsque l’une des parties ne respecte pas ses obligations. À cet égard, le représentant a relevé que la compétence consultative de la CIJ peut contribuer à la prévention des conflits, comme en témoignent les demandes de plus en plus fréquentes d’avis consultatifs que lui adresse l’Assemblée générale. Une relation étroite entre le Conseil de sécurité et la CIJ est donc nécessaire pour le règlement pacifique des différends, a-t-il souligné, avant de réitérer le soutien de son pays à un « Nouvel Agenda pour la paix » qui permette de mieux comprendre les facteurs structurels des conflits et de promouvoir le renforcement de l’état de droit.
M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a constaté que l’érosion de la confiance dans le système politique et économique international est généralisée. Il a estimé qu’elle était due à l’évolution d’un environnement sécuritaire mondial toxique où les États en sont venus à croire que s’équiper pour la guerre est la meilleure garantie de préserver la sécurité, la souveraineté et l’indépendance nationales. La confiance entre les États s’est érodée principalement parce que les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies ont été constamment violés par des États puissants et leurs alliés et parce qu’une attention insuffisante a été accordée à la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité, a-t-il ajouté. Le délégué a appelé le Secrétaire général à préparer un examen annuel des situations inscrites à l’ordre du jour du Conseil de sécurité où les principes de la Charte sont violés et où les résolutions du Conseil restent inappliquées, suggérant au Conseil d’utiliser les Chapitres VI, VII et VIII de la Charte pour amener les États violant ces principes à s’y conformer. Ce serait là le meilleur moyen de protéger l’avenir et le présent, a-t-il estimé.
Il a appelé à s’attaquer aux causes profondes des conflits, notamment la pauvreté, la faim, l’occupation et l’oppression étrangères, l’injustice, les violations des droits humains et l’impact des changements climatiques, estimant que ces questions devraient occuper une place centrale dans le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général. En outre, la pandémie et la crise du développement qu’elle a entraînée ont érodé la confiance dans le système international en raison du large déficit de solidarité à l’égard de ceux qui ont le plus souffert sans qu’ils en soient responsables, a-t-il ajouté, critiquant les institutions de Bretton Woods qui poursuivent des politiques qui exacerbent directement les problèmes budgétaires des pays en développement. Il a signalé que 54 États étaient en situation de surendettement et risquaient de se retrouver en défaut de paiement, que plus de 100 millions de personnes étaient retombées dans l’extrême pauvreté et que 300 millions de personnes avaient besoin d’une aide alimentaire. Pour y faire face, il a appelé à fournir un financement de 4 200 milliards d’euros par an pour atteindre les ODD, par la création et la réaffectation de droits de tirage spéciaux (DTS), la recapitalisation des banques multilatérales de développement, ainsi que le respect des engagements en matière d’APD et de financement de la lutte contre les changements climatiques, entre autres mesures.
M. GIANLUCA GRECO (Italie) a déclaré que, pour atteindre les objectifs de consolidation de la paix et « rétablir le cercle de confiance », le fossé entre les sociétés et les organes pertinents de l’ONU doit être comblé. Il est essentiel de respecter les besoins, les aspirations et les propositions des pays et communautés, le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix ayant une responsabilité particulière à cet égard, a insisté le représentant. C’est en ce sens qu’il a invité les deux organes à renforcer l’inclusivité de leur fonctionnement et processus de prise de décisions, à fonder leur action sur une connaissance approfondie des communautés et des peuples concernés, à promouvoir des sociétés pacifiques, justes et centrées sur les droits de l’homme et sur une relation solide entre les peuples et leurs territoires et à intégrer une perspective de genre dans toutes leurs politiques.
Le représentant a estimé que le Nouvel Agenda pour la paix devait être entendu comme un appel à l’action pour rétablir la confiance dans un multilatéralisme efficace, capable de prévenir les conflits et de maintenir une paix durable. À cette fin, il a préconisé de relancer la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 « en commençant par assurer la sécurité alimentaire de tous » et de soutenir les efforts régionaux de prévention.
M. JORGE VIDAL (Chili) a estimé que la confiance entre les différents acteurs qui œuvrent pour la paix assure la fluidité des communications et favorise l’institutionnalisation de la conduite de ces acteurs, ce qui permet de minimiser les risques de confrontation et d’incertitude. Il faut donc créer cette confiance. À cette fin, le représentant a conseillé d’analyser soigneusement les causes profondes des conflits, afin de comprendre les besoins différenciés et les vulnérabilités qui peuvent être à l’origine de la violence.
De l’avis du représentant, la construction d’une paix durable n’est possible qu’avec la participation de la société civile à toutes les étapes de la résolution des conflits. Dans cette optique, le Conseil de sécurité doit améliorer son engagement auprès des acteurs locaux, notamment les organisations de la société civile, les groupes de femmes et de jeunes, les universitaires, les journalistes et les activistes en général, afin d’assurer la prise en compte de leurs perspectives et expériences dans les processus décisionnels.
Enfin, le représentant a recommandé l’inclusion globale de la société civile, qui peut aider les pays en conflit et en transition vers la paix à trouver des solutions innovantes en mettant en œuvre des politiques publiques qui font l’objet d’un large consensus et d’un grand soutien.
M. MARTIN KIMANI (Kenya) a déclaré que, compte tenu du faible niveau de confiance actuel au sein de la communauté internationale, des actions spécifiques étaient nécessaires de la part du Conseil de sécurité, « qui souffre du plus grand déficit de confiance ». Tout d’abord, a-t-il préconisé, il convient que les délégations porte-plumes soient réparties entre membres permanents et non permanents et que les dossiers africains bénéficient de porte-plumes africains. Ce changement pourrait être mis en œuvre en janvier 2024 et au-delà, a-t-il préconisé. Dans la perspective d’une réforme plus profonde de l’organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales, la confiance sera également instaurée par les pays qui aspirent à devenir membres permanents et démontreront, « par des actes et pas seulement par des discours », qu’ils prendront leurs responsabilités au sérieux, a estimé le représentant . Il a appelé ces derniers à montrer concrètement qu’ils écoutent les points de vue de l’Union africaine, des pays africains et des petits États insulaires en développement et qu’ils y répondent positivement . Le Conseil doit en outre être plus accueillant et donner suite aux avis de la CCP, a ajouté le délégué, en plaidant pour la mise en place d’un Fonds de consolidation de la paix doté de ressources suffisantes.
M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a estimé que le renforcement de la confiance pour pérenniser la paix nécessite une approche multiforme impliquant divers acteurs, notamment les gouvernements, les organisations internationales, la société civile et les communautés. S’agissant du système des Nations Unies, le représentant a dit attendre de lui qu’il promeuve un dialogue et une participation inclusifs, éléments essentiels pour instaurer la confiance entre et au sein des différents pays. De même, les États Membres de l’ONU et les autres parties prenantes devraient investir dans des programmes d’éducation et d’information qui favorisent la compréhension et la tolérance, et qui luttent contre les discours de haine et la désinformation, a préconisé le représentant.
Selon le représentant, les gouvernements devraient également accorder la priorité aux politiques et programmes qui favorisent le développement économique, la création d’emplois et la protection sociale, tout en appuyant une réforme du système financier international. Il convient d’autre part que les États Membres et les autres parties prenantes telles que les institutions financières internationales investissent dans des institutions qui promeuvent l’état de droit, les droits humains et la bonne gouvernance, et qui répondent aux besoins de la population, a poursuivi le délégué, pour qui il importe aussi de s’attaquer aux inégalités et aux discriminations. Enfin, il a rappelé que la coopération internationale est essentielle pour instaurer la confiance et maintenir la paix, invitant les gouvernements à travailler ensemble pour relever les défis mondiaux, notamment les changements climatiques, la pauvreté, le terrorisme et les conflits.
