Assemblée générale: les pays les moins avancés exposent leurs griefs et réclament des réformes du système financier mondial pour bâtir leur futur
Les appels à de profonds changements se sont poursuivis en ce troisième jour de débat général de l’Assemblée générale des Nations Unies. Outre la réforme du Conseil de sécurité, il a aujourd’hui beaucoup été question de réformer l’architecture financière internationale: des initiatives réclamées d’urgence par les pays les moins avancés (PMA), dont 15 se sont exprimés aujourd’hui.
Il ne suffit pas d’appeler à la prospérité pour tous si les règles commerciales et les systèmes financiers aggravent la pauvreté des nations, a ainsi sèchement souligné le Président du Malawi, un PMA en proie au choléra, à la sécheresse et aux cyclones. « Annulez les dettes »! a-t-il d’ailleurs scandé à la tribune, affirmant que seul ce type d’actes forts pourrait permettre de rattraper les pertes économiques de la pandémie de COVID-19 et les deux années de progrès perdues à cause de la guerre en Ukraine. D’ici là, il compte continuer de « frapper aux portes des institutions financières qui restent trop lentes, trop insensibles et trop rigides ».
Même son de cloche de son homologue zimbabwéen, qui a parlé d’une architecture « excluante », incapable de fournir aux PMA les ressources nécessaires pour les aider à financer leur développement en matière de santé et d’environnement. Outre l’annulation et la restructuration de la dette, le dirigeant a réclamé des prêts concessionnels à long terme ainsi qu’un accès accru aux droits de tirage spéciaux (DTS) non utilisés. « Pour rétablir la confiance, il est impératif que le Nord tienne ses promesses et écoute les voix du Sud », a ajouté le Chef de l’État tanzanien; mais il a concédé que le Sud devrait aussi, de son côté, augmenter ses recettes nationales en mettant fin à l’hémorragie de ses ressources naturelles et aux sorties illicites de capitaux.
L’aide publique au développement (APD) a, elle aussi, été brocardée. « Politiquement orientée », elle est synonyme d’aumône organisée, a lancé le Président du Congo, qui a ironisé sur « les subventions au compte-goutte, distillées au rythme des intérêts propres des donateurs ». Le dirigeant du Burundi a dit ressentir aussi de la « mauvaise foi » dans cette forme d’aide, puisqu’en parallèle, les ressources offertes pour assurer la relance de son pays –et son indépendance économique- régressent.
Sur le plan de la gouvernance, il n’a pas échappé au Président de la Guinée qu’après la pandémie de COVID-19, l’Afrique est aujourd’hui frappée par une « épidémie de coups d’État », en particulier les pays francophones du sud du Sahara. Il l’a expliquée par des promesses non tenues, par l’apathie de la population et le « tripatouillage des constitutions » aux dépens des intérêts nationaux, ainsi que par la mauvaise répartition de la richesse. Dénonçant l’héritage politique des pays colonisateurs et l’imposition insidieuse et inefficace du modèle démocratique aux Africains, il n’en a pas moins mis en garde ses homologues contre la corruption des élites africaines. Car le putschiste, a glissé le dirigeant guinéen, n’est pas seulement celui qui prend les armes pour renverser un régime, mais également ceux, « plus nombreux », qui ont recours à la duplicité pour « manipuler la Constitution afin de se maintenir éternellement au pouvoir ».
Le conflit au Soudan a par ailleurs préoccupé les dirigeants des pays voisins. Le Président de la République centrafricaine a ainsi relevé que 51 077 réfugiés soudanais et tchadiens avaient déjà été enregistrés dans la préfecture centrafricaine de la Vakaga, exposant sa population à des risques humanitaires et sécuritaires. Son homologue du Soudan du Sud a aussi indiqué que l’afflux de réfugiés soudanais et de rapatriés du Soudan du Sud avait mis à rude épreuve les communautés sud-soudanaises. Le dirigeant soudanais a répondu en affirmant faire son possible pour mettre fin à la guerre, attribuant les échecs des négociations à l’« intransigeance » des rebelles, qu’il souhaite voir désignés comme « groupes terroristes » par la communauté internationale. Rappelant que son gouvernement avait accepté l’initiative de paix lancée par le Soudan du Sud, l’Ouganda et la Türkiye, il a concédé que la guerre touchait massivement les populations civiles et pouvait embraser toute la région. Il a lancé un appel pour obtenir aide alimentaire, médicaments et abris: « nos besoins sont énormes », a-t-il déclaré.
Le dirigeant d’un autre pays en proie à un conflit meurtrier, le Chef de l’État yéménite, a appelé la communauté internationale à veiller à ce que les fonds destinés au Yémen ne tombent pas dans l’escarcelle des rebelles houthistes, « lesquels continuent de violer le système bancaire et de mener des actions de blanchiment ». Faute de cette assistance, les institutions du Yémen resteront faibles et sous-financées, a averti le Président.
En écho aux appels des PMA, le Président du Conseil européen a appelé à accroître la capacité de prêt des institutions financières internationales, rappelant qu’en 60 ans, le pouvoir de financement de la Banque mondiale, proportionnellement à la production mondiale, avait été divisé par 7. La Ministre des affaires étrangères de la France a appelé tous les États à endosser le « Pacte de Paris pour les peuples et la planète » qui prévoit notamment la réallocation de 100 milliards de DTS.
Les efforts nationaux ne suffiront pas à eux seuls à garantir le succès des objectifs de développement durable (ODD), a prévenu le Président de Sri Lanka qui, comme les PMA, a plaidé pour une solidarité mondiale et averti qu’une absence de restructuration de l’ordre budgétaire mondial ferait échouer la lutte contre les changements climatiques. « Il est encore temps de rectifier le tir car la crise n’a pas atteint son paroxysme », a-t-il voulu croire, en misant sur le prochain Sommet de l’avenir en 2024.
Aspirant lui aussi à un avenir meilleur, le Président de l’État de Palestine a rappelé que le processus de paix israélo-palestinien se trouve dans une impasse « en raison de la politique israélienne ». Il a exhorté l’ONU et son Secrétaire général à convoquer une conférence de paix afin de sauver la solution des deux États et empêcher une détérioration de la situation qui menacerait « non seulement la région, mais aussi le monde entier ».
Le débat général de la soixante-dix-huitième session de l’Assemblée générale reprendra demain, vendredi 22 septembre, à 9 heures.
SUITE DU DÉBAT GENERAL
Déclarations
M. RASHAD MOHAMMED AL-ALIMI, Président du Conseil présidentiel du Yémen, a expliqué que son pays reste concentré sur la recherche de la paix afin de faire cesser les souffrances du peuple yéménite, rétablir la confiance dans les institutions nationales et continuer le développement durable. Saluant les pays qui soutiennent l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale du Yémen, le Président a remercié tout particulièrement l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis pour leur solidarité. L’appui de ces « pays frères » a empêché l’effondrement complet de nos institutions attaquées par les milices houthistes soutenues par l’Iran, a-t-il affirmé, reconnaissant toutefois qu’en dépit de cette dynamique régionale et internationale, « les problèmes demeurent ». Il a d’autre part exprimé sa gratitude à l’Arabie saoudite, au Sultanat d’Oman et à l’Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour leurs efforts de médiation, formant l’espoir que les houthistes admettront que seul un État fondé sur l’état de droit peut permettre de rétablir la stabilité et la sécurité.
Pour l’heure, le Président a appelé la communauté internationale à la méfiance quant aux intentions des houthistes, mettant en garde contre tout « autosatisfecit » lié aux accords passés avec les miliciens. Selon lui, les houthistes utilisent les accords de paix comme moyen de gagner du temps et des ressources. Il faut donc obtenir des garanties solides et s’assurer que tout accord de paix débouche sur des résultats tangibles, a-t-il souhaité. Les victimes doivent en bénéficier en priorité, mais il convient également de ranimer la confiance du peuple dans les institutions légitimes et de reconstruire des relations de voisinage, notamment avec les pays du Conseil de coopération du Golfe, a poursuivi le Chef de l’État. Dans le même temps, il a jugé important de renforcer l’économie du pays pour que le Gouvernement puisse fournir des services et mettre fin à l’action des milices. Pour cela, a-t-il dit, les grandes puissances doivent envoyer un message fort aux houthistes, leur disant de ne pas renverser le système constitutionnel. De même, pour permettre au pays de passer des secours d’urgence au développement durable, la communauté internationale doit veiller à ce que les fonds destinés aux institutions nationales ne tombent pas dans les mains des houthistes, « lesquelles continent de violer le système bancaire et de mener des actions de blanchiment ».
Faute de cette assistance, les institutions du Yémen resteront faibles et sous-financées, a averti le Président, pour qui chaque report de l’aide internationale occasionne des souffrances supplémentaires pour les Yéménites. À cet égard, il a signalé que le budget de l’État yéménite ne peut plus faire face aux besoins, en raison notamment des attaques houthistes contre les installations pétrolières du pays. S’il n’y avait pas les donations de l’Arabie saoudite, nous ne pourrions pas honorer nos obligations de base, a-t-il expliqué, non sans saluer les annonces de contributions des Émirats arabes unis, des États-Unis et de l’Union européenne. Appelant en outre la communauté internationale à condamner les ingérences du « régime iranien » et de le soumettre à des sanctions, il a signalé une augmentation des attaques houthistes en mer Rouge et dans le golfe d’Aden. Ces actions visent à déstabiliser la région et à saper tout processus politique, a dénoncé le Président, qui a aussi demandé aux États Membres de respecter l’embargo sur les armes et d’empêcher l’Iran de fournir des capacités militaires aux houthistes. Enfin, après avoir réaffirmé l’attachement du Yémen aux traités internationaux dont il est partie, en particulier dans le domaine des droits humains, il a exprimé son soutien au peuple palestinien et a adressé ses condoléances à la Libye et au Maroc.
M. FAUSTIN ARCHANGE TOUADERA, Président de la République centrafricaine, a d’abord exprimé sa solidarité aux peuples du Maroc et de la Libye, durement frappés par des catastrophes naturelles. Il a espéré que ces catastrophes interpellent la communauté scientifique quant à l’urgence d’identifier les régions du monde vulnérables aux événements climatiques extrêmes et de donner les informations nécessaires aux États concernés afin d’en limiter les dégâts. Il a également évoqué l’arrivée massive de milliers de jeunes Africains sur l’île italienne de Lampedusa, à la recherche d’un eldorado en Europe, conséquence selon lui des pillages des ressources des pays d’Afrique, des ravages de la colonisation, de l’esclavage et de l’impérialisme occidental. Il a cependant salué la solidarité internationale et l’action de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) dans cette tragédie.
M. Touadera a ensuite évoqué le confit armé interne « d’une rare cruauté » qui a éclaté au Soudan en avril dernier, alors même que le pays était sur la voie de la normalisation. Il a noté que 51 077 réfugiés soudanais et tchadiens ont déjà été enregistrés dans la préfecture centrafricaine de la Vakaga, ce qui expose la population de son pays, « certes résiliente », à des risques d’aggravation de la situation humanitaire et d’insécurité. Le Président en a appelé à la solidarité internationale en faveur des réfugiés et à prendre en compte l’impact de cette crise sur la géopolitique régionale.
La persistance des conflits dans le monde, comme en Ukraine, a-t-il poursuivi, soulève des interrogations quant à l’efficacité de certains mécanismes de prévention et de règlement pacifique des différends. C’est pourquoi M. Touadera a réaffirmé sa volonté de réforme du Conseil de sécurité, afin d’en augmenter le nombre de membres africains permanents et non permanents. « Ce ne sera que justice », a-t-il déclaré.
Il a également dénoncé les blocus économiques unilatéraux frappant le peuple centrafricain avec la reconduction, le 29 juillet 2023, de l’embargo sur les armes contre le pays. Une « décision cynique », selon lui, « motivée par des rapports fallacieux et tronqués », qui traduisent une volonté d’instrumentaliser les régimes des sanctions à des fins de pression politique. À travers les embargos sur les armes et diamants reconduits depuis plus de 10 ans, il ne s’agit rien de moins pour le Président centrafricain que de pérenniser l’insécurité et la mainmise sur les ressources naturelles du pays au profit de puissances étrangères, peu importe que ces embargos compromettent gravement les capacités du pays à réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Concernant les changements climatiques, il a regretté que les promesses de financement des pays historiquement émetteurs ne bénéficient pas aux « victimes innocentes » de la surexploitation des ressources comme la République centrafricaine.
Enfin, M. Touadera a dénoncé les campagnes de désinformation et de dénigrement menées par certains médias occidentaux contre son pays. Le 30 juillet dernier, une nouvelle Constitution a été adoptée par son peuple avec une majorité écrasante de 95,3% et un taux de participation de plus de 57%, a-t-il fait valoir avant d’assurer que le Gouvernement poursuit l’exécution de l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine. Il a dissous neuf groupes armés, s’est-il félicité.
M. LAZARUS McCARTHY CHAKWERA, Président du Malawi, a fait remarquer que lorsque les dirigeants du monde parlent d’avenir à la tribune de l’Assemblée générale, ils parlent d’un avenir qui ne leur appartient pas, mais qui appartient à leurs enfants et petits-enfants. Il ne suffit pas d’appeler à la prospérité pour tous, a-t-il poursuivi, si les règles commerciales et les systèmes financiers continuent d’aggraver la pauvreté des autres nations. Pour ce qui concerne son pays, il a parlé de son plan de mise en œuvre des 17 ODD, qui lui a permis d’être en bonne voie sur cinq d’entre eux (faim, santé, éducation, eau et vie aquatique), tout en regrettant que les autres n’aient encore pu être atteints. Soulignant que son pays avait besoin de soutien pour sauvegarder ces progrès réalisés et renforcer la résilience de son économie, il a expliqué que le Malawi avait connu cette année à la fois la pire épidémie de choléra de son histoire, une sécheresse entraînant des pertes agricoles importantes et un cyclone faisant plus d’un millier de morts et un demi-million de déplacés.
Les PMA ont besoin de décisions et d’actions sur le financement climatique, a-t-il rappelé, exigeant des actes forts s’agissant de l’annulation de leurs dettes. « Annulez les dettes! » a martelé le Président à la tribune, en rappelant que seul ce type de mesures pourrait permettre de rattraper les pertes économiques de la pandémie de COVID-19 et les deux années supplémentaires de progrès « perdues à cause de la guerre en Europe de l’Est ». L’argent dépensé pour le service de la dette devrait plutôt servir à la reconstruction des routes, écoles, hôpitaux, entreprises et moyens de subsistance, a-t-il déclaré.
M. Chakwera a indiqué que son pays voulait non seulement renforcer sa résilience économique, mais aussi continuer, pour combler les déficits de financement des ODD, à « frapper aux portes des institutions financières qui restent trop lentes, trop insensibles et trop rigides ». Si le Malawi est attaché à un système international fondé sur des règles, ces règles, qui ont longtemps joué contre les PMA, doivent être changées, a-t-il prié. C’est pourquoi le Malawi est également favorable à une « réforme radicale » du Conseil de sécurité, a-t-il poursuivi, fondée sur des valeurs de démocratie, d’inclusion, de responsabilité et de confiance. Il a relevé à cet égard, comme un élément significatif, qu’à l’occasion de cette session de l’Assemblée générale axée sur la confiance et la solidarité, un seul chef d’État parmi les membres permanents du Conseil, le Président des États-Unis, s’était présenté à la tribune. « Ce n’est pas ainsi que l’on construit la confiance et que l’on fait preuve de solidarité. » Faisant écho aux mots du Président Joseph Biden, il a insisté sur le fait que l’Afrique devait avoir des sièges permanents au Conseil de sécurité de l’ONU avec droit de veto.
