Soixante-dix-septième session,
6e & 7e séances plénières – matin & après-midi
AG/EF/3567

Deuxième Commission: le système financier en pleine « tempête macroéconomique mondiale » doit se réformer pour laisser une chance aux ODD

Le constat partagé par les experts et les délégations de la Deuxième Commission (questions économiques et financières), qui a étudié, ce jeudi, les questions de politique macroéconomique, a été clair: les règles du système financier international sont devenues obsolètes et doivent absolument être réformées si le monde veut conserver une chance d’atteindre un jour tout ou partie des objectifs de développement durable (ODD).  « Le système actuel n’a pas fluctué avec les évolutions du monde », a en effet constaté Sharon Spiegel, du Département des affaires économiques et sociales (DESA).

Dans une conjoncture particulièrement inquiétante -guerre en Ukraine, insécurité alimentaire et énergétique, pression inflationniste, augmentation du coût du transport maritime et par ricochet des prix des biens de consommation-, la longue liste des maux économiques accumulés, en 2022, a été égrenée par une cinquantaine d’orateurs qui se sont en outre plaint de l’inégalité de la reprise post-COVID.  Les pays les plus pauvres n’ont vu leur commerce augmenter que de 4% ou moins, et la baisse des recettes d’exportation et d’envois de fonds a exacerbé leurs contraintes financières.  Le Groupe des pays en développement sans littoral (PDSL) a aussi déploré les effets en cascade que les mesures anti-inflationnistes prises par les pays développés peuvent avoir sur le reste du monde.

Le besoin de réformes a donc semblé urgent et très étendu, à écouter les délégations.  Nombreux sont les pays, comme l’Iraq, qui ont demandé un système commercial qui leur soit « moins défavorable ».  Les Maldives ont pris pour exemple les barrières douanières à l’exportation du thon qui sapent le développement de l’archipel.  Les niveaux d’aide publique au développement (APD) doivent en outre être relevés et des solutions innovantes doivent être trouvées face à « une tempête macroéconomique mondiale », ont demandé le groupe des pays enclavés qui a aussi lancé un appel pour que la dette soit restructurée et son service suspendu.  À ce stade, neuf de ces pays sont en risque de surendettement.

La Communauté des Caraïbes (CARICOM) a proposé la formule « échanges de dettes pour financer la mise en œuvre des ODD », telle qu’élaborée par la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC).  Les pays les moins avancés -les PMA- ont réclamé de toute urgence un nouveau cycle de mesures globales d’allègement de la dette, tout comme les petits États insulaires en développement (PEID), « dos au mur » et en première ligne face aux changement climatiques, qui ont revendiqué des solutions adaptées.  La dépréciation des monnaies des pays en développement vient augmenter le fardeau de la dette, a confirmé Stephanie Blankenburg, de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), qui répondait à l’Égypte, inquiète de l’impact des crises en cascade sur la soutenabilité de la dette qui rendent difficiles d’investir dans les programmes sociaux.  James Zhan, également de la CNUCED, a proposé notamment de supprimer les contraintes de mise en œuvre posées par les accords internationaux d’investissement.

Sur la question des droits de tirage spéciaux (DTS), experts et délégations ont convergé: ils doivent être orientés vers les pays dans le besoin, pourquoi pas par le biais d’un « processus accéléré de réorientation », comme l’a souhaité la CARICOM.  Évoquant des défaillances systémiques de l’économie mondiale, le Groupe des 77 et la Chine a appelé à ce que le plan de relance des ODD du Secrétaire général soit adopté avec, en particulier, la création de nouveaux DTS.  Comme de nombreuses délégations, l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS) a souhaité la mise en place d’un indice multidimensionnel de la vulnérabilité et a espéré que des pistes pourront être explorées lors de la quatrième Conférence internationale pour les PIED, en 2024, et à la COP27, en novembre.

Le Nigéria a aussi dénoncé les « abus fiscaux des grandes multinationales ».  En écho, l’introduction d’un impôt minimum de 15% sur les bénéfices étrangers des plus grandes entreprises multinationales a été évoquée par James Zhan.  Pour l’expert, les économies développées et en développement devraient bénéficier considérablement de l’augmentation du recouvrement des recettes fiscales.  La CNUCED recommande d’ailleurs à la communauté internationale d’alléger les contraintes des pays en développement, notamment les PMA, pour qu’ils tirent parti de cette taxe mondiale.

Autre point mis en avant aujourd’hui: les pays développés doivent tenir leur promesse de fournir 100 milliards de dollars de financement annuel pour le climat - la moitié de cette somme devant être allouée à l’adaptation, et la moitié du financement de l’adaptation devant être canalisée vers les PMA et les autres pays vulnérables.  Un mécanisme de financement des pertes et dommages devrait aussi être créé pour compenser les impacts du dérèglement climatique, toujours selon les PMA.

Concernant la lutte contre les flux financiers illicites, l’ONU estime, et le Groupe des États d’Afrique a opiné sur ce point, que des actions sont nécessaires dans trois grands domaines: mieux appliquer les normes existantes; renforcer les normes internationales pour combler les lacunes et répondre à l’évolution des risques; et améliorer les capacités nationales d’application.  Anu Peltola, autre experte de la CNUCED, a recommandé de mettre en place un « profil de risque FFI » par pays et de travailler davantage à la question des échanges illicites, conformément au Pacte de Bridgeton.

La prochaine séance de la Deuxième Commission aura lieu demain, vendredi 7 octobre, à 10 heures.

QUESTIONS DE POLITIQUE MACROÉCONOMIQUE

SUIVI ET MISE EN ŒUVRE DES TEXTES ISSUS DES CONFÉRENCES INTERNATIONALES SUR LE FINANCEMENT DU DÉVELOPPEMENT A/77/223A/77/82

Présentation de rapports

Selon Mme MIHO SHIROTORI, Chef du Département des affaires économiques de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), le dernier rapport du Secrétaire général sur le commerce international et le développement (A/77/207) qu’elle a présenté aux délégations comporte deux messages principaux.  Le premier est que le commerce international est vital pour atténuer la crise du coût de la vie liée à l’alimentation et l’énergie; le second, que le commerce international aide les pays en développement à matérialiser leur « avantage comparatif naturel » dans la production d’énergies renouvelables, lorsque ledit avantage est associé au transfert de technologies et au renforcement des capacités.

La crise actuelle du coût de la vie résulte d’une reprise fragile et inégale après la crise de la pandémie de COVID-19.  La reprise post-COVID a été inégale: les pays les plus pauvres et ceux dont l’économie n’est pas diversifiée n’ont vu leur commerce augmenter que de 4% ou moins, et la baisse des recettes d’exportation et d’envois de fonds a exacerbé leurs contraintes financières.  La guerre en Ukraine a infligé des chocs d’approvisionnement en denrées alimentaires et en carburants, accroissant le risque d’insécurité alimentaire et énergétique par des hausses de prix massives, pendant que les prix élevés de l’énergie alimentent la pression inflationniste, en augmentant par exemple le coût du transport maritime qui représente plus de 80% du volume du commerce international de marchandises.  Cette flambée des taux de fret impacte directement les prix des biens de consommation mondiaux: la CNUCED estime qu’une augmentation de 1% du taux de fret peut accroître les prix à la consommation mondiaux de 1,6% en 2023.

Le recours à des mesures de restriction des échanges augmente aussi les coûts commerciaux.  À la mi-mai 2022, près de 80% des 300 instruments de politique commerciale appliqués par les gouvernements concernaient les produits agricoles ou les engrais.  Les pays connaissant la plus grande insécurité alimentaire, énergétique et financière sont ceux ayant le plus besoin de marchés mondiaux ouverts, équitables et prévisibles pour l’alimentation et l’énergie, a insisté Mme Shirotori.

Le commerce international aide les pays en développement à devenir des producteurs et des exportateurs compétitifs d’énergie renouvelable à long terme.  Or, à court terme, l’insécurité énergétique a contraint de nombreux pays à opter pour une demande accrue en combustibles fossiles.  Toutefois sur le long terme, les prix élevés des combustibles peuvent inciter à investir dans la production et la distribution d’énergies renouvelables, a analysé Mme Shirotori.

Mme SHIROTORI, en tant que Directrice par intérim de la Division du commerce international et des produits de base de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a présenté les principaux résultats du rapport de la CNUCED intitulé Creative Economy Outlook 2022 (Perspectives de l’économie créative).

L’une des sections de ce rapport est consacrée à la mise en œuvre de la résolution A/RES/74/198 de 2019 intitulée « Année internationale de l’économie créative au service du développement durable, 2021 »La CNUCED a créé une page Web spéciale pour la mise en œuvre de cette résolution, qui souligne que les industries de la création aident les pays en développement à profiter de nouvelles possibilités de croissance du commerce mondial.

Cette année internationale a permis avec succès de sensibiliser, d’échanger sur ces grandes questions, de coopérer, de créer des réseaux pour que tous les acteurs de l’économie créative puissent pleinement assumer leur rôle, a expliqué Mme Shirotori.  Selon une enquête réalisée par la CNUCED et les réponses obtenues de 33 pays, il ressort que l’économie créative est devenue un secteur des plus importants du point de vue social, politique et économique.  L’enquête a aussi révélé que le concept et la définition de l’économie créative sont divers, se traduisant par des accords et des politiques nationales très différents pour développer l’économie créative.  Le rapport présente des exemples en ce sens, comme le Cambodge, le Canada, les Émirats arabes unis et le Nicaragua.

