Conseil de sécurité: en Libye, une situation « grandement instable » en raison de l’impasse constitutionnelle, selon la Sous-Secrétaire générale
La situation en Libye demeure grandement instable, en raison de la persistance de l’impasse constitutionnelle qui exacerbe les tensions sécuritaires, a mis en garde, cet après-midi, devant le Conseil de sécurité, Mme Martha Ama Akyaa Pobee, la Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique aux Départements des affaires politiques et de consolidation de la paix, et des opérations de paix.
Tout en saluant les progrès accomplis à Genève du 28 au 30 juin, à l’issue d’une réunion entre les chefs de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État libyens, sur des mesures de transition en vue de futures élections, la création de provinces basées sur les districts électoraux et un système de redistribution fiscale, Mme Pobee a regretté les blocages liés à l’absence d’accord sur les critères d’éligibilité des candidats à l’élection présidentielle. C’est pourquoi elle a rappelé que la priorité pour l’ONU en Libye reste le retour au processus électoral.
« Il y a urgence à remettre la Libye sur la voie des élections », ont insisté le Royaume-Uni, les États-Unis et la France avant d’appuyer les efforts de l’ONU en faveur d’un accord entre les deux chambres afin de permettre la tenue des élections présidentielle et parlementaires dans les meilleurs délais. Dans ce contexte, ces délégations ont exhorté les acteurs libyens à finaliser rapidement un accord, notamment sur les critères d’éligibilité aux scrutins.
Les États-Unis ont par ailleurs condamné les opérations des mercenaires du groupe Wagner en Libye, en demandant qu’un mandat clair et global soit accordé à la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL), doté des ressources et des orientations politiques adéquates. « La précipitation est la mère des échecs », a réagi la Fédération de Russie qui, tout en appuyant le rôle de la MANUL, a fustigé la hâte « contradictoire » avec laquelle les Occidentaux semblent vouloir faire de l’exploitation du pétrole libyen une priorité plutôt que les progrès constitutionnels tant nécessaires à la stabilisation du pays. Rappelant que le mandat de la MANUL expire cette semaine, il s’est interrogé sur la capacité de l’ONU à aider les parties libyennes à parvenir à un processus politique inclusif, en l’absence d’un représentant spécial.
Les délégations européennes, par la voix de l’Irlande, de la Norvège et de la France, ont réitéré la nécessité de respecter l’embargo sur les armes avant de saluer l’opération IRINI qui permet de veiller au respect de cet embargo, ainsi que l’a encore récemment démontré une opération à l’encontre d’un navire. L’Inde, quant à elle, a appelé à juguler au plus vite la recrudescence des activités terroristes en Libye, qui présente des risques pour l’ensemble du Sahel, avant de s’inquiéter de la présence en Libye de combattants syriens appuyés par la Türkiye.
Au nom du groupe A3, soit les trois membres africains du Conseil de sécurité (Gabon, Ghana et Kenya), le Kenya a réitéré sa profonde préoccupation devant les souffrances de milliers de migrants et réfugiés en Libye avant de prévenir que l’interception persistante et le retour dans les ports libyens des migrants traversant la Méditerranée en quête d’une vie meilleure en Europe n’est pas une solution viable. Appuyé par la Chine, il a souhaité que le futur représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye soit un Africain.
Alors que la National Oil Corporation a repris les exportations pétrolières en Libye le 19 juillet, et que de nombreuses délégations ont plaidé aujourd’hui pour une redistribution équitable des profits, la Libye a demandé que son peuple puisse jouir de ses ressources naturelles sans ingérence étrangère. Rappelant qu’elle s’est lassée des 172 réunions organisées par le Conseil de sécurité depuis que la situation de son pays figure à son ordre du jour, et des 19 rapports du Secrétaire général « qui n’ont rien apporté à la situation libyenne », la délégation a prévenu que les élections ne pourront se tenir dans son pays tant qu’il y aura des ingérences étrangères dans les affaires internes de son pays.
