9228e séance – après-midi
CS/15154

Le Conseil de sécurité se penche sur la situation dans le corridor de Latchine, qui cristallise les tensions entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan

Le Conseil de sécurité s’est, aujourd’hui, pour la première fois depuis le 15 septembre dernier, penché sur le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, et tout particulièrement sur la situation dans le corridor de Latchine, le Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques se disant préoccupé par les récents développements sur le terrain.

M. Miroslav Jenča a certes relevé des progrès diplomatiques après la tenue de plusieurs réunions de haut niveau ainsi que d’échanges ministériels, rappelant notamment qu’à la suite d’un accord entre les deux belligérants, l’Union européenne a déployé une mission de contrôle en Arménie.  En outre, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC) ont également dépêché des missions en Arménie, les équipes de l’ONU continuant d’évaluer les besoins dans les zones auxquelles elles ont accès, a précisé le haut fonctionnaire.

En dépit de ces progrès, M. Jenča a souligné la persistance de tensions, faisant référence aux manifestations organisées le 12 décembre dernier dans le corridor de Latchine, liées à l’incidence environnementale supposée d’exploitations minières sur place.  L’ONU n’étant pas présente dans cette zone, où le sont en revanche les forces russes de maintien de la paix, le Sous-Secrétaire général a indiqué ne pas être en mesure de confirmer ces allégations.

L’Azerbaïdjan et l’Arménie, a-t-il indiqué, ont tous deux écrit à l’ONU et au Conseil de sécurité pour s’accuser mutuellement d’avoir violé la déclaration trilatérale en date du 9 novembre 2020.  Le haut fonctionnaire s’est toutefois félicité de l’engagement pris par les forces russes de faciliter le passage des biens, notant que, d’après elles et les médias présents sur place, un acheminement a été possible.

Les entraves à la circulation dans le corridor sont « inacceptables », a tranché la France, suivie par plusieurs membres du Conseil de sécurité, qui ont appelé à garantir la libre circulation des biens et des marchandises, l’un des piliers de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020 selon le Brésil, ainsi que le droit de passage dans cette zone qualifiée par M. Jenča d’ « artère vitale ».  La Fédération de Russie a, pour sa part, exhorté les parties à respecter les obligations contenues dans cette déclaration ainsi que dans celles adoptées les 11 janvier et 26 novembre 2021, et le 31 octobre 2022.

L’Arménie et l’Azerbaïdjan ont brossé des tableaux pour le moins contrastés de la situation dans le corridor de Latchine, la première affirmant que le passage y était empêché, la faute à l’Azerbaïdjan qui aurait lancé des manifestations massives pour isoler la population du Haut-Karabakh, dans un « siège médiéval » sur fonds d’opérations de nettoyage ethnique.

Rejetant ces accusations, l’Azerbaïdjan a soutenu que ces manifestations ne constituent pas une entrave et sont sans conséquences humanitaires ni restrictions pour la population locale.  Les manifestations, s’est justifiée la délégation, ont été causées par le refus de permettre à une équipe azerbaïdjanaise de mener une enquête dans les territoires occupés où l’Arménie se livre à l’exploitation de mines en l’absence de contrôle environnemental approprié, en violation des normes techniques requises.  Ces activités, qui polluent les zones limitrophes et détruisent des écosystèmes fragiles, constituent « une source légitime de graves préoccupations », a assuré l’Azerbaïdjan.

Le Gabon a pour sa part demandé l’ouverture d’une enquête indépendante pour établir les faits et éclairer le Conseil sur la réalité de la situation le long de cette voie d’accès indispensable.  Le Ghana a estimé que « tout blocus réel, ou perçu comme tel » du corridor de Latchine doit être levé de toute urgence pour permettre le mouvement fluide, continu et sûr des personnes.

