Conseil de sécurité: le Représentant spécial pour le Soudan du Sud se félicite de la prolongation de la période de transition démocratique
Présentant au Conseil de sécurité le rapport trimestriel du Secrétaire général sur la situation au Soudan du Sud, le Représentant spécial pour ce pays a qualifié, cet après-midi, de « bienvenue » la signature, le 4 août dernier, entre les signataires de l’Accord de paix revitalisé, d’un accord sur une feuille de route qui prolonge la période de transition de 24 mois, jusqu’en février 2025, et prévoit des élections en décembre 2024. Il n’y a pas d’alternatives à la mise en œuvre de l’Accord de 2018, a-t-il toutefois averti, rejoint par de nombreuses délégations qui ont appelé à l’accélération du processus de transition démocratique.
À l’approche de la fin de la période de transition, il est devenu évident que les parties n’étaient pas en mesure de conclure la mise en œuvre des principales dispositions de l’Accord d’ici à la date limite initiale, fixée en février 2023, a expliqué M. Nicholas Haysom, en saluant le consensus qui a entouré la prolongation de la période transitoire. Cela s’est traduit par le vote de 37 des 43 membres de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée en faveur de la prorogation, a-t-il précisé, indiquant que la prochaine étape sera la ratification de la nouvelle période par l’Assemblée législative nationale de transition.
M. Haysom, qui est également le Chef de la Mission des Nations Unies au Soudans du Sud (MINUSS), a indiqué que, lors de ses rencontres avec le Président Salva Kiir et le Vice-Président Riek Machar, il a signifié aux deux dirigeants que la feuille de route ne doit être qu’un « point de passage », et non un « point final », sur la voie de la transition. Au-delà du respect du calendrier de la feuille de route et du nécessaire rétablissement de la confiance, il a vu dans la préparation d’élections l’une des principales questions en suspens. Il a par ailleurs salué la fin de la formation du premier contingent des forces unifiées nécessaires, affirmant attendre de ces soldats, « symboles d’unité », qu’ils jouent un rôle essentiel dans le processus démocratique. Leur déploiement contribuera à réduire la violence infranationale et intercommunautaire, tandis que la réforme du secteur de la sécurité devrait permettre une meilleure protection des civils, a-t-il dit.
À ce propos, le Représentant spécial s’est déclaré préoccupé par les combats entre les forces du Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition-faction Kitgwang et la milice Agwelek dans le Haut-Nil, qui ont poussé des milliers de personnes vers le Jongleï, l'État de l’Unité et le Soudan. Il a aussi condamné les violences récentes à Mayom, dans l’État de l’Unité, avant d’enjoindre les parties à cesser d’utiliser la violence sexuelle comme « arme de choix ». Il a été appuyé dans cet appel par la Présidente du South Sudan Women’s Empowerment Network, qui a évoqué une situation « intenable », où les viols collectifs sont monnaie courante.
Mme Lilian Riziq a également évoqué un pays au bord de l’effondrement, estimant que la prorogation du mandat du Gouvernement ne fera que prolonger les souffrances des civils et risque de déboucher sur des élections frauduleuses. Des arguments balayés par le représentant du Soudan du Sud, selon lequel l’extension de la période de transition était « inévitable », compte tenu du nombre de dispositions de l’accord encore en suspens. Selon lui, la feuille de route doit permettre aux parties, signataires ou non de l’Accord revitalisé, d’avancer sur cette voie, tout en donnant à la communauté internationale l’occasion de se réengager en faveur du processus de paix.
Au nom des trois membres africains du Conseil, le Ghana s’est lui aussi félicité de la prorogation de deux ans de la période de transition, non sans prôner un processus inclusif afin de permettre une appropriation nationale de la feuille de route sur la base d’un dialogue avec tous les segments de la société, y compris les femmes et les jeunes. Il a également applaudi l’intégration de 20 000 combattants issus des groupes armés signataires dans les forces armées, saluant une étape cruciale dans le renforcement des capacités sécuritaires du pays et la lutte contre l’insécurité. Ces mesures doivent bénéficier de l’appui de la communauté internationale, a-t-il à son tour affirmé, rejoint par la Fédération de Russie et la Chine, pour qui le Conseil de sécurité doit tenir compte des préoccupations du Soudan du Sud et lever les sanctions imposées à ce pays pour l’aider à améliorer ses capacités de sécurité.
