En cours au Siège de l'ONU

9150e séance – matin
CS/15060

Au Conseil de sécurité, des désaccords persistants sur le rôle prêté aux changements climatiques dans l’émergence des conflits

« Le Conseil de sécurité doit cesser de fermer les yeux et reconnaître que les changements climatiques contribuent consubstantiellement à l’instabilité politique et aux crises dans de nombreux pays en Afrique », a déclaré, ce matin, le Ministre des affaires étrangères du Gabon, M. Michaël Moussa Adamo, lors d’un débat organisé par son pays sur les liens entre climat et sécurité.  Au scepticisme affiché par certaines délégations sur cette corrélation, et donc sur la légitimité du Conseil à se saisir d’une telle problématique, le Chef de la diplomatie gabonaise a invoqué des « évidences » si « flagrantes » qu’il n’est plus permis d’attendre pour agir, selon lui. 

La Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique aux Départements des affaires politiques et de la consolidation de la paix, et des opérations de paix, Mme Martha Ama Akyaa Pobee, a considéré elle aussi que cette réunion était « opportune et importante », dans la mesure où l’urgence climatique a de multiples répercussions sur la paix.  C’est particulièrement vrai de l’Afrique où, de Dakar à Djibouti, la dégradation des sols porte atteinte aux moyens de subsistance, contraint les familles aux déplacements, cependant qu’au Sahel, les extrémistes violents exploitent cette crise, a observé la haute fonctionnaire.

Le Secrétaire général de l’ONU a fait un certain nombre de recommandations à cet égard, Mme Pobee évoquant le renforcement de la gouvernance destinée à institutionnaliser la coopération sous-régionale, comme c’est par exemple le cas avec la stratégie sous-régionale en Afrique centrale.  Toutefois, a-t-elle prévenu, la « réponse que nous apportons, aujourd’hui, n’est pas à la hauteur des enjeux ». 

La Ministre des affaires étrangères de la Norvège, Mme Anniken Huitfeldt, qui a rappelé que près de la moitié de l’humanité vit déjà dans une « zone dangereuse », n’a émis aucun doute quant au fait que les liens entre climat et sécurité relèvent des prérogatives du Conseil.  Le Brésil n’a pas été de cet avis, considérant que cet organe n’est pas l’enceinte appropriée à l’examen de ces questions.  Pour lui, les changements climatiques ne sont pas, en soi, une cause directe de conflits armés et donc une menace à la paix et la sécurité, au sens énoncé dans la Charte des Nations Unies. 

La France a rappelé le projet de résolution*, présenté par le Niger et l’Irlande en décembre 2021, qui n’avait pu être adopté en raison d’un veto de la Fédération de Russie.  Cependant, depuis cet échec, le Conseil a de plus en plus intégré les risques sécuritaires posés par le climat dans ses mandats de maintien de la paix, a néanmoins relevé l’Irlande. 

De l’avis de la Russie en revanche, faire figurer de nouveaux thèmes génériques à l’ordre du jour du Conseil ne présente « aucune valeur ajoutée », la délégation y voyant une tentative de le plier aux priorités occidentales. 

La France a toutefois souhaité que le Secrétaire général soumette au Conseil un rapport semestriel sur les conséquences des changements climatiques sur la paix et la sécurité internationales, plaidant aussi pour des recommandations d’actions ciblées sur les zones à risques et la nomination d’un envoyé spécial pour la sécurité climatique.

L’Égypte, qui accueillera du 6 au 18 novembre prochain la vingt-septième Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP27), a également rappelé que l’Afrique, faible émettrice de gaz à effet de serre, subit pourtant de plein fouet leurs impacts.  Le Maroc a rappelé que s’il y a bien une promesse qui doit être tenue envers les pays en développement, c’est celle de financer les mesures d’adaptation et d’atténuation aux changements climatiques.

Une demande réitérée à maintes reprises aujourd’hui, d’autant que le Ghana a noté que sur les 2,8 milliards de dollars nécessaires à la réalisation des objectifs fixés par l’Accord de Paris, seuls 5,5% ont été débloqués à ce jour.  Nous devons progresser sur les engagements pris lors de la COP26 et aider les moins préparés, a renchéri l’Irlande.

L’Afrique a tout pour devenir « la prochaine puissance mondiale du développement économique », a affirmé pour sa part l’ancien Président du Groupe africain de négociateurs sur les changements climatiques, M. Tanguy Gahouma, pour qui les changements climatiques constituent également l’un des risques majeurs qui pèsent sur la paix et la sécurité internationales.  Sans une action climatique « ambitieuse », jusqu’à 100 millions de personnes risquent de basculer dans l’extrême pauvreté d’ici à 2030, livrant des populations déjà vulnérables à de multiples crises. 

Le Directeur régional pour l’Afrique du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), M. Patrick Youssef, a estimé que le Conseil de sécurité de l’ONU et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine ont la capacité de concevoir des réponses aux conflits armés dans lesquels les changements climatiques jouent un rôle.

