9244e séance – matin
CS/15176

Optimisme prudent au Conseil de sécurité autour d’un règlement du conflit au Yémen

L’Envoyé spécial pour le Yémen, M. Hans Grundberg, a indiqué aujourd’hui, devant le Conseil de sécurité, que le conflit pourrait cette année connaître un « tournant », en se disant encouragé par l’accalmie qui règne dans le pays et les intenses efforts diplomatiques en vue de son règlement.  La situation humanitaire demeure en revanche extrêmement difficile, comme l’a rappelé le Coordonnateur des secours d’urgence, M. Martin Griffiths.

À l’entame de son propos, l’Envoyé spécial a noté que la situation militaire est demeurée calme au Yémen, les lignes de front étant inchangées.  Il a loué la retenue des parties, malgré quelques heurts notamment à Mareb et Taëz, avant d’appeler les parties à respecter le droit international humanitaire.  La trêve s’est inscrite dans la durée même si elle a expiré en octobre 2022, a précisé M. Grundberg. 

L’Envoyé spécial a prôné une approche sur le long terme au Yémen, afin que le répit constaté ne soit pas de courte durée.  Saluant l’intensification des efforts diplomatiques au niveau régional en vue d’un règlement du conflit, M. Grundberg a invité les parties à s’engager en faveur du processus de paix.  Sans un accord global, les risques d’escalade perdureront au Yémen, a averti l’Envoyé, en appelant à l’unité du Conseil sur ce dossier.

La tonalité de l’intervention du Coordonnateur des secours d’urgence a été plus sombre.  S’il a également dit son espoir d’un tournant décisif dans le conflit, M. Griffiths a exprimé sa crainte que 2023 ne soit une autre année extrêmement difficile pour les Yéménites.  « Les besoins humanitaires restent alarmants, alors que l’économie du pays continue de s’affaiblir et les services de base ne tiennent qu’à un fil, de plus en plus ténu. »

Le Coordonnateur a en effet estimé que 21,6 millions de personnes auront besoin d’une assistance humanitaire et de services de protection cette année.  Ce chiffre ne reflète pas l’étendue des souffrances endurées par les Yéménites, a-t-il dit.  M. Griffiths a précisé qu’en 2022, les agences d’aide ont fourni chaque mois une aide vitale à près de 11 millions de personnes.  « Nous y sommes parvenus malgré un environnement opérationnel de plus en plus difficile », a-t-il fait remarquer.

Le règlement du conflit au Yémen a été au cœur de toutes les interventions, à l’instar des États-Unis qui ont estimé que seul un règlement permettra de remédier à la situation humanitaire « catastrophique » dans le pays.  Comme une majorité de délégations, le délégué des États-Unis a enjoint les houthistes à s’engager dans la voie des négociations, tout en notant les réels progrès enregistrés au Yémen depuis un an. 

Même son de cloche du côté des Émirats arabes unis qui ont exhorté les milices houthistes à renoncer à leur « logique destructrice » au Yémen.  Le rejet par les houthistes d’un renouvellement de la trêve exige une réponse de fermeté du Conseil, a dit le représentant, en exhortant ce dernier à faire appliquer l’embargo sur les armes.  Le délégué a déclaré que toute agression des houthistes contre des pays limitrophes fera l’objet d’une riposte ferme de la coalition arabe. 

« Le Conseil de sécurité doit considérer les houthistes comme un groupe terroriste », a renchéri le délégué de l’Arabie saoudite, en les accusant de se soustraire à leurs engagements, notamment humanitaires.  Son homologue du Yémen a également appelé le Conseil à aller au-delà des communiqués condamnant les actes terroristes des houthistes et à faire pression sur la « milice terroriste houthiste et le régime iranien qui la soutient ». 

Les efforts de l’ONU pour résoudre le conflit resteront vains tant que « le régime iranien » continuera d’interférer dans les affaires intérieures du Yémen, notamment par un soutien de longue date aux houthistes, a asséné le délégué.  Il a accusé ce « régime » de continuer de transférer des armes et des technologies militaires, y compris des missiles balistiques et des drones, à la milice, en violation flagrante des résolutions du Conseil.

