En cours au Siège de l'ONU

Onzième session extraordinaire d’urgence
5e & 6e séances - matin & après-midi
AG/12407

À une large majorité, l’Assemblée « déplore dans les termes les plus énergiques » l’agression contre l’Ukraine et exige le retrait immédiat des forces russes

C’est sous les applaudissements d’une salle bien remplie que l’Assemblée générale a adopté aujourd’hui la résolution intitulée « Agression contre l’Ukraine » par 141 voix pour et l’opposition du Bélarus, de l’Érythrée, de la Fédération de Russie, de la République arabe syrienne et de la République populaire démocratique de Corée.  Trente-cinq États se sont abstenus.

L’Assemblée tenait depuis lundi dernier, une session extraordinaire d'urgence, la première depuis 40 ans, à la demande du Conseil de sécurité qui voulait surmonter l’impasse provoquée par le veto russe, le 26 février dernier.  « Nous traiterons de cette question à l’Assemblée générale là où le droit de veto n’a pas de poids et où tous les États Membres des Nations Unies peuvent voter », avaient alors promis les États-Unis.

Dans sa résolution, portée par un nombre impressionnant de 90 coauteurs représentant les cinq continents, l’Assemblée ne condamne pas comme le faisait le texte initial du Conseil de sécurité mais « déplore dans les termes les plus énergiques » l’agression commise par la Fédération de Russie contre l’Ukraine, en violation du paragraphe 4 de l’Article 2 de la Charte qui dit: « tous les États sont tenus de s’abstenir, dans leurs relations internationales, de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies, et de régler leurs différends internationaux par des moyens pacifiques ». 

L’Assemblée exige que la Fédération de Russie cesse immédiatement d’employer la force contre l’Ukraine, s’abstienne de tout nouveau recours illicite à la menace ou à l’emploi de la force contre tout État Membre et retire « immédiatement, complètement et sans condition » toutes ses forces militaires du territoire ukrainien à l’intérieur des frontières internationalement reconnues.  L’Assemblée exige aussi que la Fédération de Russie revienne « immédiatement et sans condition » sur sa décision relative au statut de certaines zones des régions ukrainiennes de Donetsk et de Louhansk.  

L’Assemblée générale exhorte les parties à respecter les accords de Minsk et à œuvrer de manière constructive dans les cadres internationaux pertinents, notamment le format Normandie et le Groupe de contact trilatéral.  Elle demande instamment que le conflit entre la Fédération de Russie et l’Ukraine soit immédiatement réglé de manière pacifique par le dialogue, la négociation, la médiation et d’autres moyens pacifiques.

Sur le volet humanitaire, l’Assemblée demande instamment à toutes les parties de permettre des voies de sortie sûres et sans restriction du territoire ukrainien, de faciliter l’acheminement rapide, en toute sécurité et sans entrave, de l’aide humanitaire en Ukraine et de protéger les civils, notamment le personnel humanitaire et les personnes en situation vulnérable.

Nous vivons des heures graves qui vont être essentielles pour notre génération, celle qui précisément devait être préservée de la guerre, a déclaré l’Ukraine, en présentant la résolution.  L’enjeu du vote d’aujourd’hui est « très simple », ont ajouté les États-Unis, c’est l’attachement à l’intégrité territoriale des États et à la Charte des Nations Unies.  Le vote « historique » d’aujourd’hui montre clairement l’isolement de la Fédération de Russie, s’est réjouie l’Union européenne, parmi la quarantaine de délégations qui ont expliqué leur vote.  « La décision est claire, le monde a parlé », a-t-elle souligné, en ajoutant qu’au-delà de l’Ukraine et de l’Europe, c’est à la défense d’un ordre international fondé sur des règles que nous avons tous souscrit. 

Nous ne baisserons pas les bras tant que le peuple ukrainien n’aura pas retrouvé la paix dans une nation indépendante et souveraine, à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, a promis l’Australie.  Les autorités russes doivent entendre l’appel de la communauté internationale et « appliquer immédiatement » la résolution, a exhorté le Japon.  Après s’être abstenus par deux fois au Conseil de sécurité, les Émirats arabes unis, qui président le Conseil de sécurité pendant le mois de mars, ont cette fois voté « oui » et promis 5 millions de dollars à l’appel humanitaire d’urgence des Nations Unies pour l’Ukraine.  