Résumant l’impatience de bon nombre des délégations face aux retards pris dans la transition démocratique, les États-Unis ont regretté que les autorités sud-soudanaises aient réussi à prolonger leur mandat au pouvoir en dépit de leurs échecs ces quatre dernières années. La France a, quant à elle, appelé à une accélération de la mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé, tout en prenant note de la prolongation de la période de transition et des objectifs de la feuille de route. Exhortant le Gouvernement à mettre en place le cadre législatif et constitutionnel prévu par l’Accord de 2018, elle a fait valoir que la participation de la société civile sera décisive pour la crédibilité du processus de paix.
RAPPORTS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL SUR LE SOUDAN ET LE SOUDAN DU SUD - (S/2022/689)
Déclarations liminaires
M. NICHOLAS HAYSOM, Représentant spécial pour le Soudan du Sud et Chef de la Mission des Nations Unies dans ce pays (MINUSS), a noté que, depuis 2018, l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud a fourni un cadre pour consolider la transition vers la paix. Il a toutefois ajouté qu’à l’approche de la fin de la période de transition, il est devenu de plus en plus clair que les parties n’étaient pas en mesure de finir de mettre en œuvre des principales dispositions de l’Accord d’ici à la date limite initiale, en février 2023. Avec la fermeture de cette fenêtre, les parties signataires ont convenu le 4 août d’une feuille de route qui prolonge la période de transition de 24 mois et prévoit des élections en décembre 2024, a-t-il rappelé, qualifiant cette décision de « bienvenue » car elle représente un consensus entre les principaux signataires sur la voie à suivre. Si cette prolongation de la période de transition a suscité des réactions mitigées de la part de nombreux Sud-Soudanais, notamment chez les parties non-signataires et certains acteurs de la société civile inquiets quant à l’inclusivité du processus, il n’y a pas d’alternatives à la mise en œuvre de l’Accord de paix, a souligné le Représentant spécial. Cela s’est traduit par le vote de 37 des 43 membres de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée en faveur de la prorogation, a-t-il précisé, indiquant que la prochaine étape sera sa ratification par l’Assemblée législative nationale de transition.
M. Haysom a dit avoir indiqué au Président Kiir et au Vice-Président Machar que la feuille de route doit être un « point de passage », et non un « point final », dans le parcours du Soudan du Sud sur la voie de la transition démocratique. Au-delà du respect du calendrier de la feuille de route et du nécessaire rétablissement de la confiance, les questions les plus importantes en suspens sont, selon lui, le processus constitutionnel et la préparation des élections. Une transition politique inclusive et l’ouverture de l’espace civique sont les conditions essentielles d’un processus électoral solide, a-t-il insisté, avant de se féliciter que le Président et le Vice-Président aient convenu de sortir de l’impasse parlementaire, ce qui permet à la législature nationale de transition de traiter les aspects cruciaux de l’Accord de paix. Le Chef de la MINUSS a également salué la fin de la formation du premier contingent des forces unifiées nécessaires dans la région de l’Équatoria. Il dit attendre de ces soldats, « symboles d’unité », qu’ils jouent un rôle essentiel en contribuant à la transition démocratique du pays. Pour l’heure, a-t-il dit, ils vont être déployés pour aider à réduire la violence infranationale et intercommunautaire, tandis que la réforme du secteur de la sécurité devrait permettre une meilleure protection des civils. À cette fin, des progrès en matière de ressources budgétaires seront nécessaires pour aboutir à la création d’une armée unifiée, faute de quoi les avancées réalisées risqueraient d’être annulées, a averti le Représentant spécial.
