Soixante-dix-huitième session,
6e & 7e séances – matin & après-midi
AG/12532

À l’Assemblée générale, la guerre en Ukraine, symptôme d’une « fragmentation de la gouvernance globale », n’occulte pas d’autres foyers de tension

Au deuxième jour du débat général de l’Assemblée générale, chefs d’État et de gouvernement se sont succédé à la tribune pour battre le rappel des États Membres afin de relever les multiples défis, plus que jamais complexes et interdépendants, qui se posent dans un monde marqué par une « fragmentation de la gouvernance globale ».  Comme hier, il a été beaucoup question –mais pas seulement- de la guerre d’agression de la Russie en Ukraine, au moment même où se tenait au Conseil de sécurité une séance organisée par la présidence albanaise sur le maintien de la paix et de la sécurité en Ukraine, au titre de la « défense des buts et principes de la Charte des Nations Unies au moyen d’un multilatéralisme efficace ». 

Ainsi, le Président de la Roumanie, pays qui accueille 6 millions de réfugiés ukrainiens, a rappelé l’importance de défendre un ordre international « fondé sur des règles et le respect du droit international », face aux « ingérences malveillantes » de Moscou.  C’est particulièrement vrai à ses yeux dans la région « stratégique » de la mer Noire, d’où part l’Initiative qui porte son nom et à laquelle la Russie a mis unilatéralement fin, aggravant une crise alimentaire mondiale déjà marquée par la flambée des prix des denrées.  Son homologue de la Lituanie a abondé dans le même sens, accusant la Russie, « par ses visées impérialistes », d’infliger des revers douloureux dans des domaines qui vont au-delà de la sécurité alimentaire, comme l’action climatique ou les migrations.  Un recul qui se traduit non seulement par des pertes humaines, mais qui détruit aussi « l’optimisme de mieux rebâtir ». 

Si les dirigeants de la Lettonie, de la Bulgarie, de la Slovaquie, de la Finlande et de la République de Moldova ont pris fait et cause pour l’Ukraine, plusieurs intervenants ont attiré l’attention sur d’autres foyers de conflit, parfois éclipsés par l’actualité, mais tout aussi susceptibles de nourrir l’instabilité, y compris en plein cœur de l’Europe.  « Jadis témoin des pires horreurs, l’Europe restera fracturée aussi longtemps que Chypre sera divisée », a ainsi mis en garde le Président chypriote, en dénonçant de nouvelles violations par les forces turques du droit international et des résolutions du Conseil de sécurité. « C’est pourquoi la reprise des négociations est ma priorité absolue », a-t-il assuré, en expliquant que le statu quo actuel « ne peut pas être l’avenir » de l’île. 

Le Président de la présidence de la Bosnie-Herzégovine a de son côté fustigé le système politique de cette république fédérale, qui n’est pas selon lui une démocratie à part entière, mais une « ethnocratie ».  Ce système « totalitaire et autocratique », a-t-il soutenu, est instrumentalisé par des pays voisins qui cherchent à diriger la Bosnie-Herzégovine par le biais du contrôle qu’ils exercent sur certaines communautés, avec pour objectif de diviser le pays.  Une emprise qui ne fait que favoriser « népotisme et corruption » au sein des institutions gouvernementales, expliquant la fuite des cerveaux et des travailleurs qualifiés vers des horizons professionnels plus attrayants. 

Lui aussi préoccupé par la dynamique migratoire, le Président du Ghana a prédit qu’une Afrique de l’Ouest pacifique et prospère serait dans l’intérêt du monde entier, plutôt que l’exode périlleux des « forces vives » de cette région vers une Europe « inhospitalière ».  Pour y parvenir, il a jugé nécessaire d’appuyer les efforts des organisations régionales et continentales concernées pour rétablir la stabilité dans les pays de la région minés par les organisations terroristes et tombés aux mains de putschistes. 

Face à la vague de coups d’État militaires dans plusieurs pays du Sahel, le Président de l’Angola s’est d’ailleurs dit convaincu « de l’existence d’une main invisible intéressée par la déstabilisation de notre continent et l’expansion de sa zone d’influence, alors que nous savons qu’elle ne fournit pas le soutien nécessaire au développement économique et social des pays africains ».  S’il a condamné tout changement de gouvernement extraconstitutionnel, son homologue de la Sierra Leone a cependant souligné que les atteintes à l’état de droit tiennent à des causes profondes tels que la pauvreté, le chômage généralisé et les discriminations. 

Après avoir salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, le Président du Rwanda a rappelé que si des interventions bilatérales peuvent apporter des réponses à des situations de crise, l’engagement multilatéral reste nécessaire pour réaliser des progrès politiques et servir les intérêts des populations locales.  Aussi a-t-il insisté sur l’urgence pour l’Afrique de « parler d’une seule voix » et d’être pleinement représentée au sein des instances où se prennent les décisions relatives à son avenir. 

Étonné de l’impunité dont jouissent les auteurs de crimes, le Président de la République démocratique du Congo (RDC) a mis en cause le « silence » de l’Organisation des Nations Unies (ONU) avant de saluer les sanctions infligées par les États-Unis au Rwanda pour son soutien au M23, un groupe terroriste « qui exige un dialogue qui ne leur sera jamais accordé ». Estimant qu’il est grand temps pour Kinshasa de devenir le principal acteur de sa propre stabilité, le Chef de l’État congolais s’est également prononcé en faveur du retrait « progressif », mais « accéléré », de la Mission de l’ONU pour la stabilisation en RDC (MONUSCO), qu’il a décidé d’avancer à décembre 2023 au lieu de décembre 2024. 

Des success-stories sont cependant possibles, comme celle du Libéria, où « nous avons maintenu la paix et la sécurité, et protégé les droits humains et le droit des médias d’opérer pacifiquement et librement », s’est enorgueilli le Président de ce pays. Les scrutins d’octobre marqueront ainsi les quatrièmes élections générales pacifiques au Libéria depuis la fin de la guerre civile en 2003, a-t-il rappelé, précisant que ce seront aussi les premiers depuis le retrait de la Mission de l’ONU en 2018. 

L’Assemblée générale poursuivra son débat général demain jeudi 21 septembre, à partir de 9 heures. 

SUITE DU DÉBAT GÉNÉRAL

Déclarations

M. WAVEL RAMKALAWAN, Président des Seychelles, a considéré que la confiance et la solidarité constituent le fondement d’un ordre multilatéral fonctionnel, tout en regrettant que le monde d’aujourd’hui soit caractérisé par la désunion et la méfiance.  À mi-parcours du Programme de développement durable à l’horizon 2030, il est crucial d’accélérer nos efforts conjoints pour réaliser des progrès transformateurs à cet égard, alors que le dernier rapport en date fait état de revers et de retards. Pour inverser cette tendance, a recommandé le Président, nous devons donner la priorité à leur mise en œuvre à tous les niveaux, en exploitant le pouvoir des partenariats entre les gouvernements, la société civile, le secteur privé et les organisations internationales. La coopération Sud-Sud, en particulier, recèle un grand potentiel d’échange de connaissances et de développement mutuellement bénéfique, a-t-il estimé. 

Les Seychelles, à travers des processus tels que le Mécanisme africain d’évaluation par les pairs et l’Examen national volontaire, cherchent à consolider les acquis des succès politiques et socioéconomiques actuels, s’est enorgueilli le Chef de l’État, en se disant prêt à partager les pratiques optimales et à renforcer la coopération avec d’autres pays.  Par ailleurs, les partenaires du développement doivent mettre en œuvre le Programme d’action d’Addis-Abeba en augmentant le financement.  En outre, les institutions financières internationales devraient entreprendre des réformes pour garantir que les besoins spécifiques des pays vulnérables soient pris en compte dans l’accès au financement du développement, a poursuivi M. Ramkalawan.  Il a apporté son soutien à l’adoption d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle qui réponde pleinement aux besoins des petits États insulaires en développement (PEID).  Enfin, a-t-il ajouté, il faut tirer parti des partenariats public-privé et de l’allégement de la dette pour obtenir de meilleurs résultats pour les programmes de développement tels que l’Agenda 2063 et les résultats prochains de la quatrième Conférence des PEID en 2024.  Il a salué les mesures de relance des ODD prises par le Secrétaire général.

La lutte contre la crise climatique n’est plus une option, mais une nécessité immédiate, a poursuivi M. Ramkalawan.  Pour citer le Secrétaire général, l’ère du réchauffement climatique est devenue « une ère d’ébullition mondiale », et les dirigeants doivent faire preuve de volonté pour limiter la hausse des températures mondiales à 1,5 degré.  Pour lui, une gouvernance transparente des océans offre des opportunités de développement et de protection de l’environnement, raison pour laquelle il a rendu hommage aux actions audacieuses des PEID, tels que les Bermudes et les Tonga, qui ont délibérément choisi d’exploiter l’énergie des vagues comme solutions réalisables pour un avenir énergétique indépendant et propre.  Les Seychelles poursuivront la même approche ambitieuse alors que nous assumons la présidence du SIDS (PEID) « Dock », a annoncé le Président. 

M. PAUL KAGAME, Président du Rwanda, a commencé par rappeler les résultats du Sommet sur les objectifs de développement durable (ODD), qui a une fois encore cette année alerté sur la lenteur de la mise en œuvre de ces objectifs.  Il a souligné les difficultés auxquelles sont confrontés les pays en développement, notamment la charge de la dette et les taux d’intérêts élevés dans les économies développées, qui creusent les disparités économiques et finissent par ralentir les progrès vers les ODD.  Pour résoudre ces problèmes, le dirigeant a appelé à la coopération, mais aussi à l’amélioration de la gouvernance financière et de la gestion des ressources naturelles dans les pays en développements eux-mêmes.  Il a par ailleurs salué les propositions de l’Initiative de Bridgetown et du Sommet de Paris pour un nouveau pacte de financement mondial, ainsi que la « reconstitution du Fonds vert pour le climat » pour permettre aux pays les plus vulnérables de lutter contre les changements climatiques.

Se disant pessimiste sur la fin des conflits dans le monde, M. Kagame a dénoncé l’injustice que ces conflits font peser sur les innocents, prenant comme exemple la crise migratoire qui pousse chaque année migrants et réfugiés à entreprendre des voyages dangereux à la recherche d’un avenir meilleur.  Il a indiqué que son pays travaillerait avec ses partenaires, notamment le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), pour contribuer à une solution durable.

Concernant les questions de gouvernance auxquelles aucun pays ni aucune région ne peut échapper, le Président a salué le Nouvel Agenda pour la paix du Secrétaire général, en rappelant que si les interventions bilatérales, auxquelles le Rwanda contribue en divers endroits, peuvent apporter des réponses à des situations de crise, l’engagement multilatéral restait nécessaire pour réaliser des progrès politiques et pour que de telles interventions « servent les intérêts des populations sur le terrain ».  Concernant l’Afrique en particulier, il a insisté sur l’urgence pour ce continent de « parler d’une seule voix » et d’être pleinement représenté dans les instances où se prennent les décisions concernant son avenir.

Appelant une nouvelle fois à la mise en place d’un cadre de coopération pour le développement plus efficace et de partenariats plus justes et égaux, M. Kagame s’est notamment félicité de l’initiative de Tombouctou du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui vise à renforcer l’écosystème d’innovation des start-up africaines, ou encore de celle de l’Union internationale des télécommunications (UIT), qui ambitionne d’améliorer l’infrastructure publique numérique inclusive - deux exemples, selon lui, « de ce que l’ONU peut produire de meilleur ».  Rappelant que son pays commémorera le génocide contre les Tutsis pour la trentième fois en avril 2024, M. Kagame a conclu son intervention en disant sa reconnaissance envers tous ceux qui ont été aux côtés de son pays dans cette traversée, et s’est félicité d’accueillir la troisième Conférence des Nations Unies sur les pays en développement sans littoral, en juin prochain.

M. NIKOS CHRISTODOULIDES, Président de Chypre, a déclaré que la Charte des Nations Unies restera « une promesse et non une réalité » si nous faisons preuve de complaisance dans nos actions.  Les dirigeants qui nous ont précédés, ayant « hérité de cendres et non d’institutions », n’ont eu d’autre choix que de se tourner vers le multilatéralisme et le droit international, a-t-il observé.  Il a condamné dans les termes les plus fermes toute action militaire contraire à la paix et la sécurité internationales, en assurant que dans de tels cas, son pays se rangera toujours du bon côté de l’histoire. Depuis le premier jour de l’agression contre l’Ukraine, Chypre a fait preuve de solidarité, a-t-il noté, avant de rappeler qu’un tiers de la population chypriote est toujours déplacée du fait de l’agression étrangère contre son propre pays.  Il a donc appelé à la cessation immédiate des hostilités et encouragé les parties à engager des négociations constructives. 

Pendant ce temps, les Chypriotes grecs comme turcs continuent de subir les conséquences de l’invasion et de la division.  « Jadis témoin des pires horreurs, l’Europe restera fracturée aussi longtemps que Chypre sera divisée », a mis en garde le Président. En l’absence d’un processus de paix, il s’est inquiété du risque « sérieux » de nouvelles violations du droit international par les forces turques, comme celles perpétrées récemment à Varosha, « ville fantôme » prise en otage en violation des résolutions du Conseil de sécurité.  Nous l’avons également vu plus récemment dans la zone tampon, a-t-il noté, où les attaques contre les Casques bleus par les forces turques nous ont alertés une fois de plus sur l’urgence de la paix.  « C’est pourquoi la reprise des négociations, solidement ancrées sur le cadre convenu, est ma priorité absolue », a affirmé M. Christodoulides, pour qui le statu quo actuel « ne peut pas être l’avenir de Chypre ». 

À ses compatriotes chypriotes turcs, le Président a déclaré qu’il entendait leur appel à la paix et qu’il ne ménagerait aucun effort « pour réaliser notre rêve commun de réunification et de paix sur notre île ».  Toutefois, a-t-il insisté, il n’existe pas d’autre base pour le règlement de la question chypriote que celle dictée par les résolutions du Conseil.  « L’illégalité résultant de l’invasion, de l’agression et du recours à la force ne peut être reconnue », a-t-il ajouté, avant d’inviter son homologue turc à « travailler ensemble, guidés par une vision de paix ».  Afin de favoriser la reprise des négociations sur la base du cadre convenu et des acquis du cycle précédent, le Président a encouragé l’ONU à devenir une force motrice du dialogue en nommant un envoyé spécial pour la question chypriote.  À ses yeux, il incombe à l’Organisation d’agir en tant que catalyseur de la paix dans son pays, avec la collaboration de l’Union européenne

S’agissant des changements climatiques, M. Christodoulides a exprimé sa vive préoccupation face aux conséquences de la « colère de la nature » en Méditerranée orientale, particulièrement vulnérable aux incendies de forêt et aux inondations.  Reconnaissant par ailleurs que les droits humains sont essentiels à la paix et à un développement durable, il a annoncé la candidature de Nicosie au Conseil des droits de l’homme pour la période 2025-2027. 

