Quatrième Commission: les missions politiques spéciales, un outil de diplomatie préventive et de consolidation de la paix apprécié des délégations
Dans un monde caractérisé par l’incertitude, la volatilité accrue et des mutations rapides, les conflits se sont multipliés de manière exponentielle, provoquant des catastrophes humanitaires massives qui mettent à l’épreuve les capacités collectives de réaction. Les dépenses militaires montent en flèche tandis que le financement de l’aide humanitaire, du rétablissement et de la consolidation de la paix s’amenuise. Et au moment où l’action collective est plus que jamais nécessaire, nous sommes de plus en plus divisés.
Voilà le constat alarmant dressé, ce matin, par le Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques au sein du Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix (DPPA) et du Département des opérations de paix (DPO), M. Miroslav Jenča, à la tribune de la Quatrième Commission (chargée des questions politiques spéciales et de la décolonisation), où ce dernier était venu défendre les mérites des missions politiques spéciales de l’ONU, mais aussi identifier les défis auxquels elles se heurtent.
Si toutes les délégations ont reconnu le rôle indispensable de ces missions pour la prévention des conflits et la consolidation de la paix, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) les a décrites comme un outil souple de diplomatie préventive qui peut revêtir diverses formes, du statut d’Envoyé spécial du Secrétaire général aux Bureaux régionaux, une flexibilité qui constitue un atout majeur.
De leur côté, les pays du groupe CANZ – Canada, Australie et Nouvelle-Zélande - ont insisté sur l’impératif de formuler des réponses collectives aux obstacles rencontrés, qu’il s’agisse des ressources humaines et financières adéquates, du renforcement des capacités de déploiement rapide ou d’un soutien politique inébranlable, autant de facteurs essentiels au succès des missions politiques spéciales.
La Quatrième Commission a adopté ce matin sans vote le projet de résolution relatif à l’« Étude d’ensemble des missions politiques spéciales », qui comporte certaines nouveautés, comme l’ont fait observer les deux délégations cofacilitatrices, le Mexique et la Finlande. Celles-ci ont jugé nécessaire de mettre à jour la résolution 77/127 de l’an dernier pour reconnaître que les missions politiques spéciales doivent avoir leur place dans les pourparlers visant à donner suite à la note d’orientation du Secrétaire général intitulée Nouvel Agenda pour la paix.
Le texte note également que le financement de la consolidation de la paix reste un défi crucial puisque, deux ans après l’adoption de la résolution 76/305, l’Assemblée générale n’a toujours pas trouvé de moyen consensuel de répondre au besoin de ressources supplémentaires. Autre élément nouveau: la demande adressée au Secrétaire général de baser son prochain rapport sur les résultats des missions politiques spéciales en fournissant à l’Assemblée générale des informations sur leur impact réel dans l’exécution de leurs mandats.
L’une des principales recommandations du Nouvel Agenda pour la paix est de prévenir les conflits, d’assurer la médiation et la résolution des conflits et de construire la paix, a observé le Sous-Secrétaire général. Le rapport qu’il a présenté détaille précisément la manière dont les missions politiques spéciales s’acquittent de cette tâche en Libye, en Colombie, au Yémen, au Soudan, en Somalie, en Iraq et ailleurs. Le haut fonctionnaire a insisté sur l’importance d’impliquer plus systématiquement les femmes et les jeunes à toutes les étapes des processus politiques et de paix, mais également sur l’intérêt qu’il y aurait à renforcer la coordination et la coopération entre les missions et les organisations régionales et sous-régionales, un aspect largement soutenu par les délégations.
Certains pays sont venus témoigner des contributions diverses des missions politiques spéciales, notamment la Colombie qui est devenue une véritable « success story » dans ce domaine et souhaiterait que son expérience puisse inspirer d’autres situations de crise. L’Iraq, qui accueille la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI), a insisté sur l’importance de la coordination et du dialogue avec le gouvernement hôte et sur le renforcement de la neutralité des missions et de la confiance entre les parties.
Abondant en ce sens, le Soudan, où opère la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS), a également mis en garde contre les répercussions d’une politisation des mandats, estimant que la consolidation de la paix doit rester leur priorité absolue, plaidant pour la non-ingérence des bailleurs de fonds.
La question du sous-financement, mais aussi celle des modalités du financement des missions politiques spéciales, sont revenues à plusieurs reprises. Rappelant qu’elles ne sont pas financées à partir du budget ordinaire de l’ONU, l’Inde a appelé les délégations à réfléchir à la fragmentation budgétaire des missions politiques spéciales, exigeant davantage de transparence. L’Égypte a également préconisé une réforme du mode de financement par la mise en place d’un compte autonome pour les missions politiques spéciales dans le budget ordinaire, car in fine, elles doivent pouvoir compter sur un financement suffisant, prévisible et durable, comme l’a souligné le Pérou.
En début de séance, le Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel, M. Atul Khare, est venu brosser un tableau des activités engagées par le Département de l’appui opérationnel (DOS) en soutien aux mandats des missions politiques spéciales. Les priorités actuelles du DOS se répartissent en trois domaines clefs, à savoir la fourniture de solutions holistiques dans des environnements de plus en plus complexes, la réponse aux besoins spécifiques des clients et l’amélioration de la prestation de services, a-t-il précisé.
La Commission entamera l’examen du point relatif à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), demain, vendredi 3 novembre, à 15 heures.
