En cours au Siège de l'ONU

8944e séance - matin
CS/14761

Le Conseil de sécurité examine la situation en Afrique de l’Ouest marquée par l’expansion des activités terroristes et une piraterie de plus en plus sophistiquée

Le Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) a exhorté, ce matin, devant le Conseil de sécurité, la communauté internationale à se préoccuper du caractère urgent « d’une situation qui hypothèque l’avenir des populations et dont les conséquences pourraient se faire ressentir bien au-delà de la sous-région ». 

Présentant le dernier rapport du Secrétaire général sur les développements en Afrique de l’Ouest et au Sahel, M. Mahamat Saleh Annadif s’est notamment inquiété de la détérioration de l’environnement sécuritaire marqué par des attaques terroristes incessantes au Mali, au Burkina Faso, au Niger et au Nigéria, signalant que les incidents dans le nord de la Côte d’Ivoire, du Bénin et du Togo démontrent la réalité du déplacement des actes de terrorisme du Sahel vers les pays côtiers du golfe de Guinée.  

« L’une des conséquences majeures des développements sécuritaires est que notre région vit une crise humanitaire multiforme, caractérisée par la hausse des prix des produits alimentaires, l’augmentation de la pauvreté du fait de la COVID-19 et la perte des récoltes du fait de la sécheresse », a reconnu M. Annadif en alertant que 38 millions de personnes risquent de manquer de nourriture d’ici la prochaine saison et qu’un million de personnes déplacées ont abandonné leurs terres agricoles en raison de l’insécurité.

« Chaque année, le Sahel s’enfonce un peu plus dans une crise dont les populations sont les premières victimes », a déploré de son côté la représentante de la Coalition citoyenne pour le Sahel.  Constatant que « la stratégie du tout sécuritaire » a failli, Mme Cécile Thiombiano Yougbaré a exhorté à radicalement changer d’approche, « et le faire tout de suite », décriant une stratégie qui n’aurait pas suffisamment pris en compte les besoins de la population et ne se serait pas suffisamment appuyée sur la société civile.

C’est pourquoi elle a exhorté la communauté internationale à mettre en œuvre une nouvelle approche qui s’appuie sur quatre « piliers citoyens » définis par la Coalition citoyenne pour le Sahel et qui appellent à prioriser la protection des civils; à s’attaquer aux causes profondes de la crise en tenant compte des attentes de la société civile; à faire en sorte que les financements soient à la hauteur des besoins et que l’accès humanitaire ne soit jamais entravé, et à lutter contre l’impunité.  Constatant en outre que la réponse antiterroriste seule est vouée à l’échec, la militante a appelé des membres du Conseil, « comme la France », à laisser les sociétés sahéliennes décider de ce qu’elles veulent.  

Le Conseil de sécurité a également entendu la Directrice exécutive de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) faire état d’une augmentation marquée du trafic de drogue en Afrique de l’Ouest qui continue d’être fortement touchée par les importations illégales de tramadol.  Outre la fabrication de méthamphétamine, les plus grandes menaces pour la sécurité sont posées par le trafic de cocaïne, l’Afrique de l’Ouest servant de transit pour les expéditions vers l’Europe centrale et occidentale, tandis que le Sahel est aussi une route principale pour le trafic de résine de cannabis.  Selon Mme Ghada Fathi Waly la valeur de ces flux illicites dépasse le budget de certains pays de transit, « ce qui est très déstabilisant dans le cadre de cette situation sécuritaire complexe ». 

La haut fonctionnaire a également attiré l’attention sur l’étendue des incidents de piraterie dans le golfe de Guinée, théâtre de la majorité des enlèvements de marins contre rançon dans le monde.  Selon elle, la piraterie et les vols à main armée en mer coûtent aux pays de la sous-région environ 1,94 milliard de dollars par an, tandis que les frais portuaires et les tarifs d’importation perdus en raison de la diminution des activités maritimes sont estimées à 1,4 milliard de dollars par an.  Ces milliards représentent un potentiel perdu, des fonds qui auraient pu être investis dans des économies licites et le développement des communautés côtières, a déploré la Directrice exécutive de l’ONUDC.   

La Norvège a appelé les États Membres à collaborer de manière urgente pour faire face à cette situation.  À l’approche du dixième anniversaire de l’architecture de Yaoundé, la délégation a notamment jugé important d’évaluer ce qui fonctionne et ce qui doit être amélioré, appelant les membres du Conseil à appuyer une résolution sur cette question.  Les A3 (Gabon, Ghana et Kenya) ont eux aussi encouragé un soutien urgent à la pleine opérationnalisation de l’ensemble de l’architecture de sûreté maritime de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest. 

Les trois membres africains du Conseil de sécurité se sont par ailleurs préoccupés du recul des valeurs démocratiques et de la culture constitutionnelle en l’Afrique de l’Ouest et au Sahel, s’inquiétant notamment des retards dans les processus de transition au Mali et de la non-mise en place du Conseil national de transition en Guinée.  À l’instar de nombreuses délégations, ils ont en revanche salué le bon déroulement des élections à Cabo Verde et en Gambie.

On retiendra également l’intervention de la France qui a appelé à soutenir la Force conjointe du G5 Sahel de manière prévisible et durable, en arguant qu’un bureau de soutien des Nations Unies est le meilleur mécanisme pour y parvenir. 

