9302e séance – matin
CS/15253

Conseil de sécurité: au Mali, la mission de l’ONU est confrontée à des difficultés pour s’acquitter de son mandat, s’alarme le Représentant spécial

Alors que les situations sécuritaire et humanitaire au Mali ne cessent de se détériorer, en particulier dans les régions de Ménaka et du Centre, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) se heurte à des difficultés pour s’acquitter de son mandat, a averti, ce matin au Conseil de sécurité, le Représentant spécial du Secrétaire général dans ce pays, qui s’est dit « bouleversé » par la détresse des personnes déplacées qu’il a rencontrées il y a trois semaines.

Venu présenter le dernier rapport en date du Secrétaire général sur la situation dans ce pays, M. El-Ghassim Wane s’est en effet rendu à Ménaka, capitale de la région orientale du même nom et épicentre des affrontements que se livrent les organisations terroristes État islamique du Grand Sahara (EIGS) et Jama’a Nusrat ul-Islam wa al-Muslimin (JNIM) pour le contrôle des voies d’approvisionnement.  Sur place, il a pu mesurer l’impact « dévastateur » des déplacements de populations qui l’ont supplié de leur donner de l’eau potable, une expérience qu’il a qualifiée de « bouleversante ». 

Avec plus de 30 000 personnes déplacées vers Ménaka depuis le début 2022 et environ 2 400 autres réfugiées au nord du camp de la MINUSMA à Ménaka, la situation est « catastrophique », selon le haut fonctionnaire.  Dans cet environnement de plus en plus complexe, la MINUSMA, « avec ses capacités limitées », continue de contribuer à la protection des civils, en coordination avec les Forces de défense et de sécurité maliennes, dans un rayon de 15 kilomètres en dehors de Ménaka.  À leurs patrouilles de nuit et de jour, s’ajoutent des activités de réconciliation et de cohésion sociale visant à désamorcer des tensions intercommunautaires croissantes dans la région, a relevé M. Wane.

Outre Ménaka, les régions du Centre et de Gao demeurent des zones à risque, avec plus de 61 000 personnes déplacées depuis l’année dernière, là aussi en raison des violences entre l’EIGS et JNIM, de même qu’entre l’EIGS et des mouvements signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, sans compter les affrontements armés en cours dans les régions de Mopti et de Ségou.  Sous pression des Forces de défense et de sécurité maliennes, les groupes extrémistes y ont accru leur recours à des engins explosifs improvisés, tout en menant des attaques surprises contre plusieurs postes de police le long des principaux axes d’approvisionnement.

Il importe cependant, a observé M. Wane, que les autorités maliennes conduisent leurs opérations militaires dans le respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme.  Le Représentant spécial a été suivi sur ce point par plusieurs membres du Conseil, notamment la France, la Suisse, le Royaume-Uni ou encore l’Albanie, cette dernière corrélant la hausse des violations perpétrées par les forces maliennes à leur association avec le groupe Wagner. 

Le Mali a au contraire estimé que les violations étaient essentiellement le fait des groupes armés terroristes.  Opposée comme la Chine à toute « instrumentalisation » des droits humains « à des fins politiques ou de déstabilisation », la délégation a rejeté les accusations de la France dans le massacre de Moura, commis il y a un an.  Elle a rétorqué que la Commission d’enquête internationale pour le Mali avait imputé aux forces armées françaises des exactions, notamment à Bounty, où un mariage se serait transformé « en tragédie nationale », ce qu’a contesté la France.

La Fédération de Russie a fait valoir, pour sa part, que l’aide militaire bilatérale qu’elle fournit à Bamako répond à une demande des autorités maliennes, qui ont pu ainsi renforcer leurs capacités de lutte antiterroriste.  Les objections « néocoloniales » du camp occidental n’ont rien à voir avec le bien-être des Maliens eux-mêmes, a tranché la délégation russe, pour qui il est notoire que la déstabilisation du Sahel et du Mali soit le résultat des agissements « irresponsables » des pays occidentaux en Libye.

Afin de garantir la sécurité de ses convois, la Mission utilise des hélicoptères et des drones le long des routes de réapprovisionnement.  Or, environ 24,1% des autorisations pour ce type de vols ont été refusées, alors qu’elles figurent au nombre des paramètres essentiels à l’exécution du mandat de la MINUSMA: outre la liberté de circulation, « y compris pour les moyens de renseignement, de surveillance et de reconnaissance essentiels à la sûreté et à la sécurité des soldats de la paix », figurent l’avancement de la transition politique et les progrès accomplis dans l’application de l’Accord pour la paix et la réconciliation, marquée au cours de la période à l’examen par une « paralysie persistante ».

« Contrairement à ce qui est véhiculé, il n’existe aucune volonté de restriction des mouvements de la MINUSMA, car les demandes non autorisées ne respectaient pas la procédure convenue » avec le pays hôte, s’est justifiée la délégation malienne, en invitant la Mission à travailler plus étroitement à l’avenir avec les autorités. 

À l’approche de l’expiration du mandat de la MINUSMA, en juin prochain, plusieurs membres du Conseil se sont donc interrogés sur la pertinence de le modifier, compte tenu de ses difficultés à s’en acquitter.  La France et l’Albanie ont proposé de s’appuyer à cette fin sur l’examen interne de la Mission mené par le Secrétaire général, dont les recommandations, « si elles devaient être endossées » par le Conseil, permettraient à la MINUSMA de mieux répondre aux attentes de son premier « client », à savoir le pays hôte.