Dans ce contexte, M. Haysom s’est dit préoccupé par les combats entre les forces du Mouvement/Armée populaire de libération du Soudan dans l’opposition-faction Kitgwang et la milice Agwelek dans le Haut-Nil. Les affrontements ont déplacé des milliers de personnes vers le Jongleï, l'État de l’Unité et le Soudan, a-t-il expliqué, affirmant avoir reçu des informations selon lesquelles des personnes fuiraient en direction du site de protection des civils de Malakal déjà surpeuplé. Condamnant également les violences récentes à Mayom, dans l’État de l’Unité, ainsi qu’à Rualbet et Ouarrap, il a pris note des mesures prises par le Gouvernement pour sanctionner les exécutions extrajudiciaires, établir des commissions d’enquête et examiner les causes profondes de ces conflits. Il a d’autre part constaté une hausse alarmante des violences sexuelles liées aux conflits, estimant que ce fléau pourrait être efficacement traité si toutes les parties concernées et les autorités compétentes mettaient un terme à l’utilisation de ces pratiques comme « arme de choix ». Il a ajouté que la MINUSS renforce son soutien au système judiciaire de chaque État en favorisant la responsabilisation et les capacités de lutte contre les crimes susceptibles de déstabiliser la paix.
Guidée par la vision stratégique triennale de son mandat, la Mission a largement réussi à accomplir un « double pivot » dans son orientation et ses opérations, a assuré M. Haysom, précisant que le premier pivot est l’intensification du processus de paix et le second la transition d’une mission de protection statique à une mission se déployant sur les points chauds. Cette présence élargie en matière de protection a entraîné une légère diminution du nombre de civils touchés par la violence et une baisse significative du nombre d’incidents par rapport à l’an dernier, s’est-il félicité. Il a cependant reconnu que l’un des plus grands adversaires de son objectif de « mission intégrée en toutes saisons » sont souvent le terrain et les conditions météorologiques. Il a enfin évoqué la détérioration de la situation humanitaire, avertissant que les besoins continuent de dépasser les financements disponibles, ce qui nécessite la reprogrammation des ressources. Il a par conséquent exhorté les donateurs à honorer leurs engagements envers le plan de réponse humanitaire, qui n’est financé qu’à 44,6%.
Mme LILIAN RIZIQ, Présidente de South Sudan Women’s Empowerment Network, a déclaré que les violences persistent au Soudan du Sud et que la situation y est devenue « intenable ». Le pays est au bord de l’effondrement, a-t-elle affirmé. Elle a indiqué que les violences contre les femmes et les filles sont monnaie courante, en mentionnant les éléments d’un rapport sur les atrocités qui ont été commises dans l’État d’Unité. Elle a précisé que 130 cas de viols collectifs ont été recensés, dont celui d’une fillette de neuf ans, morte par la suite. Le Gouvernement sud-soudanais ne protège pas les civils, a tranché M. Riziq. Elle a aussi estimé que la prorogation du mandat du Gouvernement ne ferait que prolonger les souffrances des civils. Le Gouvernement serait ainsi encouragé à tenir des élections frauduleuses afin de se maintenir au pouvoir, a-t-elle craint, en mettant en garde contre le risque d’une guerre qui provoquerait l’effondrement total du pays. Enfin, elle a appuyé l’idée de lancer un dialogue inclusif afin d’aider les Sud-Soudanais à agréer un cadre constitutionnel provisoire et à identifier les modalités de la période de transition.
Déclarations
M. RICHARD M. MILLS (États-Unis) a salué les efforts de la MINUSS en faveur de la désescalade des tensions dans les États de l’Unité et du Haut-Nil. Il s’est dit préoccupé par les inondations qui continuent de frapper des milliers de personnes au Soudan du Sud. Les États-Unis, a dit le représentant, apportent une aide d’urgence aux communautés les plus frappées. Il a demandé au Gouvernement sud-soudanais de faire cesser les hostilités et de lancer un dialogue pour remédier aux causes des conflits. Il a appelé les autorités soudanaises, les membres du Conseil et la communauté internationale à appuyer les efforts humanitaires de la MINUSS, pour assurer la sûreté et la sécurité du personnel de la Mission et des travailleurs de l’humanitaire et des déplacés.
Le représentant a déclaré être déçu par les autorités sud-soudanaises qui ont prolongé la période de transition, prolongeant ainsi leur mandat au pouvoir en dépit de leurs échecs de ces quatre dernières années. Il a estimé en effet que ces autorités ont manqué à s’acquitter pleinement des engagements pris dans le cadre de l’Accord revitalisé de 2018. Il a regretté que les dirigeants n’aient pas reporté la ratification de la prolongation de sorte, ce qui aurait permis de montrer, par le biais d’actes et de résultats sur le terrain, que les nouveaux engagements consacrés par la feuille de route seront différents et que la situation sera différente de ce qui s’est passé ces dernières années. Le Gouvernement n’a pas saisi la chance de travailler avec la société civile et autres parties prenantes signataires à l’Accord, ce qui aurait accru les chances de succès, a encore observé le délégué américain.
