Conseil de sécurité: les femmes doivent passer de la « périphérie au centre » des processus de paix, plaident les délégations
Sous la présidence du Kenya, le Conseil de sécurité a organisé aujourd’hui un débat public ministériel sur le rôle que les femmes jouent dans le maintien et la consolidation de la paix, à l’occasion du vingt-et-unième anniversaire de sa résolution 1325 (2020), dont les « progrès limités » en matière de mise en œuvre ont été pointés par la soixantaine d’intervenants à cette séance. Pour changer la donne, il faut « faire passer les femmes de la périphérie au centre », a plaidé la Secrétaire d’État aux affaires étrangères du Kenya, Mme Raychelle Omamo.
Alors que beaucoup d’entre elles à travers le monde sont en première ligne du combat pour la paix, les femmes restent pourtant trop souvent à la marge des processus de paix, a constaté à regret le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres. Le leadership des femmes est une cause, a plaidé le Chef de l’ONU, réclamant qu’elle devienne la « norme, car la « moitié de l’humanité » ne peut pas être exclue des questions de paix et de sécurité internationales. Dans le rapport dont le Conseil était saisi, M. Guterres réaffirme que la prévention des conflits et le désarmement figurent au cœur des mouvements portés par les femmes depuis plus d’un siècle en faveur de la paix.
Le Chef de l’Organisation a donc réitéré son engagement à accélérer la participation pleine et égale des femmes aux processus de paix et aux transitions politiques, en précisant qu’elles représentaient, l’an dernier, 23% des membres de délégations au sein des processus dirigés ou codirigés par l’ONU. Dans cette perspective, le Conseil de sécurité doit soutenir le travail du Secrétariat dans ses efforts de partenariats avec les femmes dirigeantes locales et leurs réseaux, et pour aider et protéger les activistes des droits humains.
La Secrétaire d’État kényane aux affaires étrangères a de son côté appelé les États Membres à investir dans la protection des femmes contre les abus et la violence et dans le renforcement de leurs capacités en matière de gestion de conflit, de médiation et de négociation. En un mot, a insisté Mme Omamo, il faut déplacer les femmes de la périphérie au centre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité. Pour y parvenir, elle a notamment suggéré de renforcer la collaboration entre femmes locales et principales parties prenantes, qui doit être reflétée dans les plans d’actions nationaux.
Pour la Directrice exécutive d’ONU-Femmes, Mme Sima Sami Bahous, il faut accroître le financement de l’agenda « femmes, paix et sécurité » et, parallèlement, réduire les dépenses militaires. Dans son rapport, le Secrétaire général rappelle que, dans le contexte de la pandémie, l’économie mondiale s’est contractée de 3,3% alors que les dépenses militaires mondiales ont augmenté de 2,6% pour atteindre près de 2 000 milliards de dollars en 2020. Cette action est essentielle pour réaliser l’objectif 16 de développement durable (ODD), les faits montrant que des dépenses militaires élevées dans les situations d’après-conflit augmentent le risque de reprise des hostilités.
Même son de cloche chez Mme Celia Umenza Velasco, de l’ONG colombienne « La terre du grand peuple », qui a réclamé la démilitarisation immédiate de la police de son pays qu’elle a accusée de brutalités à l’encontre des défenseuses des droits humains et environnementaux. Le budget de la police, selon elle, devrait être redirigé vers des fonds de soutien aux investissements sociaux. La militante a aussi voulu que le Conseil assure la participation entière, égale et significative des femmes leaders à la mise en œuvre de l’Accord de paix et aux négociations avec d’autres groupes armés en Colombie.
L’Envoyée spéciale de l’Union africaine (UA) chargée de ces questions, Mme Bineta Diop, après avoir alerté au sujet du risque de violence sexuelle encouru par les femmes dans la région du Sahel et des pays comme l’Éthiopie et le Mozambique, a souligné l’importance de favoriser l’appropriation nationale pour réussir une mise en œuvre cohérente du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de l’Agenda 2063 de l’Union africaine.
La situation des filles et des femmes en Afghanistan a fait réagir les participants, à commencer par le Secrétaire général, qui a promis que l’ONU continuerait à promouvoir et à défendre leurs droits après la prise de pouvoir des Taliban. « Nous n’arrêterons pas tant que les filles ne pourront retourner à l’école et les femmes reprendre leur travail et participer à la vie publique », a assuré M. Guterres. L’Inde a, de son côté, insisté sur l’importance que leurs voix soient dûment prises en compte dans la construction de l’avenir de l’Afghanistan. « Nous devons veiller à ce que les droits des femmes et des filles figurent au cœur de toutes les discussions avec les Taliban », a réitéré le Secrétaire d’État aux affaires étrangères du Royaume-Uni.
Pour la France, le Conseil de sécurité doit réaffirmer sans ambiguïté et avec fermeté qu’il n’acceptera pas que les droits des Afghanes soient bafoués et que leurs acquis obtenus de haute lutte soient effacés. « Elles ont le droit de vivre en sûreté, dans la sécurité et la dignité tout en jouissant pleinement de leurs droits fondamentaux », a insisté l’Ambassadrice de l’Union européenne (UE) avant de saluer la nomination au Conseil des droits de l’homme d’un rapporteur spécial pour l’Afghanistan.
Le représentant afghan a déclaré qu’avant la prise illégale du pouvoir par les Taliban, son pays avait démontré son engagement résolu à appliquer la résolution 1325 (2000) dès la Loya Jirga constitutionnelle de 2002, à laquelle avaient participé quelque 220 femmes sur 1 500 représentants. Pour que l’Afghanistan ne revienne pas en arrière dans le temps, la communauté internationale doit prioriser le sort des femmes vulnérables dans ses programmes humanitaires et les faire participer au processus de réconciliation nationale: « les Taliban ont gagné la guerre, mais ils doivent savoir qu’il leur reste à gagner la paix », a résumé le délégué.
LES FEMMES ET LA PAIX ET LA SÉCURITÉ S/2021/827
Les femmes et la paix et la sécurité, sur le thème « Maintien et consolidation de la paix: miser sur les femmes » S/2021/875
M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU, a déclaré que, alors que nombre de femmes à travers le monde sont en première ligne du combat pour la paix, que ce soit en tant qu’artisanes, actrices du changement, militantes, défenseuses des droits de l’homme, décideuses, dirigeantes, médiatrices et négociatrices avec les groupes armés, elles restent pourtant et trop souvent, à la périphérie des processus de paix formels. Elles sont largement exclues des salles où les décisions sont prises. Aujourd’hui, le leadership des femmes est une cause. Demain, ça doit être la norme. Nous ne pouvons plus exclure la moitié de l’humanité de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il dit.
Le Secrétaire général a ensuite affirmé que la prévention des conflits et le désarmement sont précisément au cœur des mouvements portés par les femmes depuis plus d’un siècle en faveur de la paix. Et, comme l’illustre son rapport de cette année, il existe un lien direct entre l’augmentation des investissements dans les armes et celle de l’insécurité et des inégalités dont pâtissent les femmes. De plus, le déséquilibre de pouvoir entre hommes et femmes reste la plus tenace et la plus persistante de toutes les inégalités, qui s’exprime de plusieurs manières. Dans les taux croissants de violence et de misogynie auxquels les femmes et les filles sont confrontées dans toutes les sociétés; dans l’extrême sous-représentation des femmes aux postes décisionnaires; et certainement, dans la myriade de défis auxquels sont confrontées les femmes dans les situations de conflit.