Les A3, formés du Gabon, du Ghana et du Mozambique, ont plaidé pour une augmentation des effectifs, un renforcement des stratégies de lutte antiterroriste, la mise à disposition de moyens de transport aérien et la levée des restrictions terrestres et aériennes.  Pour le Royaume-Uni, le Conseil sera confronté en juin à des « décisions difficiles »: en l’absence de « signes visibles » de la part des autorités maliennes d’un engagement à respecter les paramètres fixés par le Secrétaire général, nous devons être prêts à adapter et à recentrer le mandat de la Mission, en examinant tout élément comportant des risques pour la crédibilité et la réputation de l’ONU, a souligné la délégation britannique.

LA SITUATION AU MALI (S/2023/236)

Déclaration liminaire

Dans une déclaration liminaire, le Président du Conseil de sécurité , M. VASSILY A. NEBENZIA, a rappelé que, ce 12 avril, la Fédération de Russie célèbre la journée du cosmonaute, commémoration du premier vol spatial effectué en 1961 par le cosmonaute soviétique Yuri Gagarin.  « Nous soutenons le fait que l’espace extra-atmosphérique reste un espace de coopération et non de confrontation, un espace qui ne soit pas consacré à la course aux armement mais à la conquête pacifique », a ajouté M. Nebenzia. 

Déclarations

M. EL-GHASSIM WANE, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), a déclaré que, depuis le début de l’année, la situation dans la région de Ménaka s’est encore détériorée, avec la recrudescence des affrontements entre l’État islamique du Grand Sahara (EIGS) et Jama’a Nusrat ul-Islam wa al-Muslimin (JNIM), qui se disputent le contrôle des voies d’approvisionnement.  Les Forces de défense et de sécurité maliennes conduisent des opérations contre l’EIGS autour de la ville même de Ménaka et dans les zones plus au sud, tout en escortant des convois au départ et à l’arrivée de cette localité.  Le 24 mars, les forces spéciales du Niger ont également annoncé des opérations transfrontalières visant à poursuivre des éléments de l’EIGS à Hamarat, dans la région de Ménaka, a précisé le haut fonctionnaire.  Reste que la situation sécuritaire et humanitaire demeure « catastrophique », a-t-il reconnu, faisant état de plus de 30 000 personnes déplacées vers Ménaka depuis le début 2022.  Environ 2 400 déplacés ont aussi trouvé refuge dans une zone située à moins de 2 kilomètres au nord du camp de la MINUSMA à Ménaka, a ajouté M. Wane.  « J’ai vu de mes yeux l’impact dévastateur de ces développements lorsque j’ai visité Ménaka il y a trois semaines.  L’afflux de déplacés internes exerce une pression supplémentaire sur la réponse humanitaire », a relaté le Représentant spécial, en confiant que des déplacés l’avaient supplié d’avoir de l’eau potable, une expérience qu’il a qualifiée de « bouleversante ». 

Dans cet environnement de plus en plus complexe, la MINUSMA, « avec ses capacités limitées », continue de contribuer à la protection des civils, en coordination avec les Forces de défense et de sécurité maliennes, et ce jusqu’à 15 kilomètres en dehors de Ménaka.  À leurs patrouilles de nuit et de jour s’ajoutent des activités de réconciliation et de cohésion sociale visant à désamorcer les tensions intercommunautaires croissantes dans la région, a poursuivi M. Wane.  Un plan de réponse humanitaire rapide pour Ménaka a été mis au point en juillet 2022, ciblant 78 000 personnes, pour un total de 38,8 millions de dollars, pour l’instant financé à hauteur de 18 millions.  Mais à l’heure actuelle, seulement 8% des 751 millions de dollars demandés par le Plan de réponse humanitaire 2023 ont été mobilisés en faveur du Mali.  Et outre Ménaka, Gao et le Centre demeurent des zones à risque: plus de 61 000 personnes ont ainsi été déplacées depuis l’année dernière dans la région de Gao.  Au cours des trois derniers mois, les organisations terroristes EIGS et JNIM se sont affrontées près de Bara, N’tilit, Anchawadi et Tessit, des combats ayant également opposé les mouvements signataires à l’EIGS.  Le Représentant spécial a également signalé des incidents sécuritaires dans le centre du Mali, liés aux conflits armés en cours dans les régions de Mopti et de Ségou.  Sous pression des Forces de défense et de sécurité maliennes, les groupes extrémistes y ont accru leur recours à des engins explosifs improvisés, tout en menant des attaques surprises contre plusieurs postes de police le long des principaux axes d’approvisionnement. 

Dans ce contexte à hauts risques, l’adoption par le Gouvernement malien de la stratégie politique pour la stabilisation du Centre, en septembre dernier, marque une étape importante.  Au cours de la période à l’examen, la MINUSMA a quant à elle continué d’accorder une attention particulière à la situation des droits humains au Mali, la majorité des violations ayant été commises par les groupes extrémistes.  Il importe cependant que les autorités maliennes mettent tout en œuvre pour que leurs opérations militaires soient menées dans le plein respect du droit international humanitaire et des droits de l’homme, que les violations et abus fassent l’objet d’enquêtes transparentes et rapides, et que leurs auteurs soient traduits en justice.  Compte tenu des défis sécuritaires dont le Représentant spécial a fait état, la nécessité d’une coordination plus étroite entre les Forces de défense et de sécurité maliennes et la MINUSMA s’impose, pour une utilisation plus judicieuse des ressources existantes et une plus grande efficacité sur le terrain.  Dès lors, la liberté de mouvement est primordiale, alors que la Mission continue de se heurter à des difficultés à cet égard, a ajouté le haut fonctionnaire. 