S’agissant des violations des droits humains dans le sud de l’État de l’Unité, il a cité le rapport du Secrétaire général pour dire que le Gouvernement et les forces alliées ont mené une tactique de la terre brûlée contre les victimes, en étant responsables notamment de violences sexuelles et des viols en groupes. Jugeant inacceptable que les femmes, les jeunes filles et les jeunes garçons soient soumis à de tels actes, il s’est dit favorable aux tribunaux mobiles. Il a appelé le Gouvernement à enquêter sur toutes les violations des droits humains, y compris les violences liées au conflit, et à forcer les auteurs à répondre de leurs actes.
Au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), M. HAROLD A. AGYEMAN (Ghana) s’est félicité de la mise en œuvre graduelle de l’Accord revitalisé, malgré les problèmes qui persistent. Il a salué les parties signataires de l’Accord revitalisé qui ont dévoilé une feuille de route prorogeant de 24 mois la période de transition afin de favoriser la réalisation des principales tâches en suspens. Afin de poursuivre sur cette voie, le représentant a prôné la mise en place d’un processus inclusif permettant une appropriation nationale de la feuille de route au moyen du dialogue avec tous les segments de la société, y compris les femmes, les jeunes et la société civile. Il s’est également réjoui des progrès réalisés dans la mise en place des forces unifiées nécessaires, en particulier la récente remise de diplômes à plus de 20 000 membres de l’armée nationale unifiée, de la police et d’autres forces de sécurité. Il s’agit là d’une étape clef dans le renforcement des capacités des institutions de sécurité du Soudan du Sud afin de protéger les civils et de lutter contre l’insécurité, a-t-il noté, y compris les violences intercommunautaires. Après avoir souligné l’importance de l’appui, notamment financier, de la communauté internationale à la mise en œuvre des dispositions transitoires de sécurité, il a exhorté les dirigeants politiques à placer l’intérêt du pays au premier plan.
Le représentant s’est dit profondément préoccupée par la réapparition de conflits intercommunautaires dans certaines parties du pays, y compris les violences à l’encontre des personnes déplacées sur l’île d’Adidiang, dans l’État du Haut-Nil, ainsi que dans les États d’Unité et de Jongleï. Alors que les changements climatiques continuent d’exacerber une situation humanitaire déjà catastrophique, il a réitéré son appel en faveur d’une augmentation du financement international. De même, le Gouvernement doit intensifier ses efforts afin d’assurer la protection des travailleurs humanitaires, a-t-il ajouté.
M. DAI BING (Chine) a observé que la transition politique au Soudan du Sud en est à une nouvelle étape, avec la signature en août d’une feuille de route qui prolonge la période transitoire jusqu’en février 2025. Cette prolongation était le bon choix à faire, étant donné la situation du pays, a estimé le représentant en souhaitant que les parties signataires parviendront à jeter des bases solides pour la tenue d’élections à la fin de la période de transition étendue. Il s’est également félicité de la formation couronnée de succès et du prochain déploiement du premier contingent des forces unifiées nécessaires, y voyant un pas en avant dans le processus de paix. Ces forces pourront contribuer au renforcement de la sécurité et à l’élimination de la violence, a-t-il dit en demandant un soutien continu de la communauté internationale. Couper les vivres tout en se plaignant des retards dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé ne contribuera pas à créer des conditions propices à la paix, a argué le délégué en demandant au Conseil de sécurité de tenir compte des préoccupations du Soudan du Sud et de lever les sanctions pour aider le pays à améliorer ses capacités sécuritaires. En tant que pays jeune, le Soudan du Sud accuse un grand retard dans son développement, d’où la nécessité de le soutenir, a fortiori en cette période de graves inondations et de crise humanitaire, a-t-il insisté. La Chine a, pour sa part, fourni une aide matérielle aux forces unifiées nécessaires et contribué, avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), au programme national de DDR (désarmement, démobilisation et réintégration). Elle continuera de fournir soutien et assistance au Soudan du Sud pour aider à la mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé, a-t-il assuré.
Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a constaté que des progrès sont effectivement possibles dans la mise en œuvre de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud. Elle a ainsi salué la fin de la formation du premier contingent des forces unifiées nécessaires, tout en invitant les autorités nationales à veiller à ce que ces soldats, une fois déployés, aient accès à la nourriture et aux médicaments, et reçoivent leurs salaires régulièrement. La représentante a également applaudi l’engagement du Gouvernement à respecter la feuille de route. Elle l’a appelé à tirer le meilleur parti de ce qui reste du délai initial et à clarifier l’utilisation du délai supplémentaire, à compter de la prolongation. Alors qu’il ne reste que cinq mois dans la période de transition d’origine, les dirigeants du pays doivent tenir leurs promesses, conformément au calendrier de la feuille de route, a-t-elle insisté, avant de rappeler que des progrès sont aussi attendus en matière de réforme de la gestion des finances publiques, de lutte contre la corruption, de rédaction d’une nouvelle constitution et de processus électoral. Elle a toutefois averti que les tentatives visant à réduire au silence les militants de la société civile et les médias vont à l’encontre de l’Accord de paix et de la gouvernance démocratique.
La déléguée a ensuite déploré le niveau « inacceptable » de la violence, y compris la violence sexuelle et l’utilisation d’enfants par les forces et les groupes armés, au Soudan du Sud, notamment dans les États de l’Unité et du Haut-Nil. Les autorités nationales doivent désamorcer ces tensions de toute urgence et lancer des enquêtes pour que les auteurs de ces crimes soient tenus responsables, a-t-elle plaidé. Elle a par ailleurs félicité la MINUSS et ONU-Femmes pour avoir contribué à l’intégration de trois réseaux de femmes dans la police, l’armée et les services pénitentiaires, jugeant que l’intégration du genre dans la réforme du secteur de la sécurité est essentielle pour favoriser un climat de responsabilisation et promouvoir une consolidation de la paix efficace. Enfin, alors que le pays connaît des inondations record pour la quatrième année consécutive, la représentante a souhaité que les risques sécuritaires liés au climat soient intégrés dans les efforts de gestion des ressources naturelles et de règlement des différends fonciers.
Mme GHASAQ YOUSIF ABDALLA SHAHEEN (Émirats arabes unis) a salué l’accord concernant la feuille de route pour une fin pacifique et démocratique de la période de transition de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud. Cet accord demeure la clef de la stabilité dans le pays, a-t-elle estimé. Au niveau sécuritaire, elle a insisté sur l’importance de protéger les civils dans un contexte de recrudescence de la violence sexuelle à l’encontre des femmes et des enfants. Elle a souhaité que les responsables de ces atrocités rendent des comptes. Toutes les parties doivent poursuivre leurs efforts pour désamorcer les tensions et fortifier la confiance entre les communautés, a-t-elle ajouté. Elle a aussi appelé à remédier aux causes profondes des défis que connaît le pays, avant de rappeler que huit millions de Sud-Soudanais sont en proie à une insécurité alimentaire aigüe. Enfin, elle a salué l’action de la MINUSS en vue de la prévention des violences.
M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a salué la fin de la formation d’un contingent de 21 000 membres des forces unifiées nécessaires, ainsi que de l’établissement de l’Assemblée législative nationale provisoire reconstituée et de l’accord conclu entre le Président Salva Kiir et le Vice-Président Riek Machar sur la participation de l’ensemble des parties à l’accord de paix dans la gouvernance des zones administratives. Il s’est également félicité de la prorogation de la période de transition jusqu’en février 2025. Il a appelé le Gouvernement du Soudan du Sud à redoubler d’efforts en vue d’un accord sur une feuille de route permettant d’ouvrir la voie à l’organisation d’élections libres, équitables et crédibles. Les préoccupations concernant les finances publiques et la corruption doivent également être réglées en priorité.
