Conseil de sécurité: « L’incident d’hier en Pologne » est un « rappel effrayant » de la nécessité d’empêcher toute escalade du conflit en Ukraine, selon Rosemary DiCarlo
Il est « impérieux » de faire cesser la guerre en Ukraine, dont les infrastructures civiles sont lourdement endommagées, après certains des pires bombardements qu’ait connus ce pays depuis le début du conflit qui l’oppose à la Fédération de Russie, a déclaré, cet après-midi, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, devant le Conseil de sécurité, au lendemain d’un tir de missile qui a touché la Pologne.
« L’incident survenu hier en Pologne, près de la frontière ukrainienne, est un rappel effrayant de la nécessité absolue d’empêcher toute nouvelle escalade », s’est alarmée Mme Rosemary DiCarlo avant de faire état d’un bilan –établi par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme–, de 16 631 victimes, dont 6 557 morts et 10 074 blessés, depuis l’invasion de l’Ukraine le 24 février dernier.
Mme DiCarlo a dénoncé les « attaques incessantes » prenant pour cible les infrastructures civiles, rappelant que celles-ci sont interdites par le droit international humanitaire, de même que le transfert de centaines de milliers d’Ukrainiens en Russie avant le retrait des troupes russes de Kherson. Si l’assistance à la population a pu faire une différence, reste que celle-ci est extrêmement difficile à prêter dans les zones contrôlées par la Russie, a déploré la haut fonctionnaire.
Alors que l’Initiative céréalière de la mer Noire, dont dépendent une quarantaine de pays, expire le 19 novembre prochain, la Secrétaire générale adjointe et plusieurs membres du Conseil ont souhaité qu’elle soit prolongée, après le retrait momentané de la Russie, suscité par l’attaque contre le pont de Crimée traversant le détroit de Kertch.
Tandis que l’Inde a dit avoir fait parvenir 12 convois d’aide à l’Ukraine, la France a annoncé une contribution d’un montant de 7,5 millions d’euros pour financer l’acheminement par le Programme alimentaire mondial (PAM) d’engrais vers l’Afrique. Ce à quoi la Russie a rétorqué qu’il s’agissait en réalité d’engrais qu’elle-même proposait d’envoyer à titre gracieux aux pays en développement.
La reprise, le 29 octobre, de l’Initiative céréalière est un signal qui révèle que même en temps de guerre, les canaux du dialogue et de la diplomatie restent ouverts, s’est félicité le Gabon, en plaidant aussi pour des négociations de bonne foi en vue de parvenir à un cessez-le-feu. Mais le Kenya a prié aujourd’hui le Secrétaire général de l’ONU de faire rapport sur les obstacles qui ont entravé les exportations d’engrais et de céréales depuis la Russie et l’Ukraine.
Tous les membres du Conseil sont les bienvenus en Ukraine, sauf la Russie qui doit s’en retirer, a tranché l’Ukraine, pour qui la sécurité régionale sera rétablie dès que Moscou ne sera plus en mesure de poursuivre sa guerre. Comme condition au dialogue, ce pays a exigé le respect par son belligérant de la Charte des Nations Unies, le retour de la souveraineté de Kiev sur l’ensemble du territoire ukrainien, le retrait de toutes les troupes russes, l’établissement des responsabilités pour tous les crimes de guerre qu’elles ont commis, enfin, la création d’une plateforme pour évaluer les dégâts environnementaux causés par la guerre ainsi que les réparations y afférentes.
S’agissant de l’incident survenu hier en Pologne, qui a fait deux victimes, la Russie a accusé ce pays et l’Ukraine de chercher à provoquer une confrontation directe entre elle et l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Son représentant a également regretté que les soupçons se soient vite portés sur Moscou, alors que les images ne laissent aucun doute quant au fait que ce sont des missiles ukrainiens qui se sont abattus en Pologne, confirmant la « mauvaise réputation » dont souffre la défense aérienne ukrainienne.
Accusant également les nations occidentales de se servir de l’Ukraine comme d’un laboratoire expérimental pour divers types d’armements, la délégation russe a soutenu par ailleurs que des équipements militaires occidentaux étaient utilisés pour des frappes dirigées contre des cibles civiles dans des villes de la région de Donetsk, « et même de la région de Belgorod, en Russie ».
Préoccupés par les répercussions dévastatrices de ces attaques sur la population civile, la plupart des intervenants ont lancé des appels à une relance du dialogue et de la diplomatie, les Émirats arabes unis saluant les appels immédiats au calme et à la retenue qui ont permis d’éviter une nouvelle escalade au lendemain du tir de missile qui s’est abattu en Pologne.
Le Royaume-Uni a jugé pour sa part qu’un pas important vers la justice en Ukraine serait fait dès que serait créé un mécanisme international « aux fins de la réparation des dommages, pertes ou préjudice résultant des faits internationalement illicites commis par la Fédération de Russie en Ukraine ou contre l’Ukraine ». L’Assemblée générale des Nations Unies a en effet adopté le 14 novembre dernier, par 94 voix pour, une résolution dans laquelle elle recommande la création de ce registre international.
Les accusations cyniques de la Russie, selon lesquelles l’Ukraine fabriquerait une « bombe sale » ont été discréditées par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), a lancé l’Estonie, qui s’exprimait au nom des pays baltes. La Secrétaire générale adjointe a indiqué que le Directeur général de cette agence des Nations Unies prévoyait de dépêcher des inspecteurs dans plusieurs centrales nucléaires en Ukraine, dont le représentant a demandé aujourd’hui que celle de Zaporijia soit placée sous le contrôle de l’AIEA.