Les membres du Conseil ont unanimement exhorté les parties à négocier en vue d’établir une paix pérenne.  Les Émirats arabes unis, la Russie, le Kenya, la Norvège ou encore l’Irlande ont, à cet égard, appelé les parties à la retenue.  « Il ne saurait y avoir de solution militaire à ce conflit », ont de leur côté estimé les États-Unis.

LETTRE DATÉE DU 13 SEPTEMBRE 2022, ADRESSÉE AU PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’ARMÉNIE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES

Déclarations

M. MIROSLAV JENČA, Sous-Secrétaire général pour l’Europe, l’Asie centrale et les Amériques, a indiqué que, depuis son dernier exposé en date, la situation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est restée précaire.  Il a relevé des progrès diplomatiques à la suite de la tenue de plusieurs réunions de haut niveau.  Il a notamment évoqué la rencontre entre les chefs d’État des deux pays à Prague, qui a abouti à un accord concernant une mission de contrôle de l’Union européenne en Arménie, dont le mandat a expiré hier.  Les deux chefs d’État se sont également réunis à Sotchi à la fin du mois d’octobre et ont convenu de s’abstenir de recourir à la force ou la menace du recours à la force.  Le haut fonctionnaire a également évoqué plusieurs réunions ministérielles ces derniers mois ainsi que des discussions sur un format pour la négociation d’un règlement général du différend, notamment sur la question frontalière.  En sus de la mission de l’UE, acceptée par les deux parties, le Sous-Secrétaire général a indiqué que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l’Organisation du Traité de sécurité collective ont déployé des missions en Arménie.  À l’invitation des gouvernements hôtes, les équipes de l’ONU ont continué d’entreprendre des évaluations des besoins, y compris dans les zones accessibles frappées par les conflits, a-t-il indiqué.

En dépit de ces progrès diplomatiques, les tensions ne se sont pas atténuées et plusieurs incidents ont été communiqués, a indiqué M. Jenča.  Le 12 septembre, des informations ont fait état de manifestations dans le corridor de Latchine, qui constitue une artère vitale dans la zone.  Ces manifestations porteraient sur l’exploitation des ressources minières et sur son incidence environnementale sur les zones voisines.  L’ONU, qui n’est présente ni dans ce corridor, ni dans les zones relevant du mandat de maintien de la paix russe, n’est pas en mesure de confirmer ces allégations, a-t-il ajouté.  Il a noté que les deux pays ont écrit à l’ONU et au Conseil de sécurité pour dénoncer ces évènements et se sont accusés mutuellement d’avoir violé la déclaration trilatérale en date du 9 novembre 2020.  Notant que les médias et les informations russes dans la zone indiquent que des fournitures et des biens ont pu y être acheminés, il s’est félicité de l’engagement pris par les forces russes de maintien de la paix pour faciliter le passage des biens dans le corridor.  L’équipe de paix des Nations Unies continue d’entretenir des canaux de négociation avec les autorités, a-t-il ajouté.

Le coût humain lié à la reprise éventuelle du conflit pourrait être considérable pour la région, a mis en garde le Sous-Secrétaire général, ajoutant que la communauté internationale ne peut se le permettre.  Il a exhorté les parties à respecter leurs obligations prises le 9 novembre 2020 et à redoubler d’efforts pour une issue pacifique à la crise avant qu’il ne soit trop tard.

Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a qualifié d’inacceptables les entraves mises à la circulation sur le corridor d’accès reliant l’Arménie et le Haut-Karabakh depuis le 12 décembre.  Le blocage du corridor de Latchine a pour conséquence directe d’isoler la population du Haut-Karabakh et entraîne des conséquences humanitaires qui s’aggravent chaque jour davantage.  La représentante a appelé au rétablissement sans conditions de la circulation le long du corridor et des approvisionnements au Haut-Karabakh, ainsi qu’à la mise en œuvre des engagements pris dans le cadre de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020.  Elle a également demandé l’accès immédiat, libre et sans entrave des organisations humanitaires et des agences des Nations Unies, notamment le HCR, aux populations concernées, y compris par le corridor de Latchine.  La représentante a ensuite appelé l’Arménie et l’Azerbaïdjan à créer un climat propice à l’aboutissement des négociations en cours et à progresser, exclusivement par la voie du dialogue et en excluant tout recours à la force, vers le règlement de l’ensemble des questions en suspens, y compris celles des droits et garanties pour la population du Haut-Karabakh.