Préoccupé par la situation humanitaire, notamment par le risque de famine, le représentant a engagé la communauté internationale à redoubler d’efforts pour soutenir le Soudan du Sud. De même il s’est préoccupé des affrontements qui ont affecté des milliers de civils dans l’État du Haut-Nil. Après avoir pris note de l’amélioration de la communication entre la MINUSS et le Gouvernement et salué la création d’un ministère de la consolidation de la paix, le délégué a rappelé que l’Inde est un des principaux pays contributeurs de troupes à la MINUSS avec 2 300 militaires actuellement mobilisés pour une mission dirigée par un Indien pour la deuxième fois consécutive.
Mme CÁIT MORAN (Irlande) a réaffirmé le soutien de l’Irlande au processus de paix, notant que la feuille de route constitue une étape importante et que sa mise en œuvre est essentielle et urgente. Elle a appelé les dirigeants du Soudan du Sud à travailler ensemble, dans un esprit de compromis, pour respecter l’application de l’accord de paix. Elle a souligné que les progrès sur le plan électoral et constitutionnel seraient essentiels au succès de la paix dans le pays et a appelé les autorités à inclure la société civile et l’ensemble du peuple du Soudan du Sud, en donnant aux femmes une pleine participation dans ce processus. Elle s’est également félicitée de la récente formation de 21 000 forces de sécurité, notant que la pleine application du plan de développement d’une force de sécurité nationale est nécessaire et que les conditions dans les camps militaires doivent être améliorées.
La représentante a condamné les rapports persistants de violences et de violations des droits humains et du droit international humanitaire, y compris les violences sexuelles et basées sur le genre. Soulignant que le Soudan du Sud fait face à sa pire crise humanitaire depuis son indépendance, elle a appelé les autorités de l’État à garantir l’accès humanitaire pour combattre l’insécurité alimentaire et la malnutrition, et a demandé à tous les acteurs de protéger les travailleurs humanitaires et les ressources contre les attaques, menaces et pillages, jugeant la mort de cinq travailleurs humanitaires cette année inacceptable. Elle a rappelé que cette situation humanitaire est exacerbée par les conséquences des inondations et autres événements climatiques, indiquant que le Ministre irlandais de l’aide étrangère au développement s’est rendu à Bentiu, dans l’État d’Unité, le mois dernier, où il a été témoin des effets dévastateurs des changements climatiques et des effets conjugués des chocs climatiques et des conflits, qui causent d’importants déplacements et menacent la stabilité. Elle a exhorté le Conseil à reconnaître les risques sécuritaires relatifs au climat dans ses travaux et a réitéré son soutien au conseiller sur le climat et la sécurité au Soudan du Sud.
M. ARIAN SPASSE (Albanie) a félicité les parties signataires sud-soudanaises d’être convenues d’une feuille de route qui prolonge la période de transition de 24 mois. Il faut maintenant s’efforcer d’achever le déploiement des forces unifiées nécessaires, a-t-il recommandé, « parce que le temps presse ». Le représentant a exhorté le Gouvernement à s’engager de manière significative avec la société civile et les autres parties prenantes afin de maintenir une action soutenue dans la mise en œuvre de la feuille de route. Préoccupé par les affrontements et les vols de bétail dans l’État de l’Unité, dans celui du Haut-Nil et dans d’autres régions, le délégué a encouragé les parties à mettre fin aux combats. Le Gouvernement doit assurer la protection des civils et enquêter sur les violations des droits humains et du droit international humanitaire, en particulier celles commises par les forces gouvernementales et les milices alliées, a-t-il plaidé.
Le représentant s’est étonné de l’augmentation de 218% des violences sexuelles liées aux conflits entre avril et juin. Il a appelé à la reddition de la justice et à la fin de l’impunité. Il a aussi demandé la mise en œuvre accélérée du plan d’action des forces armées sur la lutte contre la violence sexuelle liée aux conflits. Enfin, il a exhorté les parties à protéger les civils et à assurer l’acheminement de l’aide humanitaire, condamnant les attaques contre les travailleurs humanitaires et leurs biens. Les auteurs de ces attaques doivent être traduits en justice, a-t-il insisté.