De l’avis de la France, Moscou vise désormais les centrales électriques et hydroélectriques et les réseaux de chauffage, situés loin derrière la ligne de front, avec l’objectif assumé de « briser la résistance » d’un peuple « qui lutte pour sa liberté », stratégie vouée à l’échec. Cette délégation a en outre annoncé l’organisation conjointe avec l’Ukraine, le 13 décembre prochain, d’une conférence en soutien à ce pays.
MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ DE L’UKRAINE
Déclarations
Mme ROSEMARY A. DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a indiqué qu’au cours des derniers jours, les Ukrainiens ont essuyé certains des pires bombardements depuis le début de la guerre, avec des conséquences et des souffrances pour les civils. « L’incident survenu hier en Pologne, près de la frontière ukrainienne, est un rappel effrayant de la nécessité absolue d'empêcher toute nouvelle escalade », a-t-elle déclaré. Elle a signalé que, selon le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, il y aurait eu 16 631 victimes, dont 6 557 tuées et 10 074 blessées, depuis l’invasion de l’Ukraine en février. Dénonçant les attaques incessantes ciblant les infrastructures civiles, elle a tenu à rappeler que celles-ci sont interdites au regard du droit international humanitaire. Parmi les changements de la situation sur le terrain, la haut fonctionnaire a indiqué que la ville de Kherson est revenue sous le contrôle du Gouvernement ukrainien, mais que les attaques se poursuivent dans les régions de Donetsk et Louhansk. Craignant une nouvelle escalade, elle a évoqué l’incident d’hier en Pologne et présenté ses condoléances à ce pays.
Mme DiCarlo a ensuite déclaré que Kiev a payé un lourd tribut à ce conflit, une bonne partie de ses infrastructures ayant été détruites. Mais l’assistance humanitaire a permis à plus de 80 000 personnes de recevoir des vivres et des produits de base, et près de 500 générateurs ont été distribués aux hôpitaux, aux écoles et aux cliniques.
Il n’en reste pas moins extrêmement difficile d’aider les civils se trouvant dans les zones encore sous contrôle russe, qui empêche l’accès humanitaire. Le droit international humanitaire énonce qu’il faut laisser passer l’assistance à ceux qui sont dans le besoin, a encore martelé la Secrétaire générale adjointe, qui a décrit, en outre, la situation dramatique des enfants, dont 279 sont portés disparus, tandis que certains autres ont été transférés en Russie. Le Haut-Commissariat des Nations Unies des droits de l’homme continue à répertorier les situations d’atteinte aux droits humains, et a vérifié 57 cas de violences sexuelles par les troupes russes, et 9 aux mains de l’armée ou du personnel militaire ukrainien. Des enquêtes sont encore en cours en Ukraine, a-t-elle précisé. Elle a salué les échanges de prisonniers intervenus entre l’Ukraine et la Russie, dont le dernier remonte au 11 novembre, rappelant les dispositions de la Troisième Convention de Genève. Dans ce contexte, la Secrétaire générale adjointe a engagé les parties à faciliter l’accès sans entrave aux détenus.
Des millions de tonnes de céréales ont été exportées alors qu’une quarantaine de pays dépendent de l’Initiative céréalière de la mer Noire, a ensuite indiqué Mme DiCarlo, qui a déclaré que le Secrétaire général jugeait essentiel que ces produits retombent dans les marchés mondiaux dans les meilleurs délais. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), par le biais de son Directeur général, a par ailleurs mis en garde quant au sort de la centrale nucléaire de Zaporijia et entend dépêcher des inspecteurs dans d’autres centrales ukrainiennes.
Bien avant l’invasion, le 24 février, l’ONU et d’autres, avaient à l’esprit les conséquences potentielles de ce conflit. Les infrastructures ukrainiennes ont été détruites et il est aujourd’hui très difficile d’éviter davantage de décès et de destructions, rendant désormais impérieux de faire cesser cette guerre, a plaidé Mme DiCarlo.
Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a présenté ses condoléances au peuple polonais pour les deux victimes faites hier par des tirs de missiles ayant atteint la Pologne. Selon elle, cette tragédie ne serait jamais arrivée si la Russie n’avait pas provoqué la guerre en Ukraine. Elle a indiqué que 90 missiles ont été tirés sur Kiev ou d’autres sites ces derniers jours, ciblant les infrastructures civiles et privant une bonne partie de la population d’eau, d’électricité et de chauffage. La représentante a accusé M. Vladimir Putin de vouloir ainsi forcer l’Ukraine à se soumettre.
La déléguée a décrit les souffrances qu’elle a constatées sur le terrain lors de sa visite, indiquant que le Président Zelenskyy lui avait confié qu’il aspirait à une paix juste, fondée sur la Charte des Nations Unies et ses principes. Elle a dit que, pendant que les civils ukrainiens souffrent, un homme est assis confortablement dans son fauteuil à Moscou et aurait juste besoin de dire un mot pour que cessent ces atrocités. Mme Thomas-Greenfield a relevé que les répercussions de la guerre s’étendent au-delà de l’Ukraine, notamment avec la crise alimentaire mondiale. Des agriculteurs ukrainiens lui ont dit qu’ils entendaient poursuivre leur travail et continuer de servir de grenier des pays en développement. Elle a appelé à poursuivre l’Initiative céréalière de la mer Noire qui a permis de stabiliser les cours des céréales dans le monde, rappelant qu’elle arrive bientôt à expiration, avant d’appeler la Russie à reconduire cette mesure qui sauve des vies.
