L’Assemblée générale entérine le Programme d’action de Doha pour les pays les moins avancés après l’examen des travaux du Mécanisme international d’enquête en Syrie
C’est à l’unanimité que l’Assemblée générale a entériné aujourd’hui le Programme d’action de Doha en faveur des pays les moins avancés, adopté le 17 mars par la cinquième Conférence des Nations Unies dédiée à cette catégorie de pays, avant la tenue d’une deuxième partie de conférence à Doha en mars 2023 grâce à la « généreuse offre du Gouvernement du Qatar ».
Les « PMA » sont désormais dotés de leur cinquième Programme d’action, après deux reports dans le calendrier à cause de la COVID-19. Dix domaines d’action prioritaires sont prévus, pour arriver, par exemple, à tirer mieux parti de leur capital humain, ainsi que de la science, de la technologie et de l’innovation. Après le Programme d’action d’Istanbul qui avait prévu la création de la Banque de technologies des Nations Unies en faveur des PMA, le Programme de Doha prévoit la création d’une université en ligne, d’un centre international de soutien à l’investissement ainsi que de stocks alimentaires pour permettre à ces pays de reconstruire en mieux. Si la résolution présentée par le Pakistan, au nom du Groupe des 77 et la Chine, a été adoptée sans vote et saluée par le Malawi, des réserves ont été émises par la Chine et la Fédération de Russie notamment sur la question d’allègement de la dette. Des incidences budgétaires sont à prévoir, a aussi signalé le Secrétariat.
Le débat qui a occupé auparavant l’Assemblée générale, une grande partie de la journée, était consacré au « Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011 ». Comme l’an dernier, il a opposé les États Membres favorables à cet outil de lutte contre l’impunité à la délégation syrienne et à ses soutiens, qui contestent l’impartialité de cet organe judiciaire, voire la légitimité de son existence.
Venue présenter le dernier rapport en date du Mécanisme, dont elle dirige les travaux, Mme Catherine Marchi-Uhel a d’emblée estimé que les problèmes auxquels il se heurte aujourd’hui ne sont pas de nature juridique, mais relèvent plutôt de l’incapacité de la communauté internationale à « parler d’une seule voix » face aux « atrocités » commises en Syrie. Néanmoins, le Mécanisme n’a pas chômé, a souligné la magistrate, en faisant valoir sa coopération avec 13 juridictions différentes et l’afflux de demandes d’assistance, 180 en tout, relatives à plus de 150 affaires distinctes. Si la plupart de ces procédures en sont encore au stade de l’enquête, d’autres ont donné lieu à des procès ou ont abouti à des condamnations, notamment en Allemagne, en Suède et aux Pays-Bas, en vertu de la compétence universelle.
Ainsi, s’est félicitée Mme Marchi-Uhel, un tribunal allemand de Coblence a « fait la une des journaux du monde entier » avec deux verdicts distincts, qui affirment que des crimes contre l’humanité ont été commis dans le cadre d’une attaque généralisée et systématique contre la population civile par l’État syrien, par l’intermédiaire de ses forces de sécurité et de ses services secrets, entre avril 2011 et septembre 2012. Un tribunal de Francfort a en outre établi que les crimes contre la communauté yézidie s’apparentent à un génocide.
L’Union européenne et la Finlande, laquelle s’exprimait au nom des pays nordiques, ont salué ces jugements, considérant que la lutte contre l’impunité constitue une condition sine qua non à une future Syrie stable et pacifique. Toutes deux ont à nouveau demandé que le Conseil de sécurité renvoie la situation dans ce pays à la Cour pénale internationale (CPI), une demande également formulée par l’Allemagne, le Liechtenstein, la République tchèque, l’Estonie, l’Albanie ou encore la Slovénie. Les mêmes délégations ont plaidé pour la mise à disposition de ressources financières adéquates pour le Mécanisme, dont le financement est inclus dans le budget de l’ONU depuis 2020. Le rapport demande ainsi aux États Membres « de continuer à lui apporter un appui, au moyen du budget ordinaire de l’Organisation et de contributions volontaires complémentaires ».
Parce qu’elle lui conteste sa raison d’être même, la République arabe syrienne n’a même pas souhaité discuter des travaux du Mécanisme, fustigeant son instrumentalisation supposée par les pays occidentaux et des « organisations terroristes comme les Casques blancs », qui fournissent des éléments de preuve falsifiés et irrecevables sur le plan judiciaire. « Politisation », « sélectivité », « deux poids, deux mesures » font de cet organe subsidiaire de l’Assemblée générale une « violation » même de la Charte des Nations Unies, a cinglé la République populaire démocratique de Corée (RPDC).
À partir du moment où la République arabe syrienne n’a pas accepté la mise en place de ce mécanisme et qu’aucune résolution du Conseil de sécurité n’a été adoptée à ce sujet au titre du Chapitre VII de la Charte, ce mécanisme n’a tout simplement pas lieu d’être, a tranché la Fédération de Russie, pour qui l’Assemblée a clairement agi ultra vires, contrairement à la répartition des compétences respectives des principaux organes de l’ONU. Ce mécanisme n’est rien d’autre aux yeux du représentant russe que le « jouet » des « ambitions géopolitiques de l’Occident ». Convaincu comme la Chine que les fonds du budget ordinaire de l’ONU destinés aux « prétendues enquêtes » du Mécanisme pourraient être utilisés à meilleur escient, le délégué russe a dénigré ses méthodes de travail, qui ne répondent pas à son avis aux critères de « pertinence et d’admissibilité des preuves ».
À l’Iran et à la Syrie qui dénonçaient le manque de transparence des travaux du Mécanisme, le Canada a rétorqué que l’on ne peut imaginer un système pénal qui puisse agir autrement. « Suggérez-vous vraiment qu’un mécanisme d’enquête puisse divulguer les noms des témoins alors que l’investigation est en cours? » leur a-t-il lancé. Si vous ne voulez pas de ce mécanisme, alors vous devez tout faire pour que l’impunité ne devienne pas un « mode de vie », a-t-il déclaré, en réfutant toute accusation de politisation ou d’ingérence étrangère.
PRÉVENTION DES CONFLITS ARMÉS: NOTE DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL (A/76/690)
Déclarations
Mme CATHERINE MARCHI-UHEL, Chef du Mécanisme international, impartial et indépendant chargé de faciliter les enquêtes sur les violations les plus graves du droit international commises en République arabe syrienne depuis mars 2011, a affirmé que les « atrocités » commises en Syrie comptent parmi les plus « dévastatrices et barbares » recensées depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Après 11 ans de conflit, la communauté internationale n’a pas réussi à rendre une justice complète au peuple syrien. Les problèmes auxquels nous sommes confrontés ne sont pas de nature juridique, il s’agit de l’incapacité de la communauté internationale à parler d’une seule voix face à ces atrocités, a observé Mme Marchi-Uhel, qui a souligné qu’il est rare que justice soit rendue lorsque « les grandes puissances sont en désaccord » au sujet d’un conflit en cours. Les réfugiés et personnes déplacées ne peuvent rentrer chez eux en toute sécurité et, alors que les hostilités se poursuivent, la détention illégale et les crimes connexes persistent et il reste difficile de fournir aux familles des informations crédibles sur leurs proches disparus. Or, a-t-elle rappelé, sans cessation des hostilités, sans processus de paix, sans justice, y compris la justice transitionnelle, sans réconciliation, rien de tout cela n’est possible. Le véritable test pour cette Assemblée générale est double, a-t-elle estimé: l’efficacité avec laquelle elle a répondu à la situation actuelle en Syrie, et la manière dont elle veillera à ce que les principaux responsables répondent de leurs actes. La justice internationale est peut-être imparfaite, mais elle reste une force avec laquelle il faut compter, « une fois qu’elle est en marche », a estimé Mme Marchi-Uhel.
