Soixante-dix-septième session,
43e & 44e séances plénières, matin & après-midi
AG/J/3682

La Sixième Commission entend un exposé du Secrétariat sur la recommandation de la CDI en faveur d’une convention sur les crimes contre l’humanité

Au quatrième jour de sa reprise de session, la Sixième Commission (affaires juridiques) a entendu un exposé exhaustif de M. Arnold Pronto, représentant la Division de la codification du Bureau des affaires juridiques du Secrétariat, sur la recommandation de la Commission du droit international (CDI) concernant l’élaboration d’une convention fondée sur son projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité. 

Les délégations ont également examiné le cinquième et dernier groupe thématique dudit projet relatif aux garanties (articles 5, 11 et 12).  Si elles ont généralement insisté sur la nécessité de répondre aux besoins des victimes de crimes contre l’humanité, les délégations ont aussi débattu du principe de non-refoulement et du droit d’obtenir réparation. 

M. Pronto a d’abord rappelé aux États que le pouvoir de la CDI de formuler des recommandations vient de son statut, adopté en 1947, par l’Assemblée générale, laquelle lui a confié la mission « d’encourager le développement progressif du droit international et sa codification », comme le prévoit la Charte des Nations Unies.  Les organes subsidiaires de l’Assemblée générale ont pour fonction de faire des recommandations à celle-ci, or, dans le cas de la CDI, il s’agit, a précisé M. Pronto, d’une véritable obligation, son travail sur un texte particulier étant techniquement incomplet sans une recommandation d’action.

Aux questions soulevées pendant les discussions sur le caractère contraignant des recommandations de la CDI, Arnold Pronto a répondu que si elles ne sont pas statutairement contraignantes, elles n’en demeurent pas moins « très importantes », car elles font partie du mécanisme mis en place pour concrétiser les objectifs de la Charte.  « Toute recommandation de la CDI est donc déterminante dans le développement du droit international contemporain. »  M. Pronto a en outre assuré qu’en dernière analyse la question d’accepter ou non une recommandation de la Commission reste « entièrement entre les mains des États Membres ».

Après l’exposé du représentant du Bureau des affaires juridiques, le Mexique a appelé à la poursuite du travail d’amélioration du dialogue entre la CDI et la Sixième Commission, le Portugal lui emboîtant le pas en suggérant que, l’an prochain, la reprise de session se concentre sur l’étude de points spécifiques, sachant que la Sixième Commission doit se concentrer sur l’examen particulièrement prenant du rapport de la CDI pendant sa session ordinaire.  « Le travail des délégations consiste à “faire” le droit international, avec la collaboration de la CDI même si les relations entre les deux organes mériteraient d’être améliorées », a de son côté déclaré la Colombie. 

Sur le devenir du projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, M. Pronto a expliqué que toute décision de donner suite à la recommandation y relative de la CDI doit être reflétée dans une résolution adoptée par l’Assemblée générale.  Il a par conséquent renvoyé les délégations au rapport que le Secrétariat préparera pour la quatre-vingtième session de l’Assemblée.

En début de séance, l’Union européenne a indiqué, au sujet du projet d’article 5, que le principe de non-refoulement constitue une protection essentielle en vertu du droit des droits de l’homme et des réfugiés, et du droit international humanitaire et coutumier.  En tant que tel, ce principe n’est pas nouveau, mais elle s’est félicitée de le voir explicitement mentionné dans le document à l’étude.  Concernant le projet d’article 11, la représentante a noté que les États membres de l’UE attachent une grande importance au droit de l’auteur présumé d’une infraction à un traitement équitable. 

Pour sa part, le Cameroun a considéré que le libellé portant sur l’application du principe de non-refoulement pourrait, en l’état, ouvrir la voie à tous les abus et à l’insécurité juridique, « du moment où il amène l’État requis à apprécier et à qualifier des faits qui se déroulent en territoire étranger ».  La Chine a fait valoir qu’il n’existe pas de consensus sur l’application de ce principe en cas de commission de crimes contre l’humanité, souhaitant que la Sixième Commission continue de débattre plus avant des dispositions proposées.  La Russie est allée plus loin, arguant que le projet d’article 5 sur le non-refoulement ne constitue pas un élément du droit pénal international, mais découle plutôt de la protection des droits humains.  Son représentant n’a vu « aucune justification » à l’inclusion de cet article. 

« Il faut répondre aux besoins des victimes et des survivants, car l’application du principe de responsabilité peut être à leurs yeux plus importante encore que la procédure pénale », a plaidé le Royaume-Uni.  Fort de cette conviction, son délégué a proposé à la CDI qu’elle tienne des consultations avec les survivants de crimes contre l’humanité pour examiner si le libellé sur les réparations pourrait être renforcé.  L’Iran a déclaré concernant la question des réparations, que seules les juridictions où le crime a été commis sont compétentes pour examiner une demande de réparation.  « Pour indemniser les victimes présumées d’un crime contre l’humanité, ces autorités compétentes doivent en outre respecter strictement le principe de l’immunité des États et de leurs biens », a avancé le représentant pour qui ce principe doit être reflété dans l’article 12.

La Colombie et l’Argentine ont souhaité l’insertion d’une définition des victimes, afin d’éviter toute fragmentation du droit international.  Pour le Mexique, il est important d’insister sur l’importance de la santé mentale des victimes ou témoins de crimes contre l’humanité.  Sri Lanka a plaidé pour que les réparations prennent plusieurs formes et permettent in fine aux victimes « de recouvrer leur humanité ». 

La Sixième Commission se réunira demain, vendredi 14 avril, à 15 heures, pour achever les travaux de sa reprise de session. 

EXAMEN DU PROJET D’ARTICLES SUR LA PRÉVENTION ET LA RÉPRESSION DES CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL (CDI) 

Groupe thématique 4: mesures internationales (articles 13, 14 et 15 et annexe)

Déclaration (suite et fin)

M. NOAM CAPPON (Israël) a déclaré que les questions d’extradition et d’entraide judiciaire font l’objet de nombreux traités bilatéraux et multilatéraux, en plus d’être régies par le droit international coutumier.  « Nous ne devons donc pas réinventer la roue », a-t-il argué, en plaidant pour conserver l’équilibre fondamental entre les États.  S’agissant des exceptions aux règles d’extradition fondées sur des délits politiques, il a émis des réserves sur la formulation actuelle qui pourrait selon lui présenter des vides juridiques.  Il nous faut veiller à ce qu’on ne puisse pas abuser du projet d’articles et qu’il puisse bénéficier d’un vaste appui des États Membres tout en restant un outil efficace pour prévenir et sanctionner les crimes contre l’humanité, a-t-il conclu.