À titre d’exemple, au Myanmar, où les femmes ont longtemps été une force pour la paix -y compris dans le mouvement de désobéissance civile- une grande partie des organisations les regroupant ont dû fermer leurs opérations pour des raisons sécuritaires après le coup d’état militaire. En Éthiopie, nous entendons des rapports effrayants faisant état de violences sexuelles utilisées comme arme de guerre. Malgré leurs efforts courageux, les femmes yéménites continuent d’être exclues du processus politique global par les parties belligérantes et le dernier gouvernement n’a pas réussi à inclure une seule femme ministre, une première depuis 20 ans. Au Mali, après deux coups d’état en neuf mois, l’espace pour les droits des femmes ne se réduit pas seulement, mais se referme. Et en Afghanistan, filles et femmes assistent à un renversement rapide des droits qu’elles ont obtenus de haute lutte au cours des dernières décennies - y compris leur droit à une place dans la salle de classe.
Nous devons nous battre pour chaque femme et chaque fille. Cet engagement est au cœur de mon rapport sur « Notre programme commun », ainsi que de mon Appel à l’action sur les droits de l’homme. Nous voulons accélérer la participation pleine et égale des femmes dans tous les aspects de la vie. Cela inclut les processus de paix et les transitions politiques, a dit le Secrétaire général, ajoutant que l’an dernier, les femmes ont représenté 23% des délégués au sein des processus de paix dirigés ou codirigés par les Nations Unies. Même pour arriver à ce point, il fallait de l’innovation et du leadership. Mais nous travaillons à accélérer ces acquis, comme nous l’avons vu en Libye et en Syrie, en Colombie et en Afghanistan. L’ONU reste et continuera à promouvoir et à défendre les droits des femmes et des filles auprès des Taliban. Nous n’arrêterons pas tant que les filles ne pourront retourner à l’école et les femmes reprendre leur travail et participer à la vie publique, a-t-il assuré.
De plus, dans le cadre de l’initiative Action pour le maintien de la paix, l’ONU investit également dans des partenariats avec des femmes dirigeantes et actrices de la paix. L’Organisation augmente le nombre de femmes dans ses opérations de maintien de la paix: depuis janvier 2018, le pourcentage de femmes officiers d’état-major et experts militaires est passé de 8% à près de 18% aujourd’hui, et de 20 à 30% parmi les policiers. Il y a également plus de femmes à la tête des missions sur le terrain et la parité parmi les chefs ou chefs de mission adjoints a été atteinte. Mais, on ne s’arrêtera pas là, tant il est essentiel d’accroître la représentation et le leadership des femmes dans tous les aspects des activités de paix de l’ONU pour améliorer l’exécution de notre mandat et mieux représenter les communautés que nous servons. Nous avons besoin du soutien du Conseil de sécurité de trois manières à cet égard, a encore dit M. Guterres.
Le Conseil de sécurité doit, a-t-il demandé, soutenir le travail du Secrétariat pour renforcer et approfondir nos partenariats avec les femmes leaders locales et leurs réseaux, conformément à mon Appel à l’action sur les femmes qui transforment la paix et la sécurité. Elles doivent être capables de s’engager de manière significative dans les processus de paix et politiques. Le Conseil doit également aider à protéger les femmes défenseuses et militantes des droits humains. Il doit enfin travailler avec le Secrétariat pour promouvoir la participation pleine, égale et significative des femmes aux pourparlers de paix, à la consolidation de la paix et aux systèmes politiques à mesure que les pays passent à la paix. Nous savons que cela peut être fait, a conclu M. Guterres.
Mme SIMA SAMI BAHOUS, Directrice exécutive d’ONU-Femmes, a rappelé que 21 ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité, « nous nous rencontrons toujours pour discuter des progrès limités réalisés ». Ainsi, les portes que la 1325 était censée ouvrir n’ont laissé entrer qu’une lueur de lumière. Mais en tant que femmes, en tant qu’artisanes de la paix, en tant que praticiennes du développement, « nous prenons cette lueur et nous nous battons », a-t-elle indiqué. Du rapport du Secrétaire général sur les femmes et la paix et la sécurité, elle a tiré deux leçons marquantes. La première est que nous devons augmenter considérablement le financement de l’agenda pour les femmes, la paix et la sécurité et, à l’inverse, réduire les dépenses militaires. Deuxièmement, nous devons faire davantage pour soutenir la participation significative des femmes aux processus de paix et de sécurité.
Mme Bahous a noté que la réduction des dépenses militaires a été un objectif stratégique principal du mouvement des femmes pour la paix. C’était aussi un objectif clef de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing en 1995; il a été réaffirmé récemment lors du Forum Génération Égalité; et cette action est essentielle pour atteindre l’objectif 16 de développement durable (ODD). Les faits montrent clairement que des niveaux élevés de dépenses militaires dans les situations d’après-conflit augmentent le risque de reprise des hostilités. Cela montre également qu’investir dans l’égalité entre les sexes, a un rendement élevé en termes de dividendes de la paix, a-t-elle souligné. Pourtant, nous continuons à dépenser trop dans le premier et à sous-investir dans le second, a-t-elle regretté, rappelant que l’an dernier, les dépenses militaires mondiales ont augmenté de 2,6%, même face à la contraction de l’économie mondiale de 3,3% et aux demandes concurrentes de la COVID-19. Cela représente près de 2 000 milliards de dollars dépensés la même année où toutes les économies, qu’elles soient en paix ou en conflit, ont lutté pour répondre aux besoins fondamentaux de la population.
À l’opposé, dans les appels humanitaires, les secteurs qui traitent de la violence sexiste et des services de santé sexuelle et reproductive ne sont financés qu’à 33% et 43% respectivement, contre un financement moyen de 61% pour l’appel global. Aucun des accords de cessez-le-feu conclus entre 2018 et 2020 n’incluait l’interdiction de violences sexuelles, et le pourcentage d’accords de paix comportant des dispositions relatives au genre s’élève à 28,6%. À ce stade critique, nous devons revoir la priorisation, a affirmé la Directrice exécutive d’ONU-Femmes. Elle a souligné que les nations prospères sont des nations égales. Les nations égales sont des nations plus pacifiques. Mais les gens ne peuvent prospérer sans investir dans leurs besoins fondamentaux, comme la santé et la protection sociale. Lorsque le soutien de l’État est absent ou insuffisant, les femmes s’appuient encore plus sur leurs organisations locales. Pourtant, la part de l’aide bilatérale soutenant les organisations et mouvements féministes, dirigés par des femmes et de défense des droits des femmes dans les pays fragiles ou touchés par des conflits n’est que de 0,4%. Constatant le faible financement des organisations de femmes, elle a dit qu’il n’y a pas de meilleur indicateur de notre capacité à faire progresser l’égalité entre les sexes ou à réduire la violence à l’égard des femmes que la force du mouvement des femmes. Il est donc urgent d’accélérer leur financement tant programmatique qu’institutionnel.
Une voie pour changer les paradigmes des dépenses est d’augmenter le nombre de femmes dans les postes élus et nommés, a déclaré Mme Bahous. Elle a donc demandé à la communauté internationale de faire davantage pour soutenir la participation des femmes à la prise de décision sur les dépenses du secteur de la défense et de la sécurité. Elle est aussi priée d’étendre l’utilisation d’outils et de programmes de budgétisation sexospécifiques pour influencer les niveaux de dépenses militaires, et renforcer le contrôle des citoyens sur la budgétisation militaire grâce à une transparence et une responsabilité accrues.
