Afghanistan: « tant que les filles afghanes seront exclues de l’école, nous resterons dans l’impasse », déclare la Cheffe de la MANUA au Conseil de sécurité
Le Conseil de sécurité a tenu, aujourd’hui, une réunion d’information sur la situation en Afghanistan, situation marquée par un déni du droit à l’éducation des filles. Cette interdiction, promulguée progressivement avec d’autres par les Taliban depuis leur prise du pouvoir en août 2021, a été unanimement condamnée par la vingtaine d’intervenants -dont la Ministre norvégienne des affaires étrangères- qui se sont exprimés après avoir entendu les exposés de la Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), Mme Roza Otunbayeva, d’une activiste afghane et du Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence. Si la crise humanitaire frappant près de 30 millions d’Afghans a été largement évoquée par M. Martin Griffiths, et si les délégués se sont inquiétés de la sécurité de la population et des diplomates, c’est bien le sort des femmes qui a été au cœur de la discussion ainsi que la nécessité de maintenir un dialogue « réel » et « pragmatique » avec les autorités de facto, « même si elles ont pris le pouvoir par la force ».
Il a été répété que la communauté internationale doit maintenir ce dialogue notamment pour que les autorités de facto comprennent que la marginalisation des femmes et des filles prive le pays d’indispensables forces vives économiques et sociales. Les préoccupations ont été réitérées en fin de séance par les États-Unis et le Royaume-Uni qui ont repris la parole pour condamner la décision des autorités de facto, tout juste annoncée, d’interdire aux filles l’accès à l’université. Les Émirats arabes unis ont demandé à Mme Otunbayeva de tenir plus amplement informés les membres du Conseil de cette décision « inquiétante ».
S’appuyant sur le dernier rapport en date du Secrétaire général sur la question à l’examen, Mme Otunbayeva a indiqué qu’en raison de la prise de décrets toujours plus préjudiciables aux femmes, ces dernières ne peuvent plus, depuis le 9 novembre, se rendre dans la plupart des parcs publics ni dans les bains publics ou les gymnases. « Leur espace social se restreint désormais autant que leur espace politique », a-t-elle déploré. La Représentante spéciale a noté que ces décisions, qui ont été critiquées par l’ensemble du monde musulman, sont impopulaires parmi les Afghans et même au sein des dirigeants Taliban. Selon elle, tant que les filles afghanes seront exclues de l’école « nous resterons dans une sorte d’impasse ». Se disant convaincue que les échanges avec les Taliban devront se poursuivre « sous une forme ou une autre », Mme Otunbayeva a rappelé aux membres du Conseil que les Afghanes demandent un soutien accru de la communauté internationale et « pensent à juste titre que ce n’est qu’en discutant avec les autorités de facto qu’un changement positif pourra advenir ».
Au nom de la société civile, Mme Mahbouba Seraj, de l’organisation « Afghan women’s rights activist », a témoigné de la dégradation de la situation des femmes afghanes depuis sa dernière intervention devant le Conseil il y a un an. Les filles ne sont toujours pas autorisées à se rendre à l’école et les Taliban ont rétabli l’obligation pour les femmes de couvrir leur visage en public et l’interdiction de sortir sans un gardien masculin, a-t-elle relaté. Parlant d’un effacement des femmes de la vie publique afghane, Mme Seraj s’est alarmée de ce recul complet en matière d’autonomisation et d’émancipation. Assurant avoir entendu le message de la société civile, Mme Anniken Huitfeldt, Ministre norvégienne des affaires étrangères, s’est émue de ce que l’Afghanistan soit le seul pays au monde où les filles se voient refuser l’accès à l’éducation. Pour elle, le Conseil de sécurité doit s’appuyer sur la condamnation unanime de cette privation pour exhorter les Taliban à faire machine arrière. « Ensemble, nous devons communiquer clairement nos attentes aux Taliban », a-t-elle plaidé. Elle aussi a recommandé le maintien du dialogue avec eux, « même s’ils ont pris le pouvoir par la force », car il est nécessaire de parler à ceux qui sont au pouvoir « à notre manière et en nous gardant d’octroyer une once de légitimité aux Taliban ».
De son côté, le représentant ouzbek a signalé que le Président Mirziyoyev a récemment proposé de créer, sous les auspices de l’ONU et dans le cadre de la Conférence pour l’interaction et les mesures de confiance en Asie, un groupe de négociation international de haut niveau sur le règlement de la question afghane. À l’appui de cette initiative, il a indiqué que grâce au dialogue avec les Taliban, son pays avait réussi à faire ouvrir des écoles pour filles dans les provinces du nord. « Nous devons maintenir le dialogue et la coopération en faisant preuve de patience car ce n’est qu’en collaborant avec le Gouvernement par intérim que nous pourrons exercer une influence louable », a déclaré, de son côté, la Chine, qui a plaidé pour la levée des sanctions afin de faciliter la distribution de l’aide humanitaire. L’Iran, dans le même sens, a demandé que les avoirs gelés soient réinjectés dans l’économie afghane pour relancer la croissance.
Sur ce volet économique, la Représentante spéciale a noté la réduction de la corruption de l’État, laquelle peut expliquer que les autorités de facto aient annoncé la collecte de plus de revenus au cours des 10 premiers mois de 2022 que « la République » n’en a collectés en 2021 et 2020. Mme Otunbayeva a souligné que les Taliban ont également réussi à maintenir la stabilité macroéconomique, puisqu’après une forte détérioration de la monnaie il y a un an, « les exportations ont atteint un niveau historique d’environ 1,7 milliard de dollars cette année, contre environ 700 millions de dollars sous le régime précédent ». La MANUA, a-t-elle dit, est en contact régulier avec des acteurs et des organisations du secteur privé, notamment des chambres de commerce féminines, pour tenter d’accroître les investissements. Comme l’a reconnu M. Griffiths, ces progrès économiques ne rendent pas moins aigüe la crise humanitaire. « Nous sommes confrontés à un défi financier de taille à l’aune de 2023, avec un besoin de 4,6 milliards de dollars pour répondre de manière adéquate aux besoins humanitaires du pays », a-t-il notamment indiqué par visioconférence aux membres du Conseil.
Pour ce qui est de la situation en matière de sécurité, les intervenants ont condamné les attentats perpétrés contre les ambassades russe et pakistanaise, en pointant du doigt les agissements de l’État islamique au Khorassan, le « pire groupe terroriste opérant dans la région » d’après le représentant du Pakistan. De manière générale, les autorités de facto, désireuses d’obtenir une reconnaissance internationale, ont été sommées d’assurer la sécurité de la population afghane et la stabilité à travers tout le pays. S’agissant de la lutte contre les stupéfiants, le rapport du Secrétaire général note que le programme de développement alternatif de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a permis de venir en aide à 10 601 agriculteurs -dont 30% de femmes- dans les provinces du Helmand et de Kandahar.