M. HAGE G. GEINGOB, Président de la Namibie, a considéré que le fossé « terrifiant » qui sépare les riches des marginalisés n’est pas seulement une préoccupation morale, mais une menace pour la stabilité et l’harmonie mondiales.  Ce matin, l’Assemblée générale adoptera une déclaration politique sur la prévention, la préparation et la réponse aux pandémies, a-t-il rappelé.  Les pandémies sont depuis longtemps de redoutables adversaires qui ravagent de manière disproportionnée le tissu socioéconomique des pays en développement, a souligné le Chef de l’État.  Aussi a-t-il demandé que l’on mette fin à l’« apartheid vaccinal ».  Nous devons en outre garantir un accès équitable aux articles de santé, avec un engagement plus vigoureux de la part des pays riches en matière de transfert de technologies, de suppression des obstacles à la propriété intellectuelle, et d’investissements pour permettre la production de vaccins dans les pays du Sud.

M. Geingob s’est ensuite dit fier que la Namibie soit classée comme le huitième pays au monde à déployer des efforts visant à réduire les inégalités entre les sexes.  En plus d’avoir 44% de représentation féminine au Parlement, nous avons des femmes aux postes de premier ministre et de vice-premier ministre, et les deux tiers de nos principales institutions bancaires sont dirigées par des femmes.  Autre fossé que son pays souhaite voir comblé, celui creusé par les progrès rapides de l’informatique quantique et de l’intelligence artificielle, qui offrent des opportunités de croissance et de développement sans précédent.  Les pays en développement ne doivent donc pas être laissés pour compte dans cette révolution numérique, a plaidé le Président.

De même, la Namibie est parfaitement consciente que la transition énergétique n’est pas seulement une nécessité pour lutter contre les changements climatiques, mais aussi une opportunité pour le développement économique, a relevé le Chef de l’État.  Conformément à leurs engagements pris lors de la COP21 à Paris en 2015, les pays développés doivent donc fournir un soutien financier et technologique pour permettre aux pays en développement de passer à des sources d’énergie plus propres sans entraver leur développement, a-t-il rappelé.  Pour sa part, la Namibie avait annoncé, lors de la soixante-quinzième session de l’Assemblée générale, son intention de modifier sa structure économique en tirant parti d’outils financiers innovants pour mobiliser un financement durable pour la lutte contre les changements climatiques.  « Un an plus tard, à Glasgow, en marge de la COP26, nous avons annoncé le développement de projets à hydrogène vert à grande échelle qui fourniraient au monde les molécules propres nécessaires à la décarbonation des secteurs difficiles à réduire », a encore cité le Président.  Il s’est félicité d’avoir lancé dans son pays plus de cinq projets de ce type, avec un budget de plus de 20 milliards de dollars, afin de développer un potentiel d’énergies renouvelables de classe mondiale.  « Le but est de donner à nos générations futures une chance de lutter contre le réchauffement de la planète. »

M. KLAUS WERNER IOHANNIS, Président de la Roumanie, a rappelé l’importance qu’il y a à défendre un ordre international « fondé sur des règles et le respect du droit international ».  À ce titre, la guerre d’agression continue de la Russie contre l’Ukraine a démontré selon lui l’importance stratégique de la région de la mer Noire, une zone qui doit être protégée contre les effets de la « guerre hybride » et des « ingérences malveillantes » de la Russie.  La Roumanie restera solidaire de l’Ukraine, a-t-il déclaré, comme elle l’a déjà été en accueillant plus de 6 millions d’Ukrainiens et en soutenant l’obligation internationale de rendre des comptes pour que tous les responsables d’atrocités soient traduits en justice.  M. Iohannis a par ailleurs rappelé que la Russie avait mis fin à l’Initiative de la mer Noire en attaquant les ports ukrainiens, aggravant ce faisant la crise alimentaire mondiale.  Son pays a facilité la livraison de plus de 25,5 millions de tonnes de céréales ukrainiennes, a-t-il rappelé en affirmant qu’il ne laisserait pas tomber ses partenaires les plus vulnérables, notamment en Afrique. 

Le Président a ensuite présenté la stratégie de développement durable de la Roumanie, qui vise à promouvoir une gouvernance efficace, transparente et centrée sur les citoyens, une stratégie qui, même si le pays « reste à la traîne au niveau mondial », est sur la bonne voie, avec 62% des objectifs nationaux atteints pour 2030.  Rappelant l’importance du financement du développement, il s’est engagé à augmenter l’APD de son pays à 0,33% de son PIB national d’ici à 2030 et à contribuer à l’objectif de l’UE d’allouer 0,20% de son APD collective aux PMA.

Sur les questions des changements climatiques, le Président a rappelé la détermination de son pays à mettre en œuvre rapidement l’Accord sur la diversité biologique marine dans les zones situées au-delà de la juridiction nationale et à œuvrer, dans le cadre d’un groupe de travail de la Cour internationale de Justice (CIJ), sur les obligations des États en matière de changements climatiques, mais aussi à encourager l’éducation climatique.  Il a appelé de ses vœux l’accélération d’une transition énergétique juste en précisant que celle-ci doit se faire sans compromettre la sécurité énergétique.  Elle doit aussi être réalisée en parallèle d’autres mesures, comme la coopération internationale en matière de lutte contre les risques de catastrophe. 

En conclusion, M. Iohannis a fait part de son soutien aux initiatives visant à inclure « d’autres voix importantes », dont celle du « plus petit groupe régional » de l’Europe de l’Est au sein du Conseil de sécurité. Il a plaidé pour le renforcement du système des droits de l’homme des Nations Unies, qui mérite notamment un financement adéquat, ainsi que pour une acceptation plus large par les États de la juridiction de la CIJ.  Il s’est félicité de l’organisation du Sommet de l’avenir de l’année prochaine, qui devrait fournir aux Nations Unies les outils nécessaires pour agir pour les générations présentes et futures.

M. CHANDRIKAPERSAD SANTOKHI, Président du Suriname, a exprimé son impatience face aux crises qui se multiplient dans le monde sans trouver de réponse adéquate. « Nous faisons des promesses, que nous ne tenons pas souvent; nous exprimons de nobles objectifs, dont la réalisation est médiocre », a-t-il lancé.  « Cela ne peut pas durer. »  Or, aucun pays n’est épargné par les effets de ces crises, les pays en développement comme le Suriname au premier chef, et aucun pays ne peut résoudre ces défis seul, a-t-il relevé.  Le Président a rappelé que « nous, les humains, sommes responsables de ces crises », appelant à en assumer la responsabilité.  Pour y parvenir, M. Santokhi a proposé un nouveau multilatéralisme, plus juste et plus efficace.  Il a recommandé de transcender les intérêts nationaux et de mettre de côté les divergences idéologiques pour agir de manière constructive en faveur de la prospérité de nos peuples et de la protection de notre planète, en misant sur une ONU forte, déterminée et unie. 

Néanmoins, a reconnu le Président, le fardeau de la dette, les changements climatiques, le ralentissement économique et l’impact de la guerre qui fait rage en Ukraine ont exercé une pression énorme sur la mise en œuvre des ODD. Pour les petits pays en développement dotés de zones côtières de faible altitude, la pression budgétaire due à des crises indépendantes de leur volonté constitue un problème réel et quotidien. Il a souligné l’importance de la science, de la technologie et de l’innovation pour augmenter la production alimentaire et rendre l’agriculture plus productive, citant en exemple le programme de sécurité alimentaire de la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  Dans cette optique, le Suriname a récemment adopté une stratégie numérique nationale 2023-2030. 

Face à la détérioration de l’environnement politique, humanitaire et sécuritaire en Haïti, M. Santokhi a appelé à intensifier les efforts afin de traduire les intentions en actions tangibles.  Dans le même temps, les acteurs haïtiens, divisés, doivent démontrer sans délai leur attachement au dialogue afin de parvenir à un consensus sur la voie à suivre pour sortir de la crise, a-t-il recommandé.  Le Président a ensuite souligné que le Suriname est l’un des trois seuls pays dans le monde à présenter un bilan carbone négatif, assurant qu’il demeure engagé à jouer son rôle dans la protection de l’environnement au moyen d’actions nationales ciblées, mais aussi de partenariats publics et privés internationaux.  Il a plaidé en faveur d’un accès plus facile au financement climatique pour mettre en œuvre des politiques d’atténuation et d’adaptation.  Le Sommet sur l’Amazonie, qui s’est tenu en août au Brésil, a été l’occasion pour le Suriname et sept autres pays de la région de s’engager en faveur d’une meilleure gestion de la région amazonienne.  La ville de Paramaribo a d’ailleurs formé le vœu de mettre un terme à la déforestation d’ici à 2030.  En ce qui concerne la réforme « urgente » de l’architecture financière internationale, M. Santokhi a encouragé les États Membres à contribuer à l’adoption d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle. 

M. ZELJKO KOMŠIĆ, Président de la présidence de la Bosnie-Herzégovine, a axé le début de son intervention sur la gestion de la migration, constatant que les pays puissants sélectionnent les migrants les plus éduqués et hautement qualifiés dans le but d’exploiter leurs capacités.  Les petits pays, en revanche, perdent non seulement leurs meilleurs personnels, mais également les investissements consacrés à la « création » de ces profils hautement qualifiés.  Préoccupé par cet affaiblissement systématique des pays d’origine, il a jugé difficile de renforcer la confiance lorsque les « grands » pays s’accaparent la population des pays plus petits, entravant ainsi toute perspective de développement.  En ce qui concerne la Bosnie-Herzégovine, il a expliqué que la raison fondamentale qui pousse les gens à partir est le manque de perspectives, né du fait que le système politique en place n’est pas une démocratie à part entière mais une forme d’« ethnocratie » où les élections et l’attribution des postes au sein du gouvernement se font en fonction de l’ethnicité de la personne, créant un système totalitaire et autocratique.  En outre, la difficulté qu’il y a à remplacer les autorités crée un environnement où les autorités elles-mêmes cessent de travailler pour le bénéfice des citoyens car elles n’en voient pas la nécessité.

De plus, ce système politique est habillement utilisé par nos voisins qui cherchent à diriger la Bosnie-Herzégovine à travers les communautés ethniques qu’ils revendiquent.  Leur objectif, a-t-il accusé, est de diviser le pays et de le rendre futile.  Cette attaque contre la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine rend le développement démocratique impossible.  Et il est regrettable que certains, à l’Est comme à l’Ouest, pensent que l’appui qu’ils accordent à ceux qui veulent diviser la Bosnie-Herzégovine permettra d’assurer la stabilité des Balkans occidentaux.

Le Président a également indiqué que le système ethnique d’exercice du pouvoir favorise le népotisme et la corruption dans tous les segments de la société, en particulier dans les institutions gouvernementales.  C’est pour cela que nous ne sommes pas parvenus à créer une société d’égalité des chances, a-t-il regretté.  Il a affirmé que « l’intervention » du Haut-Représentant et la suspension pour 24 heures de la Constitution, « un précédent inconcevable dans le monde démocratique », n’avaient pas permis de retirer les obstacles au fonctionnement de l’État mais contribué à renforcer les principes ethniques antidémocratiques ainsi que la discrimination à l’encontre des citoyens au sein de la Constitution et de la législation électorale.  Si l’égalité n’est pas assurée parmi les citoyens, il est difficile de renforcer la confiance dans une société postconflit comme la Bosnie-Herzégovine, a-t-il dit.  Selon lui, le pays doit opérer une transformation d’un système de représentation politique ethnique à un système de représentation politique civique.

M. Komšić a ensuite déploré le rejet par « le Premier Ministre de notre pays voisin » du jugement rendu par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Kovačević, y voyant une forme d’interférence dans les affaires internes de la Bosnie-Herzégovine.  Ce n’est que lorsque la représentation politique civique sera acceptée en Bosnie-Herzégovine, à travers le mise en œuvre des arrêts de la Cour européenne, et les attaques perpétrées par ses voisins contre sa souveraineté cesseront, que la Bosnie-Herzégovine pourra pleinement contribuer au Programme 2030 et rejoindre le rang des sociétés démocratiques et matures.

Pour M. NANA ADDO DANKWA AKUFO-ADDO, Président du Ghana, le moment est venu de corriger « l’injustice de longue date » subie par le continent africain concernant la structure et la composition actuelles du Conseil.  Il n’est en effet plus possible de continuer à prêcher la démocratie, l’égalité et la bonne gouvernance dans le monde si l’Organisation est toujours régie par une structure injuste et inéquitable.  Il a aussi regretté que l’ONU semble ne pas vouloir -ou ne pas pouvoir- influencer le cours des événements en Ukraine.  Le Ghana, qui a siégé au Conseil tout au long de cette période, peut témoigner que la solidarité mondiale tant recherchée ne se concrétisera que si cela convient aux nations détenant le droit de veto.  Convaincu que l’Organisation constitue le meilleur endroit pour régler les problèmes mondiaux, le Président n’en a pas moins estimé qu’une réforme profonde du Conseil est indispensable pour ne pas voir sapée sa crédibilité.

Concernant les événements « tragiques » en Afrique de l’Ouest et au Sahel, le Président a évoqué l’instabilité et les activités terroristes généralisées ayant soumis les pays de la région à de fortes pressions. Plusieurs d’entre eux ont perdu de vastes étendues de territoire au profit de terroristes « déchaînés ». Les coups d’État sont réapparus.  « Certains espèrent à tort qu’ils soient la solution aux menaces pesant sur leurs nations. »  Le Chef de l’État s’est dit convaincu que ces conflits seraient mieux gérés si la communauté internationale soutenait les efforts des organisations régionales et continentales, au lieu de saper leur travail.  Les Africains, a-t-il rappelé, ont combattu et sont morts pendant la Seconde Guerre mondiale pour défendre l’Europe et ses alliés: « il est temps que le monde nous rende la pareille en ces temps difficiles ».  Une Afrique de l’Ouest pacifique et prospère serait dans l’intérêt du monde entier, plutôt que les forces vives de ces nations migrent, au péril de leur vie, vers une Europe « peu accueillante ».

Sans chercher à se soustraire à ses responsabilités, M. Akufo-Addo a appelé à reconnaître qu’une grande partie de l’Europe et des États-Unis a été construite et a prospéré « grâce à la sueur, aux larmes, au sang et aux horreurs de la traite négrière transatlantique et des siècles d’exploitation coloniale ».  Des réparations doivent être versées pour la traite des esclaves, a-t-il réclamé.  Aucune somme d’argent ne pourra jamais compenser les horreurs commises, mais cela permettrait de souligner que le mal a été perpétré, que des millions d’Africains productifs ont été arrachés à leur continent et exploités sans compensation.  L’Union africaine a autorisé le Ghana à organiser une conférence mondiale sur cette question en novembre à Accra, a-t-il rappelé.

Le Président a enfin évoqué les flux financiers illicites en provenance du continent africain, qui feraient perdre à l’Afrique quelque 88 milliards de dollars par an.  « Oui, ces sommes doivent également être restituées au continent », a lancé M. Akufo-Addo, qui s’est étonné que les pays recevant de tels fonds n’hésitent pas à les conserver, trop heureux de qualifier de « corrompus » des pays comme le Ghana.  Un groupe de travail conjoint de la Commission de l’Union africaine et du Secrétariat de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), sous les auspices de l’ONU, devrait être chargé de trouver des moyens de mettre un terme à ces sorties de fonds préjudiciables, a-t-il estimé.