En 1999, a fait observer la Serbie, l’attaque de l’OTAN contre la Yougoslavie n’avait pas suscité autant de réactions de « notre auguste Organisation » à ce qui était aussi une violation criante de la Charte.  Une Charte, a estimé le Brésil, qui n’est pas assez défendue dans la résolution, les rédacteurs de la résolution préférant « pointer un doigt accusateur ».  Les États-Unis et les pays européens veulent-ils véritablement la désescalade? s’est interrogée la Syrie, tandis que l’Érythrée justifiait son vote négatif par son rejet des sanctions unilatérales qui ne servent qu’à exacerber les tensions, au détriment des populations civiles.  

Parmi les 35 pays à s’être abstenus, la Chine a déploré un texte qui ne tient pas compte de la « complexité du conflit » et de ses « origines » et qui ne souligne pas l’urgence d’un règlement politique et d’une intensification des efforts diplomatiques.  Il faut, a-t-elle dit, se départir de la « mentalité de guerre froide » et cesser tout « élargissement des blocs militaires ». 

Le Bélarus a tenu à rappeler « notre part de responsabilité dans ce qui se passe en Ukraine aujourd’hui ».  Depuis la signature des accords de Minsk, il y a huit ans, « ni le Conseil de sécurité, ni l’Assemblée générale, ni la communauté internationale n’ont pu convaincre les autorités ukrainiennes de les mettre en œuvre ».  Il a catégoriquement rejeté les accusations portées à son encontre et reprises dans la résolution, quant à son association au recours à la force illégitime contre l’Ukraine, avant de dévoiler un « secret effrayant »: nous sommes en effet impliqués mais seulement dans les efforts visant à établir des contacts et à organiser des pourparlers entre la Fédération de Russie et l’Ukraine, dans l’espoir « sincère » qu’ils seront couronnés de succès.

La résolution adoptée aujourd’hui, a dit craindre la Fédération de Russie, risque d’encourager les « radicaux de Kiev » et les « nationalistes » sur leur voie.  Le texte, a-t-elle dénoncé, ne dit rien sur les méfaits des forces de sécurité ukrainiennes, le « coup d’État illégal » de février 2014, avec la connivence de l’Allemagne, de la France et de la Pologne, les restrictions imposées par les autorités « nationalistes » à l’utilisation de la langue russe et encore moins sur les armes qu’ont envoyées les États-Unis et l’Europe pour aider le « régime de Maïdan » à tuer dans le Donbass.

Voter contre la résolution, s’est expliquée la Fédération de Russie, c’est militer pour une Ukraine apaisée, débarrassée du radicalisme et du néonazisme, et vivant dans la paix avec ses voisins, sans ingérence extérieure.  L’« opération militaire spéciale » a été lancée pour cela, après que nous avons en vain « frappé à toutes les portes » pour alerter d’une guerre qui a fait au moins 14 000 morts, principalement dans les « Républiques populaires de Donetsk et Louhansk ».  L’« opération militaire spéciale », qui s’inscrit dans le cadre de l’Article 51 de la Charte sur le droit de légitime défense, est menée avec succès s’est enorgueillie la Fédération de Russie, en dénonçant les mensonges d’Internet sur de prétendues attaques contre les populations et infrastructures civiles.  

Constructive, la Colombie a proposé, par la voix de sa Vice-Ministre des affaires étrangères, que soit mis sur pied, de toute urgence, un « groupe de médiation » afin de régler les divergences entre la Russie et l’Ukraine et de garantir le respect fidèle des accords de Minsk, « à condition que les actions militaires cessent immédiatement ».  La Turquie a, elle, lancé un appel en faveur d’une « pause humanitaire immédiate » en se disant disposée, en tant que « voisine et amie » de la Russie comme de l’Ukraine, à faciliter le règlement pacifique du conflit.  Dans une lettre ouverte adressée à l’Assemblée générale, les épouses des Présidents de la Pologne et de la Lituanie ont appelé « les politiciens, le clergé, les organisations ainsi que toutes les personnes de bonne volonté à travers le monde » à faire preuve de solidarité avec les enfants ukrainiens, victimes sans défense de ce conflit.

