Le Conseil de sécurité débat des moyens d’améliorer ses régimes de sanctions en réduisant leurs effets indésirables
À l’initiative de la Fédération de Russie, qui préside ce mois de février le Conseil de sécurité, les questions relatives aux sanctions onusiennes ont été examinées ce matin sous l’angle de leurs effets indésirables, en se basant non seulement sur les 14 régimes actuellement en vigueur, mais aussi sur les progrès entrepris pour les améliorer. Les membres du Conseil ont rappelé toutes les règles qu’ils jugent nécessaires pour l’imposition optimale de sanctions, certains saisissant l’occasion pour alerter également des graves conséquences des mesures coercitives unilatérales.
Dans son exposé, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, Mme Rosemary DiCarlo, a commencé par rappeler l’utilité de cet « outil essentiel », basé sur la Charte des Nations Unies, qui est à la disposition du Conseil pour assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Les sanctions ne sont toutefois pas une fin en soi, a-t-elle mis en garde: pour être efficaces, elles doivent faire partie d’une stratégie politique globale, œuvrant en tandem avec le dialogue politique, la médiation, le maintien de la paix et les missions politiques spéciales.
Les sanctions onusiennes ne sont plus l’instrument coercitif qu’elles étaient autrefois, a poursuivi Mme DiCarlo, en rappelant les changements considérables apportés depuis les années 1990 pour minimiser leurs éventuelles conséquences néfastes sur les populations civiles. Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, M. Martin Griffiths, qui est également le Coordonnateur des secours d’urgence, a noté que le Conseil était passé de sanctions larges sur le plan économique à des sanctions plus ciblées. Le Mexique a rappelé à cet égard avoir fait avancer le débat grâce à des initiatives menées avec l’Union européenne il y a quelques années. Un pays touché par des sanctions, le Mali, partisan d’un « juste milieu », a toutefois jugé que les sanctions du Conseil devaient encore être améliorées. C’est « un moyen qui est dur », a témoigné lui aussi le Soudan du Sud.
Mme DiCarlo a fait valoir la normalisation des exonérations humanitaires qui, dans le cas des embargos sur les armes, sont systématiquement accordées aux acteurs humanitaires. Elle a aussi parlé des dérogations aux interdictions de voyager, pour raisons médicales ou religieuses ou pour participer à des processus de paix, et des exemptions au gel des avoirs afin de payer la nourriture, les services publics ou les médicaments. Il existe un « statut d’exemptions humanitaires » dans les régimes somalien et afghan et des « systèmes d’exemption humanitaire » accordés au cas par cas en Libye, au Yémen et en République populaire démocratique de Corée (RPDC). Ainsi, le Comité 1718, qui supervise les sanctions contre la RPDC, a approuvé 85% des demandes d’exemption reçues depuis l’année 2017.
La Secrétaire générale adjointe a précisé que le Conseil et ses comités des sanctions cherchent de plus en plus à obtenir des informations de première main sur d’éventuelles conséquences pour les populations civiles et les États tiers, afin de procéder à des ajustements, comme en Érythrée ou en République centrafricaine (RCA). Elle a fait remarquer qu’au cours de la dernière décennie, un seul État Membre a déclaré être confronté à des problèmes économiques particuliers résultant des sanctions du Conseil.
Les membres du Conseil ont salué la résolution 2615 (2021) de décembre 2021 qui consacre des exemptions humanitaires au régime de sanctions contre l’Afghanistan. La France a rappelé qu’à son initiative, le Conseil avait introduit des dispositions visant à mieux préserver l’espace humanitaire dans les régimes de sanctions relatifs à la République démocratique du Congo, à la RCA et au Mali. La délégation russe a proposé d’améliorer la boîte à outils prévue par les résolutions du Conseil et suggéré, par exemple, que ces exemptions soient accordées de manière continue pour des organisations humanitaires. Elle a aussi proposé d’établir des listes de marchandises ne devant en aucun cas figurer sur la liste d’interdiction.
Au cours de leur application, les sanctions doivent faire régulièrement l’objet d’examens et de modifications, jusqu’à leur annulation complète, a-t-on encore entendu. La délégation russe a jugé nécessaire, à cet égard, d’écouter plus attentivement l’avis des autorités des États sanctionnés. La délégation chinoise a souhaité que l’on écoute aussi le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) et les missions déployées par l’ONU dans les pays visés, qui peuvent signaler les effets négatifs des sanctions au Conseil de sécurité en vue d’ajustements. Parmi les autres exigences, il a été demandé que les sanctions du Conseil ne soient pas imposées pour une durée illimitée et que des critères clairs soient prévus pour leur levée.
La Chine a demandé de remettre sur pied le groupe informel sur la question des sanctions qui, de 2002 à 2006, faisait un travail utile pour les affiner, avant de plaider pour que le Conseil produise des rapports d’évaluation complets. Mme DiCarlo a mentionné l’existence du groupe de travail interagences des Nations Unies créé en 2014, qui a contribué à promouvoir une approche systémique des sanctions, parlant aussi du Médiateur créé en 2009, qui a introduit une structure plus robuste dans les mécanismes de procédure régulière à la disposition des individus ou des entités cherchant à être retirés de la Liste des sanctions contre Al-Qaida et Daech.
Mme DiCarlo a reconnu les limites qu’ont encore les sanctions lorsqu’elles poussent des acteurs financiers et des fournisseurs de services, par peur de violer les sanctions, à imposer des conditions supplémentaires, augmenter leurs frais, ou simplement refuser de fournir les biens et services demandés, entravant ainsi l’acheminement de l’aide humanitaire. Pour pallier le problème de la « surconformité des banques », la France a dit avoir mis en place un canal de communication direct entre les banques et les ONG.
Le débat n’aurait pas été complet sans évoquer les mesures coercitives unilatérales imposées par certains pays, qui entraînent des conséquences humanitaires graves, déstabilisent les relations internationales et affectent même le paiement des contributions au budget de l’ONU, selon la Russie qui a parlé notamment de « guerre des sanctions » contre la Syrie. Ces mesures ont sapé la foi dans le multilatéralisme, selon le Kenya. Le Mexique s’est dit opposé à toute sanction unilatérale en dehors du système des Nations Unies et notamment à l’embargo contre Cuba. Parmi les pays touchés par de telles mesures, le Venezuela n’y a vu rien d’autre qu’une « cruauté » assumée. Certains pays semblent être dépendants de telles mesures, comme d’une drogue », a renchéri la Chine. Les États-Unis ont précisé pour leur part préférer « de loin » les sanctions multilatérales aux sanctions prises unilatéralement, tout en insistant sur la licéité de ces dernières.