CONSOLIDATION DE LA PAIX EN AFRIQUE DE L’OUEST

Déclarations

Intervenant par visioconférence, Mme GHADA FATHI WALY, Directrice exécutive de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), a relevé que les incidents dans le golfe de Guinée représentent la majorité des enlèvements de marins contre rançon dans le monde, précisant que ceux-ci sont perpétrés par des groupes de pirates qui gagnent en sophistication et qui sont de plus en plus en mesure de mener des attaques contre des navires dans des eaux plus profondes.  Elle a noté que le nombre total d’incidents dans le golfe de Guinée a diminué l’année dernière, grâce notamment à l’adoption par de nombreux États de législations et stratégies maritimes.  Néanmoins, les progrès sont au point mort dans la mise en œuvre de l’architecture de sécurité maritime du golfe de Guinée.  Et dans ce contexte, les répercussions de la piraterie et de l’insécurité maritime sur la paix, la stabilité et le développement régionaux restent profondes.  Ainsi, une nouvelle étude de Stable Seas, menée en partenariat avec l’ONUDC et financé par la Norvège, estime que la piraterie et les vols à main armée en mer coûtent aux pays du golfe de Guinée environ 1,94 milliard de dollars par an.  De même, les frais portuaires et les tarifs d’importation perdus en raison de la diminution des activités maritimes sont estimées à 1,4 milliard de dollars par an.  Ces milliards représentent un potentiel perdu, des fonds qui auraient pu être investis dans des économies licites et le développement des communautés côtières, a affirmé la Directrice exécutive. 

Plus largement, elle a indiqué qu’à travers l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, le crime organisé, facilité par la corruption, perpétue l’instabilité, la violence et la pauvreté.  Le manque d’opportunités et la frustration conduisent les plus jeunes à la piraterie et au crime, et les laissent plus réceptifs aux récits de radicalisation, a-t-elle expliqué.  Selon le rapport mondial 2020 de l’ONUDC sur la traite des personnes, quelque 59% des victimes de la traite en Afrique de l’Ouest et du Centre sont des enfants et 27% sont des femmes.

En outre, les États de la région ont également sonné l’alarme devant l’augmentation marquée du trafic de drogue et l’insécurité y relative ces dernières années.  Mme Fathi Wally a souligné que l’augmentation de l’utilisation non médicale des opioïdes pharmaceutiques et les troubles liés à l’usage de drogues nuisent à la santé publique et la sécurité en Afrique de l’Ouest qui continue d’être fortement touchée par les importations illégales de tramadol.  La région est aussi devenue un fabricant de méthamphétamine, principalement destinée aux marchés d’Asie de l’Est et du Sud-Est.  Mais les plus grandes menaces pour la sécurité sont posées par le trafic de cocaïne, car l’Afrique de l’Ouest sert de transit pour les expéditions vers l’Europe centrale et occidentale.  Les données nationales sur les saisies de drogue suggèrent que le trafic de cocaïne au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Nigéria et au Sénégal a augmenté au cours des deux dernières années.  Et le Sahel est aussi une route principale pour le trafic de résine de cannabis, avec l’implication signalée de personnes affiliées à des groupes armés sahéliens.  Elle a précisé que la valeur de ces flux illicites dépasse le budget de certains pays de transit, « ce qui est très déstabilisant dans le cadre de cette situation sécuritaire complexe ».  En outre, ce trafic de drogue ainsi que le commerce illicite des armes à feu et autres biens contribuent au financement du terrorisme.   

Pour faire face à ces défis, la Directrice exécutive de l’ONUDC a appelé à intensifier le renforcement de la coopération et à élaborer des réponses efficaces qui s’appuient sur des cadres juridiques et institutionnels internationaux, régionaux ainsi que sur des capacités nationales.  C’est en ce sens que s’inscrit le soutien de l’ONUDC qui contribue par exemple à l’examen de la législation et des cadres réglementaires dans les 16 pays côtiers d’Afrique de l’Ouest et du Centre, a-t-elle indiqué.  L’Office a déjà formé près de 2 000 juges, procureurs, avocats et agents d’exécution, et appuie le renforcement des capacités de justice pénale des pays du golfe de Guinée et de toute l’Afrique de l’Ouest.  L’ONUDC entend également continuer à renforcer ses partenariats avec les organisations régionales.  Une Afrique de l’Ouest et un Sahel pacifiques ne sont possibles que si la communauté internationale travaille avec les États de la région pour soutenir les efforts transfrontaliers pour lutter contre les questions interconnectées de drogues, de criminalité, de corruption et les menaces terroristes, a-t-elle estimé. 

Mme CÉCILE THIOMBIANO YOUGBARÉ, qui intervenait au nom de Médecins du Monde France, membre de la Coalition citoyenne pour le Sahel, a expliqué que cette dernière est née du constat selon lequel la stratégie menée depuis 2013 pour tenter de mettre fin à la violence n’a pas permis de ramener la stabilité dans la région.  Au contraire, chaque année, le Sahel s’enfonce un peu plus dans une crise dont les populations sont les premières victimes, a-t-elle déploré, précisant notamment qu’en 2021, plus de 800 civils ont été tués au Mali, au Burkina Faso et au Niger, dans des attaques attribuées à des groupes armés non étatiques.

Au « Burkina », a-t-elle enchainé, on estime qu’en 2022, 8 millions de personnes seront directement affectées par la fermeture ou la réduction des services sociaux de base, alors que 1,5 million d’entre elles ont déjà été obligées de fuir leurs domiciles à la recherche de la sécurité.  Mme Thiombiano Yougbaré a également fait état des effets « dévastateurs » liés au manque d’accès aux soins de santé; à l’insécurité alimentaire, « quatre fois plus importante en 2021 que ce qui était prévu en 2020 »; à la déscolarisation de 500 000 enfants; « et surtout » à l’explosion des violences basées sur le genre à l’encontre des femmes et des filles.  Au « Burkina », a-t-elle détaillée, 53% des personnes déplacées internes sont des femmes et parmi elles, trois sur quatre se disent survivantes de violences. 

Mme Thiombiano Yougbaré s’est également déclarée particulièrement préoccupée par les attaques contre les soins de santé, précisant que rien qu’en 2020, 25 personnels de santé ont été tués au Burkina Faso et 6 ont été kidnappés ou blessés.  Elle s’est aussi inquiétée de la montée de la colère qui s’exprime contre les autorités nationales et aussi contre des pays qui sont présents militairement dans la région, comme la France.

À la question de savoir « comment on en est arrivé là », l’intervenante a estimé que la réponse sécuritaire telle qu’elle a été menée n’a pas suffisamment pris en compte les besoins des populations, et ne s’est pas suffisamment appuyée sur la société́ civile.  La stratégie du tout sécuritaire a failli et il faut radicalement changer d’approche, et le faire tout de suite, a-t-elle exhorté.

