En cours au Siège de l'ONU

8899e séance – après-midi
CS/14693

Tigré: les membres du Conseil de sécurité se montrent inquiets face aux risques d’escalade du conflit et de catastrophe humanitaire en Éthiopie

Alors que le conflit et la situation humanitaire dans la région éthiopienne du Tigré ont atteint des «proportions désastreuses », menaçant la stabilité de la Corne de l’Afrique et de l’Éthiopie, « pays stratégique », et devant les risques d’escalade et l’absence de solution militaire, les parties doivent s’engager dans des négociations en vue d’un cessez-le-feu durable et instaurer les conditions favorables à l’entame d’un dialogue politique.   

Voilà en résumé le contenu de la discussion tenue, cet après-midi, au Conseil de sécurité sur la situation au Tigré, sur la base des informations rapportées par la Secrétaire générale  adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix,  Mme Rosemary DiCarlo, et le Haut-Représentant du Président de la Commission de l’Union africaine pour la Corne de l’Afrique, M. Olusegun Obasanjo. 

Dans son exposé, Mme DiCarlo n’a pas ménagé l’assistance pour prévenir du risque énorme qu’encourt actuellement l’Éthiopie: l’ensemble du pays peut rapidement sombrer dans une guerre civile, avec une « désintégration » à la clef.  Personne ne peut prédire exactement ce qui arriverait si les combats se poursuivaient dans un pays qui compte plus de 110 millions d’habitants, plus de 90 différents groupes ethniques et où sont parlées 80 langues, a dit Mme DiCarlo en prédisant au minimum une « impensable »  catastrophe  humanitaire et  des violations des droits de l’homme.   Nous devons donc faire tout notre possible pour éviter de nouveaux combats tout en se préparant au pire, a-t-elle recommandé. 

À  Addis-Abeba et dans le  Nord, tous les dirigeants estiment que les divergences sont d’ordre politique et peuvent être abordées par le dialogue, a dit M. Obasanjo.  « C’est là une brèche dans laquelle on devrait s’engouffrer car la fenêtre d’opportunité est très limitée. »  Il a conseillé d’intervenir rapidement pour éviter des répercussions très graves sur la population.  Le Haut-Représentant se rendra d’ailleurs demain dans les régions d’Amhara et d’Afar avec l’espoir d’obtenir un retrait des troupes tigréennes de ces régions. 

Pour faciliter ce processus, qui est piloté par l’Union africaine et les pays voisins, et afin de permettre que ces efforts  donnent  des résultats, une « diplomatie de médiation » qui parle d’une seule voix est cruciale, ont plaidé le Kenya, la Tunisie, le Niger et Saint-Vincent-et-les Grenadines (les « A3+1 »).   C’est pourquoi ils ont souhaité que le Conseil de sécurité envoie un message clair à toutes les parties, pour exiger la cessation des hostilités et le lancement immédiat d’un dialogue national incluant toutes les parties prenantes. 

Tous les membres du Conseil ont appuyé cet appel à un cessez-le-feu et à un dialogue politique.  Des « négociations immédiates et sans conditions préalables  » doivent commencer, a notamment pressé le Mexique.  Afin de favoriser le début des négociations, le Gouvernement éthiopien doit commencer par ne plus désigner le Front populaire de libération du Tigré (FPLT) comme organisation terroriste, a demandé la France. 

Le Gouvernement de l’Éthiopie souscrit pleinement à l’appel au dialogue politique et estime que la mobilisation régionale est « la plus à même  » de trouver une solution qui ne sera «  ni directe ni facile  », a précisé le représentant du pays.  En revanche, toute tentative, de blanchir le groupe « illégal »  et  «  immoral » du FPLT et d’amoindrir  les  horreurs  qu’il a commises contre le peuple éthiopien ne sera que contre-productive, a-t-il  mis en garde. 

Il n’y a pas de gentil  dans cette affaire, il n’y a que des victimes de part et d’autre, a répondu la délégation des États-Unis, niant tout parti pris de son pays dans le conflit.  Les États-Unis condamnent toutes les violences, de même que l’expansion  du  FPLT  hors du territoire  du  Tigré, a-t-elle assuré. 

Partisans de la résolution des problèmes africains par des solutions africaines, la Chine et la Fédération de Russie ont souhaité une coordination « accrue » entre l’Union africaine et l’ONU, notamment entre M. Obasanjo et M. Griffiths, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, mais aussi une coordination de l’aide humanitaire avec les autorités locales éthiopiennes. 

S’agissant de la « grave » situation humanitaire née de ce «  conflit dévastateur  » et qui plonge aujourd’hui plus de 7  millions de personnes  dans des conditions proches de la famine, plusieurs membres du Conseil dont la France, la Norvège, l’Inde, l’Estonie et les États-Unis ont appelé à la levée du blocus humanitaire imposé par les forces du FTPL. 

Des membres du Conseil ont également demandé la fin des discours de haine et du profilage ethnique, qui au final ne servent  qu’à  «  monter les Éthiopiens les uns contre les autres  »,  approfondissent les divisions, et  rendront la sortie de crise encore plus difficile.  