QUESTIONS D’ORDRE GÉNÉRAL RELATIVES AUX SANCTIONS
PRÉVENTION DES CONSÉQUENCES HUMANITAIRES ET DES CONSÉQUENCES INVOLONTAIRES (S/2022/86)
Déclarations
Mme ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a indiqué que les sanctions restent un outil essentiel basé sur la Charte des Nations Unies à la disposition du Conseil pour assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Elles ne sont pas une fin en soi, et pour être efficaces, elles doivent faire partie d’une stratégie politique globale, œuvrant en tandem avec le dialogue politique, la médiation, le maintien de la paix et les missions politiques spéciales. Elle a relevé qu’il existe actuellement 14 régimes de sanctions du Conseil. Mais, ces sanctions onusiennes ne sont plus l’instrument coercitif qu’elles étaient autrefois. En effet, depuis les années 1990, elles ont subi des changements considérables pour minimiser leurs éventuelles conséquences néfastes sur les populations civiles. Elle a évoqué à cet égard la normalisation des exonérations humanitaires, et dans le cas des embargos sur les armes, des exemptions systématiquement accordées pour l’importation d’équipements nécessaires aux acteurs humanitaires pour opérer dans les zones de conflit. En cas d’interdiction de voyager, des dérogations sont systématiquement prévues pour des raisons médicales ou religieuses ou pour participer à des processus de paix, tandis que les exemptions au gel des avoirs permettent de payer la nourriture, les services publics ou des médicaments. De plus, le Conseil de sécurité a institué le statut d’exemptions humanitaires dans les régimes somalien et afghan, et des systèmes d’exemption humanitaire au cas par cas en Libye, au Yémen et en République populaire démocratique de Corée (RPDC). Ainsi, le Comité 1718, qui supervise les sanctions contre la RPDC, a approuvé 85% des demandes d’exemption reçues depuis l’année 2017, a témoigné Mme DiCarlo.
Ces dernières années, le Conseil et ses comités des sanctions ont cherché de plus en plus à obtenir des informations de première main sur d’éventuelles conséquences pour les populations civiles et les États tiers, a expliqué Mme DiCarlo. Les sanctions sont continuellement ajustées en fonction des changements survenus sur le terrain, compte tenu de leur impact sur les populations civiles, a-t-elle expliqué. C’est ainsi que le Conseil avait mis fin aux sanctions contre l’Érythrée et réduit considérablement la portée de l’embargo sur les armes imposé à la République centrafricaine. De même, face à une nouvelle menace grave contre la paix et la sécurité en Somalie, le Conseil a imposé en 2019 une interdiction d’importation ciblant certains composants d’engins explosifs improvisés. Elle a ajouté qu’au cours de la dernière décennie, un seul État Membre a déclaré être confronté à des problèmes économiques particuliers résultant des sanctions du Conseil. Selon elle, c’est là une preuve que les mesures ciblées actuelles du Conseil ont des conséquences négatives limitées sur les États tiers.
Mme DiCarlo a noté que presque tous les régimes de sanctions incluent désormais la désignation ou l’inscription de mesures destinées à faire respecter le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme. De telles mesures ont servi de levier pour obtenir des résultats positifs pour des personnes à risque, a-t-elle dit en soulignant que la perspective de sanctions a été un facteur dans la libération des femmes et des enfants enlevés en début 2020 au Soudan du Sud. De même, la perspective de sanctions a ouvert l’espace pour négocier la libération des enfants détenus par les groupes armés en République démocratique du Congo. Elle a déclaré que plus de 50 personnes et entités ont été inscrites sur des Listes de sanctions par le Conseil ou ses comités pour leur implication dans des violences sexuelles liées au conflit, l’utilisation d’enfants dans les conflits armés, le trafic de migrants, les attaques contre les travailleurs humanitaires et des entraves à l’acheminement de l’aide humanitaire, entre autres critères du droit international humanitaire. Elle a noté que l’imposition de sanctions uniquement pour de tels actes est relativement récente et bienvenue. Son utilisation envoie un signal sans équivoque sur l’engagement du Conseil à assurer la responsabilité des violations du droit international humanitaire ou des droits de l’homme, a—t-elle justifié.
La Secrétaire générale adjointe a affirmé que l’évolution des sanctions globales vers des sanctions ciblées a marqué un changement radical dans ce domaine de travail du Conseil. Mais il y a encore quelques préoccupations concernant les conséquences imprévues ou les effets néfastes de ces sanctions. Des acteurs financiers et d’autres fournisseurs de services peuvent imposer des conditions supplémentaires, augmenter leurs frais, ou simplement refuser de fournir les biens et services demandés, entravant ainsi l’acheminement de l’aide humanitaire, a—t-elle expliqué. Selon elle, la difficulté persistante à relancer le canal bancaire pour les transferts humanitaires vers la RPDC, depuis son effondrement en 2017, est un excellent exemple de tels défis. Et ces difficultés peuvent être aggravées lorsque les acteurs financiers et les autres prestataires de services sont tenus de se conformer à de multiples régimes de sanctions, ainsi que le besoin de respecter les réglementations de la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent à travers le monde. En essayant de respecter un large éventail de mesures applicables, ces acteurs adoptent parfois une interprétation trop large de ce qui est exigé par les régimes de sanctions, souvent en contradiction avec l’interprétation des acteurs humanitaires, a-t-elle relevé.
Mme DiCarlo a affirmé que la communauté humanitaire et une grande partie du monde ont chaleureusement salué la résolution 2615 (2021) qui consacre des exemptions au régime de sanctions contre l’Afghanistan. Elle a dit que des exemptions similaires dans d’autres régimes de sanctions pourraient grandement contribuer à répondre aux besoins critiques des populations civiles. De même, elle a recommandé aux États Membres de réduire davantage la charge des exigences supplémentaires imposées aux acteurs humanitaires en veillant à ce que leur législation nationale soit aussi proche que possible des exigences du Conseil de sécurité. En outre, la surveillance continue par les comités des sanctions de l’éventuel impact humanitaire des sanctions est vitale, a jugé la Secrétaire générale adjointe qui a également estimé essentiel de renforcer la coopération entre les acteurs humanitaires et le secteur privé. Le groupe de travail interagences des Nations Unies créé en 2014 a contribué à promouvoir une meilleure compréhension et une approche systémique des sanctions, a-t-elle expliqué. Enfin, elle a indiqué que depuis sa création en 2009, le rôle de médiateur a introduit une structure plus robuste dans les mécanismes de procédure régulière à la disposition des individus ou des entités cherchant à être retirés de la Liste des sanctions contre Al-Qaida et Daech. De ce fait, elle a conseillé d’établir des procédures justes et claires pour toutes les autres entités et individus désignés, ce qui rendra l’outil de sanctions encore plus efficace selon elle.
M. MARTIN GRIFFITHS, Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d’urgence, a indiqué que les sanctions sont un élément à prendre en compte dans nombre d’opérations humanitaires. Aussi ciblées et intelligentes soient-elles, ces sanctions ont des conséquences sur la logistique, le financement et l’exécution des opérations humanitaires, a-t-il reconnu. « Elles peuvent conduire à des retards ou à l’arrêt d’opérations humanitaires. » Il a admis que certaines sanctions peuvent menacer le bien-être de larges secteurs de la société civile.