LA SITUATION EN LIBYE
Déclarations
Mme MARTHA AMA AKYAA POBEE, Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique aux Départements des affaires politiques et de consolidation de paix et des opérations de paix, a cité une situation en Libye qui demeure grandement instable malgré quelques progrès, se disant inquiète de la persistance de l’impasse constitutionnelle qui exacerbe les tensions sécuritaires. Elle a cité aussi les piètres qualités des services fournis par l’État et les violations des droits humains qui sont source de vives préoccupations à travers tout le pays. La haute fonctionnaire a salué la contribution de la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la Libye, Mme Stephanie Williams, qui a organisé du 28 au 30 juin, à Genève, une réunion entre les chefs de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État libyens, en rappelant que la priorité pour l’ONU en Libye reste le retour au processus électoral. Tout en se félicitant que cette rencontre ait permis de s’entendre sur certaines mesures de transition pour de futures élections, la création de provinces selon les districts électoraux existants et un système de redistribution fiscale, Mme Pobee a regretté les blocages liés à l’absence d’accord sur les critères d’éligibilité des candidats à l’élection présidentielle. Après avoir salué la tenue ce mois d’une réunion à Istanbul, la Sous-Secrétaire générale a exhorté les parties à trouver un accord sur cette question avant de rappeler que le seul moyen de résoudre la crise politique dépend de la tenue d’élections nationales le plus tôt possible.
Par ailleurs, elle a cité les manifestations du 1er juillet à Tripoli Benghazi, Al-Bayda et Tobrouk, au cours desquelles les manifestants ont exprimé leurs frustrations face aux divisions politiques et à la détérioration des conditions de vie. Elle a exhorté les acteurs politiques libyens à répondre aux attentes de la population. Alors que les groupes armés continuent de se positionner autour des deux principaux protagonistes, MM. Dbeibah ou Bashagha, elle s’est dite préoccupée par les heurts armés observés à Tripoli le 21 juillet et à Misrata le 23 juillet. Elle a salué la reprise des travaux de la Commission militaire conjointe 5+5, les rencontres au Caire et à Tripoli entre les commandants militaires libyens, la finalisation d’un plan de retrait des forces étrangères et l’opérationnalisation d’une salle militaire conjointe.
M. Dbeibah a nommé M. Bengdara, l’ancien gouverneur de la Banque centrale libyenne, à la tête de la National Oil Corporation, pour remplacer M. Sanalla qui présidait cette instance depuis 2015. M. Sanalla a saisi les instances compétentes pour contester son remplacement. Après avoir noté que la Libye a repris ses exportations de pétrole le 19 juillet, Mme Pobee a insisté sur le fait que les ressources naturelles appartiennent à tous les Libyens et que les exportations pétrolières doivent leur bénéficier. Par ailleurs, elle s’est aussi inquiétée de la situation des droits de la personne, mais aussi de l’insuffisance de l’accès aux services de santé et éducatifs. Elle s’est inquiétée de l’érosion de l’espace civil, en citant notamment des tortures contre des migrants ou demandeurs d’asile ou encore la détention de neuf acteurs humanitaires qui ont exercé pacifiquement leur droit d’expression. Mme Pobee a enfin salué les efforts de l’Union africaine (UA) visant à organiser une conférence de réconciliation, citant en particulier la réunion technique accueillie à Brazzaville qui a rassemblé l’Union africaine et les autres partenaires internationaux dans ce sens.
Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a dénoncé la flambée de violence à Tripoli et appelé à la désescalade. Elle a jugé urgent un processus politique inclusif et exhorté les parties libyennes à des compromis en vue de la tenue d’élections. La déléguée a aussi plaidé pour une distribution équitable des revenus issus de la production pétrolière. Les autorités doivent protéger les droits humains dans tout le pays, a-t-elle ajoutée, en s’inquiétant de la répression conduite contre la société civile. Enfin, la représentante a salué la récente saisie de navires transportant des biens militaires vers la Libye et appelé au plein respect de l’embargo sur les armes.
M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a insisté sur l’importance de résoudre de manière pacifique toutes les questions en suspens. Rappelant l’urgence d’organiser les élections présidentielle et législatives libres, pacifiques et crédibles, le représentant a prié les parties libyennes de parvenir au consensus nécessaire sur une base constitutionnelle. Il s’est inquiété des derniers affrontements ainsi que de la mobilisation et des activités des groupes armés dans un contexte marqué par l’apparition de signes concrets d’essoufflement après l’accord de cessez-le-feu. Les groupes terroristes ne doivent pas rester impunis, a exhorté le représentant qui a aussi réclamé le retrait des forces étrangères et des mercenaires dont la présence se fait au détriment de la paix et de la stabilité du pays et de la région. Il a également dit être préoccupé par les violations de l’embargo sur les armes en Libye.
S’exprimant au nom du groupe A3 des trois membres africains du Conseil de sécurité (Gabon, Ghana, Kenya), M. MARTIN KIMANI (Kenya) a réaffirmé qu’un dialogue dirigé par la Libye pour les Libyens est la seule option pour une solution durable à la crise. Il a félicité les représentants des deux chambres pour leurs efforts visant à parvenir à un consensus avant de saluer la rencontre entre les généraux Mohamed Al Haddad et Abdel-Razek Al-Nadori. Il a rappelé l’importance des travaux de la Commission militaire conjointe 5+5 et les engagements pris par les parties à garantir le maintien du cessez-le-feu. Il a jugé crucial que les représentants des deux parties continuent à travailler à la formation d’une structure unifiée pour l’armée et conviennent de la nomination d’un commandant en chef unique.