L’une des conclusions à tirer est que, pour presque tous les pays, l’économie créative est primordiale.  Le problème est que les données collectées, éparses et rares, ne recouvrent pas la même réalité, certains pays évaluant l’économie créative en termes de contribution au PIB tandis que d’autres se réfèrent au nombre d’employés dans ces secteurs.  Mme Shirotori a donc suggéré à la Deuxième Commission de réfléchir aux moyens de collecter des données comparables et fiables, afin de pouvoir évaluer le développement de cette économie au niveau international et sa contribution au commerce international.

Pour l’heure, le rapport estime que les exportations de biens créatifs ont augmenté de 20% entre 2010 et 2020, passant de 419 millions de dollars à 524 millions.  Quant aux services liés à la création, ils ont enregistré une hausse bien supérieure, passant de 487 milliards de dollars en 2010 à 1 100 milliard en 2020.  Le rapport révèle également que les nouvelles technologies, comme l’impression en 3D, l’intelligence artificielle ou la réalité virtuelle, modifient en profondeur certains secteurs de l’économie créative.

M. BAHTIJORS HASANS, de la Lettonie, Président du Conseil du commerce et du développement (CCD) de la CNUCED, est intervenu depuis Genève pour présenter deux rapports, sur les travaux des deux sessions ordinaires du CCD de février et juin 2022, et sur le Pacte de Bridgetown et les résultats de la quinzième session de la CNUCED.  Il a rappelé le contexte de nombreuses crises et leurs conséquences, notamment les 1,7 milliard de personnes souffrant d’insécurité alimentaire ou énergétique et victimes de chocs financiers.  Il a dit que les perspectives de 2023 sont plus optimistes, avant d’appeler à identifier des solutions pouvant être mises en œuvre par tous.  Il a mentionné au passage les travaux intéressant à ce sujet du groupe de réaction aux crises.  Sur le sujet de la relance économique et de la résilience, il a parlé des investissements dans les ODD notamment, avec le prisme du financement durable.  Il s’agit de déterminer le coût de l’action, a-t-il expliqué.  M. Hasans a aussi relaté les discussions sur la résilience face aux changements climatiques et celles sur la relance en Afrique qui a entendu des appels à supprimer les obstacles tarifaires et non tarifaires.  Les échanges de données ont aussi été examinés: il faut des données fiables, a-t-il été observé, avec un souci de répartition juste.  Un rapport de la CNUCED est par ailleurs consacré au territoire palestinien occupé pour faire le point sur les obstacles au développement.

Mme SHARON SPIEGEL, Chef du Service de l’analyse et de l’élaboration des politiques au Bureau du financement du développement au Département des affaires économiques et sociales, a présenté trois rapports.  Le premier est le rapport du Secrétaire général sur le suivi et mise en œuvre des textes issus des Conférences internationales sur le financement du développement (A/77/223).  Le rapport porte sur les progrès accomplis depuis l’adoption, en 2015, du Programme d’action d’Addis-Abeba et des objectifs de développement durable.  Il passe en revue les difficultés à surmonter notamment les conséquences des changements rapides qui secouent le monde et propose des pistes d’action pour concrétiser les ambitions du Programme et les objectifs dans le nouveau contexte du financement du développement durable.

La croissance du produit intérieur brut (PIB) dans les économies en développement va diminuer et la croissance mondiale va se contracter, a déclaré Mme Spiegel.  La flambée des prix de l’énergie augmente les inégalités et l’un des défis réside dans le risque du flux de capitaux sortant des pays en développement, alors même que les taux d’intérêt augmentent.  Ainsi, plus de 20 pays en développement ont un taux d’intérêt de plus de 10%.  Un pays sur 5 cinq fait face à des problèmes fiscaux et de financement, tandis que de nombreux pays sont surendettés.  Tout n’est pas sombre, a tempéré Mme Spiegel, évoquant des accords sur la coopération fiscale et des avancées en matière de financement du développement.  Même si les APD ont atteint des niveaux historiques, ils ne sont pas à la hauteur des engagements nationaux, et les fonds ne sont pas toujours dirigés vers les pays parmi les plus vulnérables, a-t-elle relevé.  Selon elle, même s’il y a des solutions au niveau des pays, étant donné que la plupart des pays ne peuvent s’en sortir seuls, il faut une action multinationale. 

Mme Spiegel, a ensuite présenté le rapport du Secrétaire général intitulé Système financier international et développement (A/77/224).  Elle a observé que le système actuel n’a pas fluctué avec les évolutions du monde.  Depuis la dernière crise financière de 2008, le système financier international a été renforcé, mais des risques persistent.  De nombreux pays ont emprunté à des taux d’intérêt bas, mais avec les taux qui montent en ce moment, les risques de volatilité des marchés sont à craindre.  Sur la question des droits de tirage spéciaux (DTS) du FMI, elle a expliqué qu’ils doivent être orientés vers les pays ayant le plus besoin.  Mme Spiegel a souligné que, pour réaliser les ODD, il faut véritablement transformer le système financier international.  C’est dans cette optique que le Secrétaire général de l’ONU a plaidé pour un financement sur le long terme.  De même, le filet de sécurité financière mondial devrait être renforcé et adapté aux défis nouveaux, a-t-elle avancé, en ajoutant qu’il faut aussi réformer la gouvernance mondiale.

En ce qui concerne le rapport du Secrétaire général sur la coordination et coopération internationales visant à lutter contre les flux financiers illicites (A/77/304), il s’agit du premier rapport de ce type et il met en lumière les manières par lesquelles les États Membres peuvent respecter leur engagement d’éliminer à terme les flux financiers illicites, a précisé Mme Spiegel.  Le rapport souligne que le Groupe d’action financière (GAFI) a pris la décision, en mars 2022, de renforcer la norme de propriété relative aux personnes morales.  De ce fait, les pays engagés dans les normes du GAFI sont désormais tenus de s’assurer que les informations sur les bénéficiaires effectifs sont détenues par une autorité publique ou un organisme fonctionnant comme un registre des bénéficiaires effectifs.  La première enquête de données sur la rétrocession des actifs, depuis 2014, a révélé que 59 États ont déclaré avoir recouvré près de 10 milliards de dollars de produits de la corruption.  Ces fonds étaient gelés, bloqués ou confisqués depuis 2010.

Dans ce rapport, le Secrétaire général indique que, malgré les progrès, de nombreux défis subsistent dans la lutte contre les flux financiers illicites.  Des actions sont donc nécessaires dans trois grands domaines: une meilleure application des normes existantes; le renforcement des normes internationales pour combler les lacunes et répondre à l’évolution des risques; et l’amélioration des capacités nationales d’application.  La transparence doit être le fondement de ces efforts, précise le rapport.  Mais sans coordination politique, toutes les questions abordées par le rapport du Secrétaire général ne trouveraient pas de solution sur le long terme.

Mme STEPHANIE BLANKENBURG, Chef de la dette et du financement du développement à la Division de la mondialisation et des stratégies de développement de la CNUCED, a présenté le rapport du Secrétaire général sur la soutenabilité de la dette extérieure et du développement (A/77/206).

Le rapport indique que les crises mondiales en cascade ont des conséquences très négatives sur la viabilité de la dette extérieure des pays en développement.  Cela se traduit par des flux de capitaux négatifs nets vers les pays en développement, depuis fin 2021, des dépréciations généralisées des devises par rapport au dollar américain et une augmentation concomitante de la dette et des difficultés financières en 2022.  Ainsi, selon Mme Kristalina Georgieva du Fonds monétaire international (FMI) citée dans le rapport, à l’heure actuelle, environ 60% des pays à faible revenu et 30% des économies de marché émergentes présentent un risque élevé de surendettement ou sont déjà en situation de surendettement.  Cette situation extrêmement critique survient dans un contexte où les pays en développement sont confrontés, depuis de nombreuses années, à des pressions prolongées et croissantes sur la viabilité de leur dette extérieure.  Dans le même temps, le resserrement des politiques monétaires et budgétaires dans les économies avancées pousse l’économie mondiale au bord de la récession, ce qui compromet davantage les perspectives d’une reprise indispensable et d’une amélioration de la viabilité de la dette extérieure dans le monde en développement.

Le rapport appelle à un consensus politique en faveur d’un allégement de la dette plus substantiel, structurellement efficace et mis en œuvre de manière plus systématique.

Du point de vue de la prévention des crises de la dette, le rapport recommande en outre deux mesures principales.  Premièrement, l’établissement d’un registre accessible au public pour les données relatives à la dette des pays en développement, à la fois par les prêteurs et les emprunteurs, afin de renforcer la transparence de la dette au-delà de l’approche actuelle qui fait peser la charge, soit sur la divulgation volontaire par un groupe de prêteurs de plus en plus complexe, soit sur des améliorations indépendantes au niveau national par les emprunteurs.  Deuxièmement, l’utilisation du futur indice de vulnérabilité multidimensionnelle des Nations Unies pour l’allocation du financement du développement.  Cet indice devrait remplacer les critères obsolètes basés sur le revenu pour l’octroi de l’aide publique au développement (APD) et des financements concessionnels.  Il pourrait également jouer un rôle important dans l’intégration de la « multi-vulnérabilité » dans les instruments de prêts privés, afin de permettre une suspension temporaire des paiements de la dette en cas d’événements causant des dommages dépassant des seuils définis à l’avance.