Par ailleurs, la Directrice exécutive a noté que la participation active à la paix et à la sécurité est l’objectif central de la résolution 1325. Pourtant, nous continuons d’échouer. Les quotas et autres mesures spéciales sont nos meilleurs mécanismes pour accélérer le changement positif afin d’augmenter la représentation. En effet, le rapport nous montre que la représentation parlementaire des femmes dans les pays en conflit et post-conflit double là où il y a des quotas légiférés. Elle a proposé d’autres mesures comme les mesures de sélection inclusives; les délégations indépendantes de représentantes des femmes; l’engagement politique des États Membres pour les processus qu’ils soutiennent; ainsi que l’investissement dans une meilleure collecte de données, l’analyse de genre et le suivi des résultats dans tous les efforts de paix.
Pour Mme Bahous, il est clair que la participation des femmes et leur protection sont liées. Nous ne pouvons tout simplement pas avoir l’un sans l’autre. De fait, nous ne pouvons pas attendre des femmes qu’elles construisent la paix si leur vie est constamment menacée, a argué la haute fonctionnaire. Le rapport fournit des exemples de violences commises contre les femmes et les filles dans les zones de conflit et les camps de réfugiés, dont la plupart sont menées dans une impunité presque totale. En Colombie, 10 des 16 membres du Forum spécial sur le genre, qui surveille la mise en œuvre des dispositions relatives au genre de l’accord de paix, ont signalé des menaces directes à leur encontre, tout comme les femmes qui ont participé au Forum de dialogue politique libyen en 2020. De même, la prise de contrôle rapide de l’Afghanistan par les Taliban a été précédée par une vague de meurtres de femmes militantes de la société civile et de journalistes, et par le ciblage d’universitaires, de vaccinateurs et de femmes juges. En 2020, l’ONU a vérifié 35 cas de meurtres de femmes défenseuses des droits humains, de journalistes et de syndicalistes, mais ce nombre est une sous-estimation importante et ne provient que de sept pays touchés par un conflit disposant de données. Nous ne parvenons pas à protéger ces femmes, même celles qui risquent leur vie pour collaborer avec les Nations Unies, a-t-elle déploré.
Nous comptons sur vous pour soutenir le travail des organisations de femmes de la société civile, condamner, enquêter et punir les attaques contre elles, et revoir les lois nationales qui peuvent restreindre leur espace civique et restreindre leurs activités et leur financement, a-t-elle dit à l’endroit des délégations. De Mexico à Paris cette année, l’expression retentissante du soutien politique et financier à l’égalité femmes-hommes, galvanisée par le Forum Génération Égalité, tombe à pic. Le nouveau Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire, fait partie de ce mouvement pour faire progresser l’égalité des sexes et tout ce qu’il peut apporter, et les domaines de travail soutiendront directement les objectifs du Secrétaire général. « Je vous invite à rejoindre les 153 signataires et à prendre des engagements concrets pour faire avancer notre cause commune au cours des cinq prochaines années », a plaidé la Directrice exécutive d’ONU-Femmes. Pour un changement de paradigme dans la façon dont nous affrontons les problèmes de paix et de sécurité, nous avons besoin que les gouvernements se mobilisent, a-t-elle relevé, invitant non seulement les gouvernements des pays touchés par les conflits, mais aussi leurs voisins régionaux, leurs partenaires commerciaux, leurs alliés militaires, leurs donateurs et, surtout, le Conseil de sécurité.
Mme BINETA DIOP, Envoyée spéciale de l’Union africaine (UA) pour les questions « femmes, paix et sécurité », a alerté du fait que dans la région du Sahel et des pays comme l’Éthiopie et le Mozambique, les femmes courent un risque accru de violence sexuelle et ont du mal à subvenir à leurs besoins. Elle a cité le rapport du Secrétaire général qui met en évidence la valeur ajoutée de la participation des femmes aux processus de paix et aux activités de consolidation de paix et de relèvement. Nous souhaiterions qu’il soit précisé dans le programme « femmes, paix et sécurité » que le rôle des femmes est déterminant pour la mise en œuvre et le succès des programmes de paix, de médiation et de développement. Elle a plaidé pour un appui aux programmes africains, car a-t-elle insisté, l’appropriation nationale doit être au cœur des efforts qui doivent tous tendre vers une mise en œuvre cohérente du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et de l’Agenda 2063 de l’Union africaine. Il faut, a-t-elle conclu, recourir aux plateformes existantes, comme celle du Réseau des femmes leaders africaines.
Mme CELIA UMENZA VELASCO, de « La terre du grand peuple (ACIN) » de Colombie, a dit que son pays est l’un des plus dangereux au monde pour les défenseuses des droits humains et des droits environnementaux. La persécution perdure comme en témoignent les représailles contre les dernières manifestations en Colombie pour dénoncer les inégalités extrêmes, la violence et la faible mise en œuvre de l’Accord de paix, a informé la militante. En moyenne, au moins un ou une activiste autochtone est tué(e) chaque semaine; dans la région de Cauca, trois femmes leaders autochtones ont été tuées en 2020. Ces meurtres reflètent le prix terrible que les femmes leaders doivent payer pour leur travail, a déclaré Mme Umenza Velasco.
Réitérant que la terre représente tout pour les autochtones, elle a dit que les activistes autochtones sont perçus comme un danger parce qu’elles remettent en cause les puissants intérêts économiques. Mon peuple est sacrifié pour protéger nos cours d’eau et nos forêts, notre faune et flore, alors que son courage et son engagement devraient servir de modèles dans la défense non-violente de nos droits environnementaux, a fait remarquer Mme Velasco, pour qui la violence subie par les communautés est un exemple de l’impact dévastateur des représailles militaires face aux crises sociales.
Cela fait des dizaines d’années que les communautés autochtones appellent à la démilitarisation en Colombie, a-t-elle rappelé, car de la violence s’y exerce encore aujourd’hui. La faible mise en œuvre de l’Accord de paix a relancé le conflit. Aujourd’hui l’État déploie toujours les forces militaires dans son dispositif de sécurité, en particulier dans les régions rurales. La présence militaire et policière intervient le plus souvent pour défendre les intérêts économiques des industries puissantes, et non ceux des habitants, a accusé l’activiste. La police a eu recours à la violence face aux manifestants pacifiques durant les dernières manifestations à Cali, dont la population est davantage afro-descendante. Les forces publiques ont commis des violences sexuelles et des violences basées sur le genre. Face à cette situation grave, la Commission interaméricaine des droits de l’Homme a demandé la démilitarisation totale de la police en Colombie.
Pour Mme Umenza Velasco, l’Accord de paix a vu le jour grâce à la lutte obstinée des mouvements féministes colombiens. Cependant, sa mise en œuvre reste limitée en ce qui concerne les clauses de genre et le volet « ethnique ». Le Forum spécial sur le genre ainsi que le Forum de haut niveau sur l’ethnie reçoivent peu de fonds et de soutien politique, et leurs membres sont menacés et agressés. La Réforme complète des zones rurales visant l´accès à la terre pour les femmes a été retardée au détriment des exploitations des ressources naturelles et des violations des droits à la terre.
Mme Umenza Velasco a dénoncé le fait que la question des défenseuses des droits humains est largement ignorée par le Conseil de Sécurité dans sa mise en œuvre du programme « Femmes, paix et sécurité » en Colombie. Elle l’a donc appelé le Conseil à mettre en œuvre le Chapitre « ethnique » et les clauses de genre de l’Accord assorti d’un engagement financier et technique.
Elle a demandé au Conseil de répondre à la crise des violences contre les défenseurs et les défenseuses des droits humains, et de démilitariser immédiatement la police en la retirant du Ministère de la défense, de démanteler la Brigade mobile antiémeutes de la Police nationale et de rediriger les fonds vers le soutien d’investissements sociaux. Elle a enfin demandé à assurer la participation entière, égale et significative des femmes leaders à la mise en œuvre de l’Accord de paix et aux négociations avec d’autres groupes armés en Colombie.