Sur le plan politique, après un long processus de consultations avec les parties, la médiation internationale a soumis la semaine dernière des propositions visant à faciliter la reprise des activités des mécanismes de surveillance et à accélérer la mise en œuvre des dispositions en suspens de l’accord de paix.  Le Représentant spécial a émis l’espoir que les parties examineront ces propositions « avec l’esprit de compromis » nécessaire et s’abstiendront de toute action ou déclaration susceptible d’aggraver les tensions ou de saper les efforts en cours.  « Plus que jamais, le moment est venu pour les parties de répondre à l’aspiration profonde du peuple malien à la paix et de dépasser les intérêts particuliers », a-t-il insisté.  Par ailleurs, alors que les autorités ont annoncé le report du référendum constitutionnel, qui devait initialement avoir lieu le 19 mars, M. Wane a souligné qu’aucun effort ne devait être épargné pour assurer le retour à la règle constitutionnelle avant la date limite convenue de mars 2024. 

Après avoir salué les progrès accomplis par le Mali ces dernières années, il s’est dit convaincu que l’ONU reste le meilleur cadre pour accompagner la stabilisation durable du pays et de l’ensemble de la région du Sahel, en partenariat étroit avec l’Union africaine et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).  « Nous disposons de tous les outils nécessaires et notre action est fondée sur des principes qui lient l’ensemble des membres de l’Organisation, dont le Mali fait partie.  Il s’agit d’une position unique qui devrait continuer à être mise à profit, étant donné l’importance de sa stabilité pour la région et au-delà », a conclu le Représentant spécial.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a appelé à la pleine mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, constatant qu’il est aujourd’hui « plus menacé que jamais ».  La tentation de l’escalade, sur le terrain comme sur les réseaux sociaux, est réelle, a dénoncé le représentant, pour qui une reprise des hostilités serait désastreuse et ferait le jeu des terroristes.  Le Conseil de sécurité devrait appeler toutes les parties à la responsabilité et à soutenir les efforts de médiation de l’Algérie et de la MINUSMA, a-t-il estimé.  S’agissant de la transition politique, il a souhaité qu’elle se poursuive dans les délais prévus.  Le Conseil doit être attentif à l’appréciation de l’Union africaine et de la CEDEAO, qui assurent le suivi de ce processus, a souligné le délégué, en rappelant le report du référendum constitutionnel initialement prévu le 19 mars.  Il est crucial, selon lui, que tous les acteurs politiques et de la société civile puissent s’exprimer librement et participer à la campagne électorale.  Quant à la MINUSMA, il a rappelé que cette mission représente un effort considérable de la communauté internationale, avec le concours de dizaines de pays contributeurs de troupes et un budget annuel de plus d’un milliard de dollars.  « Bien sûr, cet outil n’est pas parfait », a-t-il concédé, avant d’appeler à être plus exigeant envers la MINUSMA, dont le mandat reste de protéger les civils, d’appuyer l’accord de paix et de garantir l’accès humanitaire aux milliers de déplacés.  Il a d’autre part jugé anormal que le Conseil ne soit toujours pas informé sur le massacre de Moura, commis il y a un an « avec l’implication du groupe Wagner ».  Les responsables doivent être poursuivis, a-t-il exigé.

Se disant conscient du fait que la MINUSMA « fait ce qu’elle peut dans un environnement difficile », le représentant s’est dit extrêmement préoccupé par les restrictions à ses activités, rappelant que sans drones, la Mission ne peut mener d’opérations.  De plus, les annonces de retrait de nombreux contingents, qui représentent 20% de la force, doivent nous alerter sur la gravité de la situation, a poursuivi le délégué.  La France appelle le Mali et tous les membres du Conseil à considérer avec attention la revue stratégique du Secrétaire général d’ici au renouvellement du mandat, a souligné le délégué, selon lequel la priorité devrait être de prendre les décisions nécessaires pour que la MINUSMA puisse remplir sa mission.  À ses yeux, cela passe par quatre paramètres, à savoir la poursuite de la transition politique, la mise en œuvre de l’accord de paix, la liberté de mouvement de la Mission et le respect de l’intégralité de son mandat, y compris en matière de droits de l’homme. 

Mme AMEIRAH OBAID MOHAMED OBAID ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a formé le vœu que le Conseil fasse preuve d’unité et décide de renouveler le mandat de la MINUSMA dans l’intérêt du peuple malien.  Le dialogue aux niveaux national et régional, y compris avec la CEDEAO et l’Union africaine, reste un pilier indispensable pour maintenir et renforcer les acquis du processus politique, a-t-elle estimé.  Selon la représentante, ce dialogue nécessite toutefois un soutien continu de la part de la communauté internationale, de même que l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, qui constitue le cadre pour l’instauration d’une sécurité et d’une stabilité durables.  Sur cette base, elle a dit espérer que les efforts de la médiation internationale aideront les signataires à communiquer et à surmonter les obstacles empêchant la mise en œuvre de l’Accord.  Pour relever les défis sécuritaires, la déléguée a recommandé des approches correspondant à leur nature complexe et transfrontalière.  L’exemple le plus frappant de cette complexité est celui des menaces posées par les groupes terroristes, tels que Daech et les groupes affiliés à Al-Qaida, qui, par leur propagation de l’extrémisme et de la violence, continuent de menacer la sécurité et la stabilité du Mali et de la région, a-t-elle relevé.  Pour faire face à ces graves menaces, la coopération régionale et sous-régionale n’en est que plus essentielle, a conclu la représentante. 

