Soixante-dix-septième session,
15e séance plénière – matin
AG/DSI/3693

Première Commission: hommages aux conventions d’interdiction des armes chimiques et biologiques et polémique sur leur manipulation politique

La Première Commission (désarmement et sécurité internationale) a entamé ce matin le volet de son débat thématique sur les armes classiques.  Elle a toutefois encore consacré l’essentiel de sa séance à la question des « autres armes de destruction massive », dont elle avait entamé l’examen hier, occasion pour de nombreuses délégations de souligner l’importance de régimes de vérification contraignants pour s’assurer sur le respect de la mise en œuvre tant de la Convention sur les armes biologiques que de la Convention sur les armes chimiques. 

Si les délégations ont toutes insisté sur l’aspect fondamental des deux conventions, vu comme le pilier fondamental du régime d’interdiction dans leur domaine respectif, plusieurs accusations de manipulation politique des textes ont été échangées. 

Entrée en vigueur il y a 25 ans, la Convention sur les armes chimiques (CIAC) a été présentée par plusieurs délégations comme la « pièce maîtresse » des efforts visant à éradiquer ces armes, voire la convention de désarmement « la plus réussie au monde », du fait à la fois d’une adhésion quasi universelle -193 États- et de son système de vérification par le biais de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  La Chine, la Fédération de Russie et la République islamique d’Iran ont néanmoins pointé du doigt les États-Unis, seul pays à n’avoir pas détruit l’intégralité de ses stocks d’armes chimiques dans les délais impartis.  Ces derniers reconnaissent le retard, mais ont aussitôt ajouté que « 90% des stocks déclarés » étaient désormais détruits et que le reste le serait d’ici à l’automne 2023 et en toute transparence. 

La rupture ces dernières années du véritable tabou entourant ces armes jugées « répugnantes » a été condamnée par l’ensemble des pays, y compris par ceux accusés d’y avoir eu recours, ce qu’ils ont catégoriquement démenti.  Plusieurs pays occidentaux ont ainsi rappelé les tentatives d’assassinat de l’ancien transfuge russe Sergei Skripal et de sa fille au Royaume-Uni en 2018, puis de l’opposant russe Alexeï Navalny en Russie, à chaque fois avec un agent chimique du type « Novitchok » d’origine russe.  Ils en ont déduit que la Fédération de Russie ne semblait pas avoir détruit toutes ses armes chimiques.  Le représentant russe a rejeté toutes ces allégations présentées comme des montages. 

La Türkiye a fait valoir que le cas de la Syrie, où des gaz toxiques ont été utilisés à plusieurs reprises contre des civils dans le cadre du conflit intérieur, était particulièrement préoccupant puisque ce pays concentre la presque totalité des cas d’utilisation d’armes chimiques et de violation de la Convention.  Plusieurs États ont rappelé qu’à l’issue d’enquêtes internationales, le Gouvernement syrien avait été tenu responsable d’une partie de ces attaques chimiques et que la Syrie, qui a adhéré à la CIAC en 2013, n’avait toujours pas fourni de réponse valable à une vingtaine de questions relatives à la destruction complète de ses stocks et des installations qui y sont liées. 

Le cas de la Syrie a aussi été jugé préoccupant par de nombreux intervenants dans la mesure où ce pays, appuyé notamment par la Fédération de Russie, a violemment accusé, à de multiples reprises et encore aujourd’hui, l’OIAC d’avoir été instrumentalisée à des fins politiques par les Occidentaux.  Les deux camps se sont donc accusés réciproquement de saper la confiance en l’OIAC, et par conséquent d’affaiblir la Convention elle-même.  Plusieurs délégations, à l’image du Brésil, ont souhaité la restauration de l’esprit de consensus dans le cadre de la CIAC.

La situation de la Convention sur les armes biologiques (CIAB) est différente.  Premier traité multilatéral de désarmement à bannir une catégorie entière d’armes, la CIAB, élaborée en 1972, ne dispose pas d’un système de vérification aussi élaboré que la CIAC.  Alors que plusieurs délégations ont rappelé que la pandémie de COVID-19 avait donné un aperçu des ravages que pourrait provoquer l’utilisation d’armes biologiques, de multiples appels ont donc été lancés en vue d’un renforcement du régime de biosécurité mondial.  À l’image de l’Irlande ou du Brésil, beaucoup ont vu dans la neuvième Conférence d’examen de la CIAB, prévue en fin d’année, une occasion unique en ce sens, ainsi que pour faire progresser l’assistance, la coopération, la réponse et la préparation des États parties.  Le Royaume-Uni a appelé à la création d’un groupe d’experts qui identifiera les différentes étapes à franchir pour renforcer la Convention sur les armes biologiques.

Certaines délégations, dont la Fédération de Russie, ont souhaité l’adoption d’un protocole juridiquement contraignant à la CIAB afin de la doter d’un mécanisme de vérification efficace, car le seul mécanisme existant pour ce type d’armes est actuellement le « Mécanisme du Secrétaire général visant à enquêter rapidement sur les allégations portées à son attention relatives à l’emploi possible d’armes chimiques, bactériologiques (biologiques) ou à toxines ».  Mais le Royaume-Uni a averti qu’il ne soutiendrait pas « les propositions qui porteraient atteinte au mandat du Secrétaire général ou à l’indépendance du mécanisme ».

La CIAB a en outre été l’occasion de nouveaux et vifs échanges entre la Fédération de Russie et les pays occidentaux et l’Ukraine.  La première avait en effet accusé les États-Unis de disposer en Ukraine d’une installation présentée comme liée à des activités biologiques militaires et convoqué en conséquence la tenue d’une réunion consultative des États parties.  Après le Canada hier, le Royaume-Uni, la République tchèque et l’Irlande ont dénoncé une campagne de désinformation risquant de saper la crédibilité de la CIAB.