LETTRE DATÉE DU 28 FÉVRIER 2014, ADRESSÉE À LA PRÉSIDENTE DU CONSEIL DE SÉCURITÉ PAR LE REPRÉSENTANT PERMANENT DE L’UKRAINE AUPRÈS DE L’ORGANISATION DES NATIONS UNIES (S/2014/136)

Suite du débat sur la question

M. NOEL MARTIN MATEA (Îles Salomon) a dit qu’en tant que nation éprise de paix, les Îles Salomon réitèrent leur position de principe pour la coexistence pacifique, la non-ingérence, l’abstention du recours à la menace ou à la force contre l’intégrité territoriale de tout État.  Il a déploré l’intervention en Ukraine de la Fédération de Russie et appelé à une désescalade immédiate de la situation.  À cet égard, le représentant a exhorté les parties à faire preuve d’un maximum de retenue, à mettre de côté toute provocation et à restaurer « notre confiance dans notre ordre international fondé sur des règles » en veillant à préserver et respecter l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Les Îles Salomon appellent toutes les parties à régler les différends internationaux par des moyens pacifiques.  Elles ont salué les pourparlers en cours entre l’Ukraine et la Fédération de Russie et encouragé toutes les parties à s’écouter davantage et à mieux se comprendre.  La délégation a également apporté le soutien des Îles Salomon aux efforts déployés par le Secrétaire général de l’ONU, plaidant pour une approche mondiale unifiée pour soutenir ces pourparlers, en privilégiant la diplomatie et le dialogue.

M. KYAW MOE TUN (Myanmar) a condamné l’invasion de l’Ukraine et les attaques non provoquées contre son peuple, voyant dans ces actes une violation flagrante de la Charte des Nations Unies et du droit international.  Il a appelé au respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, ainsi qu’à la cessation immédiate des hostilités.  Le peuple du Myanmar, a-t-il souligné, « comprend et partage plus que d’autres » les souffrances que vivent les Ukrainiens car il est confronté à des situations similaires, qui résultent d’actes inhumains, d’atrocités, de crimes contre l’humanité commis par l’armée birmane.  Dans ce contexte, le délégué a félicité les pays voisins de l’Ukraine qui ont ouvert leurs frontières et accueillent chaleureusement des Ukrainiens et d’autres ressortissants qui ont échappé aux attaques terrifiantes.  Nous remercions également tous les États Membres qui soutiennent l’Ukraine de toutes les manières possibles, a-t-il dit avant d’annoncer que son pays votera pour le projet de résolution. 

M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a d’emblée fait part de sa préoccupation devant l’évolution la plus récente de la situation qui reflète, selon lui, l’échec de la diplomatie.  « Nous n’avons eu de cesse d’insister sur la nécessité de la désescalade, la reprise des négociations, un dialogue constant et une diplomatie de chaque instant.  Tous les efforts doivent être déployés pour éviter une nouvelle escalade de la violence, des pertes en vies humaines ainsi que les tensions militaires politiques, économiques susceptibles de constituer une menace sans précédent pour la paix et la sécurité internationales ainsi que sur la stabilité économique mondiale, a insisté le représentant.  En effet, a-t-il fait observer, les pays en développement sont les plus durement touchés sur le plan économique par les conflits, où qu’ils surviennent.  M. Akram a, par ailleurs, fait part de son extrême préoccupation devant le sort des étudiants pakistanais se trouvant en Ukraine, la majorité ayant été évacuée.  Il s’est félicité, à cet égard, de la coopération des autorités ukrainiennes ainsi que de celle démontrée par les Gouvernements polonais, roumains et hongrois dans ce domaine.

