Soixante-seizième session,
62e séance – matin
AG/12409

L’Assemblée commémore la Journée contre la discrimination raciale en appelant à faire entendre la voix des États Membres contre le racisme systémique et pour une justice réparatrice

La Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale a été commémorée cette année sous la forme d’un appel à faire entendre la voix des Nations Unies dans la lutte contre le racisme.  Les intervenants ont reconnu les progrès réalisés à cette fin au cours des deux dernières années, notamment dans le sillage de mouvements citoyens planétaires salués par l’Assemblée générale en 2020.  Mais le combat contre le racisme et pour la justice est plus urgent que jamais, ont déclaré d’un seul front le Secrétaire général, M. António Guterres, la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Mme Michelle Bachelet Jeria, et le Président de l’Assemblée générale, M. Abdulla Shahid - qui a par ailleurs déclaré que les pensées de l’Assemblée allaient « au peuple ukrainien ».

La Vice-Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, Mme Verene Shepherd, a ainsi demandé aux États Membres de « déraciner le racisme systémique », ces propos forts faisant écho à ceux de M. Guterres qui en a appelé à une justice réparatrice pour réaliser l’égalité entre les races et « expier l’héritage de siècles d’esclavage et de colonialisme ».  Pour édifier un avenir de justice, il faut redresser les torts du passé, s’est-il exclamé, annonçant par ailleurs la nomination imminente d’un conseiller spécial chargé de superviser la mise en œuvre du Programme de transformation pour la justice et l’égalité raciales en quatre points.  

Le Secrétaire général et les différents groupes régionaux qui ont pris la parole ont réaffirmé la portée de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, ainsi que de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  La Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, a ajouté que ces fers de lance de la lutte antiraciste devaient s’enrichir de la participation des groupes ethniques marginalisés, les mêmes « qui subissent la violence des gouvernements quand ils se mobilisent contre ce qui les oppresse et maintient les hiérarchies raciales ».  Mme Tendayi Achiume a également appelé les États Membres à mettre fin à ce qu’elle a qualifié d’apartheid vaccinal. 

Le Lesotho, au nom du Groupe des États d’Afrique, a également rappelé que ces derniers sont attachés à ce que les réparations pour l’esclavage et le colonialisme passent par une reconnaissance sans équivoque des torts historiques, pour permettre « l’éradication des cicatrices laissées par l’inégalité raciale, la subordination et la discrimination qui furent la marque des fléaux de l’esclavage, de l’apartheid et du colonialisme ». 

D’autre part, évoquant cette fois les nouvelles formes de racisme, Mme Bachelet Jeria a attiré l’attention sur les algorithmes intégrés dans les recherches sur Internet, qui renforcent souvent les stéréotypes et les préjugés raciaux négatifs.  Elle a également fait remarquer que les outils de reconnaissance faciale sont souvent utilisés à des fins de surveillance, lesquels peuvent être une source de discrimination susceptibles de renforcer les pratiques douteuses des forces de l’ordre à l’encontre des minorités.  Dans son allocution, M. Guterres avait appelé les États Membres à combattre et dénoncer les discours de haine diffusés en ligne. 

Prenant la parole en tant que pays hôte des Nations Unies, les États-Unis ont rappelé qu’à l’été 2020, l’organisation « Black Lives Matter » avait « ébranlé le monde entier », des mouvements sociaux semblables ayant essaimé en Afrique et en Amérique du Sud.  « Nos différences sont la source de nos forces, et l’atout majeur des États-Unis a toujours été sa diversité », a affirmé la représentante américaine, assurant que la lutte contre les discriminations est une priorité de l’Administration Biden, comme en atteste le soutien apporté par celle-ci à la mise en place de l’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine. 

Le Nigéria est à l’origine de la création de cette instance chargée d’appuyer les efforts mondiaux contre la discrimination raciale.  Pour autre rappel, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale est entrée en vigueur il y a près de 50 ans.  Elle a été suivie de la Déclaration et du Plan d’action de Durban, et du Programme de développement durable à l’horizon 2030 dont l’une des bases est la non-discrimination.