Une note quelque peu dissonante est venue de la Fédération de Russie.  Si elle a encouragé les autorités et les houthistes au dialogue, elle a dénoncé les pays occidentaux dont l’objectif n’est pas le règlement global du conflit mais la garantie d’une exportation ininterrompue d’hydrocarbures yéménites vers les marchés mondiaux.  « Cette approche opportuniste est particulièrement funeste pour la paix durable dans le pays », a tranché le délégué russe.

Enfin, l’Arabie saoudite a demandé qu’un comité international de suivi et de supervision de l’Accord sur Hodeïda soit mis sur pied.  Jusque-là, les milices houthistes empêchent des observateurs d’assurer ce suivi, a tenu à rappeler le représentant.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. HANS GRUNDBERG, Envoyé spécial pour le Yémen, a indiqué qu’il vient d’avoir des discussions constructives avec les autorités nationales et régionales.  « Faisons de 2023 une année plus radieuse pour le Yémen », a-t-il déclaré avant d’expliquer que la situation militaire est demeurée calme, les lignes de front étant inchangées.  Il a loué la retenue des parties, malgré quelques heurts notamment à Mareb et Taëz, avant d’appeler les parties à respecter le droit international humanitaire (DIH).  Il a mis en garde contre des erreurs de calcul qui pourraient dégénérer en affrontements et appelé les parties à faire fond sur l’accalmie constatée dans le pays.  Il a précisé que 81 pétroliers sont entrés à Hodeïda depuis l’expiration de la trêve et s’est réjoui que la trêve se soit inscrite dans la durée, même si elle a expiré en octobre 2022.  L’Envoyé spécial a prôné une approche sur le long terme au Yémen, afin que le répit ne soit pas que temporaire. 

Il a ainsi invité les parties à s’engager en faveur du processus de paix, en notant une intensification des efforts diplomatiques au niveau régional en vue d’un règlement.  Il a estimé possible que ce conflit connaisse un tournant et exhorté les parties à se montrer responsables.  Les Yéménites doivent s’approprier le processus, a-t-il recommandé.  S’il a jugé la situation complexe et instable, il a affirmé que les efforts de dialogue ont permis de mieux définir les positions des parties, ainsi que la marche à suivre sur le long terme.  Il convient de prendre des mesures concrètes pour garantir que le processus soit inclusif, a prôné M. Grundberg, en se disant encouragé par les « discussions franches » qui ont eu lieu.  Sans un accord global, l’incertitude demeurera et les risques d’escalade perdureront, a-t-il tranché.  Enfin, l’Envoyé spécial a estimé que le Conseil, par son unité, peut envoyer un signal fort pour un avenir de paix au Yémen.

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, M. MARTIN GRIFFITHS, a dit avoir bon espoir qu’un tournant décisif dans ce conflit reste possible, tout en exprimant ses craintes que 2023 ne soit une autre année extrêmement difficile pour les Yéménites.  En effet, les besoins humanitaires restent alarmants, alors que l’économie du pays continue de s’affaiblir et les services de base ne tiennent qu’à un fil, de plus en plus ténu.  Pendant ce temps, l’accès des populations à l’aide humanitaire est entravé et les agences d’aide sont contraintes de faire face à un environnement opérationnel et à un paysage de financement de plus en plus difficiles, a noté le Coordonnateur.

M. Griffiths a informé qu’on estime à 21,6 millions le nombre de personnes au Yémen qui auront besoin d’une aide humanitaire et de services de protection en 2023.  Bien qu’important, ce chiffre ne reflète pas vraiment la réalité ou l’étendue de la souffrance des gens, a-t-il ajouté.  Ce chiffre ne reflète pas, par exemple, la peur et le risque auxquels les gens sont confrontés -en particulier les femmes et les filles– lorsqu’ils mènent des activités simples, comme aller chercher de l’eau ou aller à l’école à pied.  Il a indiqué que dans les prochaines semaines, la communauté humanitaire publiera son plan pour l’année à venir afin de répondre à ces besoins.

En 2022, grâce au solide soutien des donateurs, les agences d’aide ont fourni une aide vitale à près de 11 millions de personnes chaque mois, a-t-il rappelé en se félicitant de cet accomplissement malgré un environnement opérationnel de plus en plus difficile et des déficits de financement persistants dans un certain nombre de secteurs.  Le Coordonnateur des secours d’urgence a exhorté la communauté internationale à continuer d’être aux côtés du peuple yéménite cette année, en donnant généreusement et en aidant à réduire les déficits de financement pour sauver des vies. 