Mme ANU PELTOLA, statisticienne senior à la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a présenté le rapport intitulé « SDG Pulse » et le rapport sur les flux financiers illicites 2022, conformément à la résolution A/RES/76/196.

La CNUCED et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) sont les garantes de l’indicateur 16.4.1 de l’ODD relatif aux flux financiers illicites (FFI) et, à la demande des États Membres, les deux agences ont développé des concepts et des méthodes pour mesurer différents types de flux financiers illicites.  En mars 2022, tous les États Membres ont adopté le Cadre conceptuel pour la mesure statistique des flux financiers illicites, ce qui offre une définition de ces flux faisant l’objet d’un accord international.

Partant, Mme Peltola a recommandé de renforcer les efforts de développement des capacités pour améliorer la capacité statistique à suivre les FFI et à concevoir des mesures plus efficaces pour les endiguer.  La CNUCED et l’ONUDC travaillent en ce sens avec les commissions régionales de l’ONU en Afrique et en Asie, et des études pilotes ont été menées en Amérique latine.  Celles-ci ont montré que les flux financiers illicites peuvent être mesurés à l’aide des méthodes et ressources existantes et Mme Peltola a invité les États Membres à s’en inspirer.

La capacité de mesurer ces flux permettra de les endiguer et donc de récupérer les actifs volés.  Il faut aussi mettre en place un profil de risque FFI par pays et travailler davantage à la question des échanges illicites, conformément au Pacte de Bridgeton.  Les échanges illicites ont, en effet, de forts effets négatifs sur les objectifs de développement durable, notamment parce qu’ils réduisent les recettes fiscales.

M. JAMES ZHAN, Directeur de l’investissement et des entreprises de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), a présenté aux États Membres les messages clefs du rapport de la CNUCED sur l’investissement mondial en 2022 (WIR 2022), qui comporte deux sections: l’une sur les tendances d’investissement dans le cadre des ODD et des changements climatiques, l’autre sur les marchés de capitaux et la finance durable.

En 2021, les flux mondiaux d’investissements étrangers directs (IED) se sont élevés à 1 580 milliards de dollars, soit une hausse de 64% par rapport au niveau exceptionnellement bas de 2020.  Le rebond a été significatif, notamment dans les fusions et acquisitions et dans le financement de projets internationaux, mais 2022 sera très différent, a prévenu M. Zhan, la guerre en Ukraine provoquant une triple crise: alimentaire, énergétique et financière.  L’incertitude des investisseurs exercera une forte pression à la baisse sur les flux d’IED en 2022, a prévenu l’expert.  La situation affectera également les investissements internationaux dans les secteurs liés aux ODD: si ceux-ci ont augmenté de 70% dans les pays en développement en 2021, 2022 laisse entrevoir un déclin.

À noter: la croissance en 2021 était principalement liée aux investissements dans les énergies renouvelables.  D’autres secteurs liés aux ODD -infrastructures, alimentation et agriculture, santé, eau et assainissement, et hygiène- n’ont connu qu’une reprise partielle comparé au creux de 2020.  D’autre part, les investissements privés internationaux liés au climat sont presque exclusivement destinés à « l’atténuation », seuls 5% allant à des projets « d’adaptation ».  Plus de 60% concernent les pays développés.

Concernant les marchés de capitaux et la finance durable, la CNUCED estime que la valeur des produits d’investissement ayant pour thème la « durabilité » sur les marchés financiers mondiaux a atteint 5 200 milliards de dollars en 2021, soit 63% de plus qu’en 2020.  Cela comprend les fonds durables (2 700 milliards de dollars), les obligations vertes (plus de 1 500 milliards de dollars), les obligations sociales (418 milliards de dollars), les obligations à durabilité mixte (408 milliards de dollars) et les obligations liées à la durabilité (105 milliards de dollars).  La plupart de ces fonds sont domiciliés dans des pays développés et ciblent les actifs des pays développés.  Les économies en développement sont largement contournées par le marché des fonds durables et des inquiétudes subsistent quant à « l’écoblanchiment » et à l’impact réel des produits d’investissement axés sur la durabilité, car les produits sont « auto-étiquetés ».  Il n’existe pas de normes cohérentes ni de données fiables pour évaluer leurs références en matière de durabilité, a analysé M. Zhan.

Si les gouvernements du monde entier intensifient leurs efforts pour développer des cadres réglementaires pour la finance durable (40% des réglementations en vigueur consacrées à la finance durable ont été introduites au cours des cinq dernières années), les lacunes politiques et réglementaires sont visibles dans trois secteurs: les taxonomies, les normes de produits et la tarification du carbone.  Plusieurs agences, telles que l’Organisation internationale des commissions de valeurs (OICV) et la Fondation des Normes internationales d’information financière (IFRS) mènent un effort mondial pour consolider les normes.

Le rapport examine aussi l’impact de l’éventuelle introduction d’un impôt minimum de 15% sur les bénéfices étrangers des plus grandes entreprises multinationales.  Pour M. Zhan, les économies développées et en développement devraient bénéficier considérablement de l’augmentation du recouvrement des recettes.  Dans le même temps, la taxe pourrait diminuer les flux d’IED d’environ 2% et rendre obsolètes de nombreux outils de promotion des investissements fondés sur la fiscalité.

La CNUCED recommande à la communauté internationale d’alléger les contraintes pesant sur les pays en développement, notamment les PMA, pour qu’ils tirent parti de la taxe, et propose trois pistes de réflexion: augmenter l’assistance technique aux pays en développement; supprimer les contraintes de mise en œuvre posées par les accords internationaux d’investissement et atténuer les risques relatifs au règlement des différends entre investisseurs et États; établir un mécanisme pour restituer les recettes complémentaires perçues par les pays d’origine - développés - qui auraient dû revenir aux pays d’accueil - en développement-, qu’ils n’ont pas pu percevoir en raison de contraintes de capacité ou de traités.

En ce qui concerne les marchés de capitaux et le financement durable, la CNUCED recommande de soutenir la transition des investissements durables d’une « niche » du marché en « norme » du marché; de consolider les normes, et de mettre un frein à l’autodésignation par les acteurs du qualificatif de finance durable.

Questions et réponses

Après la présentation des rapports, le représentant de l’Égypte a demandé des précisions sur l’impact qu’auront les défis du monde actuel sur la soutenabilité de la dette.  Mme Blankenburg, de la CNUCED, a dit que la dépréciation des monnaies des pays en développement vient augmenter le fardeau de la dette, ce qui rend difficile pour les États d’investir dans les programmes sociaux.  De même, l’inflation visible sur les marchés mondiaux a un impact sur le coût de la vie dans les pays en développement, ce qui a un effet direct sur leur croissance.  La conjointure mondiale actuelle a donc des conséquences délétères sur la soutenabilité de la dette, a-t-elle affirmé, ajoutant qu’il est urgent pour les États Membres de mettre en place un cadre multilatéral pour aborder la question.  Mme Blankenburg a également proposé que les droits de tirage spéciaux (DTS) soient redirigés vers les pays en développement ayant le plus besoin de fonds.

Comment investir pour la durabilité dans les pays en développement? a ensuite interrogé le délégué du Pakistan, suivi de son homologue du Malawi qui a voulu savoir comment améliorer la gouvernance financière mondiale.  Son collègue du Brésil a, pour sa part, demandé des commentaires sur les effets de la crise actuelle sur les échanges multilatéraux et sur les investissements étrangers directs.  Le délégué de l’Afrique du Sud a souhaité savoir quelles mesures peuvent être prises dans les pays en développement pour lutter contre l’inflation. 

Mme Shirotori, de la CNUCED, a souligné que le monde connaît un problème de chaînes d’approvisionnement, notamment dans les secteurs alimentaires et de l’énergie.  Cette préoccupation a débuté avec la pandémie de COVID-19, a-t-elle rappelé.  Étant donné qu’un seul gouvernement ne peut régler ce problème, il faut réfléchir à la manière d’agir au plan multilatéral, a-t-elle commenté.  Pour Mme Spiegel, du DESA, renforcer les investissements implique de réduire les risques et de solliciter le soutien des banques d’investissement.  Elle a indiqué, en réponse au Brésil sur les investissements directs étrangers, qu’il faut des normes internationales facilitant les investissements, tout en tenant compte du contexte des pays en développement.  M. Weber, de la CNUCED, a déclaré, en réponse au Pakistan, que des mécanismes d’investissement en faveur des ODD sont mis en œuvre par divers partenaires.  Il a notamment évoqué le travail de l’observatoire de la finance durable, ce dernier œuvrant à établir une plateforme d’investissement et de suivi sur le financement de la durabilité.