ÉTUDE D’ENSEMBLE DES MISSIONS POLITIQUES SPÉCIALES
Déclarations liminaires
M. MIROSLAV JENČA, Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques au Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix - Département des opérations de paix, a présenté le rapport du Secrétaire général sur les « questions de politique générale relatives aux missions politiques spéciales ». Dans un monde caractérisé par l’incertitude, la volatilité accrue et des transformations rapides, les conflits se sont multipliés de manière exponentielle, a-t-il relevé, créant des catastrophes humanitaires massives qui mettent à l’épreuve les capacités collectives de réaction. Les dépenses militaires montent en flèche tandis que le financement de l’aide humanitaire, du rétablissement et de la consolidation de la paix s’amenuise. Qui plus est, le monde fait face à une série de menaces transnationales, notamment l’impact de la crise climatique et le potentiel de militarisation des nouvelles technologies et des nouveaux domaines. Et pourtant, au moment où l’action collective est plus que jamais nécessaire, nous sommes de plus en plus divisés, a regretté le haut fonctionnaire. Les tensions entre grandes puissances sont dangereusement élevées, et les mécanismes ayant permis de maintenir la stabilité mondiale mis à rude épreuve. C’est ce besoin criant de davantage d’unité, de dialogue et de coopération qui est à l’origine de la note d’information du Secrétaire général sur le Nouvel Agenda pour la paix, a-t-il expliqué. « L’analyse de ce document est brutale »: la période de l’après-guerre froide est derrière nous et le monde est en transition vers un nouvel ordre, caractérisé par de fortes tensions géopolitiques et de faibles niveaux de confiance.
L’une des principales recommandations du Nouvel Agenda pour la paix est l’impérieuse nécessité de prévenir les conflits, d’assurer la médiation et la résolution des conflits et de construire la paix, a insisté M. Jenča, et le rapport du Secrétaire général détaille la manière dont les missions politiques spéciales s’acquittent de cette tâche. De la Libye à la Somalie en passant par la Syrie, l’Iraq et le Yémen, les envoyés et représentants spéciaux du Secrétaire général soutiennent les processus politiques et s’efforcent d’ouvrir la voie à la paix et à la réconciliation. Au Moyen-Orient, le Coordonnateur spécial Wennesland travaille avec toutes les parties pour désamorcer la situation à Gaza, alors que tous les envoyés de l’ONU dans la région tentent d’empêcher une plus grande régionalisation du conflit. En Colombie, la Mission de vérification des Nations Unies a apporté une contribution essentielle à la mise en œuvre de l’accord final de 2016, en soutenant la réintégration des anciens combattants, les garanties de sécurité, la réforme rurale globale, la justice transitionnelle et la réconciliation. La Mission a également facilité la reprise des pourparlers de paix entre le Gouvernement et l’Armée de libération nationale (ELN), qui ont abouti à un accord de cessez-le-feu de six mois. À la demande des parties, le Conseil de sécurité a élargi le mandat de la Mission pour y inclure le suivi et la vérification de la mise en œuvre de ce cessez-le-feu.
M. Jenča a également signalé que les missions politiques spéciales travaillent dans divers contextes pour explorer et piloter de nouvelles technologies, de nouveaux outils et de nouvelles pratiques en matière de prévention des conflits, de médiation et de consolidation de la paix. Conscient du long chemin parcouru sur la voie d’une plus forte participation des femmes aux processus politiques et de paix au cours des deux dernières décennies, le Sous-Secrétaire général a toutefois concédé que ces dernières restent encore trop souvent exclues de la table de négociation de la paix et des efforts de transition. Il faut s’attaquer aux inégalités structurelles qui privent les femmes de la place qui leur revient, a-t-il demandé en arguant que les missions politiques spéciales ont joué un rôle déterminant dans la promotion d’une participation accrue des femmes dans ces domaines, notamment en Iraq, en Libye, au Soudan et en Syrie.
L’engagement significatif des jeunes est également essentiel à la réalisation du développement durable, des droits humains, de l’égalité des sexes, de la paix et de la sécurité, a souligné le haut fonctionnaire, expliquant que les missions politiques spéciales réexaminent et adaptent activement leurs approches afin de mieux exploiter le potentiel positif des jeunes dans la construction de sociétés pacifiques, prospères et justes. Il a donné les exemples concrets de ce qui se fait en Libye et en Somalie dans ce domaine.
En collaboration avec les équipes nationales de l’ONU, les missions politiques spéciales continuent de soutenir la mise en œuvre de priorités de consolidation de la paix inclusives et menées au niveau national. M. Jenča a souligné qu’au cours de la période considérée, le Fonds pour la consolidation de la paix a approuvé 37,4 millions de dollars pour des projets en Colombie, en Haïti, en Libye, en Somalie et au Soudan - tous des pays accueillant des missions politiques spéciales. Ces projets ont soutenu des initiatives de réconciliation et la participation des femmes et des jeunes à la vie publique et aux transitions politiques entre autres.
S’adressant aux États Membres, le Sous-Secrétaire général a déclaré qu’avec leur soutien, il est convaincu que les missions politiques spéciales peuvent jouer et joueront un rôle crucial dans la poursuite de la diplomatie multilatérale pour la paix et l’opérationnalisation du Chapitre VI de la Charte des Nations Unies. Ces missions seront également prêtes à jouer leur rôle dans la mise en œuvre des mesures de renforcement de la coopération convenues par les États Membres lors du Sommet de l’avenir en septembre prochain, a-t-il affirmé.