Instaurée en 1966, la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale est commémorée chaque année le 21 mars, en souvenir des 69 manifestants pacifiques et non armés assassinés par la police sud-africaine en 1960, à Sharpeville, en Afrique du Sud.

Des appels ont aussi été entendus ce matin pour éliminer le racisme en tirant parti de l’énergie, de l’optimisme et du militantisme de la nouvelle génération.  Le rôle important des jeunes du monde entier a été souligné, car ils sont « à l’avant-garde de la lutte contre le racisme ».

Par ailleurs, l’Assemblée générale a procédé à la nomination du Pakistan comme membre du Conseil du Cadre décennal de programmation concernant les modes de consommation et de production durables pour une durée de deux ans.  

ÉLIMINATION DU RACISME, DE LA DISCRIMINATION RACIALE, DE LA XÉNOPHOBIE ET DE L’INTOLÉRANCE QUI Y EST ASSOCIÉE

Réunion commémorative à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale organisée en application de la résolution A/76/226 de l’Assemblée générale du 24 décembre 2021

Déclarations

M. ABDULLA SHAHID, Président de la soixante-seizième session de l’Assemblée générale, a tout d’abord exprimé de profondes inquiétudes face aux rapports alarmants faisant état de violences contre les civils, en particulier les femmes et les filles, en Ukraine.  « Nos pensées vont au peuple ukrainien en ce jour », a-t-il annoncé.  Depuis l’instauration de cette journée internationale il y a plus d’un demi-siècle, « l’élimination de la discrimination raciale continue de nous échapper », avec, partout dans le monde, une augmentation des discours haineux, intolérants, racistes, et ce, malgré la ratification quasi universelle de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, a déploré le Président.  C’est un échec face à tout ce que nous défendons dans la salle de cette Assemblée, et cela doit changer, a-t-il poursuivi.

Rappelant « l’obligation morale » de s’attaquer au racisme sous toutes ses formes, il a estimé que l’engagement à l’égard de la Déclaration de Durban et de son programme d’action est une étape clef dans l’élimination de la discrimination raciale.  Il a encouragé à l’avenir les gouvernements nationaux, les organisations de la société civile et le secteur privé à travailler ensemble pour encourager leur application et lutter contre toutes les formes de discrimination raciale.

M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déploré, qu’aujourd’hui encore, le racisme continue d’empoisonner les institutions, les structures sociales et la vie quotidienne dans toutes les sociétés, restant en outre un facteur d’inégalité persistant et continuant de priver des personnes de leurs droits humains fondamentaux.  Il déstabilise les sociétés, a poursuivi le Secrétaire général, sape les démocraties, porte atteinte à la légitimité de l’État et fait obstacle à une reprise inclusive et durable après la COVID-19.  Le racisme accélère par ailleurs les discours publics grossiers qui banalisent la haine, nient la dignité et incitent à la violence, a-t-il ajouté, relevant que les liens entre racisme et inégalité de genre sont indéniables.  « Ces phénomènes ont des conséquences terribles, dont les discriminations multiples et transversales que subissent les femmes de couleur et les groupes minoritaires. »  Aucun pays n’est à l’abri de l’intolérance ni de la haine, a-t-il insisté, attirant l’attention sur le fait que les Africains et les personnes d’ascendance africaine, les Asiatiques et les personnes d’ascendance asiatique, les populations minoritaires, les peuples autochtones, les migrants, les réfugiés et tant d’autres continuent de subir la stigmatisation, la discrimination et la violence, et de servir de boucs émissaires. 