Groupe thématique 5: garanties (articles 5, 11 et 12)

Déclarations

Mme SIMONA POPAN, de l’Union européenne, a indiqué au sujet du projet d’article 5 que le principe de non-refoulement constitue une protection essentielle en vertu des droits de l’homme, des droits des réfugiés et du droit humanitaire international et coutumier.  En tant que tel, ce principe n’est pas nouveau ni spécifique au projet d’articles sur les crimes contre l’humanité, mais nous nous félicitons néanmoins qu’il soit explicitement mentionné dans le document, a-t-elle dit.  Concernant le projet d’article 11, la représentante a noté que les États membres de l’UE attachent une grande importance au droit à un procès équitable et à une procédure régulière, qui sont particulièrement pertinents dans le cadre des procédures pénales.  Nous nous félicitons donc vivement d’un projet d’article sur cette importante question, a-t-elle appuyé, ajoutant qu’au niveau de l’UE, le droit des suspects et des personnes poursuivies à un procès équitable est inscrit comme principe général dans les constitutions de ses États membres et en vertu de l’article 6 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.  Cela garantit que toute personne soupçonnée ou accusée dans le cadre d’une procédure pénale est innocente jusqu’à preuve du contraire, a encore expliqué Mme Popan.  Enfin, pour ce qui est du projet d’article 12, elle a estimé que le point de vue des victimes doit être pris en compte au stade approprié de la procédure pénale.  Toutefois, la portée de ce texte pourrait être plus ambitieuse en incluant une disposition distincte sur les droits de l’enfant.

Mme VIRPI LAUKKANEN (Finlande), s’exprimant au nom des pays nordiques, a rappelé que le principe de non-refoulement prévu au projet d’article 5, essentiel en droit international, est présent dans de nombreux instruments de droits de l’homme et ancré dans le droit coutumier.  La représentante a ensuite rappelé que les pays nordiques accordent beaucoup d’importance à la régularité de la procédure et à la protection des droits de l’accusé, garanties par le projet d’article 11.  Soulignant que les mesures visant la protection des victimes et témoins figuraient dans de nombreuses conventions de droits de l’homme, elle s’est félicitée que le projet d’article 12 reflète fidèlement l’évolution du droit en la matière, et notamment les différentes formes possibles de réparation.  Il existe toutefois d’autres droits pour les victimes, comme celui à la vérité, a-t-elle ajouté. 

M. AHMED ABDELAZIZ AHMED ELGHARIB (Égypte) a convenu, au sujet du principe de non-refoulement, qu’« aucun État ne peut expulser, refouler, remettre ou extrader une personne vers un autre État où il existe des motifs sérieux de croire qu’elle risquerait d’être victime d’un crime contre l’humanité ».  Cependant, il n’a pas accepté l’approche employée à l’article 5(2) pour déterminer si de tels motifs existent ou non.  Pour sa délégation, alors que des dispositions similaires sont prévues dans la Convention de 1984 contre la torture et la Convention internationale de 2006 pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, cette approche est particulièrement inadaptée à une éventuelle convention sur les crimes contre l’humanité.  En effet, une telle disposition confond selon lui un crime international atroce avec des violations moins graves, et d’autre part, elle ouvre la porte à la politisation et à la tentative d’imposer l’exercice de la compétence par certains États où l’auteur présumé pourrait être simplement présent aux dépens d’États ayant un lien réel avec le crime allégué.

M. MICHAEL HASENAU (Allemagne) a estimé que le groupe thématique 5 renvoie aux instruments sur les droits humains, notamment le projet d’article 5 sur le non-refoulement qui établit une interdiction fondamentale d’envoyer des personnes vers des États où elles seraient en danger.  En outre, les normes portant sur les droits des témoins et des victimes lors des procédures pénales visées au projet d’article 12 sont à ses yeux nécessaires et feront l’objet de plus amples discussions en vue de l’élaboration d’une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité. 

M. EMIL RUFFER (République tchèque) a salué le projet d’article 5 concernant l’application du principe de non-refoulement, rappelant qu’il se trouvait déjà notamment dans le droit des réfugiés, les Conventions de Genève et les traités relatifs aux droits humains.  Soulignant la nécessité d’interdire l’envoi des personnes dans un pays où elles pourraient être en danger, le représentant a estimé que le projet d’article sert bien cet objectif.  De même, il a estimé que le projet d’article 11 reflète bien les droits et garanties de traitement équitable des auteurs présumés d’infractions énoncés dans les instruments universels et régionaux relatifs aux droits de l’homme. 

Le projet d’article 12 reflète l’attention croissante portée aux victimes dans le cadre de la justice pénale internationale, y compris leur participation à la procédure pénale et la réparation de leurs souffrances, a salué le représentant, qui a appuyé son inclusion dans la future convention.  Tout en jugeant suffisant « à première vue » le projet d’article actuel, le représentant a assuré qu’il écouterait avec intérêt les éventuelles préoccupations des autres délégations, par exemple sur la distinction entre le devoir d’un État de fournir réparation et le devoir de l’auteur de l’infraction de le faire.

Mme AUGISTINA SIMAN (Malte) a estimé que le principe de non-refoulement constitue une protection essentielle en vertu du droit international des droits de l’homme, des réfugiés, humanitaire et coutumier.  Elle a donc appuyé fermement la décision d’inclure dans le projet d’articles l’interdiction d’expulser, de refouler, de remettre ou d’extrader une personne vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risquerait d’être victime d’un crime contre humanité.  La représentante a fait remarquer que le droit à réparation des victimes de crimes contre l’humanité énoncé à l’article 12 sert l’objectif fondamental de répondre au préjudice subi par les victimes par la fourniture d’avantages directs.  Elle a aussi noté qu’il est largement reconnu par de nombreux instruments juridiques au niveau mondial et régional.  Elle a estimé qu’au moment de choisir le type de réparations à accorder, les États devraient adopter une approche axée sur les victimes et placer celles-ci et leurs besoins individuels au centre des procédures de réparation.  Ils devraient donc envisager d’établir un critère minimum qui limite leur pouvoir discrétionnaire en la matière, a-t-elle suggéré.  La représentante a proposé que l’un de ces critères soit la participation des victimes au processus de détermination des réparations.