M. JOãO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a d’abord exhorté les parties à l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud à percevoir la feuille de route comme une « incitation à mettre en œuvre les clauses de l’accord ». Saluant le « déploiement proactif par la MINUSS » au Soudan du Sud, le délégué s’est néanmoins alarmé des violences dans l’État de l’Unité, dans l’État du Haut-Nil ainsi que des viols commis dans de nombreuses régions du Soudan du Sud, appelant les autorités sud-soudanaises à des réactions « plus audacieuses ». Le délégué s’est en outre inquiété de la situation humanitaire du pays, rappelant qu’il était craint que les deux tiers de la population soient confrontés à l’insécurité alimentaire et la malnutrition. Il a ainsi appelé à une augmentation des fonds alloués à l’aide humanitaire, dans ce pays des plus dangereux au monde pour les travailleurs humanitaires. Le représentant, enfin, a rappelé la participation de son pays à la MINUSS, via la présence du chef d’état-major de la force brésilienne. Elle est pour lui le « gage » de l’engagement de Brasilia « à promouvoir une paix durable au Soudan du Sud ».
Mme ELENA CURZIO VILA (Mexique) s’est félicitée de la signature de la feuille de route prorogeant la période de transition jusqu’en février 2025, en espérant que le Gouvernement du Soudan du Sud profitera de cette période pour réaliser des progrès tangibles. De telles avancées sont essentielles pour mettre en place un processus inclusif, avec la participation de toutes les parties, y compris l’opposition, la société civile ainsi que les groupes de femmes et de jeunes. Toutefois, la situation sécuritaire demeure une source de préoccupation, a-t-elle noté, notamment la hausse des violences intercommunautaires, y compris les attaques menées contre le centre pour personnes déplacées d’Adidiang. La représentante a dit espérer que la récente remise de diplômes au premier groupe des forces unifiées nécessaires permettra au Gouvernement de prendre les mesures qui s’imposent pour protéger les civils et prévenir l’escalade de la violence. Alors que la MINUSS et le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme continuent de signaler des abus et de graves violations des droits humains, la déléguée a exhorté les autorités du Soudan du Sud à prendre des mesures immédiates pour mettre fin à la violence envers la communauté humanitaire. Elle a dénoncé à cet égard l’imposition de droits de douane et de taxes sur les marchandises destinées à la MINUSS.
Mme CAROLINE QUINN (Royaume-Uni) a réaffirmé que l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud reste le meilleur moyen d’instaurer la paix et la stabilité dans le pays. Saluant à cet égard la décision de la Commission mixte de suivi et d’évaluation reconstituée de prolonger la période de transition, elle a appelé le Gouvernement à respecter les engagements pris dans le cadre de la feuille de route et à intégrer la société civile au processus. Elle l’a également exhorté à consacrer des ressources suffisantes à la mise en œuvre de l’Accord revitalisé, qui reste selon elle trop lente, malgré la fin de la formation des premiers hommes des forces unifiées nécessaires. Elle a donc encouragé le Gouvernement à indiquer s’il a besoin de soutien, notamment de la MINUSS, pour atteindre les objectifs fixés. Dans ce contexte, la déléguée s’est déclarée préoccupée par le niveau élevé de violence dans le pays, faisant état de violences sexuelles généralisées et de violations des droits humains. Dénonçant les attaques menées dans le comté de Mayom et les exécutions extrajudiciaires perpétrées dans l’État de l’Unité, elle a salué la formation d’une commission spéciale chargée d’enquêter sur ces affaires. Elle a également condamné la violence en cours dans l’État du Haut-Nil, avant de souligner les efforts déployés par la MINUSS pour protéger les civils. La représentante a cependant réitéré qu’il est de la responsabilité du Gouvernement de protéger ses citoyens, de même qu’il doit offrir un accès sûr et sans entrave aux organisations humanitaires.
Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a salué les efforts de stabilisation de la MINUSS, ainsi que l’accord concernant la feuille de route pour une fin pacifique et démocratique de la période de transition de l’Accord revitalisé. Elle a souligné l’importance que revêt la constitution d’une armée unie au Soudan du Sud, avant de plaider pour un assouplissement des sanctions prises contre ce pays. La déléguée s’est dite vivement préoccupée par les violences perpétrées contre les civils dans l’État d’Unité, avant de saluer les efforts de médiation de l’Union africaine et de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD). La tâche essentielle de la MINUSS et de contribuer à la stabilisation du pays et d’apporter un appui aux autorités sud-soudanaises, a noté la déléguée, en rappelant que les questions relatives aux droits humains et à la lutte contre la corruption sont la compétence de Djouba.