La paix doit être enracinée, elle doit venir de la base et ne pas rester confinée aux réunions et aux discours, a d’emblée souligné Mme RAYCHELLE OMAMO, Secrétaire d’État aux affaires étrangères du Kenya, qui préside ce débat ouvert, pour la première fois, aux pays non-membres du Conseil de sécurité depuis le début de la pandémie. Il faut, a-t-elle dit, s’efforcer de « voir les femmes », de rendre visibles leur travail, leurs expériences et leurs accomplissements. Il faut investir en elles, marcher dans leurs pas, dans leur rue pour pouvoir intégrer leurs ambitions et leurs besoins dans les politiques et stratégies nationales et internationales et tenir pleinement compte de leurs avis dans l’édification et le maintien de la paix, a martelé Mme Omamo.
La Secrétaire d’État a attiré l’attention sur l’exposition itinérante « Photoville », qui met en valeur la mobilisation des femmes. En partenariat avec le Département des opérations de paix, le Département des affaires politiques et de la consolidation de la paix et ONU-Femmes, le Kenya, a dit la Secrétaire d’État, lance le voyage africain de cette exposition, qui sera présentée en République démocratique du Congo, en République centrafricaine puis à Nairobi, l’année prochaine.
Les femmes travaillent tranquillement et se mobilisent pour la paix dans les villages, les camps de réfugiés et de déplacées, les habitats informels. Elles reconstruisent des communautés éclatées, forgent la réconciliation, plaident pour leurs droits, même face à la violence et à la brutalité d’un conflit. Le comportement des femmes au niveau local et au cœur des zones de conflit est malheureusement sous-évalué, a regretté la Secrétaire d’État, alors même qu’une paix durable passe d’abord par les communautés et les familles. Il est donc nécessaire d’encourager et de faire entendre la voix des femmes sur le terrain et de les soutenir dans la prévention des conflits et la pacification.
La Secrétaire d’État kényane a appelé les États Membres à investir dans la protection des femmes contre les abus et la violence; dans leurs compétences en matière de gestion de conflit; dans le renforcement de leurs capacités en matière de médiation et de négociation; dans leurs moyens de subsistance; dans leurs droits à la paix, et dans leur rôle potentiel contre l’extrémisme violent. En un mot, il faut déplacer les femmes de la périphérie au centre du programme « femmes, paix et sécurité ».
Mme Omamo a énuméré cinq actions: renforcement de la collaboration entre les femmes locales et les principales parties prenantes, notamment pour identifier les causes et les facteurs de conflit, et prise en compte dans les plans d’action nationaux de la contribution et de la participation des femmes au niveau local, avec attribution de budgets et conception de programmes ciblés pour faire entendre leur voix, renforcer les capacités et la résilience.
Troisièmement, il faut que la protection des femmes et des enfants soit l’un des rôles essentiels des Casques bleus femmes. Il faut aussi recourir aux compétences des femmes pour améliorer les mécanismes d’alerte précoce, tels que FemWise-Africa. Enfin, les services d’appui aux missions de paix devraient s’assurer que la reconstruction post-conflit et les processus de développement impliquent effectivement les femmes. Pour conclure, Mme Omamo a cité feu Thomas Sankara: « J’entends le vacarme du silence des femmes, je pressens le grondement de leur bourrasque. »
Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a commencé par réaffirmer l’engagement ferme et sans équivoque de son pays envers le point Femmes, Paix et Sécurité (FPS), tel qu’énoncé dans la résolution 1325. En promouvant la participation et le leadership des femmes – en politique, dans l’éducation, dans la médiation, dans les négociations, dans tous les aspects de vie publique, nous promouvons davantage de sécurité et de paix pour tous, a-t-elle déclaré. Cela devrait donc non seulement être une priorité pour les femmes mais une priorité pour tous ceux qui valorisent la paix et le progrès. Pour leur part, les États-Unis sont fiers de leur travail inlassable pour promouvoir cette « résolution historique » et ses principes.
Ils ont adopté la loi sur les FPS en 2017, ce qui en a fait le premier pays au monde doté d’une loi nationale complète promouvant ce programme clef. Depuis des progrès profonds et tangibles ont été enregistrés, ce qui a considérablement augmenté la sûreté et la sécurité des femmes, des filles et des personnes dans le monde. À ce sujet, la représentante a expliqué que l’USAID a fourni des soins de santé essentiels, un soutien psychosocial, une aide juridique et des services économiques à plus de 13,5 millions de survivantes de violences sexistes. Le Département d’État a, par ailleurs, investi environ 138 millions de dollars dans l’aide aux femmes, à la paix et à la sécurité, venant compléter ses engagements diplomatiques et politiques dans 60 pays. Mme Thomas-Greenfield a donc souligné qu’il ne s’agit pas simplement de points de discussion pour les États-Unis mais bien d’engagements concrets, clairement codifiés dans la législation nationale, et respectés dans leur politique étrangère.
En juin, la Maison Blanche a soumis son premier rapport au Congrès sur les progrès du travail dans ce domaine, et, comme l’a dit la représentante, les défis dont il y est question sont bien réels. La pandémie de COVID-19 a entraîné des pics et des taux extraordinaires de violence sexiste et a effacé des décennies de progrès dans les efforts visant à protéger et à éduquer les filles. Beaucoup de filles touchées ne retourneront jamais à l’école si la communauté internationale choisit de les négliger et de les oublier, a-t-elle avancé, en s’alarmant que « nous ne pouvons simplement pas permettre que cela se produise ». Mme Thomas-Greenfield a donc exhorté la communauté internationale à promouvoir le Programme FPS dans le monde. Pour étayer son propos, elle a parlé du rôle des femmes dans la transition au Soudan, ou encore de l’Accord de paix en Colombie qui favorise leur participation à la vie publique.
À l’avenir, les États-Unis ont espéré voir de nombreux mandats du Conseil de sécurité promouvoir l’inclusion de femmes dans les opérations, et tenir compte de leurs perspectives et besoins ainsi que d’autres groupes à risque de violence et d’exploitation, mais aussi de la protection des défenseurs des droits humains et de la société civile. Nous continuerons à insister sur ces engagements au nom des femmes et des filles du monde entier, a affirmé la représentante, en commençant par revendiquer et défendre les droits des femmes et des filles afghanes. Nous devons nous élever contre la violence et le ciblage des femmes en temps de guerre, a-t-elle déclaré, et nous devons défendre les droits des filles à l’éducation, et bien plus encore.
LORD TARIQ AHMAD DE WIMBLEDON, Secrétaire d’État aux affaires étrangères, du Commonwealth et du développement et Représentant spécial du Premier Ministre pour la prévention des violences sexuelles en période de conflit, a assuré que le Royaume-Uni s’est engagé à assurer la participation pleine, égale et significative des femmes à la prise de décision et à tous les efforts de paix. L’augmentation du nombre de femmes soldats de la paix et de femmes occupant des postes de direction est non seulement une priorité clef, mais c’est également essentiel à l’efficacité opérationnelle des missions de paix. Le Royaume-Uni s’engage, en outre, à atteindre les objectifs de parité des genres parmi les personnels en uniformes de l’ONU. Il mène, à cet égard, une étude sur les barrières liées au genre, afin de mieux comprendre les obstacles rencontrés par les femmes des Forces armées britanniques déployées dans des opérations de maintien de la paix. Son gouvernement encourage l’ONU à montrer l’exemple en faisant de la participation directe des femmes une exigence pour tous les processus de paix qu’elle soutient.