Le Président du Malawi a conclu son intervention en appelant de ses vœux une ONU réformée et un « nouveau paradigme de développement » qui tienne compte des intérêts du monde en développement, en matière d’innovation, de résilience climatique, de développement des capacités de chaque continent à faire face aux futures pandémies, et qui encourage les jeunes à prendre les commandes pour atteindre les ODD.
M. TANETI MAAMAU, Président de Kiribati, s’est félicité que cette session de l’Assemblée générale vise à « reconstruire la confiance et raviver la solidarité mondiale ». Face aux tensions, aux disparités économiques et aux défis provoqués par les pandémies, les crises et les catastrophes climatiques, cet appel souligne la nécessité pour les pays de rétablir la confiance dans la coopération et la diplomatie multilatérales, a-t-il salué, appelant à un engagement mutuel pour forger des partenariats stratégiques. Il a souligné le fait qu’aucune nation ne peut prospérer dans l’isolement et qu’il importe de travailler ensemble, comme l’a démontré l’expérience pandémique. Dans ce contexte, le Président a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur des objectifs de développement durable (ODD), rappelant qu’en 2018, Kiribati a été l’un des rares États Membres à présenter son rapport national volontaire. Dans l’optique de 2030, il a invité les pays à faire preuve d’ambition et de mobilisation pour garantir la réalisation à temps de ces objectifs. Toutefois, rien ne garantit que les ODD seront atteints, a-t-il reconnu, craignant dès lors que la sortie de Kiribati de la catégorie des pays les moins avancés (PMA) ne soit pas durable.
Le Président a ensuite rappelé que, depuis son indépendance en 1979, Kiribati a bénéficié de 44 années de gouvernance stable et pacifique. Tout en reconnaissant que son pays manque des capacités et des compétences nécessaires à son développement, il a souligné la concorde confessionnelle qui y règne et la volonté de son gouvernement de parvenir à l’équilibre entre les sexes et à l’égalité des chances. Kiribati a ainsi renforcé ses politiques et ses lois pour soutenir et autonomiser les femmes et les filles, les personnes handicapées, les seniors, les chômeurs, les jeunes et les enfants, s’est-il enorgueilli. Le Chef de l’État a également souligné l’attachement de son pays aux buts et principes de la Charte des Nations Unies. Il s’est toutefois alarmé des menaces liées à l’existence d’armes nucléaires, au rejet d’eaux traitées nucléairement et à la fuite de matières radioactives dans l’océan Pacifique. Assurant que Kiribati continuera de promouvoir la non-prolifération et l’élimination totale des armes nucléaires, M. Maamau s’est prononcé pour le versement de compensations aux habitants de l’île Christmas qui ont été exposés aux essais nucléaires.
Après avoir plaidé pour l’intensification de la lutte contre la corruption, le Président a souligné les efforts de son gouvernement pour améliorer la prospérité nationale, notamment par le biais de l’apprentissage et du renforcement des capacités. Saluant le soutien des partenaires de développement, il a souhaité que cet appui soit coordonné pour garantir une distribution juste et inclusive de ressources limitées. L’objectif, a-t-il dit, est d’accélérer la réalisation des ODD, en dépit des défis auxquels Kiribati est confronté, qu’il s’agisse de son isolement géographique, de la dispersion de ses îles au sein de sa zone économique exclusive ou de sa vulnérabilité aux changements climatiques. Mais ces efforts s’avèrent très coûteux, a-t-il fait valoir. Pour exploiter durablement nos ressources océaniques, nous avons besoin d’une aide financière et d’un accès aux capacités, technologies et équipements appropriés, a-t-il insisté, invitant également les pays développés à consacrer à l’adaptation aux changements climatiques davantage de fonds que ce que prévoit l’Accord de Paris. Cela permettrait notamment financer les pertes et dommages et de faciliter les investissements dans l’alerte précoce, a-t-il conclu.
M. EMMERSON DAMBUDZO MNANGAGWA, Président du Zimbabwe, s’est réjoui de la consolidation de la démocratie et de l’état de droit dans son pays, à la suite des élections générales organisées cette année. Pourtant, a-t-il protesté, le Zimbabwe est soumis depuis 23 ans à des sanctions économiques « illégales et unilatérales imposées par certains pays occidentaux », visant à « soumettre » la volonté souveraine du peuple zimbabwéen. Il a exigé leur levée inconditionnelle, comme celles imposées à des pays comme Cuba. Malgré ces sanctions, le peuple du Zimbabwe maîtrise son destin en utilisant ses propres ressources intérieures. Au cours des trois dernières années, le pays a connu la croissance économique la plus rapide d’Afrique australe, a affirmé le Président. En outre, le Zimbabwe donne la priorité à l’élimination de la pauvreté et à l’amélioration de la qualité de vie de sa population, en particulier celle des zones rurales. L’autonomisation et le renforcement des capacités des petits agriculteurs ont permis de parvenir à la sécurité alimentaire et nutritionnelle au niveau national. Cette année, le pays deviendra d’ailleurs exportateur net de son blé.
Cependant, le Zimbabwe n’a pas été épargné par les effets négatifs des changements climatiques, a souligné M. Mnangagwa. C’est pourquoi le Gouvernement continue de réaliser les investissements nécessaires pour renforcer la résilience de ses infrastructures face aux changements climatiques et que des barrages sont construits dans tout le pays. Un programme ambitieux, mais réalisable, vise à creuser des forages alimentés à l’énergie solaire dans chacun des 35 000 villages du pays. « Le Zimbabwe est ouvert aux affaires », a lancé le Président: des pôles d’innovation et des parcs industriels créés au sein des établissements d’enseignement supérieur incitent les étudiants à se tourner vers le développement et la production de biens et de services.
Réformer les institutions financières mondiales est essentiel pour débloquer des financements pour les pays en développement, a poursuivi le Président. L’architecture actuelle est selon lui « excluante ». Dominée par quelques États, elle est incapable de fournir à ces pays les ressources nécessaires pour financer leur développement en matière de santé et d’environnement. Les lacunes du dernier cycle d’allocation de droits de tirage spéciaux (DTS) doivent être corrigées, a-t-il ajouté. Soutenant le plan de relance proposé par le Secrétaire général, le Président a en outre demandé des prêts concessionnels à long terme, un accès accru aux DTS non utilisés, ainsi que la possibilité d’avoir recours à des modalités telles que l’annulation et la restructuration de la dette. De même, la mise en place d’une architecture de sécurité mondiale juste et inclusive est devenue urgente. « Le maintien de la paix et de la sécurité ne devrait jamais être l’apanage de quelques privilégiés », a argué le Président, avant de réaffirmer les appels de l’Afrique à une réforme du Conseil, conformément au Consensus d’Ezulwini et à la Déclaration de Syrte.
M. JOSÉ RAMOS-HORTA, Président du Timor-Leste, a déclaré qu’au cours des 20 dernières années, depuis l’indépendance de son pays, les indicateurs économiques et sociaux du Timor-Leste n’ont cessé de progresser, notamment en termes d’espérance de vie, de réduction de la pauvreté et de mortalité infantile. Cela est dû presque entièrement à la solidarité cubaine, a-t-il précisé, même si notre propre gouvernement continue de contribuer pour une part importante au financement des programmes de coopération sanitaire en cours. Aujourd’hui, 96,1% des habitants ont l’électricité et les panneaux solaires sont largement utilisés au profit des foyers pauvres et isolés, a-t-il encore indiqué, et l’accès à Internet s’améliorera considérablement dans les prochaines années grâce au déploiement de la fibre optique.
Le Chef de l’État a aussi salué les progrès réalisés ces dernières années en matière de promotion du leadership des femmes au niveau national, 34% des sièges au Parlement national étant occupés par des femmes. Après avoir souligné le lancement, en 2022, d’un plan d’action national pour mettre fin à la violence basée sur le genre au cours de la prochaine décennie impliquant la société civile, il a attiré l’attention sur le rôle accru que joue son pays au sein de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et l’adhésion prochaine du Timor-Leste à l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Par ailleurs, il a considéré que la communauté internationale devrait accroître son appui aux pays fragilisés par un conflit afin de les aider à relever les défis du développement, de la stabilité et la de résilience.
M. Ramos-Horta a jugé essentiel que le Conseil de sécurité réforme son fonctionnement et sa composition, selon lui « anachroniques », pour répondre efficacement aux crises au Myanmar et en République populaire démocratique de Corée. « Le Timor-Leste condamne l’invasion, la violation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine », a ajouté le Président, notant que les conséquences économiques et environnementales de la guerre touchent le peuple ukrainien, mais aussi les Russes et le reste du monde. Enfin, pour répondre aux défis climatiques, les pays les moins avancés et les petits État insulaires en développement devraient pouvoir bénéficier des efforts combinés visant à débloquer des financements grâce à l’allégement de la dette, à rationaliser le financement international sur la base des taux d’intérêt les plus bas, et à augmenter l’aide publique au développement.
M. SALVA KIIR MAYARDIT, Président du Soudan du Sud, a indiqué que son pays était attaché au multilatéralisme et à la coopération internationale, qui selon lui sont les meilleurs moyens d’atteindre des objectifs et aspirations communs. Il a insisté sur la nécessité de rétablir la confiance et la solidarité sur la base de l’égalité souveraine de tous les États pour relever les défis du développement. Le Soudan du Sud, a-t-il expliqué, a à cette fin élaboré un plan prévoyant sept cibles pour atteindre les ODD, dans lequel l’éducation est clef.
Le Président a cité quelques exemples des progrès réalisés dans ce domaine par son pays, notamment l’inclusion dans la Constitution de l’accès garanti à l’éducation gratuite, l’éducation étant prévue comme un droit humain de chaque enfant. Il a également rappelé qu’une loi avait été votée pour interdire le mariage des enfants et permettre aux filles de recevoir une éducation au même titre que les garçons. Il a enfin expliqué que son pays avait revalorisé les salaires des enseignants pour leur permettre de « joindre les deux bouts ». Concernant les soins de santé, autre ODD prioritaire, M. Kiir a souligné que son pays fait le nécessaire pour que le système de santé permette à tous d’accéder à des soins de bon niveau, à des prix abordables.
Concernant les changements climatiques, il a indiqué vouloir promouvoir non seulement l’utilisation durable des terres mais aussi la production d’énergies renouvelables, en coopérant avec ses partenaires internationaux. Il a jugé juste, dès lors, d’appeler les pays développés à diminuer leurs propres émissions de 45% et à s’engager davantage pour soutenir les pays en développement, notamment par le biais du fonds pour les pertes et dommages. À ce titre, il a estimé que le Sommet africain sur le climat, qui s’est tenu début septembre à Nairobi au Kenya, avait représenté un tremplin pour raviver la solidarité et mettre en œuvre le Programme 2030.
Le Président a reconnu que le Soudan du Sud avait connu des « difficultés depuis 2013 » mais que le pays avait tourné la page en signant l’Accord de paix revitalisé de 2018, lui permettant désormais de se consacrer à sa stratégie de développement, de consolider la paix et de stabiliser son économie. Plusieurs dispositions de cet accord de paix doivent encore être mises en œuvre, a-t-il indiqué, notamment des élections transparentes, libres et régulières en 2024. À ce titre, il a insisté sur le dialogue renoué avec la société civile et l’opposition pour s’assurer que le processus de paix soit « aux mains des citoyens ». Il a aussi lancé un appel aux Nations Unies pour que soit levé l’embargo sur les armes qui vise le Soudan du Sud, un embargo qui a jusqu’à présent entravé la mise en œuvre des modalités de sécurité nécessaires à l’organisation de ces élections.
Évoquant en conclusion le conflit au Soudan voisin, il a indiqué que l’afflux de réfugiés soudanais et de rapatriés du Soudan du Sud avait mis à rude épreuve les communautés sud-soudanaises. Il a donc demandé à la communauté internationale, dans l’attente d’une stabilisation de la situation dans ce pays, de mettre à disposition des ressources et un soutien durable pour aider les réfugiés et déplacés au Soudan du Sud.
M. MAMADI DOUMBOUYA, Président de la Guinée, a souligné qu’après la pandémie de COVID-19, l’Afrique est aujourd’hui frappée par une « épidémie de coups d’État », en particulier les pays francophones du sud du Sahara. Pendant que le monde condamne, impose des sanctions et s’émeut, à juste titre, de la « brusque » réapparition de cette pratique que l’on croyait révolue, le Président a souhaité que la communauté internationale ait « l’honnêteté » de ne pas dénoncer les seules conséquences de ces coups de force, mais aussi d’en examiner les causes profondes. « Le putschiste n’est pas seulement celui qui prend les armes pour renverser un régime », a-t-il argué, mais également ceux, plus nombreux, qui ont recours à la duplicité pour manipuler la Constitution afin de se maintenir éternellement au pouvoir. Le Président a visé ainsi « ceux en col blanc qui modifient les règles du jeu pendant la partie pour conserver les rênes du pays ». La « rectification institutionnelle » à laquelle il a pris part le 5 septembre 2021 n’était à ses yeux qu’une conséquence du chaos qui fissurait le tissu social de son pays.
Pour expliquer la multiplication des coups d’État en Afrique de l’Ouest, M. Doumbouya a cité les promesses non tenues, l’apathie de la population, le « tripatouillage des constitutions » aux dépens des intérêts nationaux. Qui plus est, la mauvaise répartition de la richesse engendre des « inégalités sans fin », la famine et la misère. L’Afrique souffre d’un modèle de gouvernance qui lui a été imposé par l’Occident et qui s’adapte mal aux réalités et aux coutumes africaines, a-t-il analysé en tirant la conclusion que ce modèle démocratique « insidieusement » imposé aux Africains par l’Occident ne fonctionne pas. Ce modèle a contribué « à entretenir un système d’exploitation et de pillage de nos ressources par les autres », a-t-il regretté avant de dénoncer aussi la corruption des élites africaines considérées comme des démocrates « en fonction de leur docilité ou de leur aptitude à brader les ressources et les biens de leurs peuples », ou encore « à céder aux injonctions d’institutions internationales au service des grandes puissances ». Dans ce contexte, il a dit comprendre, « sans les approuver », ceux qui ont cédé à ce qu’on leur demandait.
Pour sa part, cependant, M. Doumbouya a affirmé n’avoir pour seule préoccupation que le bien-être de son peuple. Bien que le Sahel traverse l’une des crises les plus graves de sa « très vieille histoire », il saura y faire face, a-t-il assuré. À cette fin, il a jugé que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) devrait revenir à sa vocation économique et cesser de se mêler de politique pour privilégier le dialogue.