Mme LUCIA TERESA SOLANO RAMIREZ (Colombie) a considéré que le projet d’article 5 sur le non-refoulement s’entend sans préjudice d’autres obligations similaires découlant de traités ou du droit international coutumier.  Ce projet d’article manque de clarté quant à sa relation avec le paragraphe 11 de l’article 13, selon la représentante.  En ce qui concerne le projet d’article 11 relatif au traitement équitable de l’auteur présumé d’une infraction, elle a estimé que des garanties plus importantes doivent être incluses, tant dans le processus judiciaire que dans la phase d’enquête.  En Amérique latine, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a reconnu à cet effet un large éventail de garanties procédurales pénales et de protection des droits humains, qui mériteraient à ses yeux d’être incluses dans cette disposition.  S’agissant du projet d’article 12 sur la protection des victimes, témoins et autres personnes, la représentante a noté que les réparations envisagées pour des dommages matériels et moraux sont à la fois individuelles et collectives.  Il est vital que les droits des victimes de crimes contre l’humanité soient protégés par un éventuel traité en la matière, a-t-elle argué, puisqu’il s’agit là d’un aspect fondamental de leur prévention.  À cet égard, elle a évoqué la possibilité que le projet d’article 12 consacre une définition de la victime similaire à celle établie dans le Règlement de procédure et de preuve de la Cour pénale internationale (CPI), plutôt que de laisser les États définir individuellement la notion de « victime » de crimes contre l’humanité. 

M. ALAA NAYEF ZAID AL-EDWAN (Jordanie) a estimé que le libellé utilisé dans l’article 15 sur le non-refoulement ne reflète pas le droit international coutumier.  Il relève du développement de droit international et impose une charge importante à l’État sur le territoire duquel la personne se trouve.  Le délégué a donc proposé de le supprimer pour garantir que le renvoi d’un individu sur une partie du territoire d’un État où il ne risquerait pas d’être soumis à des crimes contre l’humanité ne soit pas illégal au titre de cet article.  Il s’agit de cas survenant en particulier dans des situations de conflit armé non international. 

M. JONATHAN SAMUEL HOLLIS (Royaume-Uni) a souligné que le traitement équitable de l’auteur présumé de l’infraction, y compris le droit à un procès équitable et la pleine protection de ses droits, sont des principes fondamentaux de l’état de droit.  La capacité de toute personne contre laquelle des mesures sont prises de contester ces mesures est essentielle au bon fonctionnement de la justice, a-t-il insisté, saluant à cet égard la rédaction par la CDI du projet d’article 11.  En ce qui concerne le projet d’article 12, le représentant a noté que le coût réel des crimes contre l’humanité est leur impact « dévastateur » sur les victimes, les survivants, leurs familles et leurs communautés.  C’est pourquoi le Gouvernement britannique est déterminé à prévenir les crimes contre l’humanité, car mettre fin à ces crimes est le plus grand héritage que nous puissions laisser à ceux qui en ont souffert, a-t-il estimé.  Il faut répondre aux besoins des victimes et des survivants, car l’application du principe de responsabilité à leurs yeux peut être plus importante encore que la procédure pénale ».  Sur cette question, le représentant a salué le travail considérable que la CPI a entrepris pour mettre une participation accrue des victimes au cœur de sa doctrine.  Ainsi sa délégation soutient-elle la décision de la CDI d’encadrer le droit d’obtenir réparation en termes généraux.  Enfin, il a proposé à la CDI qu’elle tienne des consultations avec les survivants, pour examiner si le libellé sur les réparations pourrait être renforcé. 

M. MOHAMMAD GHORBANPOUR NAJAFABADI (République islamique d’Iran) a estimé que la rédaction actuelle de l’article 5 sur les garanties de non-refoulement ouvre la voie à une interprétation arbitraire de la part des États requis pour refuser d’accorder l’extradition aux États requérants.  Il a rappelé que le principe de non-refoulement est applicable dans le droit international des droits de l’homme et a jugé inacceptable son extension aux crimes contre l’humanité.  Il a fait observer qu’il n’existe rien de tel dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide et a demandé la suppression pure et simple de l’article.  Quant à la question des réparations, le représentant a estimé que seules les juridictions où le crime a été commis sont compétentes pour examiner une demande de réparation.  Pour indemniser les victimes présumées d’un crime contre l’humanité, ces autorités compétentes doivent en outre respecter strictement le principe de l’immunité des États et de leurs biens, a-t-il ajouté, en demandant que ce principe soit reflété dans l’article 12.

M. MATTHIJS BOERMA (Pays-Bas) s’est félicité du projet d’article 5 sur le non-refoulement tel qu’il est rédigé, estimant qu’il représente une protection essentielle en vertu du droit international.  Il a exprimé son attachement à un procès équitable et à une procédure régulière, comme le stipulent la Convention européenne des droits de l’homme et les traités pertinents des Nations Unies.  À cet égard, le représentant a reconnu le développement progressif, en droit pénal national et international, visant à renforcer la position juridique des victimes de crimes graves.

M. PEDRO MUNIZ PINTO SLOBODA (Brésil) a jugé équilibré l’article 5 sur le non-refoulement.  Il y a vu le reflet d’une conception largement partagée par la communauté internationale selon laquelle aucun État ne devrait expulser ou renvoyer des personnes vers des territoires où leur vie ou leur liberté seraient menacées, conception que l’on retrouve notamment dans la quatrième Convention de Genève, le droit des réfugiés et plusieurs traités de droits de l’homme, y compris des traités régionaux.  Le représentant a estimé que les motifs d’application du principe devraient comprendre non seulement le risque que la personne soit soumise à un crime contre l’humanité, mais aussi le risque de génocide, de crimes de guerre et de torture.  Il a estimé que les dispositions du projet d’article 11 sur le traitement équitable de l’auteur présumé de l’infraction pourraient être renforcées et rapprochées des garanties d’un procès équitable prévues dans le Statut de Rome de la CPI. 