Par ailleurs, le représentant du groupe A3 a réitéré sa profonde préoccupation face aux souffrances de milliers de migrants et réfugiés en Libye. Il a ajouté que l’interception persistante et le retour dans les ports libyens des migrants traversant la Méditerranée pour chercher une vie meilleure en Europe n’est pas une solution durable. Il a condamné le traitement inhumain que subissent les migrants sur terre et sur mer, avant d’exiger que les personnes impliquées s’abstiennent de violations des droits humains et respectent le droit international humanitaire (DIH) et les législations et normes internationales pertinentes régissant la migration et le traitement des réfugiés. En outre, il a souhaité que le futur représentant spécial du Secrétaire général pour la Libye soit un Africain.
M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a souligné la précarité de la situation sécuritaire en Libye, comme le montrent les incidents qui se sont déroulés entre les milices à Tripoli. Il a indiqué que le peuple libyen a montré clairement sa volonté de choisir un gouvernement et demandé la tenue d’élections crédibles et inclusives. La reprise des hostilités entraînerait des conséquences extrêmement graves pour toute la région, a souligné le représentant, en appelant le Conseil à user de tous les outils à sa disposition pour que ceux qui s’opposent au processus de paix ne puissent le faire en toute impunité. Il a dénoncé les violations de l’embargo sur les armes et demandé que les navires soient contrôlés afin d’empêcher que du matériel militaire ne soit livré en Libye. Enfin, le délégué a réclamé le retrait coordonné des combattants étrangers et demandé le plein respect des droits humains en Libye.
M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) a exhorté les chefs de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État à redoubler d’efforts pour régler les questions en souffrance. Ils doivent parvenir à un accord sur la tenue des élections car tout retard n’aide pas le peuple libyen et exacerbe les tensions, a-t-il mis en garde. Les troubles provoqués par l’exploitation des installations pétrolières en sont un exemple, privant les populations de ses ressources. Le représentant s’est également dit préoccupé par l’impasse sur la question de la Banque centrale. Exhortant les parties libyennes à prévenir les violences, il a annoncé l’appui de sa délégation aux efforts déployés en vue de collecter les preuves des violations des droits humains. Il a aussi demandé le retrait et le départ des forces étrangères en Libye, en particulier du groupe Wagner. Le rôle de l’ONU est essentiel et le Conseil de sécurité doit donner à la MANUL un mandat clair qui reflète la vue de la majorité des membres, a souligné le délégué. Refuser à la Mission un mandat de 12 mois et saboter la nomination d’un représentant spécial, c’est prendre en otage la Libye, a-t-il prévenu, en demandant à ses homologues de privilégier une approche plus constructive qui donne à la MANUL les outils dont elle a besoin.
M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) s’est inquiété de la crise du pouvoir exécutif en Libye, fustigeant un statu quo porteur de risques pour la stabilité du pays. Il a appelé à parvenir à un gouvernement unifié, capable de mener le processus électoral sur l’ensemble du territoire libyen. « Il y a urgence à remettre la Libye sur la voie des élections », a insisté le représentant qui a appelé les acteurs libyens à finaliser rapidement un accord, notamment sur les critères d’éligibilité aux élections. Il a également appelé au respect de l’embargo sur les armes, ainsi qu’à la pleine mise en œuvre de l’accord du cessez-le-feu qui, a-t-il ajouté, passe par le retrait de toutes les forces étrangères et mercenaires dans les meilleurs délais, conformément au plan d’action libyen, ainsi que par la mise en place d’un processus de démobilisation, désarmement et réintégration, en lien avec les pays de la région. Il a salué la rencontre à Tripoli entre les généraux Haddad et Nadori dans le cadre des travaux de la Commission militaire conjointe 5+5, qui est une étape supplémentaire vers la réunification des institutions militaires et sécuritaires libyennes. Le représentant a par ailleurs estimé que la reprise de la production et de l’exportation pétrolière est une étape importante, avant de préciser que la France continuera d’apporter son soutien aux propositions visant à assurer une redistribution équitable et transparente des revenus pétroliers, au profit de la population libyenne partout dans le pays. Le représentant a par ailleurs appelé à un renouvellement substantiel du mandat de la MANUL pour tenir compte des évolutions de la situation depuis un an.