Discussion générale conjointe

M. MUHAMMAD IMRAN KHAN (Pakistan), au nom du Groupe des 77 et la Chine, a dénoncé les inégalités flagrantes de l’architecture du système financier international hérité de l’ère coloniale.  L’appui international aux pays en développement était déjà en-deçà des attentes avant la COVID-19, il l’est devenu encore davantage avec la flambée des matières premières, les ruptures de chaînes d’approvisionnement, et l’action des changements climatiques, a-t-il relevé.  Évoquant des défaillances systémiques de l’économie mondiale, l’orateur a appelé d’une part à ce que le plan de relance du Secrétaire général soit adopté avec, en particulier, la création de nouveaux DTS, et des progrès sur le plan de la finance concessionnelle.  D’autre part, la COP27 doit parvenir à mobiliser d’urgence au moins 100 milliards de dollars pour la lutte contre les changements climatiques, a-t-il demandé .  Le représentant a ensuite énuméré les autres axes d’action: revoir et adapter le rôle des agences de notations; mettre en place des mécanismes d’atténuation des risques climatiques; établir un régime fiscal juste, équitable.  L’orateur a aussi appelé à réformer le droit des échanges d’émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial.  Enfin, il a demandé d’assouplir les accords commerciaux et de lutter contre les mesures économiques incompatibles avec un système commercial multilatéral universel, réglementé, ouvert, transparent, prévisible, inclusif, non discriminatoire et équitable sous l’égide de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), M. TUMASIE BLAIR (Antigua-et-Barbuda), a fait observer que les conséquences économiques et sociales de la pandémie de COVID-19 pour les petits États sont les plus difficiles.  La baisse des taux de croissance en 2020 et 2021 a entamé leur capacité à mettre pleinement en œuvre les Orientations de Samoa, le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et l’Accord de Paris.  Malheureusement, la crise économique actuelle est loin d’être homogène et certains pays sont plus touchés que d’autres, avec peu d’outils à leur disposition pour y faire face, a-t-il relevé.  Les petits États insulaires en développement (PEID) sont dans une impasse, ont du mal à répondre aux besoins de leur population et, faute de marge budgétaire, ne peuvent plus payer le service de la dette.  Le représentant a rappelé que des solutions adaptées doivent être imaginées pour les PEID, qui se trouvent dos au mur.  Il a rejeté l’imposition de mesures coercitives unilatérales visant les pays en développement, arguant que cela les plonge davantage dans de grandes difficultés.  Il a souhaité la mise en place d’un indice multidimensionnel de la vulnérabilité et a espéré que des pistes pourront être explorées lors de la quatrième Conférence internationale pour les PEID et à la COP27.  Il a également encouragé la communauté internationale à réformer l’architecture financière internationale pour la rendre plus inclusive.

M. MOHAMMAD KURNIADI KOBA (Indonésie), s’exprimant au nom de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), a appelé à renforcer la solidarité pour mieux reconstruire et être résilient.  Tirant les leçons de la pandémie de COVID-19, les pays de l’ASEAN ont compris qu’ils ont plus que jamais besoin de solidarité, a-t-il dit, en indiquant, à cet égard, que l’ASEAN renforce la coopération avec ses partenaires et les organisations internationales pour relever les défis de la pandémie émergentes et de maladies infectieuses qui réapparaissent, ainsi que pour se préparer à d’autres futures situations de santé publique d’urgence.  C’est à ce titre que l’Association a mis en place le Centre de l’ASEAN pour les urgences de santé publique et les maladies émergentes.  Le délégué a indiqué que le taux de vaccination élevé dans la région de l’ASEAN a également été le facteur favorisant la croissance économique de la région qui, en dépit de la pandémie, a connu une croissance de 3,4% en 2021.  Avec une politique prudente et équilibrée pour répondre aux défis sanitaires et socioéconomiques, l’ASEAN est assez optimiste sur le fait que la dynamique de croissance va continuer jusqu’en 2022 et 2023, avec des prévisions de croissance de 5,0 et 5,2% respectivement.

Nous devons prêcher par l’exemple et renforcer le commerce international et le développement, a poursuivi le délégué, en soulignant que le maintien des marchés ouverts au commerce et à l’investissement renforce la résilience et la durabilité des chaînes d’approvisionnement régionales.  Il a mentionné, à cet effet, la mise sur pied, le 1er janvier 2022, du « partenariat économique régional global », la plus grande zone de libre-échange au monde qui englobe un tiers du marché mondial, générant 30% du PIB mondial, un quart des échanges de biens et services, et 32% des investissements étrangers directs au monde.  Nous avons besoin de mécanismes de financement plus innovants pour générer des financements pour le développement, a également suggéré le délégué qui a insisté pour un financement adéquat pour la reprise après la pandémie.  Dans ce cadre, l’ASEAN a lancé une trousse d’obligations pour fournir des conseils sur les principes et processus clefs d’émission d’obligations conformes aux normes des ODD.  Il s’agit, a—t-il expliqué, d’une initiative concrète de l’ASEAN afin de mobiliser davantage de capitaux privés pour financer les investissements des ODD qui produisent des résultats en termes de développement durable et accélèrent la reprise économique après l’impact de la pandémie.

Mme REGINA KUMASHE AONDONA (Nigéria), au nom du Groupe des États d’Afrique, a encouragé à la conclusion d’accords commerciaux pour améliorer la performance et la croissance de sa région.  Les investissements doivent être encouragés entre l’Afrique et ses partenaires, a-t-elle aussi plaidé.  Les capacités d’exportation étant encore trop limitées, l’oratrice a appelé à mettre en place de cadres commerciaux pour faire gagner à l’Afrique de nouveaux marchés.  Elle a également appelé à lutter contre la fracture numérique et à créer des zones économiques spéciales.

La représentante a prévenu que si une croissance de plus de 3% est prévue en 2022 en Afrique subsaharienne, il n’en reste pas moins que la dette de la plupart des pays d’Afrique s’alourdit, particulièrement dans les économies gourmandes en énergie.  De plus, les envois de fonds -les investissements directs étrangers- ont diminué, s’est-elle inquiétée, en qualifiant de « morose » le paysage général à cause de la pression inflationniste.  Les besoins financiers du continent africain sont estimés à entre 225 et plus de 420 milliards de dollars, tandis que les DTS s’élèvent eux à 33 milliards, a-t-elle aussi fait observer.  Elle en a conclu que les institutions internationales ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Au nom des pays en développement sans littoral (PDSL), Mme LORATO MOTSUMI (Botswana) a fait observer que face au risque de récession mondiale, les économies structurellement vulnérables sont les plus menacées.  Notant que la solidarité mondiale est devenue encore plus importante, la représentante a attiré l’attention sur les effets en cascade que les mesures prises par les pays développés pour combattre l’inflation peuvent avoir sur le reste du monde.  Elle a souligné plusieurs domaines dans lesquels les PDSL ont besoin d’un soutien accru pour affronter la tempête macro-économique mondiale: les niveaux d’APD doivent être relevés; la dette doit être restructurée et son service suspendu, sachant que neuf PDSL sont à risque de surendettement; des solutions innovantes doivent être trouvées face à des conditions macro-économiques extraordinaires.  Elle a aussi plaidé pour des mesures coordonnées en vue de promouvoir les investissements dans les PDSL, en particulier dans l’industrie et le secteur des services, et pour renforcer les partenariats en vue d’aider les PDSL à diversifier leur économie.  La crise actuelle donne l’occasion de jeter les bases d’une résilience économique à long terme si toutes les parties prenantes travaillent ensemble dans un esprit de solidarité, a-t-elle conclu.

M. STAN ODUMA SMITH (Bahamas), s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a constaté qu’en plus des urgences climatiques en cours, la CARICOM continue de faire face à des défis de développement tels que la petite taille des pays, leur dépendance aux importations et l’étroite base des ressources d’exportation.  Il a souligné que les pays en développement, en particulier les petits États insulaires en développement (PEID), n’ont pas les capacités monétaires, budgétaires et administratives pour répondre aux crises mondiales.  Un soutien multilatéral est donc nécessaire et crucial.  Il a donc réitéré son appel à la restructuration de l’architecture financière internationale, avant de plaider aussi pour un système axé sur le développement plutôt que sur la dette, car cela fournirait plus d’innovations et d’outils basés sur des solutions pour l’accès aux financements essentiels au développement.  Aucun pays ne devrait être contraint de choisir entre la préservation des vies et des moyens de subsistance, et le paiement des dettes extérieures en raison de l’augmentation de la dette à moyen terme, a-t-il estimé.  Il a insisté sur l’importance de la viabilité de la dette en tant qu’élément essentiel pour atteindre la stabilité macroéconomique et construire des économies.

Le délégué a ainsi plaidé pour un système financier international qui fournisse des liquidités là où elles sont les plus nécessaires.  De plus, il a proposé la formule « échanges de dettes pour financer la mise en œuvre des ODD », telle qu’élaborée par la Commission économique pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC).  De même, une augmentation des financements multilatéraux à travers les banques de développement permettrait aux pays d’accéder aux financements, a-t-il argué.  Il a appelé le FMI à rediriger les DTS non utilisés là où cela est le plus nécessaire, notamment par le biais d’un processus accéléré de réorientation et réallocation des DTS en faveur des pays en développement.  Sur le domaine commercial, le délégué a plaidé pour un accès aux marchés sans entrave pour les pays en développement, et l’application à leur égard d’un traitement spécial et différencié.