Les contraintes d’accès restent un obstacle majeur au Yémen, a-t-il poursuivi en notant que, l’année dernière, les partenaires humanitaires ont signalé plus de 3 300 incidents d’accès, soit près de 10 par jour.  Il a indiqué que les obstacles bureaucratiques sont les contraintes les plus fréquemment signalées, y compris les restrictions de mouvements humanitaires et les retards dans l’approbation des visas et des permis de travail.  Nous devons également faire face à des tentatives d’ingérence à toutes les étapes de la livraison de l’aide, a-t-il aussi indiqué, précisant que ce problème est particulièrement grave dans les zones contrôlées par les houthistes.  Il a dénoncé le fait que les travailleuses humanitaires yéménites ne peuvent pas, en vertu du mahram, voyager sans tuteur masculin, tant à l’intérieur que hors du pays.  Des entraves qui freinent le travail du personnel et limitent l’impact social et économique de la participation des femmes.

M. Griffiths a déclaré que malgré le dialogue continu avec les autorités de facto houthistes, et malgré les engagements pris par ces mêmes autorités pour trouver des solutions, il n’y a pas encore de changement.  Au lieu de cela, les restrictions du mahram ne sont devenues que plus répandues et enracinées.  Il a également dénoncé les violences ciblant les humanitaires et ajouté que deux membres du personnel de l’ONU sont détenus à Sanaa depuis 14 mois, tandis que cinq autres sont toujours portés disparus après avoir été kidnappés à Abyan il y a près d’un an. 

M. Griffiths a appelé toutes les parties au conflit à faciliter le passage sûr, rapide et sans entrave de l’aide humanitaire en direction de tous les civils dans le besoin, et à protéger le personnel et les biens humanitaires, conformément à leurs obligations en droit international humanitaire.  Il a exhorté les parties à faire tout leur possible pour éviter toute action susceptible de déstabiliser davantage l’économie ou d’avoir un impact négatif sur les besoins ou la réponse humanitaires.  Il a en outre appelé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour stimuler l’économie et rétablir les services de base, ce qui, bien sûr, servira aussi à réduire les besoins humanitaires ainsi que la taille et le prix des opérations d’aide à long terme.  En fin de compte, ce que le peuple yéménite veut vraiment, ce ne sont pas des appels humanitaires année après année et des descriptions perpétuelles de leur souffrance, a-t-il relevé en rappelant que ce peuple veut surtout une fin durable à ce conflit et la chance de reconstruire ses communautés et son pays.

Pour M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni), toutes les étapes vers un règlement politique négocié, dirigé par les Yéménites sous les auspices de l’ONU, sont des étapes vers la paix que les Yéménites méritent depuis longtemps.  C’est le seul moyen de remédier pleinement à la situation humanitaire, qui reste désastreuse dans tout le pays, a souligné le représentant.  Alors que les efforts se poursuivent pour rechercher une solution durable au conflit, il a appelé à intensifier les efforts pour améliorer la situation humanitaire immédiate tout en s’attaquant aux causes profondes de la crise.  Il a reproché aux houthistes d’avoir plongé le Gouvernement du Yémen dans une situation économique difficile en bloquant les exportations de pétrole.  La communauté internationale doit prendre toutes les mesures pour atténuer cet impact et soutenir le Gouvernement yéménite en ce moment critique, a-t-il souhaité.  Évoquant le lancement du plan de réponse humanitaire à la fin de ce mois, le représentant a encouragé tous les donateurs, actuels ou potentiels, à rester déterminés à soulager les souffrances des Yéménites.  Il a également demandé aux autorités du nord et du sud de permettre un accès sans entrave aux partenaires humanitaire à tout le pays. 