M. ATUL KHARE, Secrétaire général adjoint à l’appui opérationnel, a indiqué qu’au cours des dernières années, le Département de l’appui opérationnel (DOS) s’est efforcé de rationaliser sa fonction de planification stratégique. Pour ce faire, il a intégré des méthodologies de prospective à ses plans stratégiques, ce qui lui permet de formuler des priorités, d’anticiper les tendances qui ont un impact sur le soutien opérationnel et de définir des réponses sur un horizon de cinq ans. Les priorités actuelles du DOS se répartissent en trois domaines clefs, à savoir la fourniture de solutions holistiques dans des environnements de plus en plus complexes, la réponse aux besoins spécifiques des clients et l’amélioration de la prestation de services. M. Khare a ajouté que le Département continue de soutenir le programme pour les femmes et la paix et la sécurité en assurant la gestion de la filière de sélection de femmes qualifiées en vue de leur recrutement à des postes de direction, projet phare du Secrétariat visant à accroître la parité parmi le personnel civil de haut niveau des missions sur le terrain, conformément à la stratégie sur la parité des sexes à l’échelle du système. Ainsi, depuis sa création en 2014, 66 nominations de candidates issues de cette réserve ont été annoncées, du grade P-5 à celui de Secrétaire générale adjointe. Le Département gère également les moyens permanents mobilisables, lesquels facilitent le déploiement rapide de personnels en cas de crise ou d’incidents critiques, ainsi que la création, la reconfiguration ou la fermeture d’entités.
Dans le domaine technologique, le Secrétaire général adjoint a expliqué que le DOS s’appuie sur des données pour renforcer les services d’évaluation et de conseil dans l’ensemble des missions. Il soutient également leur transformation numérique, notamment en matière de lutte contre la désinformation, tout en renforçant les capacités locales. Ainsi, en Iraq, le Département offre un appui à l’Équipe d’enquêteurs des Nations Unies chargée de concourir à amener Daech/État islamique d’Iraq et du Levant à répondre de ses crimes. De plus, toutes les missions disposent désormais d’une évacuation sanitaire primaire (EVASAN) actualisée, et un système d’accréditation systématique a été mis en place afin d’associer les capacités des professionnels de la santé aux services de soutien médical sur le terrain. M. Khare a ajouté que des formations en ligne sur la santé des femmes sont désormais obligatoires pour le personnel médical de terrain. Le Département fournit par ailleurs 8 avions à 6 missions politiques spéciales, ainsi que 22 autres avions affectés au Bureau d’appui des Nations Unies en Somalie (BANUS), soit 22% de sa flotte mondiale de 138 appareils.
Poursuivant, M. Khare a indiqué que le Département continue de faciliter un appui durable et multidimensionnel aux missions politiques spéciales en renforçant simultanément la cohérence stratégique avec les équipes de pays des Nations Unies. Il collabore également avec d’autres partenaires, tels que l’Union africaine. Enfin, s’agissant de la gestion environnementale, il a noté que le DOS suit de près la performance environnementale des missions politiques spéciales en Iraq, en Afghanistan, en Colombie et en Libye.
Au nom du Mouvement des pays non alignés, Mme MOUNA OUAZZANI CHAHDI (Maroc) s’est dite déterminée à soutenir les efforts visant à améliorer l’efficacité des missions politiques spéciales et à renforcer leur capacité à mettre en œuvre les tâches qui leur sont confiées. Elle a rappelé à cet égard le rôle primordial du Conseil de sécurité dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, et réaffirmé que les principes d’impartialité, de consentement des parties et d’appropriation nationale sont essentiels à la réussite des transitions.
Dans la foulée de la présentation, en juillet dernier, de la note d’orientation par le Secrétaire général, le Mouvement des pays non alignés souligne l’importance d’inclure les missions spéciales dans les discussions des États Membres concernant le Nouvel Agenda pour la paix. Le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale doivent par ailleurs adopter des mandats réalisables, a fait valoir la déléguée, fondés sur une évaluation objective et assortis de ressources appropriées pour toutes les composantes des missions. Une plus grande cohérence entre les mandats et les ressources est à ses yeux primordiale, d’autant plus que les besoins financiers des missions ne cessent d’augmenter. À cet égard, la représentante a réitéré l’appel du Mouvement pour que les missions politiques spéciales soient financées selon les mêmes critères et mécanismes que les opérations de maintien de la paix, y compris la création d’un compte distinct. Elle a en outre insisté sur la nécessité d’améliorer la transparence, la représentation géographique et la représentation des femmes dans les missions politiques spéciales sur le terrain.
Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. ARRMANATHA CHRISTIAWAN NASIR (Indonésie) s’est félicité du dernier rapport du Secrétaire général de l’ONU sur les missions politiques spéciales, observant qu’il s’agit d’un outil souple qui peut prendre diverses formes, de l’Envoyé spécial aux bureaux régionaux. Une flexibilité qui leur permet d’atteindre leur objectif de maintien de la paix et de prévention des causes des conflits, a-t-il estimé. Il a jugé nécessaire que les pays concernés s’approprient pleinement les processus, insistant sur l’absence de solution unique et préconçue. Le délégué a préconisé une approche qui tienne compte des particularités de chaque pays en respectant leur souveraineté nationale. De même, il a fait remarquer l’importance de la bonne coordination entre les missions, l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales. À ce titre, il a plaidé pour le renforcement de la coopération avec les pays des régions concernées, conformément au Programme commun du Secrétaire général. Enfin, il a rappelé son soutien à la participation des femmes à toutes les étapes des processus de paix.