M. JOONKOOK HWANG (République de Corée) a appelé le Conseil de sécurité à réagir face aux défis multiples et corrélés que le monde affronte actuellement en traitant les causes profondes des conflits, notamment les violations des droits humains, les changements climatiques et les cybermenaces. Pour rétablir la confiance de la communauté internationale dans son action, le Conseil devrait selon lui être plus vigilant sur les questions des droits humains et de l’état de droit, notant que les conflits étaient toujours liés à leur violation. Il aussi souligné que la reddition de comptes pour ces violations au sortir d’un conflit était capitale pour éviter sa résurgence, estimant en outre que le Conseil de sécurité devrait être saisi des violations des droits humains dans le monde entier, notamment en République populaire et démocratiques de Corée (RPDC). Il s’est aussi inquiété de la désinformation qui menace le socle même de la démocratie.
Poursuivant, le représentant a plaidé en faveur de l’inclusivité dans les efforts de consolidation de la paix et appelé le Conseil à donner plus d’occasions aux femmes, aux jeunes et à la société civile de prendre part à ses débats afin qu’ils puissent apporter « des idées plus pragmatiques et pertinentes » pour la consolidation de la paix. Après avoir exprimé sa préoccupation au sujet de la condition des femmes en Afghanistan, il a espéré que le Secrétaire général refléterait ces valeurs dans son Nouvel Agenda pour la paix. Il a également appelé le Conseil à mettre en œuvre ses propres résolutions et à éviter les veto qui se contredisent comme dans le cas des questions de non-prolifération nucléaire en RPDC.
Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, de l’Union africaine (UA), a affirmé que l’inclusivité, des cadres normatifs clairs et une approche factuelle sont des principes clefs pour entourer le processus de paix durable de toute la confiance nécessaire. À cet égard, elle a souligné qu’en matière de défense et de sécurité, le renforcement des mécanismes de démobilisation, de désarmement et de réintégration (DDR) et des réformes du secteur de la sécurité est crucial pour prévenir les conflits et l’instabilité. Elle a indiqué que l’UA a déployé des équipes techniques dans plusieurs pays africains pour, « à leur demande », aider à la conduite des processus de DDR et de réforme de sécurité. Selon elle, le Conseil de sécurité devrait envisager des moyens innovants d’appui complémentaire à ces processus de prévention des conflits, cela en accordant une importance accrue aux points de vue nationaux relatif à la leur conception. Pour ce qui est de la gouvernance, l’intervenante a indiqué que l’UA continue d’œuvrer à la mise en place de cadres juridiques fermes pour mettre un terme « à l’ère des changements anticonstitutionnels de gouvernement ». Les chefs d’État et de gouvernement de l’UA ont ainsi expriméà Malabo l’année dernière leur détermination à renforcer encore l’efficacité et la durabilité de l’appui de l’UA aux États membres en situation de transition politique et postconflit, a-t-elle fait observer.
La représentante a par ailleurs indiqué que la Commission de l’UA a récemment déployé des équipes techniques multidimensionnelles dans certains États membres, pour notamment y apporter une aide en matière de constitutionnalisme et de bonne gouvernance. Des équipes techniques à long terme seront également déployées pour l’identification des pays en reconstruction postconflit, l’objectif étant de rétablir la relation de confiance perdue entre les citoyens et les autorités nationales, et ce en rapprochant les institutions locales et nationales du citoyen ordinaire, a-t-elle encore signalé. Enfin, insistant sur le fait que l’établissement de la confiance est crucial pour le maintien de la paix, elle a souligné l’importance d’optimiser la mise en œuvre des efforts d’intérêts mutuels de l’UA et de l’ONU, y compris dans le cadre du Nouvel Agenda pour la paix.
M. OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a souligné le lien « puissant » qui existe entre la paix durable et la protection de la liberté d’expression. Il s’est dit extrêmement préoccupé par les menaces qui pèsent sur la liberté de la presse et les journalistes, qui sont de plus en plus discrédités et menacés. Selon lui, le Conseil de sécurité et les Nations Unies doivent s’engager plus activement pour protéger les journalistes et condamner le harcèlement ainsi que les représailles contre les représentants de la société civile qui collaborent avec l’ONU.
Alors que les conventions internationales relatives aux droits humains sont systématiquement violées dans de nombreux pays tels que l’Afghanistan, le Myanmar et la Syrie, le Conseil de sécurité lui-même est devenu une « scène de diffusion de la désinformation », entre autres dans le contexte de l’agression russe contre l’Ukraine, a affirmé M. Skoog. Des informateurs de la société civile ont en outre été intimidés au sein même du Conseil, et ensuite punis pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression, a-t-il rappelé. « Cela doit cesser », a déclaré le représentant, pour qui le Conseil, en tant qu’organe principal de protection de la paix et de la sécurité internationales, se doit d’incarner la Charte des Nations Unies, le droit international humanitaire et les droits humains.
Les représentants spéciaux, les envoyés et les médiateurs du Secrétaire général peuvent avoir un impact réel sur la résolution des conflits, a poursuivi le représentant. De même, le dialogue, la médiation et les bons offices devraient être inclus dans le Nouvel Agenda pour la paix en tant qu’outils de prévention des conflits. L’Union européenne soutient les communautés libérées des Chabab en Somalie et aide la République centrafricaine à établir un cadre juridique permettant de restructurer l’organisation de la police. Une grande partie de cet appui est acheminé par l’intermédiaire de l’ONU, par exemple au Yémen, où l’Union européenne joue un rôle de coordination de la médiation Track II et d’appui au cessez-le-feu. Il est cependant crucial que ces instruments soient inclusifs, a insisté le représentant, en expliquant que les sociétés les plus égalitaires entre les sexes sont aussi les plus pacifiques.
Enfin, a dit M. Skoog, l’ONU doit utiliser les données et les preuves les plus fiables pour façonner ses décisions. À cet égard, les recherches du Fonds d’analyse des risques complexes devraient selon lui alimenter les travaux du Conseil. Malgré toutes les preuves dont nous disposons sur les changements climatiques, certains membres du Conseil continuent de « nier les faits », a-t-il déploré. Maintenir la vérité dans cet organe est essentiel pour conserver la confiance dans le système onusien, a-t-il ajouté.
M. MUHAMMAD ABDUL MUHITH (Bangladesh) a dit avoir assisté ces dernières années à des déficits de confiance croissants entre les personnes et les institutions, y compris les Nations Unies, en particulier dans le contexte de la pandémie de COVID-19 et des conflits en cours. Il s’est alarmé de la mise à l’épreuve constante de la capacité du Conseil de sécurité à faire et maintenir la paix, alors que les défis à la paix se sont aggravés avec l’émergence de menaces nouvelles et non conventionnelles.
Dans ce contexte, le représentant a appelé le Conseil à faire preuve d’unité et de détermination pour répondre efficacement aux menaces visibles à la paix et à la sécurité internationales et à utiliser ses outils existants pour protéger les plus vulnérables. Il a rappelé à cet égard que près de six ans se sont écoulés depuis que les minorités rohingya ont été expulsées en masse de l’État rakhine, au Myanmar. Constatant qu’aucune mesure efficace n’a été prise par le Conseil pour remédier à cette situation, il l’a invité à « revenir sur son inaction » pour restaurer la confiance. Notant que les opérations de maintien de la paix restent l’un des outils les plus crédibles de l’ONU pour instaurer la confiance, il a souhaité que la contribution des soldats de la paix à la protection des civils et au renforcement des institutions des pays hôtes soit exploitée de manière adéquate. Il est tout aussi important, selon lui, d’accroître les investissements dans les composantes de consolidation de la paix des missions de maintien de la paix.
