Conseil de sécurité: Volodymyr Zelenskyy réclame la création d’un tribunal international pour enquêter sur les crimes commis par la Russie en Ukraine
Une série d’attaques meurtrières récentes contre des civils en Ukraine ont amené le Président ukrainien, M. Volodymyr Zelenskyy, à prendre part cet après-midi à la séance du Conseil de sécurité consacrée à la situation dans son pays. S’exprimant par visioconférence, après la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Mme Rosemary DiCarlo, le Président Zelenskyy a réclamé la création d’un tribunal international pour enquêter sur les crimes commis par la Fédération de Russie, au lendemain de la frappe de missile qui a touché un centre commercial de la ville de Krementchouk, faisant 18 morts et 59 blessés selon un bilan provisoire.
Après avoir appelé les membres du Conseil à mesurer l’horreur de ces derniers jours, M. Zelenskyy s’est interrogé sur « l’impunité dont bénéficie un État devenu terroriste ». Plus de huit ans se sont écoulés depuis l’agression russe contre l’Ukraine, a-t-il martelé. « Nous devons agir de toute urgence et tout faire pour que la Russie cesse ses massacres. » Le terme « génocide » a été utilisé de manière répétée, a-t-il dit en faisant allusion aux charniers de Marioupol, entièrement rasée par l’armée russe. Il a rappelé que dans le cas du Rwanda, le Conseil de sécurité avait créé un tribunal international six mois après le début du génocide. Le Président a remercié tous les États « civilisés » qui souscrivent à son point de vue et aident à défendre l’ordre juridique international. Il est impératif de créer un tribunal pour enquêter sur tout ce que l’armée russe a fait aux Ukrainiens, a-t-il plaidé avant de demander au Conseil d’observer une minute de silence à la mémoire des victimes ukrainiennes.
La Commission d’enquête sur l’Ukraine a conclu sa première mission dans le pays, a rapporté la Secrétaire générale adjointe, et les éléments recueillis sur place confirment la probabilité que de graves violations des droits de l’homme et du droit humanitaire international, susceptibles d’être qualifiées de « crimes de guerre », ont été commises en Ukraine depuis le mois de février. « Il faudra que justice soit faite, c’est impératif pour le peuple ukrainien et pour empêcher que de tels crimes ne se reproduisent à l’avenir ailleurs dans le monde », a lancé Mme DiCarlo. En attendant, elle a appelé à l’ouverture d’une enquête sur l’attaque de Krementchouk et sur les incidents survenus dans d’autres zones résidentielles situées loin du front.
« Les Forces armées russes ont commis des crimes de guerre en Ukraine », ont tranché les États-Unis, appuyés par l’Albanie. « Les preuves s’accumulent. » Face à ces attaques, on ne peut pas ne pas prendre parti, a averti le représentant américain pour qui la communauté internationale doit faire en sorte que les coupables rendent des comptes. « La justice doit l’emporter. » La Russie continue de violer les principes les plus élémentaires du droit international humanitaire après avoir piétiné la Charte des Nations Unies, a renchéri la France. Les criminels de guerre seront traduits en justice, a assuré son représentant, en indiquant que la France maintiendra « la pression la plus forte possible » pour contraindre les autorités russes à mettre fin à cette guerre qui ébranle la sécurité internationale. Une inquiétude partagée par Mme DiCarlo pour qui ce conflit, une source permanente d’instabilité en Europe, ne montre aucun signe d’essoufflement. Le Royaume-Uni et la Norvège ont en outre reproché au Bélarus d’avoir facilité les attaques contre l’Ukraine.
Tous les sites où se trouvent des armes et mercenaires étrangers sont des « cibles légitimes », s’est défendue la Fédération de Russie, accusant l’Ukraine d’entreposer des armes dans les centres urbains pour utiliser la population comme bouclier humain. Le représentant russe a nié tout bombardement russe d’un centre commercial à Krementchouk, précisant que la seule frappe menée dans cette ville a visé un entrepôt d’armes françaises et américaines destinées à frapper des villes du Donbass.
« La communauté internationale devrait créer un environnement propice à des pourparlers de paix entre les belligérants », a tempéré la Chine, appuyée par les Émirats arabes unis et le Ghana. La Chine s’est dite convaincue que « l’envoi d’armes ne ramène pas la paix, pas plus que les sanctions ne permettent de régler les problèmes sécuritaires ».
L’Inde, le Mexique, le Kenya et le Gabon ont insisté également sur la reprise des exportations des céréales et des engrais ukrainiens pour atténuer la crise alimentaire mondiale.