M. MOHAMED SIAD DOUALEH (Djibouti) a regretté l’agression non provoquée contre l’Ukraine mais également l’incapacité du Conseil de sécurité à agir à l’unisson en raison du veto russe.  Djibouti condamne sans équivoque ce qui constitue une violation flagrante à ses yeux du droit international, a déclaré le représentant, à savoir de s’abstenir du recours ou de la menace du recours à la force dans les relations internationales.  L’Article 33 de la Charte des Nations Unies offre des voies pacifiques pour régler les différends, a-t-il souligné, avant de saluer l’offre de bons offices du Secrétaire général et l’appel de l’UA à la paix et la diplomatie pour « préserver le monde d’un conflit planétaire ».  Le représentant s’est dit effaré par les attaques qui prennent pour cible les civils et les infrastructures civiles en Ukraine avant d’exiger que les parties facilitent un acheminement sans entrave de l’aide humanitaire.  « Si l’Ukraine ne survit pas, le droit international ne survivra pas », a-t-il mis en garde en appelant à ne pas laisser le multilatéralisme être réduit à néant par cette crise.  C’est pour toutes ces raisons que Djibouti votera pour la résolution.  Avant de conclure, le représentant a toutefois dénoncé la distinction faite entre les réfugiés fuyant les guerres et conflits au Moyen-Orient ou en Afrique et ceux fuyant la guerre en Ukraine.

Mme DOMA TSHERING (Bhoutan) s’est jointe aux appels en faveur du respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Notant que « même les replis de nos puissantes montagnes ne peuvent nous protéger des conséquences d’événements qui se produisent à des milliers de kilomètres », elle a souligné qu’avec la crise ukrainienne, ce sont les principes fondamentaux de la Charte des Nations Unies et l’ordre international fondé sur des règles qui sont en jeu.  « Petit pays épris de paix », le Bhoutan ne peut tolérer que des frontières internationalement reconnues soient redessinées de manière unilatérale, a-t-elle affirmé, avant d’indiquer qu’elle appuiera le projet de résolution.  Avant de conclure, la représentante a appelé à la cessation des hostilités et à un règlement pacifique du conflit, déclarant prier pour les familles endeuillées, les centaines de milliers de personnes déplacées et toutes celles qui souffrent de cette situation. 

Épris de paix, mon pays, a dit M. ANOUPARB VONGNORKEO (République démocratique populaire lao), défend fermement les principes de la Charte des Nations Unies et ses obligations en vertu du droit international.  Notre politique étrangère est fondée sur la paix, l’indépendance des États, l’amitié et le renforcement de la coopération.  Ayant lui-même souffert du fléau de la guerre, notre pays, a poursuivi le représentant, n’en connaît que trop bien les conséquences et sait que ce qui est en jeu aujourd’hui ne sert les intérêts d’aucune des parties.  Il a félicité l’ONU pour avoir intensifié son aide humanitaire et a dit douter de l’efficacité des sanctions unilatérales qui ne feront qu’aggraver les souffrances humaines et paralyser le monde entier, en particulier en cette période de pandémie de COVID-19.  Le représentant a donc voulu que l’on évite les actes susceptibles de causer l’escalade des tensions et que l’on donne la priorité à la recherche de solutions pacifiques et au rétablissement de la paix et de la sécurité. 

M. SOVANN KE (Cambodge) a exprimé ses préoccupations face à la situation en Ukraine et s’est dit convaincu qu’une paix pérenne passe par un dialogue et des négociations pacifiques.  L’accès à l’aide humanitaire doit être garanti pendant cette période difficile, a demandé le représentant avant d’appuyer les initiatives et efforts du Secrétaire général pour parvenir à un règlement pacifique de ce conflit.  Le représentant a également insisté sur l’importance du respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de toute nation.  Le Cambodge votera en faveur de la résolution, a-t-il annoncé avant de conclure.

M. YASHAR T. ALIYEV (Azerbaïdjan) a estimé que la situation alarmante en Ukraine et à proximité nécessite des mesures urgentes pour parvenir à la désescalade et à une solution pacifique.  Regrettant que cette crise fasse de nombreuses victimes civiles, il a appelé les parties au conflit au strict respect du droit international humanitaire, jugeant impératif que les personnes et les infrastructures civiles soient « préservées de tout temps ».  Pour le délégué, cette situation doit être réglée dans le plein respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des États.  En conclusion, il a appelé les parties à dialoguer sans tarder afin que la situation ne dégénère pas davantage, soulignant la nécessité d’engager des négociations directes. 