Pour le Bangladesh, la Commission de consolidation de la paix joue un rôle complémentaire important dans la pérennité du maintien de la paix. En raison de sa structure et de sa méthode de travail, elle est la mieux placée pour contribuer au renforcement de la confiance, a soutenu le représentant, qui a rappelé qu’en tant que président de la Commission pendant deux mandats, son pays avait tenté de lui donner de nouvelles perspectives, notamment en renforçant son rôle consultatif, en élargissant sa portée géographique et en offrant un espace aux pays pour discuter de diverses questions de sécurité « non traditionnelles », telles que les changements climatiques. Une approche similaire peut être adoptée pour faire face à d’autres menaces émergentes, y compris celles émanant des technologies numériques, a-t-il avancé, avant d’appeler à la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité dans des contextes plus larges, en particulier dans la lutte climatique, la réduction des risques de catastrophe et l’action humanitaire. Enfin, à l’approche du Sommet de l’avenir de 2024, il a jugé que les consultations en cours sur le Nouvel Agenda pour la paix, le Pacte numérique mondial et la Déclaration pour les générations futures offrent des opportunités d’échange sur les mécanismes permettant d’anticiper et de prévenir les menaces à venir.
M. ARRMANATHA CHRISTIAWAN NASIR (Indonésie) a souligné l’importance de la confiance pour la paix et l’efficacité du multilatéralisme. Le déclin de la confiance dans le multilatéralisme peut donc être préjudiciable non seulement aux efforts de consolidation de la paix, mais aussi au maintien de la paix mondiale, a-t-il dit, appelant à faire de la promotion de la confiance une caractéristique importante du Nouvel Agenda pour la paix.
Déclarant venir d’une région qui a transformé un profond déficit de confiance en « confiance stratégique », le représentant a rappelé que son pays a toujours prôné le dialogue, la coopération et la recherche d’un consensus au niveau régional. Il a ajouté que les pères fondateurs de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) avaient choisi de se concentrer sur l’établissement de la confiance par le dialogue et la coopération pour promouvoir le développement économique et l’élimination de la pauvreté. Parmi les cadres régionaux élaborés pour instaurer la confiance, faire progresser la coopération et renforcer l’architecture de paix régionale, il a cité le Traité d’amitié et de coopération en Asie du Sud-Est et le Traité de Bangkok créant la zone exempte d’armes nucléaires en Asie du Sud-Est, ainsi que les efforts de consolidation de la paix dans la région au sens large par le biais des différents mécanismes de l’ASEAN.
Le représentant a d’autre part estimé qu’une collaboration étroite entre le Conseil de sécurité et d’autres mécanismes multilatéraux est cruciale pour instaurer la confiance et consolider la paix. Le travail des mécanismes de développement des Nations Unies, par exemple, peut traduire les stratégies de consolidation de la paix adoptées par le Conseil de sécurité en actions sur le terrain, a-t-il fait valoir, avant d’appeler à un soutien adéquat et à des ressources prévisibles, y compris un financement durable, pour permettre à ces mécanismes de mener à bien leur travail. Le représentant a par conséquent plaidé pour un élargissement des sources de financement, notamment par le biais de partenariats avec le secteur privé, ainsi que via la coopération Sud-Sud et triangulaire. Enfin, après avoir souhaité que toutes les expériences disponibles soient prises en compte dans l’élaboration du Nouvel Agenda pour la paix, il s’est prononcé pour la création d’une plateforme qui permettrait au Conseil de procéder à des échanges d’expériences, y compris avec des entités régionales.
M. CORNEL FERUȚĂ (Roumanie) a affirmé que les droits humains devraient être au cœur des actions en faveur de la paix et de la sécurité, et que la coopération avec la société civile, les médias, les femmes, les filles et les jeunes, était essentielle pour instaurer la confiance. Rappelant que la Roumanie était membre actif du Conseil des droits de l’homme, le représentant a souligné l’importance qu’elle accorde à ces questions. Il a aussi souligné le rôle crucial des programmes « paix et sécurité » pour les femmes et les jeunes et de la nécessité de les intégrer dans le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général.
Aux côtés des États-Unis, la Roumanie assurera la coprésidence du réseau des points focaux pour la paix et la sécurité mondiales en 2023, a rappelé M. Feruta, qui a vivement encouragé le renforcement de la coopération entre les différentes parties prenantes au processus de consolidation de la paix, notamment les organisations régionales et les institutions nationales. Il a estimé que l’instauration de la confiance passe par la création de partenariats qui se renforcent mutuellement, constituant un élément essentiel du système multilatéral.
Rappelant que la Journée mondiale de la liberté de la presse était célébrée aujourd’hui, le représentant a salué le travail des journalistes qui s’efforcent de débusquer les fausses nouvelles afin que le public soit correctement informé, qualifiant leur activité de « tremplin pour l’instauration de la confiance » et estimant qu’il n’était pas exagéré de dire que « la paix commence avec le journalisme ».
Pour M. RÓBERT CHATRNÚCH (Slovaquie), le renforcement de la confiance mutuelle entre les différents acteurs de l’architecture de consolidation de la paix est essentiel pour améliorer la résilience et parvenir à une paix et une stabilité durables, en particulier dans les régions et les pays touchés par un conflit. La confiance se développe à travers un processus d’engagement collectif qui aide les communautés et les sociétés à renforcer leurs institutions sociales et à construire la résilience et la cohésion sociale, a-t-il fait valoir, notant que l’inclusivité est essentielle dans ce processus. Il a appelé la communauté internationale à continuer de développer et mettre en œuvre le cadre normatif international. Cela est d’autant plus important à la lumière des développements technologiques rapides, des nouvelles menaces pour la sécurité, et de la propagation croissante de la désinformation et des informations fallacieuses, ce qui a un impact particulièrement négatif sur la confiance entre les acteurs.
La prévisibilité et la reddition de comptes étant les pierres angulaires de tout ordre stable après un conflit, le représentant a souligné que le soutien international et local aux processus de consolidation de la paix dépend largement de la capacité des acteurs à démontrer de manière crédible leur respect de l’état de droit international. Il a appelé à inclure les questions liées aux crises énergétique et alimentaire, au soutien à apporter aux institutions efficaces, à la sécurité humaine et à la fracture numérique dans le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général.
M. CARLOS AMORÍN (Uruguay) a reproché à la communauté internationale, représentée par les Nations Unies, en particulier le Conseil de sécurité, de n’avoir pas été en mesure de répondre de manière adéquate à l’érosion du système multilatéral et de la validité d’un ordre international fondé sur des règles, laissant ainsi libre cours à une crise de confiance entre les États Membres qui s’est répandue dans toutes les institutions multilatérales. Pour contrer cette tendance, le représentant a prôné la défense et la promotion du multilatéralisme, dans le cadre du strict respect des buts et principes de la Charte, dont le respect de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale, l’égalité souveraine entre États et le non-recours à la force; les conditions de la légitime défense étant clairement définies au Chapitre VII. Le respect du droit international, a-t-il souligné, sert la sécurité collective et de nombreux conflits auraient pu être évités si les États avaient respecté les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, en particulier le principe du règlement pacifique des différends. En l’occurrence, les autres organes des Nations Unies doivent agir chaque fois que le Conseil de sécurité est paralysé.
M. JUAN ANTONIO BENARD ESTRADA (Guatemala) a estimé que le Conseil de sécurité n’a pas été en mesure d’assumer sa responsabilité principale dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales après que l’un de ses membres permanents, la Fédération de Russie, a attaqué de manière injustifiée l’Ukraine. De telles actions unilatérales ne font qu’affaiblir l’état de droit et violent les normes les plus fondamentales du droit international, s’est ému le représentant. Il a ensuite considéré que davantage de cohérence est nécessaire dans la compréhension des approches, des outils et des principes fondamentaux de la consolidation de la paix. En outre, le Conseil peut et doit bénéficier d’une interaction accrue avec les États Membres qui n’y siègent pas et avec d’autres organes onusiens. À cet égard, le délégué a reconnu la valeur ajoutée de la Commission de consolidation de la paix (CCP) en tant qu’organe consultatif du Conseil. Il a également jugé nécessaire que le « Nouvel Agenda pour la paix » inclut une vision holistique des conflits, soit un « continuum » qui englobe la totalité du cycle des conflits –prévention, intervention immédiate, maintien de la paix, consolidation de la paix et développement durable–, afin que le Conseil de sécurité mette en œuvre son mandat, conformément aux besoins et aux réalités du XXIe siècle.