Au nom de 19 délégations membres du Groupe des amis pour la défense de la Charte des Nations Unies, M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a fait observer que le système mondial est, aujourd’hui, confronté à de graves déséquilibres macroéconomiques, à la volatilité des marchés financiers et marchés des matières premières, au pillage des ressources des nations en développement, ainsi qu’à la hausse accélérée des niveaux de pauvreté, de chômage et d’inégalités.  Selon le Groupe, ces réalités doivent mettre en évidence, « une fois pour toutes et sans plus attendre », la nécessité d’établir un nouvel ordre international, afin que l’objectif commun de parvenir à un ordre mondial juste, inclusif et équitable, où personne n’est laissé pour compte, devienne enfin une réalité.  En outre, a dénoncé le représentant, cette crise mondiale est aggravée par la promulgation et l’application illégales de mesures coercitives unilatérales, qui sont en violation flagrante des objectifs et principes fixés dans la Charte des Nations Unies et constituent une attaque délibérée au droit au développement de millions de personnes dans le monde entier.  Le Groupe a appelé à la levée complète, immédiate et inconditionnelle de ces mesures coercitives.

Observant que l’ordre international actuel favorise la dépendance des pays en développement aux produits de base, ce qui accroît leur vulnérabilité aux fluctuations de prix et cause des tensions sociales, le Groupe a lancé un appel non seulement au renforcement de la coopération et de la solidarité internationales, mais aussi à la promotion des investissements, en particulier dans les infrastructures, à l’amélioration des capacités productives, au financement du développement et à l’accès aux technologies.  Il a suggéré aux institutions financières internationales de créer les conditions permettant un meilleur accès au financement à des conditions favorables et sans aucune forme de politisation.  La coopération, qu’elle soit Sud-Sud, Nord-Sud ou triangulaire, devrait être guidée par les principes de respect de la souveraineté nationale, d’inconditionnalité et de non-ingérence, a insisté le représentant.  Il y a ajouté le principe de responsabilités communes mais différenciées ainsi que celui de traitement spécial et différencié pour les pays en développement.  Quant à la soutenabilité de la dette, il a observé avec préoccupation que de plus en plus de pays sont confrontés à de graves difficultés face au service de la dette.

Mme AGNES MARY CHIMBIRI MOLANDE (Malawi), au nom du Groupe des pays les moins avancés (PMA), a déclaré, concernant le commerce international, que malgré les engagements internationaux visant à doubler la part des exportations mondiales des PMA d’ici à 2020, celle-ci demeurait inférieure à 1%, soit à peu près le même niveau qu’en 2011.  Leur secteur des exportations est confronté à un revers majeur en raison de la pandémie et de la guerre en Ukraine, a-t-elle expliqué, avant de parler du déficit commercial des PMA, qui a atteint 84 milliards de dollars en 2021, soit environ 7% de leur PIB.  La bonne nouvelle est que le Programme d’action de Doha pour les PMA a redéfini l’objectif de doubler les exportations de ces pays et fixe un objectif clair: doubler l’aide au commerce destinée aux PMA.

La déléguée a ensuite fait observer que les PMA sont victimes de la faiblesse de l’architecture financière mondiale.  Le coût élevé des emprunts limite leur accès à des financements supplémentaires: alors que le coût moyen des intérêts pour les pays développés est d’environ 1%, les PMA paient environ 8%.  Elle a prôné une approche à multiples facettes, notamment un meilleur accès aux finances publiques internationales et l’amélioration des conditions de financement du marché.  La déléguée a aussi donné des chiffres sur la dette publique des PMA, passée de 45 à 57% du PIB entre 2015 et 2021, avec un service de la dette en augmentation de 27%.  En conséquence, les PMA consacrent en moyenne 14% de leurs recettes intérieures au paiement des intérêts, contre les 3,5% pour les pays développés en moyenne, malgré une dette bien supérieure.  L’oratrice a dès lors réclamé de toute urgence un nouveau cycle de mesures globales d’allégement de la dette.  Avant de conclure, elle a appelé que les pays développés doivent tenir leur promesse de fournir 100 milliards de dollars de financement annuel pour le climat, la moitié de cette somme devant être allouée à l’adaptation, et la moitié du financement de l’adaptation devant être canalisée vers les PMA et les autres pays vulnérables.  Un mécanisme de financement des pertes et dommages doit être créé pour compenser les impacts des changements climatiques, a-t-elle ajouté.  Elle a enfin appelé la communauté internationale à mettre en place un mécanisme au sein du FMI pour réaffecter les DTS inutilisés à hauteur de 250 milliards de dollars aux PMA, afin de leur fournir des liquidités supplémentaires urgentes.

Mme MANUELA RÍOS SERNA (Colombie), s’est exprimée au nom du Groupe de pays de même sensibilité pour la promotion des pays à revenu intermédiaire.  Pour le Groupe, un pas dans la bonne direction pour faciliter l’accès à la coopération au développement serait de tenir compte des vulnérabilités multidimensionnelles, de la pauvreté multidimensionnelle, des lacunes structurelles et des défis environnementaux.  Ces critères pourraient permettre de changer de paradigme, a-t-elle estimé.  Ainsi, les institutions financières internationales, les banques multilatérales de développement et les partenaires au développement doivent tous s’entendre sur la nécessité de cesser d’utiliser le revenu par habitant comme seul critère pour allouer leurs ressources financières aux États, a émis de ses vœux la déléguée.  Elle a salué, à cet égard, les travaux menés par le Groupe d’experts de haut niveau sur l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle.  Elle a toutefois précisé que l’indice ne suffira pas à combler les vides dans la gouvernance des institutions mondiales dans le cadre de l’accès aux financements concessionnels et non concessionnels et à la coopération technique.  Enfin, le Groupe a considéré que la tenue d’une quatrième conférence internationale sur le financement du développement serait dans l’intérêt de tous les pays en développement.

M. ALAN EBUN GEORGE (Sierra Leone) a constaté que la pandémie de COVID-19 a touché le monde plus gravement que les crises précédentes et a entraîné un ralentissement des progrès vers les ODD, en particulier dans les PMA d’Afrique.  Il a signalé que la croissance du PIB à court et à moyen terme devrait vraisemblablement retomber dans les pays en développement aux niveaux d’avant la pandémie.  Les perturbations liées à la pandémie et aux conflits aggravent les pertes et les inégalités, a encore regretté le représentant, en réclamant des actions à mener d’urgence au niveau mondial.

La Sierra Leone a enregistré moins de cas et de décès de COVID-19 que d’autres pays, mais son économie a été touchée de plein fouet, a reconnu le délégué, qui a rendu hommage aux partenaires de développement grâce auxquels le Gouvernement a pu maintenir le pays à flot, se concentrant sur la mobilisation des recettes dans le cadre d’un plan destiné à la résilience.  Le représentant a jugé urgent de mener des actions transformatrices pour se relever des conséquences économiques de la pandémie.

M. AHMED MAGDY MOHAMED RASHAD ABDELAAL (Égypte) a souligné que les pays en développement peinent, depuis deux ans, à se relever des conséquences de la pandémie.  L’Égypte s’est engagée à réaliser le développement durable au travers de sa stratégie Égypte 2030 et insiste sur l’importance de l’amélioration des investissements dans des secteurs essentiels pour la réalisation des ODD.  Le représentant a plaidé pour des solutions innovantes et des partenariats public-privé.  Il a en outre jugé essentiel de parvenir à un système commercial international ouvert, transparent et inclusif.  Le représentant a fait remarquer que l’envol des prix des produits de base exerce de fortes pressions sur les pays en développement, d’où un risque accru pour l’insécurité alimentaire.  Il a demandé aux partenaires de développement d’alléger la charge de la dette, en plus de procéder aux réformes nécessaires de l’architecture de la dette et de prendre des mesures urgentes pour remédier aux problèmes de liquidités.  En attendant, l’Égypte s’efforce de diversifier ses sources d’investissement, a-t-il fait valoir.

Mme WASMIAH ALDHIDAH (Qatar) a évoqué les crises actuelles en soulignant que les PMA sont les plus touchés, raison pour laquelle le Programme d’action de Doha a une grande valeur, selon lui.  Le Qatar, a-t-elle témoigné, n’a pas relâché ses efforts pour le développement durable et a fourni des ressources et un financement adéquat, notamment par le fonds pour le développement du Qatar.  En 2021, ce fonds a déboursé plus de 551 millions de dollars pour le financement du développement et l’aide humanitaire.  Conscient de l’importance d’accélérer le travail collectif pour faire face à la crise climatique, le Qatar a fourni une aide aux PEID et aux PDSL, entre autres contributions, a encore indiqué la déléguée.  Elle a aussi parlé de la participation du Qatar aux efforts de partenariat, expliquant qu’elle n’est pas nouvelle.  La représentante a insisté sur le fait que son pays restera engagé dans la progression vers la mise en œuvre du Programme 2030.

M. LOUISMONGKOL SAPKUL (Thaïlande) a dit que, face aux crises complexes du monde notamment dans le domaine commercial, il faut améliorer la connectivité et les chaînes d’approvisionnement et préserver un environnement ouvert.  Le représentant a encouragé la mise en place d’un système commercial numérisé transfrontière et l’alignement du commerce international avec l’économie verte.  S’agissant du financement du développement, il a appuyé la déclaration du Secrétaire général et de la CNUCED appelant à la réforme du système financier international afin de combler l’écart entre les pays du Nord et du Sud.  Il a apporté son appui à l’idée de créer une plateforme pour porter la voix des pays en développement au sein du G20.  Pour ce qui est de la fiscalité internationale, le délégué a exigé que les géants mondiaux de la technologie paient leur part.  Il a cité le Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement, qui doit rester la boussole, appelant à décaisser davantage de crédits pour les pays en développement, à concrétiser les autres promesses de financement et à favoriser l’économie bio-circulaire et verte.