M. GITANAS NAUSĖDA, Président de la Lituanie, a rappelé qu’il ne peut y avoir de développement durable dans un contexte de guerre.  « Une guerre de type colonial a fait son retour en Europe. »  L’agression de la Russie contre l’Ukraine aggrave la situation mondiale dans des domaines tels que la sécurité alimentaire, l’action climatique ou bien encore les migrations, a dit le Président.  Il a accusé la Russie de prendre en otage, par ses visées impérialistes, la vision d’un monde libre et ouvert reposant sur la coopération.  « La communauté internationale ne peut plus laisser la Russie manipuler et détourner les règles mondiales. »  Il a demandé qu’une pression accrue soit mise sur la Russie afin qu’elle cesse ses attaques délibérées contre les civils et les infrastructures civiles en Ukraine.  Cette guerre d’agression doit cesser avec le retrait immédiat, total et inconditionnel des troupes et matériel russes du territoire ukrainien, a tranché le Président. Il a dit parler de « tout le territoire ukrainien, c’est-à-dire au sein de ses frontières et eaux territoriales internationalement reconnues de 1991. »

Le dirigeant a soutenu les efforts de la Cour pénale internationale (CPI) en vue de poursuivre en justice les auteurs de crimes de guerre, de génocide et de crimes contre l’humanité commis en Ukraine.  Il a notamment appuyé le mandat d’arrêt délivré à l’encontre du Président russe.  M. Nausėda a également demandé la création d’un tribunal spécifique afin de juger du crime d’agression commis par les autorités russes.  Il a condamné le retrait de la Russie de l’Initiative de la mer Noire, avant de s’opposer à toute levée des sanctions contre ce pays. Il a appelé l’Assemblée à se montrer déterminée et à condamner tout type d’agression qui viole de manière flagrante la Charte.  La politique de la peur et de l’intimidation doit cesser une bonne fois pour toute, a conclu le Président.

Mme ZUZANA ČAPUTOVÁ, Présidente de la Slovaquie, a noté que la guerre en Ukraine a grandement contribué à faire de 2023 l’année la plus meurtrière depuis 1994 en termes de décès liés aux conflits.  Depuis plus de 570 jours, a-t-elle dénoncé, les forces russes non seulement tuent des civils innocents, kidnappent des enfants et détruisent des villes et des villages, mais bombardent aussi les infrastructures et les ports qui exportent les céréales ukrainiennes vers ceux qui en ont besoin au Bangladesh ou en Égypte.  « Nous ne pouvons pas permettre à la Russie de transformer l’Initiative de la mer Noire en une initiative de chantage », a-t-elle martelé, avant d’indiquer que son pays augmente ses capacités de transit pour acheminer les céréales ukrainiennes là où elles sont nécessaires.  .  Elle a toutefois appelé les États Membres à ne pas fermer les yeux sur ceux qui compromettent la paix et la sécurité alimentaire mondiales.  « Nous avons besoin d’un Nouvel Agenda pour la paix, comme l’a dit à juste titre le Secrétaire général, mais nous avons avant tout besoin d’une action en faveur de la paix de la part de la Russie en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU », a-t-elle ajouté. 

La Présidente a ensuite exhorté la communauté internationale à faire reculer les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici à 2030.  Assurant que des solutions réalisables, efficaces et peu coûteuses existent en matière d’atténuation et d’adaptation, elle a souligné que la Slovaquie participe à cet effort en produisant d’ores et déjà 85% de son électricité avec zéro émission.  Elle a également rappelé que la crise climatique affecte le plus ceux qui en sont le moins responsables et qu’à mi-chemin, seuls 12% des objectifs de développement durable définis à l’horizon 2030 sont sur la bonne voie pour être atteints. 

Mme Čaputová a d’autre part souligné l’immense potentiel des nouvelles technologies dans des domaines tels que la santé publique et l’action climatique, tout en mettant en garde contre l’essor rapide des médias sociaux et le flot de désinformation et de discours de haine qui en découle.  Si rien n’est fait pour les réguler démocratiquement, les plateformes, l’intelligence artificielle et d’autres technologies émergentes « peuvent agir comme des accélérateurs des crises actuelles », a-t-elle averti.  En conclusion elle a appelé à écouter les enfants qui, selon elle, demandent qu’on leur lègue un monde où l’égalité est la règle, où le développement peut être durable et résilient au climat et où l’on puisse vivre en paix. 

M. SAULI NIINISTÖ, Président de la Finlande, a constaté que, 10 ans après sa première intervention à la tribune de l’Assemblée générale, le monde est devenu encore plus complexe et les crises se multiplient, et les avis pour y mettre fin semblent maintenant se contredire les uns les autres. Aucun des défis auxquels nous sommes confrontés ne pourra être réglé par un seul pays ou groupe de pays, a-t-il mis en garde, en affirmant que les possibilités offertes par les nouvelles technologies seront également mieux maîtrisées « si on les maîtrise ensemble ».  De l’avis du Président, pour renforcer la coopération multilatérale, toutes les voix doivent être entendues, en particulier celles qui expriment des doléances. 

Il y a un an et demi, la Russie a déclenché une guerre contre l’Ukraine en violation directe de la Charte des Nations Unies, a rappelé le Chef de l’État en faisant remarquer que la lutte pour la liberté de Kyïv trouve un écho dans la propre histoire de la Finlande.  Celle-ci a en effet combattu pour son indépendance contre un ennemi bien plus grand par la taille, s’est-il souvenu affirmant ne pas vouloir voir le monde retomber dans une situation où les puissants considèrent qu’ils peuvent dominer les plus petits.  Il s’est dit convaincu que les efforts de paix déployés de part et d’autre, y compris dans l’enceinte du Conseil de sécurité au même moment, seront de nature à atténuer les tensions et les autres foyers de conflit ailleurs.  Membre du Conseil des droits de l’homme, la Finlande plaide aussi pour la sauvegarde des droits humains.  Aucun pays n’étant parfait, chacun peut apprendre des expériences des autres, et quand l’un d’entre nous échoue, la communauté internationale doit veiller à l’établissement des responsabilités, a préconisé M. Niinistö. 

Par ailleurs, il est temps pour lui d’envisager avec le plus grand sérieux l’engagement collectif en faveur des ODD et de la lutte contre les changements climatiques, alors que le réchauffement planétaire se poursuit, marqué par la perte de biodiversité et des températures records cet été.  L’ONU a précisément été créée pour répondre à de tels moments et le moment est venu d’identifier les causes profondes du mécontentement qui conduit à des échecs répétés, a-t-il déclaré.  Le Président, voyant les Nations Unies comme la somme de ses États Membres, a recommandé que chacun veille à ce que le système soit à la hauteur de la tâche qui lui a été confiée. 

M. RUMEN RADEV, Président de la Bulgarie, a regretté qu’après la pandémie, la guerre en Ukraine ait exacerbé des crises de toutes sortes et détruit non seulement des milliers de vies humaines, « mais aussi l’optimisme de mieux rebâtir ».  Il a lancé un appel à reconstruire la confiance dans le multilatéralisme et à maintenir l’ordre international fondé sur des règles, en soulignant que l’agression de la Fédération de Russie contre l’Ukraine menaçait non seulement la paix et la sécurité, mais aussi le développement économique et social du monde entier.  Pour mettre fin à cette guerre, il faut une volonté politique plus forte de négocier une paix juste et durable fondée sur les principes internationalement reconnus de l’ONU, a déclaré le Président, en dénonçant les décisions de la Russie de se retirer de l’Initiative de la mer Noire, de bombarder des infrastructures portuaires ukrainiennes et de restreindre la navigation dans la mer Noire, qui aggravent l’insécurité alimentaire mondiale, en particulier dans les pays du Sud.

Concernant les autres conflits dans le monde, M. Radev a appelé toutes les parties au conflit israélo-palestinien à reprendre des négociations directes conduisant à une solution à deux États.  Il a par ailleurs rappelé sa position en faveur de l’unité et de la souveraineté du Yémen et souligné, au sujet de l’Afghanistan, l’importance de lutter contre les menaces terroristes et la migration irrégulière. Il a expliqué que dans les Balkans occidentaux, la stabilisation passait par des relations de bon voisinage, des réformes et le respect des critères d’adhésion à l’Union européenne.  Il a appelé les États dotés d’armes nucléaires à dialoguer, se disant notamment préoccupé par l’intention de la Russie de déployer des armes nucléaires au Bélarus. 

S’agissant du Sommet sur les objectifs de développement durable (ODD), le Président a estimé qu’il constituait une opportunité pour remettre sur les rails le Programme 2030, en notant que l’accès au financement et à des partenariats solides entre l’ONU et les institutions financières internationales était la clef du développement durable, et en insistant sur l’importance du pacte numérique mondial pour accélérer la réalisation des ODD grâce au potentiel des technologies numériques.  La pandémie de COVID-19 ayant entraîné un « revers » dans la réalisation du Programme 2030, notamment dans le domaine de l’éducation, il s’est dit prêt, au nom de son pays, à respecter les engagements pris lors du Sommet sur la transformation de l’éducation de 2022.

Concernant les changements climatiques, qu’il a définis comme un « multiplicateur de menaces », le Chef de l’État a jugé que l’action climatique était « un test pour la capacité de réponse du système multilatéral », notamment à l’approche de la COP28.  Rappelant ensuite le soutien sans ambiguïté de son pays au système des droits de l’homme de l’ONU, M. Radev a indiqué que la Bulgarie avait présenté sa candidature au Conseil des droits de l’homme pour la période 2024-2026 et a insisté, en tant que membre des conseils d’administration de l’UNICEF et d’ONU-Femmes, sur l’importance d’investir, entre autres, dans la santé, l’éducation et la protection des enfants contre la violence, ainsi que dans l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes et des filles. 

En conclusion, M. Radev a rappelé que son pays avait coparrainé la résolution de l’Assemblée générale sur le recours au droit de veto, souhaitant que le Conseil de sécurité soit plus efficace dans l’exercice de sa responsabilité première et qu’au moins un siège non permanent supplémentaire y soit attribué au Groupe des États d’Europe orientale. 

M. MOHAMED IRFAAN ALI, Président du Guyana, a affirmé que le multilatéralisme est l’approche la plus efficace pour relever le défi des changements climatiques.  Les États touchés de plein fouet par les phénomènes climatiques, tels que les petits États insulaires en développement (PEID) et les États côtiers de faible altitude comme le Guyana, sont aussi ceux qui contribuent le moins aux émissions et qui ont le plus besoin de financement, a-t-il observé.  Or, les engagements des pays développés, dont celui de fournir 100 milliards de dollars par an, ne sont toujours pas tenus. 

Doté de la deuxième couverture forestière par habitant au monde, le Guyana connaît l’importance des forêts pour l’atténuation des changements climatiques, et poursuit une stratégie de développement à faible taux d’émission, a expliqué le Président.  Ainsi, son pays a reçu 33,4 millions de tonnes de crédits d’emission de carbone, soit 750 millions de dollars pour la période allant jusqu’à 2030.  En outre, le Guyana utilise les revenus tirés des ressources pétrolières et gazières pour financer sa transition vers les énergies renouvelables.  Néanmoins, il est clair à ses yeux que l’ambition mondiale de zéro émission nette d’ici à 2050 est « irréaliste », compte tenu du coût de la transition.  La COP28 n’atteindra pas ses objectifs de zéro émission nette si nous continuons à aborder cette question de manière « doctrinaire » en ignorant les réalités actuelles, a-t-il prédit.  Qui plus est, « le manque de financement des forêts sur pied suggère qu’elles valent plus mortes que vivantes ». 

L’architecture financière actuelle est incapable de relever les défis mondiaux actuels et doit être réformée, a encore dit M. Ali.  À cet égard, il a fait valoir que l’adoption rapide d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle doit faire partie du programme de réforme.  Le Président a condamné la « militarisation de la nourriture » comme instrument de guerre.  « La paix mondiale dépend du respect de la dignité humaine », a-t-il noté, et le travail des dirigeants mondiaux consiste à faire progresser les droits de tous afin de créer un monde juste, équitable et pacifique.  Or, depuis le début de la guerre en Ukraine, ce pays a reçu quelque 260 milliards de dollars de financement d’urgence.  En revanche, en 26 ans, le peuple palestinien a reçu une aide totalisant 40 milliards, Haïti recevant pour sa part 20 milliards de dollars d’aide à la reconstruction et au développement au cours des 60 dernières années.  S’il a réaffirmé sa pleine solidarité avec le peuple ukrainien, le dirigeant a toutefois déploré la disparité des approches par rapport aux autres pays et régions du monde. Ainsi, des mesures urgentes et décisives doivent être prises pour parvenir à une solution globale en Haïti.  Il en va de même pour Cuba, cible depuis 60 ans d’une « agression économique et politique ». 

M. Ali s’est dit convaincu que la souveraineté et l’intégrité territoriale du Guyana seront affirmées lorsque la Cour internationale de Justice (CIJ) rendra son arrêt concernant les efforts du Venezuela visant à leur porter atteinte.  Néanmoins, le Guyana a reçu, hier, un message « très menaçant » du Venezuela après avoir mis aux enchères certains blocs pétroliers dans ses eaux souveraines, a dénoncé le Président, y voyant une menace pour la paix et la sécurité régionales et internationales.  Alors que le Guyana deviendra membre du Conseil de sécurité en janvier prochain, il entend se laisser guider par les principes du droit international et de la Charte des Nations Unies. 

M. ZORAN MILANOVIĆ, Président de la République de Croatie, a déclaré que « la paix n’advient pas d’elle-même ».  Il est donc beaucoup plus rentable d’investir dans la prévention des conflits que dans leur résolution après coup.  C’est pourquoi la prévention des conflits et le maintien de la paix devraient être au cœur du cadre du nouvel Agenda pour la paix, en lien avec un engagement renouvelé en faveur du multilatéralisme, de la solidarité mondiale et de la confiance.  En tant que Présidente de la Commission de consolidation de la paix (CCP) pour 2023, la Croatie plaide en faveur de son renforcement et de l’élargissement de son champ d’action géographique et thématique. 

S’agissant du développement durable, les performances de la Croatie en matière de mise en œuvre des ODD sont classées parmi les meilleures.  Toutefois, a reconnu son président, il reste encore beaucoup à accomplir.  La Croatie possède un vaste patrimoine naturel, qu’elle souhaite préserver pour les générations futures.  Elle est notamment déterminée à intensifier la coopération en matière de protection de l’environnement marin et de lutte contre la pollution plastique.  M.  Milanović s’est ainsi félicité de l’adoption historique du « traité de la haute mer », adopté par la Conférence intergouvernementale sur la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.  Il y a vu un « triomphe pour le multilatéralisme ».  Aujourd’hui, la Croatie a rejoint le premier groupe de pays signataires du traité, s’est félicité le Président.  En tant qu’État membre de l’Union européenne (UE), la Croatie s’est aussi engagée politiquement et juridiquement à contribuer à faire de l’Europe le premier continent neutre en émission de carbone d’ici à 2050. En poursuivant dans cette voie, en accélérant le développement des énergies renouvelables et en augmentant les investissements verts, le Président a dit espérer pouvoir transformer la crise actuelle et la transition énergétique en « nouvelle chance pour nos économies ».  À titre d’exemple, il a cité un projet dit de « la vallée de l’hydrogène de l’Adriatique du Nord », qui englobe les régions italiennes du Frioul et de la Vénétie, ainsi que la Slovénie et la Croatie. 