En fin de séance, la Première Commission a commencé l’examen du volet « armes classiques » de son débat thématique.  La Norvège a appelé à une mise en œuvre réelle des instruments de contrôle de ces armes « que nous avons adoptés ensemble et que nous devons respecter ensemble ».  Les autres intervenants ont mis l’accent sur la nécessité de prévenir le trafic illégal d’armes légères et de petit calibre.  Les premiers discours ont aussi fait apparaître les divergences entre les États qui soutiennent pleinement le Traité sur le commerce des armes, comme le Canada, et ceux qui, à l’image des membres de l’ASEAN, insistent sur le droit souverain des états à acheter des armes pour leur besoin légitime de défense, voire accusent, comme l’a fait l’Égypte, le Traité d’être un outil de manipulation et de monopolisation du commerce légitime des armes conventionnelles par un petit groupe de pays producteurs.

La Première Commission poursuivra demain, jeudi 20 octobre, son débat thématique sur les armes classiques. 

DÉBAT THÉMATIQUE SUR DES QUESTIONS PRÉCISES ET PRÉSENTATION ET EXAMEN DE TOUS LES PROJETS DE RÉSOLUTION ET DE DÉCISION PRÉSENTÉS AU TITRE DES POINTS DE L’ORDRE DU JOUR

Autres armes de destruction massive (suite et fin)

M. SOON YEE LIANG (Chine) a appelé à faire face aux préoccupations en matière de respect pour renforcer la confiance de la communauté internationale en regrettant que les États-Unis n’aient pas mis en œuvre leurs obligations.  Il a aussi souligné la contribution de la bioscience pour le bien de l’humanité.  Il a exhorté les États-Unis, dernier État partie à la Convention sur l’interdiction des armes chimiques à ne pas avoir achevé la destruction de son stock d’armes chimiques, à coopérer avec l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pour conclure cette destruction.  Il a espéré que le Gouvernement syrien coopérera avec le Secrétariat technique de l’OIAC pour régler les différends existants sur les questions chimiques en Syrie. 

M. KHALIL HASHMI (Pakistan) a notamment appuyé les régimes de la Convention sur les armes chimiques et de la Convention sur les armes biologiques, en appelant les États parties à ces deux conventions à optimiser encore leur potentiel.  À cet égard, il a plaidé pour l’instauration de normes de vérification afin de renforcer les capacités de mise en œuvre de la Convention sur les armes biologiques.  Le Pakistan condamne l’utilisation d’armes chimiques par quiconque, en tout lieu et en toutes circonstances, a poursuivi le représentant, qui a souligné la nécessité que les auteurs de tels actes soient traduits en justice.  Il a en outre appuyé le rôle de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques et de son Secrétariat technique à cette fin et pour la pleine application de la Convention.  Il a toutefois rappelé qu’il revient aux États Membres de décider des modalités de traduction en justice des responsables et auteurs d’attaques chimiques. 

M. KONSTANTIN VORONTSOV (Fédération de Russie) a estimé qu’afin de résoudre les problèmes liés à la mise en œuvre des dispositions de la Convention sur les armes biologiques (CIAB) concernant les activités militaires et biologiques des États-Unis et de l’Ukraine sur le territoire ukrainien, son pays, conformément à l’article V de la CIAB, avait demandé la tenue d’une réunion consultative des États parties.  « Malgré tous nos efforts, nous n’avons pas reçu de réponses exhaustives aux revendications spécifiques concernant le respect par ces États des dispositions des articles I et IV de la Convention », a-t-il déploré.  Des questions restent ouvertes et attendent des solutions, a ajouté le représentant.  Pour mettre fin à cette situation scandaleuse, il est impératif de poursuivre leur examen sérieux dans le cadre de la CIAB, a-t-il plaidé.  De plus, il est important d’utiliser l’article VI de la Convention afin d’enquêter sur la violation des dispositions de la CIAB par les États-Unis et l’Ukraine.  Il a proposé de prendre les décisions appropriées lors de la neuvième Conférence d’examen de la CIAB pour renforcer les institutions de la Convention.

Le représentant a confirmé son intérêt pour le renforcement de l’expertise du mécanisme d’enquête du Secrétaire général des Nations Unies sur l’utilisation présumée d’armes chimiques et biologiques et a entendu contribuer aux efforts globaux de la communauté mondiale.  Afin d’utiliser efficacement le mécanisme, la Fédération de Russie a soumis un projet de résolution à la Première Commission, qu’elle demande aux autres délégations de soutenir et de coparrainer. 

La Fédération de Russie remplit de bonne foi ses obligations au titre de la Convention sur les armes chimiques, a affirmé M. Vorontsov, qui a rappelé qu’en 2017, elle avait achevé la destruction de l’un des plus grands arsenaux d’armes chimiques trois ans avant l’échéance fixée par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  Le représentant a exhorté les États-Unis à suivre son exemple. 

La situation à l’OIAC elle-même continue de se détériorer, a déploré M. Vorontsov, qui a affirmé que les alliés euro-atlantiques menés par les États-Unis poursuivaient délibérément une politique destructrice visant à politiser davantage les activités de l’OIAC, dont l’objectif, a-t-il insisté, est technique.  La Fédération de Russie ainsi que la Syrie font l’objet d’accusations infondées de violations de la CIAC, a poursuivi le représentant.  Les insinuations concernant « l’affaire Skripal » et le prétendu « empoisonnement » d’Alexeï Navalny ont été complétées par des accusations selon lesquelles les forces armées russes prépareraient l’utilisation de produits chimiques toxiques ou d’armes chimiques, a-t-il noté, et ce, dans le contexte du fait que depuis décembre 2021, la Fédération de Russie a été avertie de possibles provocations de la part de formations ukrainiennes, y compris avec la participation directe de services spéciaux étrangers et de sociétés militaires privées, contre des installations du secteur chimique dans le sud et le sud-est de l’Ukraine. 

Le représentant a conclu en rappelant l’opposition constante de son pays à la « politisation effrénée des activités de l’OIAC par les pays occidentaux » et son intention de « restaurer l’esprit de consensus et l’autorité de cette structure internationale ».