M. HERNÁN PÉREZ LOOSE (Équateur) a condamné les violences des houthistes qui ont attenté à la vie et à la sécurité des fonctionnaires des Nations Unies et de la population civile, y compris des enfants.  Il a également déploré le trafic illicite d’armes et les attaques contre les ports maritimes et les infrastructures pétrolières stratégiques, exigeant ensuite la libération du personnel humanitaire et des prisonniers politiques.  Le délégué a aussi condamné les mesures mises en œuvre par les houthistes pour entraver la libre circulation des femmes et le travail des responsables humanitaires sur le terrain.  Préoccupé par le nombre d’enfants tués et mutilés par des mines, le représentant a appelé à renforcer les efforts de déminage.  Le délégué a noté que depuis octobre 2022, les tensions entre les parties se sont relâchées et la population civile a connu la plus importante période d’accalmie en huit années de conflit.  Il a encouragé l’Envoyé spécial à poursuivre les efforts pour débloquer les négociations entre les houthistes et le Gouvernement yéménite en vue de renouveler l’accord de trêve pour six mois supplémentaires.  Il s’est réjoui des progrès concernant la situation du pétrolier SAFER et a espéré que la première phase de transfert de carburant soit réalisée, comme prévu, au cours du premier trimestre de 2023.

M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a constaté que depuis la fin de la trêve en octobre 2022, s’est ouvert une nouvelle phase d’incertitude marquée par une reprise d’incidents.  Cela laisse craindre une escalade dont les civils paieraient, une fois de plus, le plus lourd tribut, s’est-il inquiété.  Il a réaffirmé la nécessité de parvenir à une nouvelle trêve et s’est dit convaincu qu’un accord de paix peut encore être conclu entre les parties.  Nous suivons avec la plus grande attention les pourparlers en cours visant à la reconduction de la trêve dans le pays et appelons toutes les parties prenantes à faire preuve de responsabilité, de souplesse et de compromis, a déclaré le délégué.  Il s’est dit très préoccupé par la situation des enfants qui, avec les femmes, sont les premières victimes du conflit qui ravage le pays.  Enfin, il a appelé à une plus grande mobilisation de la communauté internationale afin de pallier le déficit des contributions pour soutenir l’économie et les services publics du Yémen. 

M. HAFIZ ISSAHAKU (Ghana) a imploré les parties à faire preuve de retenue et de continuer à observer les éléments de la trêve qui, a-t-il insisté, doit être renouvelée.  Après près d’une décennie de combats, il est grand temps que les parties au conflit travaillent assidûment vers un cessez-le-feu à long terme qui créera les conditions nécessaires à une solution politique négociée au conflit.  La proposition de l’Envoyé spécial pour une prolongation de six mois de la trêve offre une opportunité propice qui pourrait finalement conduire à une paix durable, a-t-il estimé. 

Le représentant a ensuite souligné que la réponse à la crise humanitaire qui afflige le pays demeure de la plus haute importance et doit continuer à retenir l’attention de la communauté internationale.  Il a réclamé un soutien international pour faire face aux risques posés par les mines terrestres et les restes explosifs de guerre, avant d’appeler à la levée immédiate des goulots d’étranglement bureaucratiques et administratifs qui entravent les efforts de déminage de l’ONU dans le pays.  Il a également dénoncé les restrictions administratives et bureaucratiques aux mouvements du personnel humanitaire, en particulier le personnel féminin, notant que cette situation affecte la livraison de l’aide humanitaire. 

Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a salué les efforts de l’Envoyé spécial pour le Yémen et a appelé à rétablir la trêve de toute urgence.  C’est possible, a-t-elle insisté, puisque nous avons assisté à la signature d’une trêve négociée par l’ONU l’année dernière en avril, qui a été prolongée jusqu’en octobre.  Ces six mois ont été la plus longue période d’accalmie depuis le début de la guerre au Yémen et ont apporté un certain répit et de l’espoir à la population yéménite, a-t-elle souligné.  Bien que la trêve soit arrivée à expiration, elle a salué le fait que certains éléments de l’accord soient restés valables et qu’il n’y ait pas eu un retour aux hostilités à grande échelle.  Appelant toutes les parties au conflit, en particulier les houthistes, à s’abstenir d’imposer des exigences « maximalistes » et à donner la priorité au peuple yéménite, elle a souligné qu’il ne peut y avoir de solution militaire au conflit.  Les parties doivent immédiatement reprendre le processus de négociation, de bonne foi, et œuvrer au rétablissement d’une trêve, a exigé la déléguée.  Face à la détérioration de la situation humanitaire dans le pays, avec plus de 21 millions de personnes nécessitant une aide humanitaire, soit les deux tiers de la population, la représentante a appelé à réagir collectivement au nom d’un impératif moral.  Elle a demandé aux houthistes d’ouvrir les routes autour de Taëz et de mettre fin au blocus de la ville.  Elle a également appelé à la mise en œuvre rapide de la première phase du plan facilité par l’ONU pour retirer le pétrole du pétrolier SAFER afin d’éviter une catastrophe environnementale potentiellement catastrophique.