Il a rappelé que les sanctions onusiennes et nombre de sanctions adoptées par les États Membres ne sont pas des instruments brutaux appartenant au passé. Le Conseil est passé de sanctions larges sur le plan économique à des sanctions plus ciblées. « Nous avons vu des cas où les sanctions ont eu une incidence heureuse s’agissant du respect du droit international humanitaire et des droits humains. » Il a ainsi estimé que la menace de sanctions a pu contraindre un certain nombre de groupes armés non-étatiques en République démocratique du Congo (RDC) à libérer des enfants enrôlés dans leurs rangs. Les sanctions onusiennes sont élaborées dans le but de limiter les conséquences non-prévues, a-t-il rappelé. Le Secrétaire général adjoint a salué les signaux clairs envoyés par ce Conseil visant à limiter de telles conséquences, ainsi que la volonté de ce dernier de faire en sorte que la mise en œuvre des sanctions respecte le droit. Il a souligné la nécessité que les sanctions n’entravent pas les activités exclusivement humanitaires, conduites par des acteurs humanitaires impartiaux.
M. Griffiths a dit que les régimes de sanctions en Somalie et en Afghanistan ont ménagé un espace pour que les activités humanitaires se poursuivent. Les sanctions onusiennes peuvent néanmoins avoir des conséquences négatives pour les opérations civiles et humanitaires, a-t-il reconnu. Il a estimé que les sanctions prises par les États ont des conséquences similaires et ont souvent une portée plus grande que les sanctions onusiennes.
Le Coordonnateur a estimé que les principes humanitaires peuvent être mis à mal par la demande de sanctions. Ces sanctions peuvent rendre plus difficile pour les agences humanitaires d’engager des individus ou entités inscrits sur la Liste des sanctions mais qui exercent un pouvoir significatif sur une population civile, a-t-il donné comme exemple. Il a aussi noté que les principes d’indépendance, de neutralité et d’impartialité peuvent être sapés par les demandes d’exclure des récipiendaires potentiels de ladite aide. Il a ajouté que les banques et acteurs commerciaux peuvent refuser des prestations à des acteurs humanitaires pour éviter toute punition. En conséquence, il a relevé que des transactions routinières peuvent devenir extrêmement bureaucratiques et lourdes. Il a néanmoins estimé que des exemptions larges, comme celles prévues en Afghanistan, sont de nature à « rassurer » les organisations humanitaires.
M. Griffiths a déclaré que l’hésitation des acteurs commerciaux assurant la distribution de nourritures ou d’essence peut conduire à des pénuries et à une hausse des prix, ce qui peut être désastreux pour des économies fragiles. Les exemptions humanitaires, si elles permettent la poursuite des programmes, ne peuvent se substituer à la fourniture de services de base, a-t-il prévenu.
Le Secrétaire général adjoint a suggéré quelques pistes pour atténuer ces conséquences négatives. Il a ainsi exhorté le Conseil et les États Membres à faire en sorte que les sanctions applicables dans les conflits armés n’entravent pas l’assistance humanitaire au profit des personnes non-belligérantes et ce, indépendamment de leur allégeance. « Les sanctions ne doivent pas restreindre la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, y compris le droit à la nourriture, à l’eau, à un abri ou à la santé. » Les sanctions ne doivent pas entraîner des conséquences secondaires en cascade qui excéderaient leur champ d’application, a martelé M. Griffiths. Il a invité le Conseil à prévoir des exemptions humanitaires larges d’emblée plutôt que de procéder par des autorisations au cas par cas qui peuvent être lourdes et inefficaces. Ces exemptions doivent être transposées en droit national pour atténuer les préoccupations des acteurs humanitaires, des entreprises privées et des organisations non-gouvernementales, a-t-il aussi conseillé. M. Griffiths a relevé que la mise en œuvre est parfois aussi importante que l’élaboration des sanctions.
Il a salué les efforts visant à renforcer la confiance comme ceux de l’Union européenne qui cherchent à « rassurer » les institutions financières et le secteur privé. Il a rappelé que les opérations dans le nord-ouest de la Syrie font l’objet d’une surveillance rigoureuse, ce qui permet de garantir que les ressources humanitaires sont bien fournies à celles et ceux qui en ont besoin, et pas pour d’autre but. C’est l’essence même de l’action humanitaire basée sur des principes, a dit le Coordonnateur. Pour M. Griffiths, s’assurer que les sanctions n’aient pas de conséquences non-prévues pour les civils relève de la « responsabilité collective. »
M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a affirmé que les sanctions du Conseil de sécurité sont un outil important de mise en œuvre des fonctions assignées au Conseil pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il a toutefois souhaité qu’elles soient appliquées avec une extrême prudence, qu’elles soient justifiées et ne soient pas utilisées comme une « arme punitive ». De plus, les sanctions internationales devraient refléter la situation sur le terrain et servir le processus politique, a souligné le délégué, précisant qu’elles doivent faire régulièrement l’objet d’examens et de modifications, jusqu’à leur annulation complète. Il a également jugé nécessaire d’écouter plus attentivement l’avis des autorités des États sanctionnés.
Selon la Fédération de Russie, bon nombre des sanctions actuelles ne correspondent plus à la situation réelle, et elles interfèrent sur les plans adoptés par les gouvernements nationaux dans le domaine de la construction, ainsi que pour le développement socioéconomique. Il a évoqué les cas de la République centrafricaine (RCA) et du Soudan avant de dénoncer les sanctions qui perdurent et qui constituent un anachronisme absolu. Le délégué a appelé à prendre au sérieux les dommages collatéraux des sanctions, parlant des effets destructeurs sur l’économie nationale comme sur la vie et le bien-être de la population. Un problème qui s’est encore aggravé dans le contexte de la pandémie, a-t-il ajouté. À cet égard, il a jugé nécessaire d’améliorer la boîte à outils prévue par les résolutions du Conseil dans le cadre des exemptions humanitaires. Il a suggéré, par exemple, que de telles exceptions soient accordées de manière continue pour des organisations humanitaires. Il a aussi proposé d’établir des listes de marchandises qui ne doivent en aucun cas figurer sur la liste d’interdiction.
M. Polyanskiy a indiqué qu’un obstacle sérieux au plein fonctionnement des exemptions humanitaires sont les soi-disant « restrictions secondaires unilatérales » introduites en plus des sanctions du Conseil de sécurité. Ces restrictions sont mises en place en vertu de réglementations nationales et ont parfois une portée extraterritoriale sévère, a—t-il expliqué. En notant que de telles mesures ont des effets pervers sur l’économie des pays ciblés, il a relevé que ces problèmes sont clairement visibles dans le cas de la République populaire démocratique de Corée (RPDC). Ces « sanctions secondaires » des grands pays occidentaux, a-t-il dit, créent une « atmosphère toxique » autour de Pyongyang et conduisent à la réticence à coopérer avec le pays dans des secteurs qui ne sont pas soumis à des restrictions internationales. « Ce n’est donc pas un hasard si la Fédération de Russie et la Chine proposent des mesures spécifiques visant à contrer cette tendance pernicieuse. »
Le délégué s’est insurgé contre de telles mesures touchant le Yémen, pourtant taxé de « plus grande catastrophe humanitaire des temps modernes ». Il a aussi jugé inacceptable que les systèmes bancaires des pays tiers aient « encaissé » les avoirs gelés de la Libye, alors que ces fonds devraient être préservés pour les générations futures de ce pays dans l’ère post-crise. Au sujet de l’Afghanistan, il a estimé que la résolution 2615 (2021) a pour objectif de « bien faire comprendre que l’aide humanitaire n’est pas une violation du régime de sanctions de 1988 ». Au vu de ces exemples, le représentant a argué que le dispositif de sanctions du Conseil de sécurité a besoin d’une bonne dose d’humanisation. Il a suggéré une évaluation complète et impartiale de l’impact humanitaire des mesures restrictives internationales. Il a également proposé que des structures du Secrétariat comme le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) fassent des rapports au Conseil de sécurité sur les conséquences des sanctions.