Le Mécanisme, a-t-elle rappelé, a été créé pour collecter, consolider et analyser les informations et preuves des principaux crimes internationaux commis en Syrie avec deux objectifs: aider les juridictions qui enquêtent sur ces crimes et ont ouvert des poursuites, et soutenir les futures voies judiciaires, « si et quand elles seront disponibles ». Le Mécanisme coopère actuellement avec 13 juridictions différentes et a reçu plus de 180 demandes d’assistance, relatives à plus de 150 enquêtes distinctes, dont près d’une centaine ont déjà été soutenues, a précisé la magistrate. La plupart de ces procédures en sont encore au stade de l’enquête et ne sont pas publiques, tandis que d’autres ont donné lieu à des procès ou ont abouti à des condamnations, notamment en Allemagne, en Suède et aux Pays-Bas. Un tribunal allemand de Coblence a d’ailleurs fait la une des journaux du monde entier lorsqu’il a établi, dans deux verdicts distincts, que des crimes contre l’humanité avaient été commis dans le cadre d’une attaque généralisée et systématique contre la population civile par l’État syrien, par l’intermédiaire de ses forces de sécurité et de ses services secrets, entre avril 2011 et septembre 2012, a-t-elle indiqué. Un tribunal de Francfort a en outre établi que les crimes contre les Yézidis s’apparentent à un génocide.
Nous ne pouvons sous-estimer l’importance de telles conclusions juridiques, a considéré l’intervenante. Elles ne sont peut-être pas contraignantes pour d’autres juridictions, mais elles fournissent des orientations qui font autorité et établissent des faits sur lesquels le doute n’est pas permis. Et d’autres sont en cours, s’est félicitée Mme Marchi-Uhel. Plusieurs États ont publié des informations sur leurs procédures en cours, notamment l’Autriche, la Belgique, la France, l’Allemagne et la Suisse. Les autorités judiciaires des États ont également de plus en plus recours à des équipes d’enquête conjointes et coopèrent plus étroitement entre elles. Les Pays-Bas, rejoints par le Canada, ont engagé une procédure faisant valoir que la République arabe syrienne a manqué à ses obligations au titre de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. « La liste des développements judiciaires pertinents s’allonge d’année en année. La demande pour notre travail augmente en conséquence », s’est félicitée la magistrate.
Mme Marchi-Uhel a ensuite indiqué que le Mécanisme avait ouvert deux nouveaux dossiers sur des événements survenus en Syrie en 2015 et 2017, qui impliquent l’utilisation présumée d’armes chimiques et conventionnelles, notamment contre des installations médicales. Le Mécanisme a également finalisé et partagé un module de preuve visant à établir l’existence d’une attaque systématique contre une population civile pour étayer les accusations de crimes contre l’humanité pour les agissements liés à Daech en Syrie. Par ailleurs, le Mécanisme a mis au point un système préliminaire pour saisir les informations relatives aux personnes disparues et partage fréquemment ces données avec l’une des entités mandatées pour les rechercher. Mme Marchi-Uhel a cependant estimé que « nous devons être honnêtes avec nous-mêmes quant à ce qui peut être réalisé en ce moment, en supposant que les circonstances ne changent pas, et ajuster les attentes en conséquence ».
M. MARIO BUCARO, Ministre des affaires étrangères du Guatemala, a appuyé d’emblée les travaux du Mécanisme international et impartial pour la Syrie. Il a appelé à la défense des obligations internationales découlant du droit international des droits de l’homme, ainsi que du droit international en général et du droit des réfugiés, faisant remarquer que ces obligations sont intrinsèquement liées à la protection de la population civile. Pour contribuer à celle-ci, le Guatemala a toujours participé au maintien de la paix au sein des Nations Unies et prôné le dialogue et la médiation, a expliqué le Ministre. Il est impératif, selon M. Bucaro, de mettre en œuvre sur le territoire syrien la Convention sur l’interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage des armes chimiques et sur leur destruction. Dans cet esprit, il a condamné toute violation de cet instrument international, ainsi que l’utilisation de ce type d’armes par tout acteur et en toute circonstance, exigeant que les responsables soient tenus responsables de leurs actes et qu’il n’y ait pas d’impunité. En ce qui concerne le financement du Mécanisme, le Ministre a fait valoir qu’un instrument qui contribue à l’établissement des responsabilités doit être financé par le budget ordinaire de l’ONU, afin de garantir son impartialité et son indépendance, et de lui assurer un financement prévisible. Le manque de ressources peut compromettre sa pérennité, a mis en garde le Ministre.
M. SILVIO GONZATO, de l’Union européenne, a indiqué que plusieurs jugements ont été rendus contre des responsables syriens dans plusieurs pays européens, en rappelant l’importance de l’établissement des responsabilités pour garantir une Syrie stable et pacifique. L’Union européenne (UE) continue de demander au Conseil de renvoyer la situation en Syrie à la CPI, a-t-il ajouté. Il a assuré que l’UE restera en première ligne des efforts visant à combattre l’impunité en Syrie et qu’elle continuera d’appuyer les efforts de collecte des preuves des atrocités commises, quels qu’en soient leurs auteurs.
Le délégué a apporté son appui au Mécanisme, à la Commission d’enquête internationale indépendante et à l’équipe d’enquête et d’identification de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OAIC). Il a souligné l’importance d’établir les faits sur les atrocités commises en Syrie, y compris le sort des personnes disparues, en vue d’aboutir à une action judiciaire. Il a jugé crucial que l’ONU consacre les ressources nécessaires pour établir les responsabilités dans les atrocités commises, rappelant à cet égard la tenue le 10 mai prochain de la sixième conférence de Bruxelles d’aide pour l’avenir de la Syrie et de la région.
Au nom des pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède), Mme MIIA RAINNE (Finlande) a rappelé que le conflit en Syrie est l’un des plus sanglants de l’histoire récente. À partir d’un paisible soulèvement populaire, la violence de la répression menée par le régime a entraîné, en l’espace de 11 ans, la disparition ou la mort de centaines de milliers de Syriens, tandis que des milliers d’autres ont été soumis à la torture, au viol ou à d’autres formes de traitements cruels et dégradants, et que des millions ont fui leurs foyers. De fait, a-t-elle souligné, il est prouvé, notamment par le Mécanisme, que le régime syrien porte la principale responsabilité de la plupart des violations flagrantes du droit international. Pour la représentante, il ne peut y avoir d'impunité. Elle a jugé cela nécessaire non seulement pour garantir la justice pour les victimes, mais aussi pour prévenir et dissuader de futures violations.
Sur la base du rapport présenté par Mme Marchi-Uhel, la déléguée a noté avec satisfaction que le nombre d’États coopérant et demandant l’assistance du Mécanisme continue d’augmenter. Elle a aussi salué la coopération étendue du Mécanisme avec d’autres parties du système de l’ONU, ainsi qu’avec l’OIAC et la société civile. Elle s’est d’autre part félicitée que le Mécanisme ait ouvert deux nouveaux dossiers portant sur des attaques illégales, notamment chimiques, et qu’il ait progressé dans ses travaux analytiques sur les crimes liés à la détention et les personnes disparues. Applaudissant les actions en cours dans les tribunaux de plusieurs pays pour poursuivre, sur la base du principe de compétence universelle, les crimes commis en Syrie, elle a souhaité que davantage soit fait en la matière et a appelé le Conseil de sécurité à renvoyer la situation en Syrie à la Cour pénale internationale (CPI). Enfin, elle a estimé que l’important travail du Mécanisme nécessite des ressources durables et prévisibles, ce qui ne peut être garanti que par un financement du budget-programme de l’ONU. Les contributions fixées peuvent être complétées par des financements volontaires, a-t-elle aussi suggéré.