M. SERGIO AMARAL ALVES DE CARVALHO (Portugal) a salué la référence explicite au principe de non-refoulement dans le projet d’article 5, qui constitue une protection essentielle en vertu du droit international des droits de l’homme, du droit des réfugiés, du droit humanitaire et coutumier.  Nous soutenons en outre l’inclusion d’une disposition interdisant clairement aux États d’expulser, de refouler, de remettre ou d’extrader une personne vers un autre État où il existe des motifs sérieux de croire qu’elle risquerait d’être victime d’un crime contre l’humanité, a-t-il ajouté.  Le représentant a également salué le libellé du projet d’article 11 sur le traitement équitable de l’auteur présumé.  Il a noté à cet égard que la CDI a reconnu à bon escient que l’expression « traitement équitable à tous les stades de la procédure » entend incorporer toutes les garanties généralement reconnues par le droit international pour une personne détenue ou accusée, en particulier celles contenues à l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.  S’agissant du projet d’article 12, « le Portugal se félicite de l’importance particulière accordée aux droits des victimes, témoins et autres personnes affectées par la commission d’un crime contre l’humanité ».  Il est essentiel de donner aux victimes les moyens de s’exprimer, de signaler les crimes, de participer aux procédures pénales et, de manière générale, de promouvoir les conditions propices à la responsabilité et à la justice, a conclu le représentant. 

M. ENRICO MILANO (Italie) a appuyé le projet d’article 5, estimant que le principe de non-refoulement eu égard au risque de crimes contre l’humanité reflète un principe général du droit international des droits de l’homme qui se retrouve dans plusieurs traités majeurs.  Le représentant a également souligné l’importance au projet d’article 11 qui reconnaît le droit de l’accusé à un traitement et un procès équitables au regard notamment des normes internationales de droits de l’homme.  Il s’est également félicité des dispositions du projet d’article 12 sur les droits des victimes de crimes contre l’humanité.  Pour le représentant, ces droits comprennent la participation à la procédure pénale conformément au droit national de l’État de juridiction.  L’Italie appuie aussi les dispositions relatives au droit à réparation des victimes, les différents types de réparation possibles pouvant être définis par la législation nationale, a déclaré le délégué.

M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun) a préalablement indiqué dans le cadre du mini débat, que sa délégation est consciente des divergences sur le principe du non-refoulement.  Il s’est demandé à ce propos ce que serait le sort des réfugiés si le non-refoulement n’était pas appliqué dans les faits.  Il a apprécié que le Royaume-Uni ait demandé que la définition des crimes contre l’humanité soit élargie à des notions du type « crimes indirects ».

Au titre de sa déclaration proprement dite, M. Nyanid a constaté que l’article 5 transpose deux notions importantes: le principe de non-refoulement et le droit de refus de l’extradition, l’application dudit principe pouvant ouvrir la voie à tous les abus et à l’insécurité juridique du moment où il amène l’État requis à apprécier et à qualifier des faits qui se déroulent en territoire étranger.  Sa délégation estime en outre que le droit de refuser l’extradition en coopération judiciaire est légitime et crédible, mais elle estime qu’il vaudra mieux en échafauder les raisons et s’appuyer davantage sur les mécanismes non équivoques.  Le représentant a jugé souhaitable que les motifs de refus de l’extradition s’apprécient objectivement sur la base de la législation de l’État requérant, et non sur la subjectivité qui naîtrait de l’appréciation de la situation politique de l’État requérant.  Il a ensuite salué les dispositions de l’article 11 qui reprennent les droits de la défense tels que reconnus en droit international et interne.  Toutefois, sa délégation s’interroge sur le contenu de l’alinéa 3 s’agissant des modalités de jouissance des garanties prévues par l’alinéa 2, le Cameroun relevant à cet égard que dans certaines législations la mise en œuvre des dispositions envisagées sont soumises à des régimes stricts qui en inhibent le sens même.  D’autre part, le représentant a fait observer que le projet d’article 12 reprend les mesures classiques de protection des victimes et des témoins.

Mme ALEXANDRA HUTCHISON (Australie) a remarqué que les dispositions relatives aux garanties prévoient des protections d’importance fondamentale pour les victimes, les témoins et les personnes risquant d’être victimes de crimes contre l’humanité, de même que pour les auteurs présumés.  La représentante a dit comprendre le point de vue des États pour qui les dispositions du projet d’article 5 sur le non-refoulement risquent d’empiéter sur des obligations existantes en droit international, mais a estimé que respecter ces obligations existantes reviendrait le plus souvent à respecter le projet d’article 5.  La représentante a rappelé que les garanties de traitement équitable de l’auteur présumé de l’infraction sont essentielles à la légitimité de tout effort de responsabilisation.  La représentante a estimé que le projet d’article 11 établit un juste équilibre en ce sens et a jugé inutile qu’il développe l’ensemble bien établi du droit international des droits de l’homme qui définit le sens et la portée du « traitement équitable » et du « procès équitable ».  Elle a également dit soutenir le projet d’article 12 relatif aux droits des victimes et des témoins, qu’elle juge compatible avec les dispositions correspondantes d’autres traités relatifs aux crimes, tout en souhaitant une clarification de son premier paragraphe.  Enfin, rappelant que son pays examine comment le projet d’articles dans son ensemble pourrait renforcer l’intégration de l’égalité des sexes et des perspectives des Premières Nations, la représentante a estimé que le projet d’article 12 pourrait bénéficier de cette analyse plus approfondie.

Mme ALIS LUNGU (Roumanie) a soutenu l’inclusion d’une disposition de non-refoulement comme celle prévue au projet d’article 5, car il faut établir une interdiction générale de renvoyer, de remettre ou d’extrader une personne vers un État où elle risque d’être victime d’un crime contre l’humanité.  La représentante a rappelé que ce principe se retrouve dans plusieurs traités relatifs aux droits de l’homme et humanitaires.  Elle a soutenu le projet d’article 11 qui souligne la nécessité d’assurer à l’auteur présumé de l’infraction la protection nécessaire.  Garantir un procès équitable, un traitement équitable et le droit à une procédure régulière est essentiel pour établir la légitimité des efforts déployés par les tribunaux nationaux pour mettre fin à l’impunité, a-t-elle déclaré, rappelant que l’équité de la procédure pénale est un principe expressément inscrit dans le Code de procédure pénale roumain.  Enfin, son pays appuie une disposition détaillée relative aux droits des victimes, des témoins et autres personnes affectées par la commission d’un crime contre l’humanité.  La représentante a notamment jugé cruciaux le droit d’être entendu au cours de la procédure pénale et le droit d’obtenir réparation.  Elle s’est dit ouverte à d’éventuelles suggestions visant à renforcer le projet d’article 12.

Mme MARUBAYASHI (Japon) a souhaité que les projets d’articles 5 et 12 recueillent un large soutien, mais a jugé nécessaire d’approfondir la discussion sur la manière de déterminer la base des crimes contre l’humanité et de déterminer l’application du principe de non-refoulement.  Elle a en outre estimé que la portée des mesures à prendre pour protéger les victimes et les témoins n’était pas claire. 