Elle a appelé à mettre en œuvre une nouvelle approche qui s’appuie sur quatre « piliers citoyens » définis par la Coalition citoyenne pour le Sahel.  Elle a tout d’abord engagé les États sahéliens et la communauté́ internationale à placer les civils au cœur de la réponse à la crise.  C’est le pilier citoyen numéro 1, a-t-elle dit.  Les décisions politiques et les opérations militaires doivent prioriser la protection des civils.  Et pour cela, il faut que les forces de défense et de sécurité sahéliennes et internationales fassent preuve de plus de transparence et de redevabilité dans la conduite de leurs opérations militaires.

Elle a ensuite appelé à assurer la mise en œuvre d’une approche véritablement holistique qui s’attaque aux causes profondes de la crise, mue par le constat que la réponse antiterroriste seule est vouée à̀ l’échec.  Pour cela, il va falloir aussi que des membres de ce Conseil, comme la France, laissent les sociétés sahéliennes décider de ce qu’elles veulent, a-t-elle estimé.  Les sociétés doivent pouvoir décider qu’elles veulent faire du dialogue entre les parties un élément essentiel à la résolution de la crise actuelle.

En troisième lieu, Mme Thiombiano Yougbaré a appelé à répondre à l’urgence humanitaire, jugeant indispensable de faire en sorte que les financements soient à la hauteur des besoins, et que l’accès humanitaire ne soit jamais entravé.  C’est particulièrement crucial pour les femmes et les filles, car nous savons que 60% de la mortalité maternelle en contexte de crise est évitable.  Elle a aussi appelé à financer et mettre en œuvre le Dispositif minimum d’urgence en santé sexuelle et reproductive, exhortant par ailleurs au respect du droit international humanitaire et des principes d’impartialité, de neutralité et d’indépendance des acteurs de l’aide.

« Enfin, luttez contre l’impunité », a lancé Mme Thiombiano Yougbaré qui a alerté que tant que celle-ci prévaudra, il sera impossible de rétablir la confiance entre les populations et les gouvernements.  « Or cette confiance est cruciale pour résoudre les crises au Sahel », a-t-elle souligné.

L’intervenant a par ailleurs souhaité que les prochaines communications du Conseil de sécurité soulignent que la lutte contre le terrorisme ne doit pas se faire au détriment de la protection des civils.  Les populations du Sahel ont besoin que le Conseil de sécurité entende la voix de la société civile sahélienne et les mette au cœur de sa réponse à la crise, a-t-elle souligné.

M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), qui s’exprimait au nom des A3 (Gabon, Ghana et Kenya), a salué les bons offices de M. Annadif Khatir Mahamat Saleh ainsi que la participation à cette réunion des deux intervenantes qui apportent « leurs perspectives uniques ».  M. Agyeman a souligné l’importance de la diplomatie préventive dans le mandat de l’UNOWAS et plaidé pour un engagement accru dans ce domaine.  Il a reconnu les progrès accomplis dans la consolidation de la démocratie à Cabo Verde et en Gambie, tout en notant les défis politiques, sécuritaires et humanitaires persistants dans certaines parties de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel.  Il s’est félicité des « gestes conciliants des Présidents du Bénin et de la Côte d’Ivoire qui ont contribué à apaiser les tensions politiques dans les deux pays ».  Il s’est également félicité du dialogue en cours au Burkina Faso, au Sénégal et au Togo visant à parvenir à un consensus sur les questions politiques et de sécurité. 

Au titre des sujets de préoccupation, M. Agyeman a cité en premier « le recul des valeurs démocratiques et de la culture constitutionnelle de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel » par le changement anticonstitutionnel de gouvernements qui s’est d’abord produit au Mali, à deux reprises, puis en Guinée.  La situation politique dans ces deux pays va à l’encontre de l’architecture de gouvernance de la CEDEAO, telle qu’exprimée dans le Protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance, selon les A3: elle constitue une source de division et d’instabilité avec des implications pour l’ensemble de la région.  Le représentant a salué la détermination de l’Autorité des chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO à assurer une transition accélérée vers un régime constitutionnel dans ces pays.  Il s’est aussi inquiété des retards dans les processus de transition au Mali et de l’absence de chronogramme pour les élections et la non-mise en place du Conseil national de transition en Guinée, appelant le Conseil à apporter son plein soutien aux mesures annoncées lors de la réunion extraordinaire de l’Autorité des chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO qui vient de s’achever à Accra. 

Pour le cas du Mali, il a indiqué que l’Autorité de la CEDEAO, qui juge inacceptable la proposition des autorités de porter la transition à cinq ans, a appliqué des mesures diplomatiques, économiques et financières nouvelles et supplémentaires conformément aux protocoles communautaires, dont la fermeture des frontières terrestres et aériennes entre les pays membres de la CEDEAO et le Mali et la suspension de toutes les transactions commerciales et financières entre les États membres de la CEDEAO et le Mali.

S’agissant de la Guinée, les A3 estiment que la parole de la junte guinéenne, face à l’absence de feuille de route de transition, ne donne aucune assurance d’un engagement à rétablir l’ordre constitutionnel.  Le représentant a donc appelé les autorités guinéennes à travailler avec la CEDEAO pour mettre en place le Conseil national de transition.  Il s’est félicité de la décision de la CEDEAO d’envoyer une mission à Conakry pour discuter du processus de transition avec les autorités de transition. 

Deuxième source de préoccupation pour les A3, la détérioration de la situation sécuritaire dans la région, notamment les attaques terroristes dans un certain nombre de pays de la région, qui s’étend aux pays côtiers.  Il a réitéré l’appel lancé par le Conseil de sécurité au Secrétaire général pour qu’il tire parti des initiatives et mécanismes existants de l’ONU en vue de lancer des projets spécifiquement consacrés à l’endiguement de la violence intercommunautaire, en étroite coordination avec l’Union africaine, y compris sa Mission pour le Mali et le Sahel.  En prévision des élections en Libye, il a dit soutenir l’appel de l’UA à la coopération entre les principales parties prenantes dans l’élaboration et la mise en œuvre du plan de retrait des forces étrangères.  Il s’est félicité de la décision de l’Autorité d’activer immédiatement, en prévision de toute éventualité, la Force en attente de la CEDEAO en raison de ses décisions sur la situation malienne. 