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE

Déclarations

Mme  ROSEMARY DICARLO, Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix, a déclaré qu’un an après son déclenchement, le conflit dans la région éthiopienne du Tigré a atteint des « proportions désastreuses ».  Les combats ont plongé le pays, sa population et plus globalement la stabilité de la région de la Corne de l’Afrique dans une « grave incertitude », a-t-elle noté.  Ces derniers jours, a-t-elle relaté, les forces tigréennes ont avancé vers le sud à travers la région d’Amhara, le long de la route A2 vers Addis-Abeba, agissant en coordination avec l’Armée de libération Oromo.  En réaction, le Gouvernement éthiopien a décrété l’état d’urgence national et déclaré mener « une guerre existentielle ».  Ailleurs, l’insécurité dans la région d’ Oromiya continue de s’aggraver tandis que la situation dans certaines parties de la région de Bīnshangul Gumuz reste tendue. 

« Soyons clairs: dans un pays de plus de 110  millions d’habitants, plus de 90  différents groupes ethniques et 80  langues, personne ne peut prédire la poursuite des combats et l’insécurité qu’elle apportera. »  Nous devons faire tout notre possible pour éviter de nouveaux combats tout en se préparant au pire, a mis en garde Mme  DiCarlo.  Elle a aussi prévenu du risque de voir s’étendre la guerre civile et de voir se réaliser une désintégration qui apporterait une impensable catastrophe humanitaire.  En outre, cela entrainerait des violations des droits de l’homme qui pourraient « dévorer » l’avenir d’un pays aussi important.  La Secrétaire générale adjointe a également craint des répercussions politiques immenses sur la région qui aggraveraient les nombreuses crises frappant actuellement la Corne de l’Afrique. 

S’agissant de la situation humanitaire, Mme DiCarlo a noté que ce « conflit dévastateur » a plongé plus de 7  millions de personnes dans le besoin, en particulier celles qui vivent dans le nord de l’Éthiopie.  Dans le Tigré, plus de 5  millions de personnes ont besoin de nourriture et environ 400 000 personnes vivent dans des conditions proches de la famine.  Aucun camion de secours n’a atteint Mekele depuis le 18 octobre, à cause des frappes aériennes, a encore déploré Mme DiCarlo.  Elle a indiqué que l’ONU n’avait pas été en mesure de transporter du carburant dans le Tigré depuis août.  Dans les régions d’Amhara et d’Afar, un grand nombre de personnes ont fui leurs maisons alors que les combats s’étendent.  Cette « crise humanitaire en expansion » se déroule dans un pays qui était déjà aux prises avec d’énormes défis, notamment des conflits locaux, des inondations, des sécheresses et des épidémies de maladies infectieuses, a fait remarquer la haute fonctionnaire.  Selon les estimations, a-t-elle ajouté, plus de 20  millions de personnes en Éthiopie ont besoin d’aide humanitaire, sous une forme ou une autre, dont plus de 5  millions sont déplacées. 

Ces souffrances doivent cesser et les civils doivent être protégés, a lancé Mme DiCarlo, insistant sur la nécessité pour toutes les parties de garantir et de faciliter « immédiatement » la livraison de l’aide humanitaire, sans entraves.  Une cessation immédiate des hostilités est plus cruciale que jamais, a-t-elle ajouté, rejoignant les appels lancés par le Secrétaire général de l’ONU, le Président de la Commission de l’Union africaine, le Comité exécutif de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et le « principal voisin et ami de l'Éthiopie », le Président du Kenya, M.  Kenyatta.  Les dirigeants des parties au conflit doivent tenir compte de « ces appels d’amis », faire preuve de magnanimité et de compromis, pour s’éloigner du « précipice potentiel » et mettre l’intérêt des Éthiopiens au premier plan, a-t-elle recommandé. 

Dans les moments tragiques que traverse le pays, le courage et le leadership sont de rigueur pour empêcher la descente dans l’abîme, a-t-elle insisté avant d’assurer de l’engagement ferme de l’ONU à se tenir aux côtés du peuple éthiopien. Le Secrétaire général a offert ses bons offices et l’entière disponibilité des Nations Unies aux efforts de règlement du conflit, a encore indiqué Mme DiCarlo en soulignant que M. Guterres travaille inlassablement avec les dirigeants de la région en veillant à ce que les dirigeants éthiopiens parviennent à un large consensus pour mettre fin à ce conflit sans délai.  « L’Éthiopie, membre fondateur des Nations Unies, doit maintenant être soutenue pour trouver la paix. »  Ses dirigeants doivent saisir l’occasion, a conclu Mme DiCarlo. 