*S/2021/990  

MENACES CONTRE LA PAIX ET LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES: LE CLIMAT ET LA SÉCURITÉ EN AFRIQUE S/2022/737

Déclarations

Mme MARTHA AMA AKYAA POBEE, Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique aux Départements des affaires politiques et de la consolidation de la paix, et des opérations de paix, a déclaré que cette réunion était « opportune et importante », dans la mesure où l’urgence climatique est un danger pour la paix, avec des répercussions multiples.  L’Afrique est en première ligne, et de Dakar à Djibouti, la dégradation des sols porte atteinte aux moyens de subsistance, contraint les familles aux déplacements; tandis qu’au Sahel, les extrémistes violents exploitent cette situation.  Après avoir invité à « agir sur plusieurs fronts », elle a affirmé que « nous ne pouvons plus nous permettre d’agir comme avant ».  Partant, la COP27 qui se tiendra, en novembre, est aux yeux de la haut fonctionnaire une occasion importante, car se déroulant en Afrique, elle pourrait permettre aux pays du continent de prendre des engagements, notamment « les plus grands émetteurs » de gaz à effet de serre.  Avec l’aide des partenaires, l’ONU explore des outils censés de renforcer les capacités d’alerte précoce et d’analyse, dont des tableaux de bord, qui permettent d’évaluer la disponibilité de l’eau.  Notre engagement et analyse doivent se centrer sur les régions, les changements climatiques méconnaissant les frontières, a-t-elle souligné, avant de rappeler que, dans les zones à très forte mobilité humaine aux frontières, l’impact de tels changements provoque des tensions. 

Parmi les recommandations du Secrétaire général, Mme Pobee est revenue sur la coopération dans le domaine sous-régional, grâce à un cadre de gouvernance destiné à institutionnaliser cette approche, en citant la stratégie sous-régionale en Afrique centrale et dans d’autres sous-régions.  Elle a en outre évoqué le recours aux pratiques optimales en Afrique de l’Ouest visant à éviter les conflits entre éleveurs dans cette région.  Selon la Sous-Secrétaire générale, il faut également tirer des enseignements de ceux qui sont confrontés aux effets quotidiens des changements climatiques, a préconisé la Sous-Secrétaire générale.  À cet égard, elle a relevé que les femmes ont une expérience dans la recherche de solutions dont les résultats profitent aux populations en matière de gestion des ressources naturelles.  Le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel a adapté ses programmes, notamment pour l’adaptation et la résilience.  Mme Pobee a appelé à une coopération à un niveau sans précédent entre les partenaires et les agences des Nations Unies.  La réponse que nous apportons, aujourd’hui, n’est pas à la hauteur des enjeux, a-t-elle mis en garde en conclusion. 

M. TANGUY GAHOUMA, ancien Président du Groupe africain des négociateurs sur les changements climatiques, a déclaré que l’un des risques les plus importants pour la paix et la sécurité au XXIe siècle sont les changements climatiques.  Selon lui, la science et les faits sont clairs: la vitesse à laquelle ce phénomène s’accélère représente un véritable défi, en particulier pour les 54 États africains qui sont parmi les plus vulnérables aux crises climatique et de paix et de sécurité.  Citant les travaux de l’Institute for Security Studies publiés et de l’organisation Oxfam, M. Gahouma a relevé que 80% des catastrophes naturelles entre 1990 et 2016 sont liées aux changements climatiques.  Par ailleurs, entre 2015 et 2020, les impacts des changements climatiques ont augmenté de plus de 20% et le nombre de personnes souffrant de la faim devrait augmenter de 10 à 20% d’ici à 2050 en raison du réchauffement planétaire.  Sans une action climatique « ambitieuse », jusqu’à 100 millions de personnes risquent de tomber dans l’extrême pauvreté d’ici à 2030, laissant des populations déjà vulnérables en première ligne de crises multiples et croisées, a-t-il prévenu. 

Aussi M. Gahouma a estimé que « l’Afrique » a tout pour devenir « la prochaine puissance mondiale du développement économique ».  Sa population est jeune, ses ressources naturelles abondantes et de nombreux pays du continent sont prêts à transformer leurs économies pour sortir des millions de personnes de la pauvreté et les intégrer à la classe moyenne.  Avec la Zone de libre-échange continentale africaine, entrée en vigueur en mai 2019, une opportunité se présente pour l’intégration progressive de l’Afrique dans la mondialisation, a estimé l’intervenant, pour qui ce n’est qu’ensemble que nous pourrons trouver une solution aux changements climatiques. 

M. PATRICK YOUSSEF, Directeur régional pour l’Afrique du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a déclaré que la majorité des pays parmi les plus vulnérables et les moins en mesure de s’adapter aux changements climatiques connaissent également des conflits armés.  Par ailleurs, ces chocs convergents n’affectent pas seulement les conditions de vie des populations locales, mais aussi les institutions et la cohésion sociale, prolongeant les tensions existantes et perpétuant la fragilité.  En outre, les acteurs les mieux armés pour fournir des financements climatiques et soutenir l’adaptation aux changements climatiques sont largement absents de ces lieux, en raison des risques sécuritaires.  Dans ce contexte, il est « plus clair que jamais » que des mesures doivent être prises pour garantir des réponses préventives et durables, de nature à renforcer la résilience et les capacités d’adaptation des populations, a jugé l’orateur.

Présentant les activités menées par le Comité dans plusieurs pays africains, dont ceux du Sahel, comme au Mali, au Niger, au Soudan, au Burkina Faso ou en République centrafricaine, M. Youssef a déclaré que l’action humanitaire en première ligne est un « facteur de stabilisation vital » dans des environnements fragmentés et un « élément constitutif » des efforts de consolidation de la paix.  Cependant, les humanitaires ne sont pas des artisans de paix et ne peuvent répondre seuls à la multitude de défis qui se posent sur la voie d’une paix durable.  Le Conseil de sécurité de l’ONU ainsi que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine sont des organes internationaux qui ont la capacité de concevoir des réponses aux conflits armés sensibles au climat, a-t-il estimé.