M. GULAM KHANDKER PRINCE (Bangladesh) s’est dit préoccupé par la possibilité croissante que des terroristes et d’autres acteurs non étatiques utilisent des armes de destruction massive ou y aient accès.  Soulignant l’importance de la mise en œuvre complète, efficace et non discriminatoire de la Convention sur les armes chimiques (CIAC), il a détaillé le respect de cet instrument par son pays.  Il a toutefois souligné le recours à ces armes au cours des dernières années avant d’appeler la communauté internationale à s’unir pour condamner leur utilisation et demander des comptes aux responsables de manière transparente.  En outre, la crédibilité et l’intégrité de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) doivent être maintenues afin qu’elle puisse remplir son mandat.  Pour sa part, le Bangladesh a coopéré avec l’OIAC pour promouvoir l’utilisation pacifique des produits chimiques et a été le premier membre de l’OIAC à avoir introduit des mesures de préparation aux incidents chimiques dans les hôpitaux, a fait observer le représentant.

M. Prince a noté que la pandémie de COVID-19 avait révélé la vulnérabilité mondiale aux conséquences potentiellement catastrophiques des agents pathogènes et autres menaces biologiques.  Il a appelé à la mise en œuvre complète, efficace et non discriminatoire de la Convention sur les armes biologiques.  Il a également lancé un appel à la création d’un organisme international mandaté pour enquêter sur les épidémies suspectes d’agents biologiques. 

M. FLAVIO DAMICO (Brésil) a rappelé que le Brésil est favorable à la reprise rapide des négociations en vue de l’adoption d’un protocole de vérification contraignant relatif à la Convention sur les armes biologiques (CIAB).  Un tel protocole renforcera la mise en œuvre de la Convention et favorisera la confiance entre les États parties concernant l’utilisation exclusivement pacifique des connaissances et de la technologie dans le domaine des sciences de la vie, a estimé le représentant, pour qui la prochaine conférence d’examen de la CIAB « représente une occasion unique de reprendre ces discussions sans délai ». 

Le représentant a noté que si les armes biologiques sont mal réglementées, les armes chimiques sont soumises à un examen international intense, la Convention sur les armes chimiques représentant, a-t-il dit, « une norme d’or » en termes de régimes multilatéraux sur les armes de destruction massive.  Alors que nous célébrons le vingt-cinquième anniversaire de l’entrée en vigueur de la Convention et de la création de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), le Brésil réaffirme son soutien indéfectible au travail de l’Organisation, a affirmé le représentant, qui a également souligné l’importance de surmonter « la regrettable politisation qui a miné la culture du consensus au sein du l’OIAC et de ses organes de décision ». 

M. NADER LOUAFI (Algérie) a appelé les pays n’ayant pas adhéré aux Conventions sur les armes chimiques et biologiques à le faire sur le champ, notant que ces deux traités permettent de relever les défis que représentent ces armes et de favoriser le développement économique et social des pays en développement.  Leurs Conférences d’examen respectives devraient permettre de faire avancer ces objectifs, a-t-il espéré. 

Le représentant a exhorté à mettre en œuvre l’article X de la Convention sur les armes chimiques (CIAC) pour favoriser l’échange scientifique et technologique, afin que les États puissent utiliser les produits chimiques à des fins pacifiques.  Il noté que le régime de la CIAC avait permis d’éliminer de nombreuses armes chimiques en dépit des nouveaux défis et nouvelles menaces.  À ce titre, il est essentiel de maintenir un esprit de coopération, a-t-il plaidé.  Il s’est notamment dit préoccupé des divergences dans les discussions et du recours trop fréquent au vote pour la prise de décision.  Le représentant a en outre rappelé l’importance de la résolution 1540 (2004) dans l’architecture du désarmement international.  Il a, enfin, appelé à trouver un équilibre pour garantir l’utilisation pacifique des matières chimiques et leur utilisation abusive.

M. AIDAN LIDDLE (Royaume-Uni) a appelé tous les États à adhérer au Protocole de Genève de 1925, à la Convention sur les armes biologiques (CIAB) et à la Convention sur les armes chimiques (CIAC).  La diffusion par la Russie de désinformation concernant les armes chimiques et biologiques en Ukraine risque de compromettre cet objectif, a déploré le représentant, qui a fait observer que certaines personnalités liées au Kremlin avaient même prôné l’utilisation de ces armes.  Toute utilisation d’armes chimiques ou biologiques aurait de graves conséquences, a averti le représentant.

Pour M. Liddle, les progrès rapides de la science et de la technologie présentent à la fois des risques et des opportunités pour la CIAB.  Le Royaume-Uni est prêt à travailler avec tous les États parties pour examiner des propositions, notamment dans les domaines de l’assistance et de la coopération, des développements scientifiques et technologiques et des cadres institutionnels.  Le représentant a aussi soutenu la proposition d’un groupe de travail d’experts chargé d’identifier les mesures visant à renforcer la mise en œuvre de la Convention sous tous ses aspects. 

M. Liddle a également soutenu l’indépendance du mécanisme du Secrétaire général chargé d’enquêter sur les utilisations présumées d’armes chimiques ou biologiques.  Le Royaume-Uni ne soutiendra pas les propositions qui porteraient atteinte au mandat du Secrétaire général ou à l’indépendance du mécanisme, a prévenu le représentant.  Il faut continuer à défendre l’interdiction totale d’armes biologiques et chimiques, dont nous avons vu le danger ces dernières années en Russie, Syrie, Royaume-Uni, Malaisie et Iraq, a-t-il ajouté. 