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a qualifié cette année de cruciale pour le Mali dans la mesure où le pays s’apprête à revenir à l’ordre constitutionnel d’ici à mars 2024.  Elle s’est cependant déclarée préoccupée par la crise multidimensionnelle à laquelle est confronté le Mali et par les difficultés que rencontre le processus de transition.  Saluant à cet égard l’avancement de la révision constitutionnelle, elle a jugé essentiel que ce projet soit adopté avec un large consensus.  Après avoir encouragé les autorités à faciliter un retour à l’ordre constitutionnel dans les délais convenus avec la CEDEAO, elle a souligné l’importance d’organiser un processus électoral transparent, inclusif et crédible.  Pour la représentante, la réforme constitutionnelle ne doit pas être une raison pour retarder les élections et toutes les parties doivent faire preuve d’engagement dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger. 

La déléguée s’est ensuite alarmée de la situation sécuritaire au Mali, constatant que les régions de Gao et Ménaka sont devenues l’épicentre des activités de groupes jihadistes violents, qui ont provoqué des déplacements massifs de population et ont fait trois morts et cinq blessé parmi les Casques bleus.  Tout en reconnaissant que les autorités de transition sont confrontées à de grands défis en matière de lutte contre l’insécurité, elle a observé que, depuis que les Forces de défense et de sécurité maliennes ont commencé à mener des opérations militaires avec le groupe Wagner, les violations et exactions ont déplorablement augmenté.  Elle a rappelé que les États sont responsables de la conduite des opérations militaires dans le respect des droits de l’homme et dans le cadre du droit international humanitaire.  Dans ce contexte, la représentante a salué les efforts de stabilisation déployés par la MINUSMA, avant de regretter que la Mission soit restreinte dans sa liberté de mouvement, avec environ 300 refus de vol rien que le dernier trimestre, et bloquée dans la mise en œuvre effective de son mandat, en particulier le pilier des droits de l’homme.  À l’approche du renouvellement du mandat de la MINUSMA en juin, elle a souhaité que l’examen de la Mission mené par le Secrétaire général permette de déterminer une meilleure ligne de conduite, avec l’appui des autorités de transition. 

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana, Mozambique), s’est dit préoccupé par la paralysie du Comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, qui ne s’est pas réuni depuis novembre 2022.  Les A3 demandent instamment la convocation rapide de la septième session de haut niveau du Comité pour examiner les écarts dans la mise en œuvre de l’Accord, encourager la sauvegarde de l’espace civique et faire avancer le processus politique, a-t-il dit.  Prenant acte de la mise en œuvre partielle du programme accéléré de désarmement, de démobilisation et de réinsertion (DDR), du maintien des accords de cessez-le-feu prévus par l’Accord et des progrès accomplis dans la feuille de route pour la transition, le représentant a estimé que ces facteurs doivent être consolidés dans le cadre de la transition politique en vue de la tenue d’élections pacifiques d’ici à mars 2024.  Malgré les efforts déployés par les autorités pour rétablir l’ordre constitutionnel, il a exprimé son inquiétude face aux divergences non résolues sur le projet de constitution et le report du référendum.  La transition sert de « tremplin » à la réalisation effective de l’accord de paix ainsi qu’au respect des obligations du pays au titre du protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance, a rappelé le délégué. 

Sur le plan de la sécurité, le représentant s’est alarmé de la persistance d’attaques terroristes et de l’utilisation continue d’engins explosifs improvisés.  Condamnant ces attaques, il a averti que les lacunes en matière de sécurité dans certaines parties du Mali, en particulier dans le nord et le centre, risquent d’encourager les groupes terroristes à faire davantage de ravages.  Il a saisi cette occasion pour appeler à un engagement fort dans la mise en œuvre de la stratégie de stabilisation des régions du Centre et à un renforcement de la présence de l’État.  Par ailleurs, dans l’attente des résultats d’une étude relative aux capacité militaires et policières menée sur de la base de l’examen stratégique de la MINUSMA, il a jugé urgent de répondre aux contraintes organisationnelles de la Mission.  À ce titre, il a plaidé pour une augmentation des effectifs, un renforcement des stratégies de lutte contre le terrorisme, la mise à disposition de moyens de transport aérien et la levée des restrictions terrestres et aériennes.  Il a d’autre part estimé que la déstabilisation du Mali et de la région du Sahel est liée à celle de la Libye.  Soulignant le rôle complémentaire de la Force multinationale mixte, de l’Initiative d’Accra et de la Force conjointe du G5 Sahel, le délégué a espéré que le prochain rapport du Groupe de haut niveau sur le Sahel permettra d’intégrer les avantages de ces dispositifs de sécurité régionaux de manière à promouvoir la stabilité du Mali.  Enfin, face à la situation humanitaire désastreuse, il a exhorté les partenaires donateurs à augmenter leur soutien financier pour parvenir à l’objectif de 751,4 millions de dollars requis pour lutter contre l’insécurité au Mali et dans la région du Sahel. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a insisté sur quatre points, à commencer par la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  Observant que la sécurité et la stabilité du Mali sont indiscutablement liées à la stabilité de la région du Sahel et de toute la région de l’Afrique du Nord-Ouest, il a appelé à la reprise, dans les plus brefs délais, des réunions des organes de mise en œuvre de l’Accord.  Le représentant a ensuite estimé que la capacité de la MINUSMA à remplir son mandat requiert qu’il lui soit laissé une liberté de mouvement, conformément aux termes de l’Accord.  Les autorisations de vol, de renseignement et de reconnaissance sont indispensables à la protection efficace des civils et à la sécurité du personnel de la Mission dans un environnement de menaces asymétriques, a-t-il souligné.  Il a par ailleurs exhorté le Gouvernement malien à traduire en justice les auteurs de violations graves et d’activités criminelles, d’où qu’ils viennent.  Selon lui, le mandat de la Mission pour les activités d’enquête est un outil indispensable à cet égard.  Le délégué a enfin jugé essentiel que le processus de transition, y compris l’adoption du projet de constitution, soit mené à bien dans les délais impartis.  Sur ce point, il a encouragé le soutien continu de l’Union africaine, de la CEDEAO et de la MINUSMA, ajoutant que le rôle de « catalyseur » de la Mission nécessite des ressources suffisantes pour mener à bien le processus de retour à l’ordre constitutionnel. 