M. YOSEPH KASSAYE YOSEPH (Éthiopie) a rappelé que l’établissement de la confiance fait partie des principes de la Charte, jugeant à cet égard que la confiance dans les principes de souveraineté, d’intégrité territoriale et de non-ingérence est fondamentale. Le représentant a également insisté sur le principe d’appropriation nationale car chaque État a le droit de choisir sa voie politique, économique et culturelle. L’appropriation nationale implique des choix politiques faits par les États eux-mêmes, a-t-il dit, avant de souligné que les prérogatives pour le financement de la consolidation de la paix ne sauraient aller à l’encontre de ces principes. Le délégué a d’autre part jugé que la représentation de l’Afrique au sein du Conseil de sécurité est « injuste » et que le statu quo actuel sape sa crédibilité. Après avoir dénoncé le caractère nuisible des mesures coercitives unilatérales, il s’est dit convaincu que les défis liés au renforcement de la confiance peuvent être surmontés par le biais de la solidarité, sous l’égide de l’ONU et dans le respect des normes internationales.
M. DAVID ABESADZE (Géorgie) a estimé que le multilatéralisme traverse sa période la plus difficile depuis la création des Nations Unies, en raison de l’attaque menée par un membre permanent du Conseil de sécurité contre ses principes fondateurs. Le représentant a dénoncé la guerre d’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine et son occupation de 20% du territoire de la Géorgie. Ce sont là, a-t-il dit, des violations flagrantes des principes fondamentaux du droit international qui portent un coup terrible à la sécurité européenne et à l’ensemble de l’ordre international. Qualifiant l’agression russe contre l’Ukraine de « test décisif » de l’incapacité du Conseil à jouer efficacement son rôle, il a appelé à d’autres moyens de faire respecter la Charte, notamment contre les abus dans l’exercice du droit de veto. Ce droit doit être limité lorsqu’un membre permanent du Conseil est partie à un conflit en question, conformément à l’Article 27 de la Charte, a-t-il rappelé.
Il a aussi rappelé que la Géorgie a fait l’amère expérience d’une telle situation quand, suite à l’agression militaire massive de la Russie en août 2008, le mandat de la Mission d’observation des Nations Unies en Géorgie (MONUG) a été « effrontément annulé » par un veto russe, pourtant partie prenante au conflit. Cette décision a créé un vide total dans les territoires occupés par la Russie, au moment où l’on avait le plus besoin d’une implication internationale, a-t-il expliqué. Regrettant que 15 ans plus tard, la Fédération de Russie ne respecte toujours pas ses obligations internationales et continue de violer l’accord de cessez-le-feu du 12 août 2008, conclu sous l’égide de l’Union européenne, il a dénoncé « l’occupation illégale des régions géorgiennes d’Abkhazie et de Tskhinvali » et les graves violations des droits humains qui y sont commises, « clairement attestées » par les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour pénale internationale (CPI). Il a également rappelé l’arrêt du 7 mars 2023 de la Cour européenne, qui a confirmé que la région d’Abkhazie était sous le contrôle effectif de la Fédération de Russie, avant même l’agression d’août 2008. La Cour a aussi établi la responsabilité pleine et entière de la Fédération de Russie dans les violations des droits de l’homme dans la région occupée, a conclu le représentant.
M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) a déclaré que le Conseil doit toujours insister sur le strict respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme, demander des comptes et lutter contre l’impunité. Les droits de l’homme sont un fondement essentiel du maintien de la paix et doivent être reconnus comme tels, a-t-il ajouté, avant de demander instamment aux membres du Conseil d’inviter plus régulièrement le Haut-Commissaire aux droits de l’homme à faire des exposés. Il a également estimé qu’à l’ère des « fake news », le Conseil a la responsabilité de prendre des décisions fondées sur des preuves, qu’elles soient de nature scientifique ou liées aux informations qui lui sont transmises. Le Conseil de sécurité doit aussi approfondir sa coopération avec la Commission de consolidation de la paix et accorder la priorité aux approches soucieuses de l’égalité des sexes et aux perspectives sensibles aux causes profondes des conflits. Le représentant a d’autre part exhorté le Conseil à utiliser des données fiables, des expertises et des avancées technologiques susceptibles d’améliorer la transparence, l’exactitude et l’inclusion.
Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a considéré que pour assurer l’avenir, il faut avant tout tirer les bons enseignements de l’histoire. Sous sa forme actuelle, le Conseil de sécurité nie une représentation permanente à l’Afrique, l’Amérique latine et à « la plus grande démocratie du monde », perpétuant ainsi les inégalités. La réforme du Conseil est le premier pas vers l’établissement de la confiance nécessaire au maintien de la paix, a martelé la représentante. Les institutions multilatérales doivent être plus responsables vis-à-vis de leurs membres, et plus ouvertes à la diversité des points de vue, notamment ceux du Sud et des pays en développement. Le Conseil de sécurité ne pourra offrir de solutions efficaces que s’il donne une voix aux laissés-pour-compte. Il doit collaborer davantage avec les organisations régionales, qui ont un rôle important à jouer dans la résolution des problèmes mondiaux et dans les efforts multilatéraux. Une approche globale axée sur le développement durable, une croissance économique inclusive et les processus politiques est essentielle pour la consolidation et le maintien de la paix. L’approche de l’Inde en la matière se fonde sur l’appropriation nationale et les priorités de développement des États Membres, a-t-elle noté, notamment grâce à ses partenariats avec les pays du Sud et aux forums bilatéraux et multilatéraux dans les situations d’après conflit.
M. DANG HOANG GIANG (Viet Nam) s’est dit fermement convaincu que le dialogue constitue une base solide sur laquelle le système multilatéral peut s’appuyer et que la confiance en est le socle. Pour instaurer la confiance, nous devons reconnaître qu’elle ne peut être contrainte ou fabriquée. Dès lors, tous les acteurs des relations internationales, en particulier les grandes puissances, doivent agir de bonne foi et faire preuve de responsabilité, tout en prenant pleinement en considération les intérêts légitimes de toutes les parties prenantes. Il n’y a pas de meilleur moyen d’instaurer la confiance avec les pays hôtes et leur peuple que de s’engager dans un dialogue ouvert et des interactions franches avec toutes les parties prenantes, tout en respectant leur indépendance, leur souveraineté et leur intégrité territoriale. Cette approche doit être intégrée dans les mandats de toutes les missions de maintien de la paix des Nations Unies, a insisté le délégué.
M. AGUSTÍN SANTOS MARAVER (Espagne) a estimé que la confiance entre les États Membres est la pierre angulaire de l’Organisation des Nations Unies. Les conditions de son existence sont, du reste, inscrites dans le préambule et au Chapitre I de la Charte, a-t-il rappelé, ajoutant que les Articles 2.2 et 4.1 établissent spécifiquement le principe de bonne foi comme condition d’admission des États dans l’Organisation. Constatant toutefois qu’il existe une méfiance croissante entre les États Membres et que cette méfiance affecte la crédibilité de l’ONU dans sa réponse multilatérale aux défis de notre temps, le représentant s’est dit préoccupé par le non-respect des résolutions approuvées par le Conseil de sécurité et la paralysie de l’organe chargé de la paix et de la sécurité internationales.
Concernant le travail des Nations Unies, le représentant a estimé que la méfiance s’y traduit par la perception de l’ONU, mentionnée dans le dernier rapport sur le développement humain, comme un système « excessivement bureaucratique », éloigné des réalités quotidiennes des peuples qu’elle essaie d’aider. Le rapport du Secrétaire général sur l’état du Programme de développement durable à l’horizon 2030 corrobore ce sentiment, a-t-il relevé, jugeant impératif de reconstruire la confiance et de forger un « nouveau contrat social » multilatéral et au sein des États, fondé sur les valeurs partagées de démocratie, de solidarité et de droits humains.