Dans ce contexte, et afin de contribuer à garantir la complémentarité et un impact durable, le CICR a suggéré de concevoir des réponses spécifiques au contexte qui tiennent compte des besoins et des caractéristiques individuels des personnes.  Il a également recommandé de partager les connaissances et d’aligner les expériences par des discussions plus régulières et systématiques possibles, y compris avec les organisations régionales, sous-régionales, les organisations humanitaires et d’autres acteurs.  Il faut enfin un plus grand respect du droit international humanitaire afin de réduire les risques que subissent les communautés touchées par les conflits, notamment en raison des changements climatiques, a conclu M. Youssef. 

Après avoir évoqué les avertissements prononcés, en 2009, par l’ancien Secrétaire général, M. Kofi Annan, quant aux risques associés aux changements climatiques, M. MICHAËL MOUSSA ADAMO, Ministre des affaires étrangères du Gabon, s’est inquiété de la fréquence et de la gravité des crises climatiques qui semblent croître de manière exponentielle aux quatre coins du monde, alors que 22 millions de personnes sont menacées de famine dans la Corne de l’Afrique.  Les changements climatiques contribuent à la désertification et à l’augmentation de la densité humaine, avec pour conséquence d’exacerber les conflits entre éleveurs nomades, notamment Peuhls et Foulani.  En tant que nation dotée d’une forêt tropicale, le Gabon est conscient que les décisions prises, aujourd’hui, concernant le développement du pays peuvent entraîner des conséquences graves pour d’autres nations, alors que les forêts du Gabon sont reliées par des rivières atmosphériques à la région plus sèche du Sahel.  Il s’est inquiété de la dégradation éventuelle du bassin du Congo, qui aurait pour effet d’accroître fortement le nombre de réfugiés climatiques et de déstabiliser l’ensemble du continent.  En outre, le réchauffement planétaire entraîne des problèmes socioéconomiques et politiques dans les pays les plus pauvres, entraînant l’instabilité politique et économique, l’insécurité alimentaire et la migration à grande échelle.  Les changements climatiques sont également la cause de conflits, notamment ceux liés aux ressources naturelles, et aggravent les conflits existants, particulièrement dans la Corne de l’Afrique, dans la région du lac Tchad ou dans les Grands Lacs.  « Ce Conseil doit cesser de se voiler les yeux et reconnaître les changements climatiques comme facteur alimentant consubstantiellement l’instabilité politique et les crises dans de nombreux pays en Afrique », a insisté le représentant.  Pour relever ces défis, il a prôné l’Initiative africaine sur l’adaptation, portée au sein de l’Union africaine par le Président Bongo Ondimba.  Pour le délégué, il faut faire de l’adaptation aux changements climatiques un pilier de la bonne gouvernance et renforcer la coordination. 

Mme ANNIKEN HUITFELDT, Ministre des affaires étrangères de la Norvège, a noté que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) avait prévenu que près de la moitié de l’humanité vit déjà dans une « zone dangereuse ».  Les changements climatiques et la détérioration de l’environnement sont en effet des facteurs d’instabilité et de conflit, a ajouté la Ministre, particulièrement en Afrique, où les sécheresses et inondations frappent durement les communautés, les économies et les écosystèmes.  Alors que la preuve des effets des changements climatiques sur l’origine de conflits n’est plus à faire, il ne fait aucun doute que climat et sécurité sont des questions pertinentes pour le Conseil.  Elle a cité l’exemple du Soudan du Sud, où ces aspects sont désormais intégrés aux rapports du Conseil.  Climat et sécurité doivent donc être considérés comme faisant partie intégrante de la prévention des crises et des conflits, a-t-elle argué.  Pour aller de l’avant, la Ministre s’est attardée sur la construction de communautés et d’infrastructures résilientes au climat, en augmentant notamment les financements destinés à l’adaptation et aux mécanismes d’alerte précoce.  À cette fin, la Norvège compte doubler son financement climatique et tripler son soutien à l’adaptation climatique d’ici à 2026.  Face à ces défis, elle a également mis en avant l’appropriation locale et l’exploration de nouvelles approches en matière de médiation et de consolidation de la paix.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déclaré que, forte de son expérience dans le continent et de ses missions sur place avec le Conseil, elle a été témoin d’inondations, de sécheresses et de l’assèchement du lac Tchad, « réduit à une peau de chagrin ».  L’Afrique compte 20 pays vulnérables aux changements climatiques, dont plusieurs sont également confrontés à des conflits, a-t-elle noté, ajoutant que la production agricole subsaharienne a diminué de 40%.  Elle a également jugé insupportable que des femmes se voient obligées d’abandonner leur bétail mourant à cause de la sécheresse et du manque d’eau.  En outre, le braconnage, l’exploitation des minerais, du bois, de la faune et la flore, viennent remplir les caisses des organisations terroristes, a déploré la représentante.  Elle s’est dite découragée que d’aucuns réfutent la corrélation entre les conséquences des changements climatiques et la sécurité, contrairement au Président Biden qui a entériné un texte pour atténuer les effets des changements climatiques.