LA SITUATION EN AFGHANISTAN
Déclarations
Mme ROZA OTUNBAYEVA, Représentante spéciale du Secrétaire général et Cheffe de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), a déploré l’absence d’opposition politique visible significative aux Taliban, ceux-ci pouvant considérer cet état de fait comme un soutien. Les politiciens exilés sont bien sûr des critiques virulents, mais leurs prises de position sont de moins en moins entendues par la population afghane, a-t-elle ajouté, les Taliban rejetant toute forme de dialogue intra-afghan en affirmant que leur gouvernement est suffisamment représentatif. La représentante spéciale a assuré que, dans ce contexte, la Mission s’efforce de faire pression à tous les niveaux afin qu’une consultation ait lieu sur cette question de la représentativité des autorités de facto. Nous continuons également à interagir avec de nombreux acteurs de la société civile non talibane, a-t-elle dit, et avec des personnalités politiques en Afghanistan, et ce, « parce que nous pensons que la seule voie à suivre pour le pays passe par une politique plus pluraliste, où tous les Afghans, en particulier les femmes et les minorités, se verraient représentés et auraient un véritable poids dans la prise de décision, ce qui n’est clairement pas le cas actuellement ».
Mme Otunbayeva a ensuite déploré la répression des voix de l’opposition, une situation d’autant plus regrettable que la politique sociale des Taliban est de plus en plus dure. Nous avons vu paraître une multitude de décrets particulièrement préjudiciables aux femmes, a-t-elle poursuivi, ces dernières ne pouvant plus, depuis le 9 novembre, se rendre dans la plupart des parcs publics, les bains publics et les gymnases. Leur espace social se restreint désormais autant que leur espace politique, a-t-elle signalé, ajoutant que la situation est telle dans l’enseignement secondaire « que dans deux ans il n’y aura plus de filles susceptibles d’entrer à l’université ». Mme Otunbayeva a indiqué que ces décisions sont extrêmement impopulaires parmi les Afghans et même au sein des dirigeants talibans, décisions qui ont été d’ailleurs critiquées par l’ensemble du monde musulman.
La Représentante spéciale a également signalé que, le 13 novembre, les Taliban ont fait savoir que le chef taliban Haibatullah Akhunzada avait ordonné que les juges appliquent la peine capitale et les châtiments corporels, connus sous le nom de hudūd et qisās, « si les conditions sont remplies et conformément à la charia ». La MANUA peut attester que ces châtiments ont commencé d’être infligés dès la prise de pouvoir des Taliban et que, depuis l’annonce de l’instruction du chef taliban, « ils sont devenus de plus en plus publics ». Elle a ainsi indiqué que, le 7 décembre, la première exécution publique autorisée par la justice, apparemment en application de la peine de qisās, a eu lieu pour un meurtre commis en 2017. « L’ONU critique uniformément tous les pays qui appliquent la peine de mort et les châtiments corporels », a déclaré Mme Otunbayeva, avant d’aborder la situation économique en Afghanistan.
Sur ce front, elle a noté avec satisfaction que si le niveau de corruption a baissé au plan général, à l’échelle local elle augmente de manière insidieuse. Cependant, la réduction significative de la corruption de l’État peut expliquer que les autorités de facto aient annoncé la collecte de plus de revenus au cours des 10 premiers mois de 2022 que « la République » n’en a collectés en 2021 et 2020, malgré une contraction économique de 20% en 2021, a-t-elle encore expliqué. Selon elle, grâce à ces revenus, et en réduisant les coûts du gouvernement, les Taliban ont réussi à financer leur budget de fonctionnement et ont indiqué qu’ils disposent de ressources pour lancer leurs projets de développement. Mme Otunbayeva a en outre souligné que les Taliban ont également réussi à maintenir la stabilité macroéconomique, puisqu’après une forte détérioration de la monnaie il y a un an, « les exportations ont atteint un niveau historique d’environ 1,7 milliard de dollars cette année, contre environ 700 millions de dollars sous le régime précédent ».
La Représentante spéciale a ensuite précisé que les autorités afghanes de facto mettent en œuvre une stratégie économique axée sur l’autosuffisance, en investissant dans des secteurs tels que l’agriculture, l’irrigation, les infrastructures, la gestion de l’eau, l’exploitation minière et les industries, « qui constituent la base de la croissance économique ». La MANUA est en contact régulier avec des acteurs et des organisations du secteur privé, notamment des chambres de commerce féminines, a ajouté Mme Otunbayev, le principal obstacle à un accroissement des investissements étant le coût élevé des transactions financières internationales compte tenu de la réticence des banques internationales à faire des affaires avec l’Afghanistan, « ainsi que l’incertitude politique ».
Sur le volet humanitaire, la Représentante spéciale a noté que, si la gestion économique des Taliban a été plus efficace que prévu, il faut aussi reconnaître que les donateurs internationaux continuent de nourrir plus de la moitié de la population ». À cet égard, elle a fait remarquer que les versements en espèces nécessaires à l’acheminement de l’aide humanitaire, « qui seront mentionnés par M. Griffiths », injectent indirectement des liquidités dans l’économie. « Sans cette aide, le tableau en Afghanistan pourrait être bien plus sombre », a-t-elle reconnu. Par ailleurs, elle a relevé qu’il est prouvé que les Taliban appliquent leur interdiction de la culture de l’opium et d’autres stupéfiants annoncés en avril, notamment en détruisant des champs.
Pour Mme Otunbayeva, ces évolutions économiques positives pourraient ne pas durer si les véritables préoccupations des Afghans ne sont pas prises en compte. C’est pourquoi, entre le 11 octobre et le 8 novembre, la MANUA a mené des consultations dans 12 provinces qui ont été sélectionnées pour assurer une représentation de toutes les communautés et de tous les secteurs clefs de la société afghane, a-t-elle dit. Nous nous sommes entretenus avec 519 participants, dont 189 femmes et 83 représentants des autorités de facto, les préoccupations exprimées par la population concernant l’interdiction de l’éducation des filles, le manque d’infrastructures sanitaires, les problèmes de prise en charge de la santé mentale, la pauvreté et l’insécurité économique ainsi que la discrimination des minorités ethniques, a-t-elle indiqué. Poursuivant, la Représentante spéciale a signalé que les Afghans sont également frustrés par la communauté internationale, dont ils attendent qu’elle s’investisse davantage à travers des projets pérennes de développement plutôt que des dons.
Concluant son intervention, Mme Otunbayeva a considéré que tant que les filles seront exclues de l’école et que les autorités de facto continueront à ignorer les préoccupations fondamentales de la communauté internationale, « nous resterons dans une sorte d’impasse ». Elle a indiqué que la MANUA va continuer de réfléchir en interne sur ce qui s’est avéré efficace dans la mise en œuvre de son mandat « et sur ce qui n’a pas marché ». Cela débouchera, a-t-elle annoncé, sur des recommandations concernant son futur mandat. « Nous sommes en tout cas déjà convaincus que les échanges avec les autorités de facto devront se poursuivre sous une forme ou une autre. » Les Afghanes, en effet, demandent un soutien continu de la part de la communauté internationale et pensent à juste titre que ce n’est qu’en discutant avec les autorités de facto qu’un changement positif pourra advenir », a déclaré Mme Otunbayeva.