Le Président a assuré que son pays continue d’attacher la plus grande importance à son voisinage immédiat dans le sud-est de l’Europe.  Les questions liées au passé et à l’héritage de la guerre, telles que le sort des personnes toujours portées disparues, la coopération dans le traitement des crimes de guerre, l’accès aux archives, ainsi que d’autres questions non résolues et très sensibles, doivent être abordées de manière approfondie, a‑t‑il dit. La Croatie soutient activement les efforts de la Bosnie-Herzégovine pour intégrer l’UE.  Elle est aussi très préoccupée par les relations entre le Kosovo et la Serbie et encourage les mesures de désescalade.  « Ces deux pays doivent se concentrer sur la normalisation de leurs relations, respecter leurs engagements et commencer à mettre en œuvre ce qui a été convenu cette année à Bruxelles et Ohrid », a conclu le Président, qui a estimé dans l’intérêt de la Croatie de promouvoir la stabilité et le développement des Balkans ainsi que le processus d’intégration européenne.

M. GUILLERMO LASSO MENDOZA, Président de l’Équateur, a rappelé que son gouvernement avait mis en place une politique « historique » pour la transition écologique et pour préserver le patrimoine naturel de l’Équateur.  En parallèle, le pays a amorcé des changements pour passer d’un système de production non durable à une économie circulaire à basses émissions.  Par ailleurs, le Président s’est félicité d’avoir élargi la protection des îles Galápagos en créant la réserve marine « Hermandad » qui s’étend sur 60 000 kilomètres carrés.  De plus, en renforçant le corridor marin du Pacifique, l’Équateur a créé la plus grande réserve transfrontalière du monde en coopération avec la Colombie, le Costa Rica et le Panama, a-t-il poursuivi. 

Insistant sur la nécessité de concilier les préoccupations environnementales et le bon sens économique, M. Lasso Mendoza s’est félicité de la réalisation de la plus grande initiative innovante d’échange de dette: la dette de 1,63 milliard a permis de réorienter les ressources vers la protection des Galápagos.  Se disant préoccupé par le phénomène El Niño susceptible de provoquer des inondations dévastatrices dans toute la région, il a appelé la communauté internationale à envisager des mesures d’atténuation des risques par le biais de fonds financiers non remboursables et d’une coopération internationale, ajoutant que la gravité de cet événement était liée aux effets des changements climatiques. 

Le Chef de l’État a également tenu à partager les résultats encourageants obtenus par son pays en matière sociale.  Après avoir investi dans le recrutement de personnels médicaux et communautaires, l’Équateur a réduit de 3,5% le taux de malnutrition chez les enfants de moins de 2 ans.  Indiquant que l’Équateur s’efforce de promouvoir une migration sûre et responsable, il a précisé que le pays connaît toutes les facettes de la migration et tient à faciliter l’intégration des migrants en garantissant tous leurs droits et en leur accordant un visa humanitaire.  Plaidant en faveur d’une politique de porte ouverte, il s’est félicité d’avoir permis l’enregistrement de 201 711 citoyens, essentiellement vénézuéliens, avant d’inviter la communauté internationale à faire également preuve de solidarité et de cohérence. 

Après 31 ans d’absence du Conseil de sécurité, M. Lasso Mendoza s’est félicité du retour de l’Équateur dans un contexte marqué par une guerre inattendue et des tensions nucléaires accrues.  Il a réaffirmé sa volonté de privilégier un règlement pacifique des conflits garantissant la protection des civils pour répondre aux nouvelles menaces sécuritaires.  Concernant la guerre en Ukraine, il a exigé la fin de l’agression militaire conformément à l’ordonnance de la CIJ, rappelant que ce conflit, en plus d’infliger douleur et destruction au peuple ukrainien, déstabilise la sécurité alimentaire et l’économie mondiales, en particulier dans les pays en développement.  Pour cette raison, il a appelé à la reprise de l’Initiative de la mer Noire et à la fin des guerres et conflits. 

Enfin, abordant la criminalité transnationale organisée, qu’il a qualifiée de « système corrupteur et meurtrier qui pénètre l’État et la société », le Président a rappelé que son pays joue un rôle actif dans la lutte contre ce fléau, notamment contre le trafic de drogues.  Il a conclu en exhortant les États à multiplier leurs efforts face à un ennemi capable de se multiplier.  « Si nous voulons partager pleinement les bienfaits de la mondialisation, nous devons aussi -et ensemble- faire face aux mêmes difficultés. » 

M. JOÃO MANUEL GONÇALVES LOURENÇO, Président de l’Angola, a indiqué que le fossé entre pays développés et pays en développement demeure une réalité inacceptable, en raison d’un manque de volonté politique de le combler.  Parce que les pays en développement ne sont pas représentés correctement au sein des institutions de gouvernance mondiale, ils ne peuvent pas faire entendre leurs points de vue et préoccupations, a-t-il regretté.  Cette situation génère selon lui de l’anxiété et de la frustration au sein des populations les plus vulnérables, lesquelles, parce que leurs doléances ne sont pas prises en compte, deviennent aisément perméables à des influences négatives qui sont dangereuses pour l’ordre et la stabilité. 

Le Président a exhorté les partenaires internationaux de l’Afrique à miser sur le marché africain, le taux de rendement des investissements étant satisfaisant.  « Nous voulons répondre aux attentes des jeunes qui sont obligés de partir pour réaliser leurs rêves », a-t-il assuré, en soulignant la traversée périlleuse de la Méditerranée.  Il a ensuite passé en revue les efforts de son pays en vue d’appuyer les initiatives de règlement des conflits et d’instauration de la paix, en mettant l’accent sur la situation en République démocratique du Congo.  M. Lourenço a pensé qu’il est possible de construire une base de confiance entre les belligérants, ce qui permettra d’apaiser les tensions dans la région des Grands Lacs et de mener à la paix.  Le Président a demandé un financement adéquat, durable et prévisible des efforts de lutte contre le terrorisme sur le continent, en se disant en faveur de contributions fixes pour les opérations sous pavillon de l’Union africaine.  Il a ensuite mentionné la vague de coups d’État menés par les militaires dans plusieurs pays du Sahel.  « Nous sommes de plus en plus convaincus de l’existence d’une main invisible qui est intéressée par la déstabilisation de notre continent et l’expansion de sa zone d’influence, alors que nous savons qu’elle ne fournit pas le soutien nécessaire au développement économique et social des pays africains », a-t-il déclaré. 

 Le Président a appelé à la fin immédiate de la guerre en Ukraine, en raison des destructions et des pertes humaines, et des conséquences délétères pour la sécurité alimentaire mondiale.  Il est peu probable qu’il y ait un vainqueur et un perdant sur le champ de bataille, c’est pourquoi les parties doivent privilégier le dialogue, a dit le Président.  Il a demandé une réforme du Conseil de sécurité afin que l’Afrique y soit mieux représentée. Enfin, M. Lourenço a exhorté la communauté internationale à honorer les engagements pris au titre du financement climatique. 

M. EDGARS RINKĒVIČS, Président de la Lettonie, a ouvert son discours en rappelant que l’ordre mondial subit une transformation et qu’il est crucial de raviver la confiance et la solidarité internationale.  Rappelant que la Russie est un État doté de l’arme nucléaire et un membre permanent du Conseil de sécurité, il a estimé que l’agression contre l’Ukraine représente un test pour le système multilatéral.  Déplorant l’absence de réaction à la suite de l’agression russe contre la Géorgie en 2008 et l’annexion de la Crimée en 2014, le Président a exhorté la communauté internationale à s’opposer fermement à l’attaque actuelle de la Russie, dans l’intérêt vital de tous les États. L’issue de cette guerre déterminera la sécurité mondiale pour les années à venir a-t-il lancé, condamnant avec la plus grande fermeté l’agression de la Russie et mettant en cause le rôle du Bélarus. 

Après avoir appelé la Russie à retirer toutes ses forces et tous ses équipements militaires d’Ukraine, M. Rinkēvičs a réitéré le soutien de la Lettonie à la formule de paix de l’Ukraine fondée sur la souveraineté et l’intégrité territoriale, exhortant tous les membres de l’ONU à en faire de même et à apporter un soutien global pour la reconstruction de l’Ukraine. 

Revenant sur les attaques commises contre les civils, M. Rinkēvičs a assuré que la Russie devrait assumer l’entière responsabilité juridique et financière de son agression et des violations du droit international.  Après avoir salué les mesures prises par la Cour pénale internationale (CPI) pour enquêter sur les atrocités commises en Ukraine, il a mentionné les contributions financières de son pays à la CPI, notamment à travers le fonds d’aide aux victimes.  Tout en indiquant soutenir d’autres mécanismes internationaux établissant les violations commises par la Russie, et après avoir salué le registre des dommages créé par le Conseil de l’Europe, il a réitéré l’appel à la création d’un tribunal international spécial pour le crime d’agression contre l’Ukraine. 

Le Président a condamné la résiliation unilatérale de l’Initiative de la mer Noire par la Russie.  Rappelant que l’accès à l’alimentation constitue un droit humain, il a indiqué que la Lettonie travaille en collaboration avec le Programme alimentaire mondial (PAM) et encourage les Nations Unies à réagir de manière plus efficace aux besoins humanitaires. 

Concernant les défis entravant la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, il a rappelé la nécessité de coopérer avec les pays d’Afrique et les petits États insulaires en développement (PEID) confrontés aux changements climatiques. Dans cette perspective, il a assuré de la contribution politique et financière de la Lettonie à la préparation de la prochaine conférence des Nations Unies sur les PEID. 

Enfin, alors qu’il a appelé à la revitalisation du système des Nations Unies, M. Rinkēvičs a exhorté le Conseil de sécurité à se réformer afin d’être plus transparent.  Dénonçant son inaction, il a rappelé que le droit de veto relève non pas du privilège, mais de la responsabilité. Dans cette lignée et afin de protéger les valeurs fondamentales de la Charte des Nations unies, il a annoncé la candidature de la Lettonie aux élections du Conseil de sécurité en 2025. 

M. YOON SUK YEOL, Président de la République de Corée, a évoqué le soixante-dixième anniversaire de l’armistice de la guerre de Corée, après que l’invasion des « forces totalitaires communistes » a été stoppée avec le soutien des forces de l’ONU.  Depuis, a-t-il fait observer, la République de Corée est sortie « des cendres de la guerre » pour devenir une démocratie libérale et une économie de marché animée du désir de contribuer de manière responsable à la communauté internationale.  Or, la guerre en Ukraine a creusé les divisions idéologiques et provoqué une contraction de l’économie mondiale, aggravant les crises alimentaires et énergétiques dans de nombreuses régions, a déploré le Président en appelant la communauté internationale à rester unie, avec l’ONU en son centre. 

M. Yoon s’est attardé sur les « fractures » qui se font jour dans trois domaines clefs (développement, climat et numérique).  Il a rappelé que le développement est impossible sans infrastructures de base telles que des systèmes de traitement de l’eau potable et les installations énergétiques.  Le Gouvernement sud-coréen, a-t-il fait valoir, a augmenté de plus de 40% son budget consacré à l’APD pour 2024, une hausse qui sera canalisée vers l’éducation et la formation.

Venant à la crise climatique, M. Yoon a expliqué que son pays compte augmenter de 300 millions de dollars sa contribution au Fonds vert pour le climat. La République de Corée exploitera non seulement les énergies renouvelables, mais également des énergies sans carbone à haut rendement, telles que l’énergie nucléaire et l’hydrogène, a-t-il ajouté en présentant son objectif de mener des recherches conjointes internationales sur l’énergie sans carbone et de faciliter l’innovation technologique et les investissements du secteur privé: le pays lancera une « Carbon Free Alliance », plateforme ouverte destinée à promouvoir l’adoption d’énergies sans carbone. 

Considérant que la fracture numérique est une cause majeure de la fracture économique, le Président a indiqué que son gouvernement soutiendra la transformation numérique des pays ayant une pénétration et une utilisation limitées du numérique.  À cet effet, il a proposé la création d’une organisation internationale, sous l’égide de l’ONU, dont la fonction consisterait à établir des règles relatives à l’éthique numérique. 

« Sans paix et sécurité internationales, le développement et la prospérité restent hors de portée », a prévenu M. Yoon dont le pays soutiendra la reconstruction de l’Ukraine en fournissant 300 millions de dollars l’an prochain et un programme d’appui à moyen et long terme de plus de 2 milliards de dollars.  Il a rappelé que les programmes nucléaires et balistiques de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) constituent non seulement une menace directe et existentielle pour la République de Corée, mais également un défi à la paix dans la région Indopacifique et au-delà.  Il a jugé « paradoxal » qu’un membre permanent du Conseil de sécurité envahisse une autre nation souveraine et reçoive des armes et des munitions d’un « régime qui viole de manière flagrante les résolutions du Conseil ». Il s’est vivement inquiété du transfert éventuel de la technologie nécessaire pour renforcer les capacités de la RPDC en matière d’armes de destruction massive en échange d’un soutien à la Russie avec des armes conventionnelles.  « La République de Corée ainsi que ses alliés et partenaires ne resteront pas les bras croisés », a affirmé le Président en soulignant qu’en tant que membre du Conseil de sécurité en 2024-2025, son pays s’engage à jouer un rôle responsable dans la construction de la paix mondiale.

M. EMOMALI RAHMON, Président du Tadjikistan, a regretté qu’en dépit des efforts consentis, les objectifs de développement durable (ODD) n’allaient pas être atteints et que les pays en développement, les pays les moins avancés et les petits États insulaires en développement payeraient le plus lourd tribut.  Il a souligné que le Tadjikistan lui-même se heurtait à des difficultés, et estimé que la solidarité et le financement de ces objectifs devraient être renforcés.  À ce titre, le Président s’est félicité du plan de relance proposé par le Secrétaire général pour mettre en œuvre le Programme 2030 et qui appelle à ce qu’au moins 500 milliards de dollars soient mis à disposition de ces pays chaque année. 

Notant les répercussions fortes des changements climatiques partout dans le monde, le Chef de l’État a indiqué que l’Asie connaissait un réchauffement plus rapide que d’autres régions et rappelé les conséquences négatives de ce réchauffement, qu’il a jugé alarmantes, surtout pour son pays, constitué à 90% de montagnes.  C’est la raison pour laquelle le Tadjikistan accorde une importance particulière au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe, qui permet de renforcer les systèmes d’alerte précoce et l’assistance financière en cas de catastrophe naturelle, a-t-il expliqué.  Il a rappelé que le Tadjikistan avait vu disparaître plus de mille glaciers, sources d’eau douce, sur les 13 000 enregistrés dans ce pays, une situation qui pourrait impacter les ressources en eau et l’ensemble des écosystèmes de la région.  M. Rahmon a réclamé des mesures concrètes en matière de recherche et de collecte de données à cet égard, et s’est félicité de la proclamation de l’Année internationale de la préservation des glaciers en 2025.  Il a également rappelé que Douchanbé accueillerait en 2024 la troisième Conférence de haut niveau sur la mise en œuvre de la Décennie d’action sur le thème « L’eau pour le développement durable », ainsi que la Conférence internationale sur la préservation des glaciers en 2025. 

S’agissant des réalisations de son pays dans le domaine de l’économie verte, le Président a expliqué qu’il produisait 98% de son électricité à partir de sources renouvelables, et plus précisément de l’hydroélectricité.  L’utilisation de ces ressources peut aider au développement de la production d’énergie verte dans toute la région, a-t-il indiqué, en notant le rôle positif joué par le Fonds vert pour le climat dans ce domaine. 