Rappelant que le thème de cette année, « Faisons entendre notre voix dans la lutte contre le racisme », « nous engage à nous exprimer haut et fort, à écouter attentivement et à agir avec détermination », le Secrétaire général a dit aux États Membres qu’il leur incombe de se montrer solidaires avec tous les mouvements qui promeuvent l’égalité et les droits humains partout dans le monde.  Nous devons ainsi être solidaires avec toute personne fuyant un conflit, une persécution ou tout autre discrimination fondée sur la race, la religion ou l’origine ethnique et dénoncer les discours de haine diffusés en ligne et ailleurs, a-t-il martelé.  Le Secrétaire général a appelé à protéger la liberté d’expression et de réunion, qui sont au fondement du pluralisme, des sociétés pacifiques et inclusives, et souligné la nécessité « d’un contrat social renouvelé, sur la base des droits et opportunités pour tous » afin de mieux lutter contre la pauvreté et l’exclusion, investir dans l’éducation et rétablir la confiance et la cohésion sociale.  « Nous devons écouter ceux qui subissent l’injustice et s’assurer que leurs préoccupations et leurs revendications sont au centre des efforts menés pour démanteler les structures discriminatoires », a en outre souligné M. Guterres. 

Le Secrétaire général a par ailleurs attiré l’attention sur le fait que la justice réparatrice est cruciale pour réaliser l’égalité entre les races et « expier l’héritage de siècles d’esclavage et de colonialisme ».  Pour édifier un avenir de justice, il faut redresser les torts du passé, a-t-il clamé.  M. Guterres a indiqué que les pays disposent des textes nécessaires pour guider l’action commune, la Déclaration et le Programme d’action de Durban, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et le Programme de transformation pour la justice et l’égalité raciales en quatre points.   À l’ONU, nous avons lancé aussi notre propre plan d’action stratégique interne pour lutter contre le racisme et je nommerai bientôt un conseiller spécial, a-t-il annoncé en ajoutant qu’il va mettre en place un groupe de pilotage chargé de superviser la mise en œuvre de ce plan.  L’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine créée par l’Assemblée générale est un autre exemple de progrès significatifs pour apporter une réponse systémique au racisme systémique, a-t-il aussi fait valoir. 

Pour que l’idéal d’un monde sans racisme ni discrimination raciale devienne une réalité, il faut agir tous les jours, à tous les niveaux, dans toutes les sociétés.  Rassemblons-nous en une humanité commune et défendons d’une seule voix l’égalité, la justice et la dignité de toutes et tous, a conclu M. Guterres. 

Selon Mme VERONICA MICHELE BACHELET JERIA, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, qui s’est exprimée par visioconférence, l’impact du racisme sur les droits humains des personnes est considérable.  Qu’il s’agisse de personnes cherchant à fuir un conflit, comme vu récemment aux frontières de l’Ukraine, d’enfants scolarisés, de personnes ayant besoin de soins de santé, de demandeurs d’emploi et de bien d’autres encore, la Haut-Commissaire a observé de multiples manifestations de racisme.

Mme Bachelet Jeria a notamment mis l’accent sur les algorithmes intégrés dans les recherches sur Internet, qui renforcent souvent les stéréotypes et les préjugés raciaux négatifs.  Elle a aussi fait remarquer que les outils de reconnaissance faciale sont souvent utilisés à des fins de surveillance, qui peuvent être une source de discrimination et susceptibles de renforcer les pratiques discriminatoires des forces de l’ordre à l’encontre des minorités.  L’interdiction de certains livres, en particulier ceux traitant de l’identité raciale, dans les programmes et les bibliothèques scolaires constitue également, selon la Haut-Commissaire, une atteinte au droit à l’éducation et aux efforts visant à reconnaître et à combattre les préjugés hérités du passé.

Selon Mme Bachelet Jeria, « le racisme systémique exige une réponse systémique », et ne peut être démantelé que par des « réformes vigoureuses et globales ».  Au niveau international, cet effort doit être guidé par la Déclaration et le Programme d’action de Durban et plusieurs autres instruments importants, notamment la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques, et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.  La Haut-Commissaire a appelé à « protéger l’espace civique et la sécurité » de ceux qui font face au racisme.  Leurs droits à la liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association, en particulier, doivent être sauvegardés, car ils constituent souvent le seul moyen pour eux de faire changer les choses.  Elle a enfin souligné que les hommes politiques et les autorités ont une responsabilité particulière, celle de s’abstenir, de prévenir et de combattre l’incitation à la haine et à la discrimination.