M. MARTIN GALLAGHER (Irlande) a souligné la précarité de la situation sécuritaire en Libye, comme le montrent les incidents qui se sont déroulés à Tripoli la semaine dernière. Il s’est dit en faveur d’un renouvellement du mandat de la MANUL, exhortant le Conseil à faire montre de flexibilité afin qu’un nouveau représentant spécial prenne ses fonctions le plus rapidement possible. Il a mentionné la réunion qui s’est tenue à Genève entre les chefs de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État libyens. Il est très décevant qu’ils n’aient pas pu agréer une base constitutionnelle pour la tenue d’élections, a constaté le délégué, en appelant à une intensification du dialogue. Enfin, il a dénoncé les obstacles qui s’opposent à la pleine participation des femmes à la transition libyenne, le mot même de « féministe » étant devenu passible d’enquêtes. Nous appelons par ailleurs à un établissement des responsabilités s’agissant de la disparition forcée de Siham Sergewa il y a trois ans, a ajouté en conclusion M. Gallagher.
Mme MONA JUUL (Norvège) a dit être préoccupée par les affrontements qui ont éclaté récemment en Libye. Elle a demandé que soient protégés les civils, en particulier les enfants. L’absence de gouvernement unifié et l’action en coulisse des dirigeants libyens nuisent à la confiance et alimentent les tensions, a-t-elle encore mis en garde. Le peuple libyen est en colère et sa patience a des limites, a prévenu la représentante, demandant que soient organisées dès que possible les élections. Elle a aussi exigé le renforcement de la sécurité, notamment en réalisant l’unification des forces libyennes. Quant à la MANUL, qui a besoin de ressources supplémentaires pour remplir sa mission, elle doit être dotée d’un mandat robuste de 12 mois tenant compte de l’évolution de la situation sur le terrain. La représentante a réitéré le soutien de sa délégation à l’opération IRINI, relative à l’embargo sur les armes, qu’il faut respecter.
M. DAI BING (Chine) s’est inquiété des conséquences négatives de l’absence d’accord sur l’organisation de l’élection présidentielle. Il a salué la tenue d’une réunion à Genève entre les chefs de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État libyens, avant d’exhorter les parties à préserver un dialogue politique permettant de créer les conditions propices à la tenue d’élections le plus rapidement possible. Après avoir salué la reprise des travaux de la Commission militaire conjointe 5+5, indispensable pour préserver le cessez-le-feu, le représentant de la Chine s’est réjoui des progrès annoncés pour réaliser le retrait des forces étrangères de la Libye. Il a ensuite souhaité que le secteur pétrolier soit géré par les Libyens afin que les recettes pétrolières servent les intérêts de la population libyenne. Il a appuyé la nomination d’un représentant spécial du Secrétaire général originaire de l’Afrique.
M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes unis) s’est dit préoccupé par les incidents qui se sont déroulés à Tripoli et a appelé à la retenue. Il a déploré que les parties n’aient pas pu agréer une base constitutionnelle pour la tenue d’élections, avant d’exhorter ces dernières à redoubler d’efforts pour surmonter leurs divergences. Tous les acteurs doivent s’engager en faveur de la désescalade, a dit le délégué, en soulignant la nécessité de préserver les axes routiers. Il a appelé à l’unité des parties autour des initiatives de réconciliation nationale, en soulignant l’importance de la justice transitionnelle. Il a aussi insisté sur le rôle joué par la Ligue des États arabes et l’Union africaine dans la concrétisation de cet objectif. Enfin, le délégué a réclamé le retrait graduel des combattants étrangers et des mercenaires et souhaité la nomination d’un nouveau représentant spécial.
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a regretté l’impossibilité pour les chefs de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État de trouver un accord sur la tenue des élections. Cette situation a plongé le pays dans l’incertitude. Le représentant a appelé les acteurs politiques à préserver la paix et éviter toute mesure susceptible d’hypothéquer l’avenir de la Libye. Il a aussi rappelé la nécessité de surmonter les divergences et parvenir à des compromis, concernant notamment la participation des représentants de l’ancien régime. Le délégué a soutenu la suggestion de l’Union africaine de convoquer une réunion de réconciliation en Libye. Appelant à éviter les confrontations militaires, il a également salué la réunion des chefs militaires libyens. Il a reconnu l’importance d’assurer une extraction stable du pétrole libyen mais s’est dit « étonné » par l’ardeur des pays occidentaux d’accélérer l’exploitation pétrolière en Libye au détriment de la solution politique. Soulignant que l’ONU joue un rôle central dans la résolution de la situation en Libye, le représentant a estimé que l’impasse actuelle est en partie due à l’absence de représentant spécial et a exhorté le Secrétaire général à le nommer promptement. Il s’est dit favorable à une prolongation technique de trois mois du mandat de la MANUL, ajoutant qu’une prorogation plus longue pourra être discutée une fois le représentant spécial nommé.
