Le Conseil de sécurité débat de l’inclusion et la participation économiques des femmes comme outils essentiels d’instauration de la paix
En cette Journée internationale des femmes, le Conseil de sécurité, présidé par la Ministre des changements climatiques des Émirats arabes unis, Mme Mariam Al Mheiri, a tenu un débat public en partant du constat que l’inclusion économique des femmes dans les zones touchées par un conflit est insuffisante, alors que leur participation aux activités économiques est un moyen reconnu pour instaurer et faire durer la paix. L’occasion pour plusieurs orateurs d’exprimer leur solidarité avec les femmes et filles d’Ukraine.
Investir dans l’autonomisation économique des femmes rapporte d’énormes dividendes pour la paix et la prospérité, a déclaré d’emblée la Directrice exécutive d’ONU-Femmes. À l’inverse, les pays où les femmes sont économiquement marginalisées et exclues de la population active sont beaucoup plus susceptibles d’entrer en guerre. Mme Sima Bahous a également signalé que l’inégalité entre les sexes entraîne des pertes économiques s’élevant à 2,5 milliards de dollars dans plus de la moitié des pays fragiles et touchés par des conflits. « La solution est donc claire. » Nous avons besoin de plus d’engagement, d’une plus grande responsabilisation et d’une responsabilité partagée, a dit la responsable d’ONU-Femmes.
Mme Bahous s’est adressée notamment au Conseil de sécurité car elle a noté que certaines de ses résolutions qui couvrent largement la question « les femmes et la paix et la sécurité », comme celles sur la République centrafricaine et la République démocratique du Congo, contiennent des paragraphes sur la sécurité économique, le développement et l’exploitation illégale des ressources naturelles, mais ne tiennent pas compte du genre. Elle a donc suggéré au Conseil d’utiliser ces textes pour demander l’inclusion significative des femmes non seulement dans les efforts de consolidation de la paix, de prévention des conflits et de relèvement, mais aussi dans la prise de décision, l’analyse de genre et le suivi des dépenses.
La Directrice exécutive d’ONU-Femmes a invité à s’inspirer des actions de son agence pour rectifier la donne. Elle a cité l’initiative multipartite « Génération Égalité » grâce à laquelle on dispose maintenant d’un Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire. Le Pacte compte à ce jour 158 signataires, dont plusieurs membres du Conseil, mais nous devons faire davantage pour atteindre les banques multilatérales de développement et le secteur privé, a recommandé Mme Bahous. Elle a également évoqué le Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire qui a financé plus de 500 organisations de femmes dans plus de 26 pays depuis 2016.
L’une des bénéficiaires de ce fonds était là, justement, pour en témoigner. Mme Moussokoro Coulibaly, Présidente d’un réseau de femmes opératrices économiques dans la région de Ségou, au Mali, a expliqué comment son réseau s’emploie à mettre en relation des initiatives locales de femmes avec des partenaires financiers. De 2012 à 2019, des crédits ont ainsi été octroyés à 200 femmes dans les domaines de l’agriculture et de l’artisanat, aidant les bénéficiaires à sortir du secteur informel et à gagner la reconnaissance de leurs communautés et, partant, à influer sur le règlement des conflits communautaires.
Le Fonds monétaire international (FMI) joue aussi son rôle, a renchéri sa Directrice générale, Mme Kristalina Georgieva. Le FMI met l’accent sur le financement des services sociaux, un outil efficace pour promouvoir l’éducation des femmes, la qualité des soins et in fine la parité dans la société. Même son de cloche du côté de la Vice-Ministre aux affaires multilatérales et droits humains du Mexique qui a appelé à investir dans les mécanismes financiers existants pour soutenir les organisations de femmes et les défenseuses des droits humains, lesquelles contribuent à un climat de stabilité dans leurs communautés.
Après avoir évoqué les efforts déployés par l’Union africaine pour favoriser l’inclusion financière et économique des femmes, le Kenya a souhaité que les organes et agences compétents des Nations Unies en fassent un suivi dans l’optique d’assurer la durabilité de la paix et du développement. Au nom des 56 États membres du Groupe des amis des femmes, de la paix et de la sécurité, le Canada a invité le Conseil à renforcer sa coopération dans ce domaine avec la Commission de consolidation de la paix et le Conseil économique et social, ainsi qu’avec les organisations régionales.
De nombreuses initiatives menées à travers le monde pour garantir l’inclusion économique des femmes ont été évoquées par la soixantaine de participants au débat. Les Émirats arabes unis ont, par exemple, indiqué avoir consacré 50 millions de dollars pour soutenir près de 300 000 femmes entrepreneurs d’Iraq, du Yémen et d’Éthiopie. La Turquie a insisté sur les opportunités d’emploi, faisant remarquer que le simple fait d’augmenter le nombre de femmes occupant un emploi rémunéré ferait augmenter considérablement le PIB. Le Viet Nam a, pour sa part, suggéré de consacrer un minimum de 15% de l’aide publique au développement à l’égalité des genres dans les pays en conflit.
Des arguments juridiques ont aussi été présentés. Au nom des pays nordiques et des pays baltes, la Suède a assuré que la protection des femmes ne sera pas possible tant que les législations discriminatoires et les entraves à leur autonomisation économique ne seront pas démantelées. Dans cette veine, l’Inde a proposé d’élaborer un cadre institutionnel mondial permettant aux femmes d’accéder aux opportunités économiques et aux partenariats.
L’inclusion économique n’est cependant pas une protection contre les balles et les bombes, a noté le Royaume-Uni en évoquant les souffrances, maintes fois mentionnées au cours du débat, des femmes et enfants d’Ukraine. La Fédération de Russie a rétorqué que « depuis huit ans, les femmes sont persécutées à Donetsk et Louhansk par des radicaux ukrainiens, dans un silence assourdissant de la communauté internationale ». L’Ukraine, elle, a dénoncé le fait que les habitants se voient interdire de partir et que l’aide humanitaire ne puisse pas arriver. « Si les gens partent, les Russes les tuent. » Pour les femmes qui arrivent à partir, elle a demandé leur intégration économique dans les pays d’accueil.
LES FEMMES ET LA PAIX ET LA SÉCURITÉ (S/2022/175)
Déclarations
Mme SIMA BAHOUS, Directrice exécutive d’ONU-Femmes, a rappelé que lorsque la pandémie avait vidé la salle du Conseil de sécurité il y a près de deux ans, le Secrétaire général de l’ONU avait appelé à un cessez-le-feu mondial. Elle a rappelé que, face à un ennemi commun, il y avait l’espoir de voir un regain de coopération internationale, l’espoir que nous investissions dans la science, la santé et la protection sociale pour tous, en particulier les plus vulnérables, au lieu de dépenser de l’argent dans des armes. Au lieu de cela, a-t-elle déploré, nous avons eu plus de dépenses militaires, des coups d’état militaires, des prises de pouvoir par la force et un système multilatéral renvoyé dans les cordes. Ce même Conseil a passé les 10 derniers jours dans de multiples réunions d’urgence sur la situation en Ukraine, a-t-elle noté, rappelant les propos du Secrétaire général: « les gens exigent la paix », « nous devons donner une chance à la paix ».
La Directrice d’ONU-Femmes a également souligné les acquis perdus, après des décennies d’efforts, notamment en matière d’égalité des sexes. « Il nous reste moins de neuf ans avant 2030, mais nous ne sommes pas sur la bonne voie pour atteindre les objectifs de développement durable. » Elle a ajouté que la COVID-19 nous a encore fait reculer dans l’ensemble des objectifs, notamment en matière d’égalité des sexes, de pauvreté et de climat. En cette journée internationale de la femme, nous avons l’opportunité de faire les choses différemment, a-t-elle clamé, appelant à un modèle de leadership différent.
Selon de nombreuses études, investir dans l’autonomisation économique des femmes rapporte d’énormes dividendes pour la paix et la prospérité, tandis qu’à l’inverse, les pays où les femmes sont économiquement marginalisées et exclues de la population active sont beaucoup plus susceptibles d’entrer en guerre, a cité Mme Bahous. « Nous savons que les femmes sont plus susceptibles de consacrer leurs revenus aux besoins familiaux et de contribuer davantage au rétablissement. » Et pourtant, a constaté la haute fonctionnaire, la reconstruction et les investissements à grande échelle après un conflit sont dominés par les hommes et profitent massivement aux hommes, pendant que l’exclusion, la discrimination et les normes de genre désuètes éloignent les femmes de l’emploi, de la terre, de la propriété, de l’héritage, du crédit et de la technologie. Ce scénario se joue dans toutes les zones de conflit et situations à l’ordre du jour du Conseil de sécurité, a-t-elle fait remarquer en citant la situation d’exclusion des femmes en Afghanistan et au Yémen: dans ces pays, une réduction des écarts entre les sexes sur le marché du travail aurait pu faire augmenter le PIB du Yémen de 27%.
La Directrice exécutive a signalé que les pertes économiques dues à l’inégalité entre les sexes s’élèvent à 2,5 milliards de dollars dans plus de la moitié des pays fragiles et touchés par des conflits examinés par la Banque mondiale. Elle a expliqué que peu de pays touchés par un conflit disposent de données sur la propriété foncière des femmes, et qu’ils sont très faibles quand ils existent. Au Mali par exemple, les femmes possèdent 3% des terres. En Haïti, où plus de 45% des ménages sont dirigés par des femmes, la pandémie a entraîné une baisse de 24% de l’emploi des femmes, a enchaîné Mme Bahous en se désolant que, comme dans de nombreux autres pays, les stratégies pour faire face aux retombées économiques de cette crise restent largement aveugles au genre. Passant à l’Ukraine, elle a noté que les besoins humanitaires se multiplient et s’étendent d’heure en heure, sachant que la majorité des 1,5 million de personnes qui ont fui sont des femmes et des enfants. Ici aussi, nous risquons un recul des droits des femmes et de l’accès des femmes à l’emploi et aux moyens de subsistance, a-t-elle averti.
De nombreuses femmes militantes invitées à prendre la parole devant ce Conseil de sécurité nous ont dit que les acteurs privés, y compris les multinationales, font souvent partie du problème alors qu’ils pourraient faire partie de la solution, a-t-elle encore regretté. Et ce n’est pas seulement le cas des industries extractives et des grandes entreprises agroalimentaires, mais de plus en plus de plateformes de télécommunications qui ont un rôle majeur à jouer pour faciliter l’inclusion et prévenir les discours de haine et les représailles ciblées.
Pour la Directrice exécutive, la solution est donc claire. Nous avons besoin de plus d’engagement, d’une plus grande responsabilisation et d’une responsabilité partagée. Certaines des résolutions qui couvrent le plus largement les femmes et la paix et la sécurité, comme celles sur la République centrafricaine et la République démocratique du Congo, contiennent plusieurs paragraphes sur la sécurité économique, les questions de développement et l’exploitation illégale des ressources naturelles mais ne tiennent pas compte du genre, a remarqué Mme Bahous. Elle a donc suggéré au Conseil de sécurité d’utiliser ces résolutions pour demander l’inclusion significative des femmes non seulement dans la consolidation de la paix, la prévention des conflits et le relèvement, mais aussi dans la prise de décision, l’analyse de genre et le suivi des dépenses. De même elle a invité, dans toutes les initiatives de reconstruction et de relèvement, à donner la priorité aux entreprises dirigées par des femmes dans les services de première ligne et du secteur soins.
Mme Bahous a par ailleurs présenté quelques initiatives d’autonomisation économique des femmes. D’abord le Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire qui a financé plus de 500 organisations de femmes dans plus de 26 pays depuis 2016. Elle a salué la présence au Conseil de Mme Coulibaly, du Mali, qui est partenaire de ce fonds. Nous avons déployé beaucoup d’efforts pour impliquer le secteur privé, à la fois les donateurs et les partenaires bénévoles, mais il y a beaucoup plus à faire pour multiplier par cinq le financement des organisations de femmes en situation de crise d’ici à 2030, a-t-elle prévenu. Elle a ensuite parlé de « Génération Égalité », grâce à laquelle on a maintenant un pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire, une initiative multipartite visant à faire bouger les choses au cours des cinq prochaines années.
Le Pacte compte à ce jour 158 signataires, dont plusieurs membres du Conseil, mais nous devons faire davantage pour atteindre les banques multilatérales de développement et le secteur privé, a souhaité Mme Bahous. Pour elle, cela comprend le renforcement des mécanismes de protection sociale, la promotion des entreprises –notamment sociales- appartenant à des femmes, la lutte contre la législation et les pratiques discriminatoires qui entravent l’autonomisation économique des femmes et la garantie que l’égalité des sexes est une priorité dans les stratégies nationales, régionales et mondiales de paix et de développement. Nous avons le plan et l’analyse de rentabilisation pour soutenir l’inclusion économique des femmes, a-t-elle constaté. Ce dont nous avons besoin, a-t-elle conclu, c’est d’une volonté politique pour y parvenir.
Pour Mme KRISTALINA GEORGIEVA, Directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), l’heure est venue de réfléchir au pouvoir des femmes face à l’adversité, aux guerres et à la destruction. Dans bien des endroits leur puissance ne cesse d’être mise à mal, alors même que dans tous les conflits, les femmes se sacrifient pour leurs pays et leurs communautés a dit Mme Georgieva, en rendant hommage aux femmes ukrainiennes. Les femmes payent un tribut disproportionné en temps de guerre, a-t-elle souligné, et dans le même temps elle représentant le plus grand espoir pour la paix.