M. ZHANG JUN (Chine) a estimé que le Mali se trouve à la croisée des chemins, qu’il s’agisse de la mise en œuvre de l’accord de paix ou des préparatifs des élections, dans un contexte sécuritaire marqué par la recrudescence des incidents sécuritaires dans plusieurs régions.  La MINUSMA, a-t-il dit, doit pouvoir s’acquitter de son mandat et prêter davantage de soutien au processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) et aux opérations des Forces de défense et de sécurité maliennes.  Le délégué a cependant rejeté le recours à la notion de droits humains pour interférer dans la conduite des opérations antiterroristes, considérant que la sécurisation des zones de combats est prioritaire.  Il a déclaré qu’il encourageait la transition politique au Mali, et que la communauté internationale devait aider ce pays à surmonter tout obstacle qui se dresserait dans les préparatifs des élections ou dans tout autre domaine.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a condamné les récentes violences et attaques perpétrées contre des Casques bleus, des membres des forces armées maliennes et des civils.  S’agissant du processus de transition politique, elle a rappelé que le prochain jalon est la tenue d’élections crédibles et transparentes dans les délais impartis, avant de saluer la mise en place des 15 membres de l’Autorité indépendante de gestion des élections, dont quatre femmes.  Les femmes doivent participer en grand nombre aux élections, tant comme candidates que comme électrices, a insisté la représentante.  Par ailleurs, si l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali doit rester le cadre central pour éviter une reprise des hostilités entre les parties signataires, sa mise en œuvre semble actuellement dans l’impasse, s’est inquiétée la déléguée, qui a encouragé le Gouvernement et les signataires à reprendre le dialogue à travers les mécanismes établis.  Elle a salué les efforts entrepris en ce sens par la médiation internationale menée par l’Algérie. 

La représentante a ensuite jugé que, pour renforcer la sécurité au Mali, le lancement de la stratégie de stabilisation des régions du Centre et d’un plan d’action pour 2022-2024 est une étape importante.  Nous soutenons l’approche consolidée qui vise à rétablir la paix, la sécurité et la cohésion sociale, ainsi qu’à améliorer la gouvernance et à renforcer la justice, a-t-elle expliqué, avant d’appeler à mettre en œuvre cette stratégie sans délai et en étroite collaboration avec la MINUSMA.  La déléguée a également appelé à respecter la liberté de mouvement de la MINUSMA, ainsi que le droit international humanitaire et les droits humains.  S’inquiétant à cet égard de l’augmentation du nombre de violations graves à l’encontre d’enfants, elle a exhorté toutes les parties au conflit au Mali à y mettre immédiatement fin et à libérer tous les enfants dans leurs rangs.  La Suisse attend en outre des autorités maliennes qu’elles poursuivent les auteurs de ces actes afin de lutter contre l’impunité, a conclu la représentante, selon laquelle aucune paix n’est possible sans le respect de ces droits fondamentaux et sans responsabilité.

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a relevé trois angles dans le débat sur le renouvellement du mandat de la MINUSMA: la nécessité de réaliser des progrès politiques vers une transition démocratique, la nécessité pour les parties d’aborder les situations sécuritaire et humanitaire, et la nécessité de déployer des efforts collectifs pour garantir que la Mission opère sans entrave.  Dans ce contexte, elle a salué l’évolution politique au Mali, notamment le lancement officiel de la stratégie de stabilisation du centre du Mali, conformément aux priorités de la MINUSMA, qui sera décisif pour rouvrir les écoles et permettre l’accès aux services sociaux et aux services de base.  La représentante a aussi salué les consultations en vue de rédiger une nouvelle constitution, en particulier les références prévues aux éléments de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali.  Elle s’est cependant déclarée profondément préoccupée par les graves menaces sécuritaires, liées aux menaces terroristes persistantes dans la région, qui perpétuent le cycle de la violence.  Condamnant toutes les violations commises contre des civils par des groupes armés, des acteurs étatiques et non étatiques, et par des sociétés militaires privées telles que le groupe Wagner, elle a exigé que les responsables de ces actes soient poursuivis et jugés. 