M. JESWUNI ABUDU-BIRRESBORN (Ghana) a encouragé le développement du commerce pour faire face aux conséquences de la pandémie et de la crise actuelle en Ukraine.  Il a dit être préoccupé par les restrictions des échanges internationaux à cause précisément du conflit en Ukraine qui met à mal l’offre de marchandises dans le monde.  Il a souligné l’importance pour l’Afrique de diversifier son économie et ses échanges dans le cadre de la création de la Zone de libre-échange continentale africaine.  Toutefois, le représentant a regretté le manque de volonté politique pour passer de la parole aux actes et actions.  En matière d’endettement, il a recommandé de soulager les pressions pesant sur les pays africains par le biais de la réforme du système financier international.  Il a demandé de l’aligner sur les ODD.

Pour M. TAPIWA ROY RUPENDE (Zimbabwe), l’objectif est une croissance qui améliore la vie et les moyens de subsistance des populations.  Si les défis actuels sont des défis de court terme qui doivent être résolus, il faut surtout s’attaquer aux défis de long terme comme la pauvreté, a-t-il conseillé.  À cet égard, il a demandé de mettre au premier plan les voix des pays africains et des pays en développement sans littoral, en les plaçant au cœur des travaux de cette Commission.  Le représentant a appelé à redynamiser et réformer le commerce mondial avant de dénoncer les sanctions internationales contre son pays, qui empêchent les populations de bénéficier du droit au développement.  Il faut un système international financier et commercial stable et inclusif, a encore plaidé le délégué, qui a aussi insisté sur l’importance de maintenir la soutenabilité de la dette et de respecter l’engagement de consacrer 0,7% du PIB à l’APD.

M. NIRUPAM DEV NATH (Bangladesh) a relevé que le système de financement n’est pas aligné avec les ODD et s’est révélé incapable de faire face à des chocs mondiaux tels que la pandémie.  Il a réclamé des réformes pour un accès à des financements abordables et de long terme.  Il a souhaité lancer une discussion globale sur ce point, y compris lors de la prochaine Conférence sur le financement et au-delà.  De nombreux pays risquent de faire face, ou font déjà face, au surendettement, a-t-il mis en garde.  Il a voulu insister sur l’importance de mesures globales pour alléger la dette et répondre aux besoins très spécifiques des pays les plus vulnérables.  Personne ne devrait être laissé pour compte en termes de vaccin, de financement ou de nouvelles technologies, a-t-il lancé.  Il faut, selon lui, des sommes très importantes avec des taux d’intérêt très bas pour faire face à cette crise.  Or, la réaction des pays développés n’a pas du tout été à la hauteur, a déploré l’orateur.

Selon Mme REGINA KUMASHE AONDONA (Nigéria), il est absolument nécessaire de faciliter l’accès aux ressources financières pour les pays en développement, de lutter contre les flux financiers illicites et de réformer le système fiscal international.  La représentante a dénoncé les « abus fiscaux des grandes multinationales ».  Elle a salué un rapport du Secrétaire général dans lequel on peut lire que les normes fiscales devraient être renforcées et devraient prendre en compte les évolutions engendrées par les nouvelles technologies pour soulager les efforts des pays en développement.  La déléguée a aussi appelé à élaborer une convention mondiale sur les impôts.

Mme PATRICIA CHAND (Fidji) a axé son intervention sur la menace existentielle des changements climatiques, en appelant à des actions et à des mobilisations, ainsi qu’au respect de la promesse des pays développés de consacrer 100 milliards de dollars, par an, à la lutte contre les changements climatiques.  Elle a aussi appelé à un changement fondamental dans l’architecture financière mondiale, évoquant le Programme d’action d’Addis-Abeba ainsi que les Orientations de Samoa comme feuille de route pour réorienter ladite architecture.

M. WALTER JOSÉ MIRA RAMIREZ (El Salvador) a constaté que, bien que les pays à revenu intermédiaire représentent 75% de la population mondiale, les fonds multilatéraux pour le développement leur sont refusés.  Il faut donc revoir l’architecture financière internationale afin de la rendre plus juste, a-t-il proposé.  Il a indiqué qu’El Salvador a pris des mesures pour attirer les financements étrangers, assurant également un meilleur rendement de son administration fiscale.  Le délégué a expliqué que le pays entend également améliorer le bien-être de sa population, à travers des programmes sociaux, mais que les fonds pour le financement du développement manquent cruellement.  D’où le besoin de réforme de l’architecture y relative, a-t-il conclu.

Mme AUDREY FAY GANTANA (Namibie) a déploré le fait qu’il n’y ait toujours pas de forum pour la collaboration fiscale au niveau international.  Qu’à cela ne tienne, la Namibie a mis en place des structures pour rendre plus efficace son administration fiscale, même si l’espace fiscal national apparaît restreint, a expliqué la déléguée.  Elle a plaidé de manière générale pour un système international plus juste et transparent.  Enfin, la représentante a plaidé pour la fin des mesures coercitives qui frappent des pays comme Cuba et le Zimbabwe.

M. SEYDOU SINKA (Burkina Faso) a égrené le chapelet des blocages au décollage économique du Burkina Faso, dont la dette qui s’élève à 11 milliards de dollars.  Avec une situation sécuritaire sensible depuis sept ans, notamment du fait des actes commis par des terroristes, il a indiqué que la conjoncture nationale a conduit à la mise en place d’un Gouvernement de transition qui travaille en coordination avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).  Il a terminé son propos en appelant tous les partenaires de bonne volonté à accompagner la transition au Burkina Faso.

M. NEBIYU TEDLA NEGASH (Éthiopie) a relevé les progrès inégaux dans la réalisation des ODD, les pays les plus pauvres et les plus vulnérables étant les plus touchés par les crises actuelles.  De nombreux pays ont vu une forte diminution de leur PIB et une augmentation de la pauvreté, a-t-il noté.  Le représentant a dit apprécier les initiatives pour améliorer la mise en œuvre du Programme d’action d’Addis-Abeba et pour l’allègement de la dette ainsi que l’allocation de DTS.  Il en a appelé à des engagements politiques renouvelés et à un multilatéralisme revitalisé.  Le secteur privé doit également être sollicité pour mobiliser des ressources, a-t-il revendiqué.  Le représentant a en outre jugé important d’élaborer des politiques coordonnées face à l’augmentation des vulnérabilités financières des pays en développement.

M. DIEGO BELEVÁN (Pérou) a attiré l’attention sur les risques insidieux liés à la pollution environnementale et à cette quête du gain à court terme.  Il a suggéré de développer de nouveaux instruments de mesure de la crise liés au développement et de tirer parti de la crise pour réorienter les entreprises vers un environnement plus favorable au développement durable.  De par leur nature, les marchés publics peuvent modifier la conduite du secteur privé et de la société civile, a estimé le représentant.  Sans méthodes de financement, il ne sera pas possible de combler les fractures entre les pays, notamment par rapport aux changements climatiques, a-t-il poursuivi.  Pour lui, la façon de produire des biens et services, des denrées alimentaires, ou encore de se déplacer, doivent être prises en compte, car le financement du développement n’est pas un concept mais doit tenir compte des évolutions dans les pays.

Mme GUO JINGNAN (Chine) a évoqué les risques accrus auxquels sont confrontés les pays en développement et a suggéré d’améliorer la coordination des politiques macroéconomiques, avec des politiques fiscales et monétaires plus dynamiques pour éviter, par exemple, les fluctuations des taux de change.  En outre, les pays développés devraient respecter leurs engagements en matière d’APD et de financement du risque climatique, a poursuivi la représentante.  Il est important, selon elle, de tenir compte des préoccupations des pays en développement dans la gouvernance économique internationale et de leur laisser davantage de place.  La Chine a toujours aidé les pays en développement en vertu de la coopération Sud-Sud, a-t-elle rappelé, en citant par exemple les cas de suspension des paiements de la dette.

M. JOAQUÍN ALBERTO PÉREZ AYESTARÁN (Venezuela) a rappelé que son pays est soumis à 913 sanctions économiques et financières des États-Unis et de l’Union européenne, qui lui ont coûté des pertes de 150 milliards de dollars.  En outre, 30 tonnes d’or du Venezuela déposées à la banque d’Angleterre sont séquestrées, empêchant le pays de s’approvisionner en médicaments et de faire fonctionner ses hôpitaux et ses réseaux informatiques, a dénoncé le représentant.  Il a cependant assuré qu’en dépit de cette situation, l’économie de Venezuela présente des signes de relèvement et prend le chemin du développement durable.