M. JULIAN SIMCOCK (États-Unis) a dit que son pays est fier d’appuyer les efforts du Mécanisme dont le travail a eu un impact direct sur la reddition de la justice pour d’anciens responsables du « régime d’Assad ». Nous nous devons d’être clairs sur les moteurs de ce conflit, a-t-il dit avant d’accuser la Fédération de Russie d’avoir ciblé des civils en Syrie et de reproduire ces atrocités en Ukraine. Les États-Unis sont inquiets des informations qui font croire que la Fédération de Russie entend transférer des mercenaires syriens en Ukraine, a-t-il ajouté. Selon M. Simcock, il n’est donc pas surprenant de constater que la Fédération de Russie s’insurge contre le mandat du Mécanisme. Le représentant a salué par ailleurs le courage des Syriens qui décident de fournir des preuves d’atrocités au Mécanisme. Sans responsabilité, il n’y aura pas de justice, et sans justice, pas de paix, a conclu le représentant américain.
M. MOHAMMAD GHORBANPOUR NAJAFABADI (Iran) a regretté la politisation de la justice, déplorant notamment que le Conseil des droits de l’homme n’ait pas renouvelé le mandat du Groupe d’éminents experts sur le Yémen « à cause du vote de ceux qui sont de fervents partisans du Mécanisme ». Il a ensuite relevé que les travaux de ce mécanisme ainsi que ses résultats ont été menés sous le prétexte de confidentialité, décriant une pratique qui porte gravement atteinte à la transparence et à la responsabilisation. Le rapport ne partage pas non plus d’informations concernant les dossiers sur lesquels il travaille, a accusé M. Ghorbanpour pointant l’absence d’informations sur les sources des preuves, les procédures de collecte et de traitement ainsi que l’identité des personnes qui coopèrent avec le Mécanisme. En revanche, le rapport n’hésite pas à faire référence à la coopération entre le Mécanisme et les gouvernements parties à la crise syrienne dont le rôle néfaste est connu, a-t-il déploré.
M. MLADEN BRUČIĆ-MATIC (Croatie) a considéré que le nombre croissant de demandes d’assistance adressées au Mécanisme témoigne de son importance cruciale dans la lutte contre l’impunité, pour ensuite le remercier de ses efforts pour prêter attention aux crimes sexuels et sexistes et aux crimes contre les enfants. Il a encouragé le Mécanisme à poursuivre son travail sur la stratégie globale relative au genre et sur son approche centrée sur les victimes survivantes et à se pencher sur le transfert croissant d’informations aux acteurs mandatés pour rechercher les personnes disparues.
Le représentant a ensuite dénoncé le ciblage délibéré de civils en Ukraine. Les attaques indiscriminées commises contre eux ne sont pas seulement « moralement abjects », mais constituent des crimes de guerre et, si elles sont commises de manière généralisée ou systématique, des crimes contre l’humanité. Nous devrions donc soutenir tous les efforts visant à établir la responsabilité des crimes commis en Ukraine, a estimé le délégué, pour qui justice doit être rendue aux victimes, « en Ukraine et en Syrie », et ailleurs.
Mme YOKA BRANDT (Pays-Bas) a commencé par citer les propos d’un Syrien torturé à la prison d’al-Khatib, qui estimait que le processus d’enquête en Syrie était un motif d’espoir pour la justice. Les mots de cet homme, qui a ensuite témoigné devant le tribunal de Coblence, soulignent l’importance de poursuivre cet effort, a-t-elle affirmé. Elle s’est félicitée à cet égard que ce même tribunal allemand ait condamné, en janvier dernier, un haut responsable du Gouvernement Assad pour des crimes contre l’humanité. À ses yeux, ce verdict « historique » est non seulement le point de départ de futurs procès mais aussi le point culminant de la recherche des faits et de la collecte de preuves. C’est aussi, selon elle, le signe de la grande détermination des Syriens qui sont prêts à témoigner ou font sortir des éléments de preuve de Syrie, et des journalistes qui continuent de rendre compte de la terreur qui sévit toujours.
Nous devons veiller à ce que les mots justice et responsabilité « ne sonnent pas creux » et conduisent à des actes, a martelé Mme Brandt, estimant qu’un pas important dans ce sens a été franchi avec la création du Mécanisme qui « ouvre la voie à la justice pour les Syriens ».
M. ELIE ALTARSHA (République arabe syrienne) a dénié toute légitimité au Mécanisme et dit qu’il n’entend pas discuter du rapport. « Ce mécanisme n’est pas licite, ni légitime, il est utilisé par certains pays pour exercer des pressions sur la Syrie », a tranché le délégué. Il a rappelé que la Syrie n’a pas demandé la création d’un tel mécanisme et n’a pas sollicité l’aide juridictionnelle de l’ONU. La Syrie a lancé de nombreuses enquêtes pénales et est dotée des outils nécessaires pour rendre la justice. Il a ajouté que ce mécanisme viole plusieurs dispositions de la Charte des Nations Unies et que toute décision relative à ce mécanisme est nulle et non avenue. L’ONU ne doit pas fournir des ressources audit mécanisme.
Le délégué a refusé toute validité aux éléments de preuve collectés par le Mécanisme, ces éléments étant fournis par des organisations terroristes comme les Casques blancs et ne peuvent être versés à des procédures judiciaires. Il a estimé que la sélectivité et une approche de deux poids, deux mesures ont perverti les efforts d’établissement des responsabilités au sein de l’ONU, en fustigeant ces pays qui ont attaqué la Syrie. « Ces pays doivent rendre des comptes pour leurs actes. » Il a exhorté à ne pas céder aux pressions des pays occidentaux et à ne pas doter le Mécanisme de ressources.
M. ROBERT RAE (Canada) a soutenu le Mécanisme international, impartial et indépendant en réfutant les propos de ceux qui l’ont critiqué et en réaffirmant sa légitimité et sa crédibilité. Le représentant a rappelé que le Canada a accueilli, depuis 2013, 73 000 Syriens, qui sont aujourd’hui éligibles à la citoyenneté et qui se sont intégrés dans le tissu social canadien. « Leur histoire est devenue la nôtre », a-t-il affirmé en revendiquant leur droit à la justice. C’est dans cet esprit qu’il a salué le travail inclusif du Mécanisme qui se concentre sur les victimes et collabore avec la société civile. Il s’est félicité des efforts pour intégrer une perspective de genre dans ses travaux.
Après 11 ans de conflit, il est temps que la communauté internationale réaffirme son soutien aux initiatives de responsabilité et de justice en Syrie, comme le Mécanisme international, impartial et indépendant, a-t-il poursuivi en indiquant soutenir son financement par l’entremise du budget ordinaire de l’ONU. Il a rappelé que, depuis le début de la crise, le Canada a fourni 33 millions de dollars à des efforts propres à la Syrie, notamment pour la destruction d’armes chimiques et pour soutenir les travaux de la mission de vérification et d’enquête. Aujourd’hui, l’heure est venue d’établir des voies qui mènent davantage vers la justice et vers la paix, a estimé le représentant. Répondant aux interventions de la Syrie et de l’Iran au sujet des « enquêtes confidentielles » du Mécanisme, il leur a dit qu’il ne peut imaginer un système pénal qui puisse ne pas agir de la sorte. Suggérez-vous vraiment qu’un mécanisme d’enquête puisse divulguer les noms des témoins alors que l’enquête est en cours, leur a-t-il demandé. Si vous ne voulez pas de ce mécanisme, alors vous devez tout faire pour que l’impunité ne devienne pas un mode de vie, leur a-t-il encore répondu en réfutant toute accusation de politisation ou d’ingérence.