Pour le représentant, le préalable est d’assurer le maintien de la paix et de la sécurité pour tous, dans le respect des résolutions du Conseil de sécurité. En ce sens, a-t-il poursuivi, le Nouvel Agenda pour la paix est un plan de revitalisation de l’action multilatérale dans un monde en transition et en concurrence géostratégique. Il importe donc qu’il prévoie une réforme du Conseil, afin de le rendre plus représentatif, et qu’il promeuve une nouvelle relation institutionnelle entre le Conseil et l’Assemblée générale, qui subordonne les intérêts particuliers au bien commun, a-t-il conclu.
Dans le contexte géostratégique actuel d’érosion de la confiance et de concurrence croissante, Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a estimé que le Nouvel Agenda pour la paix offre la possibilité d’affirmer la transparence, l’instauration de la confiance et le dialogue pratique comme alternative à l’acquisition d’armes. Ce nouvel agenda peut revitaliser les mesures de transparence et de confiance existantes et promouvoir l’élaboration de nouvelles mesures dans le domaine des armes de destruction massive, des armes conventionnelles, du cyberespace et de l’espace extra-atmosphérique, ainsi que des technologies émergentes. Ces mesures, a-t-elle ajouté, doivent œuvrer à favoriser la compréhension mutuelle, réduire les perceptions et les calculs erronés, améliorer la clarté des intentions et, en fin de compte, réduire le risque de conflit armé. La déléguée a également encouragé l’utilisation accrue du rapport des Nations Unies sur les dépenses militaires et du registre des Nations Unies sur les armes conventionnelles, qui sont essentiels pour promouvoir la transparence et la responsabilité en matière de dépenses militaires et de commerce des armes. Elle a également appelé le Conseil de sécurité à introduire dans les mandats les outils nécessaires pour mieux comprendre les risques posés par le détournement, le trafic illicite et la prolifération des armes et des munitions. La déléguée a aussi mis l’accent sur l’importance de la collecte de données et de preuves crédibles, y compris l’impact perturbateur de l’intelligence artificielle sur les opérations militaires et les opportunités et les défis qui en découlent.
Pour M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud), la confiance comporte plusieurs facettes qui doivent être prises en compte dans le processus d’élaboration d’un nouvel agenda pour la paix. À cet égard, il a noté que les causes de la méfiance et de la défiance sont diverses et diffèrent d’un pays à l’autre ou d’une région à l’autre, et qu’il faut donc éviter un diagnostic et des solutions uniques. Les efforts visant à instaurer, restaurer et pérenniser la confiance doivent être guidés par des preuves empiriques basées sur chaque situation sur le terrain, a-t-il estimé.
Alors que la confiance, en relation avec les conflits inter ou intraétatiques, reste un élément clef dans tout scénario de consolidation de la paix, le représentant a mis en exergue le fait qu’elle se développe souvent grâce à un dialogue continu, à l’inclusion politique, économique et sociale et à la reconnaissance ou à la compréhension de notre interconnexion et de notre interdépendance. Les cadres normatifs et les institutions complémentaires peuvent également renforcer la confiance au sein des États et entre les États, a-t-il poursuivi, en citant notamment les institutions nationales visant à fournir les services attendus par la population, ainsi que les entités et accords régionaux qui favorisent la paix et le bon voisinage. Toutefois, une mise en œuvre, a-t-il concédé, un suivi et une évaluation scrupuleux sont importants pour que ces mesures soient efficaces.
Quant à la confiance dans le contexte des organisations intergouvernementales telles que les Nations Unies et les institutions financières, le représentant a rappelé que le Secrétaire général de l’ONU appelle à un multilatéralisme plus efficace dans la réalisation de ses promesses et, par conséquent, à un multilatéralisme plus fiable. À cet égard, le Conseil de sécurité doit jouer son rôle en s’assurant qu’il est cohérent et efficace dans le traitement des questions de paix et de sécurité, afin que les personnes dans des situations de conflit de longue date, telles que la Palestine et le Sahara occidental, aient confiance que le système multilatéral traitera leur situation de la même manière équitable et basée sur le droit international que d’autres conflits à l’ordre du jour international.
Enfin, le représentant a mis l’accent sur le rôle des partenariats entre différents acteurs sur des objectifs communs aux niveaux local, national, régional et international pour promouvoir la confiance entre les dirigeants, les institutions et le système des Nations Unies.
Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a considéré que l’inclusion et un financement adéquat sont aussi indispensables à l’instauration de la confiance que celle-ci est nécessaire à une paix durable. Elle a cité l’exemple des équipes de protection des femmes de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS) qui jouent un rôle important dans l’action précoce au sein des communautés locales et des camps de personnes déplacées. Considérant que 60% de la population du Soudan est composée de jeunes, et que la révolution de décembre a été menée au premier chef par les jeunes et les femmes, la nécessité d’inclure ces voix est une évidence qui n’est pas suffisamment prise en compte par le Conseil de sécurité, a-t-elle regretté. De même, le Conseil devrait inviter plus souvent des femmes et des représentants des jeunes pour discuter des questions relatives à la paix et à la sécurité. Il en va de même en ce qui concerne les consultations sur le Nouvel Agenda pour la paix.
S’agissant du financement, la représentante a soutenu l’utilisation des contributions fixées pour le Fonds pour la consolidation de la paix, ce qui améliorerait selon elle la prévisibilité du financement tout en envoyant un signal fort indiquant que la consolidation de la paix est soutenue par l’ensemble des États Membres de l’ONU. Elle a encouragé les délégations à soutenir ce principe dans le cadre des négociations en cours au sein de la Cinquième Commission.
M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal) a estimé que la consolidation de la paix exige d’accorder une priorité constante au développement afin de s’attaquer aux causes profondes des conflits. Fort de sa propre expérience en tant que pays émergeant d’un conflit, le Népal met l’accent sur les efforts de consolidation de la paix fondés sur un dialogue politique constant et des processus politiques inclusifs, a assuré son représentant. À cet égard, la participation significative des femmes, des jeunes et des minorités est la pierre angulaire de l’instauration de la confiance au sein du système de gouvernance. Le délégué a appelé à renforcer la coopération entre le Conseil de sécurité, l’Assemblée générale, l’ECOSOC et la CCP et de veiller aussi aux synergies entre les équipes de pays de l’ONU, les institutions financières internationales et les organisations régionales afin de rassembler des ressources adéquates pour les besoins de la consolidation de la paix. L’instauration de la confiance au sein des nations ou entre elles passe par un dialogue permanent et des échanges francs qui leur permettent d’acquérir une compréhension commune, a-t-il plaidé en conclusion.
M. ANTONIO MANUEL REVILLA LAGDAMEO (Philippines) a constaté que, dans la géopolitique actuelle, le déficit de confiance croissant entre et parmi les pays est devenu un défi pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il a donc vu dans l’appel du Secrétaire général en faveur d’un nouvel agenda pour la paix une entreprise importante pour pérenniser la confiance pour le maintien de la paix. Ce nouvel agenda doit, selon lui, être centré sur les personnes et renforcer l’inclusion des femmes, des jeunes et de la société civile dans le cadre du droit international.
De l’avis du représentant, l’expérience de la région de Bangsamoro, dans le sud des Philippines, est l’illustration d’un processus de paix centré sur les personnes. Une grande importance y a été accordée à la manière dont les communautés peuvent atteindre la qualité de vie souhaitée et le processus de normalisation a favorisé une feuille de route pour la paix et le développement qui est à la fois inclusive, participative et sensible aux conflits, à la culture et au genre, a-t-il souligné.
Sur la base de cette expérience, le représentant a souhaité que le Nouvel Agenda pour la paix donne voix au chapitre à tous les États Membres, en particulier aux pays et à la région concernés, dans la prise de décisions. Il a également plaidé pour une plus grande collaboration entre les États Membres, les organisations de la société civile et les autres parties prenantes afin de renforcer la compréhension, d’identifier les objectifs communs et de faciliter la coopération. Un effort est par ailleurs nécessaire en matière de prévention et de règlement des conflits, notamment le soutien aux négociations, la promotion du dialogue et la fourniture d’une médiation et d’autres formes d’assistance pour aider à prévenir ou à résoudre les conflits, a-t-il préconisé.