Les sources hydriques s’assèchent, les femmes sont donc forcées de parcourir à pied plus de kilomètres et s’exposent ainsi aux violences sexistes et sexuelles, a-t-elle ajouté, en décrivant brièvement un projet de l’Administration américaine tendant à l’adaptation auxdits effets, dont 16 des pays ciblés figurent parmi les plus vulnérables.  Il est clair que les femmes, éléments durables du règlement des conflits, doivent participer aux initiatives prises.  « Renouvelons nos engagements, tant à l’échelle de l’ONU qu’à celle des pays pour parvenir des énergies propres et réduire les incidences des changements climatiques », a-t-elle exhorté. 

Mme LANA NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a jugé nécessaire de trouver, au sein du Conseil de sécurité, un cadre pour aborder et discuter de la question des changements climatiques, tant est évident le lien avec la paix et la sécurité internationales.  Le Conseil peut prendre des actions en la matière, a plaidé la représentante.  Mme Nusseibeh a également estimé une priorité d’accroître les investissements en Afrique, y compris dans la lutte contre les changements climatiques.  Il faut par exemple que les engagements pris à la COP26, notamment de doubler les financements en ce domaine, soient tenus.  L’action par anticipation doit être également privilégiée, le Conseil devant en outre disposer de données analytiques fournies par l’ONU sur les changements climatiques, en coopération avec les organisations régionales et sous-régionales, a-t-elle suggéré.

M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a assuré de l’engagement de son pays à examiner les causes profondes des changements climatiques et de leurs méfaits sur les sociétés, ainsi que son ferme attachement au « régime multilatéral sur les changements climatiques », l’un des défis majeurs de notre temps.  Il a souligné que le dernier rapport en date du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) dressait un tableau sombre des impacts des changements climatiques et des risques au niveau mondial, notamment en Afrique.  Qualifiant ce rapport d’« atlas des souffrances humaines », le représentant a constaté que les changements climatiques provoquent, d’ores et déjà, des dégâts substantiels et des pertes croissantes, irréversibles, dans les pays en développement en particulier.  En conséquence, M. Costa Filho a affirmé que la COP27, prévue fin octobre à Charm el-Cheikh, en Égypte, sera l’occasion de renforcer les mesures liées à la Convention-cadre en matière de financement et autres moyens de réduire les lacunes de mise en œuvre. 

Dans le contexte du débat d’aujourd’hui, le délégué brésilien a toutefois souligné qu’il s’avère « clairement » que la question des liens potentiels entre climat, paix et sécurité sème la « discorde » au sein du Conseil.  Il convient de surmonter cette situation, a-t-il exhorté, invitant à « une clarté absolue » quant aux prérogatives de cet organe.  Le représentant a ensuite réitéré la position de son pays, qui estime que le Conseil n’est pas l’enceinte réservée à l’examen de cette question.  Les changements climatiques, a-t-il expliqué, ne sont pas, en soi, une cause directe des conflits armés, et ne constituent donc pas une menace directe à la paix et la sécurité, au sens énoncé dans la Charte des Nations Unies, a-t-il argué.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a indiqué que les discussions relatives aux liens entre climat et sécurité doivent se fonder sur des données, comme celles qui permettent d’établir l’assèchement du lac Tchad, avec les conséquences sur les communautés locales.  Plus de la moitié des opérations de maintien de la paix des Nations Unies se trouvent dans des pays très vulnérables aux incidences des changements climatiques.  Le Conseil de sécurité ne saurait être en mesure de traiter de tous les aspects des changements climatiques, mais il importe qu’il prenne cette problématique en considération.  S’il a noté le soutien international en faveur du système AMHEAS pour la réduction des risques, et s’est félicité des sommes allouées par le Fonds pour la consolidation de la paix, le représentant a toutefois estimé que le Conseil devrait adopter une approche inclusive des femmes et des jeunes, entre autres.  Relevant que 2,8 milliards de dollars seraient nécessaires pour la réalisation de l’Accord de Paris, il a déploré que seuls 5,5% de ce montant aient été réunis jusqu’à présent, plaidant pour un engagement « fort » des pays développés et de la communauté internationale tout entière.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a déclaré que le combat pour le climat est aussi un combat pour la paix et la sécurité internationales.  Nous devons dans le même temps créer un cercle vertueux entre développement économique, social et inclusif et actions en faveur de la préservation du climat et de la biodiversité.  C’est tout le sens du projet de la Grande muraille verte pour la Sahara et le Sahel, qui vise à lutter contre les effets des changements climatiques, la désertification, l’insécurité alimentaire et la pauvreté, « du Sénégal à Djibouti ».  La France a contribué à mobiliser 16 milliards d’euros en faveur dudit projet, s’est enorgueilli le représentant à ce sujet.  C’est également l’objectif de l’initiative Climate Risk and Early Warning Systems (CREWS), lancée à la COP21 dans le but de mieux alerter les populations face aux événements dangereux.