M. FERIT HOXHA (Albanie) a fait observer qu’au cours des neuf derniers mois -le temps d’une grossesse- la Fédération de Russie a créé une catastrophe aux proportions terribles. Il a noté que des missiles se sont abattus hier en Pologne, l’un d’eux tuant deux personnes dans une ferme. « Tant que la guerre continue, il y a un risque de débordement, par accident ou intentionnellement », a poursuivi le représentant. Il a salué le plan de paix en 10 points présenté par le Président ukrainien lors du Sommet du G20. Notant la décision de la Fédération de Russie de retirer ses troupes de Kherson, le représentant a ironisé sur le fait que les autorités russes avaient assuré que Kherson serait à jamais russe. Kherson restera ukrainienne, a-t-il assuré. Il a également plaidé pour la reconduction de l’Initiative céréalière de la mer Noire.
M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a condamné la nouvelle campagne de frappes de la Russie contre les villes et les infrastructures civiles ukrainiennes. La Russie porte l’entière responsabilité de cette guerre, a-t-il tranché. Cette agression viole la Charte des Nations Unies, et dès le 16 mars, la Cour internationale de Justice (CIJ) a exigé la suspension des opérations militaires de la Russie, a-t-il rappelé. Moscou vise désormais les centrales électriques et hydroélectriques et les réseaux de chauffage, situés loin derrière la ligne de front, avec l’objectif assumé de briser la résistance d’un peuple qui lutte pour sa liberté, a dénoncé le représentant pour lequel cette stratégie est d’ores et déjà un échec, car elle n’entame en rien la résistance du peuple ukrainien, renforçant au contraire sa détermination. La libération de Kherson en est une nouvelle illustration, s’est réjoui M. de Rivière. Selon lui, plus la Russie s’obstine à faire durer cette guerre, plus elle aggrave ses conséquences énergétiques, alimentaires et économiques.
Rappelant les accusations outrancières de la Russie concernant la préparation d’une bombe sale par l’Ukraine, le délégué a dit que les inspections de l’AIEA n’avaient relevé aucune activité ou matière non déclarée. Il a accusé la Russie d’instrumentaliser l’insécurité alimentaire et la malnutrition. Ainsi, après avoir d’abord suspendu pendant quelques jours sa participation à l’Initiative céréalière de la mer Noire, la Russie cherche désormais à conditionner son accord au renouvellement de celle-ci, s’est indigné le représentant, fustigeant un chantage intolérable. Tout doit être mis en œuvre pour que les exportations de céréales ukrainiennes se poursuivent sans entrave, a-t-il insisté. La France se mobilise avec ses partenaires européens dans le cadre des « voies de solidarité » qui ont permis l’exportation, par voie fluviale et terrestre, de près de 15 millions de tonnes de céréales et autres produits alimentaires. La France a annoncé une contribution à hauteur de 7,5 millions d’euros pour financer l’acheminement par le Programme alimentaire mondial (PAM) d’engrais vers l’Afrique. La Russie ne pourra s’exonérer de sa responsabilité pour les crimes commis en Ukraine, a averti en conclusion, le représentant annonçant qu’avec l’Ukraine, elle coorganisera le 13 décembre prochain une conférence en soutien à ce pays.
Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a présenté ses condoléances au peuple polonais et aux familles des blessés et tués lors de l’incident d’hier. Elle a rappelé que la raison de cette tragédie est l’invasion injustifiée et illégale de la Russie contre l’Ukraine. Elle a dénoncé les attaques contre les infrastructures, qui ont laissé les personnes sans eau, électricité, vivres et médicaments. Les attaques russes pourraient violer le droit humanitaire et sont « profondément inhumaines », a déclaré la représentante.
Mme Woodward a estimé que l’adoption, lundi 15 novembre par l’Assemblée générale, d’une résolution encourageant la création d’un registre international des dommages constitue un pas important pour la justice en Ukraine. Alors que la guerre se poursuit, elle a exhorté à prendre en compte ses effets lointains et a apporté son soutien à l’Initiative céréalière de la mer Noire. « Cette guerre est le fruit d’actions unilatérales de la part de la Russie », a poursuivi la représentante, qui a exhorté la Russie à cesser ses hostilités, se retirer de l’Ukraine et s’engager en faveur du dialogue.
Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a jugé préoccupante la situation humanitaire en Ukraine, alors que 40% du système électrique est endommagé et 30% des centrales détruites, ce qui pourrait exacerber la crise humanitaire. La représentante a mis en garde contre les effets globaux sur la chaîne d’approvisionnement. À ce titre, elle s’est ralliée à l’appel visant à proroger l’Initiative céréalière de la mer Noire.
Alors que l’aide humanitaire et les efforts doivent se poursuivre, seul un règlement pacifique durable mettrait un terme aux souffrances, a par ailleurs affirmé la représentante, qui s’est félicitée des déclarations indiquant qu’un accord de paix pourrait être négocié. Les déclarations publiques appelant au calme et à la retenue à la suite des nouvelles émanant de la Pologne ont permis d’éviter l’escalade, s’est-elle félicitée, avant d’ajouter que « cela ne peut être la nouvelle norme ». Elle a, enfin, rappelé la déclaration du G20 visant à la défense du système multilatéral et la Charte des Nations Unies.