Saluant le renforcement de l’intégration régionale en Asie centrale, M. Rahmon a rappelé que la sécurité, la stabilité et la coopération dans cette région étaient directement liées à la situation en Afghanistan.  Il a appelé la communauté internationale à augmenter le volume de l’aide humanitaire au peuple afghan, en lançant un appel au dialogue intra-afghan et à la création d’un gouvernement véritablement inclusif.  S’agissant du trafic de drogue en provenance de ce pays, il a déclaré que les autorités du Tadjikistan avaient saisi plus de 10 tonnes de stupéfiants à la frontière avec l’Afghanistan cette année et fait part de sa conviction que la réponse aux menaces du terrorisme, de l’extrémisme ou encore du trafic de stupéfiants devait être globale, et que le Bureau de lutte contre le terrorisme pouvait notamment y contribuer. 

Le Président a par ailleurs jugé inacceptables les manifestations de discrimination et d’hostilité raciale et religieuse, et réitéré l’importance de la promotion du dialogue et de la compréhension mutuelle entre les civilisations.  Il a conclu son intervention en faisant part de l’intention du Tadjikistan d’obtenir un siège non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU pour 2028-2029. 

Mme IRIS XIOMARA CASTRO SARMIENTOPrésidente du Honduras, s’est présentée devant l’Assemblée pour la seconde fois depuis qu’elle est devenue la première femme présidente de son pays.  Elle s’est décrite comme une présidente issue de la résistance populaire ayant lutté contre un coup d’État qui avait réussi à renverser M. José Manuel Zelaya Rosales, Président démocratiquement élu.  Les progrès et les résultats du Gouvernement actuel ont déjà été reconnus par la communauté internationale et les organisations financières, a‑t‑elle signalé.  La Cheffe de l’État a cité, entre autres, une meilleure croissance économique, le sauvetage des finances publiques avec la liquidation des fonds d’affectation corrompus, une discipline fiscale, le paiement en temps voulu de la dette et la diminution de l’inflation.  De plus, a‑t‑elle ajouté, plusieurs lois favorisant la corruption ont été abrogées.  La Présidente a également fait état d’investissements pour la santé et l’éducation, tels qu’une collation pour chaque écolier, la reconstruction d’écoles à l’abandon, ainsi que des constructions de routes et d’hôpitaux. 

En 2022, a‑t‑elle rappelé, l’ancien Président du Honduras a été accusé par les États-Unis d’avoir conspiré et organisé pendant plus d’une décennie le trafic de milliers de tonnes de drogue, à la tête d’une organisation criminelle comprenant différentes figures de la pègre, des maires, des ministres, des députés, des généraux de l’armés et des chefs de la police.  Elle a assuré que certains d’entre eux ont déjà été condamnés.  Or « ces agresseurs qui ont pris l’État en otage complotent aujourd’hui contre mon gouvernement », s’est insurgée la Présidente, leur reprochant de vouloir interrompre les changements structurels que le peuple a ordonnés via les urnes.  Il est à son avis impossible de saisir l’ampleur de la tragédie subie par le peuple hondurien -et les caravanes constantes de migrants arrivant aux États-Unis- si l’on détourne le regard des 13 années d’une dictature « protégée par la communauté internationale », dictature qui a multiplié la dette publique du pays par six et entraîné un taux de pauvreté de 74%, le plus élevé de l’histoire du Honduras. 

La Présidente a rappelé que le peuple hondurien lui a confié un mandat exhaustif: « combattre et démanteler un narco-État et la corruption publique-privée qui a mis à sac les institutions, trahi la volonté populaire par des fraudes électorales, et imposé un terrorisme d’État avec des escadrons de la mort ».  Mme Castro Sarmiento a remercié tous ses appuis à l’intérieur et à l’extérieur du pays qui l’aident à rétablir l’état de droit. 

À son arrivée à New York, après sa participation au sommet du Groupe des 77 et la Chine à La Havane (Cuba), la Cheffe de l’État hondurien a remis au Secrétaire général une proposition officielle visant à créer la commission internationale contre la corruption et l’impunité pour le Honduras, une commission « impartiale, autonome et indépendante, dotée de la capacité d’enquêter et d’engager des poursuites dans les affaires de réseaux de corruption et de crimes financiers à fort impact ».  C’est, selon elle, le seul moyen de nettoyer un État où les institutions publiques, les « pirates » de la classe politique et les partenariats public-privé ont été infiltrés par le crime organisé. 

La Présidente a enfin appelé à la fin des mesures coercitives unilatérales cruelles envers Cuba et le Venezuela, souhaitant également que Cuba soit retirée de la liste des pays qualifiés de terroristes: une mesure « fausse, fantaisiste et faisant l’objet de manipulations », selon elle.  Enfin, les mesures « injustes » contre le Nicaragua doivent également être levées, a‑t‑elle prié. 

M. ALAR KARIS, Président de l’Estonie, a déclaré: « Nous vivons des moments difficiles et des moments de gloire, en tant qu’êtres humains, pays, sociétés et humanité. » Il a estimé que faire le bien est une aspiration universelle, avant de souligner les périls qui menacent le monde.  En Afghanistan, les filles se voient refuser un droit à l’éducation, a‑t‑il déploré, avant de dénoncer les visées impérialistes de la Russie en Ukraine.  « Qu’il y a‑t‑il de bien à coloniser un autre pays »? Le Chef de l’État a estimé que ce conflit sera déterminant pour savoir dans quel monde l’humanité veut vivre, un monde régi par la violence ou alors par le droit.  Il a appelé à juger le crime d’agression commis par la Russie, ce pays abusant de son mandat de membre permanent au Conseil.  Un crime constitue un crime, partout où il est commis, a‑t‑il dit, en demandant la création d’un tribunal spécifique.  « L’impunité ne doit pas l’emporter, sous peine de fouler aux pieds nos principes moraux. »  La réponse aux crimes russes est capitale, a tranché le Président.  Le Conseil de sécurité est, sur ce dossier, dans l’impasse et paralysé, avec des incidences négatives dans le monde entier.  Nous avons besoin d’un Conseil qui soit à la hauteur, a ajouté M. Karis.  Selon lui, les responsables d’agression doivent être traduits en justice plutôt qu’exercer leur droit de veto. 

Le Président a admis la difficulté d’une réforme du Conseil de sécurité avant d’en souligner la nécessité. Faisons-le pour les enfants au Tigré ou en Syrie, a‑t‑il plaidé, en appelant à lancer le processus de réforme.  Il a estimé que la difficulté majeure est le droit de veto, avant de demander qu’il ne soit pas exercé en cas d’atrocités.  Il a aussi demandé une représentation équitable de tous les continents au sein du Conseil, ainsi qu’une plus grande transparence.  M. Karis a estimé que l’Assemblée devrait pouvoir renverser le veto exercé au Conseil si la situation l’exige.  « Avons-nous besoin d’une nouvelle guerre mondiale pour aboutir à un monde meilleur? »   

M. AZALI ASSOUMANI, Président de l’Union des Comores, a tenu à porter la voix de l’Afrique, en tant que Président de l’Union africaine, en rappelant l’attachement profond du continent au système multilatéral.  Il a cependant insisté sur la nécessité de réformer le système des Nations Unies, indiquant qu’il était essentiel que l’Afrique, qui abritera 3,8 milliards d’individus à la fin de ce siècle, prenne part au Conseil de sécurité en tant que membre permanent.  Il s’agit d’une question à la fois d’équité et d’efficacité, car il en va de la légitimité du multilatéralisme a‑t‑il poursuivi.  À ce titre, le Chef de l’État s’est félicité de l’intégration de l’Union africaine au sein du groupe du G20, qualifiant cet événement de « victoire diplomatique ». 

Affirmant que l’Afrique fait face à des difficultés dans l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD), M. Assoumani a rappelé que si l’agriculture représentait un potentiel de développement pour l’Afrique, dans un contexte d’insécurité alimentaire, il était indispensable de renforcer les partenariats entre les gouvernements africains, les organismes de développement et les secteurs privés étrangers.  Il est temps également que nos partenaires nous appuient dans la mise en œuvre de réformes ambitieuses, telles que le transfert d’expertise et de technologies, a‑t‑il lancé. 

Renouvelant ses condoléances aux peuples marocains et libyens victimes de pertes humaines et matérielles dues aux effets des changements climatiques, le Président a adressé un appel à la communauté internationale afin de garantir une réponse efficace aux conséquences des changements climatiques en Afrique.  Plus spécifiquement, il a exigé la mise en œuvre effective des recommandations liées à la protection et à la préservation de l’environnement, et la concrétisation des engagements pris en faveur de l’adaptation et de la mitigation. Par conséquent, il a appelé à soutenir la Déclaration de Moroni, la Déclaration de Mombasa pour une économie bleue au service d’une croissance économique accélérée et la Déclaration de Nairobi, afin que les pays africains puissent plaider en faveur du développement durable, notamment lors de la prochaine COP28 de Dubaï.  Enfin, il a adressé un appel en faveur du renforcement des capacités de l’ONU-Habitat, dans la mise en œuvre du Nouveau Programme pour les villes, afin d’assurer un soutien aux localités africaines vulnérables aux changements climatiques. 

M. Assoumani a ensuite abordé les menaces qui planent sur le Sahel.  Alertant sur des attaques terroristes de plus en plus intenses, il a exhorté la communauté internationale à renforcer les efforts entrepris en matière de stabilisation tout en précisant qu’il incombait aux Africains de mettre en œuvre des plans de développement économique et social, dans le cadre de l’Agenda 2063.  Le Chef de l’État s’est également dit préoccupé par la résurgence de changements anticonstitutionnels qui compromettent la démocratie, la paix, la sécurité et le développement socioéconomique, précisant que l’Union africaine avait imposé des sanctions. 

Après avoir indiqué que la Zone de libre-échange continentale africaine mise en œuvre depuis 2021 contribuerait à stimuler l’économie, le Président a réitéré sa demande d’appui au renforcement du partenariat stratégique entre l’Afrique et la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC).  Concernant la guerre russo-ukrainienne, il a salué l’initiative de paix africaine et a rappelé qu’il soutenait toutes les autres initiatives visant à contribuer à mettre fin à la guerre.  Assurant enfin que les prochaines élections présidentielles aux Comores seraient organisées de manière libre et transparente, il a sollicité l’appui de la communauté internationale. 

M. LUIS RODOLFO ABINADER CORONA, Président de la République dominicaine, s’est inquiété de l’impact des crises générées par les changements climatiques sur notre planète et nos sociétés.  Il a dénoncé la pratique du contrôle de l’offre par les pays exportateurs pour maintenir les prix du pétrole brut à un niveau élevé, au détriment des pays importateurs.  Selon lui, l’ONU devrait adopter un mécanisme financier garantissant la stabilité des prix du pétrole brut pour les pays importateurs à revenus moyens et faibles, comme le sien.  Le Président a recommandé l’adoption d’un indice de vulnérabilité multidimensionnelle applicable aux pays en développement et la mise en place du fonds pour les pertes et dommages à l’intention des nations les plus vulnérables aux catastrophes.  Selon lui, une réforme profonde de l’architecture financière internationale bénéficierait équitablement à tous les pays.  Par ailleurs, la République dominicaine a créé une table ronde multisectorielle pour traiter de la prolifération massive des sargasses, qui dévorent les côtes caribéennes des États-Unis et du Mexique. 

Le Président a illustré la différence entre son pays et son voisin sur l’île d’Hispaniola tels qu’ils apparaissent depuis l’espace: une moitié verte et florissante correspondant à la République dominicaine, qui a donné la priorité à la conservation et à la gestion durable de ses ressources naturelles, et l’autre moitié, dépourvue de couverture forestière, reflétant le « spectaculaire paysage de déforestation d’Haïti ».  « Cette frontière naturelle n’est pas seulement une leçon géographique, mais un puissant rappel de ce qui attend le monde si nous continuons d’ignorer les alarmes de la nature », a mis en garde M. Abinader Corona. Haïti souffre non seulement d’une tragédie environnementale, mais aussi d’une instabilité politique et sociale qui constitue une menace pour la région. 

Aujourd’hui, a déploré le Président, des Haïtiens ont repris la construction d’un canal de transfert illégal sur le territoire haïtien pour extraire l’eau de la rivière Dajabón, en violation des traités frontaliers entre les deux pays.  Ce projet, son impact environnemental et l’identité de ses bénéficiaires, n’ont jamais été officiellement communiqués au Gouvernement dominicain.  Celui-ci a demandé à plusieurs reprises aux autorités haïtiennes de cesser cette construction « unilatérale et illégale », et les autorités haïtiennes ont indiqué qu’il ne s’agit pas d’un projet gouvernemental, sans toutefois prendre de mesures pour y mettre un terme du fait de la faiblesse institutionnelle et de la crise sécuritaire.  Face à cet acte illicite, a expliqué le dirigeant, le Gouvernement dominicain a été contraint de prendre des mesures « énergiques », en fermant la frontière. 

« Nous ne cherchons pas de confrontation avec le peuple haïtien, mais nous sommes confrontés à des acteurs incontrôlables qui entretiennent l’insécurité en Haïti pour leurs intérêts particuliers », a poursuivi le Président.  À ses yeux, « le problème d’Haïti n’est plus en Haïti mais entre les mains de la communauté internationale », et le Conseil de sécurité doit autoriser de toute urgence une mission de sécurité dans ce pays.  Le Conseil a donné son aval à la création d’une force multinationale pour assister la police nationale haïtienne, comme l’a demandé le Gouvernement haïtien.  « Ce qui se passe en Haïti est une perturbation de l’ordre public par des éléments criminels sans aucune revendication politique », a martelé le Président.  Il a réitéré sa solidarité avec le peuple haïtien, en précisant que sa principale responsabilité est de défendre les intérêts du peuple dominicain.  « Il n’y aura jamais de solution dominicaine au problème haïtien », a-t-il conclu.

Mme MAIA SANDU, Présidente de la République de Moldova, a rappelé que son pays était en première ligne dans la lutte pour la démocratie, et que son pays soutenait son voisin, l’Ukraine, qui « résiste obstinément »à l’attaque brutale de la Russie. Ce soutien ne doit pas faiblir, a‑t‑elle lancé aux États Membres.  L’Europe et le monde libre sont confrontés « à un assaut extérieur lancé contre leurs valeurs », a‑t‑elle insisté, en rappelant la nature hybride de l’assaut de la Russie, fait de chantage énergétique, de soutien aux séparatistes, d’attaques cybernétiques et de désinformation.  Cette menace ne s’applique pas uniquement à nous, a expliqué Mme Sandu, mais aussi à d’autres États démocratiques qui doivent faire preuve de vigilance et d’unité. 