Intervenant par visioconférence, M. OLUSEGUN OBASANJO, Haut-Représentant du Président de la Commission de l’Union africaine pour la Corne de l’Afrique, a partagé ses réflexions sur la situation dans ce pays « stratégique » pour l’Afrique.  Il a indiqué avoir été nommé Haut-Représentant dans le souci de mobiliser davantage de soutien en faveur des initiatives africaines en favorisant la cohésion sociale.  Il a admis que c’était là un poste délicat, car c’est en effet la première fois qu’un Haut-Représentant est nommé pour une région tout entière où chaque pays est caractérisé par une situation spécifique.  Il a pu s’entretenir avec la plupart des dirigeants de la région et avec les partenaires bilatéraux et multilatéraux en particulier.  En Europe, il a rencontré le Président français et des hauts responsables de l’Union européenne, du 5  au 8  octobre.  Il a aussi eu des entretiens, du 9  au 14  octobre, avec de hauts fonctionnaires américains à Washington.  Toutes ces entrevues ont permis d’aborder la question des responsabilités qui lui incombent aux fins de faciliter son mandat. 

La crise en Éthiopie continue de s’aggraver avec un très haut risque d’escalade, a constaté M. Obasanjo, qui escompte s’y rendre très prochainement pour contribuer à l’atténuation des tensions.  S’agissant des combats dans le Nord de l’Éthiopie, il a rappelé que le 2  novembre, un état d’urgence avait été décrété sur tout le territoire et que la population a même été appelée à se préparer à des violences.  Depuis son arrivée en Éthiopie, le 4  novembre, il a rencontré la Présidente du pays, le Premier Ministre et la Présidente de la région d’Oromiya pour une réflexion commune sur les voies et moyens de relancer le dialogue et de favoriser une désescalade rapide.  Hier, le 7  novembre, le haut fonctionnaire s’est rendu à Mekele pour faire quelques pas dans ce sens et chercher à trouver une solution amiable.  À Addis-Abeba et dans le nord, tous les dirigeants estiment que toutes les divergences sont d’ordre politique et qu’il importe de passer par le dialogue.  « C’est là, une brèche dans laquelle on devrait s’engouffrer car la fenêtre d’opportunité est très limitée et il faut intervenir rapidement pour éviter des répercussions très graves sur la population », a-t-il commenté.  L’heure est venue d’agir, ensemble, et de trouver des solutions pérennes, a-t-il exhorté, en appelant à éviter des « conséquences très graves sur une région africaine stratégique ». 

Lançant également un appel à volets multiples au Conseil, il a invité celui-ci à : encourager le Gouvernement et le Front populaire de libération tigréen à un cessez-le-feu ; un accès humanitaire complet et sans entrave ; les parties au respect du droit international humanitaire et au droit international relatif aux droits de l’homme.  Il a en outre appelé le Conseil à exiger le lancement immédiat d’un dialogue national incluant toutes les parties prenantes et la communauté internationale à se « rallier au processus piloté par l’Union africaine pour que les efforts donnent des résultats ».  Ces 48  heures, il a tenu des consultations dans la capitale du Tigré et consulté le Président de la Commission de l’Union africaine.  Il se rendra, demain, dans les régions d’Amhara et d’Afar.  Le Haut-Représentant a enfin espéré aider les dirigeants à obtenir un retrait des troupes de ces régions, souhaitant aussi que les efforts déployés permettront d’arriver à un programme concret pour que ce retrait et les questions humanitaires soient réglés, à la demande des parties prenantes. 

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a regretté que le Conseil de sécurité soit resté trop longtemps silencieux, alors que la crise en Éthiopie s’intensifiait.  Elle a également souligné le rôle crucial que les organisations régionales ont à jouer pour prendre langue avec toutes les parties, soutenir les efforts de médiation et aider l’Éthiopie à trouver une solution à cette crise.  Mme Byrne Nason a ensuite appelé à un arrêt immédiat des combats, à la protection des civils, et à ce que toutes les parties facilitent la fourniture de l’aide humanitaire à ceux qui en ont désespérément besoin, conformément au droit international humanitaire.  Elle a également réclamé la fin des discours de haine « qui font froid dans le dos », d’un langage déshumanisant et de l’incitation à la violence.  Souhaitant que toutes les parties au conflit embrassent des négociations en vue d’une résolution politique durable, Mme Byrne Nason a souligné le besoin d’un dialogue national inclusif piloté par les Ethiopiens qui inclurait toutes les régions et toutes les parties prenantes.  Pour conclure, elle a déclaré « toutes les parties en Éthiopie doivent œuvrer à la paix et ramener le pays sur la bonne voie, ce que méritent tous les Ethiopiens. » 

M.  TAREK LADEB (Tunisie), s’exprimant au nom des membres africains du Conseil de sécurité plus 1 (A3+1), c’est à dire du Kenya, du Niger, de la Tunisie et de Saint-Vincent-et-les Grenadines, a déploré la dangereuse détérioration de la situation au cours des deux dernières semaines.  Cette « nation sœur » se rapproche chaque jour d’une guerre civile à grande échelle qui, si elle n’est pas immédiatement arrêtée, pourrait entraîner une violence sans précédent et des atrocités généralisées.  Elle pourrait également menacer l’unité et l’intégrité territoriales de l’Éthiopie, avec le potentiel d’avoir des effets déstabilisateurs dans l’ensemble de la région.  Pour cette raison, les A3+1 soulignent que « la priorité à ce stade » est de parvenir à un cessez-le- feu immédiat.  Ce dernier est crucial pour permettre un accès humanitaire sans restriction aux communautés touchées ainsi que pour le rétablissement des services publics.  Le groupe a donc appelé à la cessation immédiate des hostilités, au plein respect de la vie et des biens des civils, ainsi que des infrastructures de l’État.  Ils exhortent aussi les parties à engager de manière constructive des discussions pour rechercher une solution pacifique et ouvrir la voie à un dialogue inclusif dirigé par les Éthiopiens et à la réconciliation nationale dans l’intérêt du pays. 