M. BRIAN KELLY (États-Unis) a reconnu le rôle important du principe de non-refoulement pour la protection des personnes contre certains crimes, au regard du droit international.  Les dispositions de non-refoulement de la Convention relative au statut des réfugiés et de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants sont, a-t-il insisté, essentielles pour assurer la protection des personnes contre le retour dans des pays où ils pourraient faire face à la persécution ou à la torture, une protection que vient compléter l’article 5 du projet.  Le représentant a cependant noté que certains États ont rencontré des difficultés dans la mise en œuvre de leurs obligations de non-refoulement et que l’article 5 ne prévoit aucune exception, ce qui devrait faire l’objet d’un examen approfondi.

L’article 11 du projet reflète quant à lui un principe important reconnu par le Tribunal de Nuremberg et d’autres instruments internationaux selon lequel toute personne accusée d’un crime de droit international a droit à un traitement équitable à toutes les étapes de la procédure.  Le représentant a toutefois noté que cet article devrait préciser quels droits sont visés par ses dispositions, en vertu du droit national ou international applicable.  L’article 12 du projet constitue une étape importante en vue de l’élaboration d’une convention, en mettant l’accent sur les droits des victimes et des témoins, qui jouent un rôle clef dans les procédures relatives aux crimes contre l’humanité.  Il serait cependant utile, a fait valoir le délégué, de poursuivre le débat sur la question du droit d’obtenir réparation, laquelle devrait être abordée par les juridictions nationales.

Mme KATARZYNA MARIA PADLO-PEKALA (Pologne) a indiqué que pendant les travaux de la Commission, sa délégation a plaidé fortement en faveur d’une approche axée sur les victimes dans la poursuite des crimes internationaux.  Ainsi a-t-elle salué le libellé du projet d’article 12 sur les victimes et les témoins.  Cependant, leur protection pourrait être encore renforcée en ajoutant au champ des obligations énoncées à l’article 3 une référence directe à l’obligation des États envers les victimes, a-t-elle préconisé.  Le projet d’articles pourrait être encore plus ambitieux s’il incluait une disposition distincte pour accorder une attention particulière à la catégorie de victimes la plus vulnérable, à savoir les enfants.  La déléguée a déclaré qu’une telle disposition pourrait s’inspirer des articles 1 et 39 de la Convention relative aux droits de l’enfant, de l’article 24 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de l’article 25 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.  De notre point de vue, a-t-elle insisté, il convient de souligner que « l’intérêt supérieur de l’enfant » doit être une considération primordiale dans le processus de sa convalescence physique et psychologique et de sa réinsertion sociale. 

M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a rappelé que le principe de non-refoulement est inclus dans nombreux traités internationaux ou régionaux humanitaires ou de droits de l’homme.  Estimant que le contenu de l’article 5 est conforme à celui de ces textes, il a dit le soutenir.  Passant à l’article 11, le représentant a souhaité qu’on accorde une interprétation très large à son premier paragraphe qui concerne les garanties de procédure équitable dont doit bénéficier l’accusé.  Il a aussi rappelé l’importance du droit à l’assistance consulaire.  Le délégué a par ailleurs jugé fondamental d’accorder aux victimes et aux témoins une position centrale.  De manière générale, le Mexique appuie le projet d’article 12, a déclaré le représentant qui a toutefois suggéré de préciser que la liste des formes de réparation mentionnée n’est pas exhaustive.  Il a également insisté sur l’importance de la santé mentale des victimes ou témoins de crimes contre l’humanité.

Reprenant la parole au titre du mini débat, le représentant du Cameroun a dit avoir été contacté par sa capitale qui s’est offusquée de « propos désobligeants » tenus par un interprète à l’endroit d’un pays souverain.  « Je ne suis pas ici pour rigoler », a-t-il ajouté, en se demandant pourquoi ces propos ne sont tenus « qu’à l’endroit de l’Africain ».  Cette affaire fera l’objet d’une explication détaillée, a-t-il averti. 

M. JOSE JUAN HERNANDEZ CHAVEZ (Chili) a jugé l’article 5 sur le principe de non-refoulement, « nécessaire et utile » à l’élaboration éventuelle d’une convention sur les crimes contre l’humanité.  Il s’est félicité de la suppression, au paragraphe 1, de la référence au « territoire sous la juridiction » d’un autre État, estimant que le sens de cette disposition n’est pas d’empêcher qu’une personne soit envoyée vers un lieu physique déterminé, mais plutôt d’interdire la remise d’une personne à un État lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’elle pourrait être victime d’un crime contre l’humanité.  L’article 12 sur les droits des victimes, témoins et autres personnes, est une disposition équilibrée qui établit la conduite que doivent adopter les États afin d’assurer aux victimes un traitement adéquat, a encore commenté le représentant.  Tout en considérant que cet article devrait être renforcé au cours des négociations, il a ajouté qu’il ne saurait y avoir de restauration effective et durable de l’état de droit sans la mise en place des conditions nécessaires à la prévention des crimes graves. 

M. YONG-ERN NATHANIEL KHNG (Singapour) a exprimé des doutes sur le libellé du paragraphe 2 du projet d’article 12 sur les victimes, témoins et autres personnes.  Selon lui, la portée des réparations doit être déterminée par les États au cas par cas, en cohérence avec l’approche adoptée par nombre de conventions internationales en matière pénale. 

Mme BOURDON (Canada) a suggéré de réexaminer les termes employés dans le projet d’articles 5, notamment celui de « non-refoulement », qui peut être compris comme étant limité aux réfugiés ou aux demandeurs d’asile.  De même, les mots « remise » et « extradition » renvoient plutôt au fait de livrer une personne à un tribunal international ou à un autre État.  S’agissant du projet d’article 11 sur le traitement équitable de l’auteur présumé de l’infraction, la déléguée a jugé essentiel d’y inclure la protection contre l’arrestation ou la détention arbitraires, ainsi que les droits à la liberté et à la sécurité des accusés et des détenus.  Cet article devrait également mentionner clairement qu’il ne modifie en rien le droit international humanitaire.  Au paragraphe 1 du projet d’article 12, la déléguée a jugé nécessaire d’allouer davantage de flexibilité aux États quant aux procédures concernant la protection des victimes et des témoins, y voyant par ailleurs l’occasion d’incorporer des dispositions relatives à la violence sexuelle et basée sur le genre.   En conclusion, elle a réaffirmé la nécessité de respecter le principe général du droit international selon lequel les lois nationales ne peuvent prévaloir sur les obligations juridiques internationales.