M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) a déploré l’escalade des tensions entre les deux pays, avant d’appeler à la retenue.  Toute provocation doit être évitée, a dit le délégué, jugeant crucial d’assurer la liberté de circulation dans le corridor de Latchine.  Il a plaidé pour une solution pérenne, car, a-t-il dit, il ne saurait y avoir de solution militaire.  Il a donc appelé au renforcement des efforts de médiation et exhorté le Conseil à faire tout son possible pour promouvoir une coexistence pacifique.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a insisté sur l’importance de respecter la liberté de circulation sur le corridor d’accès reliant l’Arménie et le Haut-Karabakh.  Il a également exhorté les parties à trouver un accord mutuellement acceptable en ce qui concerne l’exploitation des ressources naturelles.  Il a appuyé l’idée de l’envoi d’une mission d’observateurs de l’Union européenne le long de la frontière entre les deux pays.  Il s’est félicité que les deux parties se sont engagées à signer un traité de paix aussi rapidement que possible, soulignant qu’il n’y aura pas d’autre solution que la diplomatie. 

M. GENG SHUANG (Chine) s’est dit préoccupé par les répercussions de la situation actuelle dans le corridor de Latchine.  Il a invité les parties à régler ce différend par le biais des négociations, arguant qu’une sécurité partagée sert leurs intérêts.  Le représentant a rappelé les trois déclarations trilatérales des deux pays et de la Fédération de Russie et a encouragé les parties à trouver un compromis pour régler les questions en suspens, sur la base desdites déclarations et du droit international.  La Chine, a-t-il conclu, soutiendra tout effort diplomatique qui contribuerait à atteindre cet objectif et jouera également un rôle actif en ce sens.

M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a dénoncé les restrictions imposées à la circulation dans le corridor de Latchine, en estimant qu’elles sapent la confiance dans un processus de paix et pourraient avoir de graves conséquences humanitaires.  Il a exhorté l’Azerbaïdjan à rétablir ladite circulation, avant de dénoncer toute interruption dans la fourniture des services de base pour les peuples de la région.  Le représentant a appelé les parties à s’abstenir de tout acte de nature à saper les efforts de paix, en insistant sur la nécessité d’un règlement par le biais de négociations.  Il ne saurait y avoir de solution militaire, a dit le délégué, en rappelant l’implication de son pays pour un retour au dialogue.

Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) s’est particulièrement inquiétée du blocage du corridor de Latchine qui a pour conséquence directe d’isoler la population du Haut-Karabakh.  Elle a exigé le respect de tous les accords sur le cessez-le-feu et le non-recours à la force, conclus sous la médiation russe.  Il a appelé l’Azerbaïdjan et l’Arménie à faire preuve de retenue, à s’abstenir de toute action susceptible d’accroître les tensions et à honorer les accords conclus dans le cadre des Déclarations tripartites des dirigeants de l’Arménie, de l’Azerbaïdjan et de la Fédération de Russie, le 9 novembre 2020, les 11 janvier et 26 novembre 2021, et le 31 octobre 2022.  La représentante s’est dite convaincue que la mise en œuvre intégrale de ces Déclarations est la formule la plus durable pour de bonnes relations entre Bakou et Erevan.  Elle a indiqué que son pays s’est engagé à continuer de fournir à Bakou et à Erevan toute l’assistance nécessaire pour mettre en œuvre les accords.