Le représentant a également appelé les parties à respecter leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme, en particulier en ce qui concerne la protection des civils.  Elles doivent s’abstenir d’actes de représailles contre toute communauté et de tout discours de haine et d’incitation à la violence et à la division.  Tous les Éthiopiens sont un seul peuple, a lancé le représentant, insistant sur « l’énorme et historique responsabilité » d’empêcher les atrocités et la famine et de prévenir une éventuelle déstabilisation de la région.  Pour y parvenir, a-t-il poursuivi, nous avons un fort besoin de diplomatie et de médiation.  Il est important aujourd’hui de parler d’une seule voix et d’envoyer un message clair et uni à toutes les parties en Éthiopie: la violence n’est pas une option pour résoudre les différends politiques, aussi graves soient-ils.  À cet égard, nous pensons que l’Union africaine et les pays voisins ont un rôle majeur à jouer pour aider les Éthiopiens à trouver le chemin de la paix et de la stabilité par le dialogue politique et la réconciliation.  Nous devons les aider à s’unir à nouveau dans l’intérêt commun de leur pays, a-t-il dit, avant d’exprimer le plein soutien des A3+1 au Haut-Représentant de l’Union africaine pour la Corne de l’Afrique, M. Olusegun Obasanjo. 

Mme MONA JUUL (Norvège) a relevé que l’évolution de la crise en Éthiopie « menace la stabilité et l’intégrité même du pays ».  Profondément préoccupée tant par l’ampleur de la crise que par son potentiel impact au niveau régional, la déléguée a martelé qu’il ne pouvait y avoir de solution militaire au conflit: « cela devrait être évident pour toutes les parties ».  Également préoccupée par les rapports faisant état d’une augmentation du « fichage ethnique » et des discriminations, Mme Juul a mentionné des « déclarations à connotation ethnique incitant à la violence », aggravant les divisions, « à des niveaux peut-être irréversibles ».  Elle a exhorté les dirigeants éthiopiens à reconnaître d’ores et déjà la nécessité d’un futur dialogue inclusif et d’un processus de réconciliation: toutes les parties doivent faire preuve « d’un maximum de retenue » et travailler immédiatement à la désescalade du conflit, a-t-elle plaidé.  Elle a appelé le FPLT, les forces de l’Armée de libération de l’Oromiya et d’autres groupes armés à « ne pas tenter d’attaquer Addis-Abeba », exhortant par ailleurs le Gouvernement à s’abstenir d’imposer des mesures ou des restrictions aux civils de certaines ethnies, « notamment les Tigréens et les Oromo ».  

La Norvège soutient pleinement l’initiative de paix de l’UA, ainsi que le mandat et les efforts du Haut-Représentant de l’UA pour la Corne de l’Afrique.  Sa déléguée a appelé toutes les parties à coopérer pleinement avec le Haut-Représentant, à cesser immédiatement les combats et à faire les concessions nécessaires pour une cessation négociée des hostilités. 

Qualifiant la situation humanitaire au Tigré d’ « extrêmement grave », Mme Juul a réclamé que l’accès à la nourriture, aux soins de santé et aux autres services de base soit rétabli.  L’oratrice s’est dite « consternée » par les conclusions du rapport conjoint du HCDH et de la Commission éthiopienne des droits de l’homme, qui met en évidence le massacre de civils et le « recours généralisé et systématique » aux violences sexuelles fondées sur le genre.  Ces incidents doivent faire l’objet d’une enquête, a-t-elle réagi en demandant que leurs auteurs soient traduits en justice.  Chaque jour supplémentaire de combats et de rhétorique enflammée renforce la nécessité d’un « processus de responsabilisation crédible » et d’un « mécanisme de justice transitionnelle viable », a enfin estimé Mme Juul. 

M. DINH QUY DANG (Viet Nam) a évoqué, avec une profonde inquiétude, la détérioration de la situation en Éthiopie, en particulier la poursuite des affrontements et l’extension des combats et des hostilités au Tigré, à Amhara, à Afar et aux alentours ces derniers jours.  L’escalade des opérations militaires et des affrontements ont plongé le pays et la région dans une grave instabilité, les parties risquant d’atteindre un point de non-retour, a-t-il prévenu.  Il a donc exhorté toutes les parties à l’arrêt immédiat des hostilités et au lancement d’un dialogue national inclusif, sans conditions préalables, pour parvenir à un cessez-le-feu.  Ce n’est qu’avec un cessez-le-feu durable, a insisté le représentant, que les conditions d’un dialogue inclusif et crédible seront réunies, en vue d’un règlement politique des causes sous-jacentes du conflit.  L’escalade des hostilités menace d’aggraver la situation humanitaire déjà catastrophique dans les régions du Tigré, d’Amhara et d’Afar, où des millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire urgente: le délégué a évoqué le sort de 5,2 millions de personnes devant compter sur une aide alimentaire, dont 400 000 évoluant dans des conditions proches de la famine. 