Le représentant a d’autre part estimé que les mécanismes et programmes des droits de l’homme, tels que le Programme conjoint Philippines-ONU pour les droits de l’homme, constituent un bon modèle pour favoriser la confiance entre les États Membres, l’ONU et d’autres parties prenantes, tout en établissant des partenariats durables pour la démocratie, la justice et l’état de droit. Enfin, après avoir appelé au renforcement des capacités et à l’utilisation de la technologie au service de la paix, il a jugé nécessaire de consolider les institutions pour la paix, en particulier la Commission de consolidation de la paix, en injectant les ressources nécessaires et en appuyant les processus participatifs.
Pour promouvoir la paix régionale et internationale, a indiqué M. AKAN RAKHMETULLIN (Kazakhstan), mon pays a pris plusieurs initiatives dont la Conférence sur l’interaction et les mesures d’établissement de la confiance en Asie, le Processus d’Astana sur le Syrie ou encore la création du Centre pour les objectifs de développement durable en Asie et en Afghanistan. Le représentant a jugé essentielles la collecte de données fiables sur tous les défis auxquels est confrontée l’ONU. C’est essentiel, a-t-il expliqué, pour les projections, la réaction, l’alerte rapide, la gestion et le partages des informations. Les nouvelles technologies doivent être utilisées pour contrer la désinformation qui finit par alimenter le mécontentement et l’hostilité dans les sociétés.
M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a déclaré que les processus de justice transitionnelle, tels que les commissions vérité, peuvent jouer un rôle dans le renforcement de la confiance en encourageant la reddition de comptes pour les violations des droits humains, en reconnaissant la souffrance des victimes et en facilitant la réconciliation entre différents groupes. D’autres approches du renforcement de la confiance dans le contexte du maintien de la paix comprennent des approches inclusives de la consolidation de la paix, la promotion de cadres normatifs internationaux et l’utilisation d’informations factuelles et de données de haute qualité pour éclairer la prise de décisions, a-t-il énuméré. Le représentant a souligné que l’efficacité de ces approches dépend de facteurs tels que la légitimité, la participation des communautés et, surtout, de la volonté politique des dirigeants. À son tour, il a mis l’accent sur la nécessité que les États Membres travaillent de concert à instaurer la confiance à partir des perspectives d’inclusion, de cadres normatifs agréés et de faits vérifiés. Le Conseil de sécurité a un rôle vital à jouer dans cette entreprise, et nous appelons tous les États Membres à travailler ensemble pour construire un monde plus pacifique et plus prospère, a conclu le représentant.
S’exprimant au nom des pays nordiques, Mme MARIE-LOUISE KOCH WEGTER (Danemark) a commencé par dire que le renforcement de la prévention est un élément clef de l’instauration de la confiance. Le Nouvel Agenda pour la paix offre une occasion opportune d’accroître l’efficacité de nos efforts collectifs pour maintenir la paix et rétablir la confiance dans nos systèmes, a-t-elle estimé. À cette fin, il faut envisager de renforcer les capacités de prévention à tous les niveaux, en intégrant la dimension climatique et en rendant opérationnelle la relation étroite entre la prévention des conflits et la protection et la promotion des droits humains.
Les partenariats équitables contribuent à instaurer la confiance entre parties prenantes et à maintenir la paix, a poursuivi la représentante, pour qui il faut inclure les organisations locales de la société civile, la jeunesse et les femmes. Mais, pour parvenir à de tels partenariats, nous devons disposer d’un financement adéquat, prévisible et durable pour la consolidation de la paix et soutenir en particulier les initiatives de paix menées au niveau local, a-t-elle souligné.
Pour les pays nordiques, le renforcement de la confiance résultant d’une telle inclusion dans l’ensemble de l’architecture de consolidation de la paix de l’ONU peut contribuer à renforcer la valeur de l’engagement du Conseil de sécurité auprès de la Commission de consolidation de la paix. Le rôle de rassembleur de la CCP, qui met l’accent sur l’appropriation nationale et l’inclusivité, ainsi que sur les échanges entre pairs, peut être mis à profit pour prendre en compte un plus large éventail de voix au sein des travaux du Conseil, a estimé la représentante.
M. OMAR HILALE (Maroc) a jugé nécessaire de favoriser les approches inclusives dans le cadre des processus de consolidation de paix, afin de bâtir une paix pérenne capable de faire face aux défis actuels et émergents. Les Nations Unies, et plus particulièrement le Conseil, a-t-il précisé, devraient continuer de faire usage de tous les moyens, instruments et règles mis à leur disposition par la Charte pour la prévention des conflits et le règlement pacifique des différends, notamment la promotion de la médiation et le dialogue en tant que mesures de confiance. À cet égard, le recours aux bons offices du Secrétaire général demeure fondamental pour promouvoir le règlement pacifique des différends et amener les parties à s’engager dans les négociations, la médiation et d’autres méthodes pacifiques afin de régler leur différend.
Pour le représentant, il est très important de poursuivre le renforcement de la collaboration entre le Conseil de sécurité et la CCP en vue d’assurer des stratégies plus cohérentes pour renforcer la résilience et l’efficacité des institutions et promouvoir des approches inclusives capables de soutenir des initiatives nationales de consolidation de la paix. Par ailleurs, il a souligné la nécessité de respecter les principes de bon voisinage et de non-ingérence dans les affaires intérieures des États. Le Maroc, a-t-il ajouté, a officiellement lancé son premier plan d’action national pour la paix et la sécurité le 23 mars 2022, en soutien à la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité. Son pays, a dit le représentant, reconnaît également le rôle clef de la jeunesse dans la promotion de la paix et de la sécurité au sein de leurs communautés et partout dans le monde.
M. FAHAD M. E. H. A. MOHAMMAD (Koweït) a fait état d’un système multilatéral déséquilibré, divisé et marqué par des différences de plus en plus profondes entre États Membres. Il est donc urgent de réexaminer les outils existants, notamment ceux prévus par la Charte, tout en étudiant des instruments modernes comme la technologie et la numérisation, a soutenu le représentant. Compte tenu du coût élevé d’une crise, le Conseil ne peut se contenter de la gestion des conséquences mais doit aussi étudier des moyens de prévention plus efficaces. En l’occurrence, les organisations régionales et sous-régionales doivent jouer un rôle plus important. Par ailleurs, a poursuivi le délégué, les efforts de consolidation et de pérennisation de la paix doivent se baser sur la confiance et si nous voulons nous appuyer sur cette confiance comme pilier du succès des opération de paix, il faut mettre l’accent sur l’appropriation nationale et la participation effective des femmes et des jeunes. Les efforts politiques doivent s’accompagner d’efforts dans le domaine du développement, a conclu le représentant, en apportant son soutien à « Notre Programme commun » du Secrétaire général qui appelle à la mise en place d’un « Nouvel Agenda pour la paix ».
Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) a affirmé que les attentes et la prévisibilité étaient des éléments cruciaux en vue d’établir la confiance. Étant donné que la guerre la plus sanglante des huit dernières décennies sur le sol européen a commencé au beau milieu d’une réunion du Conseil de sécurité, nous avons incontestablement des problèmes d’attentes et de prévisibilité, a-t-elle ironisé. Appelant à s’attaquer aux violations en cours de la Charte des Nations Unies, elle a affirmé qu’actuellement, le Conseil n’était pas une référence crédible en la matière parce qu’il était incapable de faire ce pour quoi il avait été créé: maintenir la paix et de la sécurité internationales. Dénonçant le « comportement irresponsable » d’un seul pays, elle s’est prononcée en faveur d’un rétablissement de la confiance, fondé sur l’équité et la justice, estimant que le langage utilisé dans les documents ne peut avoir d’importance si l’impunité prévaut.