Qu’il s’agisse de conflits, de pandémie ou de crise économique, tous ces scenarios mettent en jeu les progrès réalisés à ce jour en termes d’autonomisation des femmes, s’est inquiété la Cheffe du FMI. Elle a notamment relevé que deux fois plus de femmes ont perdu leur emploi pendant la pandémie, alors qu’elles étaient déjà 20% moins présentes sur le marché du travail que les hommes. Le destin des filles est encore plus menacé, puisque 20 millions d’entre elles risquent tout simplement de ne pas aller à l’école au lendemain de la pandémie, ce qui signifie qu’elles seront exclues des forces vives de leurs sociétés.
Sur une note positive, Mme Georgieva a noté que cette crise offre cependant une possibilité de favoriser l’émancipation des femmes et de renforcer l’égalité entre les sexes « ce qui est fondamental pour la résilience et la croissance ». Lorsqu’une femme ou une fille peut réaliser tout son potentiel, leur pays et leur communauté se portent mieux, et les sociétés dans lesquelles il y a plus de parité entre les sexes sont plus protégées de la menace d’un conflit, a-t-elle souligné. Lorsque les femmes participent aux processus de paix et aux processus de reconstruction de l’État, la solidité des institutions et la pérennité de la paix ont plus de chances. « Pourtant, les femmes restent encore souvent exclues de ces processus », s’est-indignée en déclarant que « nous avons tous une responsabilité pour remédier à cela ». Elle a indiqué que sous sa houlette, l’un des axes sur lequel le FMI travaille avec ses membres, dont 25% sont des pays en situation fragile, sont les services sociaux, un outil efficace pour promouvoir l’éducation des femmes, la qualité des soins et in fine la parité dans la société. Le FMI met aussi explicitement l’accent sur l’égalité entre les sexes parce que cela permet aux femmes et aux sociétés de devenir plus résilientes, y compris aux changements climatiques, a-t-elle expliqué.
Les femmes et les filles sont des agents puissants du changement, elles sont la base d’un avenir meilleur pour tous, comme l’ont montré les expériences de l’Irlande du Nord, du Liberia et de la Colombie. S’adressant à toutes les femmes et filles du monde, elle a déclaré : « croyez en vous et luttez pour réaliser votre potentiel », parce que le pouvoir entre les mains des femmes est synonyme d’un monde plus prospère pour tous.
Mme MOUSSOKORO COULIBALY, Présidente d’un réseau de femmes opératrices économiques dans la région de Ségou, au Mali, a rappelé que son pays est confronté depuis 2012 à une grave crise sécuritaire et économique, aggravée par les retombées de la pandémie de COVID-19, qui a des effets dévastateurs sur les conditions de vie des familles et des communautés, même si celles-ci sont restées résilientes et solidaires grâce aux efforts des femmes. Pour cette représentante de la société civile, il est clair qu’il ne peut y avoir de paix durable sans développement économique et sans inclusion des femmes dans les processus de prise de décision. Or, les femmes sont toujours tenues à l’écart, a-t-elle regretté, avant de dénoncer des pratiques néfastes aux droits des femmes dans la société malienne, ainsi que des difficultés structurelles d’accès aux emplois stables et aux financements, notamment dans les zones fragilisées par les conflits. « Ces défis ne nous font pas peur car nous sommes des piliers de nos familles », a assuré Mme Coulibaly, insistant sur le rôle décisif joué par les femmes pour la paix et la cohésion sociale, ainsi que pour l’accueil de déplacés et l’accompagnements des survivantes de violences sexuelles et sexistes.
Mme Coulibaly a expliqué que, pour contribuer à l’autonomisation des femmes, son réseau s’emploie à faciliter les mises en relation avec des partenaires financiers et à assurer un dialogue afin que ces services soient adaptés aux besoins des femmes. De 2012 à 2019, ce dialogue a permis l’octroi de crédits à 200 femmes dans les domaines de l’agriculture et de l’artisanat, aidant ainsi les bénéficiaires à sortir du secteur informel, s’est-elle enorgueillie. Cette autonomisation leur a aussi permis de gagner la reconnaissance de leurs communautés et d’influer sur les conflits communautaires, a ajouté la représentante, saluant au passage la contribution des Nations Unies, en particulier d’ONU-Femmes, et des bailleurs de fonds à la promotion des droits des femmes dans les pays en situation de conflit.
Jugeant toutefois ces efforts insuffisants, Mme Coulibaly a appelé à mobiliser davantage les acteurs du secteur privé et à garantir la participation effective des femmes dans le domaine de la paix. De même, il est essentiel que la communauté internationale dans son ensemble facilite l’accès des femmes et des organisations de femmes à des financements durables et à des secteurs économiques où les femmes sont les plus actives. Cela peut être assuré par la mise en place de fonds garantis adaptés et de programmes d’autonomisation prévoyant des facilités fiscales, a-t-elle soutenu, non sans plaider pour un dialogue accru entre le secteur privé et les représentantes de la société civile. Si vous voulez aider mon pays à parvenir à une paix durable, a-t-elle conclu, « aidez les femmes à participer aux systèmes économiques et à avoir une voix dans les décisions qui se prennent ».
Mme MARIAM AL MHEIRI, Ministre des changements climatiques des Émirats arabes unis, a déploré que la pleine participation des femmes à la vie économique et sociale soit toujours entravée. Elle a estimé que le PIB mondial augmenterait de 26% d’ici à 2025 avec une réelle réduction des inégalités de genre dans le monde du travail et une augmentation du nombre de femmes dirigeantes. Elle a souhaité que les femmes jouent un rôle de chef de file dans les efforts de consolidation de la paix. La Ministre a souligné l’importance de s’appuyer sur le secteur privé pour réaliser les objectifs transformateurs du programme « les femmes et la paix et la sécurité ».
La Ministre a ensuite fait quatre propositions pour une plus grande autonomisation des femmes dans les contextes de conflit. « Premièrement, afin de rebâtir des sociétés durables, inclusives et équitables, les femmes et les filles doivent être au cœur des efforts économiques post-conflit. » Elle a précisé que son pays a consacré 50 millions de dollars afin de soutenir près de 300 000 entrepreneuses en Iraq, au Yémen ou encore en Éthiopie. « Deuxièmement, toutes les parties prenantes doivent mieux comprendre et tirer profit de leurs synergies. » Elle a ainsi invité les États Membres, l’ONU et les organisations locales de femmes à mettre en relation le secteur privé avec les femmes vivant au sein des communautés touchées par un conflit.
« Troisièmement, le secteur privé bénéficie de sociétés pacifiques et stables, il doit donc contribuer à l’avènement de telles sociétés. » Elle a ainsi insisté sur l’importance d’un « entreprenariat social », dont pourraient bénéficier les communautés. « Enfin, nous devons faire en sorte que les femmes bénéficient d’un accès égal à tous les services leur permettant de participer à la vie économique », a conclu la Ministre, en soulignant l’importance de remédier aux inégalités numériques.
M. SIMON COVENEY, Ministre des affaires étrangères et de la défense de l’Irlande, a tout d’abord salué le courage des femmes et les filles ukrainiennes, notant que ce conflit aura un impact grave sur elles. Il a ensuite appelé à renforcer le programme sur les femmes et la paix et la sécurité , s’inquiétant des écarts entre les objectifs de ce programme et la réalité sur le terrain, lesquels se sont creusés pendant la pandémie de COVID-19. L’autonomisation économique des femmes ne peut être réalisée qu’en même temps que leur autonomisation politique et sociale, a-t-il souligné, s’alarmant que 21 ans après son adoption, le cœur du programme est sérieusement remis en question, y compris au Conseil.
À ses yeux, les femmes doivent être impliquées directement et substantiellement dans les processus de paix et politiques dirigés par l’ONU. Mais cet objectif n’a pas été atteint et le combat continue pour éliminer les obstacles sociétaux et structurels qui empêchent les femmes d’assumer la place qui leur revient aux tables de négociation et de prise de décision, a déploré M. Coveney qui s’est par ailleurs dit choqué que la violence sexuelle liée aux conflits reste une arme de guerre et que les survivants luttent toujours pour la justice. Le Ministre a également dénoncé l’érosion continue des droits des femmes en Afghanistan par les Taliban, tout en saluant le fait qu’elles continuent de se battre pour leur droit d’être entendues.
Soulignant que les progrès ne se produisent pas dans le vide, le Ministre a demandé une coopération plus étroite entre le Conseil, la Commission de consolidation de la paix, le Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire et toutes les autres initiatives et organismes consacrés à la promotion de l’égalité des sexes et des droits des femmes. Il a appelé à aider les femmes à traiter et se remettre de la douleur et des blessures causées par les conflits. Les soutiens financiers et, l’accès à la justice et aux services de santé sexuelle sont également essentiels pour donner aux femmes les moyens de répondre à leur traumatisme, a-t-il ajouté, notant que les partenariats public-privé peuvent faire une différence en matière d’aide et de relèvement. Il a également appelé à appuyer les organisations locales de femmes et les femmes bâtisseuses de paix.
Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a considéré qu’il est impossible de parler du programme pour les femmes et la paix et la sécurité aujourd’hui sans reconnaître les conséquences horribles pour les femmes de la « guerre de choix » non provoquée et injustifiable que mène la Russie contre le peuple ukrainien. « Comme dans d’autres conflits, les femmes sont contraintes de faire des choix inimaginables - elles sont obligées de fuir leur foyer en raison de menaces de violence imminente alors qu’elles continuent à soutenir leur communauté, leur famille et leurs proches. » Nous devons témoigner, en particulier, de l’extraordinaire douleur des mères pendant cette terrible période. Des mères qui ont été forcées d’accoucher dans des abris antibombes. Des mères qui ont été obligées de faire monter leurs enfants, « seuls et terrifiés », dans des trains bondés quittant le pays. La mère qui court après la couverture bleue tachée de sang qui contenait son enfant de 18 mois, maintenant mort à cause des bombardements russes. « Vous avez tous vu les images de leur douleur », a ajouté la représentante.
Bien sûr, de nombreuses femmes s’unissent courageusement pour défendre leurs maisons, leurs communautés et leur pays. Et ce sont les femmes qui mènent les efforts de l’Ukraine face à la nouvelle catastrophe humanitaire déclenchée par Moscou, tout comme elles ont joué un rôle essentiel dans la construction d’une société démocratique naissante au cours des huit dernières années en Ukraine. « Si la Russie choisit un jour de renouer avec le dialogue et la diplomatie, les femmes doivent y être associées de manière significative et cohérente », a souligné Mme Thomas-Greenfield qui a noté que la participation pleine, égale et significative des femmes accroît la probabilité de garantir une paix durable et à long terme.
Rappelant qu’une économie ne peut tout simplement pas espérer être compétitive sans la moitié de sa main-d’œuvre, elle a déploré que les femmes sont encore tenues à l’écart du marché du travail et encore plus sous-représentées et exclues des opportunités économiques dans les pays fragiles et touchés par les conflits, où leur accès aux institutions financières reste également extrêmement limité. Et cela est devenu plus évident avec l’impact de la COVID-19 au cours des deux dernières années. Ces pratiques discriminatoires non seulement privent les femmes de leurs droits fondamentaux, mais sapent aussi les efforts visant à créer des sociétés fortes, sûres et prospères. Mais lorsque vous donnez aux femmes l’accès au capital, aux services financiers et aux opportunités économiques, cela crée de la richesse et de la résilience, ce qui, à son tour, génère une paix et une sécurité à long terme.
Mme Thomas-Greenfield a ensuite indiqué qu’au Sénégal, les États-Unis ont favorisé la résilience économique et la résistance à la radicalisation en donnant une autonomie économique à 5 000 petits exploitants ruraux, dont 60% de femmes. Ces femmes ont été exposées à l’extrémisme violent, mais ont été mieux à même d’y résister parce qu’elles ont vu une meilleure voie à suivre. C’est ce genre d’approche que nous devons adopter à plus grande échelle, a insisté la représentante, pour qui ces programmes doivent être associés à des plans clairs visant à lutter contre la violence sexiste et à améliorer la sécurité et l’égalité d’accès des femmes et des filles aux secours et à l’aide au relèvement ainsi qu’aux opportunités.
Mme MARTHA DELGADO PERALTA, Vice-Ministre aux affaires multilatérales et droits humains du Mexique, a rappelé que son pays accorde une priorité à la mise en œuvre du programme « les femmes et la paix et la sécurité » dans une approche ancrée dans l’indivisibilité et l’universalité des droits humains et des libertés fondamentales des femmes et des filles dans toute leur diversité. Notant que la pandémie de COVID-19 a touché de manière disproportionnée les femmes par la perte d’emplois et, par conséquent, de revenus, elle a appelé à des efforts de relèvement qui suivent une approche sexospécifique. Elle a aussi souligné l’importance des efforts de prévention des conflits, de consolidation de la paix et de reconstruction garantissant l’inclusion économique pour réduire l’écart et la ségrégation sur le marché du travail. Il faut aussi, a-t-elle ajouté, créer des emplois décents avec accès à des systèmes complets de protection sociale, y compris des services de santé sexuelle et reproductive, conditions essentielles pour construire une paix durable.