M. BANDAR KHALIL (Arabie saoudite) a insisté sur le rôle de l’ONU et de la coopération internationale pour soutenir les efforts de développement durable.  Le Gouvernement saoudien soutient en ce sens les activités économiques nationales et internationales, a annoncé le représentant qui a aussi assuré que son pays a pris des mesures pour stabiliser le marché du pétrole.  Il a  mentionné la mise en place d’un système financier qui a permis de juguler les conséquences de la pandémie de COVID-19, d’améliorer les recettes fiscales et la gestion de la dette ainsi que la lutte contre les flux financiers illicites et le retour des avoirs.  Le représentant a mis l’accent sur la lutte contre la corruption afin de réaliser les ODD.  Il a vanté les mérites de l’Initiative Riyad qui sert de plateforme d’échanges d’informations mondiale et de lutte contre la corruption.  Il a aussi signalé le programme élaboré pour stimuler les investissements étrangers dans le pays.  Le délégué a promis la poursuite de l’appui de l’Arabie saoudite aux pays en développement et aux organisations internationales et régionales pour une croissance économique mondiale inclusive.

Mme MERYEM HAMDOUNI (Maroc) a dit qu’il n’y aura pas de relèvement mondial sans un système financier international qui soutient les ODD.  Faisant référence à l’idée du Secrétaire général de lancer un plan de soutien au développement durable des pays en développement, la représentante s’y est montrée favorable.  Elle a appelé à la réforme du système financier international et demandé de résoudre la question de l’endettement, en particulier des pays d’Afrique.  La déléguée a rappelé en outre la Déclaration de Marrakech qui demande aux institutions de Bretton Wood de faciliter l’endettement des pays africains par le lancement de droits de tirage spécifiques et l’augmentation de l’APD.  Elle a plaidé pour une approche inclusive de l’accès aux financements et pour l’utilisation de nouveaux critères de financement, autres que ceux liés au PIB.  Elle a enfin encouragé les investissements directs privés et étrangers ainsi que le financement climatique pour l’adaptation, en faveur des pays africains et des pays en développement.

Pour le représentant de l’Iraq, il est impossible d’éliminer la pauvreté sans soulager la pression pesant sur les gouvernements des pays en développement: ceux-ci doivent être soutenus, aidés, pour renforcer leur économie locale et leur résilience.  Le commerce international est un moteur du développement économique, a souligné l’orateur, qui a insisté sur la nécessité d’un système commercial international juste, équitable, ouvert aux exportations de pays en développement.  Il a fait remarquer que ces derniers n’ont pas bénéficié d’une reprise post-COVID aussi florissante que les pays développés.  Le délégué a aussi appelé à un système financier stable efficace, souple, avec une architecture remaniée.

M. HUSSAIN AZHAAN MOHAMED HUSSAIN (Maldives) a réclamé le soutien de la communauté internationale pour la sécurité énergétique et alimentaire de son pays.  Il a appelé à la mise en œuvre du Programme d’action d’Addis-Abeba.  L’augmentation des DTS n’est pas suffisante, il faut aussi réduire les coûts d’emprunts des pays en développement, a-t-il réclamé, en demandant de mettre en place un système d’obligations durables ainsi que des instruments reflétant mieux la situation des pays en développement.  De plus, le délégué a appelé à revoir l’architecture financière internationale afin de la rendre plus inclusive.  Les critères pour obtenir l’APD ne tiennent pas compte des vulnérabilités systémiques, c’est pourquoi les Maldives se positionnent en faveur de la mise en place de l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle, a-t-il dit.  Il a expliqué les difficultés que rencontrent les pays en développement pour exporter leur production en citant un exemple national: les taxes sur les exportations de thon maldivien, un important secteur de l’industrie de l’archipel, grèvent la bonne santé de cette industrie

M. PEDRO LUIS PEDROSO CUESTA (Cuba) a déclaré que son pays avait donné la priorité au secteur de la santé et à la protection sociale malgré la contraction de son budget . Il a regretté qu’il faille rappeler chaque année aux pays développés leurs promesses concernant l’APD alors que certains de ces pays dépensent des milliards de dollars en dépenses militaires.  Il a réclamé des progrès en termes de renforcement des capacités et de transfert des technologies, dans un système financier international ne faisant jusqu’alors qu’exacerber les inégalités entre pays.  Les pays en développement doivent aussi participer davantage aux réflexions et aux décisions sur les mécanismes de gouvernance économique mondiale, selon le délégué cubain.

M. BORIS MESCHCHANOV (Fédération de Russie) a relevé que les actions pour renforcer le dollar peuvent avoir des effets délétères dans les pays en développement, comme la fuite des capitaux.  Il a donc appelé à créer un filet de sécurité pour les pays en développement.  Il a également demandé de renforcer le système de notation des banques.  Pour remettre le développement durable sur la voie, il faut faire tomber toutes les barrières, parfois politiques, mises en place pour favoriser certains États, a-t-il dit.  Il a aussi plaidé pour un soutien aux accords régionaux, afin de permettre aux États d’être plus solides face aux chocs externes.  Le retour des fonds illicites est également important, a indiqué le représentant qui a appelé à la tenue de la quatrième Conférence internationale sur le financement du développement.

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a estimé que le financement mobilisé pour le développement a sauvé d’innombrables vies à travers le monde.  Au Myanmar, le Gouvernement civil élu en 2016 a proposé des politiques afin de relancer l’économie, a-t-il indiqué.  « Malheureusement, il a été renversé et cela a provoqué d’énormes problèmes socioéconomiques. »  Aujourd’hui, environ 40% de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, a expliqué le représentant.  Selon lui, les défis actuels laissent voir l’incapacité des autorités militaires à gouverner le pays.  Ce n’est que lorsque la dictature militaire sera mise de côté que la vie de la population sera améliorée, a-t-il estimé, prédisant que ce n’est qu’à ce moment-là que le pays pourra mettre en œuvre les ODD.  Il a enfin demandé à la communauté internationale d’offrir un soutien actif à la population du Myanmar.

Mme SOMOLY HENG (Cambodge) a indiqué que les autorités du pays entendent renforcer la diversification de l’économie nationale.  Le Cambodge a augmenté les échanges avec ses partenaires, ce qui a induit la création d’emplois, a-t-elle indiqué. Elle a également signalé que le pays s’est tourné vers l’économie verte.  Le Cambodge entend réduire le fossé numérique, a aussi promis la déléguée.  Elle a ensuite indiqué que le Premier Ministre du Cambodge a lancé un nouveau « Green deal » en faveur d’une économie respectueuse des principes de durabilité.  La déléguée a conclu son intervention en appelant la communauté internationale à sécuriser des ressources durables pour réaliser les ODD, « si jamais nous souhaitons y parvenir d’ici à 2030 ».

M. FAIZAH RAZALI (Malaisie) s’est félicité des signes de reprise au niveau mondial, mais a observé que les progrès sont très inégaux entre pays développés et pays en développement.  Il s’est dit prêt à relayer l’appel du G20 à soutenir les engagements volontaires au titre des DTS.  Il a réitéré la nécessité de réformer l’architecture financière internationale pour avoir un système plus équitable et plus juste et s’est dit persuadé que les mesures coercitives unilatérales nuisent au développement.  Le représentant a plaidé pour l’amélioration du système des échanges internationaux, estimant que les pratiques actuelles sont discriminatoires.  Le bien-être de la population a toujours été au cœur du développement de la Malaisie, a-t-il assuré, en attirant l’attention sur le douzième Plan national de développement qui se concentre sur la réalisation des ODD.

Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a fait observer que le volume des échanges a à peine augmenté de 4% dans les pays en développement, contre 13% au niveau mondial.  Elle a jugé indispensable de revoir le système financier international, en y appliquant les principes de prévention, de préparation et de réaction.  Des cadres qui tiennent compte des aspects multidimensionnels du Programme d’action d’Addis-Abeba sont par ailleurs nécessaires aux futurs choix économiques et financiers, a-t-elle ajouté.  En ce sens, l’indice de développement multidimensionnel devrait être un outil essentiel qui permettrait d’établir un tableau très précis des besoins de chaque pays, a estimé la représentante.  Elle a souligné que les économies en développement sont obligées de faire un choix entre la mise en œuvre des ODD et le remboursement de la dette.  Il est de notre devoir moral, a-t-elle martelé, de répondre aux besoins des pays les plus vulnérables pour parvenir au développement durable.  Il est de notre responsabilité, a-t-elle aussi déclaré, de rendre plus verts les flux financiers internationaux, publics ou privés.

M. HOAI LE THANH (Viet Nam) a insisté sur le fait que le développement durable est impossible sans financements adéquats.  Il a recommandé de réformer la structure financière internationale pour la rendre plus inclusive et plus viable.  Il a aussi recommandé d’impliquer davantage les pays en développement dans les institutions concernés.  Il a exhorté le Groupe de travail à mettre la dernière main à la mise au point de l’indice de développement multidimensionnel et insisté sur les difficultés particulières des pays à revenu intermédiaire, qui devraient bénéficier d’une aide adéquate.

M. TEODORO SANTIAGO DURÁN MEDINA (Équateur) a noté la grande instabilité économique et sociale qui sévit partout dans le monde laquelle nécessite une action rapide, en particulier la crise de la dette dans laquelle pataugent de nombreux pays en développement.  Il faut aussi, a poursuivi le représentant, s’attaquer à l’augmentation du coût de l’énergie et de denrées alimentaires.  Il a demandé aux pays développés de respecter leur engagement, s’agissant de l’aide publique au développement (APD) et d’écouter, à cet égard, les préoccupations des pays à revenu intermédiaire.  Il faut, a ensuite martelé le représentant, promouvoir un commerce international ouvert, transparent et non discriminatoire dans le cadre de l’OMC.  Aux gouvernements des pays en développement, il a conseillé la diversification de leur économie et une réforme budgétaire pour jeter les bases d’un bon redressement.