Illustrant l’ampleur des privations et souffrances de la population afghane, M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a rappelé que 97% des Afghans vivent dans la pauvreté, deux tiers de la population ont besoin d’aide humanitaire pour survivre, 20 millions de personnes sont confrontées à une faim aiguë, la moitié de la population a un besoin urgent d’accès à l’eau potable et à l’assainissement et 1,1 million d’adolescentes restent interdites d’école. Près de 7 millions de ressortissants afghans restent dans les pays voisins, y compris en tant que réfugiés, et plus de 3,4 millions de personnes déplacées à cause du conflit doivent encore trouver des solutions, a ajouté M. Griffiths avant de rappeler que l’Afghanistan doit également faire face à une aggravation de la crise climatique. Néanmoins, il s’est félicité des progrès réalisés grâce à trois facteurs principaux, en citant d’abord une augmentation massive de la réponse rapide et généreuse des donateurs, qui a permis d’offrir une assistance à 25 millions de personnes dans les 34 provinces. Les autres progrès sont liés à la facilité de trésorerie de l’ONU, qui a rapporté au moins 1,8 milliard de dollars cette année pour soutenir les opérations humanitaires, et à l’exception humanitaire adoptée par le Conseil de sécurité en décembre 2021 dans la résolution 2615.
M. Griffiths a expliqué que l’élément clef de l’exception humanitaire réside dans le fait que la fourniture de fonds ou d’actifs à des personnes ou entités désignées est autorisée lorsque cela est nécessaire pour la programmation humanitaire et les besoins humains fondamentaux. Il a témoigné que cette couverture juridique a été essentielle pour permettre aux humanitaires de travailler et aux partenaires commerciaux de traiter et verser des fonds aux ministères de tutelle. Il a aussi précisé que les agences des Nations Unies en Afghanistan continuent d’identifier des moyens de renforcer les interventions d’une manière responsable qui préserve l’espace humanitaire. Il a félicité le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) pour son récent accord de partenariat avec le Ministère des réfugiés et du rapatriement en faveur des populations touchées, en expliquant que cet accord doit permettre de garantir que les autorités de facto n’interfèrent pas dans les activités humanitaires du HCR ou de ses partenaires. Il a assuré que l’exception humanitaire n’est en aucun cas une carte blanche pour permettre aux humanitaires d’opérer sans contrôle.
Citant trois défis que doivent relever les humanitaires sur le terrain, le Chef du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a cité en premier lieu les ingérences et restrictions de routine, dont la détention de personnel humanitaire, les tentations d’influencer ou de contrôler la réponse humanitaire et la restriction à la liberté de mouvement et à la participation des femmes à l’action humanitaire. Il s’est particulièrement inquiété de ce dernier problème, qui a des conséquences sur l’accès des femmes aux services. Il a cité à cet égard des informations inquiétantes relatives à la province de Helmand, selon lesquelles des femmes ont été empêchées d’entrer dans des établissements de santé. Or, la qualité de l’aide humanitaire efficace repose sur la participation significative des femmes, a-t-il rappelé.
Le deuxième défi qu’il a cité est la poursuite de la réduction des risques bancaires. M. Griffiths a précisé que l’exception humanitaire a été une condition nécessaire mais insuffisante pour que les banques reprennent complètement les transactions internationales à destination et en provenance de l’Afghanistan, compte tenu de l’éventail de facteurs non liés aux sanctions qu’elles prennent en compte pour déterminer si elles doivent faciliter une transaction. Tout en notant qu’il y a moins de problèmes de transfert de fonds vers l’Afghanistan qu’avant l’obtention de l’exception, M. Griffiths a regretté que ce problème sérieux demeure.
Troisièmement, a-t-il enfin expliqué, « nous sommes confrontés à un défi financier de taille à l’aune de 2023, avec un besoin de 4,6 milliards de dollars pour répondre de manière adéquate aux besoins humanitaires du pays ». Il s’est de ce fait inquiété des conséquences de la diminution du financement des opérations en Afghanistan et, parallèlement, a regretté l’insuffisance de progrès dans le redémarrage des initiatives de développement nécessaires de toute urgence, sans lesquelles la situation humanitaire risque de se détériorer davantage. Il a rappelé que l’action humanitaire ne suffit pas pour sauver des vies si les partenaires au développement ne sont pas présents.
Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde), en tant que Présidente du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1988 (2011), a indiqué que, selon le dernier rapport de l’Équipe de surveillance du Comité, 41 personnes sanctionnées occupent des postes ministériels et des postes de direction dans la nouvelle Administration talibane, un nombre qui s’élève à ce jour à plus de 60. L’Équipe de surveillance a également souligné que les relations entre les Taliban et Al-Qaida sont restées étroites et marquées par la présence, tant en Afghanistan que dans la région, des principaux dirigeants d’Al-Qaida et de groupes affiliés. Le 1er août, les États-Unis ont annoncé que le chef d’Al-Qaïda avait été tué fin juillet dans un complexe à Kaboul, mais cela n’a pas encore été confirmé par les Taliban et Al-Qaida, a précisé Mme Kamboj. L’Administration de Kaboul reste à une écrasante majorité talibane, a-t-elle noté. Elle a aussi noté les inquiétudes exprimées parce que ce gouvernement est revenu sur les engagements pris avant sa prise de pouvoir et parce que l’on constate une érosion des droits humains, y compris des droits des femmes et des filles, et l’absence de progrès en matière de gouvernance inclusive.
En ce qui concerne la production de stupéfiants en Afghanistan, le rapport de l’Équipe de surveillance indique que la culture du pavot à opium s’est accompagnée d’un boom de la production et du trafic de méthamphétamine. Il relève aussi que cette culture reste la principale activité économique illicite en Afghanistan. Malgré un décret publié par les Taliban en avril 2022, interdisant la culture, l’utilisation et le trafic de stupéfiants, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a signalé une augmentation de 32% en 2021 de la culture de l’opium alors qu’en 2022, les prix de l’opium ont grimpé en flèche en raison de l’annonce de l’interdiction de sa culture.
L’Équipe de surveillance a également signalé que l’EILL Khorasan (Daech) demeure la principale menace en Afghanistan et dans la région, comme en témoignent ses attaques régulières contre les États voisins, contre les communautés ethniques et religieuses minoritaires dans le pays ou encore contre des ambassades et le personnel diplomatique. En outre, l’EIIL (Daech) conserve le potentiel d’attirer dans ses rangs des Taliban et des combattants étrangers désabusés, renforçant ainsi sa capacité à mener des attaques et à s’emparer de territoires dans le pays, ainsi que le potentiel de créer un soi-disant califat islamique dans la région, a mis en garde Mme Kamboj.
Elle a rappelé que l’objectif visé par le Comité 1988, via les sanctions, est d’appuyer un Afghanistan pacifique, stable et prospère en dissuadant le soutien aux entités terroristes et en appuyant les discussions sur la paix et la stabilité. Une exemption d’interdiction de voyage accordée en avril 2019 à un groupe de Taliban inscrits sur la liste en vue de leur permettre d’engager des discussions sur la paix et la stabilité dans une série de pays a expiré en août 2022, a-t-elle précisé, en expliquant qu’elle n’a pas été prolongée parce que le Comité 1988 n’a pas été en mesure de parvenir à un consensus. Cependant, le Comité est prêt à envisager des dérogations au cas par cas sur la base des résolutions pertinentes et directives du Comité, a assuré la représentante.