La Vice-Ministre a souligné l’importance des actions du secteur privé qui adoptent une approche genre. Elle a appelé à investir dans les mécanismes financiers existants pour soutenir les organisations de femmes et les défenseurs des droits humains, qui contribuent à un climat de stabilité dans leurs communautés. Elle a aussi jugé indispensable de soutenir les femmes artisanes de la paix des groupes les plus défavorisés tels que les femmes handicapées, les réfugiées, les jeunes femmes, les femmes chefs de famille ou membres de la communauté LGBTI. Il faut faciliter l’accès des organisations féminines locales aux technologies numériques, qui aujourd’hui peuvent également contribuer à la prévention de la violence et au fonctionnement de l’alerte précoce, a-t-elle aussi recommandé avant d’inviter à promouvoir la participation des coopératives communautaires de femmes ou entreprises dirigées par des femmes, dans des délibérations sur les questions de relance économique et de reconstruction post-conflit.
Enfin, elle a cité le Forum Génération Égalité qui a donné naissance en 2021 au Pacte femmes, paix et sécurité et action humanitaire, auquel le Mexique a adhéré. Les États Membres, des entités des Nations Unies, des organisations régionales, la société civile et le secteur privé qui participent à ce forum développent des actions dans cinq domaines thématiques, dont la sécurité économique des femmes et leur accès aux ressources et autres services essentiels. Enfin, elle a jugé essentiel que les missions de maintien de la paix garantissent que les processus de consolidation de la paix post-conflit incluent la diversité des femmes locales dans les processus de secours et de relèvement.
M. SANJAY VERMA, Secrétaire au Ministère des affaires étrangères de l’Inde, a salué la vision de Mme Hansa Mehta, déléguée indienne qui avait insisté, au cours de la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme en 1948, pour qu’on reformule l’expression « Tous les hommes naissent libres et égaux » en « Tous les êtres humains naissent libres et égaux ». Il a également fait observer qu’avec plus de 1,3 million de femmes élues, lesquelles constituent près de 44% du total des élus de la vie politique et prennent des décisions au niveau local, l’Inde est l’un des rares pays à avoir eu des femmes comme Président, Premier Ministre, Ministre de la défense, Ministre des finances et Ministre des affaires étrangères.
Dans l’optique de l’autonomisation socioéconomique des femmes, il a fait part de la nécessité d’élaborer, comme prérequis, un cadre institutionnel mondial, notamment juridique, permettant aux femmes d’accéder aux opportunités économiques et aux partenariats. En Inde, des initiatives numériques ont permis de minimiser le clivage entre les genres, et le pays a tiré parti des technologies numériques pour fournir un meilleur accès des femmes à la finance, au crédit, à la technologie et à l’emploi. Nous avons ouvert des comptes bancaires en ligne pour plus de 445 millions de personnes dont plus de 55% étaient des femmes, et pendant la pandémie de COVID-19, cette initiative a contribué au transfert direct de fonds à près de 200 millions de femmes, a-t-il indiqué. De même, le Gouvernement fournit des prêts sans garantie pour encourager l’entrepreneuriat et le travail indépendant. Environ 70% des bénéficiaires sont des entreprises détenues et exploitées par des femmes. Les femmes sont ainsi devenues économiquement autonomes et fournissent également des emplois à d’autres.
Pour ouvrir ces opportunités économiques, l’égalité d’accès à l’éducation est fondamentale, a relevé le Ministre des affaires étrangères. Il s’est enorgueilli de voir qu’un grand nombre de femmes en Inde s’engagent dans des filières des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques, précisant qu’environ 27% des postes de direction clefs de la « mission Mars Orbiter » sont tenus par des femmes indiennes. M. Verma a estimé que l’embauche d’un plus grand nombre de femmes policières et de femmes Casques bleus peut faire changer « notre réponse collective à la résolution des conflits ». Il a rappelé comment le déploiement, en 2007 par l’Inde, de la toute première équipe de police entièrement féminine dans le cadre de Mission des Nations Unies au Libéria (MINUL), avait entraîné une multiplication par trois du recrutement de femmes dans la police au Libéria.
M. Verma a jugé que la démocratie, le pluralisme et l’état de droit sont des conditions préalables nécessaires à l’autonomisation socioéconomique des femmes et leur participation aux processus de prise de décision. Il a souligné l’importance d’une approche inclusive et d’une gouvernance représentative en Afghanistan, avec une participation significative des femmes, exhortant en outre à la protection des droits des femmes, conformément à la résolution 2593 (2021).
Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a indiqué que son pays travaille en étroite collaboration avec les gouvernements partenaires, les organisations multilatérales et le secteur privé pour aider les femmes des économies fragiles à jouer un rôle égal dans l’économie, à accéder aux avantages du commerce mondial et à établir des partenariats économiques, car ce sont « des leviers pour la parité ». Elle a cité en exemple la Jordanie, où les femmes sont confrontées aux effets combinés du conflit, des déplacements et de la pandémie et où les programmes de développement britanniques fournissent des transferts en espèces aux femmes réfugiées et aux femmes jordaniennes à risque. La représentante a aussi indiqué que le Royaume-Uni et ses partenaires du G7 ouvrent la voie en mobilisant des investissements publics et privés pour faire progresser l’égalité entre les sexes et combler les lacunes dans les opportunités économiques des femmes, telles que l’accès aux actifs numériques et financiers. L’année dernière, sous la présidence britannique du G7, British Investment International et ses partenaires se sont engagés à investir 15 milliards de dollars sur la période 2021-2022 pour faire avancer ce programme dans les pays en développement. Mais dans les États fragiles où seulement 25% des femmes ont des comptes bancaires, elle a recommandé d’envisager des interventions innovantes comme le microcrédit pour les femmes.
Elle a dit « ne pas pouvoir terminer son propos sans énoncer l’évidence »: l’inclusion économique n’est pas une protection contre les balles et les bombes. Pas plus tard qu’hier, cela a été horriblement clair, s’est-elle indignée en évoquant le bombardement russe qui a tué une mère ukrainienne et ses deux enfants alors qu’ils cherchaient à évacuer la ville d’Irpin. Ils n’étaient pas les premières victimes et, tragiquement, ils ne seront pas les dernières, a mis en garde la représentante. Des hommes, des femmes, des enfants, aussi bien russes qu’ukrainiens, continueront de souffrir jusqu’à ce que la Russie mette fin à cette guerre brutale, non provoquée et illégale, a-t-elle conclu.
M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a souligné l’impact déterminant des femmes dans le règlement des conflits. Cependant, les inégalités culturelles et structurelles limitent souvent leur capacité de participer de manière égale, pleine et significative à la paix et aux processus au sein de leurs sociétés, a-t-il déploré, appelant à une collaboration stratégique renforcée avec les réseaux locaux de femmes et les femmes artisanes de la paix. Il a également insisté sur l’importance de l’inclusion économique et la réintégration des femmes, y compris des ex-combattantes, des réfugiées et des victimes de conflits, pour assurer la stabilité à long terme, la résilience économique et la cohésion sociale. Au niveau national, a-t-il relevé, le Kenya a vu l’avantage que représente l’inclusion des femmes dans le développement économique du pays. Il l’a fait dans le cadre de sa « Vision 2030 », qui prévoit une stratégie économique centrée sur les femmes et leur autonomisation. À l’échelle régionale, le principe de systèmes financiers inclusifs et la reconnaissance de l’égalité des sexes constituent des piliers essentiels pour faire avancer le développement du continent africain, a expliqué le délégué, ajoutant que ces engagements trouvent une illustration pertinente dans la nomination, le mois dernier, de Mme Nardos Bekele Thomas comme première femme Présidente du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD).
Après avoir évoqué les efforts déployés par l’Union africaine pour favoriser l’inclusion financière et économique des femmes, M. Kiboino a souhaité que les organes et agences compétents des Nations Unies en fassent un suivi en ce qui concerne la durabilité de la paix et du développement. Il a également appelé à élever au rang de priorité l’intégration des femmes dans les cadres économiques nationaux et les industries nationales pour assurer la durabilité économique. Cela nécessite la sécurisation des ressources, la promulgation de lois et de politiques pertinentes et le développement de programmes qui font progresser l’égalité des sexes dans tous les secteurs de la vie publique, a-t-il soutenu. Il a d’autre part jugé essentiel d’améliorer l’accès des femmes aux plateformes numériques et de renforcer leur formation technique et professionnelle grâce à un partenariat entre les entrepreneuses locales, les agences de développement et les institutions financières internationales et régionales. Il faut aussi garantir la participation des femmes à la formulation de plans nationaux intégrés de financement axés sur le financement des priorités de développement, tout en prévoyant des indicateurs de mise en œuvre sur le terrain. Enfin, le délégué a appelé à renforcer le rôle consultatif de la Commission de consolidation de la paix (CCP), saluant à cet égard l’avis présenté par cette dernière en faveur d’un indicateur de mise en œuvre de l’égalité des sexes. À ses yeux, le soutien de la CCCP aux efforts nationaux et régionaux de promotion des entrepreneuses et d’autonomisation économique des femmes constituent des « repères importants pour la paix et de l’édification de la nation ».
Mme LILLY STELLA NGYEMA NDONG (Gabon) a reconnu que 21 ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000) les femmes continuent de payer un lourd tribut, notamment dans les États fragiles et en situation de conflit. Il importe que le plaidoyer en faveur de l’autonomisation des femmes s’amplifie à tous les niveaux dans les sphères de la société, a plaidé la représentante. Elle a estimé que le premier défi consiste à remédier au manque d’opportunités et de ressources économiques qui affaiblit le rôle et la capacité de leadership des femmes. « Le Gabon est en Afrique l’épicentre du leadership des femmes en tant qu’agentes de changement et artisanes de paix », a dit la représentante en rappelant que les postes de Premier Ministre, de la Présidence du Sénat et de la Présidence de la Cour constitutionnelle sont occupées par des femmes. Le Gabon est pleinement conscient qu’une pleine participation des femmes aux processus de prévention et de résolution des conflits contribue à une paix durable, a-t-elle assuré. Enfin, la déléguée a demandé le renforcement du partenariat entre l’ONU et les organisations régionales dans ce domaine, ainsi que la création de mécanismes de financement flexibles pour soutenir les initiatives de consolidation de la paix entreprises par les femmes.
Après avoir exprimé son appui et sa solidarité aux femmes et aux filles ukrainiennes, Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a déclaré que la pandémie de COVID-19 a rappelé que les droits des femmes et des filles ne sont jamais pleinement acquis. L’impact économique a été particulièrement lourd pour les femmes, très présentes dans les secteurs les plus touchés par la crise ainsi que dans l’emploi informel et précaire, a-t-elle relevé. Les efforts pour reconstruire en mieux doivent s’appuyer sur une participation égale, pleine, substantielle et effective des femmes à l’économie, a-t-elle suggéré.
En Afghanistan, a poursuivi la représentante, les Taliban multiplient les exactions, notamment à l’encontre de militantes afghanes, ainsi que les violations inacceptables des droits des femmes. L’exclusion des Afghanes de la vie politique, sociale et économique du pays est un affront à la conscience humaine, s’est-elle indignée. La représentante a ensuite appelé à une mise en œuvre holistique des piliers du programme pour les femmes et la paix et la sécurité associant droit et inclusion économiques. Seule cette approche complète peut permettre la construction d’une paix durable, juste et inclusive, a-t-elle souligné.
De son côté, la France continuera de promouvoir une diplomatie féministe ambitieuse et résolue, a fait savoir la représentante qui, évoquant le Forum Génération Egalité, a appelé toutes les parties prenantes à s’engager pour assurer la mise en œuvre du « plan d’accélération mondial » en matière d’égalité et ses 40 milliards de dollars d’engagements financiers.
Mme MELINA ESPESCHIT MAIA (Brésil) a estimé que les partenariats public-privé peuvent jouer un rôle très important dans la promotion de la participation pleine, égale et significative des femmes à la prévention des conflits, la consolidation de la paix et la reconstruction post-conflit, permettant à celles-ci de devenir des moteurs de changement. En effet, l’inclusion économique des femmes, en particulier dans la population active, est une stratégie rationnelle et rentable de prévention des conflits et peut s’avérer essentielle dans la reconstruction post-conflit et la reprise économique.
Néanmoins, a constaté la représentante, la participation des femmes au marché du travail continue d’être inférieure à celle des hommes, les écarts salariaux entre les sexes sont élevés et les femmes surreprésentées dans le secteur informel et parmi les pauvres. Dans de nombreux pays, des restrictions juridiques persistent et empêchent les femmes de développer pleinement leur potentiel économique. Et une fois le conflit terminé, elles subissent des pressions pour accepter les tâches ménagères et quitter leur travail rémunéré.
Pour la déléguée, le Conseil peut œuvrer à travers diverses stratégies correctives, en rédigeant et révisant les mandats des opérations de maintien de la paix afin qu’ils soient plus explicites dans la promotion de l’inclusion économique et de l’autonomisation des femmes, conformément à la résolution 2242 (2015). Le Conseil pourrait en outre veiller à ce que les voix des femmes soient davantage entendues dans le cadre des missions politiques spéciales et continuer à soutenir la Commission de consolidation de la paix (CCP) dans ses efforts pour promouvoir l’inclusion et la participation économiques des femmes. Elle a ensuite salué la décision de la CCP d’allouer au moins 25% des ressources du Fonds pour la consolidation de la paix à des projets visant à autonomiser les femmes et les jeunes.