Mme MARITZA CHAN (Costa Rica) a jugé essentiel que le Mécanisme maintienne une perspective centrée sur les victimes et les survivants qui intègre également une perspective de genre et tienne compte des besoins stratégiques des personnes disparues, entre autres. En ce sens, elle a jugé qu’une analyse de genre avec une approche inclusive est essentielle pour garantir la justice aux victimes de violations graves des droits humains et du droit international en Syrie. Par ailleurs, la représentante s’est félicitée de l’accès accordé aux membres du Mécanisme pour consulter des documents recueillis par le Mécanisme d’enquête conjoint de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) et de l’ONU.
La déléguée a ensuite regretté que la décision d’inscrire le financement du Mécanisme au budget ordinaire ait été à nouveau contestée par certains États Membres et qu’il ait été nécessaire de recourir à un vote au sein de la Cinquième Commission pour son approbation. Le Mécanisme a un rôle clef à jouer non seulement pour mettre fin à l’impunité pour les crimes commis en Syrie, mais aussi pour rendre visibles les victimes qui ont été oubliées, a-t-elle souligné.
M. THOMAS ZAHNEISEN (Allemagne) a insisté sur l’importance du concept juridique de « compétence universelle » des tribunaux nationaux. Il a expliqué que l’Allemagne a adopté ce concept du fait de son histoire troublée, soulignant qu’il ne peut y avoir de réconciliation sans justice. Il a expliqué que c’est grâce à la collaboration du Mécanisme que les tribunaux allemands ont pu trancher sur des affaires liées à la guerre en Syrie. Le représentant a ensuite exhorté tous les États à adopter le principe de compétence universelle, avant de promettre que l’Allemagne poursuivra son assistance au Mécanisme.
M. MITCHELL FIFIELD (Australie) a salué les progrès réalisés par les juridictions nationales dans les enquêtes et les poursuites relatives aux crimes commis en Syrie, y voyant une indication de la valeur ajoutée du Mécanisme. Il a toutefois reconnu qu’il reste encore du travail à faire, citant notamment les allégations de prises d’otages, de détentions arbitraires et d’utilisation continue de tactiques de siège par les forces syriennes. Il a exhorté les États Membres à défendre de vive voix l’obligation de rendre des comptes et d’assurer la justice pour les crimes commis en Syrie. L’impunité ne doit pas prévaloir, en Syrie ou ailleurs, a martelé le représentant qui a appelé toutes les parties au conflit à coopérer pleinement avec le Mécanisme.
Mme SHARIFA AL-NESF (Qatar) a fait remarquer que l’établissement des responsabilités est un facteur de réconciliation. Cela ne peut que profiter au processus de paix, a-t-il ajouté. La déléguée a assuré que son gouvernement continuera de soutenir toutes les parties concernées pour qu’elles parviennent à une solution à la crise syrienne et à une transition politique menée par les Syriens eux-mêmes. Elle a souligné la nécessité d’appuyer le Mécanisme pour qu’il obtienne les moyens de s’acquitter de son mandat par le biais du budget ordinaire de l’ONU.
Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a constaté que quand l’impunité règne, les auteurs d’infraction s’enhardissent et cela devient une méthode de guerre. À cet égard, elle s’est félicitée que l’Assemblée générale ait su réagir à un nouveau conflit en lien étroit avec la situation en Syrie. Voyant dans la guerre en Ukraine une « répétition des stratagèmes russes » observés en territoire syrien, elle a jugé que ce nouveau conflit souligne la nécessité d’établir la responsabilité des crimes commis en Syrie. Elle a ensuite rappelé qu’en décembre 2016, le Luxembourg a présenté le projet de résolution portant création du Mécanisme pour la Syrie. Sa création était, selon elle, animée par « l’horreur, la honte collective, l’inactivité du Conseil de sécurité et la conviction que la redevabilité était non seulement nécessaire mais aussi possible ».
Saluant le travail effectué par le Mécanisme, qui a notamment appuyé 91 enquêtes menées au niveau national, la représentante s’est réjouie qu’il soit soutenu par la volonté exprimée par l’Assemblée générale d’assurer son fonctionnement sur la base du budget ordinaire de l’ONU. Malgré cela, a nuancé la déléguée, le Mécanisme n’est qu’une réponse partielle au défi de la responsabilisation. En effet, il n’est pas un tribunal et des lacunes restent à combler, a-t-elle relevé. Formant le vœu que les procès devant le tribunal régional supérieur de Coblence (Allemagne) ne soient « qu’un début », elle a souhaité que le Conseil de sécurité renvoie la situation syrienne à la CPI. Il ne pourra y avoir de paix durable en Syrie sans la justice, a-t-elle conclu.
M. JAKUB KULHANEK (République tchèque) a déclaré qu’avec ce débat « nous n’oublions aucun des conflits qui font rage dans le monde ». Il a souligné que le Mécanisme est un outil vital et contribue à l’état de droit. Il a déploré que le Conseil n’ait pas renvoyé la situation en Syrie à la Cour pénale internationale (CPI), en raison de l’exercice du droit de veto. Le délégué a enfin souhaité que le Mécanisme soit financé par le budget ordinaire de l’ONU et annoncé une contribution financière volontaire de son pays pour son financement.
M. MAURIZO MASSARI (Italie) a déploré les souffrances endurées par le peuple syrien au cours des 11 dernières années, plaidant pour l’application de la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité afin de trouver une issue pacifique au conflit. Pour parvenir à une paix durable il faut assurer la pleine redevabilité pour les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, a-t-il fait valoir, appelant à la cessation de l’impunité en Syrie. C’est dans cet esprit que l’Italie a appuyé le Mécanisme depuis sa création, a-t-il ajouté. Le représentant a salué la coopération croissante entre le Mécanisme et les autorités nationales, et a plaidé pour un renvoi des dossiers nationaux à la CPI. Il a salué l’approche axée sur les victimes et les rescapés du Mécanisme, ainsi que ses travaux thématiques. Le représentant a ensuite estimé que le Mécanisme doit être financé à partir du budget ordinaire de l’ONU.
M. DARREN CAMILLERI (Malte)a cité des comptes rendus de « témoignages glaçants » sur les exactions commises par le régime. Il a prévenu qu’il ne suffit pas d’entendre les victimes et qu’il est indispensable de leur rendre justice. Dans ce contexte, il a exhorté les États Membres à coopérer étroitement avec le Mécanisme avant de saluer les efforts entrepris par celui-ci pour déterminer le sort des personnes disparues. Dans l’attente de résultats, il a estimé que le respect d’un cessez-le-feu et la mise en œuvre d’une solution politique conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité est la seule façon de progresser vers de la justice. Il a prévenu que les crimes de guerres et crimes contre l’humanité ne peuvent et ne doivent en aucun cas rester impunis. Enfin, il a suggéré que le Conseil de sécurité renvoie la question de la Syrie devant la Cour pénale internationale.
Mme PASCALE BAERISWYL (Suisse) a appelé tous les États Membres à collaborer étroitement avec le Mécanisme. Selon elle, les poursuites judiciaires ouvertes dans plusieurs États démontrent la pertinence de son travail, ainsi que l’importance du principe de la compétence universelle, comme en témoignent certains verdicts rendus récemment en Europe. En Suisse, une modification du cadre législatif relatif à l’entraide pénale internationale est entrée en vigueur en juin 2021, a-t-elle signalé en expliquant que cela permet au pays d’accroître sa coopération avec le Mécanisme et d’autres mécanismes pénaux internationaux. Toutefois, pour que le Mécanisme puisse continuer sa mission, il est essentiel de lui assurer un financement durable, a plaidé la déléguée, qui a demandé de l’inclure dans le budget ordinaire de l’ONU. Par ailleurs, soulignant que la reddition de la justice est indispensable pour instaurer une paix durable en Syrie, Mme Baeriswyl a salué l’appui qu’offrent certaines organisations locales syriennes au travail du Mécanisme. Elle a rappelé que la Suisse et les Pays-Bas s’efforcent depuis 2017, par le biais du processus de Lausanne, de faciliter la coopération et la transmission des informations entre le Mécanisme et les ONG syriennes.