Mme OLIVEIRA (Canada) qui s’exprimait aussi au nom des délégations de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande (groupe CANZ), a remarqué que les missions politiques spéciales sont confrontées à des défis qui exigent des réponses collectives, arguant que des ressources humaines et financières adéquates, des déploiements rapides et un soutien politique inébranlable sont essentiels au succès de ces missions. Rappelant aux États Membres et à l’ONU leur responsabilité partagée pour fournir au personnel de ces missions un soutien adéquat, notamment en matière de santé mentale et sur le plan psychosocial, ce qui peut affecter la performance des missions, elle leur a demandé d’honorer leurs obligations financières afin de permettre aux missions de remplir efficacement leur mandat, en particulier dans des environnements difficiles.
Attachée à une plus forte intégration de la perspective sexospécifique, et du Programme pour les femmes et la paix et la sécurité, dans le travail de toutes les missions politiques spéciales de l’ONU, la déléguée a notamment demandé la nomination d’un plus grand nombre de dirigeantes dans ces missions –et bien sûr l’implication de femmes à tous les niveaux, y compris parmi les Envoyés spéciaux des Nations Unies, dans les médiations et les initiatives de dialogue. Pour les pays du groupe CANZ, il faut également que les missions soient plus impliquées auprès des jeunes. Ce sont des acteurs puissants pour résoudre et prévenir les conflits, a argué la représentante. Elle a assuré le soutien du groupe CANZ au rôle des missions politiques spéciales dans la promotion de la protection des civils et dans la protection des droits humains. Ces missions contribuent à la surveillance et à la sensibilisation des droits humains, et s’engagent sur les problèmes de protection, a-t-elle noté, estimant que ces efforts sont essentiels à une paix durable.
M. TOUFIQ ISLAM SHATIL (Bangladesh) a reconnu que l’action et le plaidoyer des Nations Unies pour la paix par le biais de la diplomatie dépendent fortement de l’efficacité et du succès des missions politiques spéciales. Rappelant que le Bangladesh a soutenu dès le départ ces missions, le représentant a notamment cité sa coopération avec l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Myanmar. La mise en œuvre effective du mandat de cet Envoyé spécial est essentielle pour un retour durable des Rohingya dans leur pays d’origine, le Myanmar, a-t-il argué, avant de demander que ce poste vacant soit pourvu dans les plus brefs délais.
Il a insisté sur l’importance de mandats clairs, crédibles, séquencés et réalisables pour les missions politiques spéciales et sur la nécessité de leur garantir les ressources nécessaires à l’exécution de ces mandats. Compte tenu du rôle essentiel des organisations régionales et sous-régionales dans la prévention des conflits, la médiation et le soutien au relèvement, le représentant a encouragé une coordination et coopération étroite entre les missions politiques spéciales et ses instances régionales, notamment l’ASEAN. Il s’est dit encouragé de constater l’engagement croissant des missions politiques spéciales auprès de la Commission de consolidation de la paix (CCP), préconisant aussi une implication plus grande de ces missions politiques spéciales auprès des femmes et des jeunes dans les pays où elles opèrent. Sur le financement adéquat de ces missions, le délégué a soutenu la proposition du Secrétaire général visant à renforcer l’allocation des ressources pour les missions politiques spéciales en 2024, en faisant référence à la résolution 76/305 de l’Assemblée générale sur le financement de la consolidation de la paix.
Mme SARAH AHMED AHMED AL-MASHEHARI (Yémen) a déclaré que l’objectif principal des missions politiques spéciales consiste à renforcer les capacités des États à assurer la paix tout en respectant la souveraineté et en établissant un lien entre sécurité nationale et développement. Le Nouvel Agenda pour la paix est selon elle l’occasion pour les États Membres de renforcer le rôle de ces missions et de consolider la paix selon le principe de l’appropriation nationale, tout en renforçant la coordination entre les missions politiques et les institutions des Nations Unies. La représentante a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur d’un cessez-le-feu global et du lancement d’un processus politique dirigé par les Yéménites, sous la houlette de l’ONU. Elle s’est félicitée à cet égard des efforts régionaux et internationaux visant à parvenir à la paix et la stabilité au Yémen. Elle a appelé l’Envoyé spécial du Secrétaire général à poursuivre son travail et à contribuer aux efforts de l’ONU et de la région afin de parvenir à un règlement politique susceptible de mener à une paix globale, conformément aux accords convenus. Dans ce contexte, elle a jugé nécessaire de soutenir le travail de la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH). La représentante a appelé à renforcer la coordination avec le Gouvernement yéménite afin de faire pression sur les houthistes pour qu’ils cessent d’utiliser de façon aléatoire les munitions et les mines non explosées.
M. WAEL MAHMOUD ABDELAZIZ ELDAHSHAN (Égypte) a estimé que les missions politiques spéciales sont importantes pour éradiquer les causes profondes des conflits. Pour que leurs efforts aboutissent, il a appelé les agences onusiennes à travailler à leurs côtés. Il a également insisté sur les ressources financières et humaines nécessaires aux missions, évoquant la résolution 76/305 de l’Assemblée générale qui incite à fournir un tel soutien, notamment dans les périodes de transition. Il a lancé un appel en vue de réformer leur financement, rappelant qu’elles ne dépendent actuellement pas du budget ordinaire, et préconisant la mise en place d’un compte autonome pour faire face à la prolifération des missions et la complexité des contextes dans lesquels elles opèrent. Enfin, il a estimé qu’il faut leur accorder une importance particulière dans le cadre des discussions autour du Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général de l’ONU.