M. FERIT HOXHA (Albanie) a indiqué que l’Albanie a réalisé des progrès significatifs dans l’autonomisation des femmes et l’égalité des genres à tous les niveaux. Illustrant son propos, il a dit le rapport 2021 du Forum économique mondial sur l’écart entre les genres classe l’Albanie au vingt-cinquième rang sur 156 pays, soulignant des progrès notables dans le domaine de l’autonomisation politique et de la participation et des opportunités économiques. L'une des politiques dont nous sommes le plus fiers est l’intégration du genre à toutes les étapes de la budgétisation publique, au niveau central et local, faisant de l’Albanie le premier pays de la région à inclure la budgétisation sensible au genre comme outil de promotion du financement transformateur pour l’égalité et l’autonomisation des femmes, s’est félicité le représentant. Et en novembre dernier, avec l’appui de l’Agence française de développement et la Banque Mondiale, l’Albanie a commencé la mise en œuvre d’un projet majeur, à hauteur de 51 millions d’euros, visant à accompagner et promouvoir une croissance plus inclusive et équitable en agissant sur les facteurs qui privent les femmes d’opportunités économiques égales à celles des hommes. Notant que 20 à 50% du potentiel de PIB est perdu par les pays en raison de l’accès limité des femmes au marché du travail, il a jugé urgent d’aller au-delà des mots et des engagements et à ne plus perdre de temps pour mettre en valeur le potentiel des femmes en tant qu’acteurs de la paix et de la prospérité, dans l’intérêt de la sécurité, la consolidation de la paix et le développement économique.
M. JUN ZHANG (Chine) a évoqué des initiatives de soutien économique des femmes dans des pays partenaires de la Chine. Ainsi, au Soudan du Sud, l’ambassade de Chine a offert 100 machines de tissage afin de renforcer l’autonomisation socioéconomique des femmes. Il a également parlé de cette Rwandaise qui a répliqué la formation qu’elle a reçue en Chine dans le domaine de l’agriculture circulaire, ainsi que de Concilia, la première conductrice de train kenyane qui arpente le tronçon Nairobi-Mombassa grâce à une formation chinoise.
Le délégué a invité la communauté internationale à miser davantage sur le développement, notamment en investissant dans la reconstruction des zones sortant de conflit, afin d’y jeter les bases de l’autonomisation des femmes. Il a également appelé à aider les femmes qui font face à des difficultés du fait de la pandémie de COVID-19. Grâce au renforcement des coopérations Nord-Sud, Sud-Sud et triangulaire, on peut œuvrer davantage à l’épanouissement des femmes, a-t-il argué. Il a aussi invité le secteur privé et les institutions financières internationales à s’engager. Le FMI pourrait par exemple encourager les États développés à céder leurs droits de tirages spéciaux (DTS) à des États plus fragiles, a-t-il suggéré, expliquant que cela pourrait contribuer à l’essor socioéconomique des couches vulnérables, y compris les femmes. Sur la question de la « crise ukrainienne », il a appelé les Nations Unies à accélérer l’assistance humanitaire dans le pays, plaidant pour le renforcement des initiatives diplomatiques pour parvenir au plus vite à la paix.
Le délégué a ensuite passé la parole à une représentante de la mission chinoise qui a fait part de la maxime selon laquelle « les femmes chinoises portent la moitié du ciel ». Elle a salué la contribution des Chinoises dans la lutte contre la pauvreté, ainsi que leur participation active aux délibérations politiques. Elle a terminé en rendant hommage à Wang Yaping, une astronaute chinoise qui est en orbite en ce moment autour de la terre, portant ainsi le rêve de nombreuses femmes.
M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a souligné le rôle essentiel des femmes en tant qu’artisanes de la paix et de la reconstruction. Il a regretté que cette facette de la coopération internationale soit souvent oubliée et relayée au second plan. Il a plaidé pour le renforcement du rôle des femmes dans la paix et la reconstruction, en leur donnant accès à une émancipation économique et financière. L’accent doit être mis sur l’élimination de la pauvreté, l’émancipation des femmes et l’accès croissant à l’éducation, a-t-il ajouté en recommandant que ces questions soient au cœur des travaux du Conseil de sécurité et de la Commission de consolidation de la paix afin d’œuvrer constamment à la cause des femmes.
Cette année, le 8 mars intervient sur fond de bouleversement de l’ordre mondial, a constaté le représentant russe. Depuis huit ans, les femmes sont persécutées à Donetsk et Luhansk par des radicaux ukrainiens, dans un silence assourdissant de la communauté internationale, « même quand les chaines de télévision ukrainiennes montrent des personnes brulées vivantes à Odessa », a-t-il déploré. Cette situation ne pouvait se poursuivre indéfiniment, a martelé le représentant en assurant que la paix en Ukraine sera rétablie. Revenant sur la résolution 1325 du Conseil de sécurité, il a dit que la tâche consiste à ne pas enterrer dans des divergences politiques la valeur de la coopération dans le cadre de cette cause.
Mme MONA JUUL (Norvège) a estimé qu’assurer les droits économiques des femmes nécessite leur participation aux processus, mécanismes et institutions de prise de décision, y compris économiques et financiers, et l’accès et le contrôle des ressources sur un pied d’égalité avec les hommes. Pour un pays en crise ou en conflit, garantir les droits économiques des femmes peut être un moyen de parvenir au développement, à la stabilité et à la paix à long terme, a-t-elle assuré, reconnaissant toutefois que c’est souvent dans les pays fragiles et touchés par des conflits que les femmes sont confrontées à l’exclusion économique la plus grave. Citant la dernière édition de l’Indice mondial sur les femmes, la paix et la sécurité, la déléguée a noté que les femmes et les filles déplacées sont plus exposées aux formes de violence sexiste et de marginalisation économique. Elles rencontrent notamment des obstacles à l’accès à l’emploi et aux opportunités de subsistance qui résultent de facteurs croisés affectant leurs droits. De plus, a-t-elle déploré, les mariage forcés et précoces, et l’absence d’identification légale figurent parmi les plus grands contributeurs à la pauvreté dans les ménages dirigés par des femmes déplacées. À cet égard, elle a tenu à réitérer la condamnation par la Norvège de « l’agression injustifiée de l’Ukraine par la Fédération de Russie » et s’est déclarée « préoccupée par les effets de cette guerre sur les femmes et les filles ukrainiennes ».
Plus généralement, la représentante a observé que les conflits et les crises peuvent perturber les normes traditionnelles et créer des opportunités pour les femmes. Il est impératif que ces opportunités soient reflétées dans les dispositions relatives au genre dans les accords de paix, les réformes et les nouvelles législations, a-t-elle affirmé, plaidant pour des consultations larges et inclusives avec une diversité de femmes dans les domaines de la consolidation de la paix, de la démobilisation, de la réintégration, du relèvement et des programmes économiques au niveau national et communautaire. Elle a d’autre part souhaité que le Conseil de sécurité et toutes les « présences » de l’ONU sur le terrain, y compris les opérations de paix, insistent sur l’influence directe des femmes dans les décisions qui affectent leur vie et leur avenir. Elle a également appelé à des partenariats avec le secteur privé pour exploiter des opportunités sous-utilisées, notamment en matière d’emploi, de comblement de la fracture numérique et de solutions innovantes à des problèmes complexes, tels que les moyens de paiement et la pauvreté énergétique. Pour Mme Juul, les conflits et les crises ne diminuent pas la nécessité de se concentrer sur la participation et les droits des femmes, y compris leurs droits économiques, « tout au contraire ». L’inclusion, a-t-elle conclu, exige à la fois de la créativité et un engagement solide.
Mme CAROLYN ABENA ANIMA OPPONG-NTIRI (Ghana) a estimé qu’un nouvel élan doit être insufflé au programme « les femmes et la paix et la sécurité », en accordant notamment une attention accrue aux dimensions négligées de ce programme, telles que l’inclusion économique des femmes comme élément la clef de la paix. La déléguée a souligné l’importance des apports du Fonds pour la consolidation de la paix et du Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire pour une plus grande égalité entre les genres dans le monde. Ce sont de bons exemples des avancées possibles lorsque tous les acteurs clefs du programme précité mettent en commun leurs ressources au service du bien commun, a dit la déléguée. Elle a aussi rappelé que des organisations telles que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ou encore l’Union africaine (UA) ont érigé des aspects cruciaux de ce programme en objectifs stratégiques. L’objectif d’une autonomisation des femmes adopté par ces deux organisations exige l’appui de la communauté internationale pour être réalisé, a plaidé la représentante.
Mme Oppong-Ntiri a suggéré une diminution des dépenses militaires pour dégager davantage de ressources en faveur du programme précité. « Malheureusement, la situation mondiale actuelle va probablement conduire les pays à augmenter leur budget défense. » Elle a ensuite plaidé pour le développement de politiques d’autonomisation des femmes au niveau national, avec la participation notamment des autorités traditionnelles et des médias. Enfin, la déléguée a demandé qu’un appui technique et financier soit fourni aux initiatives d’autonomisation des femmes dans les régions faisant face à la menace terroriste, en particulier au Sahel et en Afrique de l’Ouest.
M. AHMED KHALEEL, Ministre d’État des affaires étrangères des Maldives, a suggéré que lorsqu’un conflit, une catastrophe ou d’autres crises frappent, les interventions immédiates et les actions de relèvement à plus long terme doivent se concentrer sur la situation et les besoins des femmes et sur leur inclusion dans la prise de décision. Dans un petit pays comme les Maldives, a fait observer le Ministre, une catastrophe naturelle peut anéantir des décennies de progrès en matière de développement en un clin d’œil et ces situations créent des environnements où les femmes sont marginalisées. En réponse aux conséquences de la COVID-19, les Maldives ont fourni une allocation de soutien du revenu aux travailleuses qui ont perdu leur emploi, en particulièrement celles qui travaillaient dans le secteur informel, a informé M. Khaleel citant aussi d’autres initiatives de son gouvernement comme l’inclusion et la collecte de données afin d’identifier plus rapidement et de mieux comprendre les défis auxquels les femmes sont confrontées.
Pour assurer une action sur le terrain qui tienne compte des femmes, le Ministre a recommandé la participation pleine, égale et significative des femmes aux rôles de leadership. C’est ainsi que les Maldives ont adopté une loi visant à attribuer 33% des sièges au Parlement aux femmes lors des élections locales, a-t-il signalé en ajoutant qu’un tiers des postes ministériels sont occupés par des femmes. Pour la première fois, nous avons des femmes juges à la Cour suprême, s’est-il enorgueilli en ajoutant que ce sont des femmes qui dirigent la Commission du service juridique et la Commission des droits humains. Pour la première fois, en avril 2021, des femmes ont été élues pour occuper un tiers des sièges des conseils locaux, a-t-il aussi indiqué.
M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) a souligné le rôle important que jouent les femmes dans la consolidation de la paix et la promotion du développement durable. Il a indiqué que son pays, qui a participé à de multiples réunions sur les femmes, la paix et la sécurité, y compris lorsqu’il présidait l’Union africaine, reconnaît que les femmes sont des artisanes de la paix. Son gouvernement met d’ailleurs en œuvre un plan national connexe, conforme aux dispositions de la résolution 1325 (2000). Des ressources sont toutefois nécessaires pour en assurer la mise en œuvre complète, a fait observer le représentant. Récemment, a-t-il fait valoir, le Forum d’Assouan a permis de formuler une série de recommandations à l’intention des pays africains pour, entre autres, renforcer le rôle des femmes dans le maintien et la consolidation de la paix. Il a ensuite souhaité que soit favorisée une approche consensuelle sur toutes les questions liées au programme pour les femmes et la paix et la sécurité.
Mme VANESSA FRAZIER (Malte) s’est dite persuadée que l’inclusion des femmes dans la paix et la sécurité apporte de meilleurs résultats et que la présence des femmes à la table des négociations renforce la responsabilisation pour la mise en œuvre. Elle a jugé en outre indispensable la participation des femmes dans toutes les activités de promotion de la paix au regard de l’impact disproportionné des conflits sur les femmes et filles. Elle a cité en exemple l’Ukraine, l’Afghanistan, la Syrie, l’Éthiopie et le Myanmar, notant que les femmes subissent notamment des formes de discrimination multiples et croisées en conséquence des conflits. Dans un souci d’inclusion économique, elle a prôné la fourniture aux femmes des compétences nécessaires pour obtenir un emploi bien rémunéré et participer plus activement à leur société. Elle a aussi conseillé d’amender les législations pour permette aux femmes d’hériter et de posséder des terres. Permettre la participation pleine, égale et significative des femmes à tous les aspects des processus de paix et de leur mise en œuvre est une priorité essentielle pour Malte, a-t-elle ajouté, citant aussi à ce titre la mise en œuvre du programme les femmes et la paix et la sécurité qui est au centre des partenariats de Malte avec ses partenaires multilatéraux et régionaux.
M. OMAR HILALE (Maroc) a déclaré qu’il ne saurait avoir de paix sans développement et vice-versa. Il a appelé à des partenariats réussis pour pérenniser la paix, notant que le secteur privé peut y apporter une grande contribution. Il a souligné que les entreprises locales sont très souvent dirigées par des femmes qui occupent une place centrale dans la société. Le représentant a ensuite proposé d’établir un état de lieux de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, notamment pour ce qui est de la participation des femmes dans le secteur économique, avec l’aide de marqueurs qui permettraient d’identifier les écarts afin de prendre des mesures pour combler les fossés. Il serait aussi opportun, a souligné M. Hilale, que des rapports périodiques du Secrétaire général sur la mise en œuvre de ladite résolution tiennent compte de l’autonomisation socioéconomique des femmes. Enfin, il a appelé, dans le contexte post-COVID-19, à exploiter et mettre à profit les meilleures pratiques de l’ONU en matière d’autonomisation socioéconomique des femmes dans le cadre de la pérennisation de la paix.