Mme KRISTEL LÕUK (Estonie) a appelé le Conseil de sécurité à saisir la CPI de la situation en Syrie. Elle a salué le travail du Mécanisme y compris le développement de son répertoire central et l’amélioration de ses analyses pour un certain nombre d’enquêtes concernant les crimes commis en Syrie. Elle a appuyé les efforts déployés par le Mécanisme pour garantir une justice inclusive et centrée sur la victime ou les personnes rescapées, en prêtant attention aux crimes sexuels et sexistes et aux crimes contre les enfants. Elle a dit « être impatiente » de lire la stratégie de genre du Mécanisme.
Compte tenu de la gravité et de l’ampleur de la question des personnes disparues, Mme Louk a souligné l’importance des travaux du Mécanisme visant à accroître le transfert d’informations sur ces dernières et son engagement continu avec les acteurs de la société civile syrienne afin de mieux comprendre et refléter les besoins des communautés locales. Elle a par ailleurs estimé que le Mécanisme doit continuer d’être financé à partir du budget ordinaire de l’ONU.
M. ONCU KECELI (Turquie) a dénoncé les crimes commis par le « régime syrien », notamment les attaques à l’arme chimique et à l’encontre de son propre peuple, avant de saluer le Mécanisme pour ses efforts visant à établir les responsabilités. Mais pour lui permettre de continuer son importante mission, il doit pouvoir bénéficier des ressources suffisantes par le biais d’un financement adéquat assuré par le budget ordinaire de l’ONU, a souligné le représentant qui a exhorté tous les États Membres à lui apporter son soutien.
M. OLIVIER MAES (Luxembourg) a observé que l’actualité montre à nouveau l’importance de la lutte contre l’impunité pour la prévention des conflits et des crimes. « On ne peut que s’interroger sur le lien entre l’impunité pour les crimes commis en Syrie et l’agression de la Russie contre l’Ukraine », a-t-il dit, avant de se féliciter que le Mécanisme international, impartial et indépendant continue de faire la preuve de son efficacité en tant qu’acteur de la justice. Selon lui, la création du Mécanisme en 2016 a permis de franchir une étape décisive dans l’identification des responsables de ces crimes, notamment grâce à la collecte, à la préservation et à l’analyse d’éléments de preuve. Elle a aussi illustré le rôle important que l’Assemblée générale peut jouer quand le Conseil de sécurité est paralysé par le veto, a ajouté le délégué, rappelant à cet égard que son pays avait plaidé en 2013, avec 56 autres États, pour que le Conseil saisisse le Procureur de la CPI de la situation en Syrie. Or le Conseil n’avait pas été en mesure d’adopter une résolution déférant la situation en Syrie à la Cour, le 22 mai 2014, en raison du vote négatif de deux membres permanents, a-t-il regretté. Près de huit années plus tard, a poursuivi M. Maes, force est de constater que les crimes continuent. Pour mettre fin au conflit et aux atrocités en Syrie, il est indispensable d’œuvrer à une solution politique, ce qui n’est pas incompatible avec la lutte contre l’impunité, a-t-il plaidé.
Mme SHANNON TAU (Nouvelle-Zélande) a apporté son plein appui au travail du Mécanisme international, impartial et indépendant, estimant qu’il joue un rôle crucial dans la lutte contre l’impunité pour les atrocités commises en Syrie. Elle a salué le recours aux moyens technologiques de la part du Mécanisme, s’agissant notamment de la collecte d’éléments de preuve. Le travail que le Mécanisme doit encore abattre est immense, a conclu la déléguée de la Nouvelle-Zélande, en lui apportant une nouvelle fois son soutien.
Mme DIARRA DIME-LABILLE (France) a rappelé que la France apporte son plein soutien au Mécanisme pré-juridictionnel depuis sa création, ce qui se manifeste entre autres, par la signature d’une convention de coopération judiciaire internationale entre la France et le Mécanisme, le 29 juin 2021. Elle a salué la prise en compte systématique des questions liées au genre et aux violences contre les femmes dans l’ensemble de ses travaux. Saluant le « courage immense » des acteurs de la société civile syrienne, la représentante les a invités à poursuivre leur coopération avec le Mécanisme, arguant que leur contribution à la justice est essentielle. Elle a ensuite appelé à maintenir le financement du Mécanisme d’enquête sur le budget régulier de l’ONU.
La représentante a ensuite indiqué que la quarantaine de procédures en cours devant les juridictions françaises pour poursuivre les crimes les plus graves commis en Syrie ont fait l’objet de transmissions d’éléments par le Mécanisme. Elle a ajouté que la France agit également au sein de l’OIAC, pour que soit condamné l’emploi par le régime syrien d’armes chimiques contre sa population, et a lancé et préside le Partenariat international contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques, qui réunit aujourd’hui 40 États ainsi que l’Union européenne.
Mme ALBANA DAUTLLARI (Albanie) a salué le travail louable du Mécanisme pour lever les obstacles à l’accès à la justice des personnes les plus marginalisées, ainsi que les efforts visant à élucider la question des personnes disparues qui représente une tragédie pour des milliers de familles syriennes. Elle a dit la nécessité de faire pression sur le « régime Assad » afin qu’il collabore avec le Mécanisme. Elle a assuré que son pays continuera à utiliser sa voix au Conseil de sécurité pour demander à celui-ci de renvoyer la question de la Syrie devant la CPI. Soulignant que seule la redevabilité peut assurer la justice en Syrie comme en Ukraine, elle a indiqué que son pays à participé à la création du Groupe d’amis pour la reddition de comptes en Ukraine.
M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a fait savoir que pour soutenir le Mécanisme, l’Autriche a apporté un soutien financier en 2017 et 2019, saluant le fait que le financement du Mécanisme soit désormais inclus dans le budget ordinaire de l’ONU. Le Mécanisme ayant été créé par l’Assemblée générale, il est logique que son financement intégral provienne du budget ordinaire, a-t-il argué. Dans le même temps, l’Autriche a fait des contributions volontaires en 2021 au Mécanisme. Soulignant que la réconciliation nationale ne peut être réalisée sans responsabilité, il a insisté sur l’importance de tenir pour responsable les auteurs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.
M. OSUGA TAKESHI (Japon) a déclaré que la reddition de comptes est essentielle pour assurer une paix durable en Syrie, s’inquiétant notamment du sort des personnes disparues et de celles qui ont été détenues arbitrairement en Syrie. Il a exhorté à ne pas tolérer l’impunité pour les violations flagrantes des droits humains commises pendant le conflit et a salué les progrès accomplis par le Mécanisme au cours de l’année écoulée.
Le représentant a appelé le Mécanisme à continuer de collaborer étroitement avec l’ONU et d’autres organisations internationales, les États Membres et la société civile dans la poursuite d’une justice inclusive grâce à son approche centrée sur la victime et les personnes rescapées. La crise syrienne ne se terminera pas sans une solution politique conforme à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, a-t-il ajouté.