Le Ministre a aussi indiqué que son gouvernement a soutenu le Fonds pour la consolidation de la paix depuis sa création, en engageant plus de 175 millions de livres sterling pour autonomiser les femmes et les jeunes. Il soutient également les réseaux de médiatrices, en continuant de financer les médiatrices à travers le Commonwealth, cette année. Pour autant, il faut faire davantage, notamment lutter fermement contre l’impunité et demander des comptes aux auteurs d’attaques et de représailles contre les femmes défenseuses des droits de l’homme et les personnes travaillant avec le Conseil de sécurité. Et ce travail commence dans cette pièce, a-t-il lancé, ajoutant que si nous ne pouvons pas protéger les intervenantes ici, nous sapons l’objectif du Conseil de sécurité.
Abordant la situation en Afghanistan, il a estimé qu’elle avait jeté une lumière crue sur les défis qui nous attendent. Nous devons veiller à ce que les droits des femmes et des filles figurent au cœur de toutes les discussions avec les Taliban. Les femmes doivent faire partie de la conversation sur l’avenir de la nation. Il est vital que leurs voix soient entendues. Dans la mesure du possible, les équipes de négociation et de médiation doivent avoir accès à une expertise en matière de genre, et les femmes devraient être inclues dans les délégations nationales, a exigé le Secrétaire d’État
M. COLM BROPHY, Ministre d’État de l’Irlande chargé du développement d’outre-mer et de la diaspora, a constaté un écart persistant entre la rhétorique et la réalité sur la question des femmes et la paix et la sécurité. Pour le combler, il a proposé trois mesures.
D’abord, M. Brophy a proposé de responsabiliser les bonnes personnes. Cela signifie d’abord, pour le Ministre, que « ceux qui font la guerre ne peuvent et ne doivent pas avoir le monopole des termes de la paix ». Il faut donc des processus de paix avec des femmes à la table, participant pleinement et sur un même pied d’égalité. De même, le maintien de la paix doit être sensible au genre. L’augmentation du nombre de femmes Casques bleus est un élément important, mais il s’agit également d’opérer un changement culturel plus profond dans nos forces armées. Il suffit de se tourner vers l’Afghanistan pour comprendre ce qui se passe lorsque les femmes sont exclues de la politique et de la vie publique, a argué M. Brophy, ajoutant que les droits des femmes et des filles ne devraient jamais être le dernier point à l’ordre du jour, quelque chose sur lequel on revient lorsque tout le reste est convenu.
Il faut ensuite entendre les bonnes voix, a poursuivi le Ministre. Il est donc essentiel que ce Conseil écoute et tienne compte des femmes leaders ainsi que des défenseuses des droits humains et de la société civile. Nous devons entendre la vérité sans fard si nous voulons prendre de bonnes décisions fondées sur des preuves, a ajouté M. Brophy. Il a rappelé que l’Irlande avait placé les femmes intervenant au nom de la société civile au cœur de sa présidence du Conseil le mois dernier. Et s’il est bienvenu que les méthodes de travail virtuelles puissent faciliter la participation des femmes des communautés au Conseil, nous avons également besoin de voir la société civile physiquement, de retour dans ce bâtiment et assise autour de cette table en fer à cheval, a—t-il plaidé. Le Ministre a notamment déploré le fait que des femmes afghanes présentes à New York ne participent pas à cette séance.
Enfin, M. Brophy a demandé de « dépenser de l’argent pour les bonnes choses ». Il a jugé choquant qu’au plus fort d’une pandémie, les dépenses militaires dans une grande partie du monde aient été supérieures aux dépenses de santé liées à la crise sanitaire. Les chiffres montrent clairement une forte corrélation entre la militarisation et l’inégalité entre les sexes, a—t-il également noté. Il a ensuite rappelé que l’Irlande avait promis 1,5 million de dollars sur cinq ans au Fonds pour les femmes, la paix et l’action humanitaire, afin de soutenir directement les femmes artisanes de la paix et les organisations dirigées par des femmes. Nous sommes également déterminés à faire progresser l’agenda « femmes et paix et sécurité » dans notre propre pays, car il ne s’agit pas seulement d’une préoccupation de politique étrangère limitée aux pays inscrits à l’ordre du jour de ce Conseil, a conclu le Ministre.
M. DINH QUY DANG (Viet Nam) a appelé à redoubler d’efforts pour assurer la participation pleine, égale et significative des femmes aux processus de paix et politiques, conformément à l’appel à l’action du Secrétaire général. À cet effet, le représentant a mis l’accent sur trois points.
M. Dang a d’abord appelé à valoriser les expériences, les connaissances, la compréhension et l’expertise des femmes dans tous les domaines, y compris la paix et la sécurité. Pour ce faire, il a appelé à éliminer les obstacles persistants et à faire pression pour des changements radicaux afin de garantir que les femmes soient pleinement impliquées en tant que partenaires égales dès les premières étapes de chaque processus de paix et politiques.
Le représentant a ensuite rappelé que la responsabilité de la mise en œuvre du programme « femmes, paix et sécurité » incombait à tous les États Membres, avant d’exhorter chacun d’eux à veiller à ce que les rôles des femmes soient intégrés dans les cadres juridiques, les politiques, les stratégies et les initiatives aux niveaux national, régional et international en matière de paix et de sécurité.
Enfin, M. Dang a mis l’accent sur la coopération internationale en matière de renforcement des capacités et de partage des meilleures pratiques pour renforcer la participation des femmes aux processus dirigés par l’ONU. À cet égard, il a appelé à ce qu’au moins 15% de l’aide publique au développement soit consacrée à la promotion de l’égalité des sexes dans les pays touchés par des conflits.
Mettant l’accent sur les initiatives de son pays, M. Dang a indiqué que le rôle des femmes dans le maintien et la consolidation de la paix avait été intégré dans les cadres juridiques et les politiques du Viet Nam. Il a précisé que les femmes représentaient 21% du personnel militaire vietnamien des missions de maintien de la paix de l’ONU en République centrafricaine et au Soudan du Sud, soit une proportion bien supérieure à l’objectif du Secrétaire général de 15% d’ici à 2028. Enfin, il a précisé que les femmes avaient toujours joué un rôle indispensable, que ce soit en temps de guerre ou en temps de paix, dans la défense ou dans la construction du Viet Nam, et qu’elles occupaient aujourd’hui 30% des postes de direction dans les agences ministérielles.
M. TAREK LADEB (Tunisie) a rappelé que les femmes et les filles ont payé le plus lourd tribut aux répercussions de la pandémie de COVID-19 surtout dans les pays en confits. Elles doivent être placées au cœur des programmes de relèvement mais aussi des processus de paix et politiques. Au plan national, pour la première fois en Tunisie, une femme a été nommée Première Ministre, a ajouté le délégué, relevant au passage le nombre important de femmes dans les institutions publiques. Le représentant a d’ailleurs attribué l’échec des mesures adoptées contre la pandémie à la faible participation des femmes au stade d’élaboration. Insistant sur la présence des femmes aux efforts de consolidation de la paix, il a demandé au Conseil de mobiliser du soutien et des coopérations, sans oublier de mettre les technologies modernes à la promotion de la parité pour combattre les inégalités et les discriminations.