Mme PASCALE CHRISTINE BAERISWYL (Suisse) a souligné que la participation pleine, égale et significative des femmes à l’aide d’urgence, à la reconstruction et à la consolidation de la paix reste fondamentale, en faisant fond sur les nombreuses entrepreneuses, bâtisseuses de ponts impressionnantes qu’elle a rencontré tout au long de sa carrière – au Mozambique, en Égypte, au Népal ou dans son propre pays. À la question de savoir quel était le principal obstacle à leur pleine participation aux processus de consolidation de la paix, une réponse revenait fréquemment: la pauvreté. « Est-ce surprenant? Non! » L’autonomisation et l’indépendance économique sont les moteurs d’une participation plus effective des femmes aux processus de paix et de reconstruction, mais également aux processus politiques, ce qui est souligné dans le Plan d’action national de la Suisse. Elle a invité tous les pays à développer leur propre plan d’action national et à y mettre un accent sur l’autonomisation économique des femmes. Renforcer la position socioéconomique des femmes est aussi un sujet clef de la coopération suisse, a-t-elle ajouté, précisant que son pays soutient notamment des femmes gérantes de petites et moyennes entreprises transfrontalières dans la région des Grands Lacs.
Poursuivant, la représentante a salué la priorité accordée par le Fonds pour la consolidation de la paix de l’ONU au financement d’initiatives favorisant la participation et l’autonomisation des femmes, et vu dans le Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire « un bon exemple d’un multilatéralisme moderne et efficace ». Le Conseil de sécurité a également un rôle à jouer en améliorant ses partenariats grâce à la promotion de réseaux, ce qu’il peut faire lors de visites sur le terrain en rencontrant des actrices de la paix, ou en coopérant davantage avec des organisations régionales, les institutions financières internationales et la société civile. Mme Baeriswyl a conclu en soulignant l’importance des synergies entre le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social et la Commission de consolidation de la paix dans ce domaine.
M. KIMIHIRO ISHIKANE (Japon) a tout d'abord exprimé sa vive préoccupation face à la détérioration de la situation humanitaire en Ukraine et dans les pays voisins, évoquant en particulier les conséquences désastreuses de l’ « agression russe » sur les femmes et les filles. Tout en appelant à un rétablissement rapide du « statu quo ante bellum » en Ukraine, il a fait observer que survivre à une crise n’est que la « pointe de l’iceberg » du vaste programme pour les femmes et la paix et la sécurité. Les femmes doivent être au centre de tous nos efforts pour construire des sociétés pacifiques et résilientes, a souligné le représentant, constatant que les femmes sont capables de résoudre les problèmes par des moyens pacifiques et sans la tentation de modifier le statu quo par la force. De fait, a-t-il insisté, la participation des femmes est « la clef de la prévention des conflits », ce qui implique de la promouvoir par le biais d’une approche globale et de mesures spécifiques, comme l’autonomisation et le renforcement des institutions, dans le cadre de partenariats efficaces entre les parties prenantes.
Pour illustrer son propos, le délégué a indiqué que son pays a récemment soutenu un projet dirigé par ONU-Femmes dans la région du lac Tchad, qui visait à l’autonomisation des femmes touchées par les conflits violents provoqués par Boko Haram. Dans ce cadre, a-t-il précisé, ONU-Femmes a agi en partenariat avec l’association Sasakawa Africa, une organisation de la société civile japonaise qui aide les petits exploitants agricoles en Afrique depuis plus de 30 ans. En collaboration avec les autorités locales du Cameroun et du Nigéria, Sasakawa a offert aux agricultrices locales des formations à l’agriculture intelligente face au climat et aux activités génératrices de revenus afin de leur permettre d’assurer leur autonomie économique. Qualifiant ce projet de « succès », le représentant a souligné qu’un partenariat efficace exige une complémentarité efficace, ce qui passe par une amélioration du partage d’informations et des interactions entre les différentes parties prenantes, à savoir les organisations de la société civile, les institutions, le secteur privé et bien sûr les gouvernements et les entités des Nations Unies, singulièrement en situation de conflit. À cet égard, il a estimé que le Pacte sur les femmes, la paix, la sécurité et l’action humanitaire, dont le Japon est signataire, pourrait servir de plateforme utile pour renforcer la coopération dans le cadre de partenariats.
M. ROBERT KEITH RAE (Canada), au nom des 56 États membres du Groupe des amis des femmes, de la paix et de la sécurité, a exprimé sa pleine solidarité avec les femmes et les filles en Ukraine et déploré les pertes en vie humaine à la suite de l’agression de la Russie. Il a souhaité que les livraisons d’aide humanitaire prennent en compte la perspective de genre, en soulignant la nécessité que les besoins des femmes et des filles soient satisfaits. Le délégué a encouragé les États Membres à accroître leur soutien aux initiatives promouvant l’égalité entre les genres et l’autonomisation des femmes, en particulier dans les situations de conflit et post-conflit. Il a aussi invité le Conseil à reconnaître l’importance de l’inclusion économique des femmes, de leurs familles et de leurs communautés. Le Conseil devrait par ailleurs renforcer sa coopération dans ce domaine avec la Commission de consolidation de la paix et le Conseil économique et social, ainsi qu’avec les organisations régionales, a souhaité le représentant. Il a insisté sur le rôle du secteur privé pour accroître la participation économique des femmes dans les contextes de conflit, par le biais notamment d’un démantèlement des entraves systémiques et de la création d’emplois décents. « Nous devons chaque jour nous rappeler de notre responsabilité de pleinement mettre en œuvre le programme les femmes et la paix et la sécurité. »
Mme MARIA THEOFILI (Grèce) a d’emblée salué le courage et la résilience des femmes ukrainiennes. Elle a constaté que dans de nombreux contextes, le rôle des femmes est sous-estimé en raison de la persistance de pratiques discriminatoires, s’inquiétant en outre des répercussions des violences sexuelles et sexistes, des conséquences des changements climatiques, et de la pandémie de COVID-19 en particulier dans les zones touchées par les conflits. À cet égard, a estimé la représentante, le programme pour les femmes et la paix et la sécurité constitue une approche holistique avec ses quatre piliers. Elle a appelé à établir des partenariats avec le secteur privé, la société civile et les femmes journalistes, pour ensuite insister sur l’importance de la parité dans la gouvernance. La Grèce entend d’ailleurs accélérer la parité dans le pays et a adopté un plan d’action national à cette fin, a-t-elle indiqué.
M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie) a déclaré que les femmes sont toujours confrontées à des défis qui entravent leur pleine participation à l’économie, notant que le renforcement de leur autonomisation économique entraînerait des avantages directs pour les femmes et leurs communautés. Il a indiqué que femmes ne représentent que 21% de la population active et 18% du PIB de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord où le taux d’emploi des femmes a chuté en raison de la pandémie de COVID-19. Le représentant a indiqué que la Jordanie s’est dotée d’un plan d’action économique quinquennal pour les femmes qui vise à accroître leur participation dans la vie active. La Jordanie a également introduit une série d’amendements à ses lois pour renforcer la participation des femmes à la promotion des politiques sur le travail flexible, tandis que la stratégie nationale des femmes de la Jordanie pour 2020-2025 vise à accroître la participation économique des femmes, y compris les femmes réfugiées.
M. MICHAEL ALEXANDER GEISLER (Allemagne) a dit que la Journée internationale des femmes ne devrait pas être consacrée aux fleurs ni à des conférences sur le sujet, mais à la lutte pour les droits des femmes. Alors que le monde célèbre cette journée au milieu des souffrances des femmes qui vivent des conflits, le représentant a exprimé sa solidarité avec le peuple ukrainien, qui fait face à des attaques odieuses, non provoquées, de la part de la Fédération de Russie. « Les civils font face à des bombardements et des millions de personnes doivent fuir les assauts russes », a-t-il dénoncé. Prenant note de la récente résolution de l’Assemblée générale déplorant l’agression de l’Ukraine par la Fédération de Russie, le représentant de l’Allemagne s’est félicité de l’unité affichée par 141 États Membres qui se sont levés pour défendre la Charte des Nations Unies et l’ordre international fondé sur des règles. Il a exhorté la Russie à arrêter l’agression et à retirer ses forces. Passant à l’Afghanistan, il s’est dit préoccupé de l’exclusion des femmes sous le régime taliban. Il a exprimé l’espoir que la Journée internationale puisse être célébrée sans soucis l’année prochaine.
Mme AYSE INANÇ ÖRNEKOL (Turquie) a dit sa solidarité avec les femmes et filles d’Ukraine qui font preuve de résilience et de courage face à « un acte d’agression injustifié, illégal et illégitime de la part de la Fédération de Russie ». Elle a relevé que les événements récents en Ukraine ainsi qu’en Afghanistan et dans de nombreux autres endroits du monde montrent l’importance cruciale du programme pour les femmes et la paix et la sécurité dont la mise en œuvre efficace nécessite de se concentrer sur ses quatre piliers: participation; prévention des conflits; protection; secours et relèvement. L’autonomisation économique est un élément essentiel de la participation pleine et effective des femmes, ainsi qu’un catalyseur pour renforcer la résilience globale de la société, a précisé la représentante. Au contraire, la discrimination à l’égard des femmes dans le contrôle et l’accès aux ressources économiques, aggravée par le fardeau disproportionné du travail de soins non rémunéré, compromettent la résilience des femmes et des filles dans les situations de conflit et de post-conflit.
La déléguée a demandé de reconnaître les femmes comme des agents du changement, plutôt que comme des bénéficiaires passives de l’aide. Elle a recommandé de soutenir les femmes artisanes de la paix, les défenseuses des droits humains et les représentantes de la société civile afin qu’elles puissent s’engager et participer pleinement à tous les aspects de la vie publique et politique. Elle a assuré que le simple fait d’augmenter le nombre de femmes occupant un emploi rémunéré pourrait faire augmenter considérablement le PIB des pays. La violence à l’égard des femmes, en revanche, coûte à l’économie mondiale plus de 12 000 milliards de dollars chaque année en raison des pertes de productivité dues au manque de bien-être des femmes. « Nous sommes heureux de voir que, travaillant en partenariat avec les gouvernements, les agences des Nations Unies et la société civile, un nombre croissant d’entreprises privées investissent dans l’autonomisation des femmes. » En plus des initiatives nationales d’autonomisation économique des femmes, la Turquie mène des projets en Afghanistan et en Somalie, notamment dans les domaines de l’éducation et des services de santé. La représentante a également indiqué que la Turquie a été un refuge sûr pour près de 4 millions de Syriens, dont des femmes et des filles. Nous continuerons à tout mettre en œuvre pour soutenir ces femmes et ces filles et s’assurer de leur bien-être social et économique, a-t-elle assuré.
M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a souligné la nécessité d’accorder la priorité aux « agents clefs de la paix » : les femmes. Pour cela les femmes devraient faire partie de tous les efforts de prévention des conflits, de rétablissement et de consolidation de la paix, a-t-il déclaré. Pendant la reconstruction post-conflit, la participation des femmes doit être assurée dans tous les programmes et activités de secours et de redressement en vue d’assurer leur autonomisation économique et leur inclusion, a plaidé le représentant pour qui les femmes devraient être en première ligne en tant que planificatrices, décideuses et exécutantes dans tous les secteurs de la société. De plus, selon M. Akram, les partenaires internationaux, y compris les institutions financières internationales et le secteur privé, devraient promouvoir des approches soutenues, sensibles au genre et axées sur la communauté pour veiller à l’inclusion et à la participation économiques des femmes. Le représentant a ajouté que les pays touchés par des conflits ont besoin d’un accompagnement qui soit sensible à leur culture dans le façonnage de leurs secteurs judiciaire, législatif et administratif pour l’autonomisation des femmes.
Il est impératif pour le Conseil de relever les défis immédiats posés aux femmes et aux filles dans de nombreuses situations de conflit à travers une approche holistique et de manière efficace et non discriminatoire. Notant que les situations de conflit en Ukraine ou en Afghanistan où les femmes et les filles sont en danger et leurs droits fondamentaux bafoués font l’objet d’un intérêt certain du Conseil de sécurité, il a regretté que la violence contre les femmes et les filles dans des lieux occupés comme la Palestine et le Jammu-et-Cachemire occupés soit moins visible dans ses débats. À l’occasion de la Journée internationale de la femme, le Pakistan a donc appelé le Conseil à demander à l’Inde de mettre en œuvre ses résolutions pertinentes en accordant le droit à l’autodétermination aux Cachemiris afin que les millions de femmes cachemiriennes puissent vivre dans la dignité, et sans violence ni abus.
Mme ZAHRA ERSHADI (République islamique d’Iran) a soutenu que, face aux défis des crises humanitaires causées par les conflits, les changements climatiques ou encore la pandémie actuelle, les femmes jouent un « rôle indéniable », notamment en matière de promotion du dialogue et de la confiance. « C’est un fait bien connu qu’encourager les femmes à s’engager dans les processus de paix augmente les possibilités de paix », a-t-elle insisté. En conséquence, leur participation et leur inclusion dans ces processus augmentent l’efficacité de l’aide humanitaire, améliorent la protection des civils, contribuent au règlement politique des différends et au maintien de la paix à long terme, et accélèrent la reprise économique. Observant que de nombreuses résolutions de l’ONU soulignent l’importance de l’autonomisation des femmes dans la prévention et, la résolution des conflits, et la stabilisation post-conflit, elle a souhaité que la promotion des droits et de la dignité des femmes fasse partie des conditions préalables pour le développement de toutes les sociétés.