M. LUIS UGARELLI (Pérou) a fait valoir que les efforts pour assurer la paix et la stabilité dans un contexte international dégradé doivent être soutenus par des missions politiques spéciales stratégiques et renforcées. Celles-ci devraient travailler sur la base des priorités des acteurs impliqués dans le maintien de la paix, en mettant en œuvre des stratégies globales susceptibles de favoriser le relèvement après les conflits. Il est essentiel à cette fin que les missions politiques spéciales accompagnent les processus politiques visant à traiter les causes profondes des conflits, telles que la pauvreté, les inégalités et l’exclusion. Pour y parvenir, le représentant a préconisé un financement suffisant, prévisible et durable. Il est tout aussi essentiel à ses yeux d’investir dans la prévention plutôt que dans les seules mesures réactives, en apportant des réponses immédiates à toutes les formes de violence. Le représentant a réaffirmé l’importance que les missions identifient, de manière objective et ciblée, les causes profondes des conflits, en coordination avec les autorités de l’État d’accueil. Pour le délégué, la diplomatie préventive et la médiation doivent donner la priorité aux projets visant à protéger la population civile, le désarmement, la démobilisation et la réintégration.
M. ADRIAN DOMINIK HAURI (Suisse) a salué les 75 ans des missions politiques spéciales, faisant remarquer qu’elles remplissent leur mandat dans des contextes toujours plus difficiles. À propos de leur rôle indispensable dans la prévention des conflits et la consolidation de la paix, il a cité l’élargissement du mandat de la mission en Colombie, portant notamment sur la surveillance du cessez-le-feu avec l’Armée de libération nationale. La coopération étroite de cette mission avec le Gouvernement colombien lui permet de nourrir le dialogue, a-t-il estimé. Le représentant a également invité à la réflexion autour du rôle et de l’avenir des missions de paix, évoquant le retrait de deux grandes opérations de ce genre au Mali et en République démocratique du Congo. Il a rappelé qu’en tant que porte-plume avec le Ghana pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel au Conseil de sécurité, son pays se tient prêt à contribuer aux réflexions sur ce sujet, y compris sur l’éventuel transfert de tâches politiques à l’UNOWAS. Enfin, il a préconisé que chaque mission soit aménagée selon les spécificités du contexte local et chargée d’un mandat clair et réaliste, rappelant l’importance du partenariat avec les gouvernements ainsi que les organisations régionales et sous-régionales, mais insistant aussi sur la nécessaire inclusion de la société civile, en particulier des femmes et des minorités.
M. AL-HARITH IDRISS AL-HARITH MOHAMED (Soudan) a déploré le manque de financement dont souffrent les missions politiques spéciales pour concrétiser leurs mandats, faire face aux changements de circonstances ou transférer leurs responsabilités aux pays. Il a partagé une série de leçons tirées de l’expérience du Soudan avec une telle mission. En premier lieu, il a insisté sur l’importance de consultations avec les pays concernés avant que soient nommés les chefs de mission, mais aussi pour tenir compte des objectifs stratégiques des pays hôtes. Le délégué a également averti contre les répercussions d’une politisation des missions, estimant que la consolidation de la paix doit rester leur priorité absolue, et plaidant pour un refus des offres des pays donateurs. Enfin, il a considéré que les missions doivent agir conformément aux plans nationaux et être déployées dans le respect des lois, des traditions et de la culture locales.
M. HASANAIN HADI HASAN AL-DAHLAKI (Iraq) a souligné le rôle de la diplomatie dans la prévention et le règlement des conflits dans un monde marqué par des tensions croissantes, que peuvent jouer les missions politiques spéciales. Il a évoqué l’expérience de l’Iraq où l’une de ces missions a été déployée, la Mission d’assistance des Nations Unies pour l’Iraq (MANUI). Il s’est dit reconnaissant aux efforts de cette Mission, avant de rappeler qu’elles doivent respecter la Charte des Nations Unies et garantir un dialogue avec le Gouvernement du pays hôte, y compris lorsqu’il s’agit des rapports trimestriels présentés au Conseil de sécurité. Mettant en avant le rôle essentiel des missions politiques spéciales dans la diplomatie préventive, le délégué a toutefois souligné les défis auxquels elles sont confrontées, allant du manque de ressources aux obstacles politiques et aux dynamiques changeantes des conflits, avant d’appeler au renforcement de leur neutralité et de la confiance entre les parties.
M. NITISH BIRDI (Inde) a appelé à mettre en œuvre le Programme pour les femmes et la paix et la sécurité, priorité stratégique des missions politiques spéciales. Il en existe aujourd’hui 41, a-t-il noté, dotées de différents mandats et de structures variées, et évoluant pour la plupart dans des contextes sécuritaires complexes caractérisés par des menaces transnationales telles que la criminalité transnationale organisée. Le représentant s’est inquiété des menaces intersectionnelles telles que les changements climatiques, la hausse des inégalités et la militarisation des nouvelles technologies du fait de la désinformation et des discours de haine, qui atteignent des niveaux sans précédent. À cet égard, il a insisté sur la nécessité pour les missions de respecter les principes d’impartialité, de souveraineté des États, de consentement des parties et d’appropriation nationale. Il a également prôné la mise en place d’un processus consultatif transparent dès le début de la mission et pendant la formulation du mandat. Enfin, le délégué a invité les délégations à réfléchir à la fragmentation budgétaire des missions politiques spéciales, qui ne suit pas le cycle ordinaire de l’ONU, en encourageant à assurer la transparence de leurs processus budgétaires.