Elle a martelé qu’il n’y avait pas de demi-solutions au problème susmentionné et que rien ne serait possible si l’obligation de rendre des comptes n’était pas garantie et que des mesures coercitives à l’égard des contrevenants n’étaient pas appliquées. « Lorsque votre maison est en feu, vous ne vous rendez pas à Home Depot pour acheter du papier peint; il faut d’abord éteindre l’incendie », a-t-elle résumé. Elle a fustigé le fait que des criminels présumés ont récemment présidé le Conseil, rappelant les États Membres à leur devoir « d’éteindre le feu de l’agression russe ». Invoquant le souvenir des tribunaux de Nuremberg, elle a espéré que « le futur procès des criminels de guerre russes » jouerait le même rôle, dans l’intérêt de la confiance, de la paix et de l’avenir des Nations Unies.
M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a affirmé que le Conseil de sécurité peut contribuer efficacement au maintien de la paix et de la sécurité internationales, en s’attaquant aux causes profondes des conflits, en contribuant à la cessation des hostilités, en renforçant les efforts de prévention des conflits et de consolidation de la paix, en garantissant l’établissement des responsabilités pour les crimes les plus graves, en promouvant la justice et en garantissant la participation pleine, égale et significative de toutes les parties prenantes, y compris les femmes et les jeunes, tout au long des processus de paix. À cet égard, il a souligné l’importance de mettre pleinement en œuvre les résolutions 1325 (2000) et 2250 (2015) du Conseil de sécurité et de formuler des politiques inclusives adaptées aux processus politiques et aux efforts de paix. Le représentant a prôné à cette fin le renforcement des partenariats du Conseil avec les organisations régionales, la société civile et les autres parties prenantes présentes sur le terrain. De tels partenariats devraient appuyer une approche fonctionnelle et cohérente du maintien de la paix, a-t-il dit. Par ailleurs, il a indiqué que son pays considère le « Nouvel agenda pour la paix » comme le point de départ d’un dialogue constructif entre les interlocuteurs gouvernementaux et non gouvernementaux sur une approche holistique et durable de la consolidation de la paix, tout en ne retirant pas aux États leur rôle primordial dans les domaines de la paix, de la sécurité et du développement.
M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a constaté que l’architecture mondiale de paix et de sécurité est confrontée à une méfiance croissante de l’opinion publique et que la coopération multilatérale se détériore du fait de l’aggravation des divisions entre États Membres. Cela compromet la capacité collective à faire face aux menaces communes et à instaurer une paix durable aux niveaux régional et international, a-t-il regretté.
Les approches des gouvernements et des Nations Unies visant à prévenir les conflits et à promouvoir des sociétés pacifiques et inclusives requièrent un niveau élevé de confiance de la part de leur peuple et entre les peuples, a souligné le représentant, qui a ajouté que la confiance entre les communautés et leur gouvernement est ancrée dans les institutions de l’état de droit, de la justice et de la démocratie. Le rétablissement de l’état de droit et de la stabilité dans une société meurtrie par la violence va bien au-delà de la cessation de la violence et des accords politiques, a noté le représentant, qui a toutefois ajouté que favoriser la confiance du public et rétablir la confiance dans les institutions judiciaires et de sécurité est une condition préalable pour parvenir à une réconciliation nationale et à une paix durable.
Il est néanmoins difficile d’y parvenir sans aborder les questions de la responsabilité et de l’impunité, a poursuivi le représentant, pour qui le Conseil de sécurité a un rôle significatif à jouer à cet égard. En particulier, une réponse prévisible et cohérente du Conseil en cas de crimes atroces pourrait contribuer de manière significative au succès des processus de consolidation de la paix au niveau national, a-t-il estimé, en illustrant son argumentation par le cas de son pays. Il a ainsi appelé que plus de 27 mois se sont écoulés depuis le coup d’État militaire illégal de février 2021 et que, pendant cette période, le Conseil de sécurité avait publié 7 déclarations à la presse et une déclaration présidentielle, et adopté une toute première résolution dans laquelle il exprime ses préoccupations et ses condamnations répétées des violences contre la population civile et à la mise en œuvre rapide et complète du consensus en cinq points de l’ASEAN. Pourtant, s’est-il indigné, tous les appels du Conseil de sécurité ont été ignorés par la junte militaire. Le représentant a donc demandé ce que le peuple du Myanmar pouvait attendre du Conseil de sécurité. Tout en disant comprendre qu’il puisse y avoir des divergences d’approches au sein du Conseil face à un conflit particulier, il a estimé que le Conseil devait dénoncer sans équivoque les meurtres délibérés de civils, en particulier lorsqu’ils sont étayés par des preuves, et prendre des mesures pour que les auteurs de ces meurtres répondent de leurs actes et pour empêcher que d’autres personnes ne perdent la vie.
Créer la confiance implique montrer l’exemple, a déclaré M. YOUSSEF HITTI (Liban) en appelant le Conseil de sécurité à se montrer cohérent et juste dans le traitement de toutes les violations du droit international ainsi que dans l’application de toutes les résolutions qu’elle adopte. Renforcer la confiance implique aussi une réforme du Conseil qui doit être plus représentatif et plus inclusif. Trop souvent et trop longtemps, a poursuivi le représentant, la logique des soins palliatifs a prévalu dans le traitement des crises et des conflits. Pour dépasser cette logique, il a préconisé la mobilisation d’une variété d’acteurs pour bâtir la paix, à savoir les acteurs locaux, les jeunes, les femmes et la société civile.
Il a aussi préconisé des échanges plus réguliers entre le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix et appelé les Nations Unies à soutenir les efforts nationaux, avec des ressources financières adéquates, dont celles du Fonds pour la consolidation de la paix dont la prévisibilité et la pérennité doivent être garanties. Le représentant a aussi attiré l’attention sur les dernières recommandations du Conseil consultatif de haut niveau sur un multilatéralisme efficace. S’attardant sur son pays, il a reconnu que le lien de confiance entre le peuple et ceux qui sont censés répondre à ses attentions, ne pourra être instauré ou restauré sans garantir un état de droit, avec des institutions nationales robustes et un respect des droits humains. L’état de droit est le ciment de la stabilité, du développement et d’une paix durable.
Mme AGNES MARY CHIMBIRI MOLANDE (Malawi) a réaffirmé l’attachement de son pays à un ordre mondial fondé sur des règles, insistant sur la transparence et la confiance dans les efforts de paix. Gardons-nous, s’est-elle expliquée, d’un ordre de dominants et de dominés. La réalisation d’une paix durable dépend d’un fonctionnement harmonieux et efficace du Conseil de sécurité dont le poids et l’influence doivent être exploités par tous ses membres pour faire respecter un ordre international fondé sur des règles. Pleinement conscient du multiplicateur de risques que sont les changements climatiques, la déléguée a rappelé l’horrible cyclone qui vient de dévaster son pays. Avec les milliers de déplacés qu’il a causés, c’est l’harmonie communautaire et la paix mêmes qui sont en jeu. La situation des déplacés comme celle des migrants nécessitent des processus transparents de consolidation de la paix. La représentante a conclu, en appelant les Nations Unies à mettre en place des mécanismes de responsabilité pour une bonne utilisation des nouvelles technologies.
M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a jugé nécessaire de recourir à la coopération multilatérale pour régler les conflits de manière pacifique et lutter efficacement contre les conflits et les discours de haine. Selon sa délégation, le respect des principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies doit guider les processus de paix, en particulier pour le règlement par la voie diplomatique des différends avant qu’ils ne s’enveniment. L’ONU et son Conseil de sécurité constituent les principaux moyens de promouvoir la coexistence pacifique, la solidarité, la stabilité et la protection des droits humains, a ajouté le délégué, pour qui toute approche inclusive doit être fondée sur le rôle accru des organisations régionales pour éviter l’escalade des tensions. Enfin, il a appuyé le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, appelant les États Membres à « être à l’unisson au service de l’humanité ».