En attendant, il a salué les progrès accomplis sur le front humanitaire, ces derniers mois, y compris au Tigré.  L’accès et la distribution de l’assistance étant loin d’être satisfaisants, le représentant a appelé à la levée immédiate des restrictions, à un climat propice à l’accès humanitaire, au plein respect du droit international humanitaire, à la reprise rapide des services publics et à l’accroissement de l’assistance humanitaire.  Toutes les mesures doivent être prises pour protéger les personnes et infrastructures civiles ainsi que des agents humanitaires. 

La crise au Tigré, a conclu le représentant, émane de questions « complexes » à la fois politiques, historiques et ethniques.  Au lieu de semer la haine, les parties gagneraient à accorder la plus haute priorité aux intérêts de leur peuple et s’engager, patiemment, dans le dialogue et la réconciliation.  Il faut entamer le dialogue dès à présent sinon il sera trop tard pour sauver l’Éthiopie de la « catastrophe », a souligné le représentant, en appelant la communauté internationale à faciliter le processus dans le plein respect de l’indépendance, la souveraineté, l’unité et l’intégrité territoriale de l’Éthiopie.  Il a aussi appelé les parties au Tigré à la retenue, avant d’appuyer le rôle du Haut-Représentant de l’Union africaine pour la Corne de l’Afrique, M.  Olusegun Obasanjo.  Il a également appuyé l’engagement des pays voisins. 

M.  JUN ZHANG (Chine) a appelé à la retenue face à la détérioration de la situation et a conseillé aux parties de résoudre le conflit par un dialogue.  Il a espéré que toutes les parties répondront positivement à l’appel du Conseil de sécurité au cessez-le-feu.  Le délégué a fait remarquer que les acteurs régionaux peuvent jouer un rôle de chef de file dans le règlement de la question éthiopienne.  « La Chine est favorable à une résolution africaine des problèmes africains. »  De plus, M. Zhang s’est félicité de l’offre de bons offices faite par António Guterres à l’Éthiopie.  Il a indiqué espérer une coordination accrue entre l’Union africaine et les Nations Unies pour promouvoir la paix et la réconciliation en Éthiopie.  Aussi, M. Zhang a-t-il appelé à accorder le temps nécessaire aux missions de bons offices. 

Soulignant par ailleurs que les besoins humanitaires en Éthiopie sont énormes et que les capacités humanitaires doivent être renforcées, le représentant de la Chine a souligné que le soutien humanitaire doit se faire en respectant le leadership du pays et en s’appuyant sur les règles qui s’y appliquent, en évitant la politisation.  Enfin, M. Zhang s’est dit convaincu que le peuple éthiopien a la capacité et la sagesse de surmonter les défis actuels. 

L’instauration de l’état d’urgence par le Gouvernement éthiopien ne devrait pas servir d’excuse pour ignorer les droits de l’homme et le droit humanitaire international, a prévenu Mme  BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni).  Elle a rappelé que le rapport rendu public, cette semaine, par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) et la Commission éthiopienne des droits de l’homme documentait en détail des violations et des abus du droit humanitaire international, des droits humains et du droit des réfugiés.  Elle a énuméré « l’utilisation généralisée de violences sexuelles comme arme de guerre, la torture, les attaques contre les civils et les déplacements forcés ». 

Estimant que toutes les parties devaient agir pour mettre en œuvre les recommandations contenues dans ledit rapport, la déléguée britannique a appelé le Conseil à se concentrer immédiatement sur l’impact humanitaire et humain de ce « conflit tragique » et, lorsqu’il sera terminé, à se « rassembler », et à « aider l’Éthiopie à guérir ». 

Elle a jugé essentiel que toutes les parties cessent les combats et commencent à dialoguer: « les forces tigréennes doivent cesser leurs avancées et retourner au Tigré », « le blocus humanitaire a être levé », « les discours de haine et le profilage ethnique cesser », a-t-elle martelé.  Ils ne servent en effet, a-t-elle prévenu, qu’à « monter les Éthiopiens les uns contre les autres », approfondissent les divisions, et rendront la sortie de crise encore plus difficile. 

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a demandé des mesures immédiates pour obtenir un cessez-le-feu et favoriser l’amorce d’un dialogue politique.  Il a appelé le Gouvernement fédéral ainsi que le Gouvernement régional du Tigré et ses alliés à donner sans délais des gages de leur ouverture au dialogue, par des engagements politiques et militaires.  Il a également appelé à cesser immédiatement les hostilités, à figer les positions des forces, à s’abstenir d’internationaliser le conflit et à s’accorder sur un retrait progressif pour revenir aux positions d’avant le conflit.  Les autorités éthiopiennes doivent cesser de désigner le Front populaire de libération du Tigré (FPLT) comme organisation terroriste afin d’ouvrir en urgence des négociations.  Il a ensuite demandé au Gouvernement régional du Tigré de reconnaître que l’avenir de la région tigréenne ne pourra être déterminé que dans le cadre d’un dialogue national inclusif et des dispositions prévues par la Constitution, y compris sur le différend frontalier avec la région Amhara.  