M. EVGENY A. SKACHKOV (Fédération de Russie) a fait valoir que le projet d’article 5 sur le non-refoulement ne constitue pas un élément du droit international pénal, mais découle plutôt de la protection des droits humains.  Par conséquent, nous ne voyons aucune raison d’inclure cet article, a-t-il tranché, en relevant la marge d’appréciation « extrêmement large » laissée aux États en matière d’extradition par la mention « motifs sérieux de croire ».  Une telle disposition pourrait en outre saper les instruments bilatéraux et multilatéraux d’extradition et d’assistance judiciaire, selon le délégué.  Quant à l’article 11, sur le traitement équitable de l’auteur présumé de l’infraction, il a jugé nécessaire de faire référence à la législation nationale.  Enfin, l’article 12, sur les victimes, témoins et autres personnes, ne comporte selon lui aucune « valeur ajoutée », et suscite plus de questions qu’il n’apporte de réponses.

M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a rappelé que le principe de non-refoulement a été beaucoup utilisé, surtout dans le droit des réfugiés mais aussi dans le contexte du droit international des droits de l’homme.  Il a noté que ce n’est qu’à partir de 1989 que les droits des victimes ont été pris en compte et a estimé que le plus important est, dans ce domaine, le volet des réparations, qui pourrait prendre plusieurs formes et permettre aux victimes de recouvrer leur humanité.

M. KEMAL ONUR EKREN (Türkiye) a déclaré que le libellé relatif à la réparation des dommages matériels et moraux contenu dans l’article 12 sur les victimes, témoins et autres personnes, devrait répondre aux procédures correspondantes dans le droit interne de pays.

M. GRANDJEAN (Belgique) a exprimé son attachement aux dispositions relatives au principe de non-refoulement énoncées au projet d’article 5, qui est affirmé également dans de nombreuses conventions, instances et juridictions internationales et régionales.  Le projet d’article 11 réaffirme l’obligation des États de garantir un traitement équitable à l’auteur présumé d’un crime contre l’humanité, ce qui comprend le droit à un procès équitable et la protection de ses droits.  Pour lui, ces garanties doivent être assurées à toutes les étapes de la procédure conformément aux normes internationales les plus élevées.  Par ailleurs, tel que prévu par les conventions récentes de droit international pénal et par la Convention de Vienne sur les relations consulaires, le droit des personnes détenues à communiquer avec l’État de leur nationalité est prévu par les paragraphes 2 et 3 du projet d’article 11.  Le représentant a jugé particulièrement important d’adopter une approche centrée sur les victimes, tout en veillant à ce qu’elles puissent bénéficier, le cas échéant, des mesures de protection prévues au projet d’article 12.  Dans le cadre d’un processus de reddition des comptes inclusif, ces mesures comprennent, a-t-il précisé, des mesures de réparation pour les dommages matériels et moraux subis.

M. MARTÍN JUAN MAINERO (Argentine) a appuyé pleinement l’inclusion de l’article 12, au motif qu’il est vital de protéger les droits des victimes et des témoins via ce futur instrument.  Il a dit être d’accord avec le contenu de ses paragraphes, mais a proposé d’y ajouter d’autres éléments pour le renforcer.  Il a dit tout d’abord appuyer la Colombie qui est en faveur de l’insertion d’une définition des victimes, afin d’éviter toute fragmentation du droit international.  Cela permettrait d’introduire une base a minima pour établir le traitement des victimes dans les différentes législations nationales, a-t-il observé.  Il a aussi souhaité que soit inclu le droit des victimes à connaître la vérité, faisant remarquer que les circonstances de la commission des crimes contre l’humanité impliquent souvent la diffusion de fausses informations.  Cela obligerait les États à enquêter et à faire la lumière sur les crimes, a-t-il argumenté.  Le délégué a également abordé le problème des documents de voyage des victimes, qui peuvent être des réfugiés ou des demandeurs d’asile ne disposant pas de tels documents.  Il a demandé de prévoir que l’État où réside la personne collabore avec l’État où la personne est appelée à présenter son témoignage, pour la délivrance des documents de voyage.

M. PAULA DA CONCEIÇÃO MACHATINE HONWANA (Mozambique) a rappelé l’importance d’une répression des crimes contre l’humanité s’effectuant dans le respect des principes applicables à la relation entre le droit national et international.  Il a également mis en avant la nécessité de protéger les victimes de ces crimes odieux.  Dans ce contexte, le représentant a appuyé le libellé des articles 11 et 12 et la prise en compte du droit international, y compris le droit des droits de l’homme et le droit international humanitaire.  Le Mozambique a déjà adopté une législation spécifique qui protège les victimes, témoins et autres personnes, y compris lorsqu’ils sont liés à des crimes contre l’humanité, a expliqué le représentant, qui a ajouté que le Mozambique avait récemment mis à jour son code pénal, lequel contient des dispositions pour prévenir et punir les crimes contre l’humanité.  Le représentant a estimé par ailleurs que la rédaction actuelle de l’article 5 sur le non-refoulement pourrait poser des difficultés d’interprétation.  Il a conclu en estimant que l’adoption d’une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité serait une contribution majeure au développement progressif et à la codification du droit international.

Échanges interactifs

La représentante de Malte a estimé utile de signaler que dans le système des Nations Unies, il existe une définition de la notion de statut de victime, celle-ci figurant dans la résolution 60/147 de l’Assemblée générale. 

La représentante de la France a indiqué ne pas être opposée à des améliorations du libellé de l’article 5 sur le non-refoulement.

À son tour, la représentante de l’Inde a indiqué être disposée à apporter des amendements à cet article. 

Déclarations (suite)

Mme ZOE RUSSELL (Nouvelle-Zélande) a dit que son pays est favorable à l’inclusion des garanties énoncées dans les projets d’articles 5, 11 et 12.  Selon elle, ces garanties sont importantes pour assurer la cohérence avec les obligations des États en droit international des droits de l’homme et les aspects bien établis de l’état de droit, comme le droit à un procès équitable.  Elle a aussi salué l’inclusion de l’obligation de protéger les victimes de crimes contre l’humanité et de prendre en compte leurs droits dans le projet d’articles.  La déléguée s’est également félicitée du projet d’article 12(3) et de son examen spécifique de la question de la réparation.  Elle a dit soutenir la flexibilité que prévoit cette disposition en donnant aux États le pouvoir discrétionnaire de déterminer la forme appropriée de réparation. 