M. De Rivière a également déclaré que le Conseil est « pleinement » dans son rôle lorsqu’il se penche sur les menaces liées aux changements climatiques.  Il doit donc être en mesure de mieux évaluer, anticiper et prévenir l’impact des changements climatiques sur la paix et la sécurité internationales et d’en tirer toutes les conséquences, comme nous y invitait le projet de résolution porté par le Niger et l’Irlande en 2021.  À cet égard, la délégation réitère ses propositions: elle souhaite un rapport semestriel du Secrétaire général, destiné au Conseil, sur les conséquences des changements climatiques sur la paix et la sécurité internationales et plaide aussi pour l’élaboration de recommandations d’actions ciblées sur les zones à risques.  La France propose également la nomination d’un Envoyé spécial pour la sécurité climatique afin de fédérer l’action de la communauté internationale et appelle enfin au renforcement du mécanisme de sécurité climatique de l’ONU, dont l’objectif est de permettre d’intégrer l’impact des changements climatiques lorsque nous abordons les questions de paix et de sécurité, a encore dit le délégué.

Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a déclaré que les changements climatiques ont un impact réel sur les conflits et l’insécurité alimentaire qui touchent le continent africain et qu’à ce titre, le Conseil devrait donc systématiquement examiner leur impact sur la paix et la sécurité internationales.  Les sécheresses, les inondations et la désertification privent en outre des populations entières de leurs moyens de subsistance, a-t-elle noté, aggravant la vulnérabilité des femmes et des enfants, qui sont affectés de manière disproportionnée.  La représentante a évoqué les inondations, de 2021, au Soudan du Sud et les conflits intercommunautaires pour l’accès aux ressources naturelles qui, au Sahel, continuent de gagner en intensité, tandis que la Somalie demeure aux prises avec sa pire sécheresse depuis quatre décennies.  « Les pays dont l’empreinte carbone est la plus faible, dont la plupart des États africains inscrits à l’ordre du jour de ce Conseil, paient un prix exorbitant », s’est inquiétée la déléguée, en dénonçant les groupes extrémistes qui exploitent cette situation pour étendre leur emprise.  La représentante a appelé les pays développés à respecter leur engagement à fournir 100 milliards de dollars, par an, pour soutenir l’action climatique dans les pays en développement. 

M. MARTIN KIMANI (Kenya) a fait plusieurs recommandations pour combler les lacunes en matière d’engagement face aux incidences des changements climatiques, au nombre desquelles une réforme de la Charte des Nations Unies, des institutions de Bretton Woods et du G20.  Répondre à cette crise de façon rhétorique ne pourra que mener à des rapports de force parallèles, a-t-il averti, en insistant sur une représentation des pays en développement les plus touchés au sein du Fonds d’affectation spéciale du Fonds monétaire international (FMI) et un siège permanent pour l’Union africaine au G20.  Nous sommes non seulement victimes mais acteurs des solutions.  Il a aussi jugé impératif de protéger les richesses naturelles africaines et de lever les obstacles au commerce du continent, avant de préconiser un engagement en faveur d’une production non polluante d’ici à 2030.  Toutes ces questions sont étroitement liées et relèvent du mandat du Conseil, a-t-il estimé.  Le délégué a recommandé en conclusion la préparation d’un projet de résolution qui prenne en compte l’ensemble de ces aspects. 

Mme RUCHIRA KAMBOJ (Inde) a déclaré qu’ignorer la donnée historique selon laquelle les pays en développement ne sont pas responsables des changements climatiques ne serait pas faire justice aux enjeux de cette problématique.  Son pays, a-t-elle dit, réalise des centaines de projets en Afrique sur la production de sucre, le développement de pôles technologiques ou les énergies renouvelables.  Le Premier Ministre indien a pris des engagements ambitieux lors de la Conférence de Glasgow, qui dépassent ceux annoncés auparavant.  Cependant, a-t-elle dit, si certains conflits sont aggravés par les incidences des changements climatiques, il n’existe pas de méthode internationale agréée permettant de les évaluer.  Les conflits violents sont principalement dus à des questions d’ordre social, a-t-elle souligné, avant de dire que l’Inde ne souscrit pas à l’inclusion des changements climatiques dans les travaux du Conseil, une tentative des pays développés visant à détourner l’attention de la communauté internationale de leur absence de volonté.  Les pays développés doivent fournir un milliard de dollars au monde en développement, a-t-elle rappelé, espérant que les déclarations d’aujourd’hui inciteront lesdits pays à s’engager davantage.  

M. ARIAN SPASSE (Albanie) a déclaré que notre définition de la sécurité doit inclure la menace posée par les changements climatiques pour que le Conseil élabore des politiques sécuritaires appropriées et prévienne une fin catastrophique de la vie telle que nous la connaissons sur Terre.  La crise climatique croissante est source d’insécurité et de conflits, en particulier en Afrique, a-t-il relevé.  Nous ne pouvons nier la réalité à laquelle nous sommes confrontés: les changements climatiques exacerbent et prolongent l’instabilité et l’insécurité dans des pays déjà ravagés par des conflits violents et des difficultés économiques, a poursuivi le représentant.  Il a également déclaré que pour lutter contre les changements climatiques, une réponse globale intégrée est nécessaire, à commencer par la concrétisation de la promesse de maintenir le réchauffement climatique en-dessous de 1,5 degré Celsius.  De la même manière, les promesses de financer l’aide aux populations les plus touchées et investir dans des programmes d’adaptation nationaux clefs tels que le programme d’accélération de l’adaptation en Afrique doivent être tenues, a exhorté le représentant en conclusion. 