M. FERIT HOXHA (Albanie) s’est dit préoccupé par les incidents qui se sont déroulés à Tripoli et a appelé à la retenue. La Libye doit aller de l’avant en organisant des élections, a dit le délégué, notant que trop de temps a été perdu. Il a déploré que les parties n’aient pas pu agréer une base constitutionnelle, avant de dénoncer les violations des droits humains dont les auteurs, a-t-il insisté, doivent être traduits en justice. Il a plaidé pour un processus politique inclusif dirigé et contrôlé par les Libyens et demandé le retrait immédiat des combattants étrangers et des mercenaires. Il serait regrettable que le Conseil ne s’accorde pas sur la nomination d’un nouveau représentant spécial, a par ailleurs estimé le délégué.
M. JOÃO GENÉSIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) a souligné le rôle crucial de la MANUL. Malgré des arrangements provisoires loin d’être optimaux depuis le départ de son chef, la Mission a été en mesure de nourrir le dialogue entre les parties, a-t-il dit, avant d’appeler à un dialogue accru au sein du Conseil de sécurité avant le renouvellement de son mandat. Il a appelé le Secrétaire général et les membres du Conseil à œuvrer afin qu’un nouveau représentant spécial prenne ses fonctions. Le délégué a ensuite exhorté les parties libyennes à régler les questions en suspens relatives à la tenue d’élections, soulignant l’appui que peut fournir la Commission de consolidation de la paix à la Libye. Enfin, le délégué a rappelé la souveraineté du peuple libyen sur les ressources naturelles du pays, celles-ci devant être consacrées au développement de la Libye, sans ingérence extérieure.
M. TAHER M. T. ELSONNI (Libye) a dénoncé les ingérences extérieures dans son pays. Sans l’intervention des responsables militaires qui se sont réunis la semaine dernière, les récents affrontements dans plusieurs villes auraient pu faire beaucoup plus de victimes. En dépit des 172 réunions mensuelles du Conseil de sécurité sur la Libye et des 19 rapports du Secrétaire général sur la question, cet organe est paralysé, a déploré le représentant, pour qui ces rapports mensuels de l’ONU ressemblent à un journal télévisé qui répète les mêmes faits et les mêmes choses. La population est lasse de ces réunions infructueuses et n’a plus confiance dans l’ONU. La situation en Libye est politisée, a ajouté le délégué, selon lequel son pays ne présente pas de menace à la paix et à la sécurité internationales, avant de dénoncer l’absence de représentant spécial du Secrétaire général.
Les Libyens sont las de ces atermoiements qui ruinent leur vie quotidienne, a encore déclaré le représentant, y voyant les raisons pour lesquelles la jeunesse libyenne est descendue dans la rue ces dernières semaines. Elle est lasse de l’absence de services publics et des opérations des groupes armés, appelant à sortir de l’impasse, à organiser des élections et à rétablir la stabilité. Le Conseil doit écouter car il est responsable de la situation en Libye, a assuré le délégué. Il a ensuite dit qu’après l’échec des dernières négociations entre les chefs de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État, le Conseil de la présidence du Gouvernement d’entente nationale avait tenté de parvenir à un consensus. Il a dit être optimiste quant à une issue positive à cette démarche.
S’agissant de la situation économique, le représentant a déclaré que les Libyens ont le droit de jouir de leurs ressources naturelles sans ingérence étrangère. Il faut soutenir les Libyens qui veulent un État stable capable de gérer les ressources nationales. Le point de départ est l’unification des groupes armés qui devraient être placés sout l’autorité des responsables civils. Dénonçant la présence des forces étrangères et des mercenaires dans son pays, le représentant a aussi vilipendé des intérêts internationaux qui craignent la tenue d’élections car les résultats ne leur sont pas garantis. Il a rappelé que les préoccupations de la communauté internationale que sont la production de pétrole, les migrations vers l’Europe et la lutte contre le terrorisme ne concernent pas les Libyens. Nous voulons des solutions libyennes aux problèmes de notre pays, a assené le délégué. Pour y parvenir, des élections sont nécessaires, mais ce ne sera pas possible tant qu’il y aura des ingérences étrangères dans les affaires internes de son pays. « Laissez les Libyens tranquilles pour qu’ils trouvent par eux-mêmes les solutions à leurs problèmes », a conclu le représentant.