M. YANG XI (Chine) a commenté le projet d’article 5 sur le non-refoulement.  Il a fait valoir qu’il n’existe pas de consensus sur l’application de ce principe en cas de commission de crimes contre l’humanité.  Il a donc souhaité que la Sixième Commission continue de débattre plus avant des dispositions proposées au titre de cet article.

Mme LOUREEN SAYEJ (État de Palestine) a déclaré que le rôle des victimes et des témoins est indispensable et leur droit d’obtenir réparation intrinsèque à tout effort de prévention et de répression des crimes contre l’humanité.  Le projet d’articles devrait refléter les normes applicables et les meilleures pratiques concernant les droits des victimes, conformément au droit international, a poursuivi la déléguée.  La protection prévue à l’alinéa b) du paragraphe 1 du projet d’article 12 indique clairement selon elle que les victimes, les témoins, les membres de la famille et les autres personnes concernées doivent être protégés contre les mauvais traitements et l’intimidation.  De même, les commentaires expriment clairement l’objectif de disposer d’un concept plus complet de réparations, y compris pour les dommages matériels et moraux.  À cet égard, la déléguée s’est félicitée de l’inclusion d’une base collective, estimant que « des peuples entiers peuvent être victimes de crimes contre l’humanité et que leur droit collectif à des réparations doit être consacré ».

Exposé sur la recommandation de la Commission du droit international

M. ARNOLD PRONTO, Administrateur général jurisconsulte, Division de la codification, Bureau des affaires juridiques, a indiqué que son exposé portait sur la recommandation de la Commission du droit international (CDI) concernant le projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  Il a rappelé qu’il était présenté conformément au programme de travail des deux reprises de session de la Sixième Commission, prévu dans la résolution 77/249 de l’Assemblée générale et adopté ce lundi 10 avril. 

M. Pronto a dans un premier temps présenté quelques remarques générales sur le pouvoir de la CDI de formuler des recommandations.  Il a rappelé que ce pouvoir vient de son statut, adopté en 1947 par l’Assemblée générale, qui lui confie la mission « d’entreprendre des études et de faire des recommandations dans le but », entre autres, « d’encourager le développement progressif du droit international et sa codification », comme le prévoit la Charte des Nations Unies.  Le produit du travail de la Commission est adressé à l’Assemblée générale accompagné d’une « recommandation ».  S’il est de la pratique courante pour tous les organes subsidiaires de faire des recommandations à l’organe principal, c’est en fait, dans le cas de la CDI, une véritable obligation, car son travail sur un texte particulier n’est techniquement pas complet sans une recommandation d’action.

Cette recommandation, a expliqué M. Pronto, peut être de ne rien faire; de prendre acte ou adopter le rapport par résolution; de recommander le projet aux Membres en vue de la conclusion d’une convention; ou de convoquer une conférence pour conclure une convention.  Il a fait observer que la pratique avait évolué au fil du temps et que la Commission a adopté des recommandations adaptées à des résultats particuliers, en fonction de sa perception de la manière dont certains textes seront reçus par l’Assemblée générale.  Il appartient ensuite à l’Assemblée générale, via la Sixième Commission, de décider que faire de la recommandation de la CDI.  Dans le cas présent, elle a choisi d’examiner des questions de fond dans le cadre des deux reprises de session.

M. Pronto est ensuite revenu sur une question soulevée lors de la discussion, à savoir si les recommandations de la CDI étaient contraignantes pour les États.  Du fait de leur nature même, elles ne le sont pas, a-t-il précisé, d’autant qu’une mesure prise par un organe subsidiaire ne peut pas lier son organe de tutelle.  Il a toutefois estimé qu’elles sont « très importantes », puisqu’elles font partie intégrante du mécanisme mis en place pour concrétiser les objectifs de la Charte.  « Toute recommandation de la CDI est donc déterminante dans le développement du droit international contemporain. »

La CDI « prend très au sérieux » chacune des recommandations qu’elle formule, a assuré M. Pronto.  Il est revenu sur la procédure suivie, soulignant notamment que la Commission tient systématiquement compte des commentaires formulés par les États quant à la forme finale du texte et qu’elle adopte généralement ses recommandations par consensus.  « En dernière analyse, la question d’accepter ou non une recommandation de la Commission reste entièrement entre les mains des États Membres. »

M. Pronto a rappelé l’historique des travaux de la CDI sur le thème des « crimes contre l’humanité », insistant sur le fait que, dès sa décision d’inclure le sujet dans son programme de travail, elle avait déclaré « sans ambiguïté » son intention d’élaborer un ensemble de projets d’articles destinés à servir de base à une convention internationale.  Cet objectif ressort également des débats et des quatre rapports du Rapporteur spécial.  De même, a-t-il fait valoir, les débats tenus chaque année à la Sixième Commission attestent que les gouvernements membres ont eux aussi été bien conscients tout au long du processus que le résultat escompté des travaux de la Commission serait un texte destiné à servir de base à une convention internationale. 

Dès lors, la question actuellement devant l’Assemblée générale et sa Sixième Commission est de savoir si elle va accepter ou non la recommandation de la CDI et, si oui, quelle procédure suivre: élaboration d’une convention par l’Assemblée générale ou par une conférence internationale de plénipotentiaires.  M. Pronto a fait observer que la CDI avait recommandé que la future convention soit négociée « sur la base de projets d’articles », ce qui correspond à la pratique traditionnelle, bien qu’il y ait eu des exceptions. 

En 74 ans, a rappelé M. Pronto, la CDI a adopté 44 recommandations, parfois composites, dont 27 tendaient à la conclusion d’une convention internationale.  Quatorze de ces recommandations ont été suivies et ont abouti à l’adoption de 17 traités, directement ou indirectement sur la base de la proposition de la Commission.  En outre, la Sixième Commission examine actuellement les recommandations de la CDI en vue de l’adoption, ou de l’éventuelle adoption future, de huit autres conventions internationales.

M. Pronto a également rappelé que la recommandation de la CDI peut viser l’élaboration d’une convention, non pas tout de suite, mais « ultérieurement ».  Ce fut le cas en particulier en 2001 à propos du projet d’articles sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite, puis, de manière indirecte, à quatre reprises depuis.  Dans ces cas, a expliqué M. Pronto, la CDI a estimé que le projet d’articles mis au point pouvait servir de base à une convention internationale, mais a préféré laisser la décision sur sa viabilité aux gouvernements membres, chargés de décider plus tard à la lumière des évolutions.