« Nous, Africains, sommes fatigués, épuisés des catégorisations dans lesquelles les uns et les autres veulent nous cantonner », a poursuivi le Président, en s’insurgeant contre ces classements « insultants » qui les placent sous l’influence des Américains, des Français ou encore des Russes. « Nous ne sommes ni pros ni anti-Américains, ni pro ni anti-Chinois, ni pro ni anti-Français; nous sommes tout simplement pro-Africains », a-t-il martelé. Avec plus d’un milliard d’Africains dont environ 70% de jeunes « totalement décomplexés », il est temps selon lui de prendre conscience que les règles issues de l’après-guerre, lorsque les États africains n’existaient pas, sont périmées. Le moment est venu « d’arrêter de nous faire la leçon, d’arrêter de nous traiter comme des enfants », a conclu M. Doumbouya, pour qui cette « infantilisation est du plus mauvais effet pour une jeunesse africaine qui s’est émancipée ».
M. EVARISTE NDAYISHIMIYE, Président du Burundi, a considéré que la confiance et la solidarité, en tant valeurs qui devraient caractériser les relations entre les États, sont fragilisées car mises au service d’intérêts particuliers. Nous devons les libérer, a-t-il plaidé, pour qu’elles soient des valeurs partagées et retrouvent leur sens originel « perdu de manière fracassante avec la colonisation et l’expansion d’autres idéologies égoïstes qui veulent que les pays moins développés soient enfoncés davantage au profit des pays riches ». Pour le Chef de l’État, la colonisation a raté son tournant car elle aurait pu créer une solidarité par la rencontre des cultures et des savoir-faire et par un partenariat mutuellement bénéfique à la place d’un partenariat « de dépendance ». Il a blâmé les effets du néocolonialisme caractérisés par l’ingérence multiforme dans les affaires intérieures des États en développement, l’injuste rémunération des matières premières et les fortes exigences imposées par les institutions de Bretton Woods. Pour le Président, « l’aide au développement et autre partenariat pour le développement sont autant de termes imprégnés de mauvaise foi ». Ces termes prolifèrent pour voiler l’hypocrisie alors que les ressources mises en action pour espérer des rendements économiques susceptibles d’assurer la relance, elles, régressent, a-t-il jugé. Fort de ce constat, il a appelé à transcender les besoins et les intérêts des États, la solidarité internationale devant veiller à ce que tous les pays puissent interagir entre eux sur un pied d’égalité.
Le Chef de l’État a ensuite assuré que son gouvernement et le peuple burundais sont déterminés à optimiser les dividendes d’une paix et d’une réconciliation nationale « si chèrement acquises ». Pour cela, a-t-il expliqué, notre cheval de bataille est la promotion de la bonne gouvernance et la lutte contre toute forme d’injustice. Il a mis l’accent sur les efforts consentis en matière d’amélioration de la gestion de la chose publique et de renforcement de la démocratie et de la bonne gouvernance. En instaurant un climat propice aux affaires, le Burundi est devenu un lieu sûr pour les opportunités en matière d’investissement et d’activités économiques diverses, a assuré M. Ndayishimiye. En outre, pour gagner le pari économique, son pays met à l’avant-garde les jeunes et les femmes, lesquels sont de réels acteurs du développement socioéconomique, à travers la promotion de l’entrepreneuriat, l’innovation et l’esprit de créativité.
S’agissant de la situation sur le plan régional, le Président a souligné que, dans le cadre de sa direction de la Communauté d’Afrique de l’Est, il a initié une série d’actions en vue du retour à la paix et à la sécurité dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Le Burundi participe également aux opérations de maintien de la paix et à la lutte contre le terrorisme en République centrafricaine (RCA) et en Somalie, ce qui témoigne d’après lui de la volonté du peuple burundais de contribuer à l’avènement d’un monde meilleur et plus solidaire. Le dirigeant a réitéré son appel à la solidarité internationale pour la pacification de l’est de la RDC, et réaffirmé à ce sujet son soutien indéfectible aux processus de paix de Luanda et de Nairobi ainsi qu’à l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région, dont le Mécanisme régional de suivi est présidé par le Burundi. Il a de nouveau condamné les ingérences extérieures dans les affaires des États, y compris au nom des droits de l’homme, tout en s’insurgeant également contre les changements anticonstitutionnels de pouvoir qui représentent un sérieux revers en termes d’acquis démocratiques enregistrés depuis plusieurs années en Afrique. L’ordre constitutionnel et l’état de droit doivent primer avant tout, a insisté M. Ndayishimiye, le Burundi restant fermement attaché au règlement pacifique des conflits par la voie du dialogue, de la coopération, de la concertation et de la négociation.
M. ALEKSANDAR VUČIĆ, Président de la République de Serbie, a déclaré que son pays était sur la voie de l’adhésion à l’Union européenne (UE), mais qu’il n’était pas pour autant prêt à tourner le dos aux amitiés traditionnelles bâties depuis des siècles. En tant que Président d’une petite nation, il ne souhaite pas s’arroger le droit de parler des relations entre grandes puissances; il peut, en revanche, parler des horribles conséquences du non-respect du droit international. La tentative de découper son pays en morceaux, qui avait officiellement commencé en 2008 par la déclaration unilatérale de l’indépendance du Kosovo, n’est pas encore achevée. De son point de vue, la violation de la Charte des Nations Unies dans le cas de la Serbie fut le précurseur de nombreux problèmes d’aujourd’hui.
Le Président a jugé « hypocrites » les déclarations de son homologue américain et du Chancelier allemand puisque presque toutes les puissances occidentales ont violé à la fois la Charte et la résolution 1244 (1999) du Conseil de sécurité. M. Vučić a fait référence à « un évènement sans précédent dans l’histoire du monde », quand les 19 pays les plus puissants de la planète ont pris la décision -sans implication du Conseil de sécurité, a‑t‑il insisté– d’attaquer et de punir brutalement la Serbie, pays souverain sur le sol européen, soi-disant pour empêcher un désastre humanitaire. Quand le Président de la Fédération de Russie a utilisé ces mêmes prétextes, ces mêmes mots, pour attaquer l’Ukraine, lesdits pays « ne riaient plus ». Le Président a ensuite protesté contre la manière dont le « soi-disant Kosovo » a obtenu son indépendance en 2008, événement qu’il a interprété comme « la décision illégale de sécession de la province autonome du Kosovo-Metohija ». Cette décision a été prise à un moment où le Gouvernement serbe s’était engagé en faveur de l’intégration européenne et euro-atlantique. Depuis, 70% des Serbes de la province du Kosovo-Metohija ont quitté leur foyer. « Belle loi, belle justice », a ironisé le Président, dénonçant un deux poids, deux mesures: les agresseurs de la Serbie d’hier donnent aujourd’hui des leçons d’intégrité territoriale s’agissant de l’Ukraine. La Serbie, elle, soutient l’intégrité territoriale de l’Ukraine, fidèle à ses principes, indépendamment de son amitié séculaire avec la Russie. « Pour nous, toute violence est la même, toute violation de la Charte des Nations Unies est la même », a insisté M. Vučić.
Aujourd’hui, au « Kosovo-Metohija, province méridionale de la République de Serbie », l’autorité séparatiste d’Albin Kurti, Premier Ministre du Kosovo, s’exerce de manière brutale contre les Serbes, a dénoncé le Chef de l’État, et la communauté internationale « détourne le regard en haussant les épaules ». Il a appelé à ce que l’intégrité territoriale de la Serbie soit respectée comme celle de chaque État Membre de l’ONU, à ce qu’un ordre international basé sur des règles prévale, afin que personne ne disparaisse dans un « conflit darwiniste entre puissances ». La République de Serbie, son gouvernement et toutes les institutions œuvrent pleinement à la préservation du dialogue avec Pristina, sous les auspices de l’UE, a assuré M. Vučić. Toutefois, le déséquilibre qui l’amène à devoir constamment faire des concessions ne mène à rien. Du point de vue du Président, la discussion avec le Gouvernement de M. Kurti ressemble plus à un monologue qu’à un dialogue, car il est difficile d’expliquer pourquoi, plus de 10 ans après la signature de l’Accord de Bruxelles, une communauté des municipalités à majorité serbe n’a pas été formée au Kosovo. La confiance des Serbes est très ébranlée, a prévenu le Président.
M. CHARLES ANGELO SAVARIN, Président de la Dominique, a souligné la nécessité urgente de financer la lutte contre les changements climatiques et de travailler à l’atténuation de leurs conséquences. Regrettant que le conflit en Ukraine se prolonge, « alors que le monde entier réclame la fin de cette terrible guerre », il a rappelé que la dernière estimation de la Banque mondiale concernant la reconstruction de l’Ukraine s’élevait à 411 milliards de dollars. Appelant à la fin des combats, il a soutenu la déclaration commune du G20 publiée à l’issue du sommet de New Delhi. Le Président a rappelé qu’en 2010, l’Occident avait qualifié de « Printemps arabe » des soulèvements ayant abouti à la chute de plusieurs gouvernements sans qu’il soit question de sanctions ou d’interventions militaires pour les rétablir. « Quelle est la différence entre le Printemps arabe et l’Été africain? » s’est-il ensuite interrogé, appelant à tenir compte de la sagesse des dirigeants de l’Union africaine, opposés à une intervention militaire qui, selon lui, « ne servirait certainement pas le peuple africain ».
M. Savarin est revenu sur les défis considérables auxquels sont confrontés les petits États insulaires en développement (PEID), pris en étau entre leur manque de ressources financières et le coût des pertes dues aux changements climatiques. Il s’est félicité de l’organisation du Dialogue de haut niveau sur le financement du développement et de l’appel lancé par le Secrétaire général en faveur d’un sommet sur l’ambition climatique. Le Président a insisté sur la nécessité de mettre en œuvre le fonds « pertes et dommages », créé lors de la COP27, pour permettre aux économies des PEID de se redresser après les catastrophes. Il a expliqué qu’au cours des 30 dernières années, les PEID n’avaient pas reçu de soutien suffisant de la part des partenaires du développement et des institutions financières internationales, les contraignant à emprunter à des conditions défavorables et les poussant vers des niveaux d’endettement insoutenables. Le Président a rappelé le soutien de son pays à la mise en place de l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle. En outre, il a qualifié d’indispensable la réforme des institutions financières internationales, rappelant le soutien de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), présidée par son pays, à l’initiative de Bridgetown pour la restructuration des dettes souveraines.
M. Savarin s’est félicité de l’accord créant un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Il a également salué l’engagement pris par les parties de transférer des technologies marines afin d’aider les pays en développement à mettre en œuvre l’accord et à en tirer profit.
Qualifiant de désastreuse la situation en Haïti, État membre de la CARICOM, le dirigeant a estimé qu’elle méritait une intervention internationale urgente et appelé le Conseil de sécurité à agir de manière décisive en ce sens. Il a aussi rappelé que la Dominique réclamait, comme l’écrasante majorité des États Membres, la levée du blocus économique imposé par les États-Unis à Cuba. Il a aussi réaffirmé son soutien à la levée des sanctions contre le Venezuela qui « constituent une violation des droits humains du peuple vénézuélien ». Enfin, rappelant que les tempêtes Erika en 2015 et Maria en 2017 avaient respectivement coûté à la Dominique l’équivalent de 90% et de 226% de son PIB, il a compati aux souffrances du Maroc et de la Libye, récemment affectés par des catastrophes naturelles.
M. RANIL WICKREMENSINGHE, Président de Sri Lanka, a rappelé que, l’an dernier à la même époque, son pays a traversé la période la plus difficile de son histoire récente sur les plans social, économique et politique. Même nos traditions démocratiques ont été menacées par les tentatives visant à occuper notre parlement et à le paralyser, a-t-il déploré, ajoutant toutefois qu’une transition politique a pu se mettre en place. Il a indiqué que les réformes qu’il a depuis initiées visent d’une part à reconstruire la confiance entre le peuple et le Gouvernement et d’autre part, à jeter les bases de la stabilisation et de la reprise économiques. Assurant que les Sri-Lankais bénéficient déjà des résultats positifs de ces mesures dans leur vie quotidienne, il a dit vouloir conduire le pays vers une reprise et une croissance durables, avec le soutien de la communauté internationale.
Sur le plan géopolitique, le Président a noté l’émergence de nouveaux centres de pouvoir dans le cadre d’un monde multipolaire. Nous voyons un monde où les anciennes rivalités des grandes puissances et les tensions se sont ravivées dans une guerre ouverte, a-t-il observé, déplorant que, parallèlement, les divisions Nord-Sud se creusent en raison de la fracture numérique, de la crise financière, de la dette, et de la transition énergétique. De plus, a alerté le Chef de l’État, contrairement à la promesse de 2030, nous assistons aujourd’hui à des niveaux de pauvreté et de faim jamais vus depuis des décennies. De fait, les pays neutres et non alignés du Sud, comme Sri Lanka, se trouvent une fois de plus « coincés dans le jeu des puissances mondiales », a-t-il regretté, non sans rappeler les appels à l’unité et à la solidarité lancés à l’ONU, au G20, au sommet des BRICS et au G7 pour construire un avenir inclusif.
Le Président a ensuite signalé que les impacts financiers de crises telles que les changements climatiques et la pandémie de COVID-19 entravent la capacité des petits pays endettés comme le sien à progresser dans la réalisation des ODD ainsi que dans l’adaptation et l’atténuation. Malgré cela, Sri Lanka « ne fuit pas sa responsabilité envers la planète », a-t-il affirmé, évoquant le plan national d’ambition climatique présenté l’an dernier lors de la COP27. Grâce à ce dispositif, nous aurons, d’ici à 2030, 70% d’énergies renouvelables dans la production d’électricité, nous augmenterons la couverture forestière de 32% et nous réduirons les émissions de gaz à effet de serre de 14,5%, s’est-il enorgueilli, promettant également d’éliminer progressivement le charbon d’ici à 2040 et d’atteindre le « zéro net » d’ici à 2050. Reste que le dérèglement climatique a des implications sur les engagements pris en faveur de l’énergie propre, de la sécurité alimentaire, de la disponibilité de l’eau potable et des moyens de subsistance des agriculteurs, a concédé le Chef de l’État, pour qui l’urgence de mobilisation des financements climatiques est aujourd’hui plus grande que jamais. À cet égard, il a regretté que les pays riches ne tiennent pas leurs promesses en matière d’assistance pour l’atténuation et l’adaptation, et de compensation pour les pertes et les dommages.
Pour M. Wickremesinghe, les efforts nationaux ne suffiront pas à eux seuls à garantir le succès des ODD et à inverser les changements climatiques. Une solidarité mondiale est donc nécessaire pour restructurer l’architecture financière internationale, a-t-il plaidé, avertissant qu’une absence de restructuration de l’ordre budgétaire mondial ferait échouer la lutte pour inverser les changements climatiques et atteindre les ODD. « Il est encore temps de rectifier le tir car la crise n’a pas atteint son paroxysme », a-t-il voulu croire, avant de souhaiter que ces questions soient abordées en priorité lors du Sommet de l’avenir en 2024.