MAINTIEN DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ DE L’UKRAINE
Déclarations
Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et de la consolidation de la paix, a reconnu que les dévastations infligées à l’Ukraine empirent, résultats dramatiques d’attaques toujours plus aveugles contre des civils résidant dans des villes très éloignées des lignes de front. Ce conflit, a-t-elle averti, est une source permanente d’instabilité en Europe et il ne montre aucun signe d’essoufflement. Après avoir condamné la frappe contre le centre commercial de la ville de Krementchouk, qui s’est soldée par un bilan effroyable « et sûrement provisoire » de 18 civils tués et de 59 blessés, Mme DiCarlo a appelé à l’ouverture d’une enquête sur cet incident comme sur ceux survenus dans d’autres zones résidentielles situées loin du front.
Sur le front, des scènes rappellent les guerres mondiales, a poursuivi Mme DiCarlo, qui a indiqué qu’en date du 26 juin le Haut-Commissariat aux droits de l’homme déplore 10 631 victimes du conflit en Ukraine, dont 4 731 tués, ces chiffres étant basés sur des incidents vérifiés, « ce qui signifie que les chiffres effectifs sont beaucoup plus élevés ».
Elle a ajouté que la Commission d’enquête sur l’Ukraine avait conclu sa première mission dans le pays, en avançant que les éléments recueillis sur place confirment la probabilité que de graves violations des droits de l’homme et du droit humanitaire international, susceptibles d’être qualifiés de « crimes de guerre », ont été commises en Ukraine depuis le mois de février. « Il faudra que justice soit faite, c’est impératif pour le peuple ukrainien et pour empêcher que de tels crimes ne se reproduisent à l’avenir ailleurs dans le monde », a lancé Mme DiCarlo.
Concernant le volet humanitaire, la Secrétaire générale adjointe a signalé que 16 millions de personnes en Ukraine ont besoin d’aide, l’appel d’urgence en cours devant être maintenu jusqu’en août pour couvrir tous les besoins jusqu’à fin 2022. D’après l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), 323 attaques ont été menées contre des établissements de santé depuis le 24 février, faisant 76 morts parmi les personnels soignants, a encore indiqué Mme DiCarlo.
Toutes les mesures adéquates doivent être prises pour protéger les civils et les infrastructures civiles, a-t-elle ensuite martelé, rappelant qu’à ce jour un quart de la population du pays, soit 12 millions de personnes, ont fui leur foyer.
La guerre en Ukraine a des répercussions bien au-delà des frontières du pays, entraînant une crise alimentaire, exacerbant l’inflation et la volatilité des marchés dans un monde qui fait déjà face à la pandémie et aux changements climatiques, a également déclaré Mme DiCarlo.
Les mots manquent pour qualifier l’absurdité, la futilité et la cruauté de cette guerre, qui risque de provoquer un véritable chaos économique et social mondial, a-t-elle confié. En conclusion, Mme DiCarlo a déclaré que les destructions doivent cesser « pour le bien de l’Ukraine, de la Russie et du monde entier ».
M. VOLODYMYR ZELENSKYY, Président de l’Ukraine, intervenant en visioconférence depuis l’Ukraine, a regretté que l’ONU n’ait pas de définition juridique du terme « État terroriste » convenue par tous les États Membres. D’après lui, la guerre que la Russie mène contre son pays démontre toute l’urgence qu’il y a à codifier ce concept au niveau international. Il faut punir tout État terroriste, a martelé le Président ukrainien en invitant l’assistance à prendre la mesure des horreurs de ces derniers jours en Ukraine. Il a dressé un bilan chronologique des attaques de cette guerre « à outrance » contre son pays. Samedi 25 juin: 62 missiles russes ont frappé son pays.
Dimanche 26 juin, 10 nouveaux missiles, dont l’un contre un bâtiment résidentiel à Kyïv où trois étages ont été démolis; un autre missile a explosé dans le jardin d’une maternelle. Lundi 27 juin: un missile s’est abattu sur un centre commercial de la ville de Krementchouk.
Actuellement 18 personnes y auraient été tuées, un bilan amené à être revu à la hausse, selon lui; 50 autres personnes ont été blessées et une dizaine sont portées disparues. Des fragments de corps ont été retrouvés et si l’État russe affirme que toutes ces victimes n’ont pas péri sous les missiles russes, alors il propose que l’ONU envoie la Représentante spéciale du Secrétaire général ou une commission d’enquête afin de recueillir de manière indépendante toutes les informations et de constater qu’il s’agit effectivement d’une frappe russe.