M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a estimé que la chute de missiles en Pologne, hier, rappelle que les risques d’une escalade du conflit sont bien réels. La destruction des infrastructures électriques à l’approche de l’hiver compromet d’autres services de base comme l’accès à l’eau, et met en danger la vie de millions de civils ukrainiens, s’est inquiété le représentant. La détérioration des conditions de vie va générer une nouvelle vague de déplacements, alors que 7,8 millions d’Ukrainiens ont déjà été contraints de fuir leur pays et que 6 millions de personnes sont déplacées à l’intérieur du pays. Le représentant a réitéré son appel pour un accès humanitaire sans entrave à la population civile, y compris dans les oblasts occupés où la « loi martiale » a été décrétée. Le conflit ayant eu de graves conséquences sur la santé mentale de la population, il a réitéré l’importance de mettre en place des services de soutien psychosocial à long terme. Concernant la sécurité nucléaire, la situation autour de la centrale de Zaporijjia reste préoccupante, et il est important de créer une zone sécurisée autour de la centrale, comme le propose l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Le représentant a estimé que l’Initiative céréalière de la mer Noire doit se poursuivre, et que l’accord signé pour faciliter l’accès aux marchés mondiaux des produits alimentaires et des engrais russes, y compris l’ammoniac, doit être pleinement mis en œuvre. « Ces accords ont été un signe d’espoir pour trouver une solution au conflit, malgré des désaccords qui semblent insurmontables. » Enfin, ceux qui ont commis des crimes dans ce conflit doivent être traduits en justice, a-t-il estimé. La communauté internationale le doit aux victimes.
M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a rappelé qu’il n’y a pas de solution militaire de long terme en Ukraine et demandé la cessation immédiate des hostilités. Les négociations ne seront pas faciles, surtout si elles sont conformes à la Charte en ce qui concerne la protection de la souveraineté de l’Ukraine, a concédé le délégué. « Mais elles peuvent réussir comme d’autres négociations ont réussi dans l’histoire tourmentée de l’Europe. » Il a demandé le renouvellement et la pérennisation de l’Initiative céréalière de la mer Noire, avant de demander la levée des obstacles à la bonne exportation des engrais et des céréales depuis la Russie et l’Ukraine. Il a demandé au Secrétaire général de faire un rapport sur ces entraves et de le présenter au Conseil. Rappelant la grave sécheresse qui frappe la Corne de l’Afrique, le délégué a déclaré que « nous ne pouvons pas nous permettre de dépenser des fortunes pour des engrais si nous voulons éviter une aggravation de l’insécurité alimentaire l’année prochaine ».
Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a rappelé que depuis le début du conflit, l’Inde n’a cessé d’appeler à la cessation immédiate des hostilités et à la fin de la violence. Elle a assuré que l’Inde a appelé les deux parties à reprendre le chemin de la diplomatie et du dialogue, ayant aussi exprimé son soutien à tous les efforts diplomatiques pour mettre fin au conflit. L’Inde, a-t-elle ajouté, est prête à soutenir tous les efforts visant à la désescalade. La représentante a par ailleurs indiqué que son pays a jusqu’à présent fait 12 envois d’aide humanitaire à l’Ukraine et qu’elle se tient prête à faire davantage. La déléguée a fait remarquer que les effets du conflit ukrainien ne se sont pas limités à l’Europe, puisque le Sud global est particulièrement confronté à de graves conséquences économiques. « Nous espérons que l’accord global sur les céréales et les engrais de la mer Noire, facilité par l’ONU, sera renouvelé dans les prochains jours et sera mis en œuvre par toutes les parties et dans tous les pays. »
Mme LILLY STELLA NGYEMA NDONG (Gabon) s’est désolée du fait qu’après neuf mois de guerre, les signaux d’une désescalade et d’une cessation des combats ne semblent pas se profiler à l’horizon. Elle a en revanche salué la reprise des exportations de céréales, après une brève suspension. Elle s’est faite l’écho de l’appel du Secrétaire général en vue du renouvellement de cet accord important et de sa pleine mise en œuvre, de manière équilibrée. La reprise de l’accord sur les céréales est un signal qui révèle que même en temps de guerre, les canaux du dialogue et de la diplomatie restent ouverts, a fait remarquer la représentante. Rappelant les conséquences socioéconomiques et humanitaires de la guerre en Ukraine, elle a appelé les parties belligérantes à respecter le droit international humanitaire et à s’abstenir d’infliger des souffrances aux civils. Les infrastructures civiles, y compris les sites nucléaires civils, ne doivent pas être l’objet d’attaques, a-t-elle exigé en demandant aussi que l’aide humanitaire puisse se déployer sans entrave. Enfin, la déléguée a réitéré son opposition à l’utilisation de toute arme de destruction massive et appelé au dialogue et à des négociations de bonne foi en vue de parvenir à un cessez-le-feu.
M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a rappelé qu’au cours des dernières semaines, la Russie avait lancé des centaines de drones et de missiles contre l’Ukraine dans l’objectif avoué de terroriser et de démoraliser la population. Il a déploré l’escalade de la guerre, voulue par la Russie, alors que des millions de personnes pourraient se retrouver dans l’obscurité et en proie à un hiver rigoureux, sans accès garanti aux infrastructures. Il s’est inquiété de l’avenir précaire des plus vulnérables, comme les personnes âgées, les personnes déplacées et les enfants, et de la situation d’insécurité des femmes qui paient déjà un lourd tribut. Face aux tentatives russes de soustraire Zaporijjia au réseau électrique et aux attaques contre d’autres installations nucléaires ukrainiennes, le délégué a mis en garde contre les risques d’un accident qui pourrait avoir des « conséquences terribles » pour le pays, la Russie et la région. Au lendemain de l’explosion dans le village polonais de Przewodow qui a fait deux morts, il a appuyé l’enquête diligentée par la Pologne sur cet incident. S’il s’est dit préoccupé par les attaques dans l’est de l’Ukraine, le délégué a salué, « avec prudence », la « libération » de la ville de Kherson et pris note de la décision des dirigeants russes de retirer leurs troupes de la rive orientale du Dniepr. Il a en outre plaidé en faveur d’un accès humanitaire sûr et sans entrave aux civils dans le besoin, notamment ceux ayant choisi de rester chez eux ou qui ne sont pas en mesure de partir, avant de rappeler que des centaines de milliers d’Ukrainiens ont été évacués par l’armée russe avant le retrait de Kherson et que le transfert ou la déportation de civils par la puissance occupante pourrait constituer un « crime de guerre ».