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a estimé que le dernier rapport en date du Secrétaire général indique clairement qu’aucun progrès n’a été réalisé au Mali au cours de la période considérée, la trajectoire s’étant même détériorée à plusieurs égards.  Tout d’abord, les restrictions continuent d’entraver les mouvements terrestres et aériens des Casques bleus, avec près d’un quart des demandes de vol rejetées par les autorités au cours des trois derniers mois.  La représentante s’est ensuite émue de l’expulsion du responsable de la division des droits humains de la MINUSMA, avant de demander instamment la publication du rapport de l’ONU sur le massacre présumé de civils perpétré en mars 2022 à Moura par les forces armées maliennes et le groupe Wagner.  Par ailleurs, elle a exhorté les parties à faire leurs les propositions présentées la semaine dernière par la médiation internationale pour relancer le processus de paix.  Pour le Royaume-Uni, a-t-elle dit, la transition rapide vers un régime constitutionnel d’ici à mars 2024 reste impérative et les réformes électorales et constitutionnelles ne devraient pas y faire obstacle.  En juin prochain, le Conseil sera confronté à des décisions difficiles, a estimé la représentante: en l’absence de signes visibles de la part des autorités maliennes d’un engagement à respecter les paramètres fixés par le Secrétaire général, nous devons être prêts à adapter et à recentrer le mandat de la Mission, en examinant tout élément comportant des risques pour la crédibilité et la réputation de l’ONU, a-t-elle conclu. 

M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a exhorté le Gouvernement de transition du Mali à faire progresser le processus de transition politique et à garantir la liberté de mouvement de la MINUSMA.  Il a reproché aux autorités maliennes d’avoir refusé près de 300 vols de la Mission, en leur rappelant leurs obligations au titre de l’accord sur le statut des forces.  Le représentant s’est également dit préoccupé par la décision des autorités maliennes d’expulser le directeur des droits humains de la Mission, affirmant craindre une politisation de cette question.  En outre, a-t-il aussi regretté, les autorités maliennes n’ont pas accordé de visas aux experts du Groupe des Nations Unies, ce qui impacte le Comité des sanctions.  Quant au massacre de Moura, il a déploré qu’un an après les faits, il n’y ait toujours pas de rapport complet sur cet incident.  Le Conseil de sécurité doit connaître tous les faits pour pouvoir lancer les négociations sur le renouvellement du mandat de la MINUSMA, a insisté le délégué.  Saluant par ailleurs les préparatifs des élections par les autorités de transition, il a soutenu les efforts de la MINUSMA en matière de renforcement des capacités pour que les Maliens puissent voter et que l’ordre constitutionnel soit rétabli.  Appelant à une revitalisation de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, il a encouragé les groupes signataires et les autorités à renouveler leur engagement en faveur de cet accord.  Selon lui, le succès de la MINUSMA dépend de la pleine coopération des autorités maliennes.  Il serait donc « irresponsable » que le Conseil continue de déployer des soldats de la paix dans des conditions où leur mission ne peut réussir, a-t-il insisté, avant d’exhorter le Gouvernement de transition à lever les restrictions imposées à la Mission et à respecter ses engagements politiques. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a estimé que l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, conclu en 2015, est le seul cadre existant pour parvenir à une stabilisation durable de la situation.  Sa mise en œuvre devrait aller de pair avec une transition démocratique, a-t-il souligné, avant de saluer le rôle joué par la médiation internationale, notamment les efforts annoncés vendredi dernier pour relancer la mise en œuvre de l’Accord de paix.  Le représentant a cependant qualifié d’alarmante l’aggravation de la situation sécuritaire, qui désormais concerne également le sud du pays.  Tout en reconnaissant les efforts déployés par les Forces de défense et de sécurité maliennes pour remédier à la situation, le délégué a noté, en écho au Secrétaire général, que les opérations de sécurité doivent s’accompagner d’efforts visant à favoriser la cohésion sociale, à remédier à la fragilité structurelle, à fournir des services de base et à garantir le respect des droits humains et humanitaires.  À cet égard, les rapports faisant état de violations persistantes des droits de l’homme par le personnel de sécurité malien et étranger ont interpellé le représentant, qui a souligné l’importance d’une coopération renforcée entre les autorités maliennes de transition et la MINUSMA, alors que le Conseil doit prochainement discuter du renouvellement de la Mission.

M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) s’est dit conscient que la situation sécuritaire au Mali reste instable et continue de peser lourdement sur la MINUSMA, comme l’illustre la mort de trois Casques bleus près de Songobia, le 21 février dernier.  Cette insécurité entrave la présence de l’autorité de l’État et exige un soutien continu aux efforts des forces armées maliennes dans leur lutte contre le terrorisme, a souligné le représentant.  Il a ensuite constaté avec préoccupation qu’aucune solution pour la reprise des vols de renseignement, de surveillance et de reconnaissance (ISR) sans pilote n’a été trouvée jusqu’à présent, bien que la MINUSMA ait adopté les mesures convenues avec le Gouvernement de transition.  La Mission doit disposer des moyens nécessaires pour soutenir la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, ainsi que pour protéger les civils et soutenir le rétablissement de l’autorité de l’État malien dans tout le pays, a-t-il plaidé.  Bien que positifs, les développements récents dans le processus de transition et les réformes constitutionnelles ne peuvent jeter les bases solides d’une paix durable sans la mise en œuvre de l’Accord, a encore estimé le délégué, avant de saluer le leadership de l’Algérie dans le processus de médiation. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a relevé que les autorités maliennes ont déployé des efforts systématiques pour normaliser la situation, notamment en créant les conditions nécessaires à la tenue d’élections dans les délais convenus.  La feuille de route pour la transition a été mise en œuvre de manière cohérente et des mesures ont été prises pour élaborer une législation électorale et mettre en œuvre des réformes sur la restructuration territoriale, s’est-il félicité, ajoutant qu’un nouveau projet de constitution est en cours de discussion au niveau national.  À cet égard, le report du référendum constitutionnel lui semble objectivement conditionné par la volonté de permettre au plus grand nombre possible de citoyens maliens d’exprimer leur opinion librement et pacifiquement.  Le représentant a également rappelé que les dirigeants maliens se sont engagés à mettre en œuvre l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali issu du processus d’Alger et que, dans le cadre des travaux du Comité de suivi, des mesures sont envisagées pour accélérer le développement des territoires du Nord, ainsi que le retour et l’intégration des anciens combattants dans les forces armées nationales. 