Dans cet esprit, a poursuivi Mme Ershadi, l’Iran a toujours considéré la promotion du statut culturel, social, économique et politique des femmes et des filles comme un élément clef de ses politiques, de sa législation et de sa planification. La déléguée a ainsi fait état de « réalisations remarquables » dans ce domaine, malgré les sanctions américaines « illégales et inhumaines » qui ont eu des effets négatifs sur les programmes du Gouvernement, de la société civile et du secteur privé. Elle a par ailleurs attiré l’attention du Conseil sur le sort des femmes dans sa « région fragile », qui font face aux effets des conflits armés, de l’extrémisme violent, des agressions étrangères et des attaques terroristes. Elle a notamment évoqué la situation des femmes et les filles palestiniennes, qui continuent de souffrir de l’occupation et de violations de leurs droits humains. Elle s’est aussi déclarée inquiète de la situation en Afghanistan, qui a gravement affecté les droits des femmes, y compris leurs droits politiques et socioéconomiques. Les Taliban devraient, selon elle, tenir compte de l’appel de la communauté internationale à protéger les droits humains, et en particulier les droits des femmes. Enfin, elle a réaffirmé la position de principe de son pays, selon laquelle les questions concernant les femmes et les filles sont du ressort de l’Assemblée générale, estimant que le Conseil de sécurité ne devrait traiter de cette question qu’en cas de lien direct avec le maintien de la paix et de la sécurité internationales.
Mme ANNA KARIN ENESTRÖM (Suède), au nom des pays nordiques et des pays baltes a exprimé sa pleine solidarité avec les femmes et les filles en Ukraine, avant de condamner dans les termes les plus forts l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Elle salué le courage et la résilience dont les femmes ukrainiennes font montre dans la réponse politique, militaire et humanitaire. Elle a exhorté le Conseil à rester concentré sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité lors de l’examen des points inscrits à son ordre du jour, notamment la situation très préoccupante pour les femmes et les filles en Afghanistan. La protection des femmes ne sera pas possible tant que les législations discriminatoires et les entraves à leur autonomisation économique ne seront pas démantelées, a souligné la représentante qui a appelé à promouvoir des mesures transformatives qui remédient aux structures de pouvoir qui perpétuent l’exclusion des femmes et l’inégalité entre les genres. La déléguée a aussi insisté sur l’importance du secteur privé dans la pleine mise en œuvre du programme précité. Les femmes s’autonomiseront d’elles-mêmes dès lors que les obstacles qui les entravent si injustement auront été levés, a conclu la représentante.
Pour M. ANDRES EFREN MONTALVO SOSA (Équateur) la résolution 1325 (2000) souligne l’importance de promouvoir la participation des femmes à la paix et à la sécurité et la création d’un environnement propice à cet égard. Il a appelé à renforcer la capacité des missions de paix à protéger le personnel féminin, à lutter contre l’impunité et à prévenir les violences, demandant en outre à accroître la synergie entre le programme pour les femmes et la paix et la sécurité et les résolutions 2493 (2019) et 2538 (2020).
Le représentant a ensuite indiqué que dans la zone frontalière entre l’Équateur et la Colombie, son gouvernement a mis en œuvre avec l’appui de l’ONU, des programmes de renforcement des capacités des femmes et des filles pour privilégier une approche préventive. Le délégué a demandé à financer ces programmes y compris par le biais de partenariats public-privé. Il a conclu en appelant à la cessation immédiate des hostilités et au rétablissement rapide de la paix, seul moyen, selon lui, de rendre hommage à toutes les femmes et à toutes les filles victimes de l’agression armée contre l’Ukraine.
Mme MARÍA DEL ROSARIO ESTRADA GIRÓN (Guatemala) a expliqué que la fragilité et l’instabilité qui caractérisent souvent les environnements post-conflit affectent négativement les femmes et les filles, plus vulnérables à la violence et à l’exploitation. « Lorsque le conflit prend fin, les femmes continuent être exposées à un risque accru d’être victimes de violences sexuelles, d’exploitation et de traite des êtres humains, surtout si elles ont été forcées de migrer en raison du conflit », a indiqué la représentante. C’est pourquoi, elle a jugé crucial d’adopter une perspective de genre qui intègre les besoins spécifiques des femmes et filles à toutes les étapes des efforts de reconstruction post-conflit afin de réparer le tissu social des sociétés fracturées. Elle a fait le lien entre développement économique, réduction de la pauvreté et autonomisation des femmes, soulignant que les partenariats sont fondamentaux pour maintenir la paix et sécurité internationales.
Près de 22 ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, la déléguée a constaté que les États ont encore un long chemin à parcourir pour se conformer aux dispositions de cette résolution et des résolutions suivantes sur les femmes, la paix et la sécurité. Elle a noté que les conséquences de la pandémie de COVID-19 ont apporté des fardeaux supplémentaires pour les femmes et les filles dans les situations post-conflit, mettant l’accent sur la situation particulière des femmes déplacées, migrantes ou réfugiées, s’inquiétant par ailleurs des conséquences de l’agression russe en Ukraine sur la situation des femmes. Elle a appelé à investir dans l’inclusion économique des femmes par le biais de politiques publiques qui offrent des possibilités de garde d’enfants et améliorent l’accès à l’éducation et aux services tels que l’eau, l’électricité, et les transports, afin que les femmes puissent participer à des activités économiques aux bénéfices considérables.
Mme MONTSERRAT GONZALEZ CARRILLO (Chili) a présenté son pays comme un leader régional en matière de mise en œuvre du programme « les femmes et la paix et la sécurité » puisque le Chili a lancé le premier plan d’action national de la région en 2009 et a été le premier pays à lancer son deuxième plan national en 2015, qui intègre des objectifs mesurables et actualisables en fonction des contextes. La représentante a jugé important de souligner le travail accompli par la société civile pour renforcer et étendre la mise en œuvre de ce programme. « Nous avons maintenant la possibilité de préparer un troisième document qui intégrera une perspective holistique et intersectorielle afin de renforcer notre réponse aux défis émergents tels que la crise sanitaire actuelle, les catastrophes naturelles auquel le Chili est si sujet, les conflits sociaux et la plus grande prévalence de la violence sexiste dans tous ces scénarios. »
Mettant l’accent sur la valeur ajoutée des femmes pour réaliser le maintien et la consolidation de la paix, elle a appelé à investir dans le développement des compétences de médiation et négociation des femmes, la promotion de politiques et de programmes sensibles au genre et des connaissances sur les garanties internationales en matière de droits humains. L’autonomisation économique des femmes est aussi un facteur important des stratégies de consolidation de la paix à long terme, a-t-elle poursuivi, non seulement pour contribuer à la pérennité des communautés, mais aussi parce que la participation des femmes à l’économie dans les pays fragiles et touchés par des conflits les rend moins vulnérables et donc moins susceptibles d’être victimes de violence. De même, elle a estimé que la participation des femmes aux économies locales contribue à inverser les causes structurelles des conflits comme la pauvreté, y compris la féminisation de la pauvreté. Elle a jugé pertinent de promouvoir une approche de construction de la paix à partir des territoires, dans laquelle la paix est comprise non pas comme l’absence de conflit mais comme la création de conditions de base permettant aux sociétés de prospérer dans un état de droit.
M. JAKUB KULHÁNEK (République Tchèque) a déploré le sort des femmes et filles ukrainiennes qui souffrent de la guerre. Il a condamné les informations faisant état de viols d’Ukrainiennes par des soldats russes, avant d’appeler à l’arrêt des combats et de rendre hommage aux Ukrainiennes courageuses qui défendent leurs êtres chers. Il a également salué le courage des journalistes qui rendent compte du conflit malgré les risques pour leur vie. La République Tchèque appuie, a-t-il dit, les quatre piliers du programme pour les femmes et la paix et la sécurité.
Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a constaté que les conflits armés font peser un fardeau particulier sur les femmes et les filles et provoquent le recul des acquis en termes d’égalité entre les sexes, et « la guerre en Ukraine ne fait pas exception ». Garantir la participation pleine, égale et significative des femmes à toutes les étapes de la prise de décision est aussi important pour l’égalité entre les sexes que l’investissement dans des domaines où elles sont notoirement discriminées ou négligées, a estimé la représentante. À ce titre elle a cité l’accès limité des femmes aux ressources et leurs difficultés financières, arguant que leur exclusion économique est à la fois la cause et la conséquence de l’inégalité entre les sexes. Les femmes représentent une part disproportionnée de la population mondiale non bancarisée, les inégalités dans l’emploi et les revenus limitant leur capacité à ouvrir des comptes bancaires. Et dans les situations de conflit, l’autonomisation économique des femmes est encore plus restreinte.
La représentante a ensuite fait savoir que le Liechtenstein s’est associé au secteur privé dans le but de lutter contre l’esclavage moderne et la traite et atteindre les objectifs de développement durable. Un partenariat avec d’autres gouvernements, le secteur privé et l’Université des Nations Unies, a débouché sur la création de Finance Against Slavery and Trafficking Initiative qui a pour vocation d’inciter le secteur financier à lutter contre la traite et l’esclavage, notamment en améliorant l’inclusion financière des femmes et des filles. Elle a invité tous les États Membres, le système des Nations Unies, les institutions financières internationales et les acteurs financiers à se joindre à cet effort.
« Cette Journée internationale des femmes n’est pas un moment de fête », a déclaré M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne (UE), qui a appelé les États Membres à réaffirmer leur plein soutien à l’Ukraine et à son peuple, en particulier aux femmes ukrainiennes qui font preuve de résilience et de courage dans ce « conflit non provoqué ». Rappelant à cet égard que les femmes et les filles sont particulièrement touchées par les conflits et les déplacements, et qu’elles font face à un risque accru de violence, notamment sexuelle et sexiste, il s’est dit consterné par les informations faisant état de viols massifs perpétrés par les forces armées russes. Il a également condamné les attaques de la Russie contre des installations civiles, notamment les hôpitaux, qui privent les Ukrainiens de l’accès aux services de santé essentiels, y compris les services de santé sexuelle et reproductive. Le représentant a également rendu hommage aux femmes qui, dans de nombreuses villes russes, manifestent pour la paix au péril de leur liberté. « Nous sommes à vos côtés, vous soutenons et vous remercions pour votre mobilisation dans un contexte difficile et dangereux. »
Le représentant a ensuite indiqué que l’UE reste particulièrement préoccupée par la situation des femmes et des filles en Afghanistan. Depuis août 2021, leurs droits connaissent un recul brutal, a-t-il constaté, avant de dénoncer l’exclusion des femmes de la vie publique afghane et les restrictions qui leur sont imposées en matière d’éducation, de déplacements et d’accès aux services de santé, à l’emploi et aux responsabilités politiques. L’UE demande que la participation pleine, égale et significative des femmes et des filles soient garanties dans la société afghane, a-t-il souligné, en se félicitant du lancement récent du cadre d’engagement transitoire de l’ONU, qui envisage, entre autres mesures, un financement immédiat des services sociaux comme la santé et l’éducation. Il a ajouté que, le 10 mars, l’UE accueillera un forum de dirigeantes afghanes à Bruxelles afin de veiller à ce que les femmes afghanes soient associées aux efforts de dialogue politique dans leur pays.
Ces développements récents confirment, selon lui, l’importance de placer le programme pour les femmes et la paix et la sécurité au centre de tous les efforts, notamment dans le cadre du Conseil de sécurité. Nous savons que les inégalités, perpétuées et renforcées par l’exclusion des femmes et des filles de la prise de décision, des opportunités, des services et de la sécurité, sont des « moteurs de conflit » et peuvent conduire, entre autres, à un risque accru de violence sexuelle et sexiste. Nous savons également que la promotion de l’autonomisation économique de toutes les femmes et les filles est un moyen de renforcer la résilience sociétale globale, qui à son tour est essentielle à la prévention, à la résolution des conflits et à la consolidation de la paix à long terme, ainsi qu’à la réponse aux effets des crises, y compris la crise climatique. C’est pourquoi, a-t-il dit, la promotion des droits économiques des femmes et de la justice économique est au centre des efforts de l’UE en faveur de l’égalité des sexes. Enfin, jugeant inacceptable que des femmes dirigeantes de la société civile, des artisanes de la paix et des défenseuses des droits humains ainsi que les femmes journalistes continuent de faire l’objet de menaces et de représailles sexospécifiques, il a pressé le Conseil de sécurité à mettre en place un mécanisme efficace de protection de ses informateurs de la société civile.
Mme JOAN MARGARITA CEDANO (République dominicaine) a déploré les entraves à la pleine participation des femmes dans les contextes de conflit et souhaité que les processus de paix remédient à ces difficultés. Elle a aussi appelé à assurer l’autonomisation des femmes grâce à une promotion de leurs droits. Les femmes doivent être encouragées à jouer un rôle de chef de file, a-t-elle insisté., exhortant à lutter contre les normes sociales qui entravent une pleine participation des femmes. La représentante a aussi mentionné le sort des femmes en Ukraine, dont les souffrances s’ajoutent à celles éprouvées par les femmes au Yémen ou encore en Afghanistan. Notant que les femmes et les filles sont toujours les plus touchées lors des conflits, elle a appelé la Russie à cesser les hostilités, à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire et à s’acquitter de ses obligations en vertu de la Charte.