Mme EGRISELDA ARACELY GONZÁLEZ LÓPEZ (El Salvador) a rappelé que son pays a déjà accueilli une mission politique spéciale et déploie désormais des soldats de la paix, tout en restant engagé à améliorer leur efficacité et à renforcer leurs capacités. Il est essentiel à ses yeux que les mandats des missions reposent sur des analyses objectives et soient définis de manière claire, réaliste et avec une vision à long terme. De même, les transitions et reconfigurations de la présence de l’ONU dans un pays donné constituent des processus clefs qui doivent être planifiés et financés de manière à garantir la durabilité des résultats. Considérant l’importance du rôle joué par les femmes et les jeunes dans la prévention des conflits, la représentante a soutenu les efforts des missions politiques spéciales visant à promouvoir leur participation significative et égale, comme le recommande le Nouvel Agenda pour la paix. De plus, la représentation géographique des missions devrait être élargie. Enfin, la déléguée a préconisé le renforcement des synergies entre l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité, la Commission de consolidation de la paix, tout en soulignant les efforts de cette dernière pour mobiliser le soutien politique et les ressources en faveur des priorités nationales de consolidation de la paix dans les pays où des missions ont été déployées.
Mme LEONOR ZALABATA TORRES (Colombie) a expliqué que, sur la base de sa propre expérience, la Colombie est convaincue que les tâches accomplies par les missions politiques spéciales sont un exemple tangible de ce qu’il est possible d’accomplir lorsque les réalités particulières du terrain, l’État de droit et le renforcement des institutions démocratiques sont pris en compte. Elle a saisi cette occasion pour réaffirmer l’engagement indéfectible du Gouvernement colombien à mettre en œuvre l’Accord de paix signé en 2016. La récente réunion du Conseil de sécurité sur la Colombie, au cours de laquelle le mandat de la Mission de vérification a été renouvelé à l’unanimité, est un signe sans équivoque de l’engagement de ses membres en faveur de la paix en Colombie, s’est-elle félicitée, en remerciant le Secrétaire général pour le travail efficace réalisé par l’équipe qu’il a déployée sur place, ainsi que le Bureau de la Secrétaire générale adjointe, Mme Rosemary Di Carlo, et les États qui fournissent leur personnel, afin d’assurer la bonne exécution du mandat confié à cette Mission par le Conseil de sécurité. La déléguée a confirmé que le Gouvernement du Président Gustavo Petro a un mandat clair pour consolider la paix, en concentrant ses actions sur la réduction des inégalités, l’inclusion des femmes, la tolérance zéro pour la corruption et l’organisation de dialogues régionaux inclusifs pour les autorités locales et les communautés afin de contribuer à la formulation des politiques, parmi d’autres facteurs déterminants.
M. CHRISTOPHER PIERRE (Haïti) a encouragé les missions politiques spéciales à collaborer étroitement avec les États Membres pour renforcer la protection des droits humains et l’état de droit. Il est également essentiel d’assurer une participation significative des femmes et des jeunes aux processus politiques et de paix. Le délégué s’est félicité de l’organisation, en juillet dernier, du dixième dialogue interactif sur les missions politiques spéciales par le Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix (DPPA). De même, la visite le même mois du Secrétaire général en Haïti a été selon lui le symbole de la solidarité internationale, à un moment où son pays est confronté à des défis multidimensionnels de grande ampleur. Face à une situation sécuritaire préoccupante du fait de la violence des gangs armés, le représentant a assuré que le Gouvernement haïtien se mobilise pour rétablir l’ordre. Considérant que la sécurité est une condition essentielle non seulement à la liberté de mouvement, mais également à la tenue d’élections générales et au rétablissement des institutions démocratiques, il s’est félicité de l’adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 2699 (2023) autorisant le déploiement d’une mission multinationale d’appui à la Police nationale d’Haïti. Le représentant a également pris note du renouvellement des régimes des sanctions sur Haïti, estimant qu’elles constituent un outil susceptible de contribuer à apaiser le climat sociopolitique du pays. Toutefois, a-t-il prévenu, pour que les missions politiques spéciales, notamment le Bureau intégré des Nations-Unies en Haïti (BINUH), soient en mesure de s’acquitter de leurs mandats, il est crucial qu’elles soient dotées de ressources appropriées.
Mme KAREN JEAN BAIMARRO (Sierra Leone) a salué le rôle important des missions politiques spéciales dans le domaine de la diplomatie préventive, mais aussi pour promouvoir les droits humains et favoriser la participation des femmes, des jeunes et des groupes marginalisés dans les processus de paix. En dépit de l’augmentation du nombre de conflits, les missions continuent de contribuer significativement à la paix et à la sécurité internationales, a-t-elle estimé. Elle s’est ainsi félicitée du travail de l’agence de l’ONU en Sierra Leone. Cette dernière, a-t-elle considéré, contribue au partenariat entre les Nations Unies, le pays et les organisations régionales et sous-régionales, ainsi que pour restaurer l’ordre constitutionnel à la suite des changements de Gouvernement.