M. KIM SONG (République populaire démocratique de Corée) a rejeté la légitimité du Mécanisme, dans la mesure où l’Assemblée générale n’avait pas autorité à le créer, une responsabilité qui incombe de façon absolue au Conseil de sécurité. L’adoption de la résolution ayant porté création par l’Assemblée de ce mécanisme est un précédent regrettable et relève d’une « pratique anormale » au sein de l’ONU. Ce mécanisme « illégal », sous couvert de mener des enquêtes impartiales, est coupable d’ingérence dans les affaires internes d’un État, a affirmé le représentant, décriant un « exemple typique » de la politisation, de la politique de deux poids, deux mesures et de la sélectivité à l’œuvre dans l’Organisation. Il a ensuite appelé l’ONU à préserver son impartialité, son objectivité et sa crédibilité en tant que facilitatrice de la recherche d’une solution politique à la crise syrienne.
M. BOSTJAN MALOVRH (Slovénie) s’est félicité des progrès accomplis par le Mécanisme dans toutes les composantes de son mandat. Il a cependant constaté que, malgré son succès, le Mécanisme ne reste qu’une réponse partielle au défi de la responsabilisation dans le conflit syrien. S’il continue de démontrer sa valeur en tant qu’acteur efficace de la justice, le Mécanisme n’est pas un tribunal, a-t-il observé, jugeant qu’un vide crucial reste à combler. À cet égard, le représentant a salué le fait que plusieurs États aient engagé des poursuites pénales devant leurs juridictions nationales sur la base du principe de compétence universelle. Ces procédures sont un pas dans la bonne direction pour lutter contre l'impunité, mais il faut faire davantage pour garantir la justice pour les victimes du conflit syrien, a-t-il plaidé, avant d’appeler à la conclusion d’un nouveau traité d’entraide judiciaire et d’extradition pour la poursuite au niveau national des crimes internationaux les plus graves, comme le prévoit l’initiative dite MLA (Mutual Legal Assistance). Il a également réitéré son appel au Conseil de sécurité pour qu’il renvoie la situation en Syrie à la CPI, estimant que l’impunité pour les atrocités n’est pas acceptable.
M. KARL LEGATIE (Belgique) a salué le travail du Mécanisme international, impartial et indépendant, ainsi que la pertinence de son mandat. Les victimes en Syrie se comptent par centaines de milliers, a-t-il rappelé, en soulignant leur soif de justice, celle-ci étant un élément clef d’une paix durable en Syrie. Le délégué a demandé que le Conseil renvoie la situation en Syrie devant la CPI, avant d’exhorter les pays qui ne l’ont pas encore fait à définir un cadre de coopération avec le Mécanisme. Il a indiqué que son pays a financé le Mécanisme à hauteur de 1,6 million de dollars. Son souhait, a-t-il ajouté, est qu’il soit financé par le budget ordinaire de l’ONU. Enfin, le délégué belge a souligné l’importance d’une justice holistique au service d’une paix durable en Syrie.
M. MICHAL MLYNÁR (Slovaquie) s’est particulièrement félicité de l’aide apportée par le Mécanisme aux poursuites pénales menées par les autorités nationales et les tribunaux régionaux et internationaux, en collectant, analysant et préservant des preuves. En exigeant de la juridiction bénéficiaire qu’elle respecte le droit international des droits de l’homme, y compris le droit à un procès équitable, le Mécanisme contribue au renforcement de l’État de droit et à une procédure régulière, a aussi relevé le représentant avant de citer un total de 173 demandes d’assistance reçues de 13 juridictions durant la période couverte par le dernier rapport. De plus, il a noté un total de 112 demandes traitées concernant 91 enquêtes, qui soulignent la contribution pratique du Mécanisme en Syrie.
En ce qui concerne l’utilisation des preuves recueillies par le Mécanisme, il a dit que tous les motifs fondant une compétence potentielle, y compris la compétence universelle, doivent être pris en compte par les autorités nationales. M. Mlynar a appuyé les recommandations contenues dans le rapport du Secrétaire général qui demandent à l’ONU et à d’autres organisations internationales d’assurer un plein accès au Mécanisme en ce qui concerne les documents détenus au sein du système des Nations Unies relatifs aux crimes commis en Syrie et d’assurer la pleine coopération des organismes de l’ONU avec le Mécanisme, y compris grâce à l’exécution en temps voulu des demandes d’information et d’assistance. Dans le même ordre d’idées, il a exhorté les États à s’assurer que les autorités nationales chargées des enquêtes et des poursuites coopèrent sans heurts avec le Mécanisme, pour faire avancer le mandat de celui-ci et, en même temps, bénéficier de son travail.
M. PEDRO LUIS PEDROSO CUESTA (Cuba) a déclaré qu’il ne soutiendra jamais « un mécanisme qui méconnaît délibérément les principes de la Charte des Nations Unies ». À son avis, le Mécanisme ne fait que saper de façon délibérée la responsabilité de la Syrie et de son système judiciaire pour enquêter et traduire en justice les crimes qui auraient pu être commis sur son territoire. Le Mécanisme transgresse les normes et principes du droit international et représente une procédure dangereuse dans la pratique de l’ONU, a encore dénoncé le représentant pour qui son mandat n’a pas de fondement légal ni juridique. Les États Membres n’ont pas eu la moindre possibilité de se prononcer à ce sujet et encore moins de prendre des décisions sur le mandat du Mécanisme, a regretté le représentant, en pourfendant « un mécanisme qui joue et exerce les fonctions d’un procureur ».
Le Mécanisme vise à établir un lien entre les éléments de preuve concernant des infractions et ceux qui pourraient en être responsables afin de partager les informations avec les cours ou les tribunaux nationaux ou régionaux ou internationaux, a-t-il constaté en jugeant cela « arbitraire sur le plan juridique » et ne correspondant pas aux fonctions judiciaires classiques. Il a également dénoncé le changement de mode de financement du Mécanisme dont il a pointé du doigt les vices de forme, ainsi que les incohérences et les contradictions du rapport qui mettent ainsi en cause sa crédibilité, son objectivité et son impartialité.
M. XING JISHENG (Chine) a tout d’abord appelé à la levée des mesures coercitives unilatérales ciblant la Syrie. Il a ensuite appelé à lutter contre l’impunité, mais demandé que cela se fasse dans le respect du système juridique de chaque pays. Il ne faut pas que le principe de redevabilité soit politisé, a-t-il déclaré, rappelant que la position de la Chine au sujet du Mécanisme reste inchangée.
M. JHON GUERRA SANSONETTI (Venezuela) a rappelé que son pays avait voté contre le projet de résolution portant création « irrégulière » du Mécanisme pour la Syrie, une structure qui, selon lui, viole de manière flagrante les buts et principes de la Charte des Nations Unies. En outre, s’est-il indigné, cette décision, imposée « de force » à l’Assemblée générale par une « majorité de circonstance », avait usurpé les prérogatives du Conseil de sécurité. La création de ce mécanisme, qui prétend être un organe d’enquête indépendant et impartial, non seulement méconnaît le droit souverain des États à enquêter sur des faits survenus sur leur territoire mais établit aussi un précédent néfaste pour les travaux de l’Assemblée générale, a renchéri le délégué, avant de mettre en cause la validité même des éléments de preuve « hypothétiques » qui pourraient être recueillis par le Mécanisme en vue de procédures pénales.
La Syrie a toutes les capacités judiciaires pour répondre à ces crimes, sans qu’il soit nécessaire qu’un organe tiers s’ingère et propose une assistance qui n’a pas été demandée par la Syrie, a poursuivi le représentant, voyant dans ce mécanisme une tentative déguisée de déstabilisation. Il s’agit là d’un nouvel exemple de sélectivité et du « deux poids, deux mesures », par lequel de grandes puissances imposent des mesures de terrorisme économique au peuple syrien, a ajouté le représentant, selon lequel ce mécanisme ne répond en fait qu’à des intérêts nationaux « mesquins ». Appelant à ne plus utiliser l’Assemblée générale pour s’en prendre à des États souverains, il a souligné que, pour parvenir à la paix en Syrie, il importe de ne plus miser sur des sources de division qui nuisent au processus politique.