Dénonçant les nombreuses restrictions qui sont imposées aux femmes et aux filles à travers le monde, M. FRANCISCO DUARTE LOPES (Portugal) a voulu que l’on lutte contre l’impunité dont bénéficient ceux qui les imposent. Le représentant a souligné l’importance de la prévention et de l’établissement des responsabilités, avant de saluer les femmes et les filles d’Ukraine, du Yémen, d’Afghanistan et du Myanmar. Défenseur acharné de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes, il a souligné que cette autonomisation est un moteur pour le développement et l’égalité des revenus, dans laquelle l’éducation joue un rôle essentiel. L’autonomisation des femmes est également un moteur pour une contribution des femmes plus à la paix et à la sécurité, a aussi souligné le représentant.
M. LUIS UGARELLI (Pérou) a considéré que les femmes sont des artisanes de paix, et que leur émancipation et leur autonomisation constituent un véritable investissement dans l’avenir et la stabilité des sociétés. Il reste, a-t-il avoué, beaucoup à faire pour que les femmes puissent pleinement réaliser leur potentiel de transformation sociale et communautaire, compte tenu des inégalités persistantes. Aussi le représentant a-t-il préconisé de promouvoir l’éducation et la formation professionnelle des femmes et leur garantir l’accès aux financements. Leur intégration économique passe également par des partenariats public-privé, a-t-il souligné, avant de recommander le renforcement des alliances avec les institutions financières internationales.
Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a fait part de la volonté de son pays d’investir dans la participation des femmes dans tous les secteurs de la société, précisant ensuite que l’assemblée des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine a décidé, en janvier 2020, de consacrer la décennie 2020-2030 à l’inclusion économique des femmes africaines. Elle a appuyé les partenariats entre l’ONU et l’UA pour promouvoir l’autonomisation des femmes et la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité du Conseil de sécurité. La représentante a également appelé à renforcer les mandats des Nations Unies et des missions de maintien de la paix en matière d’autonomisation des femmes. En tant que membre de la Commission de consolidation de la paix (CCP), l’Afrique du Sud souhaite renforcer le rôle du secteur privé dans la consolidation de la paix, a indiqué la déléguée pour qui les partenariats public privé doivent être l’occasion de promouvoir des politiques sexospécifiques.
M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne) a salué le courage des femmes ukrainiennes et a condamné « l’aveuglement » de la Fédération de Russie. Plus d’un million de personnes ont déjà franchi la frontière polonaise, en provenance d’Ukraine dans ce qui risque d’être la plus grande crise humanitaire du siècle, en Europe, a prévenu le représentant. Il a également déploré les violations des droits des Afghanes, depuis l’an dernier, avant de rappeler que son pays est membre du Groupe des Amis des femmes afghanes. Il a appelé à des partenariats robustes avec le secteur privé et les organisations locales de femmes dans les zones de conflit. Il a aussi appelé les femmes russes à s’impliquer pour mettre fin à la guerre, en plaidant auprès de leur mari et de leurs fils. C’est d’ailleurs, a indiqué le représentant, l’objectif de « #femme russe, mets fin à la guerre », une campagne sur les réseaux sociaux.
M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a remarqué que bien que des progrès significatifs aient été réalisés dans l’exécution du programme pour les femmes et la paix et la sécurité au cours de ses 22 années, le maillon manquant reste le lien concret et tangible entre les entreprises publiques et privées, en particulier celles qui travaillent dans des environnements de conflit et de post-conflit. À ses yeux il y a deux mondes cloisonnés: d’un côté celui des entreprises qui adoptent de plus en plus une politique d’emploi sous l’angle du genre et s’engagent en faveur de l’égalité hommes-femmes, et de l’autre le monde où l’ONU et le programme pour les femmes et la paix et la sécurité soutiennent des initiatives d’entreprises telles que « Business for Peace » et le « Pacte mondial des Nations Unies ». Il a relevé que selon le rapport sur l’écart entre les sexes publié par le Forum économique mondial, les entreprises fondées par des femmes génèrent des revenus plus élevés -plus de deux fois plus par dollar investi-que les entreprises dirigées par des hommes. Il y est aussi dit que combler l’écart entre les sexes ajouterait plus de 4 milliards de dollars au PIB mondial. Dès lors, le représentant a estimé que ces chiffres plaident en faveur de la participation et de l’inclusion des femmes dans les entreprises, en particulier dans les zones de conflit.
Le délégué a également noté que malgré les progrès importants réalisés depuis l’adoption de la résolution 1325 (2000), la participation et la représentation directes des femmes dans les processus de paix formels reste le seul domaine qui accuse un retard. Entre 1992 et 2019, les femmes n’ont représenté que 6% des médiateurs, 6% des signataires et 13% des négociateurs des processus de paix dans le monde, a-t-il regretté. Pourtant, l’absence de femmes aux tables de négociation minimise la possibilité de politiques justes et inclusives. Or, lorsqu’elles sont présentes et participent aux négociations formelles et moins formelles, elles permettent d’aborder les problèmes de manière différentes y compris les approches du règlement des conflits, a-t-il fait valoir.
M. MOHAMMAD KURNIADI KOBA (Indonésie) a appelé la communauté internationale à ne pas revenir en arrière s’agissant des acquis pour les droits des femmes. Si beaucoup a été fait en la matière ces dernières décennies, de nombreux jalons n’ont pas encore été mis en œuvre, a observé le représentant, qui a encouragé le Conseil de sécurité à honorer ses engagements et à appuyer les initiatives de coopération. Rappelant d’autre part que le programme pour les femmes et la paix et la sécurité est multidimensionnel et interdisciplinaire, il a estimé que le Conseil ne peut être la seule enceinte onusienne où ces questions sont traitées. Selon lui, des contributions importantes émanent d’autres organes des Nations Unies, notamment en ce qui concerne l’inclusivité économique et les partenariats public-privé. Il a également plaidé pour un renforcement du rôle des femmes au sein des missions de maintien de la paix de l’ONU, conformément aux dispositions de la résolution 2538 (2020) portée par la diplomatie indonésienne. À cet égard, le délégué a insisté sur la nécessité d’un cadre institutionnalisé pour les femmes Casques bleus. Il a par ailleurs appelé la communauté internationale à travailler davantage avec les réseaux nationaux et régionaux de femmes négociatrices et médiatrices, attirant l’attention sur les capacités du réseau en place en Asie du Sud-Est.
M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a indiqué que les femmes souffrent en Ukraine, qui est le théâtre d’attaques indiscriminées, relevant que la plupart des deux millions de réfugiés en Ukraine sont des femmes. Il a condamné l’agression de l’Ukraine par la Russie, ainsi que les attaques conduites contre les civils le long des couloirs humanitaires. Il a constaté la poursuite en Ukraine des tendances déjà observées en Géorgie, avant de se dire « atterré » par la situation humanitaire en Ukraine ainsi que par les violations massives des droits humains. Il a ensuite rappelé que deux régions géorgiennes sont occupées par la Russie et que les femmes dans ces régions continuent de souffrir de graves violations. Enfin, le délégué a demandé à la Russie de se retirer de l’Ukraine et de respecter la pleine souveraineté de l’Ukraine, ainsi que de la Géorgie.
M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie) a souligné que l’autonomisation des femmes et la promotion de l’égalité des sexes dans les situations fragiles, de conflits et vulnérables peuvent transformer les cercles vicieux en cercles vertueux qui conduiront à la paix et au développement durable. La participation économique, le développement socioéconomique et l’autonomisation durable des femmes dans les situations de conflit doivent être renforcés, a insisté le délégué pour qui le développement économique et humanitaire de chaque segment de la société devrait aller de pair pour prévenir la fragilité et l’instabilité. À cet égard, les collaborations entre les États Membres, les agences des Nations Unies, les ONG et les organisations des jeunes et le secteur privé doivent prendre en considération le contexte local et culturel ainsi que les priorités et les politiques nationales, a-t-il estimé.
Le représentant a indiqué que la Malaisie continue de fournir une aide financière à ONU-Femmes et qu’au niveau régional, l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) est en train d’élaborer le plan régional d’action pour les femmes, la paix et la sécurité. La Malaisie prépare également son plan d’action national sur le programme pour les femmes et la paix et la sécurité. Le délégué a ensuite appelé à nommer plus de femmes médiatrices et d’envoyées spéciales dans les pays ou les régions en conflits, soulignant que l’inclusion et la participation des femmes sont essentielles pour prévenir et répondre aux conflits et à consolider la paix.
M. MAURIZIO MASSARI (Italie) a déclaré que la situation des femmes en Ukraine, en Afghanistan, en Syrie, au Yémen, en Libye ou en Éthiopie rappelle la nécessité de donner pleinement effet au programme pour les femmes et la paix et la sécurité, ainsi qu’à la résolution 1325 (2000). Il a indiqué que l’Italie se trouve d’ailleurs dans la phase de mise en œuvre de son quatrième plan d’action national sur la question, pour la période 2020-2024, et participe à l’initiative du Réseau des femmes médiatrices de la Méditerranée, qui regroupe désormais 61 femmes compétentes issues de de 21 pays de la sous-région. En outre, il est nécessaire de renforcer la contribution de la société civile et du secteur privé, a estimé le représentant, en encourageant les initiatives multipartites comme le Forum Génération Égalité et son Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire.
M. DANG HOANG GIANG (Viet Nam) s’est félicité de la participation accrue des femmes dans tous les domaines de la prévention des conflits à la consolidation de la paix 21 ans après l’adoption du programme pour les femmes et la paix et la sécurité par le Conseil de sécurité. Néanmoins, il a noté que les femmes continuent de faire face à de nombreux défis en soulignant qu’elles ont été particulièrement affectées par les conséquences de la pandémie de COVID-19, en particulier dans les régions touchées par des conflits. Le représentant a dit que le rôle des femmes reste essentiel pour assurer la prospérité, la stabilité économique à long terme et la croissance de toutes les nations. Dans ce contexte, il a exhorté la communauté internationale à encourager le renforcement des capacités des femmes aux niveaux local, national et international afin de contribuer à assurer une consolidation de la paix et une autonomisation économique des femmes en ligne avec la résolution 1889 (2009) du Conseil de sécurité. Il a jugé important de consacrer un minimum de 15% de l’aide publique au développement (APD) à la promotion de l’égalité des genres dans les pays touchés par des conflits.
Après avoir mis l’accent sur la valeur ajoutée des partenariats entre l’ONU, les États Membres et les acteurs non gouvernementaux en matière d’autonomisation des femmes, le représentant a demandé que les mandats des missions de l’ONU appuient la participation des femmes dans les activités de consolidation de la paix et reconstruction post-conflit. Le représentant a indiqué que la mise en œuvre du programme pour « les femmes et la paix et la sécurité » est une priorité du Viet Nam, qui continuera d’être un fier partenaire de la communauté internationale pour l’inclusion économique et l’autonomisation des femmes.
M. SURIYA CHINDAWONGSE (Thaïlande) a rappelé que les femmes sont des actrices actives dans les processus de paix. Elles doivent donc être incluses dans la prise de décision à tous les niveaux et ce, à participation égale. Soulignant que les femmes Casques bleus ont largement contribué au succès aux opérations de maintien de la paix, il a attribué ce fait à leur faculté d’accéder aux communautés, dans une relation de confiance, ce qui est « un atout précieux ». Le délégué a insisté sur le caractère « crucial » des partenariats pour faire avancer le programme pour les « femmes et la, paix et la sécurité ». Il a appelé au renforcement de ces partenariats au sein du système des Nations Unies mais aussi avec les organisations régionales et autres parties prenantes, y compris la société civile et le secteur privé.
Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a relevé que la pandémie a exacerbé les contraintes financières qui entravent la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, et souligné que le secteur privé peut contribuer à la construction de la paix, notamment en termes d’investissement et de création d’entreprises dirigées par des femmes et d’emplois pour les femmes. Deux décennies et 10 résolutions plus tard, « nous n’avons pas suffisamment exploré le rôle du secteur privé dans ce programme », a-t-elle regretté en plaidant pour plus de partenariats public-privé dans le contexte du relèvement post-conflit des communautés locales, mais aussi pour créer un environnement commercial stable, autonomiser les femmes et encourager leur participation politique. Les efforts actuels dans ce domaine sont dispersés et ne parviennent pas à maximiser ce potentiel, a-t-elle déploré.
La représentante a également mis en exergue la question du veuvage qui concerne 50% de la population féminine dans les contextes post-conflit, et qui n’est pas explicitement mentionné dans les résolutions sur les femmes, la paix et la sécurité. L’inclusion économique des veuves est à la fois un rempart contre la montée des inégalités, a-t-elle dit, mais s’inscrit aussi dans le respect et à la protection proactive de leurs droits humains. Elle a ensuite encouragé le Conseil de sécurité et les États Membres à diversifier leurs partenariats, en orientant leur soutien financier vers des organisations non gouvernementales qui ont une expertise thématique et peuvent avoir un fort impact grâce à leur investissement économique et social. Mme Chan Valverde a également insisté sur l’importance de reconnaître, réduire et redistribuer le travail et les soins non rémunérés et l’impératif d’éradiquer la stigmatisation du travail informel. Notant que cela suppose des investissements des secteurs public et privé, elle a demandé aux États, au secteur privé et à la société civile de soutenir et de reconnaître les organisations de travailleurs informels, telles que les coopératives et les associations bénévoles, et d’améliorer les données et les analyses sur les questions qui revêtent une importance particulière pour l’autonomisation économique des femmes, tels que le travail non rémunéré, le travail informel, le travail à temps partiel et le travail domestique.