Hier, a poursuivi le Président Zelenskyy, l’armée russe a tiré des roquettes contre des personnes qui faisaient la queue pour chercher de l’eau dans la ville de Lyssytchansk. Des personnes ordinaires, parmi lesquelles huit personnes ont été tuées, dont Danilo, un garçon de 15 ans. La personne la plus âgée avait 68 ans. Le Président a égrené les noms des quatre femmes tuées dans les frappes: Victoria, Irina, Olina et Ludmila. Presque quotidiennement, a-t-il témoigné, les frappes russes visent des civils. Hier, 9 personnes ont été tuées et 29 blessées dont 5 enfants âgés de huit à douze ans, parmi lesquels Oleg, Mykhailo et Gregory qui ont péri dans une frappe d’artillerie russe contre des bâtiments résidentiels ordinaires. Aujourd’hui, à cinq heures du matin, l’armée russe a frappé la région de Mykolaïv, tuant trois personnes dont Eve, une petite fille de six ans. Parmi les blessés on compte « Volodymyr, un bébé de trois mois, gravement blessé, né après l’agression russe », s’est ému le Président. Deux autres missiles ont frappé aujourd’hui la ville de Sloviansk dans le Donbass, quelques heures seulement avant son discours devant le Conseil de sécurité. « Alors qui d’entre vous ne reconnaît pas qu’il s’agit bien de terrorisme? » a lancé M. Zelenskyy. Ailleurs dans le monde, si une organisation quelle qu’elle soit agissait de la sorte, elle serait qualifiée de terroriste, a-t-il martelé avant de s’interroger sur « l’impunité dont bénéficie un État devenu terroriste ». Pourtant, la Charte des Nations Unies confère au Conseil de sécurité la responsabilité première pour la paix et la sécurité internationales, a-t-il insisté, citant l’Article 6 du Chapitre II qui stipule qu’un Membre de l’ONU qui enfreint de manière persistante les principes énoncés dans la Charte peut être exclu de l’Organisation. Bien que la Russie viole les principes fondamentaux de l’ordre juridique international, on ne lui demande pas de rendre des comptes au niveau mondial, s’est-il emporté. De plus, a-t-il déploré, la Russie continue de siéger dans les institutions spécialisées de l’ONU et à jouir des privilèges que lui confère son siège permanent au Conseil de sécurité. Le dirigeant a à cet égard tancé « l’absence de lucidité » des responsables politiques à la fin de la guerre froide. Pour lui, la Russie n’a pas le droit de participer au vote s’agissant de la guerre en Ukraine. Une guerre non provoquée, a redit le Président ukrainien, accusant ce pays d’être « colonialiste ». C’est pourquoi il a exhorté les États Membres à faire preuve de cohérence et de volonté politique et à « priver la délégation de l’État terroriste de ses pouvoirs à l’ONU, à l’Assemblée générale. Cela est possible, nécessaire et juste! La Russie n’a pas le droit de rester au Conseil de sécurité ». M. Zelenskyy a fait valoir que le Chapitre VII permet de créer un tribunal spécial afin d’enquêter sur les actions des occupants russes sur le sol ukrainien. Le terme « génocide » a été utilisé de manière répétée, a-t-il rappelé, en faisant allusion aux charniers de Marioupol, entièrement rasée par l’armée russe. Il a fait remarquer que dans le cas du Rwanda, le Conseil de sécurité a créé un tribunal international six mois après le début du génocide. Or, plus de huit ans se sont écoulés depuis l’agression russe contre l’Ukraine, nous devons agir de toute urgence et tout faire pour que la Russie cesse ses massacres. Le Président Zelenskyy a remercié tous les États « civilisés qui souscrivent à son point de vue et aident à défendre l’ordre juridique international ». Il est impératif de créer un tribunal pour enquêter sur tout ce que l’armée russe a fait aux Ukrainiens, s’est-il encore exclamé avant de demander à l’assistance de commémorer la mémoire de tous les Ukrainiens tués et de leur rendre hommage en observant une minute de silence.
M. FERIT HOXHA (Albanie) a déclaré que la Fédération de Russie poursuit sans relâche ses attaques massives après 125 jours de destruction et qu’elle menace véritablement l’Europe. Après le bombardement d’un centre commercial fréquenté de Krementchouk qui a fait plusieurs dizaines de victimes, il a prévenu que la seule chose que la Fédération de Russie recherche, c’est de montrer au monde qu’elle peut frapper où elle veut, quand elle veut. Si tel n’est pas le cas, comment justifier une frappe contre un centre commercial? Le représentant a rappelé que les attaques contre des infrastructures civiles sont constitutifs d’un crime de guerre, parce que lorsqu’on les mène, on sait qu’on va tuer des civils. Après s’être inquiété de l’impact du conflit sur la sécurité alimentaire mondiale, il a fait observer que quelque 8 millions de tonnes de céréales sont stockées dans les zones ukrainiennes occupées par les forces russes. Face à cette situation, il a salué la récente décision du G7 de prendre des mesures coordonnées pour accentuer les pressions sur la Fédération de Russie. Cette guerre ne cessera qu’avec le retrait immédiat de tous les effectifs russes de l’Ukraine, a conclu le représentant.