M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a dit partager les préoccupations sur l’aggravation de la situation humanitaire en Ukraine et l’impact du conflit sur la sécurité alimentaire dans d’autres régions. Estimant que l’Initiative céréalière de la mer Noire, qui a déjà permis l’exportation de plus de 10 millions de tonnes de céréales, a été une étape importante, il s’est félicité de la décision de la Fédération de Russie de reconsidérer la suspension de sa participation à la suite des incidents du 29 octobre.
Le représentant a également estimé que, bien que le conflit en Ukraine ne soit pas la seule cause de l’insécurité alimentaire à laquelle le monde est actuellement confronté, la poursuite des exportations de céréales et d’engrais via les ports de la mer Noire contribue à stabiliser les prix et à prévenir les pénuries. Pour cette raison, il a dit renouveler son soutien aux efforts de médiation du Secrétaire général et de la Türkiye et encouragé les parties à s’engager dans l’extension immédiate de l’Initiative céréalière, en tant que décision nécessaire et mesure de confiance importante.
S’exprimant sur la situation humanitaire en Ukraine, il a dit que la communauté internationale doit faire front commun pour fournir une aide humanitaire à l’Ukraine, comme le Brésil l’a fait: depuis mars, des contributions de vivres et de fournitures médicales ont été expédiées depuis le Brésil vers l’Ukraine. Dans les prochaines semaines, 24 tonnes de riz supplémentaires, données par le secteur privé, y seront envoyées. Le Gouvernement brésilien a également simplifié les conditions d’entrée afin de faciliter l’accueil des réfugiés, a cité le délégué, exhortant les gouvernements et le secteur privé à s’engager en faveur d’initiatives similaires.
M. ZHANG JUN (Chine) a noté que la crise ukrainienne s’enlise et se complexifie. La communauté internationale doit trouver un consensus et promouvoir la coopération pour désamorcer la crise, a-t-il déclaré. Il a appelé à réinstaurer les négociations et à trouver une solution pacifique. « Il n’y a pas de solution simple à une problématique complexe », a affirmé le représentant, qui a estimé nécessaire de trouver un équilibre délicat entre un système sécuritaire européen viable et les besoins des uns et des autres. S’agissant des récents évènements en Pologne, il a appelé toutes les parties à garder leur calme afin d’éviter toute escalade. Elles doivent veiller à ce que les centrales nucléaires soient protégées pour éviter tout risque d’accident nucléaire, a-t-il ajouté. Le représentant a jugé essentiel de maintenir une stabilité stratégique et d’éviter tout affrontement entre les puissances du monde. Il a également exhorté les parties au conflit à tout mettre en œuvre pour ne pas viser les installations civiles. La communauté internationale doit par ailleurs intensifier l’aide humanitaire, a-t-il estimé, afin d’éviter l’effet domino de la crise. M. Zhang a demandé aux parties d’adhérer à l’Initiative céréalière de la mer Noire, qui a permis d’atténuer la crise alimentaire, avant d’exhorter à éviter de déstabiliser les chaines d’approvisionnement mondiales.
Mme MONA JUUL (Norvège) a évoqué l’explosion qui a causé la perte tragique de vies polonaises. « Nous sommes en contact étroit avec nos alliés et partenaires sur la question et soutenons l’enquête en cours », a-t-elle dit. Selon elle, cet incident ne se serait pas produit sans les attaques de la Russie contre les infrastructures civiles en Ukraine. Il suffit de se tourner vers Kherson pour voir d’autres preuves de sa campagne brutale contre les civils, a-t-elle poursuivi. Elle a appelé à un accès sûr, rapide et sans entrave des organisations humanitaires à toutes les personnes dans le besoin, y compris l’accès aux prisonniers de guerre. La représentante a en outre affirmé que la guerre d’agression de la Russie provoque une tragédie des réfugiés avec un impact régional, et qu’elle déstabilise les marchés financiers, les chaînes d’approvisionnement et perturbe la sécurité énergétique mondiale. Il est essentiel de maintenir une ligne de transport ouverte pour l’exportation de céréales, de denrées alimentaires connexes et d’engrais, y compris l’ammoniac, a-t-elle plaidé. La Russie doit immédiatement tenir compte de la décision de la Cour internationale de Justice (CIJ) et des appels de l’ONU à suspendre ses opérations militaires à l’intérieur des frontières internationalement reconnues de l’Ukraine et à mettre fin à l’effusion de sang insensée et à la souffrance mondiale.