Dans sa conclusion, M. Pronto a rappelé qu’il serait prématuré de commenter ce qu’il adviendrait si l’Assemblée décidait de donner suite à la recommandation de la CDI concernant le projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  On ne nous l’a pas demandé et certaines délégations seraient mal à l’aise d’avoir une telle discussion à ce stade, a-t-il dit.  Il a simplement rappelé que toute décision de donner suite à la recommandation de la CDI doit être expressément et clairement reflétée dans une résolution adoptée par l’Assemblée générale, idéalement après une réflexion sur les différentes options procédurales et leurs conséquences.  Il a donc renvoyé les délégations au rapport que le Secrétariat préparera pour la quatre-vingtième session de l’Assemblée, en application de la résolution 77/97 de l’Assemblée générale.

Dialogue interactif avec le Secrétariat

Le représentant du Mexique a salué la qualité des informations transmises par M. Pronto, le rapprochement établi par ce dernier entre la CDI et l’Assemblée générale étant selon lui irréprochable.  Il a rappelé que le processus en cours n’est pas achevé tant que l’Assemblée générale ne s’est pas prononcée sur telle ou telle recommandation.  Le représentant a en outre appelé à la poursuite du travail d’amélioration du dialogue entre la CDI et la Sixième Commission.  L’an prochain, a-t-il avancé, pendant la session ordinaire et la reprise de session, nous nous appuierons sur nos travaux de cette année, puis il faudra bien que l’Assemblée générale, qui peut ou non tenir compte des recommandations de la CDI, prenne une décision.

À son tour, le Portugal a salué l’exhaustivité de l’exposé des relations entre la CDI et l’Assemblée générale, ajoutant que l’avenir du travail en cours dépendra de l’amélioration, par les États eux-mêmes, du processus.  À ce propos, il a suggéré que l’an prochain, la reprise de session se concentre sur l’examen de points spécifique, la Sixième Commission ayant de son côté pour point saillant l’examen du rapport de la CDI pendant sa session ordinaire.

Le représentant de l’Égypte s’est dit favorable à la proposition du Portugal, avant de demander comment s’y prendre pour que la Sixième Commission prenne une décision sur la recommandation de la CDI.

Jugeant lui aussi très utile l’exposé de M. Pronto, le représentant de la Chine a souhaité qu’il soit distribué aux délégations de la Sixième Commission.  Il a demandé au Secrétariat de présenter un aperçu historique des cas où la CDI aurait recommandé à l’Assemblée générale de conclure une convention à partir de ses recommandations et des suites éventuelles qui y auraient été données.  L’Assemblée, a-t-elle approuvé ces recommandations et adopté les textes en question ou bien cela a-t-il mené à d’autres résultats? a demandé le délégué.  Il a noté que l’Assemblée peut également décider d’ajouter de telles questions à son ordre du jour afin de refléter les positions des États Membres. 

La représentante de la Colombie a estimé que le travail des délégations consiste à « faire » le droit international, avec la collaboration de la CDI, bien que les relations entre les deux organes mériteraient parfois d’être améliorée.

Groupe thématique 5: garanties (articles 5, 11 et 12)

Déclaration (suite et fin)

M. MICHAEL IMRAN KANU (Sierra Leone) a souligné l’importance du projet d’article 5 sur le non-refoulement pour prévenir indirectement les crimes contre l’humanité.  En ce qui concerne l’article 11, il a proposé de s’inspirer du Statut de Rome de la CPI qui établit une distinction entre les droits des suspects et ceux des personnes accusées.  Le délégué s’est dit fort préoccupé par le paragraphe 3 de l’article 12, qui porte sur les victimes, témoins et autres personnes, et impose à l’État une obligation « trop stricte » de veiller à ce que les victimes d’un crime contre l’humanité aient droit à des réparations pour les dommages matériels et moraux sur une base individuelle ou collective.  « L’expérience de son pays montre qu’une telle obligation pourrait imposer un fardeau disproportionné aux États fragiles ou touchés par un conflit. »  Après un conflit, a poursuivi le délégué, les ressources des États peuvent en outre s’avérer insuffisantes et le nombre de victimes trop important pour que ceux-ci puissent satisfaire aux exigences visées à cet article.  Le délégué a toutefois suggéré l’ajout d’un nouveau paragraphe 4 à l’article 12, faisant état des crimes commis dans l’histoire de l’humanité et pour lequel les réparations font toujours l’objet de résistances, à savoir l’esclavage et la traite transatlantique des esclaves.  Cependant, a-t-il convenu, il existe des obstacles juridiques en droit international à la poursuite de telles requêtes. 

Au titre du mini débat, le représentant du Cameroun a tenu à remercier son homologue de la Sierra Leone qui a évoqué l’esclavage et la traite, dans le cadre des concepts de réparation et de non-rétroactivité.  « Ce serait dramatique pour l’Afrique de passer outre cette donnée historique qui a traumatisé le continent. »

Dialogue interactif avec le Secrétariat (suite et fin)

Revenant sur l’exposé sur la recommandation de la Commission du droit international, le représentant de la Slovaquie a dit qu’il était intéressant que, malgré la nouvelle pratique de la Commission d’une approche en deux étapes, en ce qui concerne ce produit, la Commission ait décidé de revenir à la recommandation directe d’adopter une convention ou de convoquer une conférence.  Cela pourrait être un élément qui pourrait éclairer l’examen de la Sixième Commission.

M. Pronto a salué la délégation de la Chine qui avait lancé l’idée des discussions interactives.  Il a répété les chiffres donnés dans son exposé sur le nombre de recommandations présentées par la CDI -14- ayant abouti à des traités, tout en expliquant que certaines autres recommandations n’avaient pas eu de suite à l’Assemblée générale.  Concernant ces dernières, il a détaillé les raisons qui avaient conduit à l’abandon, notamment en ce qui concerne un projet d’articles sur les clauses de la nation la plus favorisée.  Dans d’autres cas, a-t-il rappelé, l’Assemblée générale avait décidé d’examiner la situation ultérieurement.

La représentante du Nigéria a déclaré avoir noté que la recommandation concernant les projets d’articles sur les crimes contre l’humanité n’était pas contraignante.

 

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