Les A3, préoccupés par le lien entre les réseaux criminels maritimes et les groupes terroristes terrestres dans la région, encouragent un soutien urgent à la pleine opérationnalisation de l’ensemble de l’architecture de sûreté maritime de la CEDEAO.  Le représentant a salué les discussions engagées au sein du Conseil sur la piraterie maritime dans le golfe de Guinée, disant compter sur le soutien et la coopération des membres du Conseil dans ce processus.  Il a demandé que des mesures concrètes soient prises en matière de désarmement, de démobilisation et de réinsertion pour répondre aux recrutements de groupes ayant des idéologies extrémistes.  Il a aussi appelé à s’attaquer aux économies criminelles qui encouragent et permettent aux groupes armés illégaux d’opérer efficacement.  Il a, par ailleurs, réitéré le soutien des A3 à l’inclusion des menaces pour la sécurité induites par le climat dans le mandat de l’UNOWAS.  La prochaine conférence régionale sur les changements climatiques, la paix et la sécurité en Afrique de l’Ouest et au Sahel, qui se tiendra au premier trimestre de 2022, fera à son avis avancer le processus de résolution du problème dans la région. 

Enfin, le représentant a exprimé ses préoccupations quant à l’impact humanitaire de la situation de conflit dans la région, citant notamment les affrontements entre agriculteurs et éleveurs et les catastrophes naturelles.  L’impact accru de la pandémie de COVID-19 sur les conditions socioéconomiques des populations de la région pose des défis supplémentaires à la stabilité de la région, a-t-il rappelé en appelant à l’équité et à la justice en matière de vaccins.  Le représentant s’est aussi félicité des investissements dans les capacités militaires et dans des domaines tels que la gestion des frontières et l’échange de renseignements afin de mieux gérer l’instabilité dans la région, même s’ils ne sont encore que « rudimentaires ».  Il a conclu en appelant les États de la région et les partenaires internationaux à soutenir des approches globales, notamment par le biais de la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel et du Plan d’investissement prioritaire du Groupe de cinq pays du Sahel.

Présentant le dernier rapport du Secrétaire général sur les développements en Afrique de l’Ouest et au Sahel, M. MAHAMAT SALEH ANNADIF, Représentant spécial du Secrétaire général et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) a d’abord cité le succès des travaux de la Commission mixte Cameroun-Nigéria en charge de la mise en œuvre de l’arrêt de la Cour internationale de Justice sur le conflit frontalier entre les deux pays.  Il a indiqué que la dernière réunion, qu’il a présidée en novembre, a permis de noter que les deux pays se sont entendus sur 2 050 kilomètres du tracé de la frontière estimée à 2 100 kilomètres, « ce qui laisse très peu de points de désaccord », et que 1 673 bornes sont déjà construites, soit plus 60% du projet.  

« Le 4 décembre, en compagnie de cinq anciens chefs d’État africains à la tête de missions d’observation électorale, j’ai été le témoin privilégié de l’enthousiasme et de la discipline avec lesquelles un pourcentage record de 89% d’électeurs gambiens ont exprimé librement leur vote au scrutin présidentiel », a poursuivi M. Annadif avant de saluer l’issue d’une élection présidentielle « exemplaire » à Cabo Verde.  Le Représentant spécial a ajouté que les prochaines élections locales au Sénégal dans une dizaine de jours verront pour la première fois les maires élus au suffrage universel direct, et que le dialogue est également productif au Niger où l’opposition et la majorité continuent de discuter.  En Guinée-Bissau, en coordination avec la CEDEAO, nous sommes en contact permanent avec les acteurs politiques pour faciliter une entente sur les réformes indispensables, a-t-il indiqué, avant de souligner son engagement en Sierra Leone et ailleurs pour combler des divergences.    

Malgré ces progrès politiques, M. Annadif a regretté la détérioration de l’environnement sécuritaire marqué par des attaques terroristes incessantes au Mali, au Burkina Faso et au Niger.  « Au Nigéria, le regain de criminalité et de conflits entre agriculteurs et éleveurs a détourné l’attention de la violence extrémiste dans le nord-est, qui reste néanmoins omniprésente », a-t-il noté, avant d’expliquer que les incidents dans le nord de la Côte d’Ivoire, du Bénin et du Togo démontrent la réalité du déplacement des actes de terrorisme du Sahel vers les pays côtiers du golfe de Guinée.  

« L’une des conséquences majeures de ces développements sécuritaires est que notre région vit une crise humanitaire multiforme, caractérisée par la hausse des prix des produits alimentaires, l’augmentation de la pauvreté du fait de la COVID-19 et la perte des récoltes du fait de la sécheresse », a noté M. Annadif qui a alerté que 38 millions de personnes risquent de manquer de nourriture d’ici à la prochaine saison alors qu’un million de personnes déplacées ont abandonné leurs terres agricoles en raison de l’insécurité.  En novembre 2021, il y avait plus de 8 millions de réfugiés, déplacés internes, rapatriés et apatrides en Afrique de l’Ouest et 4,1 millions dans les pays du G5 Sahel (Mali, Niger, Burkina Faso, Tchad, Mauritanie).  M. Annadif s’est aussi inquiété de la situation de millions d’enfants qui grandissent traumatisés, mal nourris, mal soignés, et sans éducation. 