Pour M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie), l’absence d’escalade militaire montre la volonté commune des forces politiques de renouveler la trêve dont la mise en œuvre est cependant entravée par des clivages.  Les parties doivent faire preuve d’un maximum de retenue et empêcher les provocations militaires, a-t-il exigé en misant sur un processus inclusif sous l’égide de l’ONU pour établir la paix sur la base des intérêts légitimes de toutes les forces politiques.  Selon le représentant, la stabilisation ne peut passer que par un dialogue direct avec Ansar Allah.  Il a exhorté la communauté internationale à tout mettre en œuvre pour contribuer au règlement politique et au retour de la paix au Yémen.  Il a dénoncé les pays occidentaux dont l’objectif n’est pas le règlement global et à long terme du conflit mais la garantie d’une exportation ininterrompue d’hydrocarbures yéménites vers les marchés mondiaux.  Cette approche opportuniste est particulièrement funeste pour la paix durable dans le pays, a-t-il dénoncé.  Le délégué a encouragé les autorités et les houthistes au dialogue, y compris avec l’Envoyé spécial.  Il a également abordé le problème de la situation socioéconomique difficile, qui demande la mobilisation des efforts internationaux pour fournir une assistance aux populations dans le besoin et la levée de toutes les restrictions à la livraison de vivres, de médicaments et d’autres biens vitaux dans toutes les régions du Yémen.  À cet égard, il a également exigé la levée du blocus imposé au Yémen. 

M. RICHARD M. MILLS (États-Unis) a noté les réels progrès enregistrés au Yémen.  Pour preuve, il y a an, le conflit faisait rage et les houthistes attaquaient les civils, alors qu’aujourd’hui, le calme règne, a noté le délégué.  Afin de consolider l’accalmie qui règne actuellement, le représentant a exhorté les houthistes à s’engager dans la voie des négociations.  Il a également espéré une position forte de la communauté internationale s’agissant des attaques des houthistes contre les infrastructures économiques du pays.  De plus, il a déploré que des armes continuent d’être acheminées depuis l’Iran au profit des houthistes.  Seul un accord politique pourra remédier à la situation humanitaire catastrophique, a tranché le délégué, avant de saluer la volonté du Gouvernement yéménite de parvenir à tel accord.  Il a appelé à la concrétisation du plan de l’ONU en ce qui concerne le pétrolier SAFER.  Il a souhaité en conclusion que 2023 soit l’année du retour de la paix au Yémen.

M. DAI BING (Chine) a invité les parties à travailler avec sérieux et à agir avec toute la volonté politique nécessaire pour parvenir à la paix.  Il a dit espérer que les efforts de médiation vont permettre au Yémen de sortir de l’impasse.  Sur le plan humanitaire, il a relevé que près de 21,8 millions de Yéménites auront besoin d’aide humanitaire en 2023.  Il a appelé la communauté internationale à aider le pays à sortir de cette impasse.  Aux acteurs nationaux, il a demandé de permettre que les acteurs humanitaires puissent mener à bien leur mission.  Le représentant a relevé par ailleurs que la situation au Yémen a des conséquences sur la sécurité des pays du Golfe.  Une solution politique doit donc être trouvée à cette crise, a—t-il plaidé en conclusion.