Le représentant a aussi appelé l’ensemble des parties à soutenir les efforts de l’Union africaine, du Président  Obasanjo et du Kenya pour le règlement du conflit.  M. de Rivière a dit que la France soutient leurs messages, qui ont également été passés par le Secrétaire général de l’ONU et les principaux partenaires de l’Éthiopie, dont l’Union européenne.  L’ensemble de ces déclarations ont rappelé l’attachement de la communauté internationale à l’unité et à l’intégrité territoriale de l’Éthiopie.  Les acteurs de la région qui exploiteraient les vulnérabilités que le conflit a exacerbées en seront tenus responsables, a mis en garde le représentant réitérant son appel à un retrait définitif et vérifié des forces érythréennes.  

En dernier lieu, la déléguée de la France a appelé l’ensemble des parties à respecter leurs obligations en droit international humanitaire et en vertu des droits de l’homme, en priorité la protection des civils, y compris des personnels humanitaires.  Notant que l’engagement de combats en zone urbaine accroît les risques pour les populations et leurs biens, elle a appelé les parties à mettre un terme aux violences, à lutter contre l’impunité de leurs auteurs et à faire preuve de responsabilité.  Prenant note de la publication du rapport de l’enquête conjointe du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et de la Commission éthiopienne des droits de l’homme, la représentante a dit attendre de l’ensemble des parties qu’elles engagent des enquêtes crédibles sur les faits allégués « d’une extrême gravité ».  Sur le plan humanitaire, elle a réclamé un plein accès pour tout le personnel humanitaire, médical et des Nations Unies, jugeant inacceptable le blocage de l’acheminement de l’aide médicale.   

M.  RAVINDRA RAGUTTAHALLI (Inde) a plaidé pour que la fourniture de l’aide humanitaire reprenne le plus tôt possible, réitérant les principes fondamentaux d’une telle assistance : humanité, neutralité, impartialité et indépendance.  Prenant note du rapport conjoint de la Commission éthiopienne des droits de l’homme et du Haut-Commissariat des nations unies aux droits de l’homme, le délégué a salué tant la reconnaissance que l’acceptation de cet « important document » par le Gouvernement éthiopien qui pourrait compléter les efforts en cours de ce dernier pour faire la lumière sur les allégations de violations et d’abus des droits de l’homme.  Il a également noté que le rapport n’a pas été en mesure de confirmer le refus délibéré ou volontaire d’assistance humanitaire à la population civile dans la région du Tigré, ou le recours à la privation de nourriture en tant qu’arme de guerre. 

Le représentant a souligné que le dialogue national inclusif annoncé le 4 octobre, même s’il n’a pas avancé, est inévitable/incontournable.  Il a rappelé que l’Inde avait systématiquement mis en avant l’importance de la confiance mutuelle, de l’engagement, du dialogue et de la réconciliation pour résoudre tous les problèmes liés au conflit actuel.  Il a en conséquence exhorté toutes les parties prenantes à saisir l’occasion fournie par la nomination du Haut-Représentant de l’Union africaine pour la Corne de l’Afrique, M.  Olusegun Obasanjo.  Il a salué la rencontre de celui-ci avec le Premier Ministre éthiopien et pris note de sa visite à Mekele et de son exposé ce matin devant la Commission de l’Union africaine pour la paix et la sécurité, ainsi que de l’engagement des pays de la région dans ce processus.  Il a exhorté les parties à faire preuve de retenue et à œuvrer ensemble pour bâtir la confiance et ouvrir la voie au dialogue.  La stabilité politique et économique de l’Éthiopie est fondamentale non seulement pour la Corne de l’Afrique mais aussi pour le continent africain, a-t-il encore fait remarquer, en estimant qu’il est dans l’intérêt de la région que la situation politico-militaire actuelle soit réglée dans le cadre constitutionnel de l’Éthiopie.  Le représentant indien a appuyé les initiatives de l’Union africaine à ce propos, en recommandant au Conseil qu’il gagnerait de les encourager et de les appuyer activement. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) s’est dit profondément préoccupé par la récente escalade dans le nord de l’Éthiopie.  Il a appelé le Front populaire de libération du Tigré (FPLT) à retirer ses troupes d’Amhara et d’Afar et exhorté le Gouvernement éthiopien à s’abstenir de toute frappe aérienne contre des cibles civiles.  « Toutes les parties doivent faire leur possible pour protéger les civils, y compris le personnel humanitaire et médical, conformément au droit international humanitaire. »  Rappelant qu’il n’y avait pas de solution militaire au conflit, le délégué a exhorté toutes les parties à cesser les hostilités sans conditions préalables, à s’engager dans des négociations en vue d’un cessez-le-feu durable et à instaurer les conditions favorables à l’entame d’un dialogue politique. 