Selon M. Polyanskiy, les sanctions du Conseil de sécurité sont les seules légitimes. Il s’est inquiété de la pratique croissante de certains pays et leurs alliés qui adoptent des mesures coercitives unilatérales. Pour lui, il s’agit là d’une intrusion dans les prérogatives du Conseil, d’une violation de la souveraineté des États et d’une ingérence dans leurs affaires intérieures. Il a estimé que cette tendance sape les normes et les institutions du droit international. Il a jugé particulièrement intolérable que certains pays exigent le respect de leurs propres restrictions aux opérateurs économiques des pays tiers. Une telle application extraterritoriale des sanctions est contraire aux principes élémentaires du droit international, a-t-il dénoncé. Il a cité comme exemples la « guerre des sanctions » déclenchée contre la Syrie et qui a un impact extrêmement négatif sur la situation intérieure du pays.
Le représentant russe a aussi évoqué les « larges restrictions sectorielles » à l’encontre du Bélarus et qui visent à détruire ses entreprises compétitives et à déstabiliser la situation sociopolitique. Un excellent exemple de politique discriminatoire d’application unilatérale de mesures coercitives est Cuba, a poursuivi le délégué en rappelant que le pays subi un blocus de son voisin du nord depuis plus de 60 ans. De même, une véritable terreur économique était, il y a quelques années, déchaînée contre le Venezuela et son gouvernement légitime, a-t-il encore cité en se désolant que ces mesures aient conduit le pays à cesser de payer sa contribution au budget ordinaire de l’ONU et à être de ce fait privé de son droit de vote à l’Assemblée générale.
Le représentant russe a également cité les cas de l’Iran et de l’Afghanistan, avant de considérer comme insoutenables les tentatives de certains acteurs internationaux de « jouer avec les sanctions pour faire pression sur les dirigeants du Myanmar et du Mali ». Il a relevé le besoin croissant de coopération multilatérale pour trouver des approches collectives pour limiter ces sanctions unilatérales et éviter une perte totale de confiance dans les institutions internationales. Il a salué le fait que la discussion de ce jour, dans sa phase de préparation, ait provoqué un vif intérêt des États Membres de l’ONU. Le représentant a appelé le Secrétaire général et les hauts dirigeants de l’Organisation à parler ouvertement en faveur d’une politique de sanctions qui soit centrée sur l’individu et qui garantisse ses droits fondamentaux.
M. JAMES KARIUKI (Royaume Uni) a déclaré que les sanctions ciblées sont des outils qui, conformément à la Charte, peuvent jouer un rôle important aux côtés de la diplomatie, de la consolidation de la paix et du maintien de la paix. Illustrant son propos, il a indiqué que les sanctions ont contribué à mettre fin au conflit et à soutenir la transition vers la paix et la démocratie en Angola, en Côte d'Ivoire, au Libéria et au Sierra Leone. « En République centrafricaine, elles ont permis d’améliorer les pratiques d’une société minière et en Somalie, l’embargo sur les armes a permis la saisie de milliers de cartouches, de missiles guidés antichars et de fusils de sniper destinés aux Chabab », a-t-il précisé avant de citer en exemple les nouvelles sanctions mises en place en se basant sur la résolution 1267(1999) pour limiter les activités terroristes.
Pour s’assurer que le recours aux sanctions tienne compte des facteurs humanitaires, le délégué du Royaume-Uni a préconisé des sanctions soigneusement ciblées, visant des objectifs spécifiques, dans le cadre d’une approche globale du règlement des conflits. Il a ensuite appuyé le principe de l’exception humanitaire dans l’application des sanctions, en expliquant que celle prévue par les Nations Unies pour l’Afghanistan est « une bonne démonstration de la manière dont les régimes de sanctions peuvent être adaptés pour garantir qu’ils n’entravent pas la fourniture d’aide humanitaire d’urgence ». Enfin, il a cité un dialogue avec les banques et les acteurs humanitaires au sein d’un groupe trisectoriel pour trouver des moyens légaux, sûrs et transparents de garantir que l’aide humanitaire parvienne aux bénéficiaires prévus et ne soit pas entravée par des sanctions.
M. JUN ZHANG (Chine) s’est félicité de l’initiative de cette réunion en rappelant que les sanctions sont un outil spécial dont dispose le Conseil de sécurité en vertu de la Charte, que les États Membres doivent mettre en œuvre de bonne foi et selon une approche prudente. Il a toutefois noté une tendance à élargir les sanctions ce qui entraîne des perturbations économiques et sociales touchant aussi les populations civiles des pays tiers. Le Conseil doit donc se saisir avec sérieux de cette question, a-t-il lancé en plaidant pour la réduction des effets néfastes. Il a fait plusieurs recommandations à cet égard, la première étant d’utiliser les sanctions comme moyen pour créer un environnement propice à la recherche de solutions politiques, mais sans chercher à se substituer au processus politique. La menace de l’emploi des sanctions ne doit donc pas être utilisée systématiquement, a-t-il dit en conseillant de passer aussi par la médiation et les bons offices, entre autres. Il a aussi jugé important de cibler avec précision l’intensité et l’ampleur des sanctions décidées. Les États Membres doivent respecter et appliquer fidèlement les sanctions du Conseil et ne devraient pas contourner celles-ci ou, à l’inverse, les interpréter de manière excessive, a aussi souhaité le délégué chinois. « Toute coercition à l’encontre d’un pays devrait être évitée car il faut respecter la souveraineté des pays. »
Il faut également procéder à un examen régulier des régimes de sanctions, a-t-il encore recommandé, souhaitant qu’OCHA et les missions déployées par l’ONU dans les pays visés surveillent les effets des sanctions afin de les signaler au Conseil de sécurité pour que celui-ci puisse proposer des ajustements. Le représentant a ensuite demandé que les dérogations soient prévues dans le cadre du régime de sanctions, avec des critères humanitaires clairs. Certaines agences humanitaires souffrent beaucoup de ces sanctions, a-t-il rappelé avant de plaider pour que le Conseil envisage leur suspension ou leur allègement pour contribuer à l’atténuation des effets de la pandémie. En outre, les sanctions du Conseil de sécurité ne devraient pas être imposées pour une durée illimitée et des critère clairs devraient être prévus pour leur levée, a-t-il martelé. Il a demandé que les normes les plus rigoureuses soient appliquées aux sanctions conformément aux principes de diversité et de répartition géographique équitable. Les experts des comités des sanctions doivent s’acquitter de leurs responsabilités de manière impartiale, a-t-il aussi exigé en demandant que toute rupture de confidentialité soit examinée par le Comité des sanctions.
Le représentant a rappelé que, de 2002 à 2006, un groupe informel sur la question des sanctions faisait un travail utile pour améliorer et affiner les sanctions. Il a proposé la mise en place d’un tel groupe à nouveau, pour se pencher sur des recommandations à adresser au Conseil. Il a également plaidé pour que le Conseil produise des rapports d’évaluation complets. La Chine espère que la présente réunion lui permettra d’avancer sur ces questions, a-t-il dit.