M. MAHAMAN MOUSSA (Niger) a indiqué que son gouvernement s’efforce de dynamiser l’économie, en améliorant la gouvernance économique et fiscale, ce qui a conduit à un de taux de croissance de 4,8%.  Le Gouvernement s’est doté d’organismes chargés de réaliser les ODD et d’un Plan de développement socioéconomique axé sur le capital humain, la gouvernance et la sécurité.  Le Gouvernement organisera, au mois de décembre, une table ronde des partenaires pour lever des financements nécessaires au développement socioéconomique.

Mme THERESAH C. LUSWILI CHANDA (Zambie) a exigé un marché international délesté des distorsions commerciales qui joutent au détriment des pays en développement, en particulier les marchés agricoles.  Les pays les moins avancés (PMA) doivent pouvoir exporter leurs produits, a-t-elle insisté.  Elle a aussi estimé que la gouvernance du système financier international doit être réformée, afin de donner leur place aux pays en développement.  Elle a insisté sur le rôle des banques de développement, la gestion des risques, et la viabilité de la dette, avant de souligner que son gouvernement s’efforce de restructurer la dette nationale afin de rétablir l’équilibre macroéconomique et promouvoir la croissance économique et le développement.  Elle a conclu, en attirant l’attention sur l’importance qu’il y a à s’attaquer aux racines des flux financiers illicites et de l’évasion fiscale.

M. TONY OWEKE (Kenya) a déploré le fait que le stock de la dette des pays à revenu intermédiaire atteint plus de 9 000 milliards de dollars.  Face à l’ampleur du problème, il a appelé à ne pas se contenter d’en traiter les symptômes.  Il a aussi appelé à l’élargissement des critères d’éligibilité pour les États faisant une demande de fonds de développement.  Il faut utiliser l’indice de vulnérabilité multidimensionnelle comme principal critère d’accès aux prêts concessionnels, a-t-il en outre recommandé.  Il a enfin appelé à la réforme le travail des agences de notation.

Mme NELLY BANAKEN ELEL (Cameroun) a rappelé que le commerce international est un puissant levier de développement.  De ce fait, le Cameroun demande la levée de tous les blocages au bon fonctionnement de l’OMC ainsi que la levée des barrières protectionnistes.  La représentante a aussi estimé urgent de réformer le système financier international, afin que les ressources dédiées au développement durable soient augmentées.  Elle a plaidé pour des mesures d’annulation de la dette.  De même, elle a constaté que la corruption coûte aux économies africaines « la bagatelle de 150 milliards de dollars par an ».  D’où, l’importance de lutter contre les flux financiers illicites et de militer pour le retour des fonds détournés.  La représentante a, enfin, demandé de « rendre nos actes concordants avec nos discours »: « Quelle légitimité aurions-nous de prôner l’autonomisation de la femme si nous ne sommes pas prêts à payer le juste prix du travail des femmes africaines dans les champs? »

M. RODOLFO RETA (Mexique) a plaidé pour que l’indice de vulnérabilité multidimensionnel soit utilisé pour conditionner l’accès des pays en développement aux fonds de développement.  Le système financier international doit s’adapter, a-t-il plaidé, en demandant que ce dernier se tourne davantage vers le financement de l’action climatique.  Aucun effort pour réaliser les ODD ne peut aboutir sans l’implication du secteur privé qui est un partenaire important aux côtés du secteur public, a-t-il ajouté.  Le délégué a dit par ailleurs que son pays est en train d’élaborer un projet relatif à la lutte contre le blanchiment d’argent et la lutte contre le terrorisme.  Il a enfin appelé à la réforme urgente du système financier international, se disant ouvert à l’idée d’organiser la quatrième Conférence internationale sur le financement du développement.

Mme RAFEA ARIF (Norvège) a noté que le financement pour le développement est sous pression et a souhaité une vision politique ambitieuse pour y faire face.  La Norvège va continuer, pour sa part, à être l’un des contributeurs à l’APD, a-t-elle promis.  La représentante a aussi demandé d’accélérer les progrès dans l’autonomisation des femmes.  Quant au sujet des flux financiers illicites, elle a insisté sur la question de la responsabilisation.

Mme NOOSHIN TEYMOURPOUR (République islamique d’Iran) a dit que le coronavirus a augmenté et aggravé les inégalités au sein et entre les pays, en particulier en raison de ses impacts sur l’économie et le commerce mondial.  Si la communauté internationale n’agit pas efficacement pour l’élimination totale des maladies, dont la pire est l’unilatéralisme, la situation sera encore pire, a averti la représentante.  Elle a dénoncé les politiques unilatérales qui remettent en question les systèmes d’échanges, prenant en otage le développement de certains pays.  Notant que les pays développés devraient respecter leurs engagements d’APD, la représentante a prévenu que, pour dépasser les fragilités et les défis d’aujourd’hui, il faut plus d’action et moins de discussion.

Mme ALENA KAVALEUSKAYA (Bélarus) a défendu un commerce ouvert, inclusif et fonctionnant selon des règles non discriminatoires.  Elle a dénoncé les mesures coercitives unilatérales qui ne respectent pas la Charte des Nations Unies et limitent le développement des pays qui en sont la cible.  Évoquant la coopération régionale, elle a assuré que le Bélarus collabore de manière active avec ses partenaires d’Asie centrale.  Elle a souhaité également le renforcement de la coopération internationale.

M. THOMAS STELZER, de l’Académie internationale de lutte contre la corruption, a insisté sur l’importance de lutter contre les flux de financiers illicites et de restituer les biens volés pour éliminer la pauvreté.  Il a dénoncé la corruption des fonctionnaires, la faiblesse des structures de contrôle et la vulnérabilité des systèmes internationaux surtout dans les pays et territoires qui n’ont pas de politiques efficaces contre la corruption ou le blanchiment d’argent, alors que les nouvelles technologies et les méthodes de paiement alternatif contribuent à ce fléau.  L’Académie, a dit le représentant, aide les États par la formation, la recherche et la sensibilisation.  Il a estimé que la mise en place de cadres national et international est essentielle pour protéger les systèmes financiers internationaux.  Il a recommandé la mise en place d’un mécanisme de coordination pour assurer l’intégrité financière dans les pays intéressés.

M. RALF BREDEL de l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI), a préconisé de renforcer les capacités des pays en développement pour qu’ils soient compétitifs et puissent pénétrer les marchés internationaux.  L’investissement, le commerce et l’industrialisation sont des moteurs du développement durable, à condition qu’ils soient justes et viables.  Dans les pays en développement, l’adoption de lois sur les chaînes d’approvisionnement qui permettent de respecter les impératifs écologiques et autres normes essentielles est une bonne étape, mais elle doit être soutenue par d’autres actions pour assurer une meilleure compétitivité et l’accès aux marchés de pays menacés par la fuite des capitaux, le fossé numérique et la crise énergétique.  Il est tout aussi vital d’améliorer les infrastructures et de restaurer la confiance dans le commerce international.

L’ONUDI aide les pays à faire face à ces défis grâce à des interventions ciblées.  L’Organisation a élaboré un indice de développement des infrastructures de qualité, un outil analytique du respect des normes.  L’ONUDI travaille également avec les gouvernements et les entreprises pour améliorer les capacités d’échange commerciaux grâce à la promotion de l’investissement, des échanges et des partenariats pour les petites et moyennes entreprises, en particulier celles des jeunes femmes.  L’ONUDI soutient le développement des infrastructures industrielles essentielles, les zones économiques spéciales, les parcs industriels écologiques et les parcs industriels intégrés, a indiqué le représentant, qui a souligné l’importance de l’innovation, du transfert des technologies et des investissements Sud-Sud, Nord-Sud ou Est-Ouest. 

Mme RIEFQAH JAPPIE du Centre du commerce international, a réitéré le fait que le commerce international est essentiel pour la reprise économique et le développement durable.  Pour sortir de la crise actuelle, il faut un engagement mondial pour promouvoir la croissance économique par un commerce inclusif.  À cet égard, il faut tout faire pour que le commerce international soit plus viable d’un point de vue environnemental.  Il faut, a insisté la représentante, un commerce international soutenu par un écosystème entrepreneurial adéquat et tourné vers l’avenir.  Ce commerce international doit intégrer les entreprises dirigées par des femmes et les industries qui les emploient.

Le commerce international doit aussi soutenir les jeunes entrepreneurs et répondre aux besoins des personnes vulnérables et marginalisées et ainsi, soutenir les micro, petites et moyennes entreprises, lesquelles sont la base de l’économie mondiale.  Il faut tout faire pour que de telles entreprises soient plus compétitives, mieux intégrées à la chaîne de la valeur ajoutée aux niveaux régional et mondial et aptes à résister aux chocs climatiques.  Tout ceci exige un réseau d’institutions nationales et régionales, a dit la représentante, qui a plaidé pour un système commercial multilatéral basé sur des règles.  En conclusion, elle a rappelé que son Centre consacre 80% de son assistance technique aux petites et moyennes entreprises des pays en développement, y compris ceux sans littoral, surtout en Afrique, pour qu’elles puissent véritablement bénéficier de la Zone de libre-échange africaine Zone de libre-échange continentale africaine.

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