Son pays accueille favorablement le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général en ce qui concerne les missions politiques spéciales, a-t-elle poursuivi, soulignant que les États Membres doivent investir dans la diplomatie préventive pour s’attaquer aux causes sous-jacentes des conflits et de la violence. Enfin, elle a appelé à la réflexion concernant la sécurité du personnel des missions et plaidé en faveur d’un financement suffisant.
M. MOHAMMED WALID ALEM (Algérie) a constaté une montée des tensions sans précédent dans de nombreuses régions du monde, ce qui nécessite l’intensification des efforts diplomatiques pour rapprocher les points de vue des parties, en offrant une véritable plateforme de négociations. Les changements anticonstitutionnels de gouvernement, les tensions interétatiques, les transitions fragiles et l’échec des processus de paix, pour n’en citer que quelques-uns, caractérisent l’environnement dans lequel opèrent les missions politiques spéciales, a-t-il relevé. Par conséquent, il est essentiel d’intensifier leur engagement avec les différents acteurs afin de promouvoir les processus de paix. L’architecture sophistiquée, « et dans une certaine mesure fragmentée », de la paix et de la sécurité, tant sur le plan mondial que régional, nécessite des échanges de vues réguliers, inclusifs et articulés afin de tirer parti des réussites, d’évaluer les lacunes et de parvenir à une utilisation optimale des outils de diplomatie préventive à notre disposition, a estimé le délégué.
Il a ensuite plaidé en faveur de mandats qui répondent aux besoins sur le terrain, orientés vers la fourniture d’un soutien aux efforts déployés par les gouvernements hôtes. Soulignant le rôle crucial des missions politiques spéciales dans la prévention et la gestion des conflits, la consolidation de la paix et l’instauration d’une paix durable, le représentant a estimé que c’est sans doute lié à la nature flexible et réactive de ces missions, y voyant un atout important leur permettant de s’adapter à des situations imprévisibles et à des circonstances opérationnelles changeantes. Toutefois, a-t-il souligné, les missions politiques spéciales doivent être dotées de ressources adéquates pour remplir leur mandat. Pour le délégué, les partenariats régionaux restent essentiels à la bonne mise en œuvre des mandats confiés aux missions politiques spéciales et les outils existants à l’échelle régionale ont beaucoup à gagner d’une appropriation consolidée. À cette fin, il a préconisé l’élaboration de mécanismes visant à développer une évaluation commune des risques et des menaces pour la paix.
Mme YURIE MITSUI (Japon) a rappelé que cette année marque le soixante-quinzième anniversaire de la création de la première mission politique spéciale, saluant l’évolution de ce type d’initiatives en réponse à la nature changeante des conflits. Selon elle, les missions revêtent une fonction de diplomatie préventive essentielle pour éviter la résurgence des conflits et consolider la paix. Dans ce cadre, la représentante a préconisé la priorisation de certains éléments communs à toutes les missions politiques spéciales. En premier lieu, elle a appelé au renforcement de la coopération entre les missions et leurs partenaires, citant notamment les agences, les programmes des Nations Unies, les institutions financières internationales ou la société civile. À ce titre, elle a observé que la consolidation de la paix prend du temps et requiert les efforts de la part des diverses parties prenantes. En second lieu, elle a demandé que soit garantie la participation significative et égale des femmes dans les processus de paix, citant en exemple le travail accompli sur ce point par la MANUSOM et la Mission de vérification en Colombie. Enfin, elle a mentionné l’importance du soutien politique des États Membres et du Conseil de sécurité, rappelant que c’est ce dernier qui donne mandat aux missions.
Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a déclaré que les missions politiques spéciales jouent un rôle important en tant qu’outil flexible permettant de soutenir les États dans leurs efforts de maintien de la paix et d’empêcher le glissement dans une nouvelle phase de conflit. L’efficacité de telles missions pour soutenir les efforts nationaux dépend directement d’une coopération étroite avec le pays hôte, a-t-elle noté, en s’appuyant sur les priorités nationales et en respectant les principes de responsabilité nationale et de souveraineté des États. Nous devons également exploiter le potentiel des organisations régionales et sous-régionales, dont les approches coïncident avec celles de l’ONU. Or, a-t-elle ajouté, les tâches des missions spéciales sont devenues de plus en plus complexes, et englobent souvent la rédaction de Lois fondamentales, la tenue d’élections, la protection des droits humains ou encore la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité. Dans ces conditions, la représentante a appelé à ne pas oublier les prérogatives des différents organes de l’Organisation, en s’efforçant d’éviter les doublons. À cette fin, la représentante a déclaré que les mandats des missions politiques spéciales doivent être clairs et réalisables. Alors que le Conseil de sécurité est chargé d’examiner les différends internationaux et les situations susceptibles de conduire à des frictions internationales, la déléguée a souligné que les groupes d’experts associés aux comités des sanctions sont aussi, essentiellement, des missions politiques spéciales. Elle a donc préconisé une plus grande intégration entre les missions politiques spéciales et les opérations de maintien de la paix, sur la base des réalités spécifiques sur le terrain, comme le suggère le Nouvel Agenda pour la paix.