Mme Sandu a rappelé que le Moldova avait envers et contre tout réussi à maintenir la paix dans le pays, y compris dans la région de Transnistrie où sont stationnées « illégalement » des troupes russes qu’elle a appelées à se retirer sans condition.  Elle a expliqué que le Moldova avait développé sa résilience grâce à l’aide de ses partenaires, en réduisant sa dépendance au gaz russe, en investissant dans l’efficacité énergétique ou encore en construisant des lignes électriques vers l’Europe. Elle a rappelé que ce qui distingue avant tout les démocraties est leur capacité à offrir une vie meilleure à leurs concitoyens.  La Présidente a dressé la liste des efforts faits par son pays pour développer ses exportations, combattre l’inflation, ou encore lutter contre le crime organisé, notamment celui des oligarques fugitifs.  À cet égard, elle a souligné les progrès considérables accomplis par son pays en matière de lutte contre la corruption. 

La résilience passe aussi par l’investissement dans les infrastructures, a expliqué Mme Sandu, pour créer des emplois et des « couloirs de solidarité » avec l’Ukraine, couloirs qui aideront aussi à reconstruire ce pays après la guerre, a‑t‑elle précisé.  Le Moldova est un allié de l’Ukraine mais aussi un partenaire sécuritaire pour l’Europe, a‑t‑elle ajouté, soulignant que la réunion de la Communauté politique européenne que le Moldova a accueillie en juin dernier avait permis d’ancrer l’appartenance du Moldova à la famille européenne.  S’agissant des aspirations européennes de son pays, la Présidente a indiqué qu’elles n’étaient pas seulement un choix politique, mais aussi la seule manière de protéger la démocratie du pays et d’être ancré dans le monde libre, tout en offrant une vie meilleure à ses concitoyens.  Elle a conclu son intervention par un appel aux plus « robustes » des démocraties à poursuivre leur lutte pour la défense de ce système, en expliquant que « lorsqu’une démocratie prospère, elle inspire de l’espoir aux autres, et lorsqu’une démocratie s’effondre, on risque un effet domino ».  « Dans ce combat pour la démocratie, nous l’emporterons », a‑t‑elle lancé.

M. JULIUS MAADA BIO, Président de la Sierra Leone, a dressé un bilan de ses cinq premières années au pouvoir, marquées par de multiples bouleversements mondiaux (pandémie, tensions géopolitiques, guerre en Ukraine, crise alimentaire), en expliquant avoir œuvré à éliminer les legs déplaisants du passé.  Il a cité notamment l’abrogation de lois désuètes telles que la « loi sur la diffamation séditieuse », l’abolition de la peine de mort, ainsi que les progrès enregistrés dans la lutte contre la corruption.  Le financement national de l’éducation a été augmenté, en veillant à ce qu’il constitue en moyenne 22% du budget national, a‑t‑il ajouté.  Le Président a aussi indiqué qu’une « éthique d’inclusion radicale » a été adoptée, offrant à tous un accès libre et gratuit à un enseignement primaire et secondaire de qualité. 

Le Président a encore illustré l’engagement inébranlable de son gouvernement à démanteler les barrières de l’inégalité entre les sexes en citant l’état d’urgence qui a été déclaré contre les crimes de viol et contre les violences sexuelles et sexistes.  Il s’est aussi prévalu d’une loi de 2022 sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes qui a consacré l’engagement du pays à réserver au moins 30% des sièges d’élus du peuple aux femmes. Cette loi garantit en outre l’égalité des chances en matière d’emploi, prolonge le congé de maternité et oblige les institutions financières nationales à favoriser l’accès des femmes aux ressources financières. 

M. Bio a ensuite défini les piliers de son nouveau mandat qui sont notamment la sécurité alimentaire, étroitement liée aux investissements dans l’agriculture; le développement du capital humain, avec une perspective particulière sur l’égalité des sexes et un programme d’accès à l’emploi pour les jeunes; et le développement des technologies et des infrastructures.  La Sierra Leone vise à devenir un pays à revenu intermédiaire d’ici à 2035, a‑t‑il fait savoir. 

S’agissant de politique africaine, le Chef de l’État a exprimé sans équivoque son désaccord à l’égard de tout changement de gouvernement extraconstitutionnel.  Il a toutefois noté que chaque action portant atteinte à l’état de droit est liée à des problèmes sous-jacents tels que la pauvreté, le chômage généralisé et les discriminations.  S’agissant de son propre pays, le Président a dit avoir institué le Comité national d’examen des systèmes électoraux pour faire face aux défis logistiques persistants du processus électoral.  Il a aussi jugé regrettable « la décision d’un certain État Membre d’introduire des mesures coercitives unilatérales, notamment des restrictions de visa, à l’encontre des citoyens sierra-léonais », à la suite de récentes élections nationales.  De telles mesures unilatérales, contraires au droit international, ont parfois été utilisées dans d’autres pays africains pour exercer des « pressions politiques », s’est-il inquiété. 

Abordant enfin la réforme du Conseil de sécurité, le Président a relevé que les injustices historiques endurées par le continent africain demeurent non résolues dans les négociations intergouvernementales. L’Afrique, a‑t‑il regretté, se distingue comme la seule région sans représentation permanente, et elle est manifestement sous-représentée dans la catégorie de non-permanents.  « Le Conseil de sécurité demeure prisonnier d’un temps où une grande partie de l’Afrique était encore sous l’emprise du colonialisme, qui persiste trois quarts de siècle plus tard. »  La demande de l’Afrique de deux sièges permanents -assortis de droits proportionnés, y compris le droit de veto s’il est maintenu- et de cinq sièges non permanents sont des questions d’équité et de justice, a‑t‑il plaidé.  Il s’agit, a‑t‑il soutenu, du droit de l’Afrique à obtenir une voix égale dans la prise de décisions sur les questions qui l’affectent. 

Le Prince ALBERT II de Monaco a souligné combien l’enrichissement du droit international est un succès sous-estimé des efforts de coopération au sein de l’ONU et rappelé que, depuis son admission à l’ONU, la Principauté de Monaco est devenue partie à une cinquantaine de traités internationaux couvrant un large éventail de sujets tels que les droits de l’homme, le désarmement, l’environnement ou encore le droit de la mer.  Au cours de l’année qui vient de s’écouler, le multilatéralisme a, dans certains domaines, une nouvelle fois démontré sa vigueur et son efficacité, à force de persévérance, a‑t‑il dit.  « En décembre dernier, nous avons franchi un cap historique en adoptant le nouveau Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal et, quelques mois plus tard, nous sommes parvenus à conclure près de deux décennies de négociations en finalisant l’Accord sur la diversité biologique en haute mer que j’ai eu l’honneur de signer ce matin. »  Cet instrument juridique contraignant marquera une autre étape, décisive, pour la protection et la préservation des mers et des océans, a‑t‑il poursuivi.  « Ces victoires, fruits de nos efforts collectifs, doivent nous donner de l’espoir. »  Il a ajouté que ces nouveaux instruments offrent des outils puissants pour combattre les changements climatiques. 

Le dirigeant a déclaré que la bataille climatique ne pourra être gagnée qu’en avançant de front sur l’ensemble des objectifs de développement durable.  Il a précisé que le Gouvernement contribuera à la reconstitution du Fonds vert pour le climat à hauteur de 3,3 millions d’euros pour la période 2024-2027, soit une augmentation de 10% par rapport à la période précédente alors que Monaco est déjà le premier bailleur per capita de cet instrument capital de mise en œuvre de l’Accord de Paris.  Enfin, il a estimé que l’intelligence artificielle porte en elle à la fois un potentiel immense pour accélérer la réalisation des ODD et des risques sans précédent pour la paix et la sécurité mondiales.  « Elle peut être comme la langue d’Ésope, à la fois la meilleure et la pire des choses pour l’humanité », a‑t‑il conclu, en appelant à l’élaboration d’un cadre de gouvernance mondial et de normes éthiques imposant des limites à l’utilisation de l’intelligence artificielle. 

M. GABRIEL BORIC FONT, Président du Chili, a rappelé qu’il y a neuf jours, son pays a marqué le cinquantième anniversaire du coup d’État qui a brisé sa trajectoire démocratique en 1973.  « Le palais de La Moneda bombardé et feu le Président Salvador Allende sont dans toutes les mémoires ».  Saluant le rôle joué par les organisations multilatérales dans la défense des droits humains et de la démocratie, il a reconnu que le Chili a une « dette immense »à l’égard de l’ONU et de ses États Membres.  Depuis la dictature du général Pinochet, le Chili a restauré la démocratie et a su tirer les leçons de ce passé douloureux, a assuré le Chef de l’État.  Le pays mise désormais sur l’état de droit et s’emploie à protéger les droits humains, en tant que membre du Conseil des droits de l’homme, a souligné M. Boric Font.  Pour preuve de l’attachement de son pays à la démocratie, il a expliqué que, dans les moments d’instabilité politique, le Gouvernement peut s’unir à l’opposition pour sortir de l’impasse.  « Pour ma génération, qui n’était pas née en 1973, la démocratie est un legs qu’il nous faut protéger, tout en faisant face aux défis et menaces de notre temps. »  

À ses yeux, la défense de la démocratie impose de lutter contre la progression du totalitarisme et de l’intolérance, mais aussi de protéger les droits des minorités, voire des majorités s’agissant des femmes.  Il faut aussi réfléchir aux causes profondes de la désaffection des électeurs, a poursuivi le Président, estimant que la démocratie doit pouvoir offrir des résultats tangibles à des populations souvent frustrées.  Après avoir dénoncé les régimes dictatoriaux, comme celui du Président Ortega au Nicaragua, M. Boric Font s’est élevé contre les sanctions unilatérales « qui ne contribuent aucunement à la solution ». Les sanctions imposées au Venezuela n’aident pas à améliorer les conditions de vie du peuple vénézuélien, a-t-il dit, avant d’appeler les États-Unis à lever ces mesures et à cesser de « violenter » Cuba pour de fausses raisons.  Cuba ne promeut pas le terrorisme, a rectifié le Président.  Dans le même esprit, il a condamné l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie, estimant que le chemin de la paix passe par le respect de l’intégrité territoriale.  « Les pays comme le nôtre n’ont que le droit international pour se prémunir des agressions », a encore fait valoir le Président. 

Évoquant les défis liés aux changements climatiques et à la perte de biodiversité, M. Boric Font a appelé à agir sans délai pour accélérer la transition verte et repenser les modes de consommation.  À titre national, il a précisé que 43% du territoire chilien est désormais protégé et que le pays s’est doté d’une loi de protection de la biodiversité.  Face à l’accélération du dérèglement climatique, le Chef de l’État a exhorté les pays industrialisés à assumer une « éthique de la responsabilité » plus respectueuse de l’environnement et plus solidaire.  Dans le même ordre d’idées, il a plaidé en faveur d’un cadre éthique pour les nouvelles technologies, comme l’intelligence artificielle, dans le respect de la dignité et la vie privée des individus.  Il a enfin souhaité que l’ONU reste à la hauteur de ces défis, ce qui, selon lui, implique de réformer la gouvernance mondiale, du Conseil de sécurité aux institutions financières internationales. 

M. KHURELSUKH UKHNAA, Président de la Mongolie, a d’abord affirmé que face aux multiples défis géopolitiques, socioéconomiques et environnementaux auxquels le monde est confronté, la Charte des Nations Unies restait le meilleur instrument pour renforcer la paix et favoriser la coopération internationale.  D’après le rapport Notre Programme commun du Secrétaire général, la Mongolie serait un « symbole de paix dans un monde troublé », s’est enorgueilli le Président.  Puis M. Ukhnaa a abordé l’essor rapide de la technologie numérique, qui présente à la fois des opportunités et des menaces pour la sécurité mondiale, notamment via le financement du terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive.  La Mongolie, a-t-il assuré, collabore activement à l’établissement d’une convention internationale pour contrer l’utilisation criminelle des technologies de l’information et de la communication. 

Le Président a rappelé que son pays s’était débarrassé de toutes les armes nucléaires entreposées sur son territoire il y a plus de 30 ans, avant de vanter l’initiative du Dialogue d’Oulan-Bator sur la sécurité en Asie du Nord-Est.  Insistant sur la dimension profondément pacifique de son peuple, il a cité le pape François qui, lors de sa récente visite en Mongolie, a évoqué la « Pax Mongolica », à savoir l’absence de conflits.  Il a souligné la participation de la Mongolie à des opérations de maintien de la paix de l’ONU —avec plus de 20 000 Casques bleus déployés ces 20 dernières années— et a réaffirmé l’importance d’inclure davantage de femmes dans ces missions. 

Abordant la question du développement durable, le Président a alerté sur les inégalités croissantes entre et au sein des nations.  Malgré les avancées sur les objectifs de développement durable (ODD), des lacunes importantes demeurent, s’est-il inquiété, remarquant que seulement 12% des ODD avaient été pleinement atteints jusqu’ici, et que leur financement restait insuffisant. « La Mongolie aura besoin de dépenses supplémentaires d’environ 18% du PIB par an en moyenne jusqu’à 2030 pour atteindre ses propres objectifs », a-t-il prévenu.  Au sujet du climat, M. Ukhnaa a fait valoir que la Mongolie avait adopté des réformes législatives pour attirer les investissements dans des technologies plus vertes.  Il a également mentionné plusieurs projets nationaux visant à atténuer les effets des changements climatiques et à promouvoir le développement durable, notamment la plantation de nombreux arbres, ou la reconstruction de Kharkhorum, l’ancienne capitale des Mongols, avec des normes « d’éco-ville intelligente et respectueuse de l’environnement », a-t-il précisé.  « Si nous ne suivons pas une voie résolue pour préserver notre Terre nourricière dès maintenant, elle trouvera inévitablement son propre moyen de survivre, même si cela signifie le faire sans nous », a-t-il averti. 

Enfin, M. Ukhnaa a souligné l’engagement actif de la Mongolie auprès des Nations Unies, en particulier en faveur des pays en développement sans littoral (PDSL).  Il a loué les efforts collectifs, y compris ceux de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), pour la prévention des pandémies et appuyé l’élaboration d’un document juridique international pour une distribution équitable des vaccins.  Il a conclu en réaffirmant l’importance croissante de la coopération multilatérale, anticipant que le Sommet de l’avenir en septembre 2024 serait un événement décisif pour revitaliser le multilatéralisme. 

M. MOHAMED OULD CHEIKH EL GHAZOUANI, Président de la Mauritanie, s’est inquiété de crises « particulièrement aiguës » qui se chevauchent et affectent le monde entier, quoique de manière inégale.  Voyant dans cet état de fait la preuve d’une destinée commune, il a constaté que la mise en œuvre des objectifs de développement durable (ODD) s’essoufflait, notamment dans les pays en développement.  S’inquiétant de la montée de la pauvreté, de l’inflation, des crises alimentaires, sanitaires, sécuritaires et environnementales, il a plaidé en faveur d’un renforcement du multilatéralisme, d’une correction des déséquilibres en matière d’aide au développement et de la création de nouveaux mécanismes pour le financement du développement durable. 

Affirmant que son pays avait fait des ODD l’axe principal de ses efforts de développement, le Président a détaillé des progrès dans plusieurs domaines, notamment en matière de lutte contre la pauvreté et d’élargissement de la protection sociale en vue de parvenir à une couverture sanitaire universelle.  Il a aussi dressé une liste de réformes engagées afin de diversifier l’économie tout en renforçant la productivité de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche, en vue de parvenir à l’autosuffisance alimentaire.  Rappelant que la croissance avait atteint 6,4% en 2022, il s’est félicité d’un accès à l’eau potable pour 72% et à l’électricité pour 53% de la population. 