M. FERGAL MYTHEN (Irlande) a appelé les États Membres qui participeront à la Conférence de Charm el-Cheikh sur les changements climatiques (COP27), qui doit se tenir du 6 au 18 novembre prochain, à accroître leurs ambitions pour concrétiser de toute urgence l’Accord de Paris.  Nous devons progresser sur les engagements pris lors de la COP26 sur le financement climatique et sur les pertes et dommages et aider les moins préparés, tant les impacts des changements climatiques menacent les vies et les moyens de subsistance, entraînent des déplacements et contribuent aux conflits et à l’insécurité.  Le représentant a également relevé que l’Union africaine et l’Union européenne ont reconnu le lien entre changements climatiques et instabilité.  Mais, malgré l’échec de l’adoption d’une résolution indispensable sur cette question, l’an dernier, le Conseil de sécurité a de plus en plus intégré les risques sécuritaires liés au climat dans ses mandats de maintien de la paix, s’est félicité M. Mythen.  Toutefois, davantage peut être fait pour développer des systèmes résilients aux changements climatiques, a-t-il assuré en conclusion. 

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a fait état d’un lien « indéniable » entre le climat, la paix et la sécurité en Afrique.  Après avoir salué le leadership de l’Afrique sur cette question, il a regretté le veto qui a bloqué la résolution sur la sécurité climatique du Niger en décembre dernier.  Les impacts des changements climatiques multiplient les menaces auxquelles sont confrontées les populations vulnérables, a-t-il noté, comme le démontrent la sécheresse en Afrique de l’Est et les précipitations au Sahel qui ont provoqué une crise humanitaire.  Pendant ce temps, la concurrence accrue pour l’eau et les terres, la perte de biodiversité et les migrations exacerbent les conflits et l’insécurité alimentaire.  Pour y remédier, le Conseil peut contribuer à faire en sorte que le système des Nations Unies dispose des mandats et des capacités nécessaires pour intégrer le climat dans son analyse et sa réponse aux facteurs de conflits, a expliqué le représentant.  Il a prôné, à cet égard, la mise en œuvre du Pacte de Glasgow pour le climat, conclu l’an dernier, et de respecter les engagements financiers pris afin de renforcer la résilience.  Pour sa part, le Royaume-Uni s’est engagé à doubler son financement international du climat pour atteindre au moins 11,6 milliards de livres sterling jusqu’en 2026, qui seront consacrés aux mesures d’atténuation et d’adaptation, a annoncé le délégué.

M. DMITRY S. CHUMAKOV (Fédération de Russie) a jugé indéniable que les sécheresses, les inondations, la désertification, les ouragans et autres catastrophes naturelles induites par les changements climatiques ont de graves conséquences économiques et sociales, notamment en Afrique.  Nous devons non seulement intensifier les efforts mondiaux de lutte contre les changements climatiques, a reconnu le représentant, mais aussi aider les pays touchés à s’adapter à leurs conséquences négatives, notamment l’accès à l’eau potable et la sécurité alimentaire.  Il est impossible de relever ces défis sans un développement socioéconomique durable, fondé sur les priorités nationales et tenant compte des spécificités locales.  Le délégué s’est notamment intéressé aux initiatives africaines en ce sens, tels que l’Agenda 2063 de l’Union africaine et « Faire taire les armes en Afrique ».  Le délégué n’a toutefois vu « aucune valeur ajoutée » à l’ajout de nouveaux thèmes génériques à l’ordre du jour du Conseil, estimant que celui-ci ne devrait pas se conformer aux priorités occidentales.  « Les principaux apologistes de la décarbonisation et de l’économie verte sont les pays développés », a-t-il noté, en rappelant que leur prospérité économique avait été rendue possible par l’exploitation de ressources naturelles, dont les combustibles fossiles, pendant que les intérêts vitaux de l’Afrique étaient marginalisés par les décisions « unilatérales mal conçues » des « soi-disant ‘leaders climatiques’ ».

M. DAI BING (Chine) a estimé qu’il n’y a pas de corrélation forcément évidente entre changements climatiques et conflits.  Les États européens ayant subi des épisodes caniculaires cet été n’ont pas connu de conflits, a-t-il souligné pour illustrer son propos.  Le représentant a ensuite estimé que l’Afrique, qui produit moins de 4% des émissions de gaz à effet de serre, a besoin de mesures d’atténuation, les pays du continent devant avoir accès aux financements de manière équitable et juste.  Les institutions financières internationales doivent y contribuer, a enjoint le représentant, avant de déplorer que les pays développés demandent aux États africains d’assumer les mêmes responsabilités qu’eux, au lieu de respecter leurs engagements en termes de financements pris dans le cadre de l’Accord de Paris et à l’issue de la COP26 de Glasgow.

M. FRANK JARASCH (Allemagne), s’exprimant au nom du Groupe des amis sur le climat et la sécurité, a déclaré que ce groupe de plus de 60 membres de toutes les régions du monde est uni par une préoccupation commune: les changements climatiques menacent de plus en plus les moyens de subsistance, la sécurité alimentaire, la stabilité, le développement durable et la prospérité, la jouissance effective des droits de l’homme et, par ricochet, la paix et la sécurité.  Par conséquent, ils estiment qu’il faut intensifier les efforts collectifs pour faire face à la crise climatique tout en renforçant immédiatement le soutien aux personnes les plus touchées, comme les États africains. 