Nous continuons d’espérer que le travail du Comité de 1988 pourra aider à créer un environnement propice à la formation d’un Afghanistan pacifique et stable, libéré de l’emprise du terrorisme et de la drogue, a déclaré la Présidente sortante, en soulignant que les travaux du Comité et de l’Équipe de surveillance sont devenus encore plus essentiels pour contribuer à un tel changement en Afghanistan. À l’avenir, elle a souligné la nécessité pour les États Membres de soutenir et d’aider davantage les travaux du Comité et de l’Équipe, comme indiqué au paragraphe 1 de la résolution 2255 (2015) et à l’annexe de la résolution 2611 (2021). Mme Kamboj a salué la décision du Conseil de proroger le mandat des deux organes pour qu’ils continuent à superviser l’application des mesures de sanctions et à soutenir le processus de paix et de réconciliation en Afghanistan.
Mme MAHBOUBA SERAJ, de l’organisation Afghan women’s rights activist, représentante de la société civile, a indiqué que la situation des femmes afghanes avait empiré depuis sa dernière intervention devant le Conseil de sécurité il y a un an. Elle a relevé que les filles ne sont toujours pas autorisées à se rendre à l’école. Les Taliban ont également rétabli l’obligation pour les femmes de couvrir leur visage en public et l’interdiction de sortir sans un gardien masculin. Les femmes « ne peuvent plus se rendre au bureau ou sur leur lieu de travail », a-t-elle informé. Les mesures prises par les Taliban contre les femmes constituent, à son avis, « un renversement complet de l’autonomisation dont ont bénéficié les femmes afghanes au cours des 20 dernières années ». Mme Seraj a également attiré l’attention sur la situation des minorités, qui ont été « bannies de la vie publique et sociale en Afghanistan ».
La militante a par ailleurs dénoncé l’impunité avec laquelle les groupes terroristes agissent dans la région. De l’aveu même de l’ONU, ces entités jouissent d’une plus grande liberté de mouvement en Afghanistan, a-t-elle noté. Elle a insisté sur les dangers de ces développements pour la société internationale dans son ensemble, faisant un parallèle avec la situation à la fin des années 90. À ce titre, elle a condamné le silence gardé et la complaisance de la société internationale.
L’oratrice a, enfin, rappelé la gravité de la situation économique et humanitaire. Notant que 20 millions de personnes sont confrontées à la faim, que 3 millions d’enfants vont être affectés par la malnutrition et que la dette des ménages afghans a été multipliée par 6, elle a estimé que « la majorité de l’Afghanistan vit dans la pauvreté ». Face à cette situation, elle a exhorté le Conseil de sécurité à continuer de fournir une aide vitale à son peuple. La communauté internationale doit en outre faire en sorte que l’aide humanitaire ne soit pas détournée, a-t-elle insisté. Si elle a encouragé les États à discuter avec les Taliban, elle les a implorés de garder à l’esprit les intérêts du peuple afghan.
Mme ANNIKEN HUITFELDT, Ministre des affaires étrangères de la Norvège, s’est émue de ce que l’Afghanistan soit le seul pays au monde où les filles se voient refuser l’accès à l’éducation. Pour elle, le Conseil de sécurité doit s’appuyer sur la condamnation unanime de cette privation et ce déni de droit fondamental pour exhorter les Taliban à faire machine arrière. Ensemble, nous devons communiquer clairement nos attentes aux Taliban, a-t-elle plaidé. La Ministre a été d’avis qu’il faut maintenir le dialogue avec les Taliban, même s’ils ont pris le pouvoir par la force, car il est nécessaire de parler à ceux qui sont au pouvoir, en le faisant « à notre manière et en nous gardant d’octroyer une once de légitimité aux Taliban ». Elle a rappelé qu’en début d’année, la Norvège a invité les Taliban à se rendre à Oslo et que « beaucoup ont été surpris et ont même réagi avec colère ». Elle a dit rester pourtant convaincue que les enjeux en Afghanistan sont trop importants pour que nous fermions les yeux. Selon Mme Huitfeldt, l’histoire enseigne que personne ne profite d’un pays qui sombre dans la guerre civile ou devient un lieu où prospèrent des groupes terroristes. Aujourd’hui, l’État islamique représente une menace croissante en Afghanistan, a-t-elle ajouté à ce propos, estimant que si cette menace n’est pas contenue elle se propagera plus largement dans la région et au niveau international.
Ainsi, a-t-elle dit, les Taliban doivent veiller à ce que le territoire afghan ne soit pas utilisé pour planifier ou financer des actes terroristes, ou pour abriter ou entraîner des terroristes. La Ministre norvégienne a jugé essentiel que le Conseil de sécurité reste uni pour soutenir le peuple afghan et sache se montrer pragmatique et efficace. Au cours des deux dernières années, la Norvège a été porte-plume sur le dossier afghan au Conseil, a-t-elle rappelé, en soulignant son objectif principal qui était de doter la MANUA d’un mandat couvrant réellement tous les piliers de la Charte des Nations Unies. Mme Huitfeldt a insisté sur le fait que la MANUA doit à présent traduire en actes internationaux conjoints le mandat fort dont elle est désormais dotée. Le Conseil doit également continuer d’écouter les voix afghanes, a-t-elle encore demandé. Enfin, la Ministre a rappelé que l’Afghanistan fait face à un nouvel hiver rigoureux, plus des deux tiers de la population afghane ayant besoin d’une aide humanitaire à court et moyens termes. « Les Taliban imposent des restrictions aux droits humains en violation des obligations internationales de l’Afghanistan et l’espoir que de nombreux Afghans puissent vivre bientôt dans un pays stable et sûr s’estompe », a-t-elle reconnu. Elle a conclu en déclarant que si le peuple afghan n’a pas encore perdu tout espoir, le Conseil de sécurité leur doit de ne pas baisser les bras.
M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a constaté qu’en dépit des engagements pris par les autorités afghanes de facto, le manque de représentativité de la diversité du peuple afghan dans le paysage politique persiste, tant ethnique que sociale, l’inclusion des femmes dans les structures de gouvernance n’évoluant pas. À son tour, M. Biang a souligné le caractère crucial de l’éducation des filles afghanes et leur accès à l’enseignement secondaire, appelant les autorités de facto à prendre des mesures « quant à l’effectivité du respect de ce droit à l’éducation, en permettant la fréquentation scolaire des filles à tous les échelons ».
Des générations de jeunes garçons afghans, appelés à être les adultes de demain, ne doivent pas grandir en pensant qu’il est normal de mettre les femmes en marge de la société, a-t-il ajouté. Le représentant gabonais a plaidé pour que la communauté internationale poursuive ses efforts pour faire comprendre aux Taliban que la marginalisation des femmes et des filles, qui représentent une frange importante de la population afghane, prive le pays de véritables acteurs économiques, capables de jouer un rôle moteur dans la croissance. À cet égard, il a salué les efforts de la MANUA, d’OCHA, de l’équipe de pays des Nations Unies et des organisations non gouvernementales afghanes et internationales, visant la promotion des droits des femmes et leur insertion dans la société.
Après avoir appelé les autorités de facto à intensifier leurs efforts dans la lutte contre le terrorisme et dans la protection des populations, « qui relèvent de leur responsabilité », M. Biang a invité les donateurs à poursuivre leurs efforts en faveur du relèvement de l’économie afghane. « Le Fonds d’affectation spéciale, géré par le PNUD, reste une plateforme de financement essentielle pour le Cadre transitoire de coopération des Nations Unies pour l’Afghanistan de 2022 », a-t-il encore souligné. Il a également condamné tout entrave à l’accès de l’aide et les harcèlements à l’encontre du personnel humanitaire; concluant son intervention en réitérant l’exigence d’un dialogue entre les forces vives afghanes: « un Afghanistan stable, prospère ne peut se construire sans les femmes, ainsi que toutes les autres franges de la société », a-t-il dit.