Le processus de négociation n’est pas facile, a concédé le délégué, et il importe selon lui que les signataires de l’accord de paix fassent preuve de flexibilité et de compromis afin de préserver la paix et l’unité du Mali.  Convaincu du fait que la stabilité dans la région du Sahel ne peut être atteinte sans la normalisation de la situation au Mali, il a rappelé que des groupes affiliés à Daech et à Al-Qaida sont toujours actifs sur le territoire malien.  Cependant, malgré des « difficultés objectives », les forces armées maliennes ont démontré qu’elles étaient capables d’obtenir des résultats contre les terroristes, a-t-il affirmé, avant de saluer le lancement de la stratégie nationale de stabilisation des régions du centre du Mali.  Après avoir réitéré le soutien de son pays au travail de la MINUSMA, le représentant a insisté sur l’importance d’une coordination étroite avec l’État hôte et le respect de la souveraineté du Mali.  Il a aussi souhaité que la MINUSMA se concentre sur les éléments clefs de son mandat, avant de regretter qu’un certain nombre de pays contributeurs de troupes aient décidé de retirer ou de suspendre leur participation à la Mission.  Il a par ailleurs estimé que toute option de reformatage des modalités de la MINUSMA doit répondre aux principaux défis auxquels le pays est confronté, être convenue à l’avance avec Bamako et se fonder sur les vues du pays d’accueil.

Le délégué a ensuite expliqué que la Fédération de Russie fournit une assistance complète à l’armée malienne, notamment en termes d’amélioration de son efficacité au combat, de formation et de coopération bilatérale, laquelle se fait « à la demande de Bamako et dans le strict respect des règles applicables du droit international ».  Les forces armées maliennes ont ainsi pu augmenter de manière significative leur capacité de lutte contre le terrorisme et la convertir en résultats tangibles sur le terrain, a-t-il dit, non sans réfuter les « arguments négatifs » des pays occidentaux.  Les griefs de ces pays « n’ont rien à voir avec le souci du bien-être du Mali, mais soulignent, au contraire, qu’ils se moquent de l’opinion des Maliens eux-mêmes et qu’ils ne s’en sont jamais préoccupés », a-t-il assené.  Tout le monde sait que la déstabilisation du Sahel et du Mali est « le résultat des actions irresponsables des pays occidentaux en Libye », a renchéri le représentant.  Il a par conséquent appelé ces derniers à « reconnaître leurs erreurs”, à « abandonner leurs visées néocoloniales » et à laisser les Maliens et les citoyens des autres pays de la région prendre le « gouvernail » et résoudre leurs problèmes avec l’aide des partenaires qu’ils ont eux-mêmes choisis.  Assurant que son pays n’a reçu aucune plainte de la part de ses partenaires africains quant à l’engagement russe dans la région, il a appelé les partenaires internationaux de Bamako à s’abstenir de politiser les questions de soutien des donateurs, qui ont entraîné la suspension du financement au Mali.  La Fédération de Russie, a-t-il conclu, continuera à contribuer à la normalisation de la situation au Mali dans le cadre du Conseil de sécurité et à fournir un soutien global à Bamako sur une base bilatérale. 

M. ISSA KONFOUROU (Mali) a tout d’abord indiqué que les Forces de défense et de sécurité maliennes poursuivent leurs offensives contre les organisations terroristes et que des résultats « très encourageants » ont été obtenus.  Plusieurs dizaines de terroristes ont été « neutralisés » et leurs sanctuaires détruits, de même que de grandes quantités de matériels de guerre, a-t-il relaté.  De plus, durant la période à l’examen, plusieurs dizaines de terroristes ont été interpellés et mis à la disposition de la justice, parallèlement à la reddition volontaire de nombreux terroristes dans les régions du Centre, a précisé le représentant, selon lequel ces actions sont menées dans le strict respect des droits humains et du droit international humanitaire.  Il a ajouté que, par le biais du retour progressif de l’État dans les localités libérées de l’emprise terroriste, le Gouvernement malien s’emploie à réduire les violations des droits humains, lesquelles sont perpétrées « essentiellement » par les groupes armés terroristes.  À cet égard, a-t-il encore relevé, le dispositif institutionnel a franchi une étape cruciale, avec la création, le 1er février, de la Direction nationale des droits de l’homme.  À cette aune, il a assuré que le Mali se dressera contre toute utilisation de la question des droits humains à des fins politiques ou de déstabilisation.  