Pour M. ABDOU ABARRY (Niger), force est de constater que, 21 ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000), beaucoup reste à faire pour parvenir à l’égalité des genres mais également pour la mise en œuvre effective et pleine du Programme pour les femmes et la paix et la sécurité. Pourtant, a-t-il fait observer, partout où les femmes ont été impliquées dans les processus de paix, les accords conclus ont été « plus pertinents ». L’implication des femmes dans ces processus est « tout simplement une question de justice », a insisté M. Abarry, interrogeant ainsi l’assistance: « Si la paix est une question collective, pourquoi devrait-elle être discutée, consolidée et réalisée sans les femmes? »
Pour un pays comme le Niger, situé dans une région en proie à de multiples crises, le Programme pour les femmes et la paix et la sécurité n’est pas simplement un concept, il est déterminant pour maintenir la paix et prévenir les conflits, a poursuivi M. Abarry. Les grands défis qui affectent le Sahel, qu’il s’agisse de l’insécurité, de l’impact des changements climatiques ou des enjeux de développement économique ont un impact disproportionné sur les femmes et les filles, et amplifient les inégalités existantes. « Les femmes et les filles sont les principales victimes des conflits; pourtant seuls 22% des accords de paix signés entre 1995 et 2019 contiennent des dispositions particulières sur les femmes », s’est étonné le représentant.
M. Abarry s’est aussi fait la voix des femmes pour souligner leur rôle dans l’économie et le développement, demandant d’allouer davantage de fonds aux organisations de femmes qui œuvrent pour la paix, en particulier celles qui travaillent à la base, dans les communautés. En outre, lorsque les femmes sont plus nombreuses à occuper des postes de direction dans le secteur public, elles peuvent fondamentalement transformer les politiques publiques de manière à induire un changement structurel, a-t-il assuré.
Comme 30 autres pays africains, le Niger a commencé à mettre en œuvre le Plan d’action national pour la paix et la sécurité des femmes, qui a été élaboré à la suite d’un processus de consultation auquel ont participé des femmes et des hommes de toutes les régions du pays. Le représentant a salué, à cet égard, l’élaboration du Cadre continental de Résultats de l’Union africaine pour le suivi de la mise en œuvre du programme pour les femmes et la paix et la sécurité. Avec d’autres partenaires, le Niger a aussi procédé à la mise en place du Groupe d’amis des femmes du Sahel.
Le représentant a ensuite demandé au Conseil de sécurité d’en faire davantage, par exemple en renforçant les consultations avec les organisations de la société civile. « Le fossé entre notre ambition, nos engagements et la réalité ne peut être comblé que si nous soutenons de manière adéquate le travail des femmes bâtisseuses de paix », a interpellé M. Abarry. Les Nations Unies pourraient mettre en place des stratégies d’inclusion des femmes et élaborer des rapports réguliers sur les mesures à adopter afin de combler les lacunes, a-t-il suggéré.
M. DAI BING (Chine) a appelé la communauté internationale à accorder plus d’attention au programme « femmes, paix et sécurité ». À titre d’exemple, le représentant a évoqué le cas des Palestiniennes qui vivent depuis longtemps sous le spectre de l’occupation tandis que les Afghanes payent un lourd tribut de la guerre et risquent de perdre des opportunités. La pandémie a accru la situation difficile des femmes, a poursuivi le représentant, en appelant la communauté internationale à porter son attention sur les besoins et les difficultés des femmes et leur apporter une aide humanitaire spécifique dans les temps. Une attention particulière devrait aller à la cessation des menaces proférées par des groupes terroristes à leur égard, et, dans ce contexte, la Chine a appelé la communauté internationale à tout faire pour assurer le rapatriement des femmes et enfants de combattants étrangers qui se trouvent toujours dans les camps.
Pour la Chine, il est également important de promouvoir un rôle accru des femmes dans la consolidation de la paix, y compris les processus et pourparlers de paix. Elles devraient avoir les mêmes opportunités que les hommes en termes de carrière et de formation au sein des opérations de maintien de la paix. La Chine a souligné les avantages considérables des femmes dans le maintien de la paix, en rappelant avoir envoyé plus de 3 000 femmes dans les opérations de paix ces dernières années, notamment pour travailler avec les réfugiés ou pour le déminage. Pour aider les femmes sur le plan politique, leur émancipation économique est essentielle, a martelé le représentant, en soulignant que cela passe par leur éducation. Dès lors, la Chine a souhaité que les mandats pour les missions politiques spéciales et les opérations de paix appuient davantage cet aspect. Pour sa part, la Chine travaille en ce sens, notamment à travers la centaine de programmes pour les femmes qu’elle soutient sur le terrain mais aussi à travers le prix pour l’émancipation des femmes et des filles qu’elle décerne chaque année. Comme l’a résumé son représentant, la Chine conjugue ses efforts avec ses partenaires pour assurer l’égalité entre les sexes, surtout en matière d’éducation.
Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a déclaré que les inégalités entre les sexes sont depuis toujours le reflet des systèmes patriarcaux, de la misogynie et de la répartition inégale du pouvoir dans le monde. C’est l’une des causes des conflits, a-t-elle martelé. Il est donc prioritaire d’adopter une approche axée sur le genre et l’intersectionnalité, tenant compte des besoins spécifiques des femmes et des filles. Pour ce faire, la communauté internationale dispose d’un cadre robuste. En tant que pays contributeur de troupes, a poursuivi la représentante, le Mexique compte environ 35% de femmes en uniforme parmi le personnel déployé. Nous sommes donc préoccupés par le fait que la participation des femmes au maintien de la paix reste « rare », en raison des divers obstacles, liés, entre autres, aux différentes étapes du recrutement et à la formation. Or, a insisté la représentante, nous savons bien que les femmes déployées sont essentielles à une communication fluide et au renforcement de la confiance avec les communautés d’accueil. Elles peuvent développer des alliances stratégiques avec la société civile et contribuer à amplifier la voix et les revendications des militants ou identifier les lacunes existantes.
La représentante a d’ailleurs appelé « énergiquement » tous les États à s’abstenir de transférer des armes lorsqu’il existe un risque qu’elles soient utilisées dans des actes de violence fondée sur le sexe. Il est tout aussi important d’investir davantage pour s’assurer que dans les processus de désarmement, démobilisation et réinsertion, les femmes participent activement à la recomposition du tissu social, et à la réduction de la violence communautaire. Nous exhortons tous les États Membres à veiller à ce que les processus menés par l’ONU soient inclusifs et garantissent une participation pleine et égalitaire des femmes, y compris autour des tables de négociation des accords de paix. En tant que coprésident avec l’Irlande du Groupe informel d’experts chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité au Conseil de sécurité, le Mexique, a conclu la représentante, continuera de travailler à ces objectifs.
M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a constaté que la situation en Afghanistan a clairement posé la question de la faculté du Conseil à défendre les droits des femmes et leur participation aux processus et de paix. Au vu du rapport du Secrétaire général, il a salué le leadership de l’ONU pour encourager et soutenir la participation pleine, égale et significative des femmes, de la Syrie au Yémen, en passant par la Libye et le Soudan du Sud. Mais, a estimé le représentant, nos progrès restent lents et l’absence de dispositions sur le genre dans les accords de cessez-le-feu sape la participation des femmes aux futurs processus de paix. En outre, les menaces qu’elles subissent peuvent conduire les femmes militantes et représentantes de la société civile à se mettre à l’écart ou à s’autocensurer. Les femmes, a insisté le représentant, ont besoin d’être entendues, ici au Conseil et chez elles. Nous appelons à des cadres de soutien et à des ressources améliorées, y compris à l’ONU, pour soutenir leur participation et leur sécurité. Le soutien aux femmes défenseuses des droits humains fait partie des activités prévues dans le plan d’action national de l’Estonie sur les femmes, la paix et la sécurité, s’est enorgueilli le représentant, avant d’appeler à davantage de volonté politique et de ressources pour mettre en œuvre le programme « femmes, paix et sécurité ».
Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) a salué le travail du Département des opérations de maintien de la paix pour créer un espace permettant aux femmes leaders d’influencer les processus de paix au niveau national. Illustrant son propos, elle a indiqué que l’influence des femmes, via la plateforme des femmes du Darfour, a été déterminante pour l’Accord de paix de Juba au Soudan. Citant aussi le rôle des femmes dans le succès des récentes élections en République centrafricaine, la représentante a demandé que les mandats de toutes les missions de l’ONU incluent des éléments opérationnels pour soutenir la participation égale et significative des femmes aux processus de paix et aux initiatives de développement. Elle a d’ailleurs salué l’engagement de la Haute-Représentante des Nations Unies pour le désarmement en faveur de la représentation égale des femmes et des hommes dans toutes les activités et son travail sur le suivi systématique des données relatives au genre et sur l’intégration de la perspective genre dans la prévention de la prolifération des armes légères et de petit calibre. La représentante a estimé qu’il manque encore un engagement en faveur d’une analyse comparative entre les hommes et les femmes à tous les niveaux des opérations.
Notant que seuls 36% des 98 États Membres dotés de plans d’action nationaux « femmes, paix et sécurité » ont les enveloppes budgétaires nécessaires à la mise en œuvre, la représentante a appelé à un soutien renforcé. Le défi fondamental auquel nous sommes confrontés pour faire avancer le programme « femmes, paix et sécurité » est le même que celui pour garantir l’équité et la justice entre les sexes dans le monde, a souligné Mme King, en s’enorgueillissant que sa Mission permanente auprès des Nations Unies soit composé de 85% de femmes et d’une équipe de direction entièrement féminine.
M. T. S. TIRUMURTI (Inde) a déclaré que la toute première femme à occuper le poste de Présidente de l’Assemblée générale a été Mme Vijaya Lakshmi Pandit, de l’Inde. Le rôle des femmes dans les organes décisionnaires, en particulier au sein des institutions multilatérales, est un problème mondial qui n’affecte pas seulement les pays en développement, a constaté le représentant. L’Inde est passée du développement des femmes au développement dirigé par des femmes, a résumé le délégué. Aujourd’hui, plus de 1,3 million de représentantes élues dirigent les politiques publiques au niveau local. Et nous avons ouvert des comptes bancaires en ligne pour 430 millions de personnes, dont plus de 55% de femmes. Pendant la pandémie de COVID-19, cette initiative a contribué au transfert direct à près de 200 millions de femmes, a informé M. Tirumurti.
Réitérant le soutien de sa délégation à l’approche de tolérance zéro du Secrétaire général à l’égard de l’exploitation et des abus sexuels, le représentant a rappelé que son pays a été le premier pays à contribuer au Fonds d’affectation spéciale pour les victimes d’exploitation et d’abus sexuels. Aujourd’hui, une équipe composée de femmes militaires indiennes est déployée en République démocratique du Congo. La Casque bleue indienne Suman Gawani a formé plus de 230 observateurs militaires des Nations Unies et assuré la présence de femmes observatrices militaires dans chacun des sites de l’équipe de la MONUSCO. M. Tirumurti a insisté sur l’importance pour l’ONU de se focaliser sur les questions liées au rôle des femmes dans le maintien et la consolidation de la paix, en particulier en Afghanistan. « Nous espérons que les droits des femmes seront respectés et que leurs voix seront dûment prises en compte dans la construction de l’avenir de l’Afghanistan », a prié le représentant.
M. GENNADY V. KUZMIN (Fédération de Russie) a rapporté la déclaration du Président Vladimir Poutine lors du troisième forum eurasiatique des femmes, qui s’est tenu ce mois-ci à Saint-Pétersbourg: « L’activité des femmes dans la recherche de réponses aux défis mondiaux et locaux, leur participation active dans toutes les sphères de la vie servent l’intérêt commun, contribuent à révéler le maximum du potentiel humain. Et aujourd’hui, c’est probablement le facteur clef du progrès, de l’avancée, des changements concrets pour le mieux dans le monde entier, à la fois dans les différents États et sur notre planète. »
Tout en notant que le rapport du Secrétaire général confirme les progrès importants réalisés dans de nombreux domaines du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, le représentant russe a néanmoins jugé extrêmement important d’éviter les doublons dans le travail des différents organes de l’ONU. Puisque l’Assemblée générale, le Conseil des droits de l’homme et la Commission de consolidation de la paix participent activement à la coopération visant à promouvoir le rôle des femmes, à protéger leurs droits et à assurer l’égalité des sexes, a expliqué M. Kuzmin, le Conseil de sécurité devrait se concentrer sur les situations qui menacent directement la paix et la sécurité internationales, conformément à ses prérogatives. Il s’est dit convaincu que l’adoption de mesures doit être motivée par une nécessité objective due à l’existence d’un conflit armé ou d’un règlement post-conflit.
La participation effective des femmes est essentielle pour relever les défis qui se présentent, a poursuivi le délégué. À cet égard, il a remercié le Secrétaire général pour l’attention personnelle qu’il porte à l’accroissement de la participation des femmes aux opérations de paix, aux négociations de paix et aux processus politiques. Dans le même temps, il a appelé à des mesures supplémentaires pour accroître le rôle des femmes dans le développement socioéconomique des États en situation de conflit armé ou au stade du règlement post-conflit. La pratique consistant à appliquer des mesures unilatérales coercitives et des sanctions économiques politisées, dont les victimes sont principalement des femmes, est totalement inacceptable, a-t-il asséné.
Selon lui, une attention particulière doit être accordée à la défense de la famille et de la maternité, aux valeurs familiales traditionnelles en tant que pilier de toute société et garantie d’un développement réussi aujourd’hui et demain. Ces problèmes, ainsi que d’autres, devraient être au centre des activités du Groupe informel d’experts du Conseil de sécurité chargé de la question des femmes et de la paix et de la sécurité, de la Commission de consolidation de la paix et d’autres organes des Nations Unies.
Pour Mme MONA JUUL (Norvège), il est temps de prendre au sérieux la participation des femmes. Alors que le rapport de cette année met en évidence la tendance à l’augmentation des dépenses militaires mondiales, elle a exigé que l’on investisse davantage dans la participation et la protection des femmes, non pas comme une fin en soi, mais comme une condition préalable à la paix et à la stabilité. Pour sa part, dans son prochain plan d’action national pour les femmes, la paix et la sécurité, la Norvège quadruplera l’objectif de financement dans ce domaine.
Mais, a souligné Mme Juul, remédier au manque de financement n’est pas suffisant. La Norvège est présente dans plus de 50 pays touchés par des conflits et des crises, a-t-elle rappelé, et elle soutient directement ou indirectement un certain nombre de processus de paix. Dans chaque cas, la Norvège est profondément attachée à la participation pleine et substantielle des femmes. Plaçant haut la barre, elle est consciente toutefois que, pour la passer il faudra compter sur une coopération étroite avec l'ONU, la société civile et les communautés locales. Alors que les conflits et les processus de paix sont sujets à des changements brusques, les femmes « artisanes de la paix » s’adaptent toujours - et la Norvège s’engage à adapter ses approches avec elles, a déclaré Mme Juul.