M. DENIS SASSOU NGUESSO, Président de la République du Congo, a vu la question du climat comme « la plus pressante de toutes les urgences ». La montée continuelle du niveau des mers qui met en péril les pays insulaires, la désertification déferlante, la canicule suffocante qui emporte chaque fois plus de personnes, les inondations répétitives et les coulées de boue soudaines, autant de phénomènes aussi dangereux que dévastateurs qui interpellent désormais jusqu’aux plus sceptiques d’entre nous, a-t-il constaté. C’est dans cet esprit, et en sa qualité de Président de la Commission climat du bassin du Congo, que le Président Nguesso a lancé, lors de la COP27 en Égypte, l’Initiative de la « Décennie mondiale de l’afforestation » pour une biodiversité et un couvert végétal plus dense, au service de l’humanité. S’inscrivant dans cet élan, son pays s’est engagé à accueillir, en octobre prochain, un sommet des trois bassins des écosystèmes de biodiversité et des forêts tropicales (Amazonie, Bornéo-Mékong et Congo), comme réponse collective et concertée de ces trois poumons verts de la planète à l’insécurité climatique, a-t-il annoncé.
Le Président a ensuite abordé la question du développement agricole en Afrique, soulignant la nécessité impérieuse de protéger les terres arables des incidences néfastes des changements climatiques. L’Afrique, a-t-il recommandé, doit dès à présent opérer un bond qualitatif pour disposer demain d’une nourriture suffisante et de qualité et conjurer à tout jamais le spectre de la famine et de l’exode de ses populations. Pour cela, il a souligné son besoin urgent d’agriculture moderne, soutenue notamment par des dispositifs performants d’irrigation et de mécanisation, une agriculture qui lui permette de réduire de manière significative ses importations alimentaires, celles-ci étant aujourd’hui encore trop élevées. Le Président a souhaité avoir des partenariats techniques et financiers efficients pour pouvoir réaliser des avancées substantielles dans ce secteur. Toutefois, a-t-il déclaré, l’Afrique n’a nullement besoin de ces partenariats sous-tendus par des « aides publiques au développement politiquement orientées et synonymes d’aumône organisée ». « Les subventions au compte-gouttes, distillées au rythme des intérêts propres des donateurs, ne permettront certainement pas l’essor réel et effectif de notre continent… qui, du reste, n’en a nul besoin », a tranché le Président.
En sa qualité de Président du Comité de haut niveau de l’Union africaine sur la Libye, il a fait valoir que la Conférence de réconciliation interlibyenne n’aura de sens que si elle est inclusive, constructive et consensuelle. Il en a appelé « une fois encore » à l’accompagnement de la communauté internationale, à commencer par les pays de la sous-région et les organisations qui les regroupent, pour soutenir au mieux les efforts de médiation. Le Président a, enfin, rappelé « l’impérieuse nécessité de réformer » le Conseil de sécurité, afin d’assurer une représentation plus juste de tous les continents et de tous les peuples du monde, rappelant la position commune de l’Afrique, « une position conciliante et consensuelle, scellée à Ezulwini ». Il a réitéré « l’exigence africaine » de voir deux de ses États y siéger en tant que membres permanents, avec droit de veto. « Ce ne serait que justice devant l’histoire! »
M. WILLIAM SAMOEI RUTO, Président du Kenya, a regretté la paralysie dans lequel le monde actuel est plongé, déplorant l’échec des systèmes de paix et de sécurité, l’inadéquation du développement et le manque d’action climatique sur fond de progrès technologiques et d’énormes richesses. C’est dans ces moments que le multilatéralisme et l’action collective internationale sont les plus nécessaires, a‑t‑il noté, en dénonçant une « clique hostile de formations géopolitiques » qui défie les valeurs et principes fondamentaux des Nations Unies. Soulignant l’impunité de certains acteurs de la scène mondiale et les dysfonctionnements d’un Conseil de sécurité « antidémocratique, non inclusif et non représentatif », il a regretté la méfiance omniprésente entre Nord et Sud, entre riches et pauvres, ou encore entre pollueurs émetteurs et victimes.
Le Président a rappelé les contributions de son pays aux efforts de paix dans différentes régions, citant non seulement l’Accord de paix de Djouba sur le Soudan, le Dialogue intercongolais, les négociations entre les Gouvernements de la Somalie et du Somaliland, mais aussi la visite et le plan de paix en 10 points d’une délégation africaine pour la paix à Moscou et à Kyïv. S’agissant d’Haïti, où le Kenya est prêt à jouer son rôle dans le cadre du possible déploiement d’un « soutien multinational à la sécurité », M. Ruto a demandé au Conseil de sécurité d’approuver une résolution en ce sens, dans un but humanitaire et en vue d’aider à la tenue d’élections libres et équitables en Haïti.
Le Chef de l’État a souligné que le « spectacle tragique » de jeunes Africains embarqués sur des esquifs pour risquer leur vie à la recherche d’opportunités à l’étranger est un témoignage des échecs du système économique mondial. Sur ces questions, il a souligné que le sommet africain sur le climat de Nairobi avait proposé un changement de paradigme en reconnaissant que l’action climatique et les ODD doivent être poursuivis simultanément. Le développement, a‑t‑il insisté, est donc un impératif fondamental, et la croissance verte le seul moyen durable d’y parvenir. Pour exploiter les ressources de l’Afrique, sa jeunesse, son potentiel d’énergies renouvelables ou encore ses terres arables, le Président a rappelé que la Déclaration de Nairobi faisait du déblocage des financements à grande échelle, et donc de la réforme du système financier international, une priorité.
Il a présenté les quatre grands axes d’intervention possibles de cette réforme, à commencer par l’appel lancé à la communauté internationale en faveur d’une « nouvelle architecture de la dette souveraine » pour prolonger la durée de cette dernière et prévoir un délai de grâce de 10 ans. En deuxième lieu, la Déclaration de Nairobi encourage les institutions financières internationales à accorder davantage de prêts concessionnels, à des conditions financières favorables. En troisième lieu, elle demande une réorganisation des marchés financiers, notamment celle du système d’évaluation des risques de certains pays employé par les agences de notation de crédit qui, comme l’a montré la crise financière, se sont trop fréquemment trompées. Pour finir, la Déclaration de Nairobi réclame un mécanisme public mondial de financement du climat, financé par une taxe mondiale sur le carbone et sur le commerce des combustibles fossiles, et par une taxe sur les émissions des transports aériens et maritimes. Fort de cette feuille de route, M. Ruto a conclu son intervention en disant compter, pour la concrétiser, sur une « nouvelle charte mondiale du financement climatique », qui devrait être négociée dans le cadre de l’Assemblée générale et de la COP notamment.
M. WESLEY SIMINA, Président desÉtats fédérés de Micronésie, a relevé qu’en 2015, l’année où le Programme de développement durable à l’horizon 2030 a été adopté, la communauté internationale a également entériné l’Accord de Paris, instrument clef pour lutter contre la crise climatique et « point culminant du multilatéralisme ». Malheureusement, le monde n’a pas su déployer les efforts nécessaires pour limiter l’augmentation de la température moyenne mondiale à 1,5 degré Celsius. Les dommages causés par la crise climatique s’accumulent chaque jour en Micronésie, s’est alarmé le Président, et ils continueront de s’aggraver à un rythme plus rapide encore à mesure que les points de bascule seront atteints. Pour y remédier, il a préconisé une approche contraignante inspirée du Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone, qui constitue à ses yeux le « meilleur accord environnemental » ratifié par les États Membres. Ce traité pourrait servir de modèle pour un nouvel accord visant à réduire le méthane, véritable « chalumeau poussant la planète du réchauffement climatique à l’ébullition globale ». Bien qu’il s’agisse d’une menace existentielle pour son pays et de nombreux autres petits États insulaires en développement (PEID), les principaux émetteurs, y compris ceux des pays en développement, ne se sont pas encore engagés à mettre à jour leurs contributions déterminées au niveau national, a-t-il déploré.
Cette semaine, la Coalition de la haute ambition sur les changements climatiques, dont fait partie l’archipel, a publié un appel fort à l’action pour demander aux principaux émetteurs de s’engager à réduire leurs émissions d’au moins la moitié d’ici à 2030 et de fixer leurs objectifs de zéro émission nette au plus tard à 2050. Même si la Micronésie a des émissions négligeables, elle s’est engagée à réduire de 65% ses émissions de CO2 liées à la production d’électricité d’ici à 2030, a annoncé M. Simina. Le dirigeant a réitéré son appel à la nomination d’un Représentant spécial pour le climat et la sécurité et à la pleine opérationnalisation du fonds pour les pertes et dommages lors de la COP28. En outre, son pays a récemment adopté un amendement à sa constitution afin de reconnaître le droit à un environnement sain. La Micronésie fait partie du groupe de pays qui ont plaidé pour que l’Assemblée générale demande à la Cour internationale de Justice (CIJ) d’émettre un avis consultatif sur les obligations des États et les conséquences des changements climatiques au regard du droit international.
En première ligne des changements climatiques, la Micronésie n’a pas besoin de plus de promesses, mais de plus d’action, a analysé le Président. Il incombe à la communauté internationale de s’attaquer aux sources des facteurs de stress qui perturbent l’océan. Selon lui, l’adoption récente de l’Accord sur la diversité biologique marine dans les zones ne relevant pas de la juridiction nationale (BBNJ) n’aurait pas été possible sans la contribution des PEID du Pacifique comme la Micronésie, qui s’est engagée activement dans les négociations. C’est pourquoi M. Simina a été le premier Chef d’État à signer cet accord hier. La quatrième Conférence internationale sur les PEID examinera en 2024 la création de partenariats internationaux ainsi que la manière dont la connectivité Internet peut changer la vie des insulaires, en rendant la télémédecine et l’éducation à distance accessibles sur chaque île isolée.
Confronté aux effets néfastes de la guerre en Ukraine sur la sécurité alimentaire, l’énergie et les finances, le Président a plaidé ensuite pour une réforme en profondeur du Conseil de sécurité, devenu « archaïque et inefficace » face aux défis sécuritaires du monde contemporain, en élargissant le nombre de membres permanents et non permanents, y compris un siège réservé aux PEID.
M. JAKOV MILATOVIĆ, Président de la République du Monténégro, a expliqué que son élection il y a à peine quatre mois ne laissait aucun doute quant à l’orientation politique souhaitée par ses concitoyens: renforcer l’état de droit, développer la prospérité, garantir la cohésion sociale et l’égalité des chances. Il a souligné l’importance de l’état de droit en tant que clef pour déverrouiller le potentiel économique et améliorer le niveau de vie dans son pays, avec une politique de tolérance zéro à l’égard de la corruption et de la criminalité organisée. « Pour mieux atteindre nos objectifs politiques plus larges, nous fondons notre politique étrangère sur trois piliers: le premier consiste à accélérer notre intégration dans l’Union européenne (UE); le deuxième à renforcer encore la crédibilité du Monténégro en tant que membre de l’OTAN; le troisième favorise les meilleures relations possibles avec les pays voisins des Balkans. » Partisan d’une société monténégrine inclusive, le Président a affirmé que son pays s’engage à aborder le passé sans parti pris, « en appelant les choses telles qu’elles sont, comme les victimes de ces événements tragiques s’attendent à ce qu’elles soient appelées ».
Après avoir condamné l’agression non provoquée et injustifiée de la Russie contre l’Ukraine, le dirigeant a invité la communauté internationale à intensifier ses efforts pour lutter contre les changements climatiques, en mettant en œuvre l’Accord de Paris. Il s’est dit fier que le Monténégro ait été le premier pays à inscrire l’engagement en faveur des ODD dans le cadre national à travers sa stratégie de développement durable. Une réforme fiscale et du marché du travail particulièrement importante a abouti à une augmentation du salaire et de la pension minimums, suivi par d’autres réformes de la sécurité sociale. M. Milatović a appeléà une réponse mondiale à la crise des réfugiés et des migrants, fondée sur le partage des responsabilités. Aujourd’hui, s’est-il enorgueilli, il y a plus de réfugiés ukrainiens par habitant au Monténégro que dans n’importe quel autre pays d’Europe.
Par ailleurs, le Monténégro reste déterminé sur la voie d’un avenir euro-atlantique. C’est dans cet esprit, a précisé le Président, qu’il a soumis sa candidature pour un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU pour la période 2026-27. En tant que pays européen, a-t-il assuré, nous sommes convaincus que l’adhésion du Monténégro à l’UE, ainsi que de l’ensemble de la région des Balkans occidentaux, renforcera encore notre position contre les « influences malveillantes des pays tiers », et fournira un exemple positif à tous les candidats des Balkans, à savoir que « l’élargissement de l’UE est encore possible ».
M. MAHMOUD ABBAS, Président de l’État de Palestine, a ouvert son discours sous les applaudissements de l’Assemblée, en proclamant: « Ceux qui pensent que la paix peut prévaloir au Moyen-Orient sans le peuple palestinien jouissant de ses pleins droits se trompent. » Après avoir rappelé que les territoires occupés défient plus de 1 000 résolutions de l’ONU et violent les principes du droit international, le Président a assuré l’Organisation de la confiance et de l’espoir qu’il garde, notamment dans la mise en œuvre de solutions exigeant la fin de l’occupation israélienne et la réalisation de l’indépendance de l’État de Palestine pleinement souverain, avec Jérusalem-Est comme capitale, selon les frontières du 4 juin 1967. De même pour le règlement de la question des réfugiés palestiniens, qui doit se faire conformément aux résolutions pertinentes, en particulier la 194 (III).
Alertant sur le risque de la transformation du conflit politique en conflit religieux, dont « Israël portera l’entière responsabilité », il a dénoncé des attaques commises par le « gouvernement raciste de droite » sur des sites islamiques et chrétiens, en particulier la mosquée Al-Aqsa, reconnue comme un lieu de culte exclusivement réservé aux musulmans, selon un rapport de la Société des Nations datant de 1930.
Le Président Abbas a dénoncé le silence de la communauté internationale concernant les violations flagrantes du droit international commises par Israël. Réaffirmant son intention de réclamer justice auprès des instances internationales compétentes, il a pointé du doigt Israël ainsi que le Royaume-Uni et les États-Unis pour leur rôle dans la « fatidique Déclaration Balfour ». Il a exigé une reconnaissance, des excuses, des réparations et des compensations conformément au droit international. « Nous n’oublierons pas la douleur, nous n’oublierons pas l’histoire », a-t-il averti.
Rappelant que le processus de paix se trouve dans une impasse « en raison de la politique israélienne », il a exhorté l’ONU et son Secrétaire général à convoquer une conférence de paix afin de sauver la solution des deux États et empêcher une détérioration de la situation qui menacerait non seulement la région, mais aussi le monde entier. « Nous exigeons la protection. »
Le Président a enjoint les États favorables à la solution des deux États, mais ne reconnaissant pas la Palestine, notamment les États-Unis et certains pays européens, à reconnaître l’État de Palestine. Au nom de la paix et de la justice, et par respect pour le droit international, il a exigé la mise en place de mesures dissuasives à l’égard d’Israël, et ce, jusqu’à ce que le pays honore ses obligations telles que présentées dans une déclaration écrite du Ministre des affaires étrangères de l’époque, Moshe Sharett.
Face à « l’odieuse occupation israélienne », M. Abbas a dit continuer d’avoir besoin de l’aide financière de la communauté internationale, en plus d’un appui financier à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Venant aux élections tenues en Palestine récemment, il a déploré que le Gouvernement israélien empêche la tenue de celles prévues à Jérusalem-Est.