Pour le représentant, la Russie devrait répondre aux questions fondamentales que le Royaume-Uni et d’autres États ont posées sur l’utilisation confirmée d’agents neurotoxiques Novitchok contre Alexeï Navalny en 2020 et à Salisbury en 2018.  La Russie doit déclarer toutes ses armes chimiques conformément à la CIAC.  L’équipe d’enquête de l’OIAC chargée d’identifier les auteurs d’attaques à l’arme chimique en Syrie a publié deux rapports attribuant au régime d’Assad la responsabilité de quatre attentats.  La Syrie n’a pris aucune de ces recommandations et a entravé l’OIAC dans son travail, a dénoncé le représentant, qui a demandé à ce que l’OIAC soit autorisée à mener son travail sans désinformation ni atteinte à son intégrité. 

Enfin, M. Liddle a souhaité que le Conseil de sécurité réaffirme les principes de la résolution 1540 (2004) visant à prévenir les risques d’acquisition d’armes de destruction massive par des groupes non étatiques. 

M. PAHALA RALLAGE SANATHANA SUGEESHWARA GUNARATNA (Sri Lanka) a noté la nature précaire de l’environnement international de sécurité, qui fait que « la moindre erreur peut menacer toute l’humanité ».  Il a dit attacher beaucoup d’importance aux conventions d’interdiction des armes chimiques et biologiques.  Il s’est félicité du système de vérification de la Convention sur les armes chimiques et a présenté le mécanisme interne du contrôle mis en place dans son pays.  La Convention sur les armes biologiques est un autre maillon essentiel, mais l’absence d’un système de vérification continue d’entraver sa pleine mise en œuvre, a regretté le représentant.  Il a donc exhorté à négocier un protocole juridiquement contraignant sur ce point.  Il a souligné l’importance d’un régime international harmonisé qui garantit la biosécurité et la biosûreté.  Face aux répercussions de la pandémie de COVID-19, il convient de développer des normes cohérentes dans ces domaines et lutter contre le risque de propagation accidentelle de pathogènes dans l’environnement, a encore estimé le représentant.  Enfin, il a rappelé que tout examen dans le cadre de la résolution 1540(2004) doit se faire en conformité avec la Charte des Nations Unies.

M. FÉLIX BAUMANN (Suisse) s’est inquiété des conclusions de l’équipe d’enquête conjointe entre l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et l’ONU faisant état de l’utilisation d’armes chimiques en Syrie.  Tout en notant que deux cas d’utilisation sont attribués à Daech, le représentant a cité un cas avéré d’utilisation d’armes chimiques par l’armée de l’air syrienne le 4 février 2018.  Dans ce contexte, il a exhorté le gouvernement syrien à coopérer.  Il a par ailleurs insisté sur la nécessité d’un protocole juridiquement contraignant pour renforcer la mise en œuvre de la Convention sur les armes biologiques.  Il a jugé non convaincantes les allégations de la Fédération de Russie concernant de prétendues utilisations d’armes biologiques en Ukraine. 

M. ALBERTO MIRANDA DE LA PEÑA (Espagne) a déclaré que la Convention sur les armes biologiques est la « pièce maîtresse » des efforts visant à éradiquer la menace de la prolifération de telles armes.  À ce titre, il a appelé à la renforcer grâce à un mécanisme de vérification efficace et à étendre son adoption.  Il convient également de continuer à mettre à jour et à mettre en œuvre des mesures spécifiques sur les questions de biosécurité et de sûreté biologique aux niveaux national et international, compte tenu des avancées réalisées ces dernières années dans le domaine de la biotechnologie, a-t-il ajouté. 

Le représentant s’est inquiété de l’utilisation récente d’armes chimiques dans le cadre de conflits armés internes ainsi que pour commettre des meurtres.  Il a insisté sur le rôle de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques dans ce domaine.  Il a également évoqué le rôle que pourrait jouer cette organisation en matière de terrorisme.  Il a exhorté les États à se conformer à la résolution 1540(2004) du Conseil de sécurité ainsi qu’aux autres résolutions et textes pertinents.

Mme LEE HYUN GOO (République de Corée) a exprimé sa profonde préoccupation face aux allégations non fondées de la Fédération de Russie concernant « la mise au point et l’utilisation possible d’armes chimiques ou biologiques, qui pourraient entraver la pleine application des conventions pertinentes ».  La République de Corée craint également qu’il ne s’agisse de discours précurseurs à l’emploi d’armes biologiques ou chimiques par la Fédération de Russie elle-même en Ukraine.  Par conséquent, la représentante a exhorté la Fédération de Russie à cesser immédiatement toutes ses actions militaires en Ukraine, retirer ses forces du territoire ukrainien et à se conformer à ses obligations en vertu de l’ensemble du droit international. 

M. JAROSLAV ŠTĚPÁNEK (République tchèque) a déclaré que l’invasion russe en Ukraine a considérablement aggravé les risques liés aux armes de destruction massive et a condamné fermement les tentatives de désinformation de la Russie concernant les prétendus complots de l’Ukraine visant à utiliser à mauvais escient des produits chimiques toxiques dans le conflit.  Le représentant a ajouté que « ce n’est pas la première fois que l’on voit la Russie tenter de détourner l’attention de l’utilisation d’armes chimiques par ses propres agents ou par ses alliés, notamment la Syrie ».  Il a estimé que, sur ce dernier point, c’est l’ONU qui doit maintenant agir et ce, sur la base des rapports de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques, « qui n’est pas un mécanisme de reddition de comptes ».  La justice doit être rendue pour les victimes et il doit être mis fin à l’impunité des auteurs d’attaques chimiques, a-t-il ajouté.  Il a en outre déclaré que les « empoisonnements commis par des agents russes constituent une violation flagrante de la Convention sur les armes chimiques ».  Il a exhorté la Russie à reconnaître ses actes et à veiller à ce qu’ils ne se reproduisent plus.  Enfin, M. Stepanek a assuré que, contrairement aux allégations russes, les activités des Etats-Unis en Ukraine étaient conformes à la Convention sur les armes biologiques (CIAB). 