Le Groupe de travail trilatéral sur le déblocage dans les domaines économique et du transport poursuit ses travaux, sous la coprésidence, des Vice-Premiers Ministres russe, arménien et azerbaïdjanais, a ajouté la représentante, avant de préciser que son pays travaille à l’élaboration d’un traité de paix avec les deux parties.  Elle a estimé que tous les différends entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan doivent être résolus exclusivement par des moyens politiques et diplomatiques.  Les questions frontalières doivent l’être au sein de la Commission bilatérale sur la délimitation de la frontière, avec l’assistance consultative de la Fédération de Russie.

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) s’est dit gravement préoccupé de la clôture du corridor de Latchine, avec les conséquences humanitaires graves qu’une telle décision pourrait avoir, particulièrement en hiver.  Il a en effet rappelé qu’il s’agit de la seule voie d’approvisionnement des besoins essentiels dans la région.  Ce n’est que grâce à la diplomatie qu’une paix pérenne pourra être atteinte, a ajouté le représentant.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) s’est dit préoccupé par les informations faisant état de restrictions à la liberté de mouvement dans le corridor de Latchine.  Le droit de passage est l’un des piliers de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020, a-t-il rappelé, arguant que toute entrave à ce droit, quel qu’en soit le prétexte, compromet le bien-être du peuple du Haut-Karabakh et menace le processus de réconciliation entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, après un conflit qui a déjà coûté des milliers de vies humaines.  Constatant que fort heureusement, les tensions de ces derniers jours ne se sont pas traduites par des actes de violence, il a encouragé les parties à faire preuve de la même retenue dans leur rhétorique, afin que leurs propos ne soient pas interprétés comme une incitation à de nouvelles hostilités. 

Il est essentiel de maintenir ouvertes les voies de dialogue et d’adopter des mesures de confiance, afin de clarifier objectivement les faits et de trouver des solutions pragmatiques, a estimé le représentant.  Prenant note des efforts de médiation de la Fédération de Russie, qui ont contribué à la reprise de l’approvisionnement en gaz de la région, il a encouragé les autres États Membres à agir de manière tout aussi constructive pour prévenir l’aggravation de la crise et de la situation humanitaire. 

Mme JAYNE JEPKORIR TOROITICH (Kenya) a dénoncé le blocus du corridor de Latchine et les conséquences humanitaires de cette situation.  La représentante a demandé le rétablissement de la liberté de circulation, avant d’exhorter les deux parties à faire montre de la plus grande retenue.  Les parties doivent tout particulièrement éviter toute désinformation, notamment sur les réseaux sociaux, sous peine de déclencher un mouvement de panique au sein des populations et de fragiliser les efforts d’apaisement des tensions, a-t-elle plaidé.  Il ne saurait y avoir de solution militaire à ce conflit, a conclu la déléguée, en appelant à recourir à la négociation pour parvenir à un règlement pérenne.

M. JUAN MANUEL GÓMEZ ROBLEDO (Mexique) a déclaré que son pays suit avec inquiétude les tensions dans le corridor de Latchine.  Il s’est dit préoccupé par les conséquences humanitaires des restrictions à la liberté de mouvement, en cette saison hivernale.  Il a rappelé, à cet égard, l’accord du 9 novembre 2020 et exhorté au respect du droit international humanitaire.  Le représentant a réitéré son appel aux parties pour qu’elles résolvent leurs différends par le dialogue.  Il a invité les membres concernés de la communauté internationale à user de leur influence pour obtenir des parties qu’elles évitent toute action susceptible de faire monter les tensions ou de déclencher une escalade.  Rappelant le coût humain des crises passées, il a voulu que le maintien de la sécurité et de la stabilité dans le Caucase soit la priorité.