M. RICHARD M. MILLS (États-Unis) a dénoncé les horreurs que le peuple ukrainien subit au quotidien, provoquées par les attaques des forces de Putin. L’attaque contre un centre commercial à Krementchouk s’inscrit dans un schéma constant de l’armée russe qui tue des civils et détruit leurs infrastructures en Ukraine, a-t-il souligné. Le Kremlin a montré à maintes reprises qu’il tente d’assujettir l’Ukraine, sa souveraineté, son peuple et son esprit. De plus, « Putin continue d’essayer d’intimider et de diviser les partenaires de l’Ukraine ». Anticipant l’intervention de son homologue de la Fédération de Russie, le représentant a estimé que personne ne sera dupe et que tout le monde connaît la réalité: c’est la guerre de choix de la Russie qui a directement entraîné la destruction de centres commerciaux, de théâtres, d’hôpitaux et d’écoles et la perte en vies humaines. Les preuves sont légion qui montrent que la Russie est seule responsable de ces attaques délibérées, a accusé le représentant. « Les Forces armées russes ont commis des crimes de guerre en Ukraine », a-t-il déclaré. « Les preuves s’accumulent. » Elles ne peuvent pas être ignorées alors que des milliers de civils ukrainiens sont déplacés par la force et que des assassinats brutaux sont commis. Le représentant a demandé aux membres du Conseil y compris à ceux qui n’ont pas condamné ce qui se passe sous leurs yeux de dire la vérité: « nous avons tous une responsabilité à assumer, nous ne pouvons pas accepter les actes de la Russie. » Face à ces attaques, on ne peut pas ne pas prendre parti, a averti le représentant pour qui la communauté internationale doit faire en sorte que les coupables de ces attaques rendent des comptes. « La justice doit l’emporter. » Les dirigeants de la Russie et leur armée à tous les niveaux seront jugés coupables de crimes de guerre ou d’autres crimes atroces en Ukraine, a-t-il prévenu. Les États-Unis soutiennent les enquêtes internationales sur ces crimes menées notamment par la Cour pénale internationale (CPI) ou par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Ils appuient aussi les autorités nationales ukrainiennes, en particulier le Procureur général. Hier, a rapporté le représentant, les dirigeants du G7 ont réaffirmé leur solidarité et leur engagement à défendre la souveraineté de l’Ukraine. Ils ont dit très clairement que les membres du G7 aideront l’Ukraine à se défendre et à choisir elle-même son avenir sans aucune pression ou influence extérieure. Il a exhorté à ne pas cesser ce soutien tant que la Russie n’aura pas mis un terme à cette guerre cruelle et insensée. Seule la Russie peut y mettre fin en retirant ses forces de l’Ukraine et en parvenant à un règlement politique avec le Gouvernement démocratiquement élu de l’Ukraine.
M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a rappelé que, depuis le début de cette guerre, la Russie a fait le choix de prendre pour cible les populations, tuant des enfants, des personnels humanitaires, des journalistes. Elle continue à détruire sans relâche des infrastructures civiles. Il s’agit là d’une tactique de guerre, visant à terroriser et à affaiblir le moral du peuple ukrainien, a dénoncé le représentant. Ce faisant, la Russie continue de violer les principes les plus élémentaires du droit international humanitaire, après avoir piétiné la Charte des Nations Unies. Les criminels de guerre seront traduits en justice, a assuré M. de Rivière. Il a indiqué que son pays maintiendra « la pression la plus forte possible » pour contraindre les autorités russes à mettre fin à cette guerre qui ébranle la sécurité internationale. « Nous le savons, la guerre risque de faire basculer un cinquième de la population mondiale dans la pauvreté et l’insécurité alimentaire, et la Russie en porte l’entière responsabilité », a martelé le représentant, jugeant « inacceptable » que ce pays utilise la faim comme un levier politique. Il a demandé à la Russie de lever le blocus des ports ukrainiens en mer Noire afin de permettre l’exportation des denrées alimentaires. À cet égard, la France soutient pleinement les efforts déployés par le Secrétaire général. Dès lors, a insisté M. de Rivière, la France appelle la Russie à mettre un terme à cette guerre injustifiable et dévastatrice. L’accès humanitaire complet, sûr et sans entrave doit être garanti de toute urgence, en particulier dans les régions d’Ukraine les plus touchées par les combats. Face au défi « historique » que représente le retour de la guerre en Europe, l’Union européenne a décidé d’octroyer à l’Ukraine le statut de candidat à l’adhésion, car aujourd’hui le peuple ukrainien se bat pour défendre nos valeurs et celles promues par la Charte, a dit le représentant. La France, qui a déjà mobilisé 2 milliards de dollars pour le soutien économique et humanitaire, continuera de se tenir résolument aux côtés des Ukrainiens.