M. JUAN GÓMEZ ROBLEDO VERDUZCO (Mexique) a pris note des avancées importantes dans la coopération entre certaines juridictions nationales et le Mécanisme, notamment lorsqu’elles le notifient quand elles ont des procédures pénales ouvertes pour les crimes commis en Syrie. Il a espéré que, comme dans les cas de l’Allemagne, de la France et de la Suède, les autorités juridictionnelles nationales utiliseront le Mécanisme comme dépositaire de preuves à l’appui de leurs enquêtes et pour la constitution de dossiers solides. Il a également évoqué la coopération avec l’équipe d’enquête et d’identification de l’OIAC et la commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme. Toutefois, la coordination entre tous ces mécanismes est essentielle pour éviter les doubles emplois et maximiser les ressources, a fait valoir le représentant.
Tout en reconnaissant que ces efforts sont cruciaux dans la lutte contre l’impunité, le représentant a estimé que la situation en Syrie devrait être déférée à la CPI et regretté que l’usage du veto ait entravé cette voie. Il est inadmissible de faire une utilisation abusive du droit de veto pour empêcher la reddition de comptes, y compris le renvoi de certaines situations à la CPI, a-t-il affirmé. Le délégué a ensuite insisté sur l’importance d’octroyer au Mécanisme le budget nécessaire pour lui permettre de mener ses travaux avec efficacité.
En tant que l’un des coparrains du Mécanisme international, impartial et indépendant pour la Syrie dès 2016, M. VOLODYMYR LESCHENKO (Ukraine) a affirmé que son pays soutient fermement la mise en œuvre de son important mandat de collecte de preuves des atrocités commises en Syrie, y compris les meurtres, la torture et le traitement inhumain des personnes. Il est crucial que les victimes et les survivants des crimes internationaux commis en Syrie et leurs familles restent au cœur du travail du Mécanisme, a-t-il estimé avant de condamner dans les termes les plus forts le « régime syrien » et ses alliés, principalement la Russie, pour les violations et abus massifs, systématiques et graves des droits humains et du droit humanitaire. L’impunité n’est pas une option pour les auteurs de crimes aussi odieux, s’est-il indigné en exigeant qu’ils aient à rendre des comptes pour leurs actes.
Constatant que malgré les nombreux appels de la communauté internationale, le « régime syrien » continue d’ignorer ses obligations en matière de protection de la population civile, le délégué l’a exhorté à cesser immédiatement les attaques contre les civils et les infrastructures civiles et à se conformer à ses obligations internationales, y compris celles découlant de la Convention sur l’interdiction des armes chimiques. L’Ukraine continuera à soutenir le Mécanisme international, impartial et indépendant, ainsi que l’équipe d’investigation de l’OIAC, a-t-il fait savoir. Il a également insisté sur l’impératif de la pleine application de la résolution 2254 (2015) pour un règlement pacifique du conflit syrien.
M. BRIAN FLYNN (Irlande) a relevé que le Mécanisme et la mission d’établissement des faits de l’OIAC permettent de combler un fossé d’impunité et accomplissent un travail essentiel pour responsabiliser et protéger l’intégrité d’un système international fondé sur des règles. Après avoir cité en exemple le partenariat contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques lancé le 23 janvier 2018, il a félicité les États qui ont engagé des poursuites pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité devant leurs tribunaux nationaux. Par ailleurs, il a estimé que la situation des détenus et des personnes portées disparues demeure l’une des plus grandes tragédies de ce conflit, se disant inquiet de l’impact psychologique sur les victimes et leurs familles avant d’appeler les autorités syriennes et les autres parties à libérer toutes les personnes détenues et enlevées arbitrairement et à faire connaître le sort des personnes portées disparues. Il a salué l’accent mis sur cette question importante dans la résolution 76/228 adoptée par l’Assemblée générale le 24 décembre 2021.
Le représentant a rappelé que le Secrétaire général a été chargé d’étudier les moyens de renforcer les efforts du Mécanisme. Se désolant qu’une génération d’enfants syriens ait grandi en ne connaissant que le conflit, il a dénoncé la poursuite des violations graves des droits des enfants, dont leur recrutement, leur enlèvement ainsi que les meurtres et les mutilations. Il s’est particulièrement inquiété de la violence sexuelle et sexiste dont sont victimes les filles et du ciblage des établissements d’enseignement et de santé. C’est pourquoi il a mis l’accent sur la nécessité de renforcer la protection des enfants, de faire valoir leurs droits et de demander des comptes aux responsables.
M. KAHA IMNADZE (Géorgie) a estimé que les auteurs de crimes graves et de violations des droits humains et du droit international humanitaire doivent être tenus pour responsables. Il a appelé le « régime syrien » à cesser les attaques contre les civils et les installations civiles, afin de permettre la fourniture sans entrave et continue d’une aide humanitaire sûre, au bénéfice de tous ceux qui en ont besoin, en particulier dans le nord-ouest de la Syrie. Il a également invité le Gouvernement syrien à coopérer pleinement avec le Mécanisme, ainsi qu’avec la Commission d’enquête internationale indépendante sur la République arabe syrienne. Le représentant a également appelé à se joindre aux efforts de la Géorgie, de l’Ukraine et de la communauté internationale pour s’assurer que justice soit rendue pour les crimes que la Fédération de Russie commet contre l’Ukraine.
M. TIMOTHY JAMES SYLVESTER (Royaume-Uni) a réitéré l’appui de sa délégation au Mécanisme qui continue de compiler les cas de violations des droits humains commises contre le peuple syrien, arguant qu’il ne peut y avoir d’impunité pour ceux qui violent le droit international humanitaire et les droits humains. Le huitième rapport du Mécanisme démontre son expertise, son efficacité et sa contribution à la justice internationale, a applaudi le délégué pour qui le nombre croissant de demandes d’assistance accrédite cette évaluation. Il a fait le même constat pour les avancées significatives enregistrées dans l’obtention de la justice, notamment avec le verdict historique rendu à Coblence (Allemagne). Ce verdict a déterminé que des crimes contre l’humanité avaient été commis en Syrie dans le cadre d’une attaque systématique contre la population civile par le « régime d’Assad » entre avril 2011 et septembre 2012, a rappelé le représentant. Il a ensuite pris note de la mise à jour du répertoire central d’informations du Mécanisme. Il a aussi dit être « préoccupé » face à la situation de dizaines de milliers de personnes enlevées et de personnes portées disparues et détenues en Syrie, avant de conclure en demandant la cessation des disparitions et enlèvements.
M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a indiqué que la position de son pays sur le « soi-disant mécanisme » n’a pas varié. Il a rappelé que la République arabe syrienne n’a pas consenti à la mise en place de cette structure, qui, a-t-il indiqué, n’est prévue par aucune résolution du Conseil de sécurité au titre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, estimant que la création dudit mécanisme a violé de manière flagrante les principes d’égalité souveraineté et de non-ingérence dans les affaires intérieures. Ce faisant, l’Assemblée générale a outrepassé son mandat et continue de le faire en recevant des rapports « non sollicités » de cette structure « illégitime » dont les prétendues « preuves » ne peuvent être utilisées sur des bases juridiques dans le cadre de procédures pénales nationales ou internationales. De plus, s’est-il indigné, un groupe de pays occidentaux a « cyniquement » fait adopter le transfert du financement du Mécanisme au budget ordinaire de l’ONU, brisant par là même la tradition de consensus de la Cinquième Commission de l’Assemblée générale. Le « paradoxe » est que ce « jouet » créé pour répondre aux ambitions géopolitiques de l’Occident fonctionne avec « notre argent commun », a-t-il dénoncé.