Après avoir plaidé en faveur d’une criminalisation du déni de la Nakba palestinienne et appelé à désigner le 15 mai journée internationale de commémoration, le Président Abbas s’est adressé à son peuple, qu’il soit en Palestine, dans les camps de réfugiés ou qu’il s’agisse de la diaspora, en s’exclamant: « Nous célébrerons l’indépendance de notre État à Jérusalem, notre capitale éternelle. Ils la voient lointaine, nous la voyons proche. »
M. CHARLES MICHEL, Président du Conseil européen, a rappelé que le système des Nations Unies est aujourd’hui « ankylosé, entravé par des forces hostiles ». Il a alerté sur l’érosion de la confiance, craignant la menace d’une « dangereuse confrontation bipolaire ». Pour remettre la coopération sur les rails, il a donc préconisé de restaurer la confiance, résoudre les problèmes les plus urgents et réparer le système des Nations Unies. La confiance, a‑t‑il souligné, est fondée sur le respect de la Charte des Nations Unies. Dans ce cadre, il a déploré la « guerre de conquête » menée par la Russie en Ukraine et ses répercussions sur le crédit dont jouit l’ONU. Pour y remédier, il a détaillé un plan de réforme du Conseil de sécurité et assuré du soutien de l’Union européenne concernant les propositions de changement présentées par le Secrétaire général dans « Notre Programme commun ».
En premier lieu, M. Michel a prôné la réforme du droit de veto, jugeant choquant qu’un membre permanent du Conseil de sécurité oppose son veto à des sanctions contre lui-même, quand bien même il viole la Charte des Nations Unies. Rappelant que la Charte prévoit qu’un membre du Conseil de sécurité s’abstienne lors d’un vote dont il est l’objet, il a exhorté les autres pays siégeant au Conseil à invoquer cette clause contre la Russie. Il a assuré la France et le Mexique du soutien de l’Union européenne concernant leur initiative pour limiter l’exercice du droit de veto dans les cas d’atrocités de masse. De même, il a appelé de ses vœux un nouveau mécanisme conjuguant prise de décisions à la majorité et usage modéré du droit de veto.
M. Michel s’est également prononcé en faveur d’une meilleure représentativité au sein du Conseil de sécurité, notant qu’à ce jour, 60 pays n’y ont encore jamais siégé. Il a déploré la quasi-absence de régions entières du monde, en Afrique, Amérique du Sud, Caraïbes et Asie. Ce manque de représentativité, a‑t‑il averti, érode la légitimité du Conseil. Enfin, il a proposé d’intégrer dans cet organe les organisations régionales ou continentales, lesquelles représenteraient « un nouveau niveau de légitimité » dans le monde actuel.
Face aux changements climatiques, le Président du Conseil européen a estimé qu’il était dans l’intérêt de tous les pays avancés d’appuyer les efforts des pays en développement vers la neutralité carbone. Ces pays ne bénéficieraient que d’un quart des investissements privés mondiaux, alors même que le G20 serait responsable de 80% des émissions, a‑t‑il fait remarquer. Soulignant l’ampleur du défi, il a rappelé que, selon l’Agence internationale de l’énergie, le « zéro carbone » exige 5 000 milliards d’euros par an d’investissements mondiaux –soit 4% du PIB mondial– dès 2030 et jusqu’en 2050.
Enfin, il s’est inquiété de la situation économique des économies les plus vulnérables, fragilisées par la pandémie et la guerre en Ukraine. « Personne ne doit être contraint de choisir entre la réduction de la pauvreté et le verdissement de l’économie », a‑t‑il estimé, préconisant la mise en place d’un système financier « plus robuste, plus juste, et mieux préparé au XXIe siècle ». Il a réclamé notamment la réforme du système de Bretton Woods pour le rendre plus équitable, plus inclusif et plus efficace, soutenant aussi le stimulus des ODD présenté par le Secrétaire général. Enfin, il a appelé à accroître la capacité de prêt des institutions financières internationales, rappelant qu’en 60 ans, le pouvoir de financement de la Banque mondiale, proportionnellement à la production mondiale, avait été divisé par 7.
M. RUSS KUN, Président de la République de Nauru, le « plus petit État Membre de cette auguste instance », s’est demandé si l’ONU allait être réformée de manière à permettre à tous ses membres de bénéficier de la paix, de la prospérité, du progrès et de la viabilité. Une étape cruciale sera à cet égard la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), qui a pris du retard, a-t-il regretté, en blâmant l’insuffisance des financements alloués aux pays en développement. Aussi faut-il de toute urgence prendre des mesures audacieuses et nouer des partenariats fondés sur le respect mutuel entre égaux, en nous appuyant sur un système de catégorisation des vulnérabilités plus précis et nuancé. « Sur la base des mesures existantes de l’aide publique au développement, Nauru n’est éligible ni à des subventions ni à des prêts », a-t-il déploré, en vantant les mérites de l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle (MVI), qui garantirait que son pays reçoive une assistance à sa juste mesure.
Une autre voie pour accélérer la mise en œuvre du Programme à l’horizon 2030 sera pour le Président la reconnaissance et l’intégration de la situation spécifique des petits États insulaires en développement (PEID) à tous les niveaux. Une telle opportunité se présentera lorsque nous nous réunirons pour la conférence des PEID en mai de l’année prochaine à Antigua-et-Barbuda, s’est-il réjoui, en plaidant pour l’adoption d’un programme d’action plus ciblé et doté de ressources complètes, avec des solutions pratiques pour accélérer leur développement durable. Le soutien des partenaires du développement et de la communauté internationale, y compris le financement, sera essentiel à cet égard. M. Kun a par ailleurs demandé la nomination d’un Représentant spécial du Secrétaire général sur la sécurité climatique.
Nauru, a-t-il poursuivi, se félicite de l’adoption plus tôt cette année de l’instrument international juridiquement contraignant portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale (BBNJ), appelant à un soutien international pour renforcer la capacité à ratifier et mettre en œuvre ce traité. Le dirigeant a en particulier rappelé l’importance de garantir une pêche durable, en veillant à ce qu’il n’y ait pas de surpêche, à ce que des prix équitables soient payés aux PEID pour le poisson pêché dans leurs eaux et à éliminer la pêche illégale, non déclarée et non réglementée.
La vision nationale à long terme de Nauru envisage un avenir dans lequel les partenariats individuels, communautaires, commerciaux et gouvernementaux contribuent à une qualité de vie durable pour tous les Nauruans. Un pilier clef sera de garantir la santé de notre population. Toutefois, Nauru reste vulnérable aux épidémies de maladies transmissibles, a prévenu le Chef de l’État. En effet, la pandémie de COVID-19 a démontré la nécessité urgente d’investir massivement pour renforcer les besoins institutionnels et infrastructurels d’un système de santé fragile. Notre pays, a ajouté le Président, a besoin de soutien et d’expertise technique pour développer des solutions innovantes afin de lutter contre les risques viraux, par exemple la médecine électronique et le développement et l’utilisation de technologies numériques.
M. ÚMARO SISSOCO EMBALÓ, Président de la Guinée-Bissau, a encouragé les États Membres à introduire les changements requis dans l’architecture internationale de paix et de sécurité ainsi que dans le système financier mondial pour être à la hauteur des enjeux contemporains. La réforme du Conseil de sécurité, jugée depuis longtemps nécessaire, a rappelé le dirigeant, doit prendre en compte la position de l’Union africaine afin d’assurer une représentation réaliste et plus juste, cohérente avec le rôle de plus en plus prépondérant de l’Afrique dans la construction et le maintien de l’équilibre mondial. Depuis son entrée en fonction à la tête de l’État en 2020, M. Embaló a expliqué que son pays s’était focalisé sur le dialogue, la consolidation de la paix, la stabilité politique ainsi que le développement social et économique au niveau national et dans la sous-région de l’Afrique de l’Ouest et au-delà. Des principes, a‑t‑il ajouté, qui l’ont également guidé au cours de son mandat de Président de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), qui s’est achevé en juillet dernier.
Le Président a ensuite réitéré sa grande préoccupation face à la répétition des coups d’État et aux reculs en matière de démocratie et d’état de droit dans certains pays de la sous-région d’Afrique de l’Ouest, en « violation flagrante des résultats des urnes ». Il a ensuite rappelé qu’il présidait aussi depuis un an l’Alliance des dirigeants africains contre le paludisme, grâce à laquelle plus de 1,5 milliard de cas ont été évités et 10,5 millions de vies sauvées sur le continent depuis 2000. Après avoir réaffirmé que, cette année, le peuple de la Guinée-Bissau célèbre ses 50 ans d’existence en tant qu’État indépendant et souverain, M. Embaló a conclu en réaffirmant l’engagement de son pays et de son peuple à continuer à travailler avec l’ONU et à coopérer avec tous les gouvernements et peuples amis.
M. BAJRAM BEGAJ, Président de l’Albanie, s’est félicité des changements survenus en Albanie depuis son adhésion à l’ONU et a rappelé que le pays achevait son deuxième mandat de membre non permanent du Conseil de sécurité. M. Begaj a également tenu à souligner le rôle de son pays en matière de paix et de stabilité dans les Balkans, rappelant que l’Albanie a fait le choix d’une « politique d’amitié et de relations de bon voisinage ». Avec le Kosovo, l’Albanie s’est engagée en faveur de la paix et entend renforcer sa contribution aux efforts de paix, a‑t‑il souligné.
Indiquant que le dialogue entre le Kosovo et la Serbie se poursuivait dans le cadre des efforts de médiation de l’Union européenne et avec l’appui des États-Unis, le Président a réaffirmé son attachement à la prospérité, l’intégrité et la reconnaissance du Kosovo. Estimant que la présence de citoyens serbes au Kosovo reflète la modernité du pays, il a souhaité que la situation soit similaire pour les citoyens albanais se trouvant en Serbie. Malgré des efforts dans le domaine de la paix et la sécurité, M. Begaj a fait part de sa préoccupation concernant l’insuffisance de l’investissement dans la région.
Après avoir rappelé le passé de l’Albanie, marqué notamment par des guerres, le Président a réitéré son attachement à l’ordre international fondé sur des règles. Les relations entre États doivent être basées sur l’égalité et non sur la loi du plus fort, a‑t‑il fait valoir, condamnant fermement l’agression contre l’Ukraine. Insistant sur le lien indéfectible entre les objectifs de développement durable et la sécurité internationale, il a considéré que le conflit russo-ukrainien remettait en question le développement durable dans la région et dans le monde. Il a également déploré le détournement des sources de financement en raison des incertitudes causées par la guerre.
Le Chef de l’État s’est toutefois félicité de la tenue du Sommet sur les objectifs de développement durable qui doit permettre la revitalisation des efforts conjoints de mise en œuvre du Programme 2030. À cet égard, il a insisté sur la nécessité d’appuyer les pays en développement dans sa réalisation. M. Begaj a jugé nécessaire d’entamer une réforme incluant les pays en développement afin qu’ils participent activement à l’économie internationale. Après avoir réaffirmé son attachement aux droits humains, condition sine qua non de la prospérité et de l’épanouissement, il a annoncé la candidature de l’Albanie au Conseil des droits de l’homme en insistant sur le désir de coopérer « main dans la main » avec les autres pays.
M. ABDEL-FATTAH AL-BURHAN ABDELRAHMAN AL-BURHAN, Président du Conseil souverain de transition du Soudan, a rappelé que son peuple était la victime d’une guerre lancée par les Forces d’appui rapide. Ces dernières, a‑t‑il affirmé, bénéficieraient de l’assistance de factions tribales et d’autres acteurs venus de l’étranger, dont des mercenaires. Elles auraient commis des actes de pillage, de viol, de meurtre, et de destruction de bien civils et publics. « Elles ont aussi tenté d’effacer notre histoire en détruisant des registres et des musées et libéré des prisonniers, dont des terroristes. » Auteurs de nettoyages ethniques et d’actes de torture au Darfour, à Khartoum et ailleurs, selon lui, ces groupes seraient coupables de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre. Le Président a lancé un appel à la communauté internationale pour que ces groupes et leurs alliés soient désignés comme groupes terroristes, une mesure qu’il a estimée nécessaire pour protéger non seulement le peuple soudanais, mais aussi le monde entier.
M. Al-Burhan a affirmé avoir fait son possible pour mettre fin à la guerre. Il a attribué les échecs des négociations à l’intransigeance des rebelles, rappelant que son Gouvernement avait accepté l’initiative de paix lancée par le Soudan du Sud, l’Ouganda et la Türkiye. Cette guerre, a‑t‑il estimé, n’est pas un conflit entre belligérants armés, comme on l’entendrait souvent, puisqu’elle touche massivement les populations civiles. En outre, a‑t‑il ajouté, elle constituerait une menace pour la paix nationale et internationale, dans la mesure où les rebelles recrutent dans divers pays du monde. « Elle peut se propager et mettre le feu à toute la région », a‑t‑il averti.
Saluant les efforts des Nations Unies, de son Secrétaire général, de ses organismes ainsi que d’autres agences et nations alliées, il a précisé que son pays tentait d’éliminer les obstacles à l’acheminement de l’aide humanitaire. Ce faisant, il a appelé les nations à remplir leurs promesses en matière d’aide alimentaire, de médicaments et d’abris. « Nos besoins sont énormes », a‑t‑il ajouté.
M. Al-Burhan a affirmé que son gouvernement était prêt à honorer ses engagements et à transférer le pouvoir au peuple. Sur ce point, un consensus règne au sein des forces armées, a‑t‑il assuré. Il a proposé un transfert du pouvoir sous la forme d’élections pacifiques et légitimes, avec une période de transition courte et un gouvernement civil. Dans ce but, il s’est dit prêt à poursuivre le dialogue avec tous les acteurs impliqués.
Il a enfin exprimé sa volonté de soutenir les femmes, les enfants et toutes les catégories de personnes vulnérables pour qu’elles puissent jouir pleinement de leurs droits. Réaffirmant son engagement envers les ODD, il a souligné les répercussions négatives du gel de l’aide humanitaire sur leur réalisation, ainsi que sur la crise alimentaire et le sort des personnes déplacées. À ce titre, il a lancé un appel aux agences et aux bailleurs de fonds internationaux.
M. HAN ZHENG, Vice-Président de la Chine, a jugé que le monde était dans une situation qui n’était guère reluisante. Il a attiré l’attention sur plusieurs domaines d’action prioritaires, à commencer par la nécessité de veiller à ce que les intérêts sécuritaires de tous les pays soient protégés de manière égale, sans qu’aucun ne soit lésé. Une sécurité complète axée sur la coopération, plutôt que sur la concurrence, et sur le dialogue plutôt que sur la confrontation, est indispensable, a-t-il défendu. La Chine appuie tous les efforts déployés pour mettre fin pacifiquement à la crise ukrainienne, a dit le Vice-Président en déclarant qu’elle est prête à y concourir. Il a également assuré du soutien de son gouvernement au peuple palestinien, en faisant valoir la solution des deux États.