Le représentant a ensuite pris à partie le représentant de la France, qualifiant sa mémoire de « sélective » au sujet de la « tragédie » de Moura.  Dans le rapport de la Commission d’enquête internationale pour le Mali, a-t-il pointé, plusieurs paragraphes sont consacrés aux violations des droits humains commises au Mali par les forces armées françaises.  En janvier 2021, les forces françaises ont aussi « transformé une célébration de mariage en tragédie nationale » à Bounty, a poursuivi le délégué, avant de s’en prendre à l’Équateur, au motif que le Mali « n’a pas de leçons à recevoir d’un pays épinglé pour ses violations des droits humains ».  Les persécutions contre les journalistes et les juges sont « monnaie courante » en Équateur, s’est-il emporté.  

Malgré les efforts déployés par le Gouvernement, la situation humanitaire est tributaire des attaques perpétrées par les groupes terroristes et de certains facteurs exogènes, tels que la situation internationale et les effets des changements climatiques, a estimé le délégué.  Il a regretté que les besoins en financement ne soient couverts qu’à hauteur du tiers, alors que le cours des denrées de première nécessité ne cesse d’augmenter sur les marchés mondiaux.  Le Gouvernement malien, en ce qui le concerne, s’engage à redoubler d’efforts pour répondre aux besoins humanitaires de ses citoyens, a-t-il dit, avant d’appeler à une solidarité internationale accrue. 

S’agissant des défis opérationnels au Mali, le représentant a affirmé que, sur la base des chiffres fournis par le Secrétaire général, les demandes de mouvements de la MINUSMA sont satisfaites à hauteur de 75%.  « Contrairement à ce qui est véhiculé, il n’existe aucune volonté de restriction des mouvements de la MINUSMA », a-t-il dit, précisant que les demandes non autorisées « ne respectaient pas la procédure convenue entre les deux parties ».  Il a invité la MINUSMA à travailler plus étroitement avec les autorités maliennes compétentes, à travers le cadre de concertation mis en place à cet effet « pour la sécurité de tous ».  Quant à l’avenir de la MINUSMA, il a constaté que les conclusions du rapport sur l’examen interne de la Mission ne sont « pas à la hauteur des attentes du Gouvernement et des populations maliennes ».  Il a toutefois assuré que son gouvernement reste ouvert au dialogue sur ce point précis.  Enfin, « en raison de nombreux faits, documentés, dont la France s’est rendue coupable » au Mali, il a de nouveau exigé le changement de porte-plume sur tout dossier concernant le Mali abordé au Conseil de sécurité.

Reprenant la parole, M. DE RIVIÈRE (France) a dit ne pas avoir l’intention de polémiquer avec son homologue du Mali, précisant toutefois que « tout ce qui est excessif est insignifiant ».  Or, a-t-il dit, les propos tenus par le représentant malien à l’égard de la France sont « excessifs et donc insignifiants ».  La France, a-t-il rappelé, est intervenue au Mali à la demande des autorités maliennes en 2013, alors que le pays faisait face à une offensive d’Al-Qaida, dont les forces progressaient vers la capitale et auraient pris le contrôle intégral du pays « à 48 heures près ».  Il a ajouté qu’au début de 2013, « qu’on le veuille ou non », c’est l’armée française qui a sauvé l’indépendance du Mali.  Faute de l’intervention française, le pays serait tombé aux mains de ce groupe terroriste, a souligné le délégué, avant de rappeler que 50 soldats français sont tombés « pour la défense de l’intégrité, de la souveraineté et de la paix du Mali ».

Quant aux faits évoqués par le représentant du Mali, il les a qualifiés d’inexacts, notamment ceux relatifs à un mariage dans le village de Bounty.  Selon le représentant de la France, les premiers rapports de l’ONU sur cet incident étaient « malheureusement inexacts et infondés ».  « Basons-nous sur des faits et attendons patiemment que le rapport de Moura sorte », a conclu le délégué, assurant que la France continuera à aider le Mali et sa population, qui souffre et a « probablement » besoin de démocratie. 

Reprenant à son tour la parole, M. PÉREZ LOOSE (Équateur) a précisé qu’il n’avait pas tenté de « faire la leçon » au Gouvernement malien lors de son intervention, les droits humains n’étant selon lui « l’apanage d’aucun pays ».  Aucun journaliste n’a été poursuivi en Équateur, a-t-il encore déclaré, ajoutant que « le Mali n’est peut-être pas au courant que le mandat du Président Correa s’est terminé il y a quatre ans ». 

En réaction à ces reprises de parole, M. KONFOUROU (Mali) a affirmé que la situation des droits humains dans le pays est une source de préoccupation majeure pour son gouvernement, qui travaille à son amélioration.  Il a cependant souligné que cette situation est intimement liée à la situation sécuritaire du pays, sur laquelle les autorités maliennes mettent l’accent.  Il a réfuté les arguments de la France concernant les différents rapports, affirmant que « ces documents existent » et décrivent « ce qui s’est passé ».  Après avoir rappelé que le Mali a demandé une réunion spéciale du Conseil de sécurité pour évoquer les violations répétées de son espace aérien malien et les cas d’espionnage dont il fait l’objet, il a appelé la France à « lever les blocages » pour la tenue de cette réunion.  Enfin, demandant à ce qu’on cesse de politiser la situation des droits humains, il s’est dit sûr qu’il existe un espace de compréhension mutuelle avec « son ami de l’Équateur et l’Ambassadeur de France ». 

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