M. VASSILY A NEBENZIA (Fédération de Russie) a accusé l’Ukraine et la Pologne de provoquer une confrontation directe entre la Russie et l’OTAN. Il a en particulier dénoncé le Président ukrainien, M. Volodymyr Zelenskyy, qui aurait déclaré « qu’un tir de missile sur le territoire de l’OTAN est un tir de missile russe contre la sécurité collective ». Or, le Président ukrainien devait avoir les informations lui indiquant que ces missiles étaient ukrainiens et il a tenté d’impliquer l’OTAN, a fait observer le représentant. De leur côté, les autorités russophobes polonaises ont affirmé immédiatement qu’elles avaient été attaquées par la Russie, alors que les images ne laissent aucun doute que ces sont des missiles ukrainiens qui ont pénétré en Pologne, a poursuivi M. Nebenzia. Le représentant a noté que la défense aérienne ukrainienne a mauvaise réputation depuis qu’en 2001, un avion civil russe a été abattu au-dessus de la mer Noire lors d’exercices militaires faisant 78 morts. En 2014, un Boeing malaisien a été abattu au-dessus du Donbass, mais les « soi-disant » enquêteurs internationaux, dont l’Ukraine faisait partie, n’ont pas considéré la responsabilité de Kiev dans le crash, a-t-il insinué. Et au cours des derniers mois, les systèmes de défense aérienne ukrainiens ont frappé des bâtiments résidentiels, tout en essayant maladroitement de les faire passer pour les conséquences de frappes russes, a-t-il encore ajouté.
Certaines délégations ont répété aujourd’hui leur mantra sournois préféré: « sans la Russie, nous ne serions pas là où nous en sommes », a observé M. Nebenzia. Mais, pour le représentant de la Fédération de Russie, nous n’en serions pas là où nous sommes s’il n’y avait pas eu un coup d’État anticonstitutionnel sanglant à Kiev en 2014, et si vous n’aviez pas couvert la guerre ukrainienne de huit ans contre la population du Donbass. Dans ce cas, nous n’aurions pas eu besoin de lancer une opération militaire spéciale pour protéger sa population, a-t-il insisté. Et si l’Occident avait encouragé les dirigeants ukrainiens à faire la paix dans des conditions réalistes plutôt que de céder à leurs fantasmes morbides sur la possibilité de vaincre la Russie, nous n’aurions pas eu besoin de lancer des frappes de précision sur les infrastructures, a-t-il ajouté.
Le représentant a rappelé l’implication des pays de l’OTAN dans le conflit ukrainien et affirmé que des équipements militaires occidentaux étaient utilisés pour des frappes ciblées contre des cibles civiles dans des villes de la région de Donetsk « et même des villes de la région de Belgorod en Russie ». Il a accusé l’Occident d’utiliser l’Ukraine comme un « terrain d’essai » pour divers types d’armements.
M. Nebenzia a également dit avoir entendu le Président français M. Macron affirmer que des couloirs de nourriture avaient été mis en place grâce au Programme alimentaire mondial (PAM) et la France, alors qu’il s’agit d’engrais que la Fédération de Russie proposait d’envoyer à titre gracieux aux pays en développement.
Le représentant a accusé les pays occidentaux de chercher à rejeter la responsabilité de toutes leurs fautes sur la Russie, en utilisant l’ONU à des fins égoïstes. Toutefois, a-t-il ajouté, lors du débat de la session spéciale de l’Assemblée générale, le 14 novembre, la « campagne occidentale d’intimidation, de coercition et de chantage des pays en développement » a clairement échoué. Pour la plupart des pays, la politique de deux poids, deux mesures des Occidentaux, leur refus de répondre de leurs transgressions -esclavage, colonialisme, invasions militaires, blocus et sanctions- leur volonté de contrer le droit international par un « ordre fondé sur des règles » dans lequel ils formulent eux-mêmes les règles, sont évidents, a estimé M. Nebenzia. La crise ukrainienne n’est qu’une monnaie d’échange dans les plans de l’Occident, un outil pour punir les indésirables, soumettre les dépendants et tenter de maintenir une insaisissable domination mondiale dans le contexte d’un monde multipolaire émergent, a-t-il conclu.
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a salué le fait que la Fédération de Russie ait repris sa coopération avec l’Initiative céréalière de la mer Noire, qui a permis l’expédition de plus de 10 millions de tonnes métriques de céréales à travers le monde. Il a dit compter sur l’engagement de bonne foi de toutes les parties prenantes pour la reconduire en temps opportun. Près de 100 millions de personnes souffrent de niveaux élevés d’insécurité alimentaire, une « réalité inacceptable », a poursuivi le délégué, demandant que cette situation figure au premier plan des discussions, afin de garantir un approvisionnement alimentaire mondial sans entrave et d’adopter des mesures pragmatiques pour remédier aux obstacles à l’exportation d’engrais et de produits agricoles russes. « Nous devons empêcher l’aggravation de l’insécurité alimentaire dans les mois à venir. » Le délégué a ensuite exprimé sa préoccupation devant l’intensification des attaques de missiles et de drones dans plusieurs villes d’Ukraine, notamment les nouvelles attaques contre Kiev, Kharkiv et Lviv, hier. Il s’est dit alarmé par les nouveaux rapports faisant état de possibles crimes de guerre dans la ville de Kherson. Il a réitéré sa position de principe selon laquelle de telles allégations, y compris des violations des droits humains et des violences sexuelles liées au conflit, doivent faire l’objet d’enquêtes approfondies, transparentes et indépendantes. Le Conseil de sécurité doit œuvrer de concert avec la communauté internationale pour éviter l’impunité en Ukraine et garantir la justice pour toutes les victimes de la guerre, a-t-il conclu.