M. ANUPAM RAY (Inde) a dit être préoccupé par le risque que des armes de destruction massive tombent entre les mains de terroristes et d’acteurs non étatiques.  Le représentant a rappelé la résolution annuelle « Mesure visant à empêcher les terroristes d’acquérir des armes de destruction massive », déposée depuis 2002 et adoptée par consensus, qui exhorte les États Membres à soutenir les efforts internationaux ainsi qu’à prendre et à renforcer les mesures nationales, le cas échéant, pour empêcher les terroristes d’acquérir des armes de destruction massive et leurs vecteurs. 

Au plan national, le Gouvernement indien a promulgué une loi en 2005 qui démontre son engagement à prévenir la prolifération des armes de destruction massive, a poursuivi le représentant.  Membre du Comité 1540, l’Inde souhaite le renouvellement du mandat du Comité, afin de lui permettre d’aider les États Membres à renforcer leur mise en œuvre de la résolution et à relever plus efficacement les défis à la prolifération des armes de destruction massive.  L’Inde appuie également la mise en œuvre intégrale de la Convention sur les armes chimiques et son représentant a demandé le respect de l’impartialité et de l’intégrité de l’OIAC. 

M. ARSEN OMAROV (Kazakhstan) a notamment réitéré la proposition de son pays qu’il soit créé, dans le cadre de la Convention sur les armes biologiques et d’un groupe de travail dédié, une agence internationale de sécurité biologique.  Il a souhaité que cette proposition soit examinée de manière approfondie lors de la neuvième Réunion des États parties à la Convention, qui devrait se tenir en décembre prochain.  En outre, le représentant a indiqué que son pays remplit ses obligations en mettant en œuvre la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité tendant à prévenir l’acquisition d’armes de destruction massive par des terroristes, en axant ses efforts au plan régional sur le contrôle des exportations et le transfert de biens et de technologies. 

M. MEMET MEVLÜT YAKUT (Türkiye) a regretté que la Convention sur les armes chimiques ait été violée à plusieurs reprises ces 10 dernières années.  Il a rappelé que le recours à des armes chimiques constitue un crime contre l’humanité et une très grave violation du droit international.  « Le cas de la République arabe syrienne est particulièrement préoccupant puisque ce pays concentre la presque totalité des recours observés d’armes chimiques », a fait observer le représentant.  Notant que le mécanisme d’enquête conjoint a tenu la République arabe syrienne responsable de l’utilisation d’armes chimiques à au moins huit reprises, le représentant a affirmé que ces agissements du Gouvernement syrien ne pouvaient plus être tolérés.  Il a regretté les tentatives croissantes de discréditer le Secrétariat technique de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et ses organes d’enquêtes. 

M. OGASAWARA ICHIRO (Japon) a insisté sur l’importance de renforcer les Conventions sur les armes chimiques et biologiques.  L’utilisation répétée d’armes chimiques ces dernières années est un problème sérieux, a déclaré le représentant.  À ce titre, il a exhorté la République arabe syrienne à respecter ses obligations sur cette question.  Le Japon, a-t-il noté, s’est engagé en faveur de la destruction des armes chimiques abandonnées et a consacré près de 3 milliards de dollars à cet effort. 

Le représentant a en outre souligné que la pandémie de COVID-19 avait démontré les effets négatifs mondiaux que pourrait provoquer toute arme biologique et appelé au renforcement de la Convention sur les armes biologiques.  Il a soutenu la proposition d’un groupe de travail pour sortir de la situation de blocage du régime sur ce texte.  Il a en outre mis en garde contre l’utilisation du mécanisme de consultation à des fins politiques avec des allégations « inventées et non crédibles ».  Le représentant a appelé au renforcement du mécanisme d’enquête sur les éventuelles utilisations d’armes biologiques du Secrétaire général des Nations Unies.  Il a également rappelé l’importance de la mise en œuvre de la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité. 

M. CHRISTIAN PADILLA (Cuba) a dit que son pays est favorable au désarmement total, qui est inscrit dans sa Constitution.  Cuba n’a pas d’armes de destruction massive et n’a aucune intention d’en fabriquer ou d’en acquérir, a affirmé le représentant, qui s’est dit respectueux des Conventions sur les armes chimiques et biologiques.  Il a condamné les mesures unilatérales imposées contre Cuba par les États-Unis avant d’affirmer que les États-Unis devaient détruire leurs arsenaux chimiques sous contrôle international. 

M. GYÖRGY MOLNÁR (Hongrie) a annoncé la présentation du projet annuel de résolution contre les armes biologiques, dont la version 2022 ne compte que quelques mises à jour calendaires.  Le représentant a souhaité que ce texte, qui réaffirme la conviction de la communauté internationale que la Convention sur les armes biologiques qui est un pilier contre la prolifération des armes de destruction massive, soit cette année adoptée par consensus. 

M. AL ASHKAR (République arabe syrienne) a réitéré son rejet catégorique du recours à des armes chimiques en tout temps et en toute circonstance.  Il a regretté que les États-Unis se soient opposés à l’instauration d’une zone dénucléarisée au Moyen-Orient.  Le programme militaire israélien continue de menacer la paix dans la région, a-t-il affirmé, notant qu’il s’agit du seul État de la région possédant des armes de destruction massive. 

Le représentant a assuré de la pleine coopération de son pays avec les organismes de la Convention sur les armes chimiques.  La politisation de ces questions repose sur les allégations infondées visant la République arabe syrienne, a-t-il affirmé.  Il a ajouté que les rapports de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) « brillent par leur manque de professionnalisme ».  L’OIAC est exploitée à des fins politiques par certaines délégations et s’est détournée de sa mission technique, a-t-il déploré.  La Syrie prend au sérieux les menaces d’acquisition d’armes chimiques par les groupes terroristes et leur utilisation à l’encontre de la population civile. 

Le cadre juridique actuel concernant les armes biologiques est insuffisant et ne permet pas une approche coordonnée de la communauté internationale, a également regretté le représentant, qui a donc exhorté à remédier aux failles par le biais d’un accord permettant la coordination des efforts de lutte contre l’acquisition d’armes biologiques par les terroristes. 