Mme TENDAYI ACHIUME, Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, a estimé qu’au cours des deux dernières années des progrès ont été réalisés pour faire entendre la voix de celles et ceux qui subissent au quotidien le racisme systémique.  En 2020, l’Assemblée générale, à la suite de l’assassinat de George Floyd, s’est prononcée pour une justice raciale renforcée, l’un des moyens les plus sûrs de mettre à bas le racisme systémique et les injustices qui continuent de caractériser la vie de millions de marginalisés dans le monde entier, a déclaré Mme Achiume.  Selon elle, des réponses urgentes doivent être apportées par les États Membres dans le cadre des conventions internationales pertinentes.  À cet égard, elle a plaidé pour la participation des groupes ethniques marginalisés, les mêmes « qui subissent parfois la violence des gouvernements quand ils se mobilisent contre ce qui les oppresse et maintient les hiérarchies raciales ».  Mme Achiume a également appelé les États Membres à mettre fin à ce qu’elle qualifié d’apartheid vaccinal et à œuvrer, conformément à leurs obligations internationales, au renforcement de la protection de l’espace civique partout dans le monde. 

Mme VERENE A. SHEPHERD, Vice-Présidente du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, a déploré le fait que trop de personnes n’aient pas appris les leçons du passé en termes d’impact tragique des guerres.  Au moment où l’on réfléchit à ce qui s’est passé le 21 mars 1960, lorsque la police a ouvert le feu et tué 69 hommes, femmes et enfants lors d’une manifestation pacifique à Sharpeville, en Afrique du Sud, elle a appelé à célébrer le fait que depuis ce jour tragique, le système d’apartheid en Afrique du Sud a été démantelé et le pays a fait de grands efforts pour s’assurer que plus jamais un tel mal ne se reproduira.  Elle a constaté que la communauté mondiale a également progressé en termes d’élimination du racisme et de la discrimination.  Depuis 1960, le colonialisme a pris fin dans de nombreux autres pays et la superstructure de l’esclavage et de l’apartheid racial a été démantelée, a-t-elle constaté en parlant aussi des lois et des pratiques racistes qui ont été abolies dans de nombreux pays.  De plus, les Nations Unies ont mis en place un cadre international pour lutter contre le racisme, a expliqué Mme Shepherd.  Parmi les avancées en la matière, elle a mentionné le Programme d’action de Durban, la création de l’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine, et la publication d’un rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme qui appelle les États Membres à adopter un « programme de transformation » pour déraciner le racisme systémique.

Nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers, a-t-elle tempéré.  Elle a relevé que les événements des années 2019-2021 et les deux premiers mois et demi de 2022 sont des rappels opportuns pour nous tous que l’intolérance à l’égard de la diversité, le racisme et la discrimination ne sont pas seulement des idéologies et des pratiques du passé.  Selon elle, nous avons vu leurs manifestations dans le meurtre tragique de l’Afro-Américain George Floyd, la mondialisation du Mouvement « Black Lives Matter », l’impact disproportionné de la COVID-19 sur les peuples autochtones et les personnes d’ascendance africaine, la distribution inéquitable des vaccins, l’intensification du mouvement de la justice réparatrice et l’insistance sur la conviction que l’histoire doit guider nos actions pour construire des sociétés plus équitables face à une apparente résurgence du pro-colonialisme.  Nous avons également tous vu l’impact des changements climatiques et de la dégradation de l’environnement et, plus récemment, l’impact de la guerre russo-ukrainienne sur les immigrants et les minorités, y compris les personnes d’ascendance africaine, a observé Mme Shepherd.  Elle a appelé la famille humaine à s’engager à nouveau aujourd’hui dans la lutte contre la discrimination raciale et pour la construction de ponts de compréhension, en étendant ces ponts.  Étant donné que le racisme est systémique, elle a appelé à une réponse également systémique.  Elle a souhaité, en conclusion, une approche transformatrice s’attaquant aux domaines interconnectés qui alimentent le racisme et conduisent à des tragédies répétées, tout à fait évitables, comme la mort de George Floyd. 