M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine) a noté la difficulté pour la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix de brosser le tableau de la situation sur le terrain, avant de dénoncer les crimes de guerre russes en Ukraine. Tous les membres du Conseil sont les bienvenus en Ukraine sauf la Russie qui doit s’en retirer, a continué le représentant. C’est une « farce » que de voir encore la « Russie terroriste » autour de cette table aux côtés des 14 autres membres du Conseil, a ajouté le représentant, avant de fustiger les attaques russes qui privent les Ukrainiens d’eau, d’électricité et de chauffage. Quelque 10 millions d’entre eux ont été touchés par des coupures d’électricité, a comptabilisé le délégué, en annonçant que son gouvernement est prêt à participer à l’enquête sur l’incident survenue en Pologne mardi dernier.
Selon lui, dès que la Russie ne sera plus en mesure de poursuivre la guerre, la sécurité régionale sera rétablie. Reprenant sa charge, il a ajouté que la Russie lance des attaques contre les civils en guise de revanche contre sa défaite militaire y compris à Kherson et à Mykolaev. Dans sa fuite, l’armée russe a perpétré des crimes de guerre, a indiqué le représentant, qui a salué l’adoption par l’Assemblée générale de la résolution sur la création d’un registre international des dommages qui servira à recenser les éléments tendant à dresser un bilan des dégâts, pertes ou préjudices causés à toute personne physique et morale concernée et à l’État ukrainien en raison des agissements de la Fédération de Russie en Ukraine ou contre l’Ukraine.
Commentant l’appel au dialogue de la Russie, le représentant a mis en doute la sincérité des autorités de Moscou, qui est difficile à percevoir en l’absence d’actions concrètes. Il y a vu au contraire un prétexte pour les Russes de regrouper leurs forces et de lancer de nouvelles attaques. Il ne faut pas permettre à la Russie de recouvrer ses forces, a plaidé le délégué, avant de rappeler la déclaration de son Président, M. Volodymyr Zelenskyy, à la réunion du G20. Il a en outre appelé à garantir la sureté nucléaire de l’Ukraine et demandé le retrait des forces russes de la centrale de Zaporijjia, qui devrait être placée sous le contrôle de l’AIEA. Depuis juillet, l’Ukraine a exporté plus de 10 millions de tonnes de céréales. Mais nous voulons exporter plus, a annoncé le représentant, en informant que son pays peut exporter 45 millions de tonnes cette année. S’agissant de la « sécurité énergétique », il a prié pour que cesse le terrorisme énergétique russe qui vise à empêcher l’exportation d’électricité ukrainienne aux pays voisins. Pour ce faire, il a réclamé davantage de défenses aériennes antimissiles. Le délégué a également demandé la libération de tous les Ukrainiens déportés qui se trouvent en captivité en Russie, dont 11 000 enfants. Avant tout éventuel dialogue, il a posé des conditions, en premier lieu le respect par la Russie de la Charte des Nations Unies, le retour de la souveraineté de Kiev sur tout le territoire ukrainien, le retrait de toutes les troupes russes, l’établissement des responsabilités pour tous les crimes de guerre russes. Le représentant a aussi exigé la création d’une plateforme pour évaluer les dégâts environnementaux causés par la guerre ainsi que des réparations. Le représentant a exigé la création de dispositifs de garantie contre la guerre après que cette guerre est terminée. C’est lorsque toutes ces mesures auront été prises que l’on pourrait envisager le dialogue. Le délégué a enfin pourfendu les tentatives russes de discréditer le Conseil et pointé du doigt la dégradation morale du Kremlin.
M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a expliqué que le 15 novembre, vers 15h30, lors d’une vague de frappes massives de missiles par les forces russes contre des infrastructures civiles dans toute l’Ukraine, y compris à proximité immédiate du territoire polonais, deux civils polonais ont perdu la vie dans le village polonais de Przewodów, à 5 kilomètres de la frontière polono-ukrainienne. La cause apparente de leur mort est l’explosion d’un missile perdu tombé sur le village, sans aucune intention militaire apparente, a-t-il fait savoir. Il a exprimé sa profonde gratitude pour les gestes de solidarité que la Pologne reçoit du monde entier à cette occasion. Ce triste événement souligne à quel point nous sommes proches d’une escalade de la guerre d’agression russe, a-t-il déploré, se demandant jusqu’où les effets ricochets de cette guerre vont aller.
Le représentant a annoncé que la Pologne a lancé une enquête d’envergure dont les premières constatations confirment l’hypothèse que l’événement n’était pas une attaque délibérée. La Pologne a néanmoins décidé d’accroître la préparation au combat des Forces armées polonaises, en mettant l’accent sur la surveillance de l’espace aérien, a-t-il indiqué. Le délégué a assuré la communauté internationale de la transparence de l’enquête en cours et des garanties de sécurité collective que la Pologne continuera de fournir, à la fois en tant que pays individuel et en tant que membre de l’OTAN. Malgré les récents revers sur le champ de bataille, Moscou veut toujours effacer l’Ukraine souveraine de la carte, a-t-il déclaré. Il a regretté que la Russie prétende être prête pour des pourparlers, alors qu’en réalité elle mène des attaques barbares contre la population civile et les infrastructures énergétiques de l’Ukraine.