Dans ce contexte, il a exhorté la communauté internationale à se préoccuper du caractère urgent d’une situation qui hypothèque l’avenir des populations et dont les conséquences pourraient se faire ressentir bien au-delà de la sous-région.  Le Chef de l’UNOWAS s’est félicité des dernières opérations conjointes entre le Burkina Faso et le Niger d’une part et entre la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Togo et le Bénin d’autre part ainsi que du travail de la Force multinationale mixte dans le bassin du lac Tchad et de la Force conjointe du G5 Sahel.  Il a aussi estimé que des plateformes de discussions telles que le Forum des gouverneurs du bassin du lac Tchad pour la coopération régionale, et celui des gouverneurs des régions frontalières du Liptako-Gourma se sont avérés efficaces pour réunir les gouvernements, la société civile et les communautés pour trouver des solutions à leurs besoins spécifiques.  

M. Annadif a indiqué que l’UNOWAS a organisé, il y a quatre semaines, une conférence des leaders traditionnels et religieux de toute la région, y compris des femmes notables du Liptako-Gourma et du nord-est du Nigéria pour valoriser la contribution des communautés à la résolution de ces crises qui entravent leur développement.  Il a aussi précisé que l’opérationnalisation de la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel se poursuit en collaboration avec le Bureau du Coordonnateur spécial pour le développement du Sahel.  Il a appelé les coordonnateurs résidents et humanitaires du système des Nations Unies à s’engager pour que la stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel soit une plateforme stratégique directrice pour les cadres de coopération et les programmes d’intervention humanitaire des Nations Unies au Sahel, en intégrant l’approche Nexus Plus dans toutes leurs interventions.  L’UNOWAS soutient en outre les efforts de revitalisation de la Plateforme ministérielle de coordination des stratégies du Sahel, et compte poursuivre, en 2022, sa collaboration avec les partenaires régionaux pour faciliter la mise en place d’un forum des ministres de la justice et des experts judiciaires en Afrique de l’Ouest dans le but de renforcer les capacités des systèmes judiciaires.  

Soulignant également la nécessité d’une approche à long terme par rapport aux changements climatiques, M. Annadif a cité la création d’un groupe de travail régional inter agences à l’UNOWAS qui a produit une analyse conjointe en réponse aux recommandations du Comité exécutif du Secrétaire général.  Il a aussi cité la tenue, dans quelques semaines à Dakar, d’une conférence, en collaboration avec le Gouvernement irlandais, pour lancer des initiatives concrètes avec la participation d’experts et d’institutions.  En collaboration avec la CEDEAO, les pays de la région et les équipes-pays des Nations Unies, l’UNOWAS soutient en outre le développement de stratégies d’adaptation à la dégradation climatique dans la région Afrique de l’Ouest et Sahel.  De même, l’UNOWAS a l’intention de travailler beaucoup plus étroitement avec les équipes de pays du système des Nations Unies dans les 16 pays couverts par le Bureau, notamment pour renforcer le cercle vertueux de la bonne gouvernance, de la sécurité, de la paix et du développement.

Après avoir salué l’action de la Commission de la consolidation de la paix (CCP) pour accompagner les pays de la sous-région en situation de sortie de crise, M. Annabi a appelé à une plus grande volonté politique se traduisant, entre autres, par le financement de plans d’action nationaux pour promouvoir la représentation des femmes au niveau des organes de décision, plus de 21 ans après l’adoption de la résolution 1325.

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a constaté que malgré les progrès récents enregistrés à Cabo Verde et en Gambie, la sécurité et la stabilité demeurent hors de portée pour la majorité de la région.  Elle a insisté sur l’importance de la volonté politique et a appuyé l’issue du Sommet de la CEDEAO d’hier sur le Mali, affirmant que la situation dans ce pays est critique pour la sécurité et le progrès de la région.  La représentante s’est inquiétée de la persistance de la violence et des actes de piraterie commis dans le golfe de Guinée.  La perspective d’un avenir plus prospère pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, et en particulier les femmes et les jeunes, ne peut être envisagée qu’en tenant compte de l’impact des changements climatiques, a-t-elle ajouté.  Elle a également souligné l’importance de faire respecter les droits humains des membres de la communauté LGBTI. 

Mme Byrne Nason a souligné que seules des solutions intégrées et holistiques pour s’attaquer aux causes profondes de l’insécurité peuvent conduire à des solutions durables.  Selon la déléguée, la coopération conjointe dans toute la région, les dialogues intercommunautaires et des approches centrées sur les droits humains sont essentiels pour résoudre les problèmes de sécurité à long terme et appuyer la prévention des conflits et la réconciliation.  Elle a dit soutenir fermement la poursuite par l’UNOWAS des efforts en ce sens, ainsi que le rôle de leadership que les organisations régionales telles que la CEDEAO doivent jouer.

M. FERIT HOXHA (Albanie) a reconnu les développements positifs depuis la dernière discussion sur l’UNOWAS, réalisés ensemble avec les organisations régionales, en premier lieu « la CEDEAO qui continue de jouer un rôle crucial dans la promotion de la paix et de la stabilité dans la région ».  Saluant la tenue des élections à Cabo Verde et en Gambie en décembre, il a encouragé l’UNOWAS à soutenir les pays de la région à se préparer au mieux pour les élections à venir, en particulier en renforçant la sécurité sur le terrain.  Le représentant a salué les progrès démocratiques réalisés au Niger et les engagements du Gouvernement nigérien à faire face à la détérioration de la situation et améliorer l’accès à l’éducation, en particulier pour les filles.  Malheureusement, va-t-il tempéré, des milliers d’écoles ont fermé dans le reste du Sahel, déscolarisant ainsi plus de 13 millions d’enfants.  Il a fait l’éloge de la formation UNOWAS dispensée aux femmes et aux jeunes sur la participation politique, tout en soulignant le besoin de voir l’engagement des gouvernements locaux.

M. Hoxha a fait siennes les recommandations du Secrétaire général concernant les prorogations inconstitutionnelles des mandats et les coups d’État dans la région.  Il a appelé les parties prenantes au Mali et en Guinée à assurer une transition du pouvoir aux civils élus et un retour à l’ordre constitutionnel en temps opportun.  Il a déploré l’expansion du terrorisme et le nombre croissant d’attentats dans la région du Sahel, appelant la communauté internationale à mieux soutenir les réponses régionales.  Il a rappelé que la situation sécuritaire au Sahel a un impact sur l’ensemble de la région, du continent et bien au-delà, compte tenu de sa position géographique, reliant l’Afrique subsaharienne au bassin méditerranéen.  Tout en soulignant les exemples positifs de l’appropriation africaine, il a prévenu qu’il reste encore beaucoup à faire face au risque d’évolution rapide de la menace, demandant à la communauté internationale d’accentuer son soutien aux organisations régionales dans la lutte contre le terrorisme.