Le délégué estonien a apporté son plein appui aux efforts régionaux et internationaux en vue de parvenir à un règlement pacifique du conflit.  Toutes les parties à un conflit ont l’obligation de faciliter un accès humanitaire sans entraves à toutes les zones touchées par ledit conflit, a-t-il poursuivi.  Il s’est également dit vivement préoccupé par les allégations de violations des droits humains et de violences fondées sur le genre, exhortant le Gouvernement éthiopien à honorer ses promesses concernant l’établissement des responsabilités pour de telles violations.  « Afin de préserver la stabilité, l’unité et l’intégrité territoriale de l’Éthiopie, toutes les parties doivent cesser les hostilités et surmonter leurs divergences au moyen d’un dialogue national véritable et inclusif », a conclu M. Jürgenson. 

Mme  LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis d’Amérique) a déploré que le spectre de la famine plane sur la population à mesure que l’aide humanitaire est de plus en plus difficilement accessible, avant de souligner que le rapport conjoint, qui détaille cette situation, montre combien la situation est grave.  Pour elle, les forces de l’Amhara, le Front populaire de libération du Tigré (FPLT), l’armée éthiopienne, tous sont coupables : « Il n’y a pas de gentil dans cette affaire, il n’y a que des victimes de part et d’autre », a déclaré l’Ambassadrice américaine.  Les violations et abus ne sauraient être tolérés, a-t-elle poursuivi, soulignant qu’il faut que les responsabilités soient établies.  Quant aux humanitaires, ils doivent bénéficier d’un accès sans entrave, a-t-elle ajouté.  Mme Thomas-Greenfield a appelé toutes les parties à cesser les hostilités immédiatement et à s’abstenir de discours provocateurs qui ne font qu’aggraver les violences communautaires, avant d’ajouter que l’heure est aussi venue pour les forces de défense érythréennes de se retirer du territoire éthiopien.  À ceux qui disent que les États-Unis ont pris parti dans ce conflit, Mme Thomas-Greenfield a répondu que son pays condamne toutes les violences, quels qu’en soient les auteurs.  Les États-Unis condamnent ainsi l’expansion du FPLT hors du territoire du Tigré et appellent les forces éthiopiennes à ne pas entraver l’aide humanitaire.  « Le Gouvernement éthiopien doit autoriser les agences onusiennes à reprendre leurs opérations », a exigé la représentante des États-Unis, ajoutant que cette situation est « un affront aux Nations Unies ». 

Pour Mme  Thomas-Greenfield, la solution à ce conflit ne peut être qu’une solution politique.  C’est pourquoi, a-t-elle souligné, l’Union africaine a un rôle important à jouer.  Rappelant que « les seuls qui peuvent apporter la paix à l’Éthiopie, ce sont ses dirigeants et son peuple », Mme  Thomas-Greenfield a exhorté les parties à tout faire pour que la paix soit rétablie.

Mme  ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie) a reconnu les grands besoins d’aide humanitaire en Éthiopie.  Une aide qui doit être fournie avec l’accord des autorités et dans le plein respect des normes du droit international humanitaire, a-t-elle précisé.  La représentante a également souligné les problèmes complexes que connaît ce pays, en notant qu’ils sont enracinés dans l’historique de cette nation.  Pour les résoudre, a-t-elle conseillé, il faut éviter la politisation.  Il faut également éviter la politique des sanctions qui n’apportent aucun résultat, a estimé la déléguée en prônant plutôt de soutenir les efforts nationaux et régionaux.  La Fédération de Russie appuie donc les efforts déployés par M. Obasanjo, « homme honnête et neutre », de même que ceux de M.  Griffiths, a dit la représentante.  Elle a noté en conclusion que les Éthiopiens ont montré par le passé qu’ils étaient capables de résoudre leurs différends. 

M. JUAN RAMON DE LA FUENTE RAMIREZ (Mexique) a déclaré que la convocation de cette réunion émane de sa profonde préoccupation face à la situation en Éthiopie.  Il a estimé en effet que les avancées du Front populaire de libération du Tigré, la mobilisation du Front de libération des Oromo (FLO), et les attaques aériennes constantes de l’armée éthiopienne contre Mekele, constituent une intensification « exponentielle » des hostilités dont les effets s’étendent aux régions d’Amhara et d’Afar. 

M. de la Fuente Ramírez a conclu que la récente décision du Gouvernement éthiopien de décréter l’état d’urgence est un signal clair que si les parties persistent dans l’option militaire du conflit, celui-ci s’étendra à tout le pays, avec de graves conséquences pour la population et toute la région.  Il a dès lors vivement appuyé les efforts régionaux tendant à la résolution de la crise, en particulier ceux du Haut-Représentant de l’Union africaine pour la Corne de l’Afrique, M.  Olusegun Obasanjo. 