M. El Ghazouani a évoqué le lancement d’un programme de développement de l’hydrogène vert afin d’atteindre l’objectif national de réduction de 11% des émissions de carbone du pays.  Il a appelé les États industrialisés à respecter leurs engagements en la matière.  Face à la désertification, il a expliqué que son pays mettait en œuvre l’initiative Grande Muraille verte pour le Sahara et le Sahel (IGMVSS) et s’engageait au sein du Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS). 

Le Président a aussi affirmé que son pays promouvait les droits humains, notamment ceux des femmes et des enfants et luttait contre toutes les formes d’esclavage moderne et que les résultats avaient été salués par les partenaires internationaux et les organisations internationales spécialisées.  Il s’est aussi félicité de la stabilité et de la sécurité qui prévalaient dans son pays malgré une situation régionale instable.  Il a rappelé que son pays présidait actuellement le G5 Sahel et contribuait au contingent de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA). 

Après avoir réaffirmé le soutien de la Mauritanie à la création d’un État palestinien indépendant dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale, le Chef de l’État a réitéré la position de principe de son pays sur le Sahara occidental, soutenant les efforts de l’ONU et rappelant les résolutions du Conseil de sécurité visant à parvenir à une solution durable et acceptable pour tous.  Rejetant enfin toute prise du pouvoir par des moyens non constitutionnels, il a appelé les « États frères du Sahel » à un retour rapide à l’ordre constitutionnel. 

M. GEORGE MANNEH WEAH, Président du Libéria, a exprimé ses inquiétudes quant à la prolifération des acteurs non étatiques armés, la menace d’escalade nucléaire et les conditions climatiques extrêmes.  Le Libéria, a-t-il poursuivi, a accompli des progrès dans divers domaines, allant de la santé à l’éducation, en passant par l’égalité de genre et le développement des infrastructures.  « Nous sommes fiers de nos accomplissements en termes de réduction du taux de mortalité maternelle, d’augmentation de la parité entre les sexes dans la scolarisation, et d’amélioration de notre santé et de notre bien-être en général. »  M. Weah a affirmé soutenir le plan de relance des ODD lancé par le Secrétaire général.  Il a appelé à lever 500 milliards de dollars par an pour stimuler le développement durable des pays en développement.  Cela implique notamment de s’attaquer au coût élevé de la dette et aux risques croissants de surendettement, a-t-il précisé. 

Venant à la question de la consolidation des institutions et infrastructures, le Président du Libéria a rappelé avoir annoncé, il y a cinq ans à cette tribune, la transition démocratique pacifique de son pays.  « Nous avons maintenu la paix et la sécurité.  Nous avons protégé les droits humains et le droit des médias d’opérer pacifiquement et librement. »  Il a ajouté que le peuple libérien jouit maintenant du plein exercice de ses droits constitutionnels, avant d’informer de la tenue prochaine de scrutins pour les élections présidentielle et législatives.  Les élections d’octobre marqueront les quatrièmes élections générales pacifiques au Libéria depuis la fin de la guerre civile en 2003, a-t-il dit, précisant que ce seront les premières depuis le retrait de la présence de maintien de la paix de l’ONU.  Il s’est prévalu de toutes les mesures prises pour garantir des élections libres, équitables, transparentes, pacifiques, inclusives et crédibles. 

Enfin, le Président Weah a plaidé pour que la priorité soit donnée à la gestion de la crise climatique.  Il a mis en avant l’appui nécessaire à fournir aux pays, y compris le Libéria, qui ont la capacité d’utiliser la biodiversité, pour renforcer la résilience face aux changements climatiques.  En conclusion, le Président a réitéré son engagement à protéger la planète, à promouvoir la paix et à prévenir les conflits.  De même pour le financement durable et le renforcement des partenariats, a-t-il ajouté en soulignant que ces objectifs ne peuvent être atteints que grâce à une collaboration entre les gouvernements, les parties prenantes non gouvernementales et d’autres partenaires. 

M. FÉLIX-ANTOINE TSHISEKEDI TSHILOMBO, Président de la République démocratique du Congo (RDC), a rappelé qu’à mi-parcours sur la voie des objectifs de développement durable (ODD) 2030, les besoins humanitaires et les déplacements de population atteignent des niveaux inédits.  Il est évident que la mutualisation des énergies et une approche multilatérale sont des atouts majeurs et indispensables pour venir à bout de menaces existentielles, a-t-il dit. 

M. Tshisekedi Tshilombo a réaffirmé son attachement aux valeurs de solidarité et de confiance prônée par l’Organisation tout en dénonçant « l’attitude équivoque et la politique de deux poids, deux mesures de l’ONU ».  Mettant en cause les prises de position du Conseil de sécurité dans certaines crises politiques et sécuritaires qui sévissent en Afrique, le Chef de l’État a abordé la question de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).  Après avoir remercié la communauté internationale, il a plaidé en faveur du retrait progressif de la MONUSCO à partir de décembre 2023, indiquant qu’il s’agissait d’une étape nécessaire pour la consolidation des progrès entrepris.  Pointant du doigt l’incapacité de la MONUSCO à faire face aux rébellions et conflits armés touchant la RDC et la région des Grands Lacs, le Président a affirmé qu’il était « illusoire et contre-productif de maintenir la MONUSCO au nom de la restauration et de la stabilisation de la paix ».  Il a précisé que la RDC explorait de nouveaux mécanismes de collaboration stratégiques avec l’ONU en intégrant les contingences actuelles.  Le Président a également fait état d’un courrier adressé au Président du Conseil de sécurité le 1er septembre 2023. 

Le Président a réitéré la demande adressée par la RDC au Conseil de sécurité visant à sanctionner tous les auteurs, coauteurs et complices de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité ainsi que des violations graves des droits de l’homme, du droit international et de la Charte des Nations Unies sur le territoire congolais.  S’étonnant de l’impunité dont jouissent les responsables de crimes, pourtant cités dans les rapports de l’ONU, il a mis en cause « le silence total" de l’Organisation avant de saluer les sanctions infligées par les États-Unis au Rwanda.  Il a rappelé que ce pays soutenait le groupe terroriste du M23 qui ne respecte aucun des engagements conclus par les chefs d’État de la région dans le cadre des processus de Luanda et de Nairobi.  Sous les applaudissements d’une partie de l’Assemblée, il a ajouté que le M23 exigeait « un dialogue qui ne leur sera jamais accordé ». 

Le Président a invité la communauté internationale à revitaliser les approches du réchauffement climatique, déplorant le non-respect d’engagements pris en 2009.  S’illustrant notamment par le Sommet africain sur le climat de Nairobi, la volonté du continent de jouer un rôle clef dans la solution au réchauffement planétaire a été mise en exergue par M. Tshisekedi Tshilombo.  Il a également appelé à la création d’un marché du carbone équitable. 

Pressant les États d’élargir le Conseil de sécurité et d’intégrer deux représentants du continent africain comme membres permanents, le dirigeant a précisé qu’une réforme de l’ONU serait indispensable mais insuffisante. 

Rappelant les progrès entrepris par la RDC, il a évoqué le Fonds national des réparations des victimes des violences sexuelles liées aux conflits et des victimes des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité (FONAREV) créé en décembre 2022.  Enfin, soulignant l’imminence des élections générales organisées en RDC, il a de nouveau appelé les institutions internationales à accompagner ce processus de consolidation de la démocratie et exhorté l’ONU à œuvrer à la levée immédiate des sanctions contre le Zimbabwe. 

Le Roi MSWATI III d’Eswatini s’est dit vivement préoccupé par la persistance des conflits, des coups d’État et des changements anticonstitutionnels de gouvernement dans plusieurs États africains.  Il a appuyé les efforts en vue de trouver une solution à la situation relative au Sahara occidental conformément à la résolution 2654 (2022).  Il a appelé à faire taire les armes partout dans le monde et plaidé pour une résolution pacifique des conflits et pour un renforcement continu de la règle démocratique.  Il a précisé que son pays soutient l’égalité entre les genres et la lutte contre les violences faites aux femmes.  « Nous avons établi un bureau d’aide juridique afin de faciliter l’accès à la justice, en particulier pour les groupes vulnérables et marginalisés. » 

Le dirigeant a précisé que la mise en œuvre des ODD par son pays a été affectée par de multiples chocs, tant nationaux qu’internationaux.  Malgré ces défis, nous restons déterminés dans nos engagements à les réaliser, a-t-il assuré.  « Nous avons été classés par la Banque mondiale dans le top 5 des économies en expansion avec une croissance du PIB de 7,8%. »  Il a précisé que son pays est au neuvième rang des 10 pays africains avec le PIB par habitant le plus élevé.  « Nous n’allons pas nous reposer sur nos lauriers mais travailler encore plus pour fortifier notre économie. » 

Le Roi a loué le modèle démocratique unique en vigueur en Eswatini.  Notre constitution reconnaît le rôle de la monarchie au même titre que le parlement, la séparation des pouvoirs, les droits humains et l’état de droit, a-t-il dit, en parlant de « démocratie monarchique ».  Enfin, il a estimé que l’inclusion de Taiwan est un élément essentiel en vue d’un bon accomplissement du Programme 2030.  L’inclusion de Taiwan dans le système onusien et les activités se rapportant à la mise en œuvre des ODD permettra de renforcer la coopération internationale et de faire en sorte que personne ne soit laissé de côté, a-t-il conclu. 

M. DAVID KABUA, Président des Îles Marshall, a déclaré qu’une ONU forte et efficace est plus que jamais nécessaire pour confronter les chocs économiques, les tensions politiques et les changements climatiques.  Il a souhaité que la Russie rende des comptes pour son « invasion illégale et immorale » de l’Ukraine.  De même, il a exhorté tous les pays du monde à respecter les droits de la personne et protéger les voix des plus vulnérables.  Pays candidat au Conseil des droits de l’homme pour la période 2025-2027, les Îles Marshall écouteront tous les points de vue sur les droits humains, a promis le Chef de l’État. 

Rappelant l’adoption du nouveau traité sur la haute mer, M. Kabua a souhaité que le texte entre en vigueur avant la Conférence des Nations Unies sur les océans de 2025. Aujourd’hui, a-t-il dit, les Îles Marshall sont confrontées aux défis de l’élévation du niveau de la mer et de l’érosion des côtes, aux inondations causées par les marées hautes, au blanchissement des coraux et au réchauffement de l’océan.  Dès lors, il a appelé à créer un mécanisme de financement international pour aider les petits États insulaires en développement qui en ont besoin, afin qu’ils soient protégés contre les chocs énergétiques, les bouleversements de la chaîne d’approvisionnement, l’insécurité alimentaire, les pandémies et l’hyperinflation. 

Il faut déclarer la guerre aux changements climatiques, a exhorté le Président, faisant valoir que l’avenir des Îles Marshall et de tous les États insulaires de basse altitude est en jeu. À cet égard, il a misé sur la COP28, qui devra être le tournant après l’échec de l’Accord de Paris.  Le Président a invité le monde à réagir en élaborant une feuille de route claire pour corriger la trajectoire, avec l’élimination progressive des combustibles fossiles.  M. Kabua a réitéré l’importance d’un financement adéquat, prévisible et accessible pour répondre aux conséquences des changements climatiques pour les pays les plus vulnérables.  Les pays donateurs doivent respecter leurs engagements à faire face à la crise du financement climatique, en se fondant sur la science et les besoins des États vulnérables, a lancé le Président. 

S’agissant des relations bilatérales avec les États-Unis, M. Kabua a accusé ce pays d’avoir manqué à ses obligations envers le peuple des Îles Marshall découlant du programme d’essais nucléaires mené dans le passé.  Toujours est-il que les Îles Marshall souhaitent poursuivre leur libre association avec les États-Unis, a-t-il assuré, tout en soulignant que le peuple marshallais veut voir les questions nucléaires traitées.  En outre, il a fait part de son inquiétude concernant le rejet en mer des eaux de la centrale nucléaire de Fukushima.  Il a demandé, en conclusion, la participation des 23 millions d’habitants de Taiwan aux institutions spécialisées du système des Nations Unies, ainsi qu’aux réunions et aux mécanismes qui contribuent à la réalisation des ODD. 

M. MOKGWEETSI ERIC KEABETSWE MASISI, Président du Botswana, a commencé par exprimer son accord avec l’importance de « reconstruire la confiance et raviver la solidarité mondiale » afin d’accélérer les progrès vers les objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030.  Dans une époque marquée par des crises multiples, il a cité les tensions géopolitiques en Ukraine, les défis des changements climatiques et les effets persistants de la pandémie de COVID-19 comme autant de défis mondiaux.  Inquiet face à la stagnation, voire au recul des ODD, M. Masisi a estimé qu’il « était temps » d’avoir une femme au poste de secrétaire général de l’ONU, l’égalité des genres étant l’un des objectifs affichés.  « La gravité des défis auxquels nous sommes confrontés exige que nous transcendions l’approche « business as usual », a-t-il lancé. 

Le Président a ensuite rappelé l’impact dévastateur de la pandémie de Covid-19, dont les conséquences ont été ressenties dans toutes les nations, mais dont l’étendue des dégâts a grandement varié, avant de saluer les discussions en cours sur la prévention, la préparation et la réponse aux pandémies. Il a fait état des priorités du Botswana pour garantir l’équité pendant une pandémie et s’est félicité que son pays ait été désigné Centre d’excellence de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en matière de diagnostic du VIH/sida.  S’agissant des changements climatiques, M. Masisi s’est alerté des niveaux records d’émissions de gaz à effet de serre rapportés par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), et a plaidé pour une coopération internationale renforcée, incluant un financement adéquat pour les pays en développement, à hauteur de 100 milliards de dollars par an.  « Nous réaffirmons notre engagement à atteindre une réduction de 15% des émissions de carbone d’ici à 2030 », a-t-il indiqué. 

En ce qui concerne la paix et la sécurité, le Président a rappelé les conséquences mondiales de la guerre en Ukraine et a appelé à un arrêt immédiat des hostilités, saluant les efforts diplomatiques récents. Il a également exprimé sa préoccupation quant aux conflits persistants et aux « déstabilisations de gouvernements légitimes » en Afrique et a appeléà une collaboration étroite entre l’ONU et l’Union africaine.  M. Masisi a ensuite énuméré les défis posés aux pays en développement sans littoral (PDSL), « qui continuent de souffrir de leur marginalisation dans le commerce mondial en raison des coûts exorbitants du commerce », avant de plaider pour un soutien international accru en vue de la prochaine conférence à Kigali, au Rwanda.  Pour conclure, le Président a martelé que la reconnaissance des problèmes mondiaux ne suffisait pas.  « Nous avons besoin de plus d’actions »! a-t-il clamé, en soulignant l’urgence de revitaliser le système de l’ONU. 

Mme GIORGIA MELONI, Présidente du Conseil des ministres de l’Italie, notant que le monde vit une époque complexe, faite d’urgences et de changements, a préconisé de revenir sur le « sens profond » de la Charte des Nations Unies, qui a été établie pour trouver des solutions communes et garantir la paix et la prospérité.  Pour la Présidente, la guerre d’invasion de l’Ukraine par la Russie est le fait de ceux qui veulent nous ramener dans un monde de domination et de guerres néo-impériales.  L’Italie a choisi la justice en s’opposant à un monde dans lequel l’avantage serait donné à ceux qui bombardent les infrastructures civiles, utilisent l’énergie et la nourriture aux dépens des pays en développement.  L’Italie, a annoncé Mme Meloni, est particulièrement tournée vers l’Afrique où sévissent la sécheresse, les effets des changements climatiques, l’insécurité alimentaire, le terrorisme et le fondamentalisme.  Mais c’est un choix qui est fondé sur la foi dans la dignité et la valeur de la personne humaine.  Le Gouvernement italien entend être en première ligne sur la migration et le développement en suivant deux axes principaux: « vaincre les marchands d’esclaves du troisième millénaire » et, en même temps, s’attaquer aux causes profondes de la migration. 