M. LEYNER PALACIOS, Commissaire à la Commission colombienne de la vérité, a souligné que les pratiques discriminatoires, l’exclusion et le racisme sont des fléaux qui nous affectent aujourd’hui comme ils ont affecté « nos ancêtres qui étaient asservis » dans le cadre du commerce transatlantique.  Il a rappelé que du fait de leur condition de noirs, ils n’étaient pas considérés comme des êtres humains, mais plutôt comme des objets et des biens personnels.  Puis après l’abolition de l’esclavage, sont venues d’autres formes d’exclusion et de racisme en Colombie, a-t-il témoigné.  Il a relevé qu’avec une scène montrant un être humain placer son genou sur le cou d’un autre, on comprend combien le racisme est encore présent dans nos sociétés.  C’est pourquoi il est important que l’Assemblée générale se lève contre ces pratiques racistes, a-t-il reconnu.

M. Palacios s’est souvenu qu’au cours du conflit colombien, que le pays essaye maintenant de dépasser, on a constaté des éléments très forts témoignant de l’existence du racisme et des pratiques racistes.  En effet, des communautés de femmes noires et les personnes d’ascendance africaine ont subi des violences d’une manière disproportionnée, précisément parce que les acteurs armés considéraient que ces citoyens avaient moins de droits.  En Colombie, a-t-il poursuivi, le racisme se vit dans la jouissance des droits en matière de santé, d’éducation, de logement, de services, d’accès à l’eau potable dont les enfants noirs ont tant besoin.  Il a expliqué que la situation des femmes rurales est encore pire parce qu’elles n’ont aucune possibilité de plainte.  M. Palacios a souhaité que des mesures soient prises pour mettre fin à ces fléaux.

M. THABANG EDWIN TLALAJOE (Lesotho), au nom du Groupe des États d’Afrique, a rappelé que, l’année dernière, les Nations Unies et la communauté internationale ont célébré les 20 ans de l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, lesquels forment le fer de lance de tous les efforts internationaux visant à éliminer le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée.  Nous réaffirmons que ces instruments incarnent le ferme engagement de la communauté internationale à lutter contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée aux niveaux national, régional et international, a-t-il insisté.  Or pour le représentant, le racisme demeure une préoccupation mondiale et le combattre doit rester « un effort universel ».  Plaidant pour une action préventive et concertée, notamment dans le domaine de l’éducation et de la sensibilisation, cela pour que s’instaurent des sociétés plus inclusives, équitables et harmonieuses, M. Tlalajoe a souligné que si la mondialisation offre d’importantes opportunités de développement, « les avantages sont inégalement partagés, tandis que ses coûts sont inégalement répartis ».

« Nous appelons à la prévention et à l’atténuation des effets négatifs de la mondialisation qui aggravent la pauvreté, le sous-développement, la marginalisation et l’exclusion sociale et renforcent l’homogénéisation culturelle et les disparités économiques au sein des États », a déclaré M. Tlalajoe.  Selon lui, la mondialisation peut être une chance pour tous si les moyens d’atteindre le développement durable sont équitablement distribués, comme le prévoient notamment le Programme d’action d’Addis-Abeba, le Programme de développement durable à l’horizon 2030, les programmes de l’Union africaine et du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique.  Le représentant a également rappelé que les États africains sont attachés à ce que les réparations pour l’esclavage et le colonialisme passent par une reconnaissance sans équivoque des torts historiques, permettant ainsi l’éradication « des cicatrices laissées par l’inégalité raciale, la subordination et la discrimination qui furent la marque des fléaux de l’esclavage, de l’apartheid et du colonialisme ». 