Mme ISIS MARIE DORIANE JARAUD-DARNAULT (France) a d’emblée appelé à accélérer la mise en œuvre de l’Accord de paix revitalisé. Prenant note de l’extension de la période de transition pour deux années supplémentaires, elle a constaté que cette décision était devenue inéluctable puisqu’il était irréaliste de tenir les élections d’ici à la fin de l’année. Elle a également salué l’adoption de la feuille de route, qui, selon elle, définit des échéances claires en matière d’arrangements sécuritaires, de processus constitutionnel et de préparation de futures élections. Pour la représentante, l’intégration de 21 000 combattants dans les forces de sécurité est un autre pas important, le but étant d’intégrer l’ensemble des combattants issus des groupes armés signataires et de les déployer sur le terrain. S’agissant de la mise en œuvre de la feuille de route, elle a encouragé les autorités à allouer les ressources budgétaires nécessaires et à mettre en place le cadre législatif et constitutionnel prévu par l’Accord de paix revitalisé. La participation de la société civile, en particulier des femmes et des jeunes, sera décisive pour la crédibilité du processus de paix, a-t-elle souligné, avant de s’alarmer des restrictions aux libertés d’expression et de réunion. À cet égard, les travaux engagés pour circonscrire les attributions des forces de sécurité doivent être finalisés dès que possible, a plaidé la déléguée.
Réitérant son soutien aux mécanismes de suivi de l’Accord de paix et du cessez-le-feu, mis en place sous l’égide de l’IGAD, la représentante a ensuite appelé les autorités à remplir leurs prérogatives pour protéger les civils et les travailleurs humanitaires. Alors que la MINUSS vient de produire un rapport qui établit les faits et les responsabilités concernant les atrocités commises entre février et mai dans l’État de l’Unité, elle a souhaité que les auteurs de ces violences soient traduits en justice et sanctionnés par le Conseil de sécurité. Elle a également enjoint les autorités à reprendre la coopération engagée avec la MINUSS, rappelant qu’elle a produit des résultats encourageants par le passé. Elle a enfin indiqué que, face à l’urgence, l’Union européenne a augmenté son assistance humanitaire au Soudan du Sud, en la portant à 77,2 millions d’euros en 2022, ce qui vient s’ajouter aux 208 millions d’euros d’aide pour la coopération au développement prévus jusqu’en 2024.
M. AKUEI BONA MALWAL (Soudan du Sud) a remercié le Secrétaire général d’avoir compris la nécessité de la nouvelle feuille de route et de la prolongation de deux ans de la période intérimaire de l’application de l’accord de paix. Il a prié les partenaires qui ont retiré leur financement par frustration de reconsidérer leur décision. La nouvelle feuille de route et l’extension étaient inévitables car beaucoup reste à mettre en œuvre dans l’accord, a justifié le représentant. Cette feuille de route donne aux signataires une autre chance d’appliquer sérieusement, au cours des deux prochaines années, toutes les dispositions et tous les chapitres de l’accord, a-t-il poursuivi. Elle donne à l’ensemble de la communauté internationale une autre chance de se réengager afin d’éviter de gaspiller la prolongation de deux ans comme les trois dernières années.
Selon lui, le Président Salva Kiir Mayardit a saisi cette occasion pour appeler les parties récalcitrantes à rentrer dans le pays et à se joindre au processus de rétablissement de la paix. Sans l’aide de la communauté internationale, les parties signataires ne pourront pas surmonter les défis qui ont ralenti la mise en œuvre en temps voulu de la paix au cours des trois dernières années, a-t-il prévenu. Cette feuille de route est une autre occasion pour la communauté internationale de s’impliquer davantage en aidant le processus de paix à se terminer avec succès en février 2025, a promis le représentant qui a attiré l’attention de la communauté internationale, y compris les ONG nationales et internationales, pour qu’elle vienne au secours du Soudan du Sud frappé par une calamité naturelle qui touche actuellement la majorité des Sud-Soudanais. Cette année, la plupart des dix États du Soudan du Sud sont submergés, a-t-il rappelé en faisant référence aux nouvelles inondations qui ont aggravé la situation causée par les eaux de crue de l’an dernier qui ne se sont pas complètement asséchées.