M. ZHANG JUN (Chine) a estimé que l’Afghanistan est à la croisée des chemins s’agissant de l’édification de la nation afghane. Il a exhorté les Taliban et la communauté internationale à coopérer pour combattre résolument le terrorisme et éviter que des groupes terroristes reviennent dans le pays. Son pays étant voisin de l’Afghanistan, le représentant chinois a exhorté la communauté internationale à faire un front uni, à rejeter le deux poids, deux mesures et à éviter la politisation pour que ce pays ne redevienne pas une plaque tournante des mouvements et groupes terroristes. Il a exhorté les Afghans à se débarrasser de toutes les forces terroristes et à assurer la sécurité des populations et des diplomates. Il a appelé à faire montre de la plus grande vigilance face à la prolifération des armes et munitions avant d’espérer que la MANUA pourra renforcer sa coopération avec l’Afghanistan pour faire face à ce problème.
Rappelant que 23,8 millions d’Afghans auront besoin d’aide humanitaire en 2023, soit une hausse de 4 millions par rapport à 2022, le représentant a salué la résolution instaurant une exception humanitaire aux sanctions imposées. Néanmoins, il a regretté que les obstacles à la distribution de l’aide humanitaire en raison des sanctions unilatérales soient toujours réels en dépit de l’adoption de la résolution 2615. Le représentant a exhorté les Taliban à entendre les légitimes requêtes de la communauté internationale s’agissant de l’accès aux emplois et à l’éducation pour les femmes en précisant que les Taliban doivent comprendre que cela est essentiel pour la stabilité et les progrès de l’Afghanistan. « Nous devons maintenir le dialogue et la coopération en faisant preuve de patience car ce n’est qu’en collaborant avec le Gouvernement par intérim que nous pourrons exercer une influence louable » a encore ajouté le représentant chinois. C’est pourquoi il a regretté que le Conseil de sécurité n’ait pu trouver un accord sur des dérogations permanentes au régime de sanctions.
Mme AMIERA ALHEFEITI (Émirats arabes unis) a concédé que, face aux derniers développements et à l’absence de réponse des autorités afghanes de facto aux appels du Conseil, il serait tentant pour la communauté internationale de mettre fin à son engagement et de chercher à isoler le pouvoir afghan. Cependant, les Émirats arabes unis persistent à penser qu’il n’y a pas d’alternative à un dialogue pragmatique avec les autorités de facto. L’isolement ne fera que renforcer leurs positions, voire pousser les Taliban à adopter des positions encore plus extrêmes, a-t-elle mis en garde. Elle a aussi appelé à se concentrer sur les domaines où il est possible d’obtenir des résultats concrets, citant la récente Conférence internationale sur l’éducation des femmes afghanes, qui s’est tenue à Bali, comme exemple de recherche de moyens permettant aux acteurs internationaux d’opérer un réel changement. À cet égard, elle a salué l’activation du Fonds afghan annoncée en septembre dernier.
Le renouvellement du mandat de la MANUA sera l’occasion pour la communauté internationale de parler d’une seule voix et d’adresser un message clair et ferme aux parties prenantes afghanes, a-t-elle souligné. Malgré des circonstances sans précédent, la MANUA s’est acquittée sur le terrain de tous les aspects de son mandat, a relevé Mme Alhefeiti, en émettant l’espoir que le Conseil pourra utiliser l’occasion de ce renouvellement pour examiner les forces et faiblesses du mandat, évaluer ce dont la Mission a besoin et éviter la création de fausses dichotomies entre les priorités liées au travail de la Mission. La représentante a également remarqué que l’Afghanistan est une étude de cas qui démontre à quel point les effets des changements climatiques peuvent exacerber la fragilité et semer les graines de l’insécurité. Le mandat de la MANUA inclut la surveillance des effets délétères de la sécheresse pour permettre à la communauté humanitaire d’adapter ses interventions en vue d’accroître la résilience des communautés afghanes, a-t-elle rappelé à cet égard dans l’attente du rapport de la Mission sur cette question.
M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a souligné la situation critique du peuple afghan et sa « remarquable force et résistance » face aux crises multiples auxquelles il est confronté dans tous les secteurs de la société. Il a noté que, 15 mois après la prise de pouvoir des Taliban, l’activité économique s’est contractée d’environ 30% et que le système bancaire s’est effondré tandis que le chômage et l’inflation ont augmenté. Il a dénoncé les politiques discriminatoires qui ont écarté les femmes et les filles de la vie publique. La population, a-t-il indiqué, est plongée dans la pauvreté et devient de plus en plus dépendante de l’assistance humanitaire, qui est déjà confrontée à des difficultés d’acheminement. Compte tenu des informations reçues depuis aout 2021, le représentant a estimé que l’isolement de l’autorité de facto ne produira aucun résultat positif. Il a donc estimé important de maintenir des canaux de communications et d’échanger avec les dirigeants de facto, même en l’absence de reconnaissance formelle, tout en continuant à insister sur l’inclusion et sur les droits et libertés des femmes et des filles. À cette fin, il a appelé à réévaluer les interdictions de voyage actuellement en vigueur. Des solutions « créatives » sont également nécessaires pour reconstruire le système bancaire de l’Afghanistan, a-t-il en outre déclaré, évoquant à ce titre le besoin de reconsidérer la situation des actifs afghans détenus à l’étranger.
M. ROBERT A. WOOD (États-Unis) a souligné la menace croissante du terrorisme sur le sol afghan. Il a salué le travail de la MANUA, malgré les circonstances difficiles dans lesquelles elle opère. Rappelant que les Taliban piétinent les droits des femmes et des filles et que de nombreux médias indépendants ont mis la clef sous la porte, le représentant a également parlé de l’interprétation stricte de la charia qui passe par des flagellations, des amputations et des exécutions. Les Afghans continuent de condamner ces décisions des Taliban, a-t-il noté, en estimant que ces derniers s’éloignent de la reconnaissance à laquelle ils aspirent par la communauté internationale. Il a appelé à un réel dialogue avec eux sur toute une série de questions et a demandé à toutes les parties prenantes de respecter les droits humains, comme le fait la MANUA. Il a estimé que la Mission est en bonne posture pour convoquer les acteurs clefs aux niveaux local et national, y compris les femmes et les minorités, pour promouvoir le dialogue sur les questions importantes. Les États-Unis étant le principal bailleur de fonds humanitaire en Afghanistan, le délégué a assuré que cette aide sera toujours impartiale et conforme aux principes humanitaires. Il a noté que la résolution pertinente du Conseil préserve un mécanisme de surveillance pour atténuer le détournement de l’aide humanitaire vers des individus sanctionnés. Saluant le dialogue intra-afghan en cours, le représentant a insisté sur le fait que la reconnaissance des Taliban par la communauté internationale doit commencer par une légitimité aux yeux du peuple afghan.