M. KANE AMANDUS (Nauru), s’exprimant au nom des États d’Asie et du Pacifique, a rappelé que si le racisme n’est pas un phénomène nouveau, la pandémie de COVID-19 a exacerbé la discrimination entre les pays et à l’intérieur de ceux-ci.  Nous avons assisté à une montée alarmante de l’hostilité et des crimes de haine contre les personnes d’origine asiatique, les personnes d’ascendance africaine, et en particulier contre les femmes, les enfants et les personnes âgées, a-t-il noté.  Cela a été encore amplifié par la mésinformation, la désinformation, les discours de haine et des propos racistes.

Le représentant a rappelé que la région Asie-Pacifique comprend 55 pays qui comptent 56% de la population mondiale.  Elle abrite certains des plus grands et des plus petits pays du monde, et la région est la plus diversifiée en termes d’ethnies, de langues, de religions et de cultures.  La sauvegarde du patrimoine culturel, le pluralisme et la diversité sont essentiels pour un monde plus stable et pacifique, a—t-il affirmé.  Le représentant a donc plaidé pour le respect des droits individuels et culturels, qui est primordial pour maintenir l’équité dans les sociétés.  Il a salué la création d’un mécanisme international d’experts indépendants visant à favoriser un changement transformateur pour la justice raciale et l’égalité.  Pour conclure, le représentant a souligné que les valeurs énoncées dans la Déclaration et le Programme d’action de Durban sur la culture de la paix sont d’une importance capitale, avant d’appeler à un avenir qui célèbre l’inclusion et la diversité culturelles.

M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMIRÉZ (Mexique), au nom du Groupe des pays d’Amérique latine et des Caraïbes, a constaté que, malgré les progrès réalisés, le fléau du racisme, de la discrimination, de l’exclusion et des discours de haine continue de sévir. Ce racisme se manifeste dans les discriminations subies par les personnes d’ascendance africaine, dans les injustices à l’encontre des peuples autochtones, dans la xénophobie vécue par les migrants et les réfugiés, et dans l’exclusion dont sont victimes les personnes handicapées, a-t-il énuméré. Le représentant a rappelé que des siècles de colonialisme et d’esclavage ont jeté les bases des discriminations raciales actuelles, discriminations qui prennent sans cesse de nouvelles formes, notamment dans le monde numérique – algorithmes, intelligence artificielle. « Nous devons empêcher les nouvelles conceptions et les nouveaux développements technologiques de reproduire la discrimination et de l’encoder dans de nouveaux domaines. »

Les femmes et les filles étant touchées à la fois par la discrimination sur le genre et la discrimination raciale, de manière intersectionelle, les membres du groupe des pays d’Amérique latine et des Caraïbes considèrent que l’ONU et la communauté internationale doivent accélérer les actions visant à éliminer les violences fondées sur le genre et redoubler d’efforts pour parvenir à l’égalité des sexes, ainsi qu’à l’autonomisation des femmes et des filles. « Il s’agit notamment d’éliminer tous les obstacles juridiques, sociaux, culturels et économiques à l’égalité des sexes », a appuyé l’orateur. 

Pour M. KARL LAGATIE (Belgique), au nom du Groupe des États d’Europe occidentale et autres États, il est indéniable que le racisme et la discrimination raciale sont enracinés dans « toutes les sociétés du monde ».  La pandémie a exacerbé les inégalités préexistantes et révélé l’étendue du racisme envers les minorités ethniques, raciales et religieuses dans les sociétés du monde entier, a-t-il noté en en faisant le constat en particulier pour les personnes en situation de vulnérabilité, fréquemment exposées à des risques accrus.  Afin de démanteler les structures permettant au racisme de prospérer, il a jugé crucial d’appliquer « complètement et efficacement » la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.  Cette convention historique, adoptée il y a plus de 55 ans, reste plus que jamais d’actualité et, « en tant qu’États parties, nous avons l’obligation d’aller de l’avant pour faire de l’objectif de la Convention une réalité », a proclamé le représentant.  