Mme ALYA AHMED S. AL-THANI (Qatar) a rappelé qu’il y a 22 ans, la résolution 1325 du Conseil de sécurité avait souligné le lien essentiel entre l'égalité des sexes, la paix et la sécurité. Depuis, le Programme 2030 a confirmé le caractère central de l’égalité des sexes et de la nécessité d’intensifier les efforts d’autonomisation économique des femmes, qui contribuent à la stabilité et à la prospérité mondiales, a-t-elle relevé avant d’assurer que le Qatar s’emploie à accroître la participation des femmes à la population active. « Quand plus de femmes travaillent, notre économie grandit », a-t-elle résumé, avant de réaffirmer l’engagement de son pays en faveur de la participation des femmes aux processus de paix et de sécurité. La déléguée a noté à cet égard qu’en janvier dernier, le Qatar a coorganisé avec la Finlande, la Colombie et l’ONU, la Conférence mondiale de haut niveau sur les processus de paix inclusifs pour les jeunes pendant laquelle les participants ont souligné la nécessité d’investir dans les efforts des jeunes femmes artisanes de la paix.
La représentante a ensuite mis l’accent sur les partenariats, précisant que son pays finance plusieurs agences et départements des Nations Unies impliqués dans la mise en œuvre du programme « les femmes et la paix et la sécurité ». En outre, a-t-elle ajouté, le Fonds du Qatar pour le développement donne la priorité à l’autonomisation économique des femmes et des filles dans les situations de conflit et post-conflit, notamment en œuvrant avec des partenaires stratégiques et à la participation des femmes aux activités économiques à grande et à petite échelle, en accompagnant les institutions de microfinance, en augmentant les opportunités d’emploi pour les femmes déplacées, en améliorant les services éducatifs et sociaux dans les camps de réfugiés et en mettant en place des modèles économiques localisés générateurs de revenus pour endiguer la pauvreté. Ce même fonds et le Fonds digital citoyen, a encore indiqué Mme Al-Thani, ont signé en avril 2021 une convention de subvention pour un projet de formation de femmes afghanes axé sur l’expertise numérique, tandis que la Fondation Silatech, basée au Qatar, soutient les jeunes femmes en situation de conflit ou post-conflit en leur proposant une orientation professionnelle.
Mme ZAHRAA M. SALIH MAHDI NASSRULLAH (Iraq) a souligné le rôle crucial joué par les femmes iraquiennes dans le relèvement de son pays. Elle a ensuite énuméré les « prouesses » accomplies par les autorités iraquiennes afin d’accroître la participation des femmes à la vie politique, économique et sociale de l’Iraq. Le Parlement iraquien compte 96 femmes, a-t-elle notamment déclaré. Elle a aussi mentionné l’étroite association des femmes aux processus de consolidation de la paix, ainsi que les prêts à taux avantageux réservés aux femmes entrepreneuses. Enfin, la déléguée a insisté sur l’importance du rôle d’ONU-Femmes et appuyé tous les efforts pour une plus grande inclusion économique des femmes.
Mme AMAL MUDALLALI (Liban) a considéré que le Conseil de sécurité se réunit aujourd’hui à un moment particulièrement délicat où les femmes, la paix et la sécurité sont mises à rude épreuve par les guerres qui font rage de part et d’autre. Or, malheureusement, femmes et enfants sont souvent ceux qui paient le coût le plus élevé des situations de conflit. La représentante a fait observer qu’entre 1992 et 2019, les femmes représentaient en moyenne à peine 13% des négociateurs, 6% des médiateurs et 6% des signataires des accords de paix à travers le monde. En 2021, le nombre de femmes parlementaires ne s’est accru que de 0,6%, passant à 26,1%, un progrès modeste, qui remet en mémoire la conclusion de la dernière édition du rapport sur les disparités entre les sexes. À ce rythme, soulignait le rapport, il faudra 135,6 ans pour surmonter le fossé existant au niveau international. La représentante a réclamé une place pour les femmes à la table des négociations de la prochaine Conférence d’examen des parties au Traité sur la non-prolifération, qui se tiendra en août. Les femmes doivent pouvoir pleinement jouer leur rôle dans les questions de désarmement et dans la « diplomatie nucléaire ».
M. MARTIN JUAN MAINERO (Argentine) a déclaré que la Journée internationale des femmes est une occasion de dresser le bilan de la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000). Il a rappelé qu’une étude menée en 2015 a fait ressortir que le manque de ressources freine la participation des femmes à la consolidation et au maintien de la paix. De plus, les nombreuses activités non rémunérées auxquelles s’adonnent les femmes limitent le renforcement de leurs capacités et les empêche de tirer pleinement parti des opportunités d’emploi et des services sociaux.
M. Mainero a regretté que les femmes restent largement absentes des organes de prise de décision et des processus de paix dans leurs pays et communautés. Dans ce contexte, il a recommandé que les processus de paix et de reconstruction qui incluent des dispositions spécifiques sur le genre se traduisent par des programmes concrets et des réformes tangibles. Il a également déploré que peu d’États donateurs se sont engagés à consacrer 15% de leur financement des activités de consolidation de la paix de l’ONU au genre, les exhortant à le faire.
M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal) a plaidé pour que, dans l’esprit de la résolution 1325, on poursuive les efforts pour assurer l’inclusion systématique des femmes dans les négociations de paix, le maintien de la paix, la consolidation de la paix et le processus de reconstruction post-conflit en vue de parvenir à une paix durable. Il a expliqué qu’en tant que pays sortant d’un conflit, et au cours des années qui ont suivi la signature de l’Accord de paix global en 2006, le Népal a opéré une transformation historique en garantissant la participation des femmes à l’architecture de la gouvernance et leur autonomisation économique par le biais de dispositions constitutionnelles et juridiques pertinentes. La Constitution du Népal garantit 33% des sièges aux parlements fédéral et provincial et 40% des sièges du gouvernement local aux femmes représentantes. Des incitations ciblées ont également été mises en place, comme des prêts gratuits ou à faible taux d’intérêt pour les femmes entrepreneurs afin de les autonomiser économiquement, a précisé M. Rai. Il a également rappelé que le Népal, en 2011, a été le premier pays d’Asie du Sud et le deuxième d’Asie à adopter son Plan d’action national pour la mise en œuvre des résolutions 1325 et 1820 du Conseil. La participation des femmes à la prise de décision, au leadership politique, à la paix et à la sécurité, l’accès aux ressources et la création d’emplois figuraient parmi les principales priorités du premier Plan d’action, a précisé le représentant alors que le deuxième met l’accent sur les questions de justice pour les femmes et les filles touchées par le conflit, l’amélioration de leurs moyens de subsistance et la sécurité des femmes et des enfants.
Mme NATALIIA MUDRENKO (Ukraine) a souscrit à la déclaration de l’Union européenne, avant de rappeler que son pays siégeait au Conseil de sécurité lorsque la résolution 1325 (2000) a été adoptée. Même dans le contexte actuel de guerre, l’Ukraine, a-t-elle affirmé, reste engagée à promouvoir le programme pour les « femmes et la, paix et la sécurité ». La représentante a fait état de progrès significatifs en la matière, au fil des ans, grâce aux partenariats entre le Gouvernement et la société civile. Mais, a-t-elle accusé, l’invasion « scandaleuse » de la Fédération de Russie, y compris à partir du Bélarus, a bouleversé nos vies et les femmes font désormais partie des groupes vulnérables. Elle a rappelé que plus de deux millions personnes ont déjà fui à l’étranger et que, chaque jour, des femmes et des enfants meurent sous les balles et les abus de l’armée russe.
Depuis le début de cette agression, plusieurs dizaines d’enfants ont perdu la vie, a insisté la déléguée, selon laquelle la situation dans des villes comme Marioupol, Mykolaïv ou encore Butcha, près de Kiev, devrait faire l’objet de mesures immédiates des dirigeants du monde, de l’ONU et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). On interdit aux habitants de partir et à l’aide humanitaire d’entrer, a-t-elle dénoncé, ajoutant que « si les gens partent, les Russes les tuent ». Les accords sur les « couloirs humanitaires », a-t-elle poursuivi, sont sapés par les militaires russes, qui placent des mines sur les itinéraires convenus. « Justice sera rendue tôt ou tard pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité perpétrés en Ukraine », a-t-elle promis.
Alertant par ailleurs sur le manque cruel d’eau dans de nombreuses localités, la représentante a indiqué qu’une fillette est morte hier de déshydratation après que sa mère a été tuée par des obus. Elle a aussi fait état de cas de violences sexuelles commises par l’occupant russe. Dans ce contexte de conflit, la représentante a appelé à l’intégration économique des femmes ukrainiennes forcées de fuir leurs maisons et leur patrie. Elle a aussi appelé à une aide juridique pour permettre aux réfugiées de bénéficier d’une protection sociale. La guerre, a-t-elle souligné, a mis en exergue le rôle des femmes dans la défense du pays. Beaucoup d’entre elles rejoignent aujourd’hui l’armée nationale et les forces de défense territoriales. En 2020, l’on comptait quelque 57 000 femmes dans l’armée ukrainienne, soit 22,8% des effectifs, et aujourd’hui « ce chiffre est nettement plus élevé ». Ces femmes, s’est enorgueillie la représentante, prouvent qu’elles n’ont pas peur de prendre les armes pour défendre leurs enfants et leur terre » et « ce n’était pas le cas avant que les Russes veuillent les priver de leur avenir ».
M. FRANCOIS JACKMAN (Barbade), au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) a indiqué que, dans sa région, les femmes jouent un rôle de chef de file dans la réponse à l’insécurité écologique, environnementale, climatique, sanitaire et économique. Mais nous sommes à un point de bascule, tant les gains de l’égalité des sexes sont sapés, a prévenu le représentant, en appelant à promouvoir les principes du programme « Les femmes et la paix et la sécurité ». Il faut, a-t-il insisté, poursuivre en justice les responsables de violences à l’encontre des femmes et apporter aux victimes un soutien financier et psycho-social. Comme la violence à l’égard des femmes ne cesse de s’aggraver, il est essentiel, a estimé, M. Jackman, de renforcer la participation féminine dans tous les efforts de maintien et de consolidation de la paix. Il a conclu, en pressant la communauté internationale d’accorder une attention accrue à la pleine mise en œuvre du programme « Les femmes et la paix et la sécurité ».
Mme GABRIELA LILIÁN GONZÁLEZ HERNÁNDEZ (Uruguay) a souligné que l’autonomisation économique des femmes est confrontée à des obstacles persistants, en particulier en temps de crise. Les écarts entre les sexes s’agissant des emplois, de l’intégration financière, de l’impact de la pandémie de COVID-19 ou encore de l’accès à l’éducation rendent encore plus difficile la participation des femmes, en particulier celles des communautés locales, aux processus de paix. La représentante a annoncé que son pays lancera, au mois d’avril prochain, son premier Plan d’action « Les femmes et la paix et la sécurité ». L’année dernière, l’Uruguay avait déjà donné le coup d’envoi, avec l’Argentine, le Brésil, le Chili et le Paraguay, du Réseau régional de médiateurs de l’hémisphère Sud pour promouvoir une plus grande participation des femmes aux négociation de paix et à la médiation, dans les situations humanitaires, de conflit ou post-conflit.
L’Uruguay, s’est enorgueilli la représentante, a également mis en place une politique pour ouvrir aux femmes l’accès à l’armée et à la police nationales ainsi qu’aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Elle a souligné l’attachement de son pays à la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000), au renforcement des droits des femmes et des filles, à l’élimination des obstacles structurels qui empêchent leur égale participation égale à la vie publique et à l’autonomisation des femmes, en tant qu’agent d’un changement « essentiel » pour parvenir au développement et à une paix durables.
M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a plaidé en faveur de partenariats renforcés à tous les niveaux pour promouvoir le rôle des femmes dans la prévention et la résolution des conflits, sur un pied d’égalité, et surtout au moment de la conclusion des accords de paix. Même si les femmes chefs de file ont fait la preuve de leurs talents à maintes reprises, elles continuent d’être tenue en marge des processus de paix et de transition, a regretté le représentant. Il a par ailleurs vivement encouragé tous les États Membres à combattre l’impunité et à traduire en justice les responsables des violences à l’égard des femmes; l’établissement des responsabilités étant la condition sine qua non d’une paix durable. Le représentant a indiqué que son gouvernement a fait de ses politiques en matière de sécurité un domaine prioritaire dans lequel les femmes peuvent faire entendre leur voix. Il a en conclusion réitéré son soutien à tous les efforts internationaux déployés pour promouvoir la participation des femmes dans les domaines humanitaire et du développement.
M. MD MONWAR HOSSAIN (Bangladesh)a déclaré que la parité entre les genres constitue une condition sine qua non de la consolidation de la paix et affirmé, dans ce cadre, que son pays n’a jamais cessé de promouvoir le programme « Les femmes et la paix et la sécurité ». Le Bangladesh, a-t-il dit, a toujours promu l’émancipation des femmes et leur autonomisation économique. Il a cité les lois sur la promotion de la femme et sur la discrimination positive, avant de mentionner des initiatives visant à faciliter l’émergence de femmes entrepreneures. Aujourd’hui, a-t-il conseillé, il faut tenir compte du fait que la pandémie de COVID-19 et les changements climatiques ont touché les femmes de manière disproportionnée. En tant que pays vulnérable à ces changements, le Bangladesh a vécu des déplacements de population et insiste aujourd’hui sur des investissements massifs dans la résilience des femmes.
Reprenant la parole, la représentante de l’Inde a tenu à préciser que le Jammu-et-Cachemire fera toujours partie intégrante du territoire indien et ce, quelles que soient les convictions du Pakistan.