S’agissant des effets négatifs, il a parlé de la RPDC qui connaît des conséquences humanitaires graves résultant des sanctions (pénurie alimentaire, conséquences médicales). Il a rappelé que la Chine et la Fédération de Russie s’étaient portées coauteurs d’un projet de résolution le mois dernier pour éviter ces effets sur ce pays, mais que certains membres du Conseil avaient refusé d’examiner le texte. Il a donc demandé de reprendre ces consultations pour examiner ces questions de manière responsable.
Passant aux mesures unilatérales, le délégué chinois a déploré qu’elles aient semé des catastrophes dans de nombreux pays. Il a cité la crise humanitaire en Afghanistan d’août dernier, qui avait donné lieu à l'adoption d’une résolution sur les sanctions et leurs effets humanitaires. II a toutefois noté que cela n’a pas amélioré la situation car ce sont en réalité les sanctions unilatérales coercitives qui provoquent une crise dans ce pays. Le délégué s’est donc vivement inquiété de ces mesures. « Certains pays semblent être dépendants de telles mesures, comme d’une drogue », a-t-il dit, alors qu’elles entraînent des conséquences humanitaires graves, déstabilisent les relations internationales et affectent même le paiement des contributions au budget de l’ONU. « Ces mesures ont aussi une incidence très négative sur les échanges technologiques commerciaux de par le monde. » Ces sanctions vont à l’encontre de la Charte, a-t-il aussi dénoncé en appelant « ces pays » à renoncer aux mesures unilatérales pour enrayer les effets néfastes sur les pays visés.
Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a indiqué que les sanctions ont un rôle crucial à jouer pour promouvoir l’établissement des responsabilités et prévenir des comportements répréhensibles, tels que la répression violente et les violations des droits humains. Les sanctions sont un instrument vital pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a dit la déléguée, en ajoutant qu’elles peuvent venir appuyer des transitions pacifiques. Elle a rappelé que les sanctions sont un élément de stratégies politiques, de maintien et de consolidation de la paix, avant de noter qu’elles peuvent avoir des conséquences non voulues. « Les organisations humanitaires ont clairement dit combien ces sanctions peuvent entraver leur travail. » À cette aune, elle a jugé crucial que ces sanctions soient soigneusement ciblées pour avoir une portée maximale pour les acteurs visés tout en minimisant les conséquences humanitaires.
La déléguée a rappelé que son pays a, au sein de ce Conseil, appuyé l’inclusion d’éléments de langage humanitaire dans les régimes de sanctions en République démocratique du Congo, en République centrafricaine ou encore au Mali. Elle a assuré que l’Irlande continuera d’appuyer l’adoption de mesures adéquates d’atténuation. Il est important, dans ce contexte, que le Conseil entende les voix des populations civiles et des acteurs humanitaires, a déclaré Mme Byrne Nason. Enfin, elle a dit que l’Irlande œuvre au sein de l’Union européenne à l’adoption de sanctions préventives, ciblées et proportionnées.
M. MOHAMED ISSA ABUSHAHAB (Émirats arabes Unis) a estimé que les sanctions sont un outil précieux et utile pour pouvoir maintenir la paix et la sécurité internationales, sans recourir à la force. Il a néanmoins jugé indispensable d’en atténuer les conséquences humanitaires potentielles, en prévoyant des exemptions. Nous devrions voir ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné, et insérer des clauses explicites pour minimiser l’impact imprévu des sanctions sur les populations civiles. Le représentant a plaidé pour des régimes de sanctions adaptés à chaque contexte spécifique. Il a aussi estimé nécessaire de tenir compte, lors de l’élaboration des sanctions, des risques de détournement ou de pillage de l’aide humanitaire par des groupes et acteurs non étatiques pour financer leurs efforts de guerre ou leurs activités terroristes illégales.
Le représentant a souligné l’importance d’une évaluation régulière, indépendante et transparente de l’effet des sanctions sur les populations concernées. Il a exhorté le Conseil à résoudre les problèmes au fur et à mesure qu’ils surviennent, et les Comités de sanctions, à partager leur expérience pour mieux comprendre l’impact humanitaire. Nous devons, a insisté le représentant, être prêts à réajuster, suspendre ou supprimer les mesures que nous imposons pour pouvoir constamment les adapter et protéger les populations civiles des effets néfastes involontaires.
M. T.S. TIRUMURTI (Inde) a insisté sur le caractère « provisoire et non permanent » des sanctions, conformément à l’Article 41 de la Charte des Nations Unies. Les régimes de sanctions ne sauraient être une fin en soi et surtout se garder d’aggraver les souffrances des populations. Ces régimes doivent être suivis étroitement, adaptés à l’évolution de la situation sur le terrain et dénués de toute politisation. Pour les améliorer le délégué a fait six propositions. Les sanctions, a-t-il dit, doivent rester un instrument de dernier recours et respectueux des principes du droit international. Elles doivent viser un objectif « clair » et ne pas s’éterniser. Elles doivent, a poursuivi le représentant, être assorties d’efforts pour réduire leur impact négatif sur les populations, en particulier dans le contexte de la pandémie de COVID-19, et pour ne pas compromettre les activités commerciales et économiques légitimes de l’État concerné et de ses partenaires régionaux.
S’agissant de leur levée, elle doit se fonder sur des critères réalistes et réalisables. Il est tout aussi important que les sanctions n’entravent pas l’action humanitaire, a ajouté le représentant, en mettant tout de même en garde contre l’exploitation des exemptions par des groupes terroristes. Enfin, a-t-il dit, les Comités des sanctions, en particulier leurs Présidents, doivent être plus proactifs pour s’attaquer à des questions telles que les violations techniques des embargos sur les armes, les objections des partenaires humanitaires, le fonctionnement du Groupe d’experts et, dans certains cas, la non-coopération des États Membres. Il est donc impératif que les méthodes de travail « archaïques et opaques » des organes subsidiaires du Conseil deviennent « ouvertes, transparentes et crédibles ».
Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a fait remarquer que les sanctions peuvent prévenir des violations du droit humanitaire et des droits humains. Des sanctions ciblées peuvent contribuer à la protection des civils et prévenir la violence sexuelle, ainsi que l’enrôlement d’enfants dans les conflits armés, a-t-elle précisé. Elle a néanmoins souligné la nécessité que ces sanctions soient soigneusement élaborées et mises en œuvre de manière efficace. Elles doivent être « ajustées » et tenir compte de la situation sur le terrain, a-t-elle recommandé. La déléguée a salué le fait que le Conseil ait adopté l’année écoulée des éléments de langage explicites, selon lesquels l’application des sanctions doit respecter le droit. Elle a invité le Conseil et les États Membres à dialoguer avec les acteurs humanitaires afin de faire en sorte que les sanctions n’aient pas de conséquences négatives. Les exemptions humanitaires doivent être rédigées d’une manière qui apporte la clarté nécessaire à tous les acteurs, a encore suggéré la déléguée. Nous ne pouvons pas accepter les allégations fallacieuses qui présentent les sanctions comme une explication alternative des défis qui sont en réalité nourris par d’autres facteurs, comme les conflits, a-t-elle poursuivi. Enfin, elle a estimé que les personnes visées par les sanctions doivent bénéficier d’un recours juridictionnel.