S’agissant du golfe de Guinée, « une zone toujours difficile », M. Hoxha s’est félicité de la poursuite des discussions et du soutien apporté par les efforts régionaux.  Il a plaidé pour une approche multidimensionnelle et inclusive pour traiter les questions de paix et de sécurité, pour couvrir les dimensions développement, politique, sécurité, justice et droits humains.  Abordant ensuite les effets « évidents » des changements climatiques sur la paix dans la région du Sahel, il a appelé à reconnaître ces défis et à prendre les mesures nécessaires.  Il a conclu en réaffirmant que l’Albanie est prête à soutenir l’UNOWAS dans le renforcement de ses efforts en faveur de la consolidation démocratique et du consensus dans toute l’Afrique de l’Ouest et la région du Sahel.

M. RICARDO DE SOUZA MONTEIRO (Brésil) a salué la reprise des activités et des progrès réalisés dans les travaux de la Commission mixte Cameroun-Nigéria concernant la démarcation de la frontière, ainsi que les processus électoraux pacifiques et ordonnés qui se sont déroulés à Cabo Verde et en Gambie.  Il a ensuite appelé à mettre en œuvre les réformes institutionnelles décrites dans l’Accord de Conakry de 2016 et la feuille de route de la CEDEAO visant à résoudre la crise politique.

La situation humanitaire dans l’espace CEDEAO préoccupe le Brésil qui travaille en étroite collaboration avec ses partenaires africains pour multiplier les accords de coopération pour relever les défis dans les domaines de la santé, de l’alimentation et de la sécurité.  Évoquant la question de la piraterie dans le golfe de Guinée, le représentant a rappelé l’importance de l’architecture de Yaoundé pour la sécurité maritime.  Il a souligné que le coût de la piraterie détourne des ressources qui pourraient autrement être utilisées pour le développement et la sécurité de la région.  Il a appelé la communauté internationale à traiter de cette question d’une manière globale et intégrée, à commencer par ses causes profondes, généralement associées au manque d’opportunités et l’extrême pauvreté.  Dans ce contexte, la Commission de consolidation de la paix pourrait fournir des contributions importantes pour consolider la paix dans et autour du golfe du Guinée et intégrer des stratégies pour s’attaquer aux causes profondes de la piraterie sur terre.

M. DAI BING (Chine) s’est inquiété des difficultés auxquelles font face les pays de l’Afrique de l’Ouest pour lutter contre la pandémie de COVID-19 et l’insécurité tout en essayant de préserver le développement économique.  Il a salué le succès des processus électoraux à Cabo Verde et en Gambie, avant de citer les situations de transition politique au Mali et en Guinée et d’évoquer le dialogue politique en Côte d’Ivoire ou au Burkina Faso.  Le représentant de la Chine a dit la volonté de son pays de continuer d’aider la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union africaine à faire face à de nombreux défis dont la lutte contre le terrorisme.  « La communauté internationale doit aider les pays de la région à renforcer leurs capacités antiterroristes par des coopération bilatérales et multilatérales », a insisté le délégué qui a aussi appelé à redoubler d’efforts pour appuyer la dé radicalisation, répondre aux causes profondes des conflits et promouvoir l’emploi de jeunes.  

Par ailleurs, le représentant a appelé à renforcer la coopération maritime aux fins de la sécurité maritime dans le golfe de Guinée où la piraterie a un effet désastreux sur le commerce.  Il a jugé nécessaire d’assurer la formation des forces maritimes et une meilleure coordination pour une surveillance conjointe des côtes.  Il a dit la volonté de son pays de participer de manière constructive aux discussions relatives au projet de résolution présenté par le Ghana et la Norvège pour lutter contre la piraterie dans le golfe de Guinée.  S’agissant de la lutte contre la pandémie, il a incité la communauté internationale à aider les pays de la sous-région à produire des vaccins et à s’en procurer.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a relevé que la situation sécuritaire qui s’aggrave au Sahel menace toute l’Afrique de l’Ouest.  Notant que la menace terroriste affecte désormais les pays côtiers, il a remarqué, pour la première fois, que trois attaques ont été menées contre les forces de défense et de sécurité du Bénin.  Les violences contre les civils continuent au Burkina Faso, au Mali et au Niger, va-t-il ajouté avant d’appeler à doter les pays de la région des moyens de lutter contre le terrorisme.  La Force conjointe du G5 Sahel doit être soutenue de manière prévisible et durable, va-t-il plaidé, en arguant qu’un bureau de soutien des Nations Unies est le meilleur mécanisme pour y parvenir.  Le délégué a encouragé la coopération entre les pays côtiers et ceux du Sahel.  Dans ce contexte, il a jugé « prometteuse » l’Initiative d’Accra.  Il a assuré que la France poursuivra son appui sécuritaire aux pays du Sahel, en coordination avec ses partenaires européens, dont plusieurs participent à la Task Force Takuba.  M. de Rivière a par ailleurs condamné le déploiement en cours sur le territoire malien de mercenaires russes de Wagner, « connus pour menacer les civils, violer le droit international et la souveraineté des États », ce qui ne peut selon lui que contribuer à déstabiliser davantage le Sahel.  