M. VALENTIN RYBAKOV (Bélarus) a d’emblée souligné que son pays votera contre le projet de résolution.  Nous avons tous notre part de responsabilité pour ce qui se passe en Ukraine, a-t-il dit, en rappelant, à cet égard, la signature des accords de Minsk, il y a huit ans, entérinés par la résolution du Conseil de sécurité 2202.  « Ni le Conseil de sécurité, ni l’Assemblée générale, ni la communauté internationale n’ont pu convaincre les autorités ukrainiennes de mettre en œuvre les dispositions de ces accords », a-t-il estimé.  Il a regretté le refus des autorités de Kiev de s’asseoir à la table des négociations avec leurs compatriotes de Donetsk et de Louhansk, refusant ainsi de prendre en compte leurs intérêts légitimes.  Aujourd’hui, le paragraphe 8 du projet de résolution appelle de façon « hypocrite » toutes les parties à appliquer les accords de Minsk. 

S’adressant aux auteurs de la résolution, il leur a demandé pourquoi au cours de ces huit années, ils n’ont pas pu forcer Kiev à appliquer les dispositions de ces documents.  Les États-Unis, le Canada, les pays de l’Union européenne, qui estiment être des chantres de la démocratie, ont exercé une pression indue sur l’ONU, l’OSCE, le Conseil de l’Europe et l’ensemble de la communauté internationale, et n’ont pas pu trouver le courage de réagir aux agissements criminels des autorités de Kiev? s’est-il interrogé.

Regrettant que la communauté internationale n’ait pas tiré les enseignements de la Seconde Guerre mondiale, il a affirmé que toute résurgence du néonazisme doit être immédiatement réprimée.  Ce qui se trame aujourd’hui, en cette salle et au-delà, constitue à ses yeux, un exemple criant du deux poids, deux mesures de la part des États-Unis et de leurs alliés, dont les crimes ont déjà fait des centaines de milliers de victimes en Yougoslavie, en Iraq, en Libye et en Afghanistan.  La délégation a rejeté catégoriquement les accusations portées à l’encontre de son pays quant à son association au recours à la force illégitime contre l’Ukraine, avant de dévoiler un « secret effrayant »: en effet, « nous sommes impliqués », a-t-il reconnu.  Le Président du Bélarus a redoublé d’efforts pour établir des contacts entre les parties au conflit.  Notre implication consiste en l’organisation de pourparlers entre la Fédération de Russie et l’Ukraine, dans l’espoir sincère de voir les participants aboutir à des pourparlers à succès.  Il a regretté que beaucoup de pays n’aient même pas mentionné ces pourparlers, se demandant s’ils ne veulent pas mentionner le Bélarus ou souhaitent tout simplement que ces pourparlers échouent.

Pour finir, il a mis en garde ces pays contre les retombées des sanctions, qui aggraveront les problèmes économiques et sociaux et entraîneront davantage de famine.  Ces sanctions, qu’il a qualifiées de « comble du terrorisme économique et financier », ne sont pas ciblées, mais visent à étouffer l’économie et aggraver les conditions de vie des populations.  Il a de même évoqué les difficultés auxquelles se heurtent les citoyens russes et bélarussiens qui souhaitent quitter l’Ukraine, accusant les autorités ukrainiennes de les détenir en otage.

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a tout d’abord salué tous ceux qui se vouent à la défense des idéaux des Nations Unies.  Elle a appelé la Fédération de Russie à cesser cette guerre « non sollicitée et injustifiable » et à respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.  Elle a également appelé le Bélarus voisin à cesser d’appuyer cette guerre, en ouvrant son territoire aux troupes russes.  Nous nous réunissons ici, a poursuivi la représentante, pour demander des comptes à la Fédération de Russie, régler la crise humanitaire et stopper les violations des droits de l’homme qui découlent de cette agression.  Cette session extraordinaire, la première en 40 ans, est « un moment historique », a-t-elle estimé.  L’ONU, a-t-elle rappelé, a été créée pour prévenir les guerres et les arrêter.  Si l’invasion de grande ampleur engagée par le Kremlin a été lancée au moment même où le Conseil de sécurité tentait d’éviter l’escalade, depuis lors, s’est félicitée la représentante, l’Ukraine se défend « avec vigueur » et, comme l’a relevé hier le Président Joe Biden, « Putin rencontre une résistance à laquelle il ne s’attendait pas ». 