M. MICHEL XAVIER BIANG (Gabon) a noté qu’une trentaine de régimes de sanctions ont été adoptés depuis 1966 se sont révélés des outils politiques peu coûteux, au regard du prix de la guerre. Il s’est félicité de la tendance aux sanctions ciblées contre des personnes en particulier. Les sanctions qui menacent les recettes budgétaires des États ont forcément des incidences sur le bien-être des populations, a-t-il insisté. Espérer que les populations touchées par des sanctions finiront par se retourner contre leur gouvernement est un pari « risqué et illusoire », a estimé le représentant. Il a noté les 14 régimes de sanctions en cours, dont huit concernent directement des pays africains, avant d’avouer que le cas de l’embargo sur les armes en République centrafricaine est « particulièrement interpellant ». Les autorités démocratiquement élues de ce pays sont, a-t-il souligné, amputées de leur pleine capacité d’acquérir des équipements pour lutter efficacement contre les bandes armées qui elles, ont souvent des armements plus sophistiqués pour saborder l’autorité de l’État sur une bonne partie du territoire national.
Le représentant a estimé que cette situation est « intenable » pour le peuple centrafricain et « insoutenable » pour les voisins immédiats de la République centrafricaine, comme le Gabon, qui partage avec ce pays une communauté de libre circulation des biens et des personnes. Il a donc a appelé le Conseil à lever sans condition l’embargo sur les armes, ce qui contribuerait d’ailleurs à atténuer l’ampleur des conséquences humanitaires sur la population civile. Il a aussi exhorté le Conseil à agir avec la plus grande circonspection lorsqu’il s’agit d’adopter un régime de sanctions contre un État Membre des Nations Unies, en intégrant chaque fois le risque de victimiser les populations. Enfin, le représentant a rappelé que la résolution 59/45 adoptée par l’Assemblée générale révèle le degré de préoccupation de la communauté internationale sur les effets néfastes des sanctions internationales.
M. RONALDO COSTA FILHO (Brésil) a dit qu’avec 14 régimes de sanctions en vigueur et près de 1500 inscriptions sur les listes, on peut se demander si une mesure qui devrait être de dernier ressort, est devenue le choix de prédilection pour faire face aux crises insolubles. Les sanctions peuvent être légitimes et efficaces lorsqu’elles sont créées multilatéralement, stratégiquement ciblées et conçues pour avoir un impact minimal sur les populations civiles. Mesure de dernier recours, elles doivent intervenir quand toutes les voies diplomatiques ont été épuisées et faire partie d’une stratégie globale contre une crise. Le représentant a reconnu que le Conseil de sécurité a fait beaucoup de chemin pour améliorer ses régimes de sanctions, avec le passage à des sanctions ciblées, la création des exemptions humanitaires et la mise en place des mécanismes de suivi que sont les groupes d’experts.
Il a encouragé le Conseil à ajuster encore le cadre des sanctions pour minimiser les souffrances humaines plutôt que de les aggraver. Les sanctions, a préconisé le représentant, doivent être limitées dans leur portée et dans le temps et préférence, prévoir d’emblée des clauses d’extinction. Les régimes de sanctions qui s’étalent sur des années sont le signe de leur inefficacité ou de l’absence d’autres outils pour régler une crise. À son tour, le représentant a plaidé, lors de la conception ou du renouvellement des régimes de sanctions, pour qu’il y ait une évaluation sur leur impact humanitaire potentiel. Il faut aussi que les critères d’inscription sur les listes et de levée de sanctions soient clairement établies. Tout en reconnaissant la spécificité de chaque régime de sanctions, le délégué a conclu, en appelant à une plus grande cohérence dans les exemptions humanitaires.
Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déclaré que les sanctions peuvent jouer un rôle vital pour prévenir les menaces à la paix. Elles compliquent la levée des fonds de la part des terroristes, freinent le renforcement des capacités en armes de destruction massive, comme c’est le cas en RPDC, et accélèrent les processus de paix. Comme tout outil, les sanctions peuvent être mal utilisées, a-t-elle reconnu, en appelant à améliorer leur application. Elle a souligné la nécessité d’élaborer des sanctions « efficaces » et « ciblées » en réitérant l’attachement de son pays à un tel objectif. La déléguée a aussi rappelé que son pays souhaite que des dérogations humanitaires soient prévues dans les régimes de sanctions. Elle a fait remarquer à cet égard que l’exemption humanitaire adoptée par le Conseil au sujet de l’Afghanistan a facilité l’acheminement de l’aide. La déléguée a aussi appelé à un dialogue accru entre les groupes d’experts des régimes de sanctions et les organisations humanitaires.
Les victimes nous demandent régulièrement d’adopter des sanctions contre les personnes qui violent leurs droits, a déclaré la déléguée. Elle a souhaité l’adoption de sanctions contre des groupes paramilitaires comme le groupe Wagner qui entrave la livraison d’aide et exacerbe les tensions. La déléguée a aussi fustigé « ces membres du Conseil qui s’opposent à l’inscription des noms de ‘fauteurs de troubles’ sur les listes des personnes frappées de sanctions », entravant l’efficacité desdites sanctions. Elle a précisé que son pays préfère « de loin » les sanctions multilatérales aux sanctions prises unilatéralement, tout en insistant sur la licéité de ces dernières. Elle s’est aussi dite favorable aux sanctions prises par des organisations régionales telles que l’UE ou bien encore la CEDEAO. Abordant le cas particulier de la RPDC, elle a rappelé que le premier obstacle à la livraison de l’aide dans ce pays est la fermeture des frontières, non pas les sanctions. En conclusion, la représentante a appelé à redynamiser les groupes d’experts des régimes de sanctions.
M. FERIT HOXHA (Albanie) a rappelé que la Charte des Nations Unies est très claire sur la nécessité d’imposer des sanctions pour prévenir de nouvelles violences et faire face aux menaces à la paix. En tant que telles, les sanctions ciblées sont un élément important de la boîte à outils du Conseil, un élément qui doit être utilisé avec le plus grand soin et la plus grande précision. Les sanctions, a insisté le représentant, doivent être mesurées et proportionnelles pour être efficaces et éviter les dommages collatéraux ou les conséquences imprévues. Ces sanctions doivent donc faire l’objet d’un suivi régulier, à tous les stades: élaboration, application et évaluation. Le représentant a invité le Conseil de sécurité à renforcer l’efficacité des sanctions, mais aussi à autoriser des exemptions si nécessaire. C’est précisément, a-t-il fait observer, ce que la résolution 2615 sur l’Afghanistan a fait.
Le représentant s’est opposé à l’idée de suspendre les sanctions en cas d’urgence, au risque de compromettre l’objectif poursuivi et de porter atteinte à la notion même de leur inviolabilité. Mais, a-t-il conclu, le Conseil doit être plus attentif et soutenir les Comités des sanctions et les groupes d’experts pour atténuer les conséquences néfastes, en particulier dans le contexte de la pandémie de COVID-19.