La Chine, a-t-il dit, s’oppose à l’hégémonisme, à l’unilatéralisme et à la « mentalité héritée de la guerre froide cultivée par un certain nombre d’États ». La communauté internationale doit résister collectivement à ces agissements, a-t-il dit, en rappelant le soutien historique de la Chine à Cuba pour s’opposer aux ingérences extérieures et à l’embargo qui lui a été imposé.
Le dirigeant a ensuite exprimé l’opposition de son gouvernement à l’utilisation d’armes nucléaires et à la guerre nucléaire, avant de souligner que la Chine est le seul membre permanent du Conseil de sécurité à s’être engagé à ne pas se servir de ce type d’armes. Il s’est ensuite enorgueilli du succès de l’initiative Route de la soie, qui fête cette année son dixième anniversaire. Il faut maintenant mettre en œuvre l’Accord de Paris et les pays développés doivent en faire davantage pour s’acquitter de leurs obligations et assurer un financement viable du monde en développement, a exhorté M. Han.
Pour lui également, nous devons rester ouverts et inclusifs et faire progresser la civilisation humaine dans son ensemble, tout en respectant le contexte spécifique à chaque pays, et en s’abstenant d’instrumentaliser la notion des droits humains pour s’ingérer dans les affaires intérieures des autres. Il faudra en outre faire en sorte que la gouvernance mondiale soit réformée, pour qu’elle reflète les équilibres existants, a préconisé le Vice-Président. La Chine ne se lancera jamais dans l’expansion et l’hégémonie, a-t-il assuré, en rappelant cependant que son pays est déterminé à défendre son intégrité territoriale et sa souveraineté nationale, en parachevant son unification.
M. TIÉMOKO MEYLIET KONÉ, Vice-Président de la République de Côte d’Ivoire, rappelant que le contexte actuel est marqué par une incertitude croissante, a tenu à alerter sur le manque de ressources pour parvenir à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030. Se penchant sur les questions sécuritaires, il a déploré une hausse mondiale des dépenses de sécurité, et invité à un règlement pacifique de la guerre en Ukraine. Après avoir souligné son engagement dans la lutte contre le terrorisme, le Vice-Président a rappelé que les groupes terroristes mettaient en péril des décennies de progrès dans des secteurs clef tels que l’éducation, la santé ou encore la culture. À ce titre, il a enjoint l’ONU et la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDAO) à examiner les modalités de financement du plan d’actions prioritaires antiterroristes, adopté par la CEDEAO en 2019, afin d’en accélérer la mise en œuvre.
M. Koné a réitéré son engagement en faveur de la lutte contre les effets des changements climatiques, précisant que la Côte d’Ivoire œuvrait à renforcer la résilience des populations dans un premier temps, avant de développer une « conscience citoyenne ». Dans cette perspective, le Vice-Président a exhorté les parties prenantes de la COP15 à poursuivre leur soutien en faveur de la mise en œuvre de l’Initiative d’Abidjan. Il a également demandé aux partenaires bilatéraux et multilatéraux de tenir leurs engagements financiers au titre de l’Accord de Paris sur le climat et de faciliter le fonds pour les pertes et dommages créé lors de la COP27. Le Vice-Président s’est également félicité du succès du Sommet africain sur le climat et de la détermination du continent à faire entendre sa voix lors de la COP28.
Après être revenu sur les effets de la pandémie de COVID-19 sur l’économie de la Côte d’Ivoire, M. Koné a rappelé que son pays s’est doté en 2019 d’un régime dénommé « Couverture maladie universelle ». Il s’est dit enthousiaste à l’idée de pouvoir procéder à un partage d’expériences et de contribuer ainsi au renforcement des systèmes de couverture sanitaire. Le Vice-Président a également indiqué que la Côte d’Ivoire consolide ses avancées démocratiques, rappelant que des élections municipales, régionales et sénatoriales avaient été organisées au mois de septembre dernier.
Abordant la question des objectifs de développement durable (ODD), M. Koné a rappelé que des plans nationaux de développement avaient concouru à l’amélioration des ODD en Côte d’Ivoire. Toutefois, ces progrès sociaux se trouvent fortement fragilisés en raison de l’afflux massif de réfugiés provenant des pays voisins, a-t-il averti, affirmant qu’il était urgent de recourir au multilatéralisme pour faire face aux difficultés actuelles. Dans la continuité du discours du Secrétaire général de l’ONU et conformément à la vision du Président Alassane Ouattara, M. Koné a enjoint les membres de l’Assemblée à s’interroger sur la nécessité de réformer la gouvernance mondiale à tous les niveaux, en vue de renforcer la solidarité entre les nations.
Mme JESSICA ALUPO, Vice-Présidente de l’Ouganda, a souhaité une revitalisation de l’Organisation pour relever les défis actuels. À cet égard, elle a prôné une réforme du Conseil de sécurité, afin de le rendre plus représentatif et de remédier aux « injustices historiques commises à l’encontre des peuples africains ». Son pays étant le nouveau Président du Mouvement des pays non alignés, la Vice-Présidente a souligné l’importance de cette alliance au sein de l’ONU et sa pertinence pour servir les intérêts de ses États membres. Elle a également insisté sur l’importance de la coopération Sud-Sud, saluant « la solidarité dont font preuve les pays du Sud pour soutenir leurs homologues ».
S’alarmant des problèmes de financement des pays du Sud, Mme Alupo a appelé de ses vœux une réforme de l’architecture financière mondiale. Elle a évoqué les répercussions économiques de la pandémie de COVID-19 en Ouganda et dans d’autres pays en développement sur les plans de l’emploi, des chaînes d’approvisionnement, de la chute des investissements étrangers et de l’augmentation de la pauvreté. La Vice-Présidente a souligné la nécessité de réaliser les objectifs de développement durable (ODD). Dans ce cadre, elle a mentionné les initiatives phares de son pays, dont l’organisation d’une conférence nationale annuelle en présence de toutes les parties prenantes. Selon elle, l’Ouganda enregistre des progrès constants dans la mise en œuvre du Programme 2030, lesquels devraient être présentés lors du forum politique de haut niveau pour le développement durable organisé sous les auspices du Conseil économique et social, en juillet 2024.
Cependant, a averti le la Vice-Présidente, les changements climatiques compromettent la réalisation des ODD. L’Ouganda, a-t-elle assuré, prend des mesures audacieuses en faveur du climat, que ce soit en matière d’accès à une énergie abordable et durable, d’augmentation de la couverture forestière et des zones humides, ou en promulguant une agriculture « intelligente ». Préoccupée par le fait que les pays qui émettent le moins de gaz à effet de serre sont ceux-là même qui sont les plus affectés par les changements climatiques, elle a appelé les nations développées signataires de l’Accord de Paris à respecter leurs engagements de fournir 100 milliards de dollars par an aux pays en développement jusqu’en 2025.
Sur le plan de la paix et de la sécurité, Mme Alupo a souligné l’importance de résoudre les conflits par la coopération et la diplomatie. Elle a rappelé l’engagement de son pays auprès de l’Union africaine, de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), de la Communauté d’Afrique de l’Est et de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs. L’Ouganda, a-t-elle rappelé, se classe parmi les premiers pays mondiaux en termes d’accueil de réfugiés, et travaille avec l’ONU et d’autres partenaires pour s’attaquer aux causes profondes des déplacements.
Estimant que son pays avait encore du travail en matière d’égalité des sexes, la Vice-Présidente s’est réjouie que plus de 34,9% des sièges parlementaires et exécutifs soient occupés par des femmes. En matière de droits fondamentaux, elle a rappelé que la Constitution de l’Ouganda stipule que « les valeurs culturelles et coutumières sont compatibles avec les droits de l’homme et les libertés fondamentales ». À ce titre, Mme Alupo a prôné une approche des droits de l’homme respectueuse des valeurs culturelles d’autrui. Les questions des droits humains, a-t-elle insisté, « ne doivent pas devenir le facteur modérateur de nos relations à long terme avec nos partenaires de développement ».
M. MOHAMMED JALLOW, Vice-Président de la Gambie, a appelé, en tant que pays faisant partie des pays les moins avancés (PMA), à la mise en œuvre résolue du nouveau Programme d’action de Doha afin d’éviter que la décennie 2022-2031 soit celle des engagements non tenus. Eu égard aux dures réalités économiques actuelles dans les pays du Sud, de nombreux pays en développement sont confrontés à un fardeau de dette insoutenable qui compromet leur capacité à sortir de la pauvreté, a-t-il ajouté. Ainsi a-t-il considéré essentiel, dans le contexte de la reprise économique postpandémie, de trouver de toute urgence des moyens de remédier à ce fardeau, « car la plupart de nos pays courent le risque d’être de véritables laissés-pour-compte ».
Le Chef de l’État a rappelé que l’objectif des PMA est de reconstruire leur économie en créant un environnement politique propice à une reprise rapide de la croissance. Dans cette optique, il a souhaité que la communauté internationale intensifie ses efforts à travers des initiatives nouvelles pour trouver des solutions durables au problème de la dette. Il a rappelé que la question de l’allégement de la dette des PMA est liée à la nécessité d’une réforme plus approfondie des institutions financières internationales et de leurs mécanismes de prise de décisions. « Nous nous joignons à d’autres pays en développement pour appeler à des réformes qui garantissent notre plus grande participation à ces mécanismes », a déclaré M. Jallow, qui a salué en ce sens la récente désignation d’un siège permanent pour l’Union africaine au sein du G20. « Cela amplifiera considérablement la voix et la participation de l’Afrique aux débats sur les questions géopolitiques et dans les initiatives mondiales de développement qui concernent le bien-être de sa population. »
Sur la question des changements climatiques, qui touchent durement et de façon disproportionnée l’Afrique, le Président gambien a relevé que si le monde ne manque ni d’engagements en matière d’action climatique ni de ressources financières à la hauteur des ambitions collectives, la volonté politique pour agir vite et de manière décisive fait défaut. Quand sera respecté l’engagement annuel de consacrer 100 milliards de dollars pour lutter contre le réchauffement de la planète, et allons-nous bientôt nous mettre d’accord sur les modalités du fonds pour les pertes et dommages en vue de la tenue la COP28? a-t-il demandé. « Nous appelons les États Membres et la communauté internationale à remplir d’urgence leurs engagements envers la Terre nourricière! »
Par ailleurs, le Chef de l’État a attiré l’attention sur les défis auxquels l’Afrique de l’Ouest est confrontée en matière de développement, de gouvernance démocratique, d’état de droit, de paix et de sécurité. Il a assuré à cet égard que si la Gambie est elle-même aux prises avec ses défis régionaux, elle est véritablement déterminée à faire grandir sa jeune démocratie, à renforcer ses institutions, à protéger et à promouvoir les droits et libertés fondamentaux, ainsi que l’autonomisation des femmes et des jeunes. « Nous profitons désormais de plus en plus des dividendes de la démocratie et nous pensons qu’elle constitue la meilleure forme de gouvernance pour notre peuple. »
M. TEODORO NGUEMA OBIANG MANGUE, Vice-Président de la Guinée équatoriale, s’est élevé contre l’ingérence de certains pays dans les affaires intérieures d’autres pays et le pillage de leurs ressources naturelles, qui continuent d’être un facteur déterminant de sous-développement, de conflit et d’instabilité. Pour lui, l’Afrique mérite une attention prioritaire dans les initiatives d’appui et de financement du développement, avec une matérialisation décisive des engagements pris en faveur du développement durable. Préoccupé par les crises répétées que subit Haïti, le dignitaire a proposé d’organiser une conférence des Nations Unies pour ce pays, afin d’analyser cette situation en profondeur et de trouver une solution durable à ses tourments.
Le Vice-Président a ensuite réitéré avec insistance la nécessité de réformer le système des Nations Unies, notamment le Conseil de sécurité, le continent africain continuant d’être victime de l’injustice historique d’être le seul sans représentation permanente au sein de cet organe. Et ce, malgré le fait que la plupart des questions à l’ordre du jour sont des questions africaines, s’est-il étonné. L’Afrique, dans le cadre du consensus d’Ezulwini et de la Déclaration de Syrte, réclame depuis plus de 15 ans l’attribution de deux sièges permanents et deux sièges non permanents supplémentaires, a rappelé M. Obiang Mangue.
Le Vice-Président a rejeté catégoriquement l’imposition unilatérale de mesures coercitives en violation de la Charte des Nations Unies et du droit international. Ainsi s’est-il élevé contre le blocus commercial, économique et financier imposé à Cuba il y a plusieurs décennies. Il a enfin annoncé l’intention de son pays d’élaborer le Plan stratégique 2035 de diversification économique, espérant que ses partenaires l’accompagneront dans sa mise en œuvre.
M. PHILIP ISDOR MPANGO, Vice-Président de la République-Unie de Tanzanie, a estimé que, depuis des décennies, les appels persistants du Sud à la paix, au progrès et à la prospérité pour tous étaient restés sans réponse. Il a regretté que les principes de solidarité, de fraternité, de non-ingérence ou d’égalité entre les nations, légués par les pères fondateurs de l’ONU, soient en train de s’étioler. Ajoutant que la paralysie du multilatéralisme entraînait « le déplacement des plaques tectoniques géopolitiques et la création de nouveaux blocs », M. Mpango a déploré une érosion de l’état de droit et un retour à l’unilatéralisme. Il a appelé à la réforme immédiate du système des Nations Unies et des institutions financières internationales dont il a jugé l’efficacité « plus que jamais remise en question ».
Évoquant la pandémie de COVID-19, les changements climatiques, les conflits armés, l’insécurité alimentaire, la pauvreté persistante, les inégalités croissantes et les crises de l’énergie et de la dette qui se profilaient, le Vice-Président s’est inquiété des résultats décevants obtenus sur le front des objectifs de développement durable (ODD). Il a notamment blâmé les promesses de financement et de transfert de technologie non tenues par le Nord et la faible marge de manœuvre budgétaire de la plupart des pays africains. « Pour rétablir la confiance, il est impératif que le Nord tienne ses promesses et écoute les voix du Sud », a-t-il martelé, ajoutant que le Sud devait augmenter ses recettes nationales, notamment en mettant fin à l’hémorragie de ses ressources naturelles et aux sorties illicites de capitaux.
M. Mpango a prié les États Membres de prendre dûment en considération le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général dont les priorités « correspondent parfaitement à l’esprit et à l’essence du thème de cette session de l’Assemblée générale ». Il a rappelé qu’en mars 2023, la Tanzanie était le douzième contributeur des 125 pays participant aux missions de maintien de la paix de l’ONU. Il a aussi appelé l’Organisation à traquer et condamner ceux qui alimentent les conflits en Afrique afin de « tirer profit du commerce des armes ou de s’ouvrir une voie ensanglantée vers les richesses minérales ».
Le Vice-Président s’est dit découragé de constater qu’à mi-parcours, à peine 15% des 169 cibles des ODD étaient en voie d’être atteintes, tandis que 37% d’entre elles avaient soit stagné, soit même régressé par rapport aux valeurs de référence de 2015. Il a précisé qu’en juillet 2023, la Tanzanie avait présenté son deuxième rapport national volontaire qui montrait des progrès significatifs concernant les ODD 2 à 7, notamment en termes de sécurité alimentaire, de disponibilité des médicaments, de mortalité infantile, d’égalité des sexes et d’approvisionnement en eau et en électricité. M. Mpango a toutefois reconnu des progrès limités concernant les ODD 1, 8 et 10 et indiqué que son pays restait déterminé à faire mieux en augmentant ses recettes nationales et en capitalisant sur les partenariats public-privé.