M. JOÃO GENESIO DE ALMEIDA FILHO (Brésil) s’est déclaré profondément inquiet, après les dernières frappes aériennes dans des zones densément peuplées, dont celle contre le centre commercial de Krementchouk, dimanche dernier, constitue l’exemple le plus spectaculaire. Il a instamment demandé aux parties d’autoriser une enquête indépendante et de s’abstenir de toute action susceptible d’accroître encore le nombre des victimes civiles. Le représentant a aussi appelé les parties à respecter les obligations qui leur incombent, en vertu de la Charte des Nations Unies et du droit international humanitaire international, dont les principes de distinction et de proportionnalité. Prolonger les opérations militaires serait déraisonnable puisque cela éloignerait la perspective de mettre fin aux souffrances humaines. Le représentant a donc renouvelé son appel à une cessation immédiate des hostilités et au lancement de négociations de paix, sans délai ni condition préalable.
Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a regretté qu’un peu plus de quatre mois après le début de son invasion illégale contre l’Ukraine, la Fédération de Russie continue de pilonner la région orientale de l’Ukraine, le Donbass, dans le but d’en prendre le contrôle. Et pendant le week-end, la Fédération de Russie a lancé une attaque massive de missiles de croisière sur des cibles à travers l’Ukraine, y compris un centre commercial à Krementchouk avec plus de mille personnes à l’intérieur. Quand le monde appelle à la paix, au dialogue et au respect du droit international, la Fédération de Russie répond par l’escalade et le ciblage des civils, a condamné la représentante. Davantage d’attaques, de destruction, de morts, de propagande de guerre et de désinformation. De même, a-t-elle poursuivi, nous ne pouvons ignorer le « rôle prépondérant » du Bélarus qu’elle a accusé d’avoir servi de « relais direct » dans ces dernières attaques. « L’Ukraine a le droit de se défendre, comme n’importe lequel d’entre nous le ferait si ses villes et villages étaient soumis à des frappes répétées et incessantes de missiles par une armée étrangère désireuse d’anéantir son existence. » C’est pourquoi, le Royaume-Uni continuera de soutenir l’Ukraine dans l’exercice de sa légitime défense et dans la recherche d’un futur règlement de paix fondée sur la garantie de ses privilèges en vertu de la Charte des Nations Unies.
Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a condamné, à son tour, la frappe russe d’hier contre un centre commercial dans la ville de Krementchouk, une attaque délibérée contre des personnes et des infrastructures civiles et une violation flagrante du droit international humanitaire. Toutes les allégations de violations de ce droit et des droits de l’homme doivent faire l’objet d’une enquête et les responsables, d’être traduits en justice. La représentante a indiqué que les armes explosives ont fait plus de 10 000 victimes civiles dans la guerre en Ukraine. Condamnant ces attaques aveugles et disproportionnées, elle a exprimé la détermination de son pays à veiller à ce que les responsables des atrocités criminelles commises en Ukraine répondent de leurs actes. Elle a réitéré l’importance de l’enquête en cours à la Cour pénale internationale (CPI), arguant que le monde ne saurait tolérer l’impunité pour les pires horreurs, ni en Ukraine, ni nulle part ailleurs. Elle a appelé « à nouveau » la Fédération de Russie à respecter ses obligations, en vertu du droit international et à retirer toutes ses forces sans condition préalable de l’ensemble du territoire souverain de l’Ukraine.