Au-delà du Sahel, la France est préoccupée par l’insécurité maritime dans le golfe de Guinée, a poursuivi M. de Rivière en disant soutenir les initiatives régionales de lutte contre la piraterie, dans le cadre de l’architecture de Yaoundé.  Il a rappelé que la France mène des exercices maritimes avec plusieurs pays africains et participe aux Présences Maritimes Coordonnées de l’Union européenne.  Par ailleurs, le délégué a indiqué que les programmes de développement doivent aller de pair avec les réponses sécuritaires et il a soutenu la Stratégie intégrée des Nations Unies pour le Sahel.  Mais, a-t-il précisé, celle-ci ne doit pas se limiter à la tenue de réunions ou d’ateliers.  Il a suggéré qu’elle mette en œuvre des programmes concrets.  Il a également jugé impératif que les États du Sahel s’emploient à restaurer la confiance des populations et à améliorer leur gouvernance, sans compter la nécessité de prendre en compte les effets des changements climatiques, notamment en matière de sécurité et de prévention des conflits.  

En ce qui concerne les situations politiques, il a dit que la France reste gravement préoccupée par le non-respect des engagements pris par les autorités de transition au Mali de revenir à l’ordre constitutionnel selon le calendrier fixé par la Charte de la transition et endossé par le Conseil de sécurité.  Il a ajouté que la France soutient les efforts de la CEDEAO qui a adopté hier de nouvelles sanctions contre les autorités de transition au Mali, car celles-ci n’ont une fois encore pas respecté les exigences de la CEDEAO et leurs propres engagements.  

M. JAMES KARIUKI (Royaume-Uni) a salué le bon déroulement des élections en Gambie, pour ensuite s’inquiéter des défis que connaît la transition en Guinée et au Mali, pays où les autorités ont notamment décidé de reporter les élections pour une période pouvant aller jusqu’à cinq ans.  Il s’est aussi préoccupé de la détérioration de la situation sécuritaire au Sahel, notamment de la prévalence des attaques dans la zone des trois frontières entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger, et des répercussions sur l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest.  Il a souligné que les changements climatiques alimentent l’insécurité, attirant par ailleurs l’attention sur la poursuite du conflit avec les groupes extrémistes dans le nord-est du Nigéria et le bassin du lac Tchad.

Le représentant a appelé à adopter une approche holistique et intégrée pour répondre aux défis interconnectés que connaît la région.  Les efforts nationaux de sécurité doivent aller de pair avec les efforts des partenaires de développement, les agences de l’ONU et la Commission de consolidation de la paix pour répondre aux causes des conflits et appuyer la cohésion sociale et la bonne gouvernance, a-t-il estimé.

Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a relevé qu’en dépit des solutions aux niveaux national, régional et les efforts internationaux, il reste encore du travail à faire pour mettre la région sur la voie du redressement, de la stabilité et de la sécurité.  Sur le plan sécuritaire, elle a jugé nécessaire de redoubler d’efforts pour combattre les groupes terroristes présents dans ces zones, notamment Daech et Boko Haram, qui peuvent profiter des vides politiques et de la détérioration des conditions sociales et économiques pour établir un point d’ancrage pour leurs activités terroristes.  Il faut également, a-t-elle dit, accorder une attention particulière au lien croissant entre le crime organisé et le terrorisme.  La déléguée a salué les efforts déployés par la Force conjointe du G5 Sahel à cet égard pour lutter contre le terrorisme et le crime organisé dans la région.  Elle a en outre souligné que les actes persistants de piraterie et de vols à main armée dans le golfe de Guinée menacent la navigation et la sécurité et le développement durable des pays de la région, plaidant à ce propos pour le renforcement des capacités des États de la région.  En plus d’une approche régionale, il est important de comprendre les contextes spécifiques aux pays, a-t-elle ajouté.

Mme Nusseibeh a ensuite insisté sur la nécessité de fournir une aide humanitaire d’urgence aux pays d’Afrique de l’Ouest et du Sahel, et d’attacher une importance particulière au problème de l’insécurité alimentaire qui touche actuellement 20 millions de personnes dans la région.  Elle a également appelé à la fourniture des vaccins et des équipements médicaux nécessaires pour faire face à la pandémie de COVID-19, précisant que l’aide des Émirats arabes unis aux pays du Sahel, dans les domaines du développement et de l’humanitaire s’élevait à environ 240 millions de dollars au cours de la période 2016-2020.  Elle a par ailleurs estimé que la question des changements climatiques, l’un des défis les plus importants auxquels l’Afrique de l’Ouest et le Sahel sont confrontés, doit occuper une place suffisante dans les discussions du Conseil.  Elle a enfin salué les efforts visant à soutenir la participation des femmes aux processus politiques et sécuritaires, ainsi que les initiatives visant à autonomiser les jeunes de la région.

M. JUAN MANUEL GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a salué la tenue d’élections réussies à Cabo Verde et en Gambie, ainsi que les progrès réalisés dans des initiatives de dialogue politique au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire et en Sierra Leone, entre autres.  Ces développements positifs montrent que le dialogue politique et la gouvernance de la démocratie sont essentiels pour résoudre les problèmes complexes qui affectent la région, a-t-il noté.  L’UNOWAS joue à son avis un rôle de premier plan pour soutenir le processus de consolidation institutionnelle dans la région qui doit accompagner les initiatives de coopération militaire déployées en Afrique de l’Ouest et au Sahel.  Sans les réformes nécessaires dans les domaines de la gouvernance, du développement économique, du renforcement de l’État et du régime constitutionnel, la violence alimentée par les groupes extrémistes, le crime organisé, l’autodéfense et les rivalités entre communautés se poursuivront, a-t-il prédit, malgré les efforts déployés dans le domaine de la sécurité, en particulier dans le Sahel central.

Le Mexique estime qu’il est nécessaire d’aller vers une stratégie régionale qui s’oppose au trafic illicite d’armes, en particulier les armes légères et de petit calibre.  Il a souligné la menace que représentent ces armes pour les droits humains et en termes d’attaques contre les civils.  Conformément à la résolution 2616 (2021), approuvée en décembre dernier, il a estimé que l’UNOWAS peut contribuer à harmoniser les efforts menés dans chaque pays et à articuler une vision régionale pour lutter efficacement contre ce trafic, en s’attaquant à son modèle de financement et à ses sources d’approvisionnement.  Avant de conclure, le représentant du Mexique a condamné la violence qui a fait un grand nombre de victimes parmi le personnel des Nations Unies comme parmi la population civile de la région, appelant à rendre la justice pour stopper le cycle de l’impunité.