La Fédération de Russie, a-t-elle accusé, bombarde des logements, des hôpitaux, des orphelinats et des crèches, provoquant souffrances humaines et déplacements massifs.  Remerciant les pays qui ont « ouvert leurs cœurs et leurs maisons » aux Ukrainiens, la représentante a repris à son compte l’appel du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et a exhorté ces pays à protéger tous les réfugiés sans distinction aucune.  La Fédération de Russie rendant sa campagne « encore plus brutale », nous voyons désormais des vidéos qui prouvent l’utilisation de bombes à sous-munitions et autres armes interdites en Ukraine.  La représentante a également évoqué le convoi de centaines de blindés russes faisant mouvement vers Kiev.  Ces agissements sont contraires à tout ce que défend l’Assemblée générale, a-t-elle martelé, en se félicitant des manifestations de solidarité avec l’Ukraine qui se multiplient dans le monde entier, « et même à Moscou et à Minsk ». 

Partout, les gens exhortent Putin à cesser ses attaques et la population russe elle-même se demande combien de Russes vont encore périr.  Gardez-vous, a-t-elle dit à la Fédération de Russie, de commettre des crimes de guerre.  Déposez les armes et quittez l’Ukraine.  La vérité, a affirmé la représentante, est que cette guerre est celle d’un seul homme, le Président Putin qui a forcé des populations entières à se réfugier dans des caves et des centaines de milliers de personnes à fuir vers les pays voisins.  Après avoir rappelé les sanctions imposées par son pays et ses alliés, elle a estimé que l’enjeu du vote est « très simple »: votez pour si vous croyez au respect de l’intégrité territoriale des États et de la Charte des Nations Unies et si vous pensez que la Fédération de Russie doit rendre des comptes. 

Mgr GABRIELE CACCIA, Observateur permanent du Saint-Siège, a joint la voix du Saint-Siège à celle des nombreux États Membres « et aux millions de personnes à travers le monde » qui demandent la cessation immédiate des hostilités en Ukraine et le retour à la diplomatie et au dialogue.  Rappelant que l’ONU avait été fondée « pour préserver les générations futures du fléau de la guerre » et leur permettre de « vivre en paix les uns avec les autres en bons voisins », il a ajouté qu’il était du devoir de tous les États de chercher à résoudre les différends par la négociation, la médiation ou par d’autres moyens pacifiques, « même lorsque la guerre a commencé ».

L’Observateur permanent a rappelé que le pape François avait déclaré urgent d’ouvrir des couloirs humanitaires et d’accueillir ceux qui fuient.  Il a exprimé sa reconnaissance aux États qui offrent une assistance humanitaire à ceux qui sont dans le besoin, tant en Ukraine que dans les pays voisins, dans lesquels de nombreux Ukrainiens ont cherché la sécurité.  Il a aussi rappelé l’appel lancé par le pape à l’observation, mercredi 2 mars, d’un jour de proximité avec les souffrances du peuple ukrainien, « pour sentir que nous sommes tous frères et sœurs, et pour implorer de Dieu la fin de la guerre ».  

Se disant convaincu qu’il existe « toujours du temps pour la bonne volonté, encore de la place pour la négociation, de la place pour l’exercice d’une sagesse qui peut empêcher la prédominance de l’intérêt partisan, sauvegarder les aspirations légitimes de chacun, et épargner au monde la folie et les horreurs de la guerre », Mgr Caccia a souhaité que cette session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée générale puisse faire progresser les efforts en ce sens.

L’Observateur permanent de l’Ordre souverain de Malte, M. PAUL BERESFORD-HILL, a expliqué qu’en huit ans de conflit, l’ambassade de l’Ordre en Ukraine avait fourni un soutien, des conseils et une aide matérielle considérables aux citoyens ukrainiens et aux résidents non ukrainiens du pays qui sont dans le besoin.  Alors que la crise actuelle voit plusieurs villes et villages attaqués et bombardés, forçant les familles à quitter leurs maisons et à chercher refuge ailleurs.  Si certains réfugiés disposent de moyens suffisants pour voyager et trouver refuge par eux-mêmes, ou bénéficient de la double nationalité avec des pays voisins, la majorité n’ont pas les ressources nécessaires, a expliqué la représentante.  Les agences des Nations Unies prédisent qu’un exode potentiel de réfugiés de plus de six millions de personnes pourrait résulter de cette crise.