M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) s’est dit gravement préoccupé par les derniers développements, en particulier à Mykolaïv, Tchernihiv, Jytomyr, Lviv, Odessa et Tcherkassy ainsi qu’à Kiev, Kharkiv et Krementchouk, notant que l’intensification des bombardements signalée dans ces régions et ces villes font de plus en plus de victimes civiles. Ces actes, a-t-il prévenu, constituent une violation de la Charte et du droit international humanitaire. Il a condamné l’usage disproportionné de la force, l’utilisation de boucliers humains et le fait de cibler des civils, des établissements de santé, des centres commerciaux et des systèmes d’eau et d’électricité. Il a particulièrement condamné le blocus des ports ukrainiens qui perturbe la sécurité alimentaire dans le monde, empêchant les exportations de céréales et provoquant, en conséquence, l’inflation des prix des produits alimentaires.
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) s’est dit préoccupé par l’intensification des bombardements en Ukraine, au cours des deux derniers jours, tuant hommes, femmes et enfants. Il s’est alarmé de ce que les zones résidentielles deviennent des champs de bataille. Alors que la situation actuelle jette une ombre sur la perspective de paix, le Conseil ne peut pas et ne doit pas perdre espoir, a exhorté le représentant. Il a réclamé l’intensification des efforts diplomatiques et salué les résultats positifs des visites du Secrétaire général de l’ONU à Kiev et à Moscou, au mois d’avril, démontrant par-là la pertinence de l’ONU dans des circonstances aussi délicates. Il a encouragé les parties à accepter les bons offices du Secrétaire général pour rétablir la confiance brisée et faire avancer des négociations au point mort. Le délégué a plaidé pour la cessation immédiate des opérations militaires dans les zones densément peuplées et demandé la création urgente de couloirs humanitaires démilitarisés dans toutes les zones assiégées. Les travailleurs humanitaires doivent bénéficier d’une bonne protection, a exigé le délégué qui en conclusion, a appelé les parties à la plus grande retenue.
M. JUAN RAMON DE LA FUENTE RAMIREZ (Mexique) a déclaré que les bombardements aveugles et brutaux contre des zones résidentielles de plusieurs villes du Donbass, qui ont détruit des infrastructures essentielles de communication et de services, sont tout simplement « inqualifiables ». Ils compromettent la fourniture des services essentiels et entravent l’accès à plusieurs villes de la région, a-t-il ajouté, ce qui entraîne la dégradation de la situation humanitaire. Le représentant s’est également dit extrêmement préoccupé par la prolifération des armes, un facteur supplémentaire de volatilité puisque l’accès des civils à ces armes favorise la poursuite du conflit. Enfin, il a appelé à des pauses humanitaires pour permettre l’évacuation des civils qui cherchent à fuir les zones bombardées. Il a aussi voulu que l’on facilite de toute urgence les exportations des céréales et des engrais ukrainiens pour atténuer la crise alimentaire mondiale.
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a regretté que le Conseil de sécurité ait refusé le droit de parole à la délégation de la République centrafricaine alors qu’il donne la parole aux représentants de l’Ukraine et à leurs alliés. Il a exhorté le Conseil à cesser de pratiquer le deux poids, deux mesures, et dénoncé la guerre menée depuis huit ans par l’Ukraine contre la population civile du Donbass. « Le seul front qui intéresse les Occidentaux est le front médiatique », a déploré le représentant. Il a fustigé ce qu’il a appelé les « infox » de la partie ukrainienne et les fausses légendes construites autour d’un prétendu sacrifice des défenseurs de l’Île aux serpents et d’un prétendu fantôme de Kiev qui aurait abattu des dizaines d’avions russes. Il a accablé la « propagande ukrainienne qui, à l’instar de l’ancienne propagande nazie, fait passer les soldats russes pour des barbares, des violeurs et pillards de toilettes et de théières ». Le représentant a nié tout bombardement russe d’un centre commercial à Krementchouk, précisant que la seule frappe menée dans cette ville a visé un entrepôt d’armes françaises et américaines destinées à frapper des villes du Donbass. Il a indiqué que tous les sites où se trouvent des armes et mercenaires étrangers sont des « cibles légitimes ». Le représentant a aussi accusé l’Ukraine d’entreposer des armes dans les centres urbains pour utiliser la population comme boucliers humains. De plus, a-t-il ajouté, n’importe quel expert militaire pourra confirmer que le récent bombardement d’un immeuble à Kiev n’est pas le fruit d’un missile russe mais de la chute d’un missile de la défense antiaérienne ukrainienne. Il a prévenu que la livraison d’armes occidentales ne fera que prolonger l’agonie du « régime criminel » de Kiev et que l’opération spéciale russe se poursuivra tant que les Occidentaux essaieront de transformer l’Ukraine en anti-Russie et tant que ses dirigeants seront une menace pour la Russie.
M. RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a rappelé que depuis le début du conflit en Ukraine, son pays n’a cessé d’appeler à la cessation complète de toutes les hostilités et a prôné la voie de la paix, du dialogue et de la diplomatie. « Nous appuyons tous les efforts visant à alléger les souffrances du peuple ukrainien, en particulier les pourparlers entre l’Ukraine et la Fédération de Russie », a dit le représentant. L’Inde a envoyé des fournitures humanitaires à l’Ukraine et à ses voisins, notamment des médicaments et d’autres matériels de secours essentiels. Elle s’est aussi engagée à travailler de manière constructive pour atténuer l’impact négatif du conflit sur la sécurité alimentaire. Nous avons accueilli favorablement la recommandation de l’équipe spéciale du Groupe mondial d’intervention en cas de crise, d’exempter les achats de nourriture par le Programme alimentaire mondial (PAM) des restrictions à l’exportation de denrées alimentaires, a précisé le représentant. L’Inde a fourni une aide financière ainsi que des céréales vivrières aux pays touchés par le conflit en Ukraine. Elle a exporté 1,8 million de tonnes de blé vers les pays dans le besoin, notamment l’Afghanistan, le Myanmar, le Soudan et le Yémen au cours des deux derniers mois. L’Inde aide également Sri Lanka à assurer sa sécurité alimentaire.
M. JUN ZHANG (Chine) a insisté sur la nécessité de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale des pays. Le représentant a demandé un cessez-le-feu et des pourparlers de paix car il ne faut ménager aucun effort pour parvenir à une désescalade et rétablir la paix le plus tôt possible, atténuer les conséquences humanitaires et stabiliser l’ordre économique mondial. Il a regretté que le conflit se poursuive et semble vouloir durer. La situation humanitaire reste catastrophique et le nombre de victimes civiles ne cesse de croître. Le dialogue et la négociation sont le seul moyen de rétablir et de consolider la paix, a insisté le représentant qui a salué les bons offices du Secrétaire général sur la question des exportations de céréales ukrainiennes. Selon lui, « la communauté internationale devrait créer un environnement propice à des pourparlers de paix entre les belligérants. L’envoi d’armes ne ramène pas la paix, pas plus que les sanctions ne permettent de régler les problèmes sécuritaires ». Le fait de contraindre les pays à prendre parti revient à diviser artificiellement la communauté internationale et rend le monde moins sûr, a ajouté le représentant. Cela retarde les négociations diplomatiques et ne fait qu’exacerber le conflit. « L’OTAN doit revoir sa position et ses responsabilités et renoncer à cette mentalité de la guerre froide fondée sur la confrontation entre les blocs », a poursuivi le représentant, avertissant que la Chine suit de très près les actions de l’OTAN. Il a exhorté l’Alliance à ne pas utiliser la crise en Ukraine comme une excuse pour alimenter les confrontations entre les blocs et se lancer dans une nouvelle guerre froide. « L’Alliance ne doit pas rechercher des ennemis artificiels en Asie pacifique, ne pas semer la division et la discorde. » La Chine, a insisté le représentant, est fermement opposée à ceux qui revendiquent l’implication de l’OTAN en Asie-Pacifique. Les troubles qui agitent certaines régions du monde ne doivent pas se produire dans cette région, a-t-il mis en garde.
Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a déploré l’intensification des frappes dans des zones urbaines densément peuplées et dans les villes ukrainiennes des lignes de front. Il est plus que temps de négocier un cessez-le-feu comme première étape vers une sortie de crise durable, a-t-elle souligné, avertissant des risques d’insécurité alimentaire et énergétique dans le monde. La Charte prévoit des outils pour mener à la fin de ce conflit par la voie du dialogue, a noté la représentante, qui a encouragé les parties à saisir l’occasion que leur est donnée de s’impliquer, sous l’égide de l’ONU, dans des pourparlers de bonne foi.
Mme EDWIGE KOUMBY MISSAMBO (Gabon) a souligné les conséquences de la guerre qui exacerbent l’insécurité alimentaire dans des pays déjà en proie à des conflits dont certains sont menacés par le spectre de la famine alors que les humanitaires rencontrent des difficultés à fournir l’aide alimentaire dont les populations ont urgemment besoin. Face à une inflation sans précédent, qui met à mal les économies, la représentante a estimé qu’il est encore temps d’éviter le chaos et d’aider les parties au conflit à trouver un consensus sur l’exportation des tonnes de blé retenus dans les ports ukrainiens. À cet égard, elle a salué l’action menée par l’Union africaine, en espérant qu’elle donnera des résultats dans des délais raisonnables. Elle a expliqué que de nombreux agriculteurs, notamment africains, attendent les fertilisants.