Le représentant a regretté que les frappes aériennes contre Mekele aient forcé les agences onusiennes à suspendre leurs vols vers cette ville, entraînant une interruption de l’entrée d’argent et du personnel humanitaire dans la zone et par ricochet, aggrave les conditions de vie de la population civile.  De la même façon, il a déploré que, bien que les produits alimentaires et de première nécessité soient disponibles pour la population du Tigré, ils ne peuvent être livrés en raison de l’absence de carburant et d’argent pour rémunérer les fournisseurs.  La délégation mexicaine a espéré que les deux vols hebdomadaires réguliers vers Mekele pourraient reprendre.  Il a pris note du rapport de l’enquête conjointe du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et de la Commission éthiopienne des droits de l’homme, qui fait état d’agressions contre la population civile; d’exécutions extrajudiciaires; de torture et de disparitions forcées; de violence sexuelle et sexiste; de déplacement forcé; du déni d’accès à l’aide humanitaire; ainsi que d’arrestation et de détention de journalistes, entre autres.  Toutes les actions de la part de tous les acteurs doivent être vérifiées et sanctionnées, a-t-il voulu. 

Il a réitéré l’appel à toutes les parties en vue d’un cessez-le-feu pour jeter les bases d’un dialogue national.  Le Mexique a enfin appelé à des « négociations immédiates  et sans conditions préalables », regrettant aussi qu’en dépit des indices sur le potentiel destructeur de ce conflit, et des multiples appels des agences humanitaires onusiennes sur la gravité de la situation dans ce domaine, le Conseil de sécurité n’ait pas été capable d’éviter une telle escalade du conflit.  Le représentant s’est également offusqué des propos belliqueux attisant l’animosité entre groupes ethniques: « nous savons trop bien où peut mener une telle instrumentation du discours de haine dans un pays si divers », a-t-il vivement mis en garde, en espérant néanmoins que le Conseil aura tiré des enseignements des erreurs du passé et sera en mesure d’assumer ses responsabilités pour faciliter un processus politique aboutissant à la paix. 

M. TAYE ATSKESELASSIE AMDE (Éthiopie) a d’abord annoncé au Conseil que les Forces de défense éthiopiennes avaient « inversé la menace militaire » posée par le FPLT, et déployé en parallèle tous les efforts possibles pour fournir des produits alimentaires et non alimentaires aux personnes dans le besoin au Tigré.  Le Gouvernement a signé un accord d’assistance humanitaire avec l’ONU, dépensé « près de 100 milliards de birr » pour l’assistance et la reconstruction, déclaré un cessez-le-feu humanitaire et retiré ses forces de la zone.  Le Gouvernement a aussi imploré le FPLT « félon », « entreprise criminelle », de livrer ses cadres, tout en promettant de laisser les partisans de base du groupe vivre en paix.  Ce fut en vain: « cela ne nous a pas aidés à gagner la paix », a soupiré le délégué. 

En raison de la « belligérance criminelle » du FPLT, la population du Tigré ne peut recevoir l’aide humanitaire urgente qu’elle réclame; les populations des régions d’Afar et d’Amhara sont vulnérables; les villes et les villages bombardés; les habitants tués sur le pas de leur porte, le fruit de leur labeur volé, a témoigné l’orateur.  Les convois humanitaires déployés de bonne foi par le Gouvernement au Tigré transportent aujourd’hui « des armes » et de « jeunes combattants manipulés », ou « forcés de se battre contre leurs frères et sœurs » pour « les desseins politiques avides de quelques individus ». 

M. Amde, qui a déclaré souscrire pleinement à l’appel au dialogue politique, a aussi reconnu qu’il existait des griefs politiques profondément ancrés au sein de la démocratie éthiopienne naissante -une nation diverse, abritant « 83 langues » et de nombreux groupes ethniques, chacun avec des demandes légitimes insatisfaites.  À la différence près qu’« aucun groupe ethnique ou politique, malgré ses demandes non satisfaites, n’a fait la guerre à la mère patrie » comme le FPLT, « un groupe criminel qui a refusé d’accepter l’égalité, d’abandonner un pouvoir et des privilèges mal acquis ».  L’orateur a accusé les médias occidentaux et des dirigeants d’organisations internationales de soutenir ouvertement le groupe.  Il a aussi dénoncé les rapports ayant amené le Conseil à se réunir de « faux », notamment au sujet de l’utilisation de la faim comme arme de guerre.  Des « accusations malveillantes », selon lui réfutées par le récent rapport d’enquête conjoint de la Commission éthiopienne des droits de l’homme et du HCDH. 

Il a renouvelé son appel aux partisans du FPLT, « enhardi à un point tel qu’il menace de renverser le gouvernement fédéral et de déstabiliser une nation de 112 millions d’habitants », de renoncer à ce projet « illégal » et « immoral ».  Si la délégation éthiopienne a estimé que la mobilisation régionale était « la plus à même » à trouver une solution, le chemin vers le dialogue et un accord politique ne sera « ni direct ni facile »: pour l’instant, le Gouvernement se consacre à arrêter le FPLT, « groupe criminel ».  Toute tentative, y compris la campagne à laquelle nous avons assisté ces derniers jours, de blanchir le FPLT et d’amoindrir les horreurs qu’il a commises contre le peuple éthiopien ne sera que contre-productive, a mis en garde M. Amde. 

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