Il a ensuite appelé à la ratification universelle de cette convention cruciale et a reconnu le travail important que mène le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale dans le suivi de la mise en œuvre effective de ladite convention.  Il a également pris note de la création par l’Assemblée de l’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine, attendant de voir comment celle-ci pourra contribuer à la mise en œuvre de la Convention.  L’orateur a enfin souligné le rôle important des jeunes du monde entier, qui sont « à l’avant-garde de la lutte contre le racisme ».  Au cours de l’année écoulée, des personnes du monde entier, en grande majorité des jeunes, sont descendues dans la rue et se sont exprimées sur les médias sociaux pour protester contre le racisme et réclamer des mesures progressistes: « nous devons aux jeunes et aux générations futures de construire des sociétés plus inclusives et plus justes qui embrassent le respect et la diversité », a-t-il commenté.  

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a déploré le fait que le racisme anti-asiatique et d’autres racismes connaissent une recrudescence aux États-Unis, notamment depuis la pandémie de COVID-19.  Elle a également dénoncé l’antisémitisme qui sévit aux États-Unis et en Europe.  Le racisme entraîne le racisme et nous devons mettre fin à cette tendance, a-t-elle plaidé.  Elle a rappelé qu’à l’été 2020, le mouvement « Black Lives Matter » a ébranlé le monde entier.  Dans son sillage, au Nigéria, un mouvement social semblable appelait à la responsabilité des forces de l’ordre.  Elle a également évoqué le mouvement « Kilombo » au Brésil qui valorise la culture des afrodescendants, avant de mentionner la discrimination des Rohingya au Myanmar et des Ouigours en Chine. 

La représentante a affirmé que nos différences sont la source de nos forces, en soulignant que l’atout majeur des États-Unis a toujours été sa diversité.  Elle a déclaré que la lutte contre les discriminations est une priorité de l’Administration Biden qui a par exemple débloqué des fonds en soutien à des universités afro-américaines.  Parlant de sa propre expérience, la déléguée a dit avoir fait face à l’adversité, et cela l’a rendu plus forte.  Elle a donc appelé le monde à faire également face à l’adversité du racisme.  Elle a relevé que les Nations Unies ont été créées non seulement pour préserver le monde du fléau de la guerre, mais également pour mettre en branle des changements importants.  C’est pour cette raison d’ailleurs que les États-Unis ont soutenu la mise en place de l’Instance permanente des personnes d’ascendance africaine.  Enfin, elle a appelé à éliminer le racisme en tirant parti de l’énergie, de l’optimisme et du militantisme de la nouvelle génération.

Droit de réponse

Le représentant de la Chine a réagi en réponse à des commentaires de la délégation des États-Unis sur la situation des minorités ethniques en Chine, les qualifiant de « moquerie ».  Pour la Chine, les déclarations du pays hôte sur les violations des droits humains dans les provinces du Xinjiang et du Sichuan sont un « plan politique orchestré par les États-Unis ».  Le délégué a catégoriquement rejeté ces accusations, prévenant que la vérité l’emporterait et « sauterait à la figure des États-Unis ».  L’espérance de vie a augmenté dans ces provinces qui se peuplent à grande vitesse, a déclaré le représentant chinois.  « De quel génocide parle-t-on? » s’est-il étonné en mettant ces accusations en parallèle avec le sort des populations autochtones sur le territoire des États-Unis au début du XXe siècle, et avec les « brutalités policières » aux États-Unis qui ciblent, selon lui, davantage les Afro-Américains que les Américains blancs.  Il a aussi évoqué le racisme et la violence anti-asiatique en augmentation dans le pays hôte.  « Quand allez-vous donner aux Amérindiens une explication?  Quand allez-vous ratifier la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale?  Quand allez-vous donner une protection aux femmes asiatiques? » a lancé le délégué à l’adresse de son homologue des États-Unis, en demandant à ce pays de « cesser de dicter aux autres pays quoi faire, avant qu’il ne soit trop tard ».

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