Le Groupe appelle donc les États Membres à mettre en œuvre « pleinement et de manière ambitieuse » l’Accord de Paris, notamment par le biais des engagements reflétés dans le Pacte de Glasgow pour le climat.  Il estime que le financement climatique et les moyens de mise en œuvre, ainsi que le développement et le financement humanitaire, s’ils sont bien utilisés, peuvent contribuer à maintenir la paix et la sécurité.  Les investissements dans l’adaptation au climat profitent souvent aussi à la paix et à la stabilité, en atténuant les effets négatifs des changements climatiques. 

Le Groupe salue en outre les progrès accomplis dans la reconnaissance des effets des changements climatiques lorsque l’on envisage les mandats des missions de paix et des missions politiques spéciales, a encore indiqué le représentant.  Pourtant, il reste encore beaucoup à faire pour garantir une approche véritablement systématique.  Il a donc exhorté tous les membres du Conseil à écouter le nombre croissant de pays qui connaissent l’instabilité et l’insécurité en raison des changements climatiques, puis à soutenir leur demande d’action du Conseil, « au lieu de la bloquer », a conclu l’orateur. 

M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte), dont le pays accueillera et présidera la COP27, a affirmé son engagement fort pour traiter des menaces existentielles occasionnées par les changements climatiques, réaffirmant l’importance de mettre en œuvre tous les accords souscrits jusqu’à présent dans ce contexte.  D’après le Groupe II du GIEC, l’Afrique, qui contribue peu à l’émission de gaz à effet de serre, subit pourtant de plein fouet leurs impacts.  Le financement en la matière est plus que jamais nécessaire, a-t-il insisté, en mettant l’accent sur les 100 milliards de dollars que les pays développés doivent fournir aux nations en développement d’ici à 2025, dont les pays africains qui ont prévu des mesures pour contenir les impacts des changements climatiques.  

M. MAURIZIO MASSARI (Italie) s’est préoccupé des effets néfastes des changements climatiques qui, associés à d’autres facteurs de déstabilisation tels que l’extrême pauvreté, l’insécurité alimentaire, la fragilité institutionnelle et le terrorisme, constituent une menace sérieuse pour la paix et la sécurité internationales.  Les pays africains et leurs populations les plus vulnérables, notamment les femmes et les enfants, sont souvent parmi les plus touchées par ce phénomène, a-t-il noté.  Les sécheresses qui sévissent aujourd’hui dans la Corne de l’Afrique et au Sahel entraînent le déplacement de millions de personnes et alimentent les conflits, a ajouté le représentant, qui y a vu un signal d’alarme pour tous.  Selon l’Union africaine et l’Organisation météorologique mondiale (OMM), le stress hydrique élevé devrait toucher environ 250 millions de personnes sur le continent et déplacer jusqu’à 700 millions d’individus d’ici à 2030, a-t-il relevé.  Pour y faire face, il a appelé à un partenariat renforcé entre les Nations Unies et les organisations régionales, tout en souhaitant que le lien entre les changements climatiques, la paix et la sécurité soit intégré aux priorités communes de l’ONU et de l’Union européenne.  À ses yeux, l’atténuation et l’adaptation devraient être davantage intégrées aux mandats des missions de maintien de la paix des Nations Unies. 

M. OMAR HILALE (Maroc) a déclaré que les conséquences des changements climatiques devraient attirer l’attention du Conseil de sécurité, avant de dire que la COP27 offre aux États l’opportunité de discuter de la question du financement et des investissements dans la lutte contre les changements climatiques, en particulier dans le domaine agricole.  S’il y a bien une promesse qui doit être tenue envers les pays en développement, c’est celle de financer les mesures d’adaptation et d’atténuation aux changements climatiques, a insisté le représentant.  Tant que les actions de la communauté internationale ne parviendront pas à atteindre cet objectif, cette question continuera de figurer à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, a-t-il souligné. 

M. NEVILLE GERTZE (Namibie) a déclaré qu’en « triangulant » le lien entre changements climatiques, conflit et développement, nous pouvons clairement reconnaître comment le réchauffement planétaire interagit avec d’autres variables telles que la marginalisation sociale, politique et économique, la pénurie d’eau, la sécurité alimentaire, la concurrence pour les ressources, le faible développement économique, le déplacement de population et les migrations, entre autres.  Il a estimé qu’en renforçant la capacité des États africains à développer des réponses plus intégrées aux risques sécuritaires liés au climat, on leur donne les moyens de répondre à leurs propres menaces, dans une pleine appropriation locale et régionale.  Dans ce contexte, le représentant a appelé la communauté internationale à respecter les engagements financiers d’un montant de 100 milliards de dollars que les pays développés doivent consentir pour lutter contre les changements climatiques.  Il a aussi appelé Conseil à maintenir l’élan des discussions sur les liens entre climat et sécurité, qui constituent la prochaine frontière des menaces émergentes pour le monde, selon lui.

Mme KHRYSTYNA HAYOVYSHYN (Ukraine) a estimé que la question à l’ordre du jour va au-delà de la sécurité, car elle a une incidence sur toutes les vies.  Principal fournisseur d’huile de tournesol, l’Ukraine a réaffirmé sa solidarité avec le continent, en regrettant que plus de 400 milliards de personnes risquent de souffrir des conséquences de l’invasion russe.  L’Ukraine, pour sa part, s’est engagée à réduire de 60% ses émissions de gaz à effet de serre et à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2060.  « La planète est notre maison à tous » et les défis auxquels les Africains sont confrontés aujourd’hui ne sauraient nous laisser indifférents, a-t-elle commenté, se félicitant également qu’en dépit de sa situation actuelle, son pays s’efforce de poursuivre son partenariat avec les pays africains en leur envoyant plusieurs tonnes de céréales, notamment à l’Éthiopie. 