M. MARTHINUS CHRISTOFFEL JOHANNES VAN SCHALKWYK (Afrique du Sud) a rappelé que le monde a changé, alors même que l’ONU célèbre le soixante-quinzième anniversaire des missions politiques spéciales. Il s’est fait l’écho du Secrétaire général de l’ONU, selon qui les conflits actuels sont multidimensionnels, marqués par l’exclusion, les inégalités ou les flux de réfugiés, et aggravés par les changements climatiques et l’utilisation malveillante des nouvelles technologies. Dans ce cadre, le délégué a jugé nécessaire de garantir que les missions politiques spéciales demeurent adaptées à leur objectif, préconisant un examen détaillé. Il a appelé de ses vœux la collaboration de l’Assemblée générale, du Conseil de sécurité et de la Commission de consolidation de la paix. Le résultat des consultations en cours, a-t-il poursuivi, confirme l’impératif de mandats bien définis, dotés de ressources adéquates et respectueux de la souveraineté des États au sein desquels elles opèrent.
Le représentant a considéré que la flexibilité et l’adaptabilité des missions politiques spéciales en font un instrument inestimable de résolution des conflits. À ce titre, il a notamment évoqué la coopération des missions avec les organisations régionales. Se réjouissant que les missions figurent en bonne place dans le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, il a estimé qu’elles doivent continuer à être utilisées comme plateforme pour favoriser la participation des femmes aux processus de paix, jugeant cette condition indispensable au développement d’une démocratie inclusive et à la promotion de la bonne gouvernance. Il a également appelé les missions à mobiliser les jeunes. Enfin, il a souligné la nécessité d’un financement adéquat, prévisible et durable.
M. FRANCISCO JOSÉ DA CRUZ (Angola) a réaffirmé le rôle central des missions politiques spéciales dans la promotion de la diplomatie préventive et dans la recherche de solutions à un conflit ou à une situation spécifique. Il a rappelé le rôle joué par l’Angola dans la prévention, la gestion et le règlement des conflits, ainsi que dans la promotion de la paix et de la démocratie en Afrique, en particulier dans la région des Grands Lacs, grâce à des initiatives diplomatiques visant à renforcer le dialogue politique permanent, à instaurer la confiance mutuelle et la coopération, afin de favoriser une croissance économique inclusive, la prospérité et le bien commun, en particulier en tant que Président en exercice de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL) et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC).
Prenant note des efforts déployés par les missions politiques spéciales de l’ONU pour améliorer l’expertise et l’efficacité, la transparence, la responsabilité, la représentation géographique, la prise en compte de la dimension de genre et la participation égale des femmes et des jeunes, il a également encouragé l’inclusion et la participation significative des jeunes et des femmes à ces missions et des partenariats inclusifs avec les organisations régionales, sous-régionales et d’autres parties prenantes concernées. Le représentant a notamment encouragé la coopération entre les Nations Unies et l’Union africaine (UA) en vue d’établir des missions politiques spéciales conjointes pour traiter les questions de paix et de sécurité sur le continent. Il est indéniable que les missions politiques spéciales contribuent à créer un environnement propice au dialogue politique et à la compréhension, a-t-il concédé, demandant par conséquent qu’elles disposent des outils nécessaires et des ressources adéquates pour mettre en œuvre efficacement leur mandat et favoriser les solutions politiques durables nécessaires pour garantir la protection des populations.
Mme MOHAMED ESSA SAIF BOAUSAIBAH AL-ALI (Émirats arabes unis) a déclaré que les missions politiques spéciales constituent un outil fondamental pour assurer la paix et la croissance économique et sociale. En tant que membre du Conseil de sécurité au cours des deux dernières années, la délégation a pu constater la valeur ajoutée qu’apportent ces missions pour améliorer la sécurité et faire avancer les processus politiques. Selon la représentante, des missions politiques spéciales devraient être mises en place pour s’attaquer aux discours de haine et à la désinformation. Toutefois, ces procédés doivent tenir compte de la situation individuelle de chaque État, y compris les aspects historiques et géographiques propres à chaque pays, avec un calendrier de début et de fin. En 2021, les Émirats arabes unis et le Département des affaires politiques (DAP) ont conclu un accord de financement afin d’aider les États Membres dans le maintien de la paix et la prévention des conflits, et pour assurer la participation pleine et égale des femmes. Afin d’améliorer l’efficacité des missions politiques spéciales à l’avenir, la représentante a appelé à mener des évaluations afin d’identifier les éléments qui doivent être revus.
Décision sur un projet de résolution (A/C.4/78/L.9)
En entérinant ce projet de résolution, adopté sans vote, l’Assemblée générale prendrait acte du rapport du Secrétaire général sur cette question et le prierait d’instaurer un dialogue régulier, interactif et ouvert à toutes les parties intéressées. Elle respecterait le cadre des mandats confiés aux missions politiques spéciales, et soulignerait le rôle qu’elle-même joue dans les débats tenus sur les questions de politique générale intéressant les missions politiques spéciales. L’Assemblée encouragerait en outre le renforcement de la coordination, de la cohérence et de la coopération entre elle-même, le Conseil de sécurité et la Commission de consolidation de la paix, et inviterait à cet effet le Conseil à continuer de solliciter les conseils de la Commission. Par ce texte, l’Assemblée générale engagerait encore les missions politiques spéciales à continuer de forger des partenariats inclusifs avec des organisations régionales et sous-régionales et d’autres parties prenantes, et à collaborer avec les équipes de pays de l’ONU afin de favoriser la cohérence et la coordination.