M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a déploré que l’Afghanistan continue d’être un refuge pour les groupes terroristes, y compris Al-Qaida et certaines de ses entités affiliées tels que les Chabab. Sur ce dernier point, il a assuré que la façon dont le monde réagit à la situation sécuritaire en Afghanistan a des ramifications directes « sur notre propre sécurité, dans la Corne de l’Afrique ». Ainsi, a-t-il jugé important que les Taliban comprennent que, s’ils espèrent obtenir une reconnaissance internationale, ils doivent assurer une paix et une sécurité durables en Afghanistan et veiller à ce que le territoire afghan ne devienne le sanctuaire ou la base arrière d’aucun groupe terroriste. D’autre part, M. Kiboino a demandé à tous les donateurs d’intensifier leur aide, en particulier pendant la saison hivernale qui est habituellement marquée par un accroissement net des besoins humanitaires. Il a souhaité que l’acheminement de l’aide humanitaire en 2023 soit plus pragmatique et efficace, en particulier à l’échelle des communautés. Après avoir préconisé que des solutions soient trouvées pour que les avoirs gelés afghans soient injectés dans l’économie réelle, le représentant a exhorté les Taliban à mettre fin aux pratiques rétrogrades qui barrent l’accès des filles à l’éducation et empêchent les femmes de participer aux activités économiques du pays ou de travailler.
M. FERIT HOXHA (Albanie) a dit que les Taliban n’ont tenu aucun engagement depuis août 2021 et qu’ils ont ainsi trahi le peuple afghan. Il les a aussi accusés de s’employer à inverser systématiquement tous les progrès sociaux obtenus ces dernières années. Illustrant ses propos, il a précisé que les filles n’ont toujours pas accès à l’éducation secondaire et font face à des mariages forcés. « Les artistes et le patrimoine culturel sont menacés », a encore fustigé le représentant, avant de citer l’absence d’État de droit et un mépris du cadre constitutionnel qui aggrave le sentiment d’impunité. Il s’est aussi inquiété des activités du groupe terroriste ISIS Khorasan. Il a demandé aux Taliban à quelles fins sont utilisées les taxes prélevées et comment elles bénéficient aux nécessiteux. Le délégué a exhorté le personnel de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) à ne pas se laisser décourager par les difficultés. Il a exhorté le régime Taliban à lutter contre le terrorisme. « Nous ne pouvons pas rester les bras croisés alors que 38 millions d’Afghans sont privés de leurs droits », a encore insisté le représentant.
M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a noté l’aggravation de la situation en Afghanistan en demandant que cessent la répression, les abus des droits des Afghans et les tentatives d’effacer les femmes et les filles de la vie publique. La mission première du Conseil est de maintenir la paix, or il n’y a pas de paix pour le peuple en Afghanistan, ni pour les acteurs humanitaires ou les pays voisins en prise avec le terrorisme transfrontalier et le trafic de stupéfiants, a-t-il fait remarquer. Nous avons échoué à faire rendre des comptes aux Taliban et à défendre les droits et la dignité du peuple afghan, s’est indigné le représentant en martelant que le Conseil de sécurité a la responsabilité de dénoncer les actes condamnables des Taliban « qui doivent mettre fin à leur règne de terreur contre le peuple afghan ».
Les graves violations des droits humains interviennent dans une situation humanitaire grave, a poursuivi le délégué. En effet, les deux tiers de la population afghane ont besoin d’aide humanitaire, a-t-il rappelé avant de dénoncer les entraves à l’acheminement de cette aide et son détournement. Insistant sur les droits inaliénables des femmes afghanes, il a appelé à un processus de dialogue et à l’ouverture de canaux par la communauté internationale pour leur prêter main forte directement. Le mandat de ce Conseil est clair et sa riposte doit l’être aussi, sans aucune ambiguïté à l’égard des Taliban, a conclu le représentant.
M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMIREZ (Mexique) a noté que l’Afghanistan témoigne de la fragilité qui caractérise le processus de consolidation de la paix. Il a regretté la détérioration actuelle de la situation et l’échec des appels de la communauté internationale à mettre en place un gouvernement incluant femmes et minorités. Il a reconnu la nécessité d’un engagement direct avec les Taliban au titre de la diplomatie préventive. Il a néanmoins noté qu’à mesure que le temps passe, « les perspectives et les aspirations de très nombreuses personnes s’évaporent ». Le représentant s’est inquiété de la réforme du système judiciaire, qui « ne semble pas être propice au progrès ». Il a par ailleurs condamné les attaques terroristes en Afghanistan, soulignant l’importance de la coopération entre les pays de la région et la communauté internationale pour mettre fin à ce fléau. Le représentant a également jugé « inacceptable » la campagne de limitation des droits des femmes et des filles, qui visent à les effacer de la vie publique. Face à la crise humanitaire sans précédent à laquelle est confrontée l’Afghanistan, il a enfin réitéré que l’aide humanitaire ne peut être subordonnée à des considérations politiques.
Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a réitéré son soutien au peuple afghan, notant l’apport du Royaume-Uni pour l’aide humanitaire dans le pays. Elle a rappelé qu’alors que 97% des Afghans vivent dans la pauvreté, la priorité est d’atteindre les personnes dans le besoin. À ce titre, elle a exhorté les Taliban à cesser de s’immiscer dans les activités humanitaires. Elle a également constaté qu’ils n’ont toujours pas honoré leurs engagements en matière de droits humains. Elle a condamné les violations des droits et des libertés des femmes et des filles, qui visent à les évincer de la vie publique et économique. La représentante s’est, enfin, inquiétée de la détérioration de la situation s’agissant du terrorisme et constaté que le nombre de Taliban inscrits sur la liste des sanctions est croissant. Lorsque les Taliban n’honorent pas leurs engagements de lutte contre le terrorisme, ils ne peuvent pas s’attendre à être perçus comme légitimes et à ce que les sanctions soient levées, a-t-elle estimé.
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a assuré Mahbouba Seraj d’avoir pleinement entendu son message, un message clair et sans équivoque qui rappelle que les femmes ne peuvent être écartées du progrès et de l’avenir de l’Afghanistan. Parce que le règlement de la situation en Afghanistan est de ceux qui exigent le soutien de tous, et afin que le peuple afghan puisse envisager l’avenir avec un quelconque degré d’optimisme ou de confiance, ce Conseil doit accorder la priorité à la sécurité et à la réponse aux défis économiques auxquels l’Afghanistan est confronté, a poursuivi le représentant. En raison de la détérioration de la situation sécuritaire et économique dans ce pays, il a en effet appelé à la mobilisation de ses dirigeants, des puissances régionales et la communauté internationale autour d’une action collective, cohérente et coordonnée en faveur du processus de paix national et du développement économique du pays. À cet égard, il a salué les résultats du sixième Sommet de la Conférence pour l’interaction et les mesures de confiance en Asie, qui a eu lieu le 13 octobre à Astana, au Kazakhstan, notant en particulier la proposition du Président ouzbek de former un groupe international de négociateurs de haut niveau impliquant des représentants des autorités afghanes de facto. À son tour, il a exhorté les Taliban à respecter les droits de toutes les filles et femmes à l’éducation, à l’emploi et à la participation à la vie publique et culturelle. Sur les plans humanitaire et économique, le représentant a salué le rôle actif de la MANUA dans le maintien de sa présence sur le terrain aux niveaux existants pour protéger les liens vitaux entre les acteurs internationaux et locaux, créer des compétences locales et faciliter l’accès des organisations humanitaires aux populations dans le besoin.