Le délégué a souligné que la valeur totale estimée de l’aide polonaise accordée en 2022 aux réfugiés ukrainiens s’élève à plus de 5,5 milliards de dollars. Selon les estimations de l’OCDE, la Pologne dépensera en 2022 pour l’aide humanitaire et militaire un total de 8,5 milliards de dollars, soit environ 1,5 % du PIB polonais, devenant ainsi l’un des principaux bailleurs de fonds auprès de l’Ukraine. Le représentant a déploré qu’en raison des bombardements russes, plus de 3,5 millions de personnes n’aient plus de toit. Il a de plus dénoncé le fait que les forces russes attaquent les infrastructures énergétiques ukrainiennes dans une tentative délibérée d’aggraver la crise humanitaire. Selon lui, leur objectif est de provoquer une nouvelle vague de réfugiés pour déstabiliser la situation dans les pays où ils arrivent.
L’impérialisme russe doit être traité comme une menace globale ayant des conséquences d’une portée considérable, a décrété le représentant. Il a appelé à neutraliser cette menace globale avant qu’elle ne plonge davantage le monde entier dans le chaos. Cette guerre doit se terminer et l’agresseur doit rendre des comptes pour les atrocités de guerre et les dommages qu’il a infligés, a-t-il exigé, se félicitant, à cet égard, de la résolution adoptée la semaine dernière par l’Assemblée générale sur la création d’un mécanisme d’enregistrement des dommages.
M. REIN TAMMSAAR (Estonie), qui s’exprimait au nom des pays baltes, a rendu hommage à la bravoure des forces ukrainiennes qui ont repris Kherson après des mois d’occupation russe. Il n’y a aucun doute que l’Ukraine va tôt ou tard libérer tous les territoires occupés au sein de ses frontières internationalement reconnues, a assuré le délégué, en apportant son soutien à Kiev. Il a indiqué que les nouvelles frappes effectuées par la Russie hier contre des villes ukrainiennes montrent que ce pays ne veut pas la paix. Le représentant a déclaré que la Russie a commis des atrocités à Kherson comme dans les autres zones libérées, avant d’assurer l’Ukraine du soutien des pays baltes en vue d’affronter les rigueurs de l’hiver. La réinstallation forcée d’enfants ukrainiens en Russie constitue un crime de guerre, a dit le délégué. Il a demandé à la Russie le renouvellement de l’Initiative céréalière de la mer Noire. Enfin, le délégué a condamné dans les termes les plus forts la rhétorique de la Russie s’agissant de l’arme nucléaire. Les accusations cyniques de la Russie, selon lesquelles l’Ukraine fabriquerait une « bombe sale », ont été démontées par l’AIEA, a conclu le délégué.
M. BJÖRN OLOF SKOOG, de l’Union européenne, a exhorté au respect du droit international humanitaire alors que la Russie a augmenté ses frappes sur les cibles civiles ukrainiennes. La Russie, a-t-il déclaré, tente de « paralyser l’Ukraine » en déstabilisant délibérément l’approvisionnement en eau et en électricité à l’approche de l’hiver. Ces actions sont illégales et constituent des crimes de guerre, a estimé le représentant. Il a indiqué que l’Union européenne prend des mesures urgentes pour réparer les infrastructures détruites par la Russie et pour assurer la stabilité macroéconomique, la stabilité et le maintien des services publics en Ukraine.
M. Skoog a souligné la nécessité de documenter les preuves des crimes de guerre commis en Ukraine, indiquant s’appuyer sur la Cour pénale internationale (CPI) et sur les autorités ukrainiennes afin de traduire leurs auteurs en justice. À ce titre, il a estimé que la résolution adoptée lundi dernier par l’Assemblée générale recommandant la création d’un registre des dommages est une étape importante. « Toutes les victimes de l’agression russe méritent justice et réparation », a-t-il déclaré.
« La Russie est seule responsable de la crise alimentaire globale », a affirmé le représentant, qui a exhorté à prolonger l’Initiative céréalière de la mer Noire. Il a également souligné l’importance des couloirs de solidarité Union européenne-Ukraine et indiqué que l’Union européenne a annoncé un nouveau programme d’aide humanitaire, appelant d’autres États à suivre cet exemple et à fournir une assistance humanitaire aux plus vulnérables. « La guerre pourrait cesser demain si la Russie se retirait », a-t-il conclu.
M. RÓBERT CHATRNÚCH (Slovaquie) a déploré que près de neuf mois après le début de l’agression militaire russe non provoquée et injustifiée contre l’Ukraine et malgré de nombreux appels de la communauté internationale, la Fédération de Russie reste silencieuse et continue de justifier son « opération militaire spéciale » sous de faux prétextes basés sur la diffusion de désinformation et de propagande. Comment la Fédération de Russie peut-elle continuer à nous persuader que son action est justifiable au regard du droit international et comment peut-on s’attendre à ce qu’elle adhère au droit international, y compris le droit humanitaire, et protège les civils innocents en temps de guerre, alors qu’elle ignore de garantir les droits fondamentaux de ses propres citoyens? s’est demandé le représentant.
Il a également réitéré ses préoccupations concernant les graves effets de l’invasion russe sur la sécurité alimentaire mondiale. En conséquence, des millions de personnes dans le monde se retrouvent dans l’extrême pauvreté, souffrant de la faim et du manque d’accès à la nourriture. Étant donné que l’Initiative céréalières de la mer Noire est sur le point d’expirer, le délégué a dit soutenir fermement sa prolongation. Il a exhorté la Fédération de Russie à écouter enfin la voix de l’ONU et à mettre en œuvre toutes les résolutions pertinentes, y compris celle de l’Assemblée générale adoptée lundi dernier qui a recommandé la création d’un registre international des dommages causés à l’Ukraine par la Fédération de Russie.