M. MICHAEL KAPKIAI KIBOINO (Kenya) a rappelé qu’en 2018, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur l’impact négatif des mesures coercitives unilatérales, M. Idriss Jazairy, avait fait valoir que les sanctions économiques peuvent dégénérer en blocus qui « exposent les gens aux ravages de la guerre économique en temps de paix ». Nous devons tenir compte de l’éthique et de la légalité des sanctions au-delà de leur impact humanitaire, a—t-il préconisé. Quand elles sont appliquées unilatéralement, leur légitimité est sapée, a-t-il dit en parlant de ces sanctions. « La fréquence et la portée des sanctions unilatérales ont conduit à une opinion croissante selon laquelle elles sont les armes du fort contre le vulnérable ou le faible. » Le délégué a jugé qu’à ce titre, ces mesures ont sapé la foi dans le multilatéralisme. Reconnaissant que les groupes terroristes doivent être sanctionnés et que leurs finances, leur recrutement et leurs déplacements sont perturbés dans le monde entier, il a fait remarquer qu’il y a pourtant aujourd’hui une filiale d’Al-Qaida en Somalie, qui a assassiné des dizaines de milliers de gens dans plusieurs pays mais qui est considérée par le Conseil de sécurité comme « un simple saboteur politique interne ».
« Nous ne pouvons pas avoir une lutte antiterroriste à deux vitesses. « M. Kiboino a également constaté que les groupes terroristes prélèvent parfois des frais sur l’accès humanitaire et utilisent ces finances pour perpétrer des attaques contre des civils. Il a demandé que les normes de la logistique de l’aide humanitaire soient combinées à des mesures fortes pour limiter le financement du terrorisme. Il faut intégrer dans les régimes de sanctions l’exigence automatique d’examens périodiques pour s’assurer qu’à toutes les étapes, ils remplissent encore leurs buts, a-t-il également recommandé.
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana) a rappelé que le Conseil a adopté son premier régime de sanctions en 1968 face à la prise de pouvoir illégale dans ce qui était alors la Rhodésie du Sud. Les sanctions continuent d’être un instrument important pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a dit le délégué, mais elles doivent être ciblées pour éviter des conséquences négatives pour les populations. Les sanctions, a-t-il plaidé, doivent être une mesure de dernier recours et suivre des lignes directrices, s’agissant notamment des demandes d’exemption au gel des avoirs qui peuvent avoir une incidence humanitaire directe. Les groupes d’experts désignés dans les régimes de sanctions doivent renforcer leur engagement avec les organisations humanitaires afin de collecter des données fiables.
Le délégué a insisté sur la nécessité de renforcer les mécanismes d’exemption humanitaires, en estimant que ceux qui existent ne permettent pas de remédier aux difficultés. S’il incombe au Conseil d’atténuer les conséquences humanitaires des sanctions, les autorités nationales doivent aussi veiller à un accès humanitaire sans entraves, a déclaré M. Agyeman. Il a par ailleurs qualifié d’inacceptables les sanctions unilatérales, compte tenu de leurs graves conséquences pour les populations. Il a attiré l’attention sur l’exemple des organisations régionales, comme la Communauté économique des pays d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), dont les régimes de sanctions sont souvent efficaces et d’une durée limitée.
Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a rappelé que les sanctions s’inscrivent dans le cadre d’une stratégie politique visant à la prévention et à la résolution des conflits, à la lutte contre la prolifération des armes nucléaires, contre le terrorisme et contre les violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme. Pour tenir compte des potentiels effets négatifs de certaines d’entre elles sur l’acheminement de l’aide humanitaire et médicale, la représentante a dit la nécessité de sanctions ciblées et proportionnées, flexibles et réversibles, et levées lorsque les objectifs sont atteints. S’agissant du suivi des sanctions, elle a salué le travail des comités de sanctions et des panels d’experts avant de souligner la responsabilité du Conseil de s’assurer que l’aide humanitaire sera acheminée à l’ensemble des personnes dans le besoin, dans le plein respect des principes humanitaires.
Par ailleurs, la représentante de la France a rappelé que le Conseil a introduit des exemptions humanitaires pour garantir que les sanctions onusiennes relatives aux Taliban (régime 1988), à la Somalie, à la Corée du Nord et au Yémen n’entravent pas la réponse humanitaire. « Nous devons continuer à adopter une approche au cas par cas, tenant compte de la spécificité de chaque contexte » a insisté Mme Broadhurst avant de préciser que le Conseil de sécurité a introduit, à l’initiative de la France, des dispositions visant à mieux préserver l’espace humanitaire dans les régimes de sanctions relatifs à la RDC, à la RCA et au Mali. En outre, la représentant de la France a rappelé que l’Union européenne (UE) a toujours pris ses responsabilités pour s’assurer que les sanctions qu’elle adopte n’entravent pas l’action humanitaire. « Les mesures restrictives de l’UE, conformes au droit international, sont ciblées, afin d’éviter ou d’atténuer leurs potentiels effets négatifs », a-t-elle assuré avant d’ajouter que l’UE a mis en place des dérogations et exemptions pour préserver l’acheminement de l’aide humanitaire et médicale.
Mme Broadhurst Estival a précisé que la France a mis en place un canal de communication direct entre les banques et les ONG, pour lutter contre le phénomène de surconformité des banques et de contribuer ainsi à préserver à la fois les enjeux de lutte contre le financement du terrorisme et l’espace humanitaire. Appelant à ne pas politiser la question des sanctions, le représentant de la France a cité la tenue, du 21 au 23 mars 2022, d’un Forum humanitaire européen qu’elle organise avec l’UE dans le but de protéger l’espace humanitaire et répondre aux besoins des populations.
M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a rappelé qu’il y a quelque temps, son pays a mis sur la table la nécessité de sauvegarder l’espace humanitaire, à travers une initiative conjointe avec l’Allemagne et la Suisse. Et plus récemment, le Mexique a coparrainé avec l’Union européenne une série de discussions sur la protection et la sécurité du personnel humanitaire dans les conflits, et la question de l’impact négatif et imprévu des sanctions y est également abordée. Il a estimé que ces initiatives ont porté leurs fruits, puisque « nous sommes passés du débat sur la question de savoir si les sanctions produisent ou non des conséquences humanitaires indésirables, à un stade où on parle d’action pour essayer de prévenir ou d’atténuer ces impacts ».
Le représentant mexicain a évoqué le cas de la Somalie et le renforcement récent du langage humanitaire dans le régime de sanctions en République démocratique du Congo, ainsi que l’adoption de la résolution 2615 (2021) du Conseil de sécurité créant une exception humanitaire en Afghanistan. Cependant, il reste encore un long chemin à parcourir, a-t-il dit. Il a noté que les sanctions imposent de sérieuses restrictions aux donateurs pour fournir des fonds et du matériel aux acteurs humanitaires. Parfois, elles entraînent également des poursuites pénales contre le personnel humanitaire, et elles peuvent générer une onde de choc qui dissuade de participer ou de coopérer à des programmes de nature humanitaire et finissent par affecter la population qui précisément aurait dû en profiter. Par conséquent, le Mexique s’oppose à l’imposition de sanctions unilatérales en dehors du système des Nations Unies, comme c’est le cas de l’embargo contre Cuba, a conclu le délégué.