Le Vice-Président s’est inquiété des conclusions du dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) selon lequel le monde n’est pas sur la bonne voie pour atteindre la limite de 1,5 degré Celsius fixée par l’Accord de Paris et l’Afrique se réchauffe à un rythme supérieur à celui de la planète. Plaidant en faveur d’une action « urgente et concertée » des États Membres pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et renforcer les mesures d’atténuation et d’adaptation, il a demandé que soient facilités les investissements nécessaires. En conclusion, appelant les belligérants du monde entier à faire taire leurs armes, il a cité l’adage: « œil pour œil et tout le monde finit aveugle ». »
M. KEITH ROWLEY, Premier Ministre de Trinité-et-Tobago, s’est inquiété de l’état de la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) qui ne peut que pousser au « pessimisme ». À ses yeux, le monde est « en péril », du fait des crises en cascade qui secouent différentes régions du globe. Les investissements dans les instruments de guerre ont largement dépassé les investissements dans les instruments de paix, a déploré M. Rowley, aux dépens des plus vulnérables et de l’esprit du multilatéralisme, objectif même de l’ONU. « Est-ce là l’héritage que nous voulons laisser aux générations futures »? Son pays, a-t-il assuré, s’engage à jouer son rôle pour parvenir au développement durable ainsi qu’à la paix et à la sécurité pour tous.
Cependant, a alerté le Premier Ministre, la capacité de Trinité-et-Tobago à naviguer en toute sécurité vers la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030 est entravée par des menaces, notamment la prolifération et l’utilisation d’armes à feu illégales. Une situation qui s’est aggravée en grande partie à cause de la disponibilité des armes, couplée au trafic illégal depuis les pays de fabrication vers les territoires presque sans défense des Caraïbes. Sur une population de 1,4 million d’habitants, a ainsi témoigné M. Rowley, Trinité-et-Tobago a connu plus de 600 meurtres l’année dernière, dont 90% impliquant des armes de poing et, de plus en plus, des armes d’assaut. Cette année, le bilan a été porté à 400 meurtres violents. Il s’agit d’une crise partagée par presque tous les territoires des Caraïbes et qui s’ajoute aux défis qui font obstacle à la réussite des ODD, s’est lamenté le Premier Ministre.
Trinité-et-Tobago, tant individuellement qu’en tant que membre de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a tenté de concevoir des solutions pour relever ces défis de manière significative et holistique, a expliqué le Chef du Gouvernement, citant le récent symposium régional de la CARICOM, accueilli par son pays, pour aborder la criminalité et la violence en tant que problème de santé publique. Conscient de la nécessité d’une coopération à tous les niveaux, il a fait part de son plein attachement au Traité sur le commerce des armes et à ses objectifs déclarés, et de son engagement à continuer à travailler en collaboration avec ses partenaires régionaux et internationaux, en particulier les États-Unis, pour endiguer de toute urgence le commerce illicite d’armes à feu illégales, dont la plupart sont produites par des fabricants et promoteurs d’armes basés dans ce pays. M. Rowley a encore mis en garde contre la prolifération des crimes violents qui, alliée à d’autres crises, constitue un terreau susceptible de déstabiliser n’importe quel pays.
Par conséquent, a poursuivi le Premier Ministre, Trinité-et-Tobago, alors qu’elle mène sa propre bataille dans ce domaine, reste profondément préoccupée par les développements en Haïti, et salue la décision du Gouvernement du Kenya de proposer son aide pour diriger une unité multinationale dans ce pays. Il a exhorté la communauté internationale à collaborer avec Haïti pour parvenir à une solution crédible à la crise actuelle, qui garantirait que le pays et son peuple ne soient pas laissés pour compte, avant de conclure sur l’emblématique titre du chanteur de calypso David Rudder, « Haïti, je suis désolé »!
M. KYRIAKOS MITSOTAKIS, Premier Ministre de la Grèce, a mis l’accent sur les changements climatiques et les migrations dont la gestion sera au cœur de la candidature de la Grèce pour la période 2025-2026 au Conseil de sécurité et, si élue, au centre de son mandat, de pair avec la sécurité maritime. La communauté internationale doit adopter une approche collective face à ces défis, a exhorté le Premier Ministre. Appelant à agir pour la gestion des migrations irrégulières, le Chef du Gouvernement grec a jugé la mise en œuvre des accords internationaux existants comme un échec. Insistant encore sur les conséquences des catastrophes naturelles comme les derniers incendies survenus dans le nord de son pays, M. Mitsotakis a observé qu’il ne s’agit plus d’une crise réservée au Sud. Une bataille très inégale avec la nature est livrée dans le sud de l’Europe, en particulier vers la Méditerranée, a‑t‑il témoigné. Face à cela, la Grèce a pris des propositions ambitieuses pour la décarbonisation de notre île, a annoncé le Premier Ministre en précisant que le Gouvernement investit dans les recherches sur les technologies vertes et les énergies renouvelables dont l’énergie éolienne.
Le Gouvernement grec, a‑t‑il fait savoir, agit également de manière résolue pour l’atténuation sur le long terme, et l’adaptation à court terme. M. Mitsotakis a proposé aux dirigeants de la Croatie, de Chypre, de la France, de l’Italie, de Malte, du Portugal, de la Slovénie et de l’Espagne de reconnaître que les circonstances exigent d’agir en dehors du cadre à long terme de l’Union européenne. Il faut trouver et mettre en œuvre un plan de financement pour relever les nouveaux défis, a‑t‑il expliqué. Il a annoncé l’organisation d’un forum pour l’adaptation mondiale afin de réfléchir collectivement, de relancer la coopération, d’accéder à de nouveaux financements et de travailler à l’adaptation à court terme. Il faut investir davantage dans les nouvelles technologies et les modèles de prévision avancée, a‑t‑il recommandé, en soulignant que « notre première obligation est la protection de la vie humaine ».
S’agissant du défi des migrations, a continué M. Mitsotakis, la Grèce fournit abri et protection à des centaines de milliers de réfugiés et demandeurs d’asile et fait tout ce qui est en son pouvoir pour sauver des dizaines de milliers de vies en mer. « La Grèce sera toujours un pays ouvert qui accueillera ceux qui fuient persécutions et violences, ceux qui cherchent un avenir meilleur en utilisant les voies d’accès légales. » Pour ce qui est de l’immigration, le Premier Ministre a signalé que la politique de la Grèce est « dure, mais juste », ayant pour but de prévenir les migrations illégales et d’améliorer l’efficacité des systèmes de retour. Cette politique facilite la migration sûre, régulière et ordonnée et répond rapidement aux demandes d’asile.
Sur la relation de la Grèce avec la Türkiye, le Premier Ministre a dit que le différend portant sur la délimitation de leurs zones maritimes en mer Égée est un problème important pouvant être résolu en appliquant le droit international, notamment la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Pour ce qui concerne Chypre, il faut une solution viable, acceptable pour tous, a‑t‑il reconnu. Athènes soutient pleinement les efforts menés par l’ONU pour faciliter la reprise des négociations, a dit le Premier Ministre se fondant sur les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité de l’ONU. M. Mitsotakis a par ailleurs réitéré sa condamnation de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
M. PUSHPA KAMAL DAHAL ‘PRACHANDA’, Premier Ministre du Népal, a passé en revue les réalisations de son pays dans le cadre d’une transition réussie menée à l’échelle nationale depuis 2008. II s’est engagé à achever la tâche restante en matière de justice transitionnelle qui figure en tête de son agenda politique. Le projet de loi proposé, issu d’un processus consultatif plus large, adopte une approche centrée sur la victime et reconnaît la réparation comme un droit de la victime, a précisé le Premier Ministre, assurant qu’il n’y aura « pas d’amnistie générale » pour les violations graves des droits de l’homme.
Aujourd’hui, alors que la trajectoire politique du Népal s’est stabilisée, l’attention se porte sur l’agenda de la transformation économique, a confié M. Dahal, annonçant que son pays sortira de la catégorie des pays les moins avancés (PMA) d’ici à 2026. En attendant, en tant que Président du Groupe des PMA, il reste activement engagé dans toutes les enceintes pertinentes, y compris au sein du système des Nations Unies, pour protéger et promouvoir l’intérêt collectif des PMA, appelant à un régime commercial international juste et équitable.
Le Chef du Gouvernement a souligné que les pays montagneux vulnérables comme le Népal subissent de plein fouet les changements climatiques, alertant sur la fonte des glaciers de l’Himalaya qui menace plus de 2 milliards de personnes. Le Népal, dont la superficie est constituée à 45% de forêts riches en biodiversité et à 15% de hautes montagnes, émet peu de gaz à effet de serre et contribue de manière significative à la préservation écologique, mais, a pointéM. Dahal, il a injustement souffert de la crise climatique.
Ce type d’inadéquation doit être résolu par un mécanisme de compensation en faveur des pays qui contribuent positivement au verdissement de la planète, a‑t‑il martelé. Pour sa part, le Premier Ministre a indiqué rester pleinement engagé en faveur de la mise en œuvre efficace de l’Accord de Paris.
Outre les changements climatiques, le Premier Ministre a évoqué les conséquences de la pandémie de COVID-19 et de la concurrence géopolitique accrue sur les progrès durement acquis dans la réalisation des objectifs de développement durable (ODD). Il a donc appelé à un soutien international tout en saluant l’appel du Secrétaire général pour une augmentation du financement des ODD à hauteur de 500 milliards de dollars par an. Enfin, il a rappelé que le Népal, en tant que deuxième pays contributeur de troupes et de policiers aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, a répondu « à chaque appel et sans aucune réserve ». Il a de nouveau demandé une part équitable des postes de direction au quartier général et sur le terrain pour les pays contributeurs de troupes et de policiers.
M. AHMAD NAWAF AL-AHMAD AL-SABAH, Premier Ministre de l’État du Koweït, rappelant les nombreux défis mondiaux, a souligné l’importance de la coopération internationale et du partenariat et s’est référé à la vision du Secrétaire général dans son rapport Notre Programme commun. Rappelant les efforts de son pays pour améliorer les relations avec l’Iraq, le Premier Ministre a dit sa surprise devant la décision de la Cour suprême fédérale iraquienne déclarant « inconstitutionnelle » la loi de ratification de l’accord sur la réglementation de la navigation maritime dans la zone de Khor Abdallah, signé en 2012, entre les deux gouvernements. Ce jugement comprend plusieurs contradictions historiques à l’encontre de l’État du Koweït, a protesté M. Al-Sabah. Il s’est également étonné de la décision de l’Iraq d’annuler le protocole d’échanges sécuritaires signé entre les forces des deux pays il y a quelques jours. Cela aura des répercussions négatives sur la sécurité maritime et sur la navigation dans la région de Khor Abdallah, a prévenu le Premier Ministre pour qui les deux accords restent en vigueur. Il a ajouté que l’État du Koweït prendra des mesures concrètes et décisives pour remédier aux répercussions de ce jugement et aux contradictions historiques qu’il contient. Le Premier Ministre a appelé l’Iraq à faire preuve de sa bonne foi et à poursuivre les réunions des équipes techniques en charge de la délimitation des frontières. En tout cas, a promis M. Al-Sabah, le Koweït se réserve le droit de prendre les mesures juridiques nécessaires pour sauvegarder ses droits légitimes sur la base du droit international.
Sur la question palestinienne, le Premier Ministre a informé que son gouvernement a écrit à la Cour internationale de Justice (CIJ) pour demander son avis sur les répercussions de l’occupation israélienne et les violations du droit du peuple palestinien à l’autodétermination. S’agissant du Soudan, il a exhorté les parties à mettre immédiatement un terme au combat, à recourir au dialogue et à retourner au processus politique pour sauvegarder la paix et la sécurité. Il a dit soutenir les initiatives de l’Arabie saoudite et des États-Unis à cet égard. En ce qui concerne le Yémen, M. Al-Sabah a renouvelé son appui aux efforts de l’ONU à travers son Envoyé spécial afin d’aboutir à un règlement global du conflit. Concernant la Syrie, il a recommandé d’intensifier les efforts afin de trouver une solution politique purement syrienne, dans le respect des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Le Premier Ministre a ensuite appelé l’Iran à prendre des mesures sérieuses pour rétablir la confiance, entamer un dialogue basé sur la non-ingérence dans les affaires internes des États et maintenir la sûreté et la liberté de la navigation internationale. Il a rejeté toute prétention sur le champ gazier d’Al-Durra qui est une propriété commune entre l’État du Koweït et le Royaume d’Arabie saoudite. Enfin, a conclu le Chef du Gouvernement, son pays, dans le cadre de sa vision de développement, a pris l’engagement d’assurer la neutralité carbone à l’horizon de l’an 2050.
M. ALEXANDER SCHALLENBERG, Ministre fédéral des affaires européennes et internationales de l’Autriche, a énuméré les grands défis de notre époque, marquée par des conflits violents, des crises climatiques et un recul des droits humains. Utilisant la métaphore du tremblement de terre pour illustrer le sentiment général d’incertitude, tandis que se creusent des failles dans nos systèmes de commerce et de sécurité, il a estimé que « nous vivons dans un temps entre les temps ». Se montrant critique envers les « populistes polarisants qui diffusent de fausses informations », le Ministre a rappelé que les réponses simples aux questions complexes n’étaient que des formes dangereuses de pensée magique, comme « cela a été douloureusement prouvé le 24 février de l’année dernière, lorsque la Russie a brutalement envahi l’Ukraine ».
Affirmant que la coopération, le pacifisme et le multilatéralisme étaient dans l’ADN de l’Autriche, M. Schallenberg a rappelé que Vienne était « fière d’abriter l’un des sièges des Nations Unies et plus de 50 organisations internationales ». Selon lui, l’ordre international basé sur des règles a rempli son office pendant près de huit décennies, mais il n’est plus adaptéà son objectif et ne pourra sans doute pas durer encore 80 ans. Il a donc plaidé pour un Conseil de sécurité plus inclusif et représentatif, suggérant de l’ouvrir à de nouveaux pays, notamment africains. L’Autriche défendra cet objectif lors de sa candidature pour un siège non permanent en 2026, a‑t‑il fait savoir.
Qualifiant l’Autriche contemporaine de « pays florissant, socialement stable, économiquement prospère, et protecteur de l’environnement, dont la capitale, Vienne, a été élue à plusieurs reprises ville la plus agréable à vivre au monde », plus d’un siècle après avoir chu de son piédestal impérial, il a mis en garde contre les abus du recours à l’histoire pour justifier la violence. « Vous ne pouvez pas construire un avenir en restant coincés dans le passé », a‑t‑il défendu, affirmant que le multilatéralisme restait la meilleure alternative pour garantir la prospérité et la sécurité. En conclusion, M. Schallenberg a insisté sur le besoin de dialogue et de compromis, rejetant la notion de « avec nous ou contre nous » et exhortant à un multilatéralisme pragmatique. Selon lui, cette approche nécessitera de « l’endurance, de la patience stratégique et une bonne dose de réalisme », mais « nous en émergerons plus forts, plus prospères et plus résistants », a‑t‑il espéré.