M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) s’est inquiété de la détérioration de la situation en Afghanistan après 20 ans de guerre, l’arrivée au pouvoir des Taliban et la fuite précipitée des troupes étrangères. Après avoir fustigé « les tristes résultats de la campagne internationale », marquée par de « nombreux crimes de guerre commis par les militaires américains et de l’OTAN soigneusement étouffés », le représentant russe a indiqué que le Ministère russe des affaires étrangères a préparé un livre blanc sur la question, qui peut être consulté sur son site Web. Par ailleurs, le représentant russe a fustigé l’attitude des collègues occidentaux, menés par les États-Unis, qui consiste à blâmer les Taliban pour la situation actuelle dans le pays alors que ces derniers n’ont pas eu les moyens depuis le 15 août 2021 de résoudre les problèmes de l’Afghanistan. Au-delà de la situation politique intérieure compliquée, le représentant russe s’est inquiété des risques de sécurité préoccupants posés par l’émergence du groupe terroriste EIIL-Khorassan, qui commet de plus en plus d’attentats terroristes visant des représentants de minorités religieuses et ethniques, dont des femmes et des enfants. Il s’est aussi dit préoccupé par la nouvelle tendance des attaques contre les ambassades et leurs employés et la menace pour la sécurité du personnel de la MANUA.
Tout en se félicitant de l’adoption de la résolution 2615, visant à faciliter la fourniture de l’aide humanitaire à l’Afghanistan sans conditions préalables, le représentant russe a dit regretter que les donateurs occidentaux ne semblent pas être intéressés à étendre l’aide au-delà des besoins de relèvement de base. Il a souligné les contradictions des Occidentaux qui prétendent vouloir aider le peuple afghan, revendiquer des droits pour les femmes et les filles, tout en rejetant catégoriquement la moindre opportunité de contribuer au développement du pays, à la restauration des écoles et des hôpitaux, à la construction de routes reliant les provinces ou les villes avec les zones agricoles. Il a aussi fustigé « les tentatives des États-Unis et d’autres grands donateurs de s’approprier les avoirs afghans ». C’est pourquoi, le représentant a demandé la restitution immédiate des « fonds volés au peuple afghan », y compris ceux des femmes et des filles qu’ils prétendent vouloir aider. Le représentant a exhorté les États-Unis et leurs partenaires à comprendre que leurs méthodes d’influence sur des régimes qu’ils détestent, par le biais de sanctions unilatérales, de pressions politiques et économiques et d’ultimatums sans fin, ont perdu de leur efficacité.
Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a indiqué que la situation des droits humains ne cesse de se détériorer en Afghanistan, où « les femmes et les filles continuent d’être privées de leurs droits les plus fondamentaux et sont systématiquement exclues de l’espace public ». Les dernières mesures édictées, telles que l’exclusion des femmes des parcs de Kaboul, des bains publics et des stades, restreignent encore un peu plus leur liberté de mouvement. Elle s’est dite également très préoccupée des informations relatives à la possible exclusion des femmes de l’Université. « Les scènes de flagellations, lapidations et autres châtiments publics réitérés, ainsi que l’exécution publique d’un homme dans la ville de Farah, le 7 décembre, au mépris des droits les plus élémentaires, sont particulièrement choquantes. » Nous ne pouvons pas nous habituer à ces violations quotidiennes, dont les Taliban sont et doivent être tenus responsables, a-t-elle tranché. Enfin, la déléguée a dit que la France reste mobilisée pour soutenir la MANUA dans la réalisation de l’ensemble de son mandat et pour soutenir les femmes et les hommes qui travaillent aux côtés du peuple afghan.
M. SANJAY VERMA (Inde) a expliqué que l’Inde a un intérêt direct à assurer le retour de la paix et de la stabilité en Afghanistan, en tant que pays voisin et partenaire de longue date. Parmi les principales priorités de l’Inde en Afghanistan, il a cité la fourniture d’une aide humanitaire immédiate au peuple afghan, la formation d’un gouvernement véritablement inclusif et représentatif, la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue et la préservation des droits des femmes, des enfants et des minorités. Ces critères ont également été définis par la résolution 2593 (2021) du Conseil de sécurité qui guide l’approche de la communauté internationale à l’égard de l’Afghanistan, a souligné le représentant.
L’Inde surveille de près la situation en matière de sécurité en Afghanistan et collabore activement avec la communauté internationale sur les questions liées à l’Afghanistan, a assuré le représentant, qui a fait part de son inquiétude face aux attentats terroristes ayant ciblé des espaces publics tels que des lieux de culte et des établissements d’enseignement, en particulier pour les minorités, ainsi que des locaux diplomatiques. Invoquant les dispositions de la résolution 2593, il a rappelé que ce texte exige sans équivoque que le territoire de l’Afghanistan ne soit pas utilisé pour abriter, entraîner, planifier ou financer des actes terroristes, en particulier des individus et des entités terroristes proscrits par le Conseil de sécurité de l’ONU, y compris Lashkar-e-Tayyiba et Jaish-e-Mohammed. La menace du trafic de drogue est étroitement liée à la question du terrorisme, a-t-il souligné en appelant à renforcer la coopération internationale pour démanteler les réseaux de trafic
Le représentant des États-Unis a repris la parole pour condamner la décision visant à interdire l’accès à l’université pour les femmes afghanes.
Son homologue du Royaume-Uni a également repris la parole pour condamner, à son tour, la décision des Taliban d’interdire l’accès des femmes aux universités. Elle a également regretté les déclarations de ceux qui blâment l’Occident pour la situation en Afghanistan au lieu de contribuer aux efforts de l’ONU dans le pays.
M. NASEER AHMAD FAIQ (Afghanistan) a condamné la décision des Taliban d’interdire l’accès des femmes à l’université, qui constitue la violation d’un droit humain fondamental. Il a constaté l’absence de progrès quant à la situation sociale, économique, sécuritaire et politique en Afghanistan en raison de l’échec des Taliban à répondre à la crise actuelle. Le délégué a également regretté que les autorités de facto aient rétabli leurs pratiques draconiennes, cruelles et inhumaines du passé. Le système judiciaire manque de transparence, a-t-il déploré, avant de condamner la suppression de la liberté d’expression, la privation de l’accès des filles à l’enseignement et les atteintes aux droits fondamentaux des femmes. Il s’est également inquiété de la modification des programmes scolaires pour promouvoir l’idéologie religieuse qui donnera lieu à la radicalisation et à l’extrémisme des générations futures. Il a par ailleurs noté l’impossibilité des Taliban de recruter les personnes disposant de compétences techniques à des postes gouvernementaux. Le représentant a ensuite constaté la détérioration de la situation sécuritaire en Afghanistan, notant que les Taliban n’ont rien fait pour lutter contre ce phénomène. C’est pourquoi il a exhorté à lutter contre l’impunité, soulignant la responsabilité de l’Envoyé spécial et de la MANUA. La crise économique continue également d’être difficile, a-t-il noté, avant d’appeler à mettre en place des mécanismes de rapport et de suivi pour garantir que l’assistance humanitaire parvienne aux nécessiteux. Si elle est nécessaire à court terme, il ne saurait s’agir d’une solution pérenne qui puisse être substituée à un système légitime de gouvernance, a estimé M. Faiq. Le représentant a appelé en conclusion à reprendre le dialogue en faveur d’une paix durable en tenant compte des intérêts de la société afghane.