Mme MAAYAN MICHAL (Israël) a dénoncé une culture de non-conformité et de mépris des normes internationales par de nombreux pays du Moyen-Orient avant de dénoncer des pratiques « d’États voyous ».  Illustrant son propos, la représentante a rappelé que l’utilisation d’armes chimiques par des États de la région contre leur propre population a été observée à plusieurs reprises depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.  Elle a rappelé la pertinence du Protocole de Genève de 1925 avant de soutenir la pleine mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques.  Elle a indiqué que le mécanisme d’enquête avait mis en évidence une centaine d’incidents démontant que le régime Assad a visé sa population au cours des 10 dernières années.  Elle a exhorté la République arabe syrienne à corriger et revoir sa déclaration sur son arsenal chimique avant d’estimer que ce pays devait être traduit en justice pour non-respect de ses engagements au titre de la Convention sur les armes chimiques.  « Le fait que le Gouvernement syrien ait manipulé les données et caché un certain nombre d’événements est préoccupant », a-t-elle conclu.

Mme CAOIMHE UDOM (Irlande) a condamné l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie et a déploré que cette dernière se soit aussi engagée dans de dangereuses campagnes de désinformation sur les armes de destruction massive visant l’Ukraine, les États-Unis et d’autres.  Les efforts de désinformation de la Russie dans ce domaine risquent de saper les instruments multilatéraux essentiels de désarmement et de non-prolifération, dont dépend notre sécurité collective, a protesté la représentante.  Elle a rejeté les efforts visant à saper le travail et la légitimité de l’OIAC et a assuré sa détermination à parvenir à un résultat fondé sur le consensus lors de la cinquième Conférence d’examen de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques l’année prochaine.  Il ne doit pas y avoir d’impunité pour ceux qui utilisent des armes de destruction massive, a insisté la représentante. 

La représentante a dit vouloir renforcer la Convention sur les armes biologiques (CIAB) lors de la neuvième Conférence d’examen de celle-ci, en fin d’année.  Cette Conférence d’examen représente une opportunité d’améliorer la biosûreté et la biosécurité à l’échelle mondiale, ainsi que de faire progresser l’assistance, la coopération, la réponse et la préparation des États parties, a-t-elle estimé. 

L’Irlande appuie le Mécanisme du Secrétaire général, qui est efficace, efficient et accomplit son travail avec intégrité, indépendance et impartialité, a poursuivi Mme Udom.  Elle a exhorté les États Membres à mettre en œuvre la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité, qui reste un outil essentiel dans la lutte contre les acteurs non étatiques cherchant à acquérir et à utiliser des armes de destruction massive.  Le renforcement du régime international de non-prolifération est vital pour l’Irlande, a conclu la représentante.

M. JOÃO IAMBENO GIMOLIECA (Angola) a réitéré l’importance d’une pleine mise en œuvre des conventions sur les armes chimiques et sur les armes biologiques, tant la lutte internationale contre les armes de destruction massive est nécessaire pour le développement socioéconomique des pays comme le sien et au plan régional.  Il a indiqué que l’Angola participe chaque année à un nombre croissant d’ateliers techniques de formation aux enjeux des deux conventions. 

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a noté que l’architecture de non-prolifération des armes nucléaires avait permis de mettre le développement de celles-ci hors de portée de la plupart des États, mais s’est inquiété du fait que l’accès aux armes biologiques et chimiques est plus simple et moins onéreux.  Notant que les populations civiles sont alors les premières victimes, le représentant a appelé à redoubler d’efforts pour lutter contre leur prolifération. 

Le représentant s’est félicité de l’engagement de l’OIAC pour la mise en œuvre de la Convention sur les armes chimiques et a appelé à une coopération internationale renforcée pour permettre le développement industriel et économique des parties concernées.  Il est impératif de renforcer le mécanisme permettant de traduire les auteurs de l’utilisation d’armes chimiques en justice, a-t-il estimé.  Il a regretté que la rédaction d’une loi interdisant les armes chimiques au Myanmar ait été stoppé en raison du coup d’état militaire illégal.  La junte semble s’être engagé dans la réactivation d’un programme d’armes chimiques, a affirmé le représentant -opposant à la junte militaire qui gouverne son pays- qui a ajouté que celle-ci n’était pas un partenaire fiable pour le désarmement et la non-prolifération nucléaire.  Il a également appelé à développer un mécanisme de vérification de la Convention contre les armes biologiques par le biais d’un protocole juridiquement contraignant.  Le représentant a, enfin, appelé à la vigilance face à l’émergence de nouvelles armes de destruction massive.

Mme NOHRA MARIA QUINTERO CORREA (Colombie) a réaffirmé l’importance de l’interdiction totale de toutes les armes de destruction massive et d’enquêter les cas de recours à ces armes.  Leurs auteurs doivent faire l’objet de poursuites, a-t-elle ajouté.  Elle a noté que l’OIAC était l’enceinte au sein de laquelle les incidents ayant trait à des armes chimiques doivent être discutés.  Elle a rappelé l’importance du renforcement des capacités, par le biais d’outils facilitant la mise en œuvre des obligations de la Convention au niveau national. 

La représentante a exhorté au renforcement de la Convention sur les armes biologiques, notamment sur la question du contrôle, indispensable, des matières connexes ou à double usage.  Elle a également appelé à renforcer la surveillance épistémologique.  Elle a plaidé pour une meilleure coopération et pour la confiance mutuelle afin de garantir l’usage pacifique des technologies nucléaires, chimiques et biologiques.  Les instruments actuels doivent être conservés et faire l’objet d’un régime de vérification strict, a souligné la représentante qui a aussi appelé à ne pas oublier la perspective de genre.