M. RICHARD MILLS (États-Unis) a salué la plus grande participation de la société civile à la vie politique de la région du Sahel, ainsi que les processus électoraux libres, équitables et transparents qui ont eu lieu à Cabo Verde et en Gambie.  Cependant, il s’est dit profondément préoccupé par l’absence de progrès au Mali et a exhorté les autorités de transition maliennes à revenir à la démocratie en temps opportun.  M. Mills a ensuite condamné le coup d’État de septembre 2021 en Guinée, avant d’exhorter le Gouvernement de transition à organiser rapidement des élections et à ramener le pays à une démocratie constitutionnelle dirigée par des civils. 

Le représentant a dit soutenir les efforts de la région pour lutter contre le terrorisme et promouvoir la stabilité grâce à des stratégies holistiques qui s’attaquent aux moteurs sous-jacents des conflits.  Selon lui, les gouvernements sapent leur efficacité et leur crédibilité lorsque des représentants de l’État, en particulier les forces de sécurité chargées de protéger leurs propres populations, se livrent à des violations des droits humains.  Il a indiqué que l’inclusion d’organisations de la société civile favorise le développement de solutions dirigées par la communauté pour contrer les attaques et la violence de manière proactive.  

Selon M. Mills, le travail qu’effectue l’UNOWAS avec les gouvernements d’Afrique de l’Ouest et du Sahel pour développer un projet conjoint dirigé par des civils afin de résoudre les conflits locaux est essentiel pour la stabilité.  Il a également salué le partenariat entre l’UNOWAS, le Bureau pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), le Centre de collaboration régionale de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC)et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) pour lancer un groupe de travail régional chargé de lutter contre les effets néfastes des changements climatiques sur la sécurité et le développement en Afrique de l’Ouest. 

Le représentant a par ailleurs fait savoir que la Coalition mondiale contre Daech a accueilli le Burkina Faso en tant que quatre-vingt-quatrième membre à la fin de 2021 et annoncé la formation, le mois dernier, d’un groupe de réflexion sur l’Afrique qui vise à renforcer les capacités civiles de lutte contre le terrorisme des membres de la Coalition africaine.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) s’est inquiété des graves difficultés auxquelles font face les pays de la sous-région en matière de lutte contre le terrorisme et de lutte contre le trafic de stupéfiants.  Le représentant russe a particulièrement appuyé toutes les parties qui mènent une lutte difficile contre le terrorisme dans la région.  Notant que le nombre de personnes ayant besoin d’une aide alimentaire ne cesse d’augmenter, le représentant russe a appelé à redoubler d’efforts pour aider les États à restaurer leur autorité.  Il a insisté que la mise en œuvre de l’accord de paix au Mali et la lutte contre le terrorisme exige la stabilité politique du pays.  Il a particulièrement salué les efforts des Maliens pour rétablir l’ordre dans leur pays avant de juger inadmissible que « des informations non vérifiées et non fiables » aient été mentionnées au cours de cette réunion du Conseil de sécurité.  

Par ailleurs, le représentant russe a estimé que l’efficacité des activités de l’UNOWAS dépend de la qualité de sa coopération avec l’Union africaine, la CEDEAO, le G5 Sahel, le Bureau régional des Nations Unies pour l’Afrique centrale (BRENUAC) et la Commission du bassin du lac Tchad.  Enfin, le représentant russe a jugé que la poursuite de sanctions contre la Guinée-Bissau va à l’encontre du bon sens.

M. T. S. TIRUMURTI (Inde) a félicité les peuples de Gambie et de Cabo Verde pour avoir fait confiance aux valeurs de la démocratie.  Il a relevé cependant que la démocratie a connu un recul en Guinée suite au coup d’État de septembre dernier.  Malgré les efforts déployés par la CEDEAO, il n’y a eu aucun progrès vers le rétablissement de l’ordre démocratique, s’est-il inquiété.  De même, au Mali, le respect d’une transition de 18 mois, qui a été initialement convenue par les autorités maliennes, reste incertain. 

Sur le plan sécuritaire, le représentant a relevé que le lien entre les terroristes, les criminels, les trafiquants de drogue et les pirates continuent d’alimenter l’instabilité et la violence en Afrique de l’Ouest et dans le bassin du lac Tchad.  Les groupes terroristes affiliés à Al-Qaida et à Daech continuent d’instrumentaliser les dimensions religieuses et ethniques du conflit entre agriculteurs et éleveurs, a noté le délégué.  Il a appelé à assurer un financement prévisible et durable aux initiatives régionales de sécurité telles que la Force conjointe du G5 Sahel.  M. Tirumurti a signalé que plusieurs marins indiens ont été victimes de piraterie et d’enlèvements dans le golfe de Guinée, jugeant urgent de renforcer la surveillance pour garantir la sécurité maritime dans la zone grâce à une collaboration internationale accrue.

Mme MONA JUUL (Norvège) s’est inquiétée de la prolongation non constitutionnelle des mandats présidentiels ainsi que des coups d’État perpétrés dans la région.  Elle a souligné que la coopération est essentielle pour faire face à la propagation du terrorisme et d’autres défis sécuritaires et humanitaires, appelant notamment l’ONU à appuyer la Force conjointe du G5 Sahel en tant que « solution transfrontalière ».

Relevant par ailleurs que pratiquement tous les enlèvements en mer sont perpétrés dans le golfe de Guinée, elle a appelé les États Membres à collaborer de manière urgente pour faire face à cette situation.  À l’approche du dixième anniversaire du cadre de Yaoundé, il importe d’évaluer ce qui fonctionne et ce qui doit être amélioré, a-t-elle estimé, avant d’appeler les membres du Conseil à appuyer la première résolution sur cette question en 10 ans.  Mme Juul a ensuite souligné que la protection des civils doit être au cœur des tous les efforts et a fait part de son appui aux quatre piliers citoyens définis par la Coalition citoyenne pour le Sahel.

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