M. AMMAR MOHAMMED MAHMOUD MOHAMMED (Soudan) a déclaré que les sanctions soulèvent de nombreuses questions s’agissant de leur efficacité et de leurs effets délétères. Il s’est dit préoccupé par le recours du Conseil de sécurité aux sanctions, qu’elles soient ciblées ou non. Il y a une suspicion de politisation de ces sanctions, a-t-il dit, en doutant de leur légitimité. Il a rappelé que son pays est frappé par un régime de sanctions qui a eu un effet négatif pour « l’image » du Soudan. Les flux d’investissements étrangers ont été entravés, tandis qu’un climat de défiance à l’égard du Soudan s’est instauré, a-t-il témoigné. Fort de cette expérience, le délégué du Soudan a demandé que les régimes de sanctions soient réalistes, non-politisés et aient une durée limitée. Les sanctions doivent être levées dès que les conditions sur le terrain ont changé, a conclu le délégué.
M. AKUEI BONA MALWAL (Soudan du Sud) a exprimé sa satisfaction quant à la convocation de cette réunion sur les questions générales relatives aux sanctions. Soulignant qu’il n’y a pas de sanctions imposées directement à son pays par l’ONU ou bilatéralement par les États Membres, il a néanmoins cité « les sanctions ciblées imposées injustement aux fonctionnaires et aux entités et l’embargo sur les armes » qui ont eu un impact négatif sur le peuple du Soudan du Sud. Il a attiré l’attention sur la « perception qu’il a créée », faisant observer que le monde des affaires a été confronté à des difficultés dans les transactions commerciales, en particulier avec les banques. Il en a expliqué les conséquences sur le coût du commerce et donc sur les consommateurs. Par conséquent, a-t-il regretté, ces sanctions rendent la vie et les moyens de subsistance plus difficiles pour les Sud-Soudanais.
En tant que pays devenu indépendant après une guerre civile de plus de 50 ans et qui a été ébranlé par un conflit interne, le Soudan du Sud aurait préféré que Conseil de sécurité utilise d’autres mécanismes de règlement des conflits que des sanctions comme moyen de résoudre les problèmes politiques, a déclaré M. Malwal. I l n’a pas jugé bon que le Conseil utilise les sanctions « comme la meilleure méthode pour atteindre son objectif », sans nécessairement épuiser de meilleures options. Cela a aggravé la situation, a-t-il estimé, expliquant que les sanctions ou la peur de celles-ci ont polarisé les parties et creusé un fossé dans la recherche d’une paix et d’une sécurité durables. Et ces sanctions ont aggravé la situation humanitaire, plus particulièrement pendant la pandémie, a-t-il ajouté. En conclusion, le délégué a réaffirmé que le Soudan du Sud n’appuie pas les sanctions sous quelque forme que ce soit, en particulier lorsqu’elles n’atteignent pas l’objectif visé. Le Conseil de sécurité et le système des Nations Unies en général devraient rechercher un monde pacifique par d’autres moyens que des sanctions, a-t-il plaidé. « Vous ne pouvez pas rechercher ou maintenir la paix mondiale en utilisant un moyen qui est dur. »
M. ISSA KONFOUROU (Mali) a jugé que les régimes de sanctions du Conseil de sécurité doivent être améliorés, afin de trouver un juste milieu entre l’efficacité nécessaire pour obtenir le résultat voulu et les conséquences néfastes éventuelles, notamment sur les plans socioéconomique et humanitaire, pour les populations ». Le délégué a souligné la nécessité d’engager une réflexion approfondie pour évaluer l’efficacité du régime de sanctions individuelles imposé dans son pays, Le Mali, quatre ans après sa mise en place. La recherche du « juste milieu » doit également inspirer les organisations régionales et sous régionales, a-t-il dit. Les sanctions politiques, économiques et financières imposées au Mali par la CEDEAO et l’Union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA), le 9 janvier 2022, engendrent des conséquences humanitaires désastreuses pour les populations maliennes, s’est expliqué le représentant, en jugeant qu’elles non aucune base juridique, étant donné qu’elles ont été prises en violation flagrante des textes fondateurs de ces organisations, des principes de solidarité et de l’idéal panafricain.
Le délégué a dénoncé la fermeture des frontières terrestres et aériennes entre les pays de la CEDEAO et le Mali, ainsi que le gel des avoirs de l’État malien et des entreprises publiques et parapubliques dans les banques commerciales des pays de la CEDEAO. Certes la CEDEAO s’emploie à expliquer, « sans convaincre », que ces sanctions ne visent pas les populations maliennes et que les produits de premières nécessités sont épargnés « mais la réalité est tout autre », a martelé le représentant. Les sanctions de la CEDEAO et de l’UEMOA, a-t-il tranché, visent essentiellement les populations du Mali, qui avaient plutôt besoin de solidarité régionale. C’est avec les ressources aujourd’hui gelées que le Gouvernement du Mali fait fonctionner les hôpitaux, les centres de santé, les écoles, et assure le paiement des fonctionnaires, l’eau, l’électricité et autres services sociaux de base. Malgré le caractère « illégal, illégitime et inhumain » de ces sanctions, le Mali, a conclu le représentant, reste ouvert au dialogue avec la CEDEAO.
M. SARHAD SARDAR ABDULRAHMAN FATAH (Iraq) a appelé à la prudence dans l’élaboration des régimes de sanction afin de prévenir tout impact négatif sur les populations civiles et l’aide humanitaire. Insistant sur la nécessité d’assurer le suivi des sanctions contre Al-Qaida, Daech et les personnes affiliées, le représentant a estimé que l’idéal serait que les sanctions soient « ciblées et intelligentes », sans conséquence humanitaire. Évoquant la résolution 1518 du Conseil de sécurité sur le gel des avoirs imposé dans son pays, il a plaidé pour leur restitution pour pouvoir faire avancer les objectifs de développement durable.
M. SAMUEL MONCADA (Venezuela), qui s’exprimait aussi au nom du Groupe des amis de la Charte, a indiqué que les mesures prévues au Chapitre VII de la Charte ne doivent être prises qu’en dernier recours et conformément aux buts et principes énoncés dans la Charte, en mettant en garde contre leurs conséquences négatives pour les civils et les agents humanitaires. La population de l’État soumis à de telles mesures ne doit pas être privée de ses moyens de subsistance et de développement, a-t-il expliqué. Le délégué a rejeté la politisation de l’aide humanitaire. « L’aide humanitaire constitue une composante fondamentale de la protection des civils en période de conflit armé et doit être assurée conformément aux principes directeurs établis dans la résolution 46/182 de l’Assemblée générale. »
Le représentant a fustigé les sanctions unilatérales illégales prises par un groupe de pays. C’est un unilatéralisme de groupe qui vise à faire plier des nations souveraines et à infliger délibérément des souffrances, a accusé le délégué. Il a indiqué que ces sanctions sont une « cruauté » assumée. Par ces sanctions unilatérales, c’est la population civile qui est attaquée, a insisté le délégué, en les qualifiant de crimes contre l’humanité. Le délégué a invité le Conseil à condamner sans équivoque ces sanctions unilatérales, qui sont des facteurs de crise. « N’ignorez pas les appels en faveur de l’élimination des sanctions unilatérales. »