M. MAHAMAT SALEH ANNADIF, Ministre d’État, Ministre des affaires étrangères, des Tchadiens de l’étranger et de la coopération internationale du Tchad, a regretté que le rêve commun de bâtir un monde stable et paisible et l’espoir d’une vie meilleure cèdent le pas à l’angoisse et à l’incertitude des conflits armés, du terrorisme, des changements climatiques, des migrations à grande échelle, du sous-développement, de la pauvreté, des crises politiques, économiques et financières. Saluant le thème de cette soixante-dix-huitième session, le Ministre a appelé les nations à accélérer la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD). Cette action devrait se faire sans exclusive et sans préjudice pour rétablir la confiance. M Annadif a fait le point sur la matérialisation du Programme 2030 dans son pays. Le Gouvernement a ainsi inscrit les ODD au nombre des priorités de la « Vision 2030: le Tchad que nous voulons » et de ses plans nationaux de développement pour les périodes 2017-2023 et 2024-2028.
Cette mise en œuvre, a rappelé le Ministre, a été marquée, entre autres, par la chute des cours des matières premières sur les marchés mondiaux, les attaques de la secte Boko Haram, la pandémie de COVID-19, les changements climatiques, les conflits intercommunautaires dans les pays voisins avec des effets directs sur la population tchadienne, ainsi que les conflits politico-militaires. Selon lui, cette situation est aujourd’hui aggravée par la guerre en cours au Soudan voisin. Quelque 400 000 nouveaux réfugiés se sont ajoutés aux 600 000 réfugiés déjà installés au Tchad depuis plusieurs années. « Sur une population totale de 17 millions d’habitants, près de 2 millions sont des réfugiés. C’est un fardeau bien lourd pour le Tchad », a résumé le Ministre. M. Annadif a demandé une action rapide et concertée de la communauté internationale pour faire face à cette catastrophe humanitaire sans équivalent.
Le Ministre a poursuivi en disant que depuis le décès du Président Idriss Deby, le Tchad est engagé dans un processus de transition politique inclusif et transparent. Le premier jalon fut la conclusion de l’Accord de Doha entre le Gouvernement et les mouvements politico-militaires en août 2022. Cet accord, a‑t‑il ajouté, a permis le retour aux pays de nombreux Tchadiens exilés ou réfugiés. Aujourd’hui, le Gouvernement d’union nationale est à pied d’œuvre pour la tenue du référendum constitutionnel qui déterminera la forme de l’État et qui ouvrira la voie au rétablissement progressif de l’ordre constitutionnel. Des reformes administratives, judicaires, sécuritaires et militaires sont en cours, a rapporté M. Annadif. En outre, « des gestes d’apaisement allant de l’ouverture de l’espace politique à la grâce présidentielle ont contribuéà détendre le climat au sein de la classe politique ». Cette dynamique a permis la mise en place d’un cadre de concertation des partis politiques sur des bases plurielles. Concernant la crise soudanaise, le Ministre a appelé à un cessez-le-feu durable. Il n’y a pas de solution militaire à ce conflit, a‑t‑il tranché. Enfin, M. Annadif a demandé la réforme du Conseil de sécurité telle que reflétée dans le consensus d’Ezulwini et la Déclaration de Syrte. Il a encouragé la création d’un État palestinien indépendant et souverain vivant en sécurité aux côtés de l’État d’Israël et exigé la levée de l’embargo imposé à Cuba.
M. ROBERT DUSSEY, Ministre des Affaires étrangères du Togo, a commencé par exprimer son inquiétude quant à l’état « peu reluisant » du monde, se demandant si nos engagements étaient « à la hauteur » et rappelant l’urgence de rétablir la confiance et la solidarité globales. Il a énuméré les multiples défis auxquels fait face l’Afrique et en particulier son pays, le Togo. Dans la litanie de « vulnérabilités », la plus préoccupante est selon lui le terrorisme, que le Gouvernement togolais entend combattre avec une stratégie multisectorielle, conciliant les approches sécuritaires et de développement.
Le Ministre a ensuite insisté sur les efforts de son pays en matière de protection environnementale. Le Togo ambitionne de protéger 90% de ses côtes d’ici à 2025 et il a lancé un programme de reboisement d’un milliard d’arbres, ayant aussi interdit le glyphosate, a-t-il détaillé. Il a également mis en avant les initiatives pour promouvoir les énergies renouvelables, notamment à travers le projet Cizo qui consiste à fournir des kits d’énergie solaire aux populations rurales vulnérables. Il a exhorté à une action mondiale plus efficace contre les changements climatiques lors de la COP28, mais il a surtout mis en exergue l’importance de trouver une voie africaine face aux défis régionaux et internationaux. « L’Afrique sait ce qu’elle veut. Les peuples africains et du Sud global sont frustrés car ils se sentent insultés, déshumanisés », a-t-il souligné.
Insistant sur le pacifisme profond du Togo, M. Dussey a vanté les succès de son pays en tant que médiateur, citant en exemple la libération de 49 soldats ivoiriens le 6 janvier dernier. Il a appelé à la cessation des hostilités dans les différents foyers de tension dans le monde et en particulier en Afrique de l’Ouest, avant de dénoncer les ingérences extérieures, affirmant que l’Afrique doit rester maîtresse de son destin. « Les ingérences ne sont plus les bienvenues dans une Afrique qui a conscience de ses propres responsabilités », a-t-il clamé. Le Ministre a aussi mentionné la crise soudanaise et les consultations menées par le Togo pour parvenir à un compromis et ouvrir un couloir humanitaire. Il a incité les parties en conflit à adopter la voie du dialogue. Abordant la question de la gouvernance, il a annoncé le Forum de la paix et de la sécurité de Lomé, dont la première édition se tiendra au mois d’octobre, avant de critiquer le statu quo au Conseil de sécurité de l’ONU et d’exiger une représentation plus équitable pour le continent africain.
Il a réaffirmé que l’Afrique cherche des relations fondées sur l’égalité et le respect mutuel. « La réalité du monde, c’est qu’il n’a plus de centres de gravité monopolistique. Le centre du monde est désormais ici et nulle part ailleurs », a-t-il déclaré, précisant que la réforme de « l’architecture multilatérale mondiale » avait été identifiée comme un sujet clef du prochain (neuvième) Congrès Panafricain de 2024, prévu à Lomé. Selon le Ministre, l’Afrique doit éviter de s’impliquer dans des rivalités extérieures et se concentrer sur ses propres combats, qui sont, entre autres, « la lutte contre le néocolonialisme, la lutte contre la pauvreté, l’industrialisation du continent et la prospérité économique, le combat pour la paix, la lutte contre la désafricanisation de l’Afrique et pour la renaissance africaine et la dignité ». En conclusion, il a répété sa fatigue face au paternalisme, au mépris, à la condescendance, et à l’arrogance.
Mme DOMINIQUE HASLER, Ministre des affaires étrangères, de l’éducation et du sport du Liechtenstein, a fait appel à la « responsabilité commune » afin de sauvegarder l’ordre international pour les générations futures, en agissant pour une ONU plus forte, plus équitable et plus résiliente, et en promouvant l’état de droit illustré par la Charte des Nations Unies, « le traité le plus réussi jamais adopté ». Mais, en tant que dirigeants, « faisons-nous réellement suffisamment d’efforts pour mettre ces promesses en pratique »? s’est-elle interrogée, pointant du doigt la guerre de colonisation que la Russie mène contre son voisin, l’Ukraine. Se lever ensemble contre cet acte d’agression signifie, avant tout, défendre l’ordre juridique international. La Ministre a salué à cet égard le défi « admirablement relevé » par l’Assemblée générale face à un Conseil de sécurité paralysé par le recours au veto, soulignant le rôle central désormais dévolu à cette Assemblée dans un Nouvel Agenda pour la paix. De fait, a-t-elle étayé, « c’est ensemble que nous avons appelé au retrait complet de toutes les troupes russes du territoire ukrainien et défini les paramètres d’une paix juste, et c’est ensemble que nous devons franchir la prochaine étape évidente: garantir la responsabilité pénale des individus pour cet acte d’agression ».
Abordant la problématique des changements climatiques, Mme Hasler a reconnu que nous ne sommes pas sur la bonne voie pour gagner ce combat. Si elle a placé ses espoirs dans la COP28, elle s’en est remise, en dernier ressort, à la loi qui « doit nous guider ». C’est pourquoi le Liechtenstein a soutenu la demande d’un avis consultatif de la Cour internationale de Justice (CIJ) qui aidera à clarifier les questions juridiques complexes liées aux changements climatiques. S’agissant du Programme de développement durable à l’horizon 2030 qui reste, à ses yeux, l’une des expressions les plus réussies d’un terrain d’entente de la dernière décennie, la Ministre a reconnu que le chemin est encore long à parcourir au regard du nombre croissant de personnes vivant dans l’extrême pauvreté depuis la pandémie de COVID-19. De même, au rythme actuel, il faudra des siècles pour atteindre l’égalité totale entre les sexes. Mme Hasler a évoqué les innombrables femmes qui souffrent de violence et d’oppression dans le monde entier, dénonçant les situations de persécution systématique liée au genre, de l’Afghanistan à l’Iran, en passant par le Bélarus et le Myanmar.
Mme CATHERINE COLONNA, Ministre de l’Europe et des affaires étrangères de la France, a commencé par rappeler les principes directeurs de la politique internationale française, dans le contexte de l’agression russe contre l’Ukraine. Le premier d’entre eux est l’égalité entre États, le respect de leur intégrité territoriale et de leur souveraineté, « principes sur lesquels personne ne peut ni ne doit transiger ». Puis la Ministre a défendu la sécurité alimentaire, pour laquelle la France se bat en finançant des livraisons du Programme alimentaire mondial au bénéfice des pays les plus fragiles et en facilitant l’exportation des céréales ukrainiennes. Elle a ensuite évoqué l’inviolabilité du patrimoine historique, « que ce soit à Mossoul et à Tombouctou hier, à Odessa ou à Lviv, aujourd’hui », ainsi que la lutte contre l’impunité des crimes, et le soutien de la France à la Cour pénale internationale (CPI). « Ce qui se joue en Ukraine nous concerne tous. Si nous laissons nos principes communs être transgressés là-bas, ils le seront partout », a insisté Mme Colonna.
Elle a ensuite abordé le rôle croissant de la France dans la solidarité internationale, le pays étant devenu le quatrième acteur mondial en termes d’aide, aux côtés des États-Unis, du Japon et de l’Allemagne. Le Sommet pour un nouveau Pacte financier mondial, qui s’est tenu à Paris les 22 et 23 juin et « a permis de tracer un chemin pour rehausser les financements publics et privés », a abouti au « Pacte de Paris pour les peuples et la planète », a-t-elle expliqué. Elle a appelé tous les États qui ne l’ont pas encore fait à endosser ce pacte, conçu pour « affronter en même temps la pauvreté, les changements climatiques et la perte de biodiversité, en faisant en sorte qu’aucun pays n’ait à choisir entre ces objectifs ». Puis elle a évoqué diverses initiatives, telles que l’accueil prochain de la coalition pour l’alimentation scolaire, à Paris en octobre, et la réunion de reconstitution du Fonds international de développement agricole (FIDA) en décembre. Elle a également annoncé l’accroissement significatif de l’aide alimentaire de la France, portée à 900 millions d’euros et bénéficiant à 67 pays. Sur le front environnemental, la Ministre a vanté l’engagement financier de la France en faveur du climat, à hauteur de 7,6 milliards d’euros en 2022, avant d’annoncer que la France accueillera la Conférence des Nations Unies sur l’océan en juin 2025 et s’engagera pour la protection des forêts. Puis, elle a critiqué le régime des Taliban pour leur politique de ségrégation et de violence contre les femmes, et a souligné l’engagement continu de la France auprès des Casques bleus et des travailleurs humanitaires. « Nous devons mieux les protéger », a déclaré la Ministre.
En ce qui concerne les crises internationales, Mme Colonna a appelé à des solutions pacifiques et inclusives dans des régions conflictuelles comme le Haut-Karabakh, le Soudan, et la République démocratique du Congo. La France, a-t-elle indiqué, continuera de soutenir les organisations régionales africaines dans des crises comme celle au Niger, en mettant l’accent sur le rôle vital de ces organisations, comme la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), pour instaurer la paix et la stabilité. « En Afrique, nous croyons aux solutions africaines aux crises africaines, et nous soutenons les organisations régionales africaines à chaque fois qu’elles demandent l’appui de leurs partenaires », a-t-elle affirmé, défendant également une plus grande présence africaine au Conseil de sécurité. Dans un contexte de recomposition du Moyen-Orient, elle a enfin annoncé la participation de la France à la troisième conférence dite « de Bagdad », soulignant la volonté de la France de contribuer à des projets concrets de coopération régionale.
M. DAN JØRGENSEN, Ministre de la coopération pour le développement et de la politique climatique globale du Danemark, a rappelé que, depuis plus de 40 ans, son pays a réalisé l’objectif consistant à consacrer au moins 0,7% de son produit national brut à l’aide au développement. Or même si tous les pays respectaient l’objectif en question, cela ne couvrirait que 10% du déficit de financement actuel, ce qui n’est tout simplement pas acceptable, a déclaré le Ministre. Cette année, le Danemark a décidé d’augmenter « à un niveau jamais atteint » son financement climatique basé sur des subventions: 745 millions de dollars, dont environ 60% seront alloués aux mesures d’adaptation. Et en 2024, nous doublerons notre contribution au Fonds vert pour le climat pour atteindre environ 234 millions, a promis le Ministre. Il a expliqué que Copenhague augmentera également son soutien à l’institution danoise de financement du développement, lui permettant de tripler sa contribution annuelle au financement climatique dans les pays en développement, de 300 millions de dollars aujourd’hui à environ 900 millions d’ici à 2030.
Pour mobiliser des financements pour le développement et l’action climatique, nous devons également mieux exploiter l’énorme potentiel des institutions financières internationales, a poursuivi M. Jørgensen. Les banques de développement, dont la Banque mondiale, doivent lever non pas des milliards, mais des milliers de milliards de dollars pour l’action climatique et les ODD, a expliqué le Ministre, en soulignant à quel point l’architecture financière internationale doit être revisitée.
Pour le Danemark, le manque de respect flagrant de la Russie envers les principes les plus fondamentaux de l’ONU est une « tragédie » pour l’Organisation. Raison pour laquelle son pays, a indiquéM. Jørgensen, soutient tous les efforts visant à mettre fin à l’agression russe contre l’Ukraine, à commencer par la formule de paix du Président Zelenskyy. Il a également demandé que soient établies les responsabilités complètes de la guerre d’agression illégale menée par la Russie contre l’Ukraine. Hier, a ensuite informé le Ministre, le Danemark était fier de signer le traité international historique (BBNJ) pour protéger la haute mer qui a été adopté plus tôt cette année, permettant ainsi de faire progresser l’ODD 14. Cette adoption revêt également une énorme valeur symbolique, a-t-il estimé, montrant qu’en dépit des tensions et des divisions croissantes, il est encore possible de rassembler et de trouver un terrain d’entente.