Mme CAMILLA NEVES MOREIRA (Brésil) a noté que le dernier accord de cessez-le-feu a été renouvelé deux fois et s’est traduit par une baisse du nombre de victimes liées à la guerre au plus faible niveau depuis le début de 2015.  Même après sa « regrettable » expiration officielle en octobre, les effets durables du cessez-le-feu représentent une fenêtre d’opportunité unique pour un règlement politique qui ne doit pas être négligée par les parties, a fait valoir la déléguée.  Gâcher cette opportunité reviendrait à aggraver les souffrances des hommes, des femmes et des enfants yéménites, a-t-elle mis en garde ajoutant que même en l’absence d’hostilités à grande échelle, la terrible crise humanitaire dans le pays se poursuit.  Des centaines de milliers de personnes ont déjà péri et, selon OCHA, environ 20 millions de personnes auront besoin d’une aide humanitaire en 2023, a-t-elle rappelé.  Elle a exigé des parties qu’elles respectent leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et s’abstiennent de prendre des mesures qui compromettent la fourniture de l’aide humanitaire.  Elle a également exhorté les parties belligérantes à faire preuve de la flexibilité nécessaire et à s’engager de manière constructive dans un dialogue constructif, sans conditions préalables, pour ouvrir la voie à un avenir de paix, de stabilité et de développement pour le Yémen.

Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a exhorté les houthistes à coopérer de bonne foi pour parvenir à un cessez-le-feu durable.  La souffrance de la population yéménite est inacceptable, a dénoncé la représentante qui a appelé les parties à permettre aux acteurs humanitaires de fournir l’aide aux personnes dans le besoin.  Elle a condamné les restrictions imposées aux opérations humanitaires, appelant notamment les houthistes à mettre un terme à leur pratique discriminatoire contre les femmes et à leur permettre de travailler.  Elle a appelé à la libération immédiate des détenus y compris le personnel de l’ONU et de l’ambassade américaine.  Elle a également condamné les attaques des houthistes contre la navigation internationale et les infrastructures portuaires.  La représentante a dénoncé les impacts de leur guerre économique qui retarde le relèvement du pays, de même que les violations de l’embargo sur les armes par les houthistes.  Préoccupée pas la contrebande d’armes depuis l’Iran vers le Yémen, la déléguée a également dénoncé les activités malveillantes de l’Iran dans la région et la détermination des houthistes à prolonger ce conflit. 

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a remarqué qu’en dépit de l’expiration de la trêve et des atermoiements des houthistes, les autorités et le peuple yéménites sont déterminés à mettre un terme au conflit.  Il a appelé à un cessez-le-feu permanent et à une solution politique globale au Yémen.  Il a loué les efforts de l’Arabie saoudite à cette fin, ainsi que la médiation d’Oman.  Les milices houthistes doivent cesser leur guerre économique et mettre un terme à leur logique destructrice au Yémen, a exigé le délégué, en accusant ces dernières de commettre des violations.  Il a estimé que le rejet par les houthistes d’un renouvellement de la trêve exige une réponse de fermeté du Conseil.  Le Conseil doit faire appliquer l’embargo sur les armes, a-t-il tranché, en déplorant les livraisons d’armes aux houthistes.  Enfin, il a déclaré que toute agression de ces derniers contre des pays limitrophes fera l’objet d’une riposte ferme de la coalition arabe.

M. ALEXANDRE OLMEDO (France) a appelé le Conseil de sécurité à tout faire pour éviter une reprise des hostilités sur le terrain, faisant remarquer que la rupture de la trêve a créé une instabilité durable.  La situation est fragile et peut se détériorer rapidement si les parties décident de reprendre les combats, a-t-il mis en garde.  Selon lui, huit ans de conflit au Yémen ont montré que l’option militaire n’est pas une solution.  Il a condamné la stratégie houthiste visant à étouffer économiquement le Gouvernement yéménite.  Le délégué a dit qu’il est de la responsabilité du Conseil de préserver l’espace humanitaire au Yémen qui subit de graves atteintes.  Il a plaidé pour le plein accès humanitaire et de meilleures conditions de travail pour les acteurs humanitaires.  Il a par ailleurs déploré l’imposition de tuteurs masculins avant d’appeler les houthistes à respecter les femmes engagées dans les ONG. 

Concernant le pétrolier SAFER, la France est heureuse d’annoncer une contribution supplémentaire d’un million d’euros au plan de sauvetage piloté par les Nations Unies, a poursuivi le représentant en espérant la mise en œuvre rapide de la première phase du plan, afin d’éviter toute menace imminente d’une catastrophe écologique.  Il a appelé les houthistes, actuellement en contrôle du navire, à pleinement coopérer avec les Nations Unies pour la mise en œuvre du plan de sauvetage.  Il est essentiel, a-t-il souligné en conclusion, que tous les efforts de médiation soient menés en parfaite coordination avec ceux de l’Envoyé spécial.  Il a aussi réitéré l’importance d’une pleine participation des femmes au processus de paix. 