M. ANATOLII ZLENKO (Ukraine) a condamné le recours à des armes chimiques en Syrie avant d’exhorter ce pays à pleinement respecter les travaux de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC).  Il a ajouté que l’Ukraine, ancien pays détenteur de l’arme nucléaire, respectait pleinement le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), la Convention sur les armes chimiques, la Convention sur les armes biologiques et la résolution 1540 (2004) du Conseil de sécurité.  Il a particulièrement dénoncé les accusations russes d’utilisation d’armes chimiques par l’Ukraine.  « L’Ukraine n’a jamais élaboré d’armes biologiques et ne dispose pas d’infrastructures capables de le faire » a assuré le représentant, avant d’ajouter que ces fausses allégations russes ne visent qu’à détourner l’attention de la communauté internationale des crimes horribles commis par la Russie dans son pays. 

M. SAJJADIEH (République islamique d’Iran) a réaffirmé l’appui de son pays à la Convention sur les armes chimiques (CIAC) en dépit des attaques contre son efficacité, en particulier son utilisation à des fins politiques.  Cette démarche représente une menace contre la Convention, a déclaré le représentant.  Les États-Unis doivent prendre des mesures pour détruire leurs stocks d’armes chimiques, a-t-il ajouté, en précisant que les sanctions américaines empêchent l’Iran de produire notamment des médicaments.  Il faut mettre en œuvre l’article XI de la Convention, a martelé le représentant pour qui ce qui s’est passé récemment au sein de l’OIAC ne milite pas en faveur de sa crédibilité.  Il faut éviter la politisation de la CIAC, qui doit être mise en œuvre de manière équilibrée.  La CIAC est liée au Protocole de Genève de 1925, a aussi rappelé le représentant, qui a terminé en exhortant les États à adhérer à la CIAC, y compris au Moyen-Orient. 

Droits de réponse

Le représentant de la Fédération de Russie a estimé que la présence d’un laboratoire militaro-biologique américain sur le territoire de l’Ukraine, soit très près de celui de la Russie, montre bien que ces deux pays ne respectent pas la Convention sur les armes biologiques.  Les explications de ces deux pays au mécanisme de consultation de la Convention ne sont pas satisfaisantes, ce qui risque de saper encore davantage le régime de la Convention, a-t-il insisté. 

La représentante des États-Unis a réagi en rappelant que son pays honore ses obligations au titre de la Convention sur les armes biologiques et contribue en outre à la lutte salutaire contre la diffusion des maladies infectieuses et au renforcement de la sécurité dans les laboratoires de santé humaine et animale du monde entier.  Par ailleurs, les États-Unis ont achevé l’élimination de 90% de leurs stocks déclarés d’armes chimiques en avril de cette année.  Le 30 septembre 2023 au plus tard, tous nos stocks auront été détruits, a ajouté la représentante, qui a affirmé que ce processus se faisait en toute transparence. 

Le représentant de la République arabe syrienne a rejeté toutes les accusations « fabriquées » lancées contre son pays, et qui résultent de la politisation de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques d’une poignée de pays occidentaux.  Nous ne reconnaissons pas l’équipe d’enquête rattachée au Secrétariat technique de l’OIAC, a-t-il dit.  Il a accusé cette équipe de faire partie d’une tentative d’agression de ces mêmes pays, de desservir la réputation du Secrétariat technique, et, partant, d’entacher la légitimité de l’OIAC en la déviant de ses objectifs initiaux. 

Le représentant de l’Ukraine a repris la parole pour déclarer que les prétendues preuves présentées par la Russie ont été inventées de toutes pièces et n’ont convaincu personne.  L’Ukraine, a-t-il affirmé, ne dispose ni de telles armes ni des capacités requises.

Le représentant de la Fédération de Russie a repris la parole pour réagir aux propos des États-Unis et de l’Ukraine à propos des preuves « convaincantes » présentées par son pays.  Dire qu’il s’agit de mensonges vise à détourner l’attention de la communauté internationale, a-t-il estimé, ajoutant que les preuves de la Russie peuvent être vérifiées par les États sur le site Internet de l’OIAC.  Il a accusé les délégations des États-Unis et l’Ukraine de ne pas souhaiter présenter de réponse concrète aux questions soulevées par la Russie pour contribuer au régime de mise en œuvre de la Convention.

Armes classiques

Au nom de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), M. SOVANN KE (Cambodge) a dit être préoccupé par la prolifération illicite des armes classiques dans le monde.  Il a estimé qu’une réglementation et un contrôle efficaces des armes classiques sont nécessaires.  La mise en œuvre des accords internationaux pertinents sur les armes classiques doit être conforme aux principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies et du droit international.  L’ASEAN insiste sur le fait que les États ont des droits souverains pour acquérir et gérer leur arsenal conventionnel pour l’autodéfense pour la sauvegarde de leur sécurité nationale. 

L’ASEAN reste intéressée par l’évolution continue de divers cadres et instruments internationaux juridiquement contraignants, notamment la huitième Conférence des États parties au Traité sur le commerce des armes.  Elle s’emploie à renforcer le mécanisme de désarmement dans la région et au-delà. 

L’ASEAN continue de lutter contre la contrebande d’armes dans le cadre de la Réunion ministérielle de l’organisation sur la criminalité transnationale et du Forum régional de l’ASEAN, a aussi informé M. Ke, qui a jugé nécessaire de traiter la menace posée par les engins explosifs improvisés en particulier par des acteurs non étatiques.  Le représentant a pris note des résultats de la Conférence annuelle des Hautes Parties contractantes du deuxième Protocole modifié à la Convention sur certaines armes classiques.  L’ASEAN réaffirme aussi l’importance de l’action contre les mines dans le relèvement national et le développement durable.