Mme MONA JUUL (Norvège) s’est dite préoccupée par les développements dans le corridor de Latchine et par le risque supplémentaire de déstabilisation de la région.  Le blocage du couloir a déjà eu de graves conséquences humanitaires, a-t-elle relevé en regrettant que les fournitures de soins médicaux et les évacuations sanitaires aient été interrompues.  Toute interruption de l’approvisionnement en biens et services essentiels nuit en premier aux groupes les plus vulnérables, a souligné la déléguée ajoutant que « cela peut et doit être évité ».  La Norvège, a-t-elle déclaré, appelle les parties à respecter les accords prévus dans la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020.  « En particulier, nous appelons l’Azerbaïdjan à garantir la sécurité des déplacements le long du corridor de Latchine. »  La représentante a fait valoir qu’il n’est dans l’intérêt de personne de déclencher une situation humanitaire évitable au Haut-Karabakh.  Elle a appelé à rechercher des solutions par le dialogue et des initiatives diplomatiques.  En outre, la représentante a exhorté les parties à faire preuve d’un maximum de retenue, à prendre des mesures pour désamorcer la situation et à revenir à la table des négociations de bonne foi et sans conditions préalables.

Mme KHALILAH HACKMAN (Ghana) a déclaré qu’en tant qu’ami de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan, son pays est préoccupé par les tensions qui affectent les deux pays depuis des siècles et qui ont par intermittence dégénéré en conflit armé, faisant des victimes civiles et militaires et provoquant la destruction d’infrastructures vitales.  La représentante a estimé que la communauté internationale doit continuer de travailler avec les deux parties pour trouver les voies d’une coexistence pacifique.  Concernant le différend relatif au Haut-Karabakh, elle a exhorté les dirigeants et la société civile à soutenir les efforts de paix, en facilitant le discours intercommunautaire et en évitant les actions susceptibles d’attiser les tensions.

Nous réitérons notre appel aux parties pour qu’elles restent attachées à la pleine mise en œuvre de la Déclaration trilatérale de 2022, laquelle constitue une étape importante vers la cessation complète des hostilités, le règlement progressif du conflit et la normalisation des relations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.  Compte tenu des tensions en cours sur le continent européen et la crise en Ukraine, la représentante a estimé que des mesures de confiance contribueraient à renforcer la paix fragile qui règne actuellement entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.  S’agissant du volet humanitaire, elle a jugé que tout blocus réel, ou perçu comme tel, du corridor de Latchine doit être levé de toute urgence afin d’assurer la circulation fluide, continue et sûre des personnes.

M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) s’est déclaré gravement préoccupé par l’obstruction continue du corridor de Latchine, qui a débuté le 12 décembre et a de graves répercussions sur la population locale.  Sans la libre circulation des personnes, des biens, de la nourriture et des fournitures médicales à travers ce couloir vital, les habitants du Haut-Karabakh feront sûrement face à une crise humanitaire cet hiver, a-t-il averti, exhortant les membres du Conseil à empêcher qu’une autre catastrophe ne se produise sous leurs yeux.  Il a également appelé les autorités azerbaïdjanaises à rétablir immédiatement et sans condition la liberté et la sécurité de circulation le long du corridor de Latchine, conformément à l’accord trilatéral du 9 novembre 2020.

Notant que le mois dernier a marqué le deuxième anniversaire de la fin de la guerre de 44 jours entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, le représentant a appelé à la retenue et à la désescalade.  Il est temps de modérer la rhétorique, de s’abstenir de menaces et de provocations et de poursuivre d’importants efforts de réconciliation afin d’éviter de nouvelles pertes de vie inutiles, a-t-il demandé aux parties.  De même, il a appuyé un règlement négocié, global et durable du conflit, y compris sur le statut à long terme du Haut-Karabakh et a fait part de son plein soutien au format international du Groupe de Minsk de l’OSCE pour poursuivre cet objectif. 

Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon) a dénoncé le blocus du corridor de Latchine qui pourrait déclencher une crise humanitaire.  Les parties doivent s’en tenir à l’accord de cessez-le-feu du 10 septembre 2020, a-t-elle dit.  Prenant note des explications de l’Azerbaïdjan, elle a demandé une enquête indépendante pour établir les faits et éclairer le Conseil sur la réalité de la situation le long de cette route indispensable.  Enfin, la représentante a réitéré la nécessité de poursuivre les négociations, sur la base du cadre tracé par l’accord tripartite, en vue de trouver un accord sur les questions en suspens, notamment la signature d’un traité de paix et de délimitation des frontières.