M. PEDRO COMISSÁRIO AFONSO (Mozambique) a encouragé d’emblée la poursuite des efforts visant à rétablir la trêve entre les autorités yéménites et le mouvement houthiste.  Il a appelé à consolider les avantages tangibles que le répit des combats a apportés au peuple yéménite et a exhorté le Conseil de sécurité à appuyer ces ouvertures, y voyant la seule voie actuellement disponible vers la paix.  Il a dit rester préoccupé par la tragédie humanitaire sans précédent que connaît le pays; les menaces persistantes à la libre circulation des marchandises; et le risque que ce conflit n’offre un sanctuaire aux terroristes et aux extrémistes.  Après avoir appelé à la libération immédiate de tous les travailleurs humanitaires retenus captifs, le représentant s’est dit consterné par les informations faisant état d’un recrutement continu d’enfants soldats, ainsi que par l’utilisation généralisée et aveugle de mines terrestres et d’engins non explosés, qui font de nombreuses victimes civiles.  Constatant que les risques d’une rechute dans la guerre restent toujours élevés, le délégué a appelé à n’épargner aucun effort pour éviter ce scénario et à apporter une réponse urgente et généreuse à l’appel humanitaire de l’ONU pour le Yémen.

Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a appelé les parties au conflit à rétablir une trêve formelle et d’œuvrer en faveur d’un règlement négocié du conflit, jugeant qu’il est temps de choisir la paix « pour de bon ».  De même, elle a exhorté les parties à poursuivre le dialogue de bonne foi et à faire preuve de retenue.  L’objectif à plus long terme d’un règlement politique intra-yéménite auquel toute la société participe et qui inclut les voix des femmes et des groupes marginalisés doit rester au centre des efforts de paix, a-t-elle souligné, ajoutant que les différents dialogues en cours doivent s’alignent sur les efforts de l’Envoyé spécial. 

La représentante a aussi plaidé pour que l’assistance humanitaire soit dictée par les besoins de la population touchée et fasse abstraction de toutes considérations politiques.  Un accès humanitaire rapide et sans entraves doit être garanti partout dans le pays et par toutes les parties au conflit.  Il faut limiter les restrictions bureaucratiques comme les délais dans l’approbation des visas ou des permis de travail, dès lors que celles-ci empêchent une réponse efficace et conforme aux principes humanitaires, a-t-elle indiqué.  La déléguée a également souligné la nécessité pour les parties au conflit de protéger les enfants et de les libérer immédiatement de leurs rangs.  Elle a également appelé à autoriser l’importation du matériel indispensable pour le déminage humanitaire et à combler les financements manquants à cet égard.  Enfin, s’agissant du pétrolier SAFER, elle a demandé la mise en œuvre rapide de la première phase du plan de sauvetage. 

M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a déploré l’instabilité de la situation sécuritaire au Yémen, que les récentes attaques des houthistes, contre le port de Qena notamment, sont venues aggraver.  Il a appelé à une solution politique et exhorté les parties, notamment les houthistes, à prendre les mesures nécessaires en vue d’un renouvellement de la trêve au Yémen.  Il a indiqué que son pays va continuer d’appuyer le Yémen, y compris en soutenant le projet de l’ONU en ce qui concerne le pétrolier SAFER.  Il a aussi estimé que le renforcement des fonctions du port d’Aden jouerait un grand rôle dans la reconstruction de l’économie yéménite.  Enfin, le délégué japonais a de nouveau insisté sur la nécessité du dialogue au Yémen.

M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a accusé la milice houthiste de continuer d’aggraver l’ampleur de la souffrance humaine en manipulant le marché noir du carburant, en entravant le travail des banques et des institutions financières, en empêchant la circulation de la monnaie nationale dans les zones sous son contrôle ainsi que par ses tentatives de créer une économie parallèle.  Il a appelé le Conseil à aller au-delà des communiqués condamnant les actes terroristes des houthistes et de faire pression sur la milice terroriste houthiste et le régime iranien qui la soutient.  Il a rappelé que si les autorités gouvernementales sont en faveur de la paix, celle-ci ne peut être atteinte sans un véritable partenaire.  Il a donc invité les houthistes à renoncer à l’option de la guerre, à œuvrer en faveur de l’égalité des droits pour tous les Yéménites et à renoncer à la violence comme moyen de faire respecter leurs agendas politiques. 