M. SAMADOU OUSMAN (Niger) a noté que l’Afrique, bien qu’ayant peu contribué aux changements climatiques, subit de manière disproportionnée les conséquences néfastes de ce phénomène qui affecte la stabilité de plusieurs États.  L’imprévisibilité des précipitations, la désertification et la baisse du niveau des cours d’eau affectent la vie économique et sociale des populations et provoquent des conflits pour l’accès aux ressources naturelles, a-t-il expliqué, notamment au Sahel et dans le bassin du lac Tchad.  « Le nexus climat-sécurité-développement est incontestable », a poursuivi le délégué.  Il a appelé à une approche multidimensionnelle pour en atténuer les effets, intégrant la protection et la récupération des terres, ainsi que la gestion rationnelle des ressources naturelles afin de parvenir à un développement durable.  Pour ce faire, il a demandé la présentation de rapports réguliers du Secrétaire général au Conseil de sécurité, comme l’a demandé le Niger, en décembre 2021, à l’occasion de sa présidence du Conseil.  Le représentant a exprimé l’espoir que la Conférence de Charm el-Cheikh, de 2022, sur les changements climatiques (COP27), le mois prochain, permettra aux États parties de parvenir à un accord sur les questions en suspens, notamment le financement des politiques climatiques et le transfert de technologie en faveur des pays en développement. 

M. KRZYSZTOF SZCZERSKI (Pologne) a déclaré que les changements climatiques exacerbent l’instabilité et la capacité de la communauté internationale à répondre aux crises.  Ils détruisent en outre les moyens de subsistance des communautés, aggravant la pauvreté et l’insécurité alimentaire, avec pour effet d’alimenter la radicalisation et les conflits.  Le représentant s’est inquiété des effets de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine sur la situation alimentaire déjà critique en Afrique, y voyant un « terrible exemple » de la façon dont un conflit régional peut avoir des répercussions mondiales.  Cette guerre a également contribué à une forte hausse des prix du carburant, des engrais et des denrées alimentaires, a-t-il relevé, ainsi qu’à la perturbation des chaînes d’approvisionnement.  Pendant ce temps, les conséquences de la pandémie de COVID-19 continuent d’entraver notre capacité économique à investir dans le renforcement de la résilience climatique, qui est en Afrique un besoin urgent, en particulier dans les infrastructures régionales, a fait valoir le représentant.  Le Groupe des Amis pour le climat et la sécurité a par ailleurs plaidé en faveur de plusieurs résolutions du Conseil reconnaissant les effets néfastes des changements climatiques dans les régions touchées par des conflits, a rappelé le délégué.

Mme LEONOR ZALABATA TORRES (Colombie) a indiqué que les inégalités s’accentuent, la pression sur les ressources naturelles dont dépend la survie des populations vulnérables, les obligeant à quitter leurs foyers, donnant lieu à des conflits.  Elle a renvoyé notamment au fait que, dans la Corne de l’Afrique, plus de 30 millions se heurtent à une sècheresse très grave et que 345 millions de personnes par le monde sont confrontées à la famine.  La Colombie est, elle aussi, confrontée à un défi sans pareil pour les populations d’ascendance africaine, contraintes au déplacement, a confié la représentante, avant de citer un adage du peuple Arauco, basée dans la région de Santa Marta, une communauté à laquelle elle appartient: « quand la terre est malade, je suis malade; quand la terre est guérie, elle me guérit, moi. » 

M. XOLISA MABHONGO (Afrique du Sud) s’est dit « fermement attaché » à une réponse collective et multilatérale à la « menace existentielle » que sont les changements climatiques.  L’Afrique du Sud appelle les pays développés à honorer, « de toute urgence », leurs engagements envers les pays en développement en matière de financement climatique, de transfert de technologie et de renforcement des capacités, afin de proposer une solution multilatérale à cette crise et éviter les pires scénarios possibles qui auront des conséquences apocalyptiques pour nous tous.

Le représentant a également déclaré que, bien que les pressions climatiques puissent généralement contribuer à accroître le risque de conflit, les preuves scientifiques à l’appui de conclusions plus générales d’une causalité directe entre changements climatiques et menaces à la paix et à la sécurité internationales sont « minimes. »  Le délégué ne pense pas qu’il soit « très utile » d’élargir le champ d’action du Conseil de sécurité pour y inclure une plus grande attention aux changements climatiques.  Cela porterait atteinte, selon lui, à la primauté de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques en matière de questions climatiques.

Ce qu’il faut au contraire, ce sont des progrès « urgents » sur les questions centrales d’intérêt au cœur des négociations sur le climat, notamment la fourniture des moyens de mise en œuvre par les pays les plus responsables des changements climatiques.  À cet égard, la COP27 doit réaliser des progrès substantiels sur les questions prioritaires pour l’Afrique et les autres pays en développement, a conclu M. Mabhongo.

En fin de séance, la Fédération de Russie est intervenue à nouveau pour rappeler à certains intervenants dont les références à la Russie étaient fallacieuses, que son pays n’exploite pas mais aide les Africains. 

 

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