M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) s’est inquiété de la situation dans le corridor de Latchine dont le blocage empêche l’acheminement vers les populations du Haut-Karabakh de vivres et de médicaments.  Estimant que cette situation risque d’entraîner une crise humanitaire, il a appelé les parties à respecter les accords précédemment conclus.  Il a appuyé les efforts de médiation en cours dans la région, avant d’exhorter les deux parties à user de tous les moyens diplomatiques à leur disposition pour garantir une paix durable.

M. MHER MARGARYAN (Arménie) a déclaré que, depuis le 12 décembre, le passage en toute sécurité des personnes, de la nourriture et des médicaments à la population du Haut-Karabakh a été empêché alors même que l’Azerbaïdjan lançait une campagne massive de manifestations le long du corridor de Latchine, bloquant la seule et unique voie d’approvisionnement dans et hors du Haut-Karabakh.  Pour le représentant, les agissements de l’Azerbaïdjan constituent une violation directe de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020, y compris de son paragraphe 6 qui stipule que le corridor de Latchine, sous le contrôle des forces de maintien de la paix de la Fédération de Russie, doit continuer de relier le Haut-Karabakh et l’Arménie.  À ce titre, a-t-il ajouté, l’Azerbaïdjan doit garantir la circulation en toute sécurité des citoyens, des véhicules et des marchandises circulant le long du corridor de Latchine dans les deux sens.  Le représentant a estimé que le « blocus illégal orchestré par l’Azerbaïdjan » vise à isoler quelques 120 000 personnes et à les plonger, en plein hiver, dans une situation humanitaire précaire. 

Depuis le 12 décembre, un seul transfert d’un patient devant subir une opération a pu avoir lieu, nécessitant la coopération de multiples parties prenantes, dont les soldats de la paix et le CICR, a poursuivi M. Margaryan.  Selon son pays, cela indique clairement que le couloir reste fermé à la population, contrairement à ce que suggère la partie azerbaïdjanaise.  Le représentant a en outre évoqué une pénurie de vivres et d’autres biens essentiels, 4 000 tonnes de fournitures diverses n’ayant par exemple pas pu être livrées à destination.  « Le siège médiéval de la population du Haut-Karabakh a été exacerbé par la perturbation de l’approvisionnement en gaz pendant trois jours consécutifs dans des conditions hivernales rigoureuses », a encore lancé le délégué arménien, qui a affirmé que la région est au bord de la catastrophe humanitaire.  « Le manque de chauffage a en outre perturbé le quotidien des élèves, les privant même de leur droit fondamental à l’éducation », a-t-il aussi dit.  M. Margaryan a estimé que le caractère coordonné des actions de l’Azerbaïdjan, y compris les incidents ciblant la population civile et les infrastructures vitales, apporte la preuve supplémentaire que la fermeture du corridor de Latchine est bien une opération planifiée mise en œuvre par les autorités azerbaïdjanaises dans l’unique but de porter atteinte à la population civile et de créer une crise humanitaire de grande ampleur dans le Haut-Karabakh. 

Poursuivant sa déclaration à charge, le représentant a accusé l’Azerbaïdjan de se livrer à des opérations de nettoyage ethnique dans des villages du Haut-Karabakh et d’entraver des activités agricoles au motif fallacieux qu’elles porteraient atteintes à l’environnement.  Si l’Azerbaïdjan est intéressé par une évaluation indépendante de la situation environnementale, non pourrions envisager de déployer une mission d’enquête de l’ONU pour examiner la question, a-t-il ironisé.  Concernant l’utilisation de mines terrestres, M. Margaryan a souligné que celle-ci était limitée au territoire de l’Arménie, et ce « strictement à des fins défensives ». 