M. EDUARDO JANCHEZ (Mexique) a souligné que les armes à feu utilisées en dehors des zones de conflits armés entraînent des spirales de violence et alimentent toutes sortes de trafics et d’activités criminelles, y compris celles des groupes suprématistes blancs.  Il a plaidé pour le renforcement de mécanismes de contrôle pour lutter contre un phénomène qui est essentiellement transfrontalier.  Pour cela, le représentant a plaidé pour une approche pluridimensionnelle, ajoutant que lutter contre la prolifération des armes légères et de petit calibre (ALPC) est un impératif humanitaire tant ces armes entravent la réalisation du développement durable.  Le représentant a appelé à l’accélération de la mise en œuvre complète du Programme d’action de l’ONU sur les ALPC et de l’universalisation du Traité sur le commerce des armes, tout en soulignant la pertinence et l’utilité de tous les instruments internationaux et régionaux relatifs aux armes classiques.  La résolution 26/16 de l’Assemblée générale doit être mise en œuvre, en particulier ses dispositions sur le transfert illicite de ces armes, a-t-il encore dit.  Pour conclure, il a soutenu la proposition irlandaise d’élaborer un instrument de protection des civils, notamment en milieu urbain.

Mme ALEXANDRA KAMINSKI (Canada) a appelé à l’universalisation des textes internationaux pertinents et au contrôle des transferts des armes.  Dans ce cadre, la représentante a appelé à prendre en compte les liens avec les droits de l’homme, le développement, ainsi que les dimensions de sexe et de genre et les violences sexuelles et sexistes.  Elle a réitéré l’engagement du Canada en faveur du Traité sur le commerce des armes, notant que son pays apporte un soutien financier au programme Genre et désarmement de l’Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement.  Elle a encouragé les États parties au Traité à rendre leurs rapports accessibles au public et à payer leurs contributions annuelles. 

Le Canada est également engagé à faire avancer la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel, qui est « essentielle à la réussite des objectifs de développement durable » car elle soutient les efforts de paix et de stabilisation et assure la sécurité de l’acheminement de l’aide humanitaire.  La représentante a appelé les États à y adhérer, ainsi qu’à la Convention sur les armes à sous-munitions.  Il convient également d’interdire les systèmes d’armes qui frappent de manière indiscriminée, générant des blessures superflues ou inutiles, a conclu la représentante.

M. ABDELRHMAN MOHAMED FARID HEGAZY (Égypte) a dit que les efforts pour relever les défis et menaces du trafic illicite d’armes légères et de petit calibre (ALPC) doivent être conformes à la Charte des Nations Unies et satisfaire les besoins légitimes de défense des États.  Le représentant a dit attendre avec intérêt la quatrième Conférence d’examen du Programme d’action en 2024 pour approfondir les questions liées au détournement d’ALPC vers des destinataires non autorisés.  Il attend aussi avec impatience la mise en place rapide du programme de bourses proposé par les pays non-alignés pour fournir une formation aux pays en développement sur les questions relatives aux ALPC.  Il a dénoncé l’augmentation des flux illicites et des transferts de ces armes aux terroristes et aux groupes armés illégaux avec le soutien direct de quelques États, appelant des mesures concrètes de la part des Nations Unies. 

Le représentant a pointé du doigt les lacunes du Traité sur le commerce des armes, notamment l’absence de définitions et de critères clairs, qui compromet son éventuelle efficacité et facilite l’usage abusif et politisé du Traité comme d’un outil de manipulation et de monopolisation du commerce légitime des armes conventionnelles.  Il a appelé les États parties au Traité à veiller à ce que sa mise en œuvre soit conforme à la Charte des Nations Unies et respecte les droits des États de répondre à leurs besoins de sécurité nationale et d’autodéfense.  Il a demandé à intensifier la coopération internationale pour s’attaquer aux problèmes posés par les mines antipersonnel. 

Mme HELENA HAKAOJA (Finlande) a appelé à la mise en œuvre réelle des instruments de contrôle des armes classiques, « des instruments que nous avons adoptés ensemble et que nous devons respecter ensemble ».  Elle a salué les discussions sur les munitions en cours à l’ONU, et souligné l’importance de l’universalisation du Traité sur le commerce des armes et du renforcement de l’assistance internationale, technique et financière, pour accompagner les pays dans le respect de leurs engagements en matière de lutte contre la prolifération des armes légères et de petit calibre.  La Finlande est un fervent partisan de l’action humanitaire, en particulier dans le domaine de la lutte contre les mines antipersonnel, en Afrique et en Afghanistan notamment, a en outre rappelé la représentante.

Mme Hakaoja a reconnu la nécessité de mettre en place un cadre adapté aux systèmes d’armes létaux autonomes sur la base des recommandations du groupe d’experts gouvernementaux.  La Finlande souhaite que ce cadre soit mis en place dans le cadre de la Convention sur certaines armes classiques.  Enfin, la représentante a noté avec satisfaction le fait que la dimension de genre pour la mise en œuvre des instruments des armes classiques est de plus en plus encouragée. 

M. CHRISTIAN FOUGNER RYDNING (Norvège) a regretté que les armes classiques restent à l’origine de destructions massives qui touchent principalement les populations civiles.  Il a appelé à l’établissement de mesures de contrôle et de transparence.  Le monde universitaire a un rôle particulier à jouer, a-t-il souligné, appelant également à veiller à prendre en compte la perspective de genre dans les travaux.  La criminalité internationale fleurit grâce au trafic du commerce des armes et il faut donc lutter contre ce fléau, a déclaré le représentant.  Il a jugé efficace le Traité sur le commerce des armes et a appelé les États ne l’ayant pas fait à le ratifier au plus vite. 

Soulignant que les mines continuent de constituer une menace pour les communautés, le représentant a exhorté les États à continuer de financer les opérations de déminage et à rejoindre « au plus vite » la Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel.  Il a déploré que 90% des morts liées à des explosifs dans des régions peuplées soient d’origine civile, appelant à redoubler d’effort pour protéger ces populations.  Le représentant s’est enfin inquiété des considérations militaires et éthiques liées au système d’armes autonomes.  Le contrôle humain doit être réaffirmé, a-t-il déclaré, exhortant à l’action face aux risques de ce type d’armements. 

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