Le représentant a estimé que les houthistes n’ont aucun désir de paix et qu’ils exploitent les efforts des Nations Unies.  Il a accusé la milice de recruter et d’utiliser des enfants dans les opérations militaires, et de restreindre la participation à la vie publique des femmes, à un moment où l’importance du rôle des femmes et leur participation dans tous les aspects de la vie sociale est mise en évidence.  Il a estimé que tous les efforts du Conseil de sécurité et de l’ONU pour résoudre le conflit resteront vains tant que « le régime iranien » continuera d’interférer dans les affaires intérieures du Yémen, notamment par un soutien de longue date aux houthistes.  Selon le délégué, ce « régime » continue de transférer des armes et des technologies militaires, y compris des missiles balistiques et des drones, à la milice houthiste, en violation flagrante des résolutions internationales, au premier rang desquelles celles du Conseil de sécurité.  Il a relevé que le Conseil de défense nationale a décidé de qualifier les houthistes d’« organisation terroriste ».  Ce qui exige que le Conseil de sécurité et la communauté internationale passent de la simple condamnation à une action collective pour les dissuader.  Il a ainsi appelé à inclure la milice houthiste dans la liste des groupes terroristes du Conseil de sécurité, afin de faire pression sur elle et de contraindre ses membres à reprendre le chemin de la paix et du processus politique. 

En outre, le représentant a dénoncé la complexité de la situation économique imposée par la milice houthiste qui empêche la circulation de la monnaie nationale dans les zones sous son contrôle, ce qui pousse davantage de Yéménites à s’en remettre entièrement ou de manière partielle à l’aide humanitaire.  Au sujet du pétrolier SAFER, le délégué a souhaité que ce dossier soit traité de toute urgence, pour éviter une catastrophe qui coûterait des dizaines de milliards.  Il a mis en garde les milices houthistes qui selon lui exploitent ce dossier à des fins de chantage politique.

M. ABDULAZIZ M. ALWASIL (Arabie saoudite) a salué les efforts de l’Envoyé spécial mais reproché aux milices houthistes d’avoir rejeté en octobre 2022 la reconduction de l’accord de cessez-le-feu pour des raisons politiques, alors que les partenaires régionaux et internationaux continuent d’aider le Gouvernement yéménite à aller vers la paix, sous les bons auspices de l’ONU, et des efforts appuyés par l’Arabie saoudite.  Notant que les milices houthistes ont décidé de se soustraire aux engagements qu’elles avaient elles-mêmes endossés, il a affirmé que leurs engagements humanitaires n’ont pas été respectés.  En attendant, les ports continuent de fonctionner et les vols commerciaux vers l’aéroport de Sanaa se poursuivent, a noté le représentant.  D’après lui, les milices houthistes ne manifestent pas de signes ou de volonté politique indiquant vouloir mettre fin à la crise au Yémen, alors qu’elles ont la main mise sur les ressources du pays.  Elles refusent de participer aux négociations et consultations visant la paix, a-t-il constaté en regrettant que le Conseil de sécurité n’ait pas été en mesure jusque-là d’adopter une position forte face aux actions des milices houthistes contre les civils.  À ce titre, il a notamment parlé de recrutement de force d’enfants-soldats, de détentions arbitraires de travailleurs humanitaires et d’appropriation, par les milices, de l’aide humanitaire.

Les populations yéménites n’ont pas accès aux services de base dans les territoires sous contrôle de ces milices, a poursuivi le représentant en affirmant que ces dernières exercent un chantage sur la communauté internationale en utilisant la situation humanitaire à son profit.  La communauté internationale et le Conseil de sécurité doivent faire face à ces milices et les considérer comme un groupe terroriste, a exigé le délégué.  Il a également demandé qu’un comité international de suivi et de supervision de l’Accord sur Hodeïda soit mis sur pied.  Jusque-là, les milices houthistes empêchent des observateurs d’assurer ce suivi, a tenu à rappeler le représentant.  Il a conclu en avertissant que les États de la coalition se défendront si les milices houthistes les prennent pour cible ou cherchent à saper leur sécurité.

 

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