M. EVANGELOS SEKERIS (Grèce) s’est attardé sur trois points, à savoir les cadres normatifs, l’inclusion et la confiance. S’agissant du premier, il a insisté sur la Charte des Nations Unies et appelé à un engagement renouvelé à ses principes de base. Dans ce cadre, il a parlé de la sécurité maritime qui exige une approche intégrée, fondée sur la Convention sur le droit de la mer. Poursuivant sur l’inclusion, il a jugé essentiel de tirer parti du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, et en cette Journée mondiale de la liberté de la presse, le représentant a souligné le rôle crucial des médias au moment où l’on voit une désinformation alarmante, la polarisation des discours et des attaques féroces contre les faits, conduisant à l’érosion de la confiance et ouvrant la voie à une confusion qui alimente les crises. Coprésidente avec la France et la Lituanie, du Groupes des Amis de la protection des journalistes, la Grèce, a promis le représentant, est dévouée aux principes d’une presse libre, indépendante et plurielle.
M. VADIM GUSMAN (Azerbaïdjan) a souhaité que les discussions informelles sur la proposition du Secrétaire général concernant un Nouvel Agenda pour la paix permettent d’aborder toutes les menaces et de réfléchir à l’engagement collectif envers la Charte des Nations Unies et le multilatéralisme. À cet égard, il a noté que la sélectivité, le « deux poids, deux mesures » et le non-respect persistant des obligations internationales qui en résulte, ainsi que l’insuffisance des mécanismes internationaux de sécurité, continuent d’être parmi les principaux obstacles à la lutte contre les menaces actuelles et émergentes et à la promotion plus efficace de la confiance et de la consolidation de la paix. S’agissant des cadres normatifs internationaux, le représentant a jugé essentiel de rejeter les interprétations erronées, de souligner qu’il n’y a pas de conflit entre les normes et les principes communément admis et de réaffirmer le devoir de mettre en œuvre les obligations internationales de bonne foi. Soulignant que la pierre angulaire de tous ces efforts est et doit rester l’État, il a insisté sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale, essentiel à tout progrès dans la prévention des conflits, le rétablissement et le maintien de la paix et l’établissement de liens pacifiques mutuellement bénéfiques entre les nations.
Pour le délégué, la responsabilité est un outil préventif important et un élément essentiel à plus long terme. En effet, la justice contribue à la consolidation de la paix, à une paix durable et à un ordre international pacifique, a-t-il affirmé, plaidant pour que l’ONU continue de mobiliser le monde contre le racisme, les discours de haine, la désinformation et l’incitation à la violence et à l’extrémisme. Le dialogue interculturel et interreligieux aux niveaux national et international est, selon lui, une voie à suivre dans le cadre des objectifs plus larges de consolidation de la paix, de maintien de la paix et de réconciliation. Saluant à ce sujet le rôle joué par l’Alliance des civilisations, il a appelé de ses vœux un renforcement de la solidarité mondiale. À ses yeux, fournir un appui aux États touchés par un conflit et engagés dans la consolidation de la paix, la reconstruction et le relèvement postconflit doit rester un engagement essentiel de l’ensemble du système des Nations Unies. Un tel soutien est essentiel pour l’Azerbaïdjan et pour de nombreux États dans le monde qui surmontent les conséquences de guerres dévastatrices, d’agressions, d’occupations et de nettoyages ethniques, a conclu le représentant.
Mme SOPHEA EAT (Cambodge) a constaté que les États Membres ont des interprétations différentes des principes qui soutiennent la paix et la coexistence pacifique. La fragilité actuelle de la paix dans le monde montre également qu’il existe un énorme manque de confiance et que l’esprit de solidarité internationale est en train de s’éroder, a-t-il déploré. Il a toutefois salué la tenue de ce débat public comme un signe de foi dans le multilatéralisme, « meilleure ligne de défense » des petites nations comme le Cambodge. Il a appelé à une prise en compte équitable des préoccupations de tous les États Membres et souligné que son pays est un bon exemple de ce que la confiance et la méfiance peuvent faire à une nation. Il a conclu en exprimant son soutien au Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général.
Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF(Argentine) a notamment mis l’accent sur le fait que l’inclusion est un aspect essentiel de l’instauration d’une paix durable. Les processus et efforts de prévention et de règlement des conflits et de consolidation de la paix doivent ainsi concerner tous les secteurs de la société, a-t-elle dit, mettant l’accent sur la part des femmes, qui doivent jouer un rôle actif à toutes les étapes d’un processus de paix. La représentante a souligné que l’autonomisation des femmes et l’égalité des sexes sont associées à la paix et à la stabilité surtout lorsque les femmes participent aux décisions qui engagent le devenir socioéconomique et culturel de leurs communautés. Au contraire, l’absence d’inclusion menace les processus de paix et de réconciliation ainsi que la stabilité de l’État lui-même, a-t-elle averti, répétant que la participation de tous les citoyens à la construction de la paix contribue de manière effective à la réalisation des accords inclusifs et à l’établissement d’une paix et une stabilité durables.
Mme ARLENE BETH TICKNER (Colombie) a estimé que l’inclusion constitue l’axe transversal du lien indissoluble entre développement et paix. Selon elle, il est indispensable d’écouter les voix de la société dans son ensemble, ce qui signifie que les politiques nationales ne doivent être imposées depuis les capitales, mais être construites à partir des régions. Cette participation élargie non seulement légitime les initiatives visant à renforcer l’état de droit, mais garantit également leur viabilité, a-t-elle estimé. Les voix des femmes, des jeunes, des personnes LGBTIQ+, des peuples autochtones et des populations d’origine africaine sont essentielles dans tout effort entrepris par l’ONU, a-t-elle ajouté. Par ailleurs, a annoncé la représentante, la Colombie est en train d’élaborer son premier plan d’action national pour la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité sur les femmes et la paix et la sécurité, sous la forme d’un document concerté impliquant non seulement les institutions publiques, mais aussi la société civile, le milieu universitaire et les femmes elles-mêmes. Enfin, comme l’a démontré le cas colombien, il est essentiel d’avoir le soutien politique, technique et financier de la communauté internationale et des banques régionales afin de financer des projets qui contribuent au développement durable, a relevé la déléguée.
M. ARAM HAKOBYAN (Arménie) a considéré que le respect de l’état de droit dans le cadre du maintien de la paix et de la sécurité internationales est essentiel à la réalisation du droit à la vérité, à la justice, à la réparation et aux garanties de non-répétition des abus de confiance. Pour instaurer la confiance, les accords et engagements internationaux doivent être mis en œuvre de bonne foi et dans leur intégralité. Les antécédents bien établis de l’Azerbaïdjan en matière de non-respect des traités internationaux, des accords et des régimes de contrôle des armements, ainsi que son refus de mettre en œuvre les mesures de confiance et de sécurité ont démontré une intention claire de déclencher de nouvelles hostilités dans la région, comme en atteste l’agression à grande échelle contre le Haut-Karabakh en 2020.
Malheureusement, a poursuivi le représentant, l’absence d’une réaction adéquate de la part des structures internationales a permis à l’Azerbaïdjan de continuer son agression. Cela fait presque cinq mois que ce pays a imposé un blocus au corridor de Latchine, le seul à relier le Haut-Karabakh à l’Arménie et au monde extérieur. En outre, le 23 avril, l’Azerbaïdjan y a installé un point de contrôle, violant ainsi la Déclaration trilatérale sur le cessez-le-feu, du 9 novembre 2020, méprisant les mesures provisoires indiquées par la CIJ. Les violations constantes du droit international et des engagements antérieurs, le bellicisme et le comportement agressif de ce pays ne devraient être tolérés ni par ce Conseil ni par la communauté internationale, a martelé le représentant.
Reprenant la parole, M. GUSMAN (Azerbaïdjan) a fait part de la détermination de son pays à reconstruire et réintégrer les zones touchées par le conflit, à assurer le retour des déplacés et des réfugiés et à promouvoir la normalisation pour le bien-être et la stabilité de tous les peuples de la région. Il a indiqué que son gouvernement participe de bonne foi aux pourparlers qui se tiennent actuellement à Washington. Dans ce contexte, le délégué a rejeté toute tentative de l’Arménie d’imposer des discours erronés et de favoriser l’animosité.