De nombreuses personnes âgées, malades ou handicapées sont incapables d’échapper aux bombardements et au stress et l’Ordre de Malte est autant préoccupé par leur sort que par celui de ceux qui ont réussi à partir.  Son personnel et ses bénévoles, dans les principaux centres de population en Ukraine, continuent de leur fournir de l’aide dans la mesure du possible.  Le long de la frontière avec l’Ukraine, plus de 5 000 personnes, et des dizaines de milliers de bénévoles font leur possible pour offrir aux personnes déplacées des plats chauds et des boissons, dispenser des soins aux victimes de blessures et d’accidents, des conseils et un soutien émotionnel.  L’Observateur permanent a expliqué que l’Ordre coordonne ses activités avec des agences d’aide internationales, telles que la Croix-Rouge et le HCR, et qu’il est engagé dans un programme international de collecte de fonds pour garantir que des ressources adéquates continuent d’être disponibles pour le soutien aux nécessiteux.

Mme SOUREK, observatrice de l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (IDEA), a vivement condamné l’agression non provoquée lancée par la Fédération de Russie avec le concours du Bélarus contre l’Ukraine, une nation souveraine et une démocratie.  Cette action est une violation des accords internationaux et de l’ordre international fondé sur des règles.  L’observatrice a fait part de sa pleine solidarité avec le peuple ukrainien, « victime innocente » de cette agression, demandant à la communauté internationale d’agir sans délai pour le protéger et atténuer les conséquences humanitaires de l’invasion.  Se tournant, pour finir, vers la Fédération de Russie, l’intervenante a rappelé que l’Ukraine est un pays qui a réussi à atteindre les normes démocratiques au cours de ces 20 dernières années et qu’il n’est pas surprenant que le Président Putin soit effrayé de voir une démocratie aussi dynamique à ses portes.

Présentation du projet de résolution intitulé « Agression contre l’Ukraine » (A/ES-11/L.1)

Nous vivons des heures graves qui vont être essentielles pour notre génération, celle qui précisément devait être préservée de la guerre, a déclaré M. SERGIY KYSLYTSYA (Ukraine).  C’est la raison pour laquelle l’ONU a été créée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale et aujourd’hui, il nous incombe de nous préserver de la guerre, de la déclarer hors-la-loi et de qualifier l’agression russe de violation grave des traités internationaux.  Les mots qu’a prononcés le juge Robert Jackson, en 1945, au Tribunal de Nuremberg, devraient s’adresser aujourd’hui à MM. Putin et Lavrov, et à des dizaines d’autres dignitaires russes, mais certainement pas aux citoyens ukrainiens qui essayent de préserver leur dignité.  Depuis plus d’une semaine, a dit le représentant, nous nous battons contre ceux qui cherchent à nous priver du droit même d’exister. 

Cette guerre ne vous rappelle-t-elle pas quelque chose?  Il y a plus de 80 ans, un autre dictateur essayait de faire de même, causant la mort de dizaines de millions de personnes.  Sommes-nous prêts aujourd’hui à payer ce prix?  L’Ukraine a remercié tous les pays qui accueillent ceux qui ont fui et qui font preuve de solidarité.  Face à la résistance totale de la population ukrainienne, des missiles balistiques russes ont commencé à pleuvoir, coûtant la vie à des dizaines de civils dont un Indien et un Chinois.  À Kiev, la tour de la télévision a été prise pour cible, tuant cinq personnes.  

L’objectif de la Fédération de Russie n’est pas seulement de nous occuper, mais d’opérer un génocide, a affirmé le représentant, en rappelant avoir saisi la Cour pénale internationale (CPI) qui va ouvrir une enquête officielle, étant donné que les agresseurs continuent de se rendre coupables de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.  Si l’on tolère le mal, il se poursuivra, a-t-il mis en garde, et ce projet de résolution est un moyen d’éviter cette progression. 

En votant pour, vous, les États Membres, allez réaffirmer votre attachement aux buts et principes de la Charte.  Venez signer « ce petit livre bleu » en sortant de la salle de l’Assemblée générale, a invité l’Ukraine.  La Charte ainsi signée sera remise au Secrétaire général pour qu’il se sente encouragé par cette majorité de nations qui croient encore en elle.  Ne renonçons jamais et ne baissons jamais les bras dans la poursuite des buts et principes de la Charte, a martelé l’Ukraine.

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