Le représentant a également décrié le caractère « superficiel » des informations contenues dans les rapports du Mécanisme. Il a ainsi noté que les sources des « soi-disant éléments de preuve » n’y sont pas révélées, pas plus que les modalités de leur collecte et de leur traitement. De même, le Mécanisme refuse de divulguer des informations sur sa coopération avec des ONG telles l’Observatoire syrien des droits de l’homme basé à Londres, ce qui laisse à penser que l’Assemblée générale a contribué à la création d’une « « fabrique de fausses nouvelles ». En effet, a-t-il fait valoir, quelles preuves peuvent fournir des ONG sur des crimes commis dans des pays où elle ne se trouvent pas? Lorsque le Mécanisme explique collecter ses informations « principalement à partir de sources ouvertes », cela signifie « en langage non bureaucratique » qu’il transforme la « propagande occidentale » en « preuves juridiquement pertinentes », a encore soutenu le délégué.
Notant que, dans le but de « justifier son existence », le Mécanisme a annoncé l’achèvement imminent du « module de preuves » concernant les attaques systématiques de Daech contre la population civile en Syrie, le représentant a fait remarquer que les organismes syriens se sortent très bien de leurs enquêtes sur ces crimes. À cet égard, il a jugé que les méthodes de travail du Mécanisme ne permettent pas de respecter les critères de pertinence et de recevabilité des preuves recueillies et les rendent absolument inutiles pour les enquêtes nationales. Il s’est par ailleurs étonné qu’une structure « illégitime » telle que le Mécanisme ait eu accès aux archives de l’OIAC, sans l’accord du Conseil de sécurité, et a enjoint le Secrétariat à mettre fin à cette pratique. Enfin, il a averti les « auteurs » du Mécanisme que les « mensonges » reproduits par ce dernier ne conduiront à « aucun changement de régime ».
Droits de réponse
Exerçant son droit de réponse, le représentant de la Syrie a rappelé que les forces d’occupation des États-Unis ont commis un « acte horrible » en 2019 en Syrie, au cours duquel 70 femmes et enfants ont perdu la vie, et qui n’est mentionné nulle part dans le rapport du Mécanisme. Il a affirmé que les actes horribles cesseront en Syrie dès que les forces d’occupation se seront retirées, lorsqu’on ne soutiendra plus les groupes terroristes en Syrie et lorsque les sanctions seront levées.
Il a dit ne pas vouloir répondre à la Turquie, « alors qu’il pourrait parler des mois entiers de la guerre que mène la Turquie en Syrie », mais lui a fait remarquer que le chef de Daech a été éliminé dans un village à quelques mètres de la frontière turque. Au Canada, qui a demandé des mesures pour lutter contre l’impunité en Syrie, le représentant a souligné que celles-ci doivent s’appliquer à tous, y compris aux gouvernements qui ont financé la guerre en Syrie. Le représentant a ensuite rappelé que la Syrie avait fourni des informations à l’OIAC qui ont ensuite été transmises au Mécanisme, se demandant au nom de quel droit l’OIAC a pu se permettre d’agir ainsi.
Le représentant de l’Iran a souligné que le Mécanisme n’est pas un organe juridique étant donné l'Assemblée générale n’a pas le mandat de créer un tel organe. Selon lui, le Mécanisme est avant tout un outil politique qui représente une atteinte à la souveraineté et à l’intégrité de la Syrie.
À son tour, le représentant de la Fédération de Russie a affirmé que les dirigeants ukrainiens s’en prennent à leur propre population en utilisant des sites civils pour l’installation de matériels militaires ou en torturant des prisonniers. Il a dénoncé l’approche sélective des parrains occidentaux de l’Ukraine, avant de promettre que la Fédération de Russie ira au bout de son entreprise de dénazification de l’Ukraine.
« Qui se trouve actuellement sur le territoire ukrainien? » a demandé en russe le représentant de l’Ukraine s’adressant directement à son homologue de la Fédération de Russie. « Ce sont vos forces armées, et vous vous permettez de nous accuser de tuer notre propre peuple. C’est absurde. »
SUIVI DE LA QUATRIÈME CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS (A/76/L.47)
Décision sur le projet de résolution
Un représentant du Secrétariat a fait état des incidences budgétaires à prévoir pour la mise en œuvre de la résolution adoptée. Des ressources d’un montant de 52 800 dollars devraient être prévues par le projet de budget-programme de l’ONU pour 2023, tandis qu’il faudrait inscrire des ressources d’un montant de 26 400 dollars au projet de budget-programme de 2024.
Explications de position
Au nom des pays les moins avancés (PMA), la représentante du Malawi s’est déclarée enchantée que l’Assemblée générale ait approuvé le Programme d’action de Doha par acclamation. Elle a émis l’espoir qu’ainsi les plus marginalisés de la communauté internationale ne seront pas oubliés. L’adoption de ce « pacte mondial ambitieux », qui reflète les aspirations des PMA, permettra d’engager un relèvement rapide et de renforcer la résilience de ces pays en vue de leur mise œuvre du Programme 2030, s’est-elle félicitée. À ses yeux, l’application du Programme d’action s’impose de toute urgence en cette « période sans égale ». En effet, a expliqué la représentante, nos pays ont du mal à se relever des multiples répercussions de la pandémie de COVID-19. Les gains du développement ont été perdus, l’inflation bat des records, les taux d’intérêt sont galopants et la dette est plus lourde que jamais, ce qui paralyse nos économies.
De plus, a-t-elle ajouté, la guerre en Ukraine a jeté de l’huile sur le feu, en faisant bondir les prix, notamment ceux de l’énergie, à des niveaux supérieurs que ce que l’on a vu lors de la crise financière de 2008. Tout cela touche durement les 46 PMA, a souligné la déléguée, avant d’appeler les États Membres à appliquer le Programme d’action à tous les niveaux, en coordination avec la Haute-Représentante pour les pays les moins avancés. De même, après avoir invité les partenaires au développement à aller au-delà de leurs engagements et à répondre aux besoins urgents des PMA, elle a demandé à l’ONU de renforcer les moyens du Bureau de la Haute-Représentante, dont la charge est croissante. Enfin, elle a tenu à remercier le Qatar pour l’aide apportée à l’organisation de la Conférence de Doha.
Le représentant de la Chine a salué l’adoption de la résolution qui permet d’entériner le Programme d’action de Doha. Il a espéré que la deuxième partie de la Conférence se tiendra comme prévu et qu’on pourra ainsi obtenir davantage de résultats en matière de développement durable des PMA. Lors de la première partie de la Conférence, le 17 mars, la Chine avait déjà parlé de la partie ayant trait à l’allégement de la dette, ayant des réserves quant aux paragraphes sur ce sujet. Le libellé est selon elle trop vague et trop vaste. Ce n’est pas le miroir des engagements de la communauté internationale en la matière, a commenté le représentant qui n’a pas jugé ces dispositions propices à aider les PMA à alléger le fardeau de leur dette. Il a suggéré d’utiliser plutôt des termes tels que la suspension ou le traitement de la dette. La Chine se dissocie donc du paragraphe 29 notamment, a dit le délégué.
Tout en comprenant la nécessité d’adopter ce projet de résolution dans l’intérêt des pays les moins avancés (PMA), le représentant de la Fédération de Russie a souhaité se dissocier de certains paragraphes adoptés sans l’accord d’un certain nombre d’États, regrettant que la position de certains États ne soit pas reflétée dans ce programme d’action. Il a regretté que cela ne soit pas vraiment le reflet d’un consensus et qu’il y ait des concepts « un peu polémiques ». Il a dit se dissocier de certains paragraphes, notamment le 28.