L’Azerbaïdjan non seulement menace régulièrement de recourir à la force contre l’Arménie, mais continue également de maintenir sous occupation illégale plus de 140 kilomètres carrés du territoire souverain de mon pays, s’est-il ensuite défendu.  Pour le délégué arménien, l’essentiel est qu’une population de 120 000 personnes, dont des femmes, des enfants et des personnes âgées, est prise en otage par l’Azerbaïdjan, pays dont le représentant est ici aujourd’hui pour proférer mensonges et accusations destinés à dissimuler des violations flagrantes et massives des droits de l’homme. 

Selon M. Margaryan, le recours massif à la force, l’abolition de tous les droits collectifs du peuple du Haut-Karabakh et l’élimination même du nom de cette terre peuplée d’Arméniens depuis des millénaires constituent des signes avant-coureurs clairs d’une politique génocidaire.  Dans ces circonstances, il a exhorté le Conseil de sécurité des Nations Unies à prendre des mesures pour obtenir de l’Azerbaïdjan son plein respect les dispositions de la déclaration trilatérale du 9 novembre 2020, l’ouverture immédiate et sans condition du corridor de Latchine, et le déploiement d’une mission d’enquête pour évaluer la situation humanitaire sur le terrain. 

M. YASHAR T. ALIYEV (Azerbaïdjan) a commencé par rappeler que seule la terminologie géographique établie par les autorités nationales compétentes doit être utilisée et reconnue par les Nations Unies.  À ce titre, il a regretté que l’Arménie et certains membres du Conseil de sécurité aient employé l’expression de « Haut-Karabakh » pour désigner un territoire azerbaïdjanais occupé dont le titre légal est la région économique du Karabakh (région du Karabakh).

Il a déclaré que le régime du corridor de Latchine demeure inchangé et que les mouvements ne sont pas entravés.  Les allégations relatives aux conséquences humanitaires sont fausses et aucune restriction n’est imposée à la population locale, a-t-il assuré.  Il a noté qu’en violation de l’accord du 10 novembre 2020, l’Arménie refuse de retirer ses forces armées illégales du territoire azerbaïdjanais où sont temporairement déployées des forces de maintien de la paix russes.  Il a également accusé l’Arménie de ne pas avoir fourni de carte des mines disséminées sur le territoire azerbaïdjanais et d’en avoir déposé de nouvelles, en utilisant la route de Latchine pour les transporter.  À cet égard, il a déclaré que, depuis la signature de la déclaration trilatérale, 276 Azerbaïdjanais ont été victimes des mines. 

En outre, il a déclaré que la route de Latchine a été utilisée pour le trafic illicite de minerais et d’autres ressources depuis le territoire azerbaïdjanais occupé où les forces russes sont déployées.  Ces opérations minières et d’extraction ont été menées sans contrôle environnemental approprié, en violation des normes techniques en matière d’environnement, a affirmé le représentant, qui a souligné que l’impact environnemental de ces activités constitue une source légitime de graves préoccupations.  En effet, ces activités illégales polluent les zones limitrophes et détruisent des écosystèmes fragiles, a-t-il indiqué.  Le représentant a regretté qu’une équipe azerbaïdjanaise ait été empêchée de mener une enquête dans la zone, ayant indigné le public et conduit à une manifestation sur la route de Latchine-Shusha.

L’Azerbaïdjan, a-t-il dit, est disposé à garantir les droits et libertés des citoyens d’origine arménienne conformément à son droit interne et à ses obligations internationales.  Il a regretté que l’Arménie et des pays tiers tentent de saper le fragile processus de normalisation.  La création de relations de bon voisinage entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est essentielle, a-t-il estimé.  Le délégué a donc réitéré son appel à la communauté internationale pour persuader l’Arménie d’accepter l’offre de paix de l’Azerbaïdjan afin de négocier en vue de trouver des solutions pacifiques.

 

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