M. AMIR SAEID JALIL IRAVANI (République islamique d’Iran) a réitéré la position de son pays, en soulignant que les avoirs gelés « appartiennent au peuple et doivent être restitués sans condition pour aider l’économie afghane ». Le représentant a accusé les États-Unis d’invoquer des motifs infondés « pour justifier leurs actes illégaux, y compris le blocage continu d’actifs essentiels à la relance économique » de l’Afghanistan. Les régimes de sanctions ne doivent pas entraver les tentatives de reconstruction de l’économie afghane, a insisté le représentant iranien, qui a ensuite salué les efforts menés par la MANUA pour, avec les autorités de facto, aider le peuple afghan, notamment en travaillant à l’intensification de la réponse humanitaire. Dans le même temps, a ajouté M. Iravani, les autorités de facto doivent respecter leurs obligations internationales, en particulier en veillant à ce que les femmes et les filles ont accès à l’éducation. Selon lui, il est un fait que si la communauté internationale ne continue pas à soutenir la reprise économique de l’Afghanistan, la situation actuelle continuera de créer un environnement favorable à l’essor des groupes terroristes et des trafiquants de drogue, lesquels pourront exploiter et recruter des personnes vulnérables afin de poursuivre leurs objectifs destructeurs sur le plan régional et international. Enfin, le représentant a tenu à rappeler que son pays offre une éducation et une formation gratuites à tous les étudiants afghans vivant en Iran. Selon les estimations, a-t-il indiqué, l’Iran fournit un milliard de dollars de subventions annuelles pour accueillir et abriter 5 millions d’Afghans. En conclusion, M. Iravani a estimé qu’en vertu du principe de responsabilité partagée, « d’autres pays, en particulier ceux qui affirment soutenir les droits humains des Afghans, en particulier des femmes et des filles, devraient accepter des réfugiés ».
M. NURILLA ABDULLAYEV (Ouzbékistan) a appelé à intensifier le dialogue avec le gouvernement intérimaire et en même temps à continuer à exiger des autorités afghanes le respect de ses engagements clefs. À cette fin, il a proposé de créer, sous les auspices de l’ONU, un groupe de négociation international de haut niveau sur le règlement de la question afghane (ING) en précisant que cette initiative a été lancée par le Président ouzbek Shavkat Mirziyoyev lors du sixième sommet de la Conférence sur l’interaction et les mesures de confiance en Asie, qui s’est tenue à Astana le 18 octobre 2022. Il a expliqué que cette initiative s’appuie sur l’expérience de l’Ouzbékistan d’engagement avec les Taliban depuis leur arrivée au pouvoir. « Grâce au dialogue avec eux, nous avons réussi à faire ouvrir des écoles pour filles dans les provinces du Nord », s’est félicité le représentant, avant de noter que pour la première fois au cours des 25 dernières années, a été ouverte une route terrestre pour le transit des marchandises vers les ports maritimes du Pakistan et retour par l’Afghanistan.
« Au cours des 10 derniers mois, 600 000 tonnes de marchandises ont été transportées dans les deux sens le long de cette route de transit, sans aucun incident de sécurité », a encore illustré le représentant, avant de citer aussi la mise en œuvre d’un partenariat dans la lutte contre le terrorisme. Il a expliqué que les Taliban participent à ce partenariat en partageant des informations relatives aux risques sécuritaires, aux menaces et aux attaques terroristes. Il a aussi cité la création d’une plateforme logistique dans la ville frontalière de Termez pour acheminer l’aide humanitaire non seulement en Afghanistan, mais aussi dans d’autres pays de la région, laquelle est maintenant activement empruntée par diverses agences de l’ONU.
M. AKAN RAKHMETULLIN (Kazakhstan) a jugé important de maintenir une étroite coopération avec les autorités de facto de l’Afghanistan, malgré l’absence d’une reconnaissance officielle et ce, pour le bien du peuple afghan. Eu égard à la nature et à la spécificité desdites autorités, la MANUA devrait se concentrer sur les éléments de son mandat les moins à même de les irriter, tels que l’acheminement de l’aide humanitaire ou l’aide au développement. Il sera temps plus tard, dans un environnement plus propice, de se pencher sur les autres aspects dudit mandat, a tranché le délégué. Enfin, il a indiqué que son pays participera à la mise en œuvre d’un programme visant à fournir une formation universitaire aux Afghanes.
M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a rappelé que la paix et la stabilité en Afghanistan sont essentielles pour le Pakistan. Il a estimé que l’engagement avec les autorités intérimaires constitue la meilleure alternative pour atteindre la paix et la sécurité ainsi que les différents objectifs de la région, notant que l’isolement et les mesures coercitives n’ont pas fait leurs preuves. L’effondrement de l’économie afghane est lié au fait qu’il n’existe plus d’aide extérieure, a-t-il estimé. La priorité doit donc être de résoudre la crise humanitaire afghane. Le représentant s’est félicité de la résolution 2615 du Conseil de sécurité qui vise à créer des exceptions humanitaires pour le régime des sanctions. Le plan d’action de 4 milliards de dollars de l’ONU doit être pleinement financé, a-t-il ajouté en misant aussi sur l’aide du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour renforcer l’activité économique du pays. Il a également évoqué la question du système bancaire et a proposé d’injecter les avoirs afghans détenus à l’étranger dans le système économique afghan. Le représentant a souhaité que reprenne la reconstruction des infrastructures ainsi que la mise en œuvre des projets de connectivité, ce qui peut constituer une partie essentielle de la reprise économique en Afghanistan. Il a noté que les pays voisins sont prêts à cette reprise, estimant que les organisations internationales et les banques ne devraient pas être dissuadées d’y participer.
Le délégué du Pakistan a assuré que son pays continuera de contribuer à l’assistance humanitaire, sans concession sur le droit des femmes et l’accès à l’éducation. Il s’est dit préoccupé, à cet égard, par l’annonce concernant l’accès des femmes à l’enseignement supérieur. Il a en outre relevé que, si les autorités intérimaires ne souhaitent pas partager le pouvoir, elle pourrait néanmoins bénéficier d’une meilleure gouvernance en acceptant la participation des experts. Le représentant a, enfin, exprimé la préoccupation de la communauté internationale face à la hausse de la violence terroriste en Afghanistan et depuis le territoire de ce pays. La principale menace découle du Tehrik-eTaliban Pakistan (TPP) et de Daech, a-t-il estimé, exhortant la communauté internationale à travailler avec le Gouvernement intérimaire pour éliminer ces groupes. Il a également appelé la MANUA à coopérer avec le Gouvernement intérimaire, notamment pour mettre en œuvre le programme de collecte des armes. Il a, enfin, estimé essentiel de maintenir une approche régionale unifiée.
La représentante des Émirats arabes unis a repris la parole pour s’inquiéter de la décision « injuste » d’interdire l’accès des femmes à l’université. Elle a appelé le Conseil de sécurité à parler en détail de ce sujet.