Selon la Présidente, « l’Afrique n’est pas un continent pauvre ».  Au contraire, elle détient la moitié des minéraux du monde et 60% des terres arables.  L’Italie veut contribuer à la construction d’un modèle de coopération capable de collaborer avec les nations africaines afin qu’elles puissent croître et prospérer grâce aux grandes ressources qu’elles possèdent.  Ce sera une coopération d’égal à égal, car l’Afrique n’a pas besoin de charité, mais d’être mise en condition de rivaliser sur un pied d’égalité, avec des investissements stratégiques sur des projets mutuellement bénéfiques.  De cette façon, a analysé Mme Meloni, l’Italie peut offrir une alternative sérieuse au phénomène de la migration de masse via le travail, la formation, des opportunités pour les nations d’origine et des voies de migration légale.  Elle a évoqué le « Plan Mattei pour l’Afrique », qui est un plan de coopération en matière de développement qui va équilibrer les intérêts nationaux de l’Italie avec le droit des États partenaires. 

Il faut avoir le courage de remettre l’humanité et les droits humains au centre de notre action, a déclaré la Présidente en mettant en garde contre les implications des technologies comme l’intelligence artificielle notamment. Il faut des mécanismes de gouvernance mondiale qui garantissent que ces technologies respectent les limites éthiques, a-t-elle précisé, car l’évolution technologique doit être mise au service de l’humanité et non l’inverse.  Ce sont, a-t-elle promis, quelques-uns des thèmes majeurs que l’Italie prévoit de mettre au centre du G7 en 2024.  Mme Meloni a souligné, en conclusion, la nécessité d’une réforme du Conseil de sécurité qui doit être plus représentatif, plus transparent et plus efficace.

M. PEDRO SÁNCHEZ PÉREZ-CASTEJÓN, Président du Gouvernement de l’Espagne, est revenu sur le triste sort de la jeune humanitaire espagnole qui a perdu la vie dans la région de Bakhmut en Ukraine, lorsque son véhicule a été touché par des tirs d’artillerie.  Il a exigé une réflexion urgente sur la nécessité de prendre position contre l’injustice et de ne pas rester silencieux lorsque les droits humains et les règles les plus fondamentales qui régissent la coexistence pacifique des nations sont violés.  Il a préconisé de s’atteler en premier lieu à l’urgence climatique, notant qu’après l’été le plus chaud jamais mesuré et face à la fréquence des phénomènes météorologiques extrêmes, il ne s’agit plus d’essayer d’empêcher la hausse des températures, mais d’atténuer et, dans la mesure du possible, de s’adapter. 

De même, il a plaidé pour une plus grande solidarité avec les pays les plus vulnérables, en faisant avancer le programme d’adaptation et en mettant en pratique l’accord sur les pertes et dommages conclu lors de la COP27. Lutter contre l’urgence climatique demande du courage et de la détermination, a-t-il concédé.  Il a défendu l’idée d’une révolution technologique et économique, appelant à se départir du déni climatique et à suivre la science à chaque étape du processus.  Il a ensuite fait savoir que l’Espagne compte contribuer à hauteur de 225 millions d’euros au Fonds vert pour le climat, avant d’annoncer qu’il avait signé, aujourd’hui même, au nom de l’Espagne, le traité de la haute mer. 

Le Président s’est ensuite inquiété de la « profonde » crise d’apathie et de méfiance à l’égard des institutions, et de la montée d’une vague d’extrémisme et de pensée réactionnaire partout dans le monde, propulsée par des mouvements qui promettent un retour à un passé mythique qui n’a jamais existé et qui marginalisent et criminalisent les minorités défavorisées.  Il a appelé à la défense du multilatéralisme et d’un ordre international fondé sur des règles, prônant en outre une intensification des efforts de mise en œuvre du Programme 2030. 

Abordant la question de Gibraltar, le Chef du Gouvernement a rappelé la conclusion le 31 décembre 2020, d’un accord entre l’Espagne et le Royaume-Uni dans le contexte de la sortie de ce dernier de l’Union européenne.  « Depuis lors, nous avons travaillé sans relâche pour que cette compréhension constitue la base des futures relations de Gibraltar avec l’Union européenne », a-t-il attesté.  Enfin, alors que son pays assure la présidence du Conseil de l’Union européenne (UE), il a promis que « nous n’allons pas rester les bras croisés et laisser quiconque s’en prendre aux objectifs et aux principes de la Charte des Nations Unies ».

M. PATRICE EMERY TROVOADA, Premier Ministre de Sao Tomé-et-Principe, a déclaré que l’humanité est confrontée à l’inversion des progrès du développement humain et à l’aggravation des inégalités entre les régions du monde et au sein des États.  Il s’est également inquiété de la persistance d’un déficit énorme en termes d’autonomisation et d’égalité des chances, notamment en ce qui concerne la participation des femmes aux organes de décision politique.  Il a fait savoir que son pays, qui est au premier rang des victimes du dérèglement climatique, de la dégradation de l’écosystème et de la dépendanceéconomique, connaît une situation d’urgence économique et financière de court terme, tout en traversant un processus de transition complexe vers « le stade de développement moyen ».  Il a pointé du doigt les responsables en matière de dérèglement climatique au sein du G20 ou des instances de gouvernance économique mondiale qui continuent à ne pas tenir compte des objectifs sociaux et environnementaux de son pays, particulièrement en le privant d’accès aux ressources financières en quantité et conditionnalité raisonnables. 

Poursuivant, M. Trovoada s’est inquiété de la polarisation et de la fragmentation de plus en plus grande du monde et de la gouvernance globale, constatant que même la société technologique digitale devient une nouvelle source d’inégalité, de concentration de la richesse et de domination.  De plus, il a relevé que les conflits armés en violation du droit international reçoivent eux aussi un traitement différencié, regrettant le manque de réaction pour imposer la paix face à la situation de conflit larvé dans la région des Grands Lacs.  Le Premier Ministre a ensuite appelé les dirigeants à faire germer un art capable d’articuler les solutions attendues, et qui puisse « éclairer tant d’humains dont l’expérience n’est rien d’autre qu’un voyage de souffrance et d’incertitude ».  Le vrai leadership c’est de trouver les compromis nécessaires, et avoir la capacité de faire la paix et de promouvoir le progrès, a-t-il souligné. 

M. ALEXANDER DE CROO, Premier Ministre de la Belgique, a tout d’abord partagé ses raisons d’être optimiste, évoquant les progrès en matière d’accès à l’éducation et à une eau salubre et potable bénéficiant à plus de 2 milliards d’individus dans le monde.  Mais le tableau est moins rose si l’on pense aux événements climatiques extrêmes récents, comme les feux de forêt en Grèce, en Espagne, au Canada et à Hawaï, ou les inondations en Libye et à Hong Kong.  La Belgique elle-même a connu de longues périodes de sécheresse et de stress hydrique.  Sur une note positive toutefois, a nuancé le Premier Ministre, le prix de l’énergie renouvelable ne cesse de baisser.  De nombreux spécialistes du climat pensent que les émissions de carbone atteindront leur niveau le plus élevé en 2025 et qu’elles baisseront ensuite si le rythme actuel des investissements dans le secteur des énergies renouvelables est maintenu.  « Il ne faut pas sombrer dans le désespoir », a exhorté le Premier Ministre qui a vanté les mérites de la transition verte.  Il faut mettre en place une nouvelle donne industrielle, et augmenter les capacités d’innovation pour trouver les solutions climatiques de demain. 

Selon M. de Croo, cette nouvelle donne industrielle sera l’une des principales priorités de la présidence belge de l’Union européenne, qui commencera le 1er janvier de l’année prochaine.  Pour en faire un succès, l’Europe a besoin de partenariats avec l’Afrique.  La Belgique dispose de partenariats avec des pays comme la Namibie, le Maroc et l’Égypte pour accélérer la transition verte dans le domaine de l’énergie éolienne et solaire et dans le domaine de l’hydrogène. Les investissements se multiplient, créent des emplois et des connaissances au niveau local et elles permettront bientôt d’exporter des molécules propres des côtes de l’Afrique vers les ports de l’Europe du Nord.  De concert avec l’Allemagne, la France, les Pays-Bas, le Luxembourg, le Danemark, la Norvège, l’Irlande et le Royaume-Uni, a annoncé le Chef du Gouvernement, « nous transformons la mer du Nord en une centrale électrique verte pour l’Europe d’ici à 2030 dont la production d’électricité atteindra 120 gigawatts ».  Dans le domaine du nucléaire, la Belgique va prolonger la durée de vie de ses deux plus grandes centrales, a encore informé M. De Croo. 

S’agissant de la migration irrégulière, le Premier Ministre a indiqué qu’au au cours de sa présidence de l’Union européenne, Bruxelles entend signer un nouveau pacte européen d’immigration qui veillera à ce que chaque pays de l’Union fasse ce qui lui incombe.  Il faut également traiter les principales causes de la migration, à savoir la pauvreté, le manque d’opportunités économiques et les changements climatiques.  La réponse, d’après M. De Croo, ce sont des partenariats entre l’Europe et les pays de transit et d’origine, des partenariats qui permettent de construire des institutions fortes et ouvertes à tous, et pas seulement à une poignée de personnes ou à la classe dirigeante.  Régler le problème de la migration suppose également de créer des moyens légaux de se rendre en Europe via des programmes de recherche de talents et d’éducation pour renforcer les sociétés des pays d’accueil, afin que les jeunes Africains puissent réaliser leurs rêves africains.  S’agissant de la région du Sahel, le Premier Ministre a fait valoir que la seule manière d’avancer est de rétablir l’état de droit.  À cet égard, il a dénoncé la Russie qui « sème la mort et la destruction en Afrique », de même qu’en Ukraine.

M. MOHAMMAD NAJIB AZMI MIKATI, Président du Conseil des ministres du Liban, a indiqué que son pays, qui célèbre cette année le quatre-vingtième anniversaire de son indépendance, fait face aujourd’hui à des crises multiples et complexes exacerbées par un système multilatéral plein de défis et un environnement régional fragile.  Cette situation affecte lourdement le peuple libanais qui souffre quotidiennement de l’absence de biens de subsistance, en plus de la fuite des cerveaux et des jeunes, a-t-il déploré.  Mais le premier des défis réside, selon lui, dans l’incapacité à élire un président, ce qui se reflète sur la stabilité institutionnelle et politique de son pays, contribue à accentuer la crise financière et économique ainsi qu’à freiner le lancement de réformes pour la relève du Liban. 

À cet égard, le Chef du Gouvernement a dit « espérer sincèrement » voir le Parlement libanais exercer son rôle souverain à travers l’élection d’un président qui rassemblera autour de lui le peuple libanais et, partant, retrouvera sa place dans le concert des nations en coopération avec ses « frères arabes » et ses partenaires internationaux.  Le Président du Conseil des ministres a saisi cette occasion pour saluer le rôle du Comité des cinq ainsi que celui de l’initiative française en vue d’aboutir à cet acquis constitutionnel. 

Évoquant la crise des déplacés syriens au Liban, il a alerté sur les vagues successives supportées par son pays, regrettant la frilosité de la communauté internationale face à cette tragédie humanitaire malgré plusieurs appels en ce sens.  Il a prévenu contre les conséquences négatives de ce fardeau qui ne fait qu’accentuer la crise de son pays, pressant pour la mise en œuvre d’une feuille de route avant que la situation « ne devienne incontrôlable ». 

Il s’est, dans le même temps, félicité de l’accord avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) lié à la présence syrienne au Liban, indiquant sa volonté d’approfondir son action avec les organisations internationales et onusiennes dans ce sens. 

Le Président du Conseil des ministres libanais a, par ailleurs, abordé la poursuite de la colonisation israélienne d’une partie de son territoire, dans le sud du pays, en violation des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, dont la 1701 (2006).  Il a salué, à cet égard, tous les pays participant à la Force intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).  Sur un autre registre, il s’est félicité des forages exploratoires menés près des côtes du Liban pour la recherche des hydrocarbures. 

M. Najib Azmi Mikati s’est aussi inquiété de l’absence de stabilité politique et sécuritaire dans certains pays de la région, à l’exception de ceux du Conseil de coopération des États arabes du Golfe, qui jouissent du développement et de la croissance.  Parmi les autres acquis, il a salué le retour de la Syrie dans la famille arabe et l’accord scellé entre l’Arabie saoudite et la République islamique d’Iran. 

Sur un autre volet, le Président du Conseil des ministres libanais s’est inquiété de la situation déplorable dans laquelle vivent les populations palestiniennes sous le joug de la colonisation, réitérant son attachement à une paix juste et globale sur la base de la solution des deux États et des résolutions du Conseil de sécurité.  Il a appelé en outre la communauté internationale à s’acquitter de ses responsabilités en faveur des réfugiés de Palestine, notamment à travers le plein soutien de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Il a conclu son allocution en assurant de son engagement à poursuivre la mise en œuvre des ODD ainsi que de l’Accord de Paris. 

M. FATALLA AF ELZUNI, Ministre de la Jeunesse de la Libye, qui s’exprimait au nom du Président de la Libye retenu dans son pays en raison de la récente catastrophe, a d’abord exprimé ses condoléances au peuple libyen, affecté par de terribles inondations.  Il a également offert ses condoléances au peuple marocain, victime d’un tremblement de terre quelques jours auparavant. 

C’est « le cœur lourd et l’âme emplie de tristesse », que le Ministre a peint un tableau sombre de la situation en Libye, décrivant la tragédie du 10 septembre à Derna, où des torrents ont ravagé un quart de la ville et tué des milliers de personnes.  En dépit des efforts du Gouvernement d’unité nationale de transition, de l’armée libyenne et du pays tout entier pour évacuer les personnes, pour extraire les survivants des décombres et pour contenir la situation sanitaire, « l’ampleur de la catastrophe a dépassé toutes les capacités locales d’intervention », s’est ému le Ministre.  Il a remercié les nations qui ont offert leur assistance et lancé un appel à la communauté internationale pour davantage de soutien, notamment pour éviter une crise sanitaire. 

« Les grandes valeurs naissent d’une grande souffrance », a déclaré le Ministre, soulignant que ce moment difficile avait uni les Libyens, les poussant à « transcender les plaies du passé et à tracer les contours du futur ».  Selon lui, le Libye doit désormais s’écarter des « marchands de guerre » et emprunter le « chemin de la réconciliation » et de la démocratie.  Il a ainsi demandé l’arrêt de l’ingérence étrangère et plaidé pour la tenue d’élections et l’établissement d’une autorité unifiée.  Enfin, il a précisé que son peuple n’avait plus besoin d’armes pour s’entretuer mais d’un appui technique et logistique pour voter, avant d’annoncer « l’aube d’une nouvelle ère » pour son pays. 

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