Après avoir condamné les frappes contre les personnes et infrastructures civiles, dont un centre commercial au centre de l’Ukraine, la représentante s’est particulièrement inquiétée de la tendance à banaliser la menace d’utiliser des armes de destruction massive. Persuadée que la communauté internationale a des moyens d’actions pour ramener les protagonistes à la table des négociations, la représentante a plaidé pour un engagement de bonne foi et pour un recours à tous les canaux diplomatiques et politiques afin de trouver une issue négociée et consensuelle au conflit.
Mme MONA JUUL (Norvège) a demandé à la Fédération de Russie de cesser immédiatement ses attaques aveugles contre les personnes et infrastructures civiles. Le fait de cibler des zones résidentielles est inacceptable, a-t-elle martelé. Les populations civiles doivent être protégées et toutes les précautions doivent être prises à leur égard, conformément au droit international humanitaire. Elle n’a manqué de condamner le Bélarus pour avoir facilité l’agression russe contre l’Ukraine.
Reprises de parole
À son tour, le Royaume-Uni a rappelé à son homologue russe que ce sont les forces de son pays qui sont en Ukraine. Il n’y a aucun soldat ukrainien dans la Fédération de Russie, a-t-il dit, en prévenant: nous avons un agresseur ici qui sera bientôt rattrapé par les preuves et qui devra rendre des comptes pour les crimes qu’il a commis.
Nous n’avons aucune leçon à recevoir d’un pays connu pour falsifier les faits et fabriquer des affaires dans lesquelles nous serions prétendument impliqués, a rétorqué la Fédération de Russie.
Déclarations
Au nom des pays baltes (Estonie, Lettonie et Lituanie), Mme KRISTEL LÕUK (Estonie) a salué le courage du Président Volodymyr Zelenskyy et du peuple ukrainien. Incapable de vaincre l’Ukraine sur le champ de bataille, a-t-elle accusé, l’armée russe a choisi de terroriser la population, comme en atteste le bombardement d’un centre commercial bondé de Krementchouk, et ce, sans aucune justification militaire. Ce sont des violations flagrantes du droit international, y compris de la Charte des Nations Unies. Les violations systématiques du droit international humanitaire et des droits de l’homme, et les attaques délibérées contre des biens à caractère civil et des civils constituent des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité et peut-être même un génocide, a prévenu la représentante. Elle a appelé la communauté internationale à ne ménager aucun effort pour que les responsables de ces atrocités criminelles répondent de leurs actes.
Elle s’est aussi dite préoccupée par la rhétorique dangereuse et irresponsable de la Fédération de Russie sur les armes de destruction massive et l’intention de renforcer la force de frappe nucléaire du Bélarus. Elle a exhorté ces deux pays à agir conformément à leurs engagements internationaux et à cesser de déstabiliser le monde « à coups de sabre nucléaire ». La représentante a dûment condamné l’implication du Bélarus et son rôle de complice de l’agression contre l’Ukraine. Elle a aussi condamné le fait que la Fédération de Russie fasse des exportations des céréales une arme de guerre. Plus de 20 millions de tonnes de céréales, s’est-elle expliquée, sont actuellement bloquées en Ukraine. La représentante a apporté son appui aux efforts de l’ONU pour trouver une solution urgente à l’exportation des céréales ukrainiennes et a exhorté la Fédération de Russie à assurer le libre passage des navires à partir des ports ukrainiens. Ce pays, a-t-elle conclu, doit cesser immédiatement ses attaques aveugles et retirer ses troupes sans condition préalable de l’ensemble du territoire ukrainien.
M. MATEUSZ SAKOWICZ (Pologne) a tenu à le dire « haut et fort »: au cours de ces seuls quatre derniers jours, la Fédération Russie a tiré plus de 130 missiles sur les villes ukrainiennes de Kiev, Kharkiv, Mykolaïv et Odessa. En décidant de frapper des objectifs dénués d’intérêt militaire, il ne fait aucun doute que Moscou veut causer d’importantes pertes humaines, terroriser la population et perturber le fonctionnement des infrastructures nécessaires à la vie quotidienne des gens. Parce que la Fédération de Russie se moque du Conseil de sécurité, il est de notre devoir, a martelé le représentant, de travailler ensemble pour recueillir les preuves de toutes les violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises en Ukraine. Après avoir salué le courage des Ukrainiens, « qui résistent toujours aux forces de l’agresseur », il a exhorté la Fédération de Russie à arrêter la guerre et à retirer ses forces de l’Ukraine, « seul moyen d’éviter de nouvelles morts civiles ».