Dans ce contexte, la Norvège reste attachée à l'initiative « Action pour le maintien de la paix » du Secrétaire général, qui oriente l’objectif collectif d’accroître la participation des femmes aux opérations de paix. Cela permettra aux missions de mieux refléter la population qu’elles desservent et d’augmenter leur efficacité. Mais il ne s’agit pas seulement de chiffres, a souligné la représentante, il s’agit de veiller à ce que les femmes, à tous les niveaux, aient une influence directe et substantielle sur la mise en œuvre des décisions. D’ailleurs, la Norvège est également déterminée à veiller à la participation des femmes à tous les aspects de la protection des civils, estimant que c’est un facteur important pour être en mesure de s’attaquer aux causes profondes des conflits. En réponse aux nombreux appels en faveur d’un mécanisme de financement dédié aux femmes qui défendent des droits humains travaillant dans des situations de crise, de conflit et de post-conflit, la Norvège a annoncé qu’elle allait fournir un financement de démarrage pour ce nouveau mécanisme par le « Fonds pour la paix et l’action humanitaire des femmes ».
M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a déclaré que, comme d’autres, la France est d’avis que l’heure n’est plus aux paroles mais aux actes en ce qui concerne les objectifs collectivement fixés dans la résolution 1325 (2000). Ces actes passent par l’augmentation et le rehaussement de la participation pleine, entière et effective des femmes au maintien et à la consolidation de la paix. La participation accrue des femmes à la mise en œuvre de l’Accord de paix au Mali et la nomination d’une générale de gendarmerie française à la tête de la composante police de la MINUSMA sont des exemples de notre capacité à agir concrètement, a poursuivi le représentant, pour qui ce sont là des exemples que nous devons réitérer.
S’agissant de l’Afghanistan, vers où est portée toute l’attention, les restrictions des droits des femmes et des filles, tout comme l’absence de leur représentativité au niveau politique, sont inacceptables, a affirmé M. de Rivière. Pour la France, le Conseil de sécurité doit le réaffirmer sans ambiguïté et avec fermeté: nous n’accepterons pas que les droits des femmes et des filles soient bafoués et que ces acquis durement gagnés par les femmes et les filles soient effacés.
Le représentant a affirmé que la France agissait et promouvait une diplomatie féministe ambitieuse. La France a ainsi coorganisé le Forum Génération Égalité avec le Mexique et la société civile, sous l’égide d’ONU-Femmes, qui a permis la mobilisation de 40 milliards de dollars en faveur de l’égalité de genre et le lancement du « Compact Femmes, Paix et Sécurité et Action Humanitaire », a-t-il rappelé. La France a par ailleurs mis au point son troisième plan national d’action de mise en œuvre du programme « Femmes, Paix et Sécurité » couvrant la période 2021-2025. Elle soutient financièrement le développement de la formation des conseillers et points focaux militaires « genre » déployés dans les opérations de maintien de la paix, en collaboration avec l’Organisation internationale de la Francophonie. La France a en outre substantiellement augmenté sa contribution à ONU-Femmes, y compris afin de renforcer la participation de militaires féminins dans les opérations de maintien de la paix. La France contribue également à hauteur de 6 millions d’euros au Fonds Mukwege/Murad pour les rescapés de violences sexuelles, a ajouté le représentant.
Au nom du Groupe des Amis des femmes, de la paix et de la sécurité, Mme O’NEILL (Canada) a présenté ce Groupe comme un réseau informel de 65 États Membres qui représentent les cinq groupes régionaux des Nations Unies et de l’Union européenne. La représentante a réclamé des mesures d’urgence pour mettre en œuvre les engagements visant à protéger les droits fondamentaux des femmes et des filles dans toute leur portée ainsi qu’à concrétiser la participation pleine, égale et véritable des femmes à tous les processus décisionnels relatifs à la paix, à la politique et à la sécurité. Rappelant que cela fait 21 ans qu’a été adoptée la résolution 1325, elle a noté l’insuffisance des progrès alors que les faits montrent clairement que la participation des femmes à toutes les étapes du processus de prévention et de résolution des conflits contribue à une paix plus durable. En revanche, les processus qui n’incluent pas les femmes et leurs points de vue ont tendance à ne pas s’attaquer aux causes profondes du conflit et sont voués à l’échec.
Les femmes ne peuvent participer si elles ne sont pas en sécurité, a poursuivi la représentante, en insistant sur la prévention et la protection des femmes et des filles contre la violence, « des questions que nul ne peut ignorer ». Elle a exprimé sa solidarité « inébranlable » avec les femmes et les filles afghanes qui risquent de perdre les acquis pour lesquels elles se sont battues si durement pendant plus de 20 ans. Elle a demandé au Conseil de sécurité d’inclure systématiquement les femmes dans ses discussions, l’exhortant à intégrer pleinement les engagements relatifs aux femmes, à la paix et à la sécurité dans tous ses travaux et résultats, y compris en ce qui concerne les situations propres à chaque pays et les mandats des missions.
Elle a également encouragé les organisations régionales et sous-régionales à redoubler d’efforts pour mettre pleinement en œuvre le programme « Femmes, paix et sécurité » et a réclamé la levée des obstacles à une participation « significative » des femmes en uniforme dans les opérations de paix des Nations Unies, ainsi qu’une plus grande collaboration avec les femmes locales chargées de la consolidation de la paix. La représentante a exprimé sa grande préoccupation quant au fait que les femmes œuvrant à la consolidation de la paix, à la défense des droits de la personne et à la promotion de l’égalité des sexes, ainsi que les membres de leur famille, continuent de faire l’objet d’intimidation, de menaces et de violence en raison de leur travail essentiel.
Elle a exhorté tous les États à créer un environnement sûr et favorable pour tous ceux et celles qui travaillent à la protection et à la promotion des droits de la personne et de l’égalité des sexes. Elle a de nouveau insisté sur un financement plus élevé, prévisible, durable et adaptable pour les organisations et les réseaux de femmes locaux et communautaires, en tant que partenaires essentiels pour garantir la paix et la sécurité. Le manque de ressources et de fonds adéquats, a-t-elle martelé, est l’un des principaux obstacles à la mise en œuvre du programme « Femmes, paix et sécurité ». La crise en Afghanistan, a-t-elle tout de même ajouté, est un test de notre engagement à mettre en œuvre la résolution 1325. Au Canada, les femmes autochtones font toujours face à des difficultés pour se faire entendre, et les autorités nationales entendent mettre en place des mesures pour y remédier.
Mme STELLA RONNER GRUBAČIĆ, Ambassadrice pour les questions de genre et de diversité du service d’action extérieure de l’Union européenne, a réaffirmé le plein soutien de l’UE aux femmes et aux filles en Afghanistan, ainsi qu’aux efforts du Secrétaire général des Nations Unies, à cet égard. Elle a regretté que les femmes et les défenseuses des droits humains sont de plus en plus ciblées de manière disproportionnée par les Taliban. « Les femmes et les filles afghanes ont le droit de vivre dans la sûreté, la sécurité et la dignité tout en jouissant pleinement de leurs droits fondamentaux », a insisté l’Ambassadrice de l’Union européenne (UE) avant de saluer l’adoption par le Conseil des droits de l’homme d’une résolution d’inspiration européenne nommant un rapporteur spécial pour l’Afghanistan.
Elle a estimé que les missions de maintien de la paix doivent disposer des budgets nécessaires pour exécuter correctement leurs mandats en faveur des femmes, de la paix et de la sécurité. « Les organisations de la société civile, en particulier les organisations de défense des droits des femmes et dirigées par des femmes, doivent bénéficier d’un financement à long terme, durable et flexible », a-t-elle aussi insisté en estimant qu’il incombe aux États Membres d’adopter des plans d’action nationaux, et de les financer. À cet égard, l’Ambassadrice de l’Union européenne (UE) a dit l’importance d’une formation en matière de genre avant d’exhorter les missions de maintien de la paix à créer un environnement sûr et non hostile pour les femmes et les filles. « Cela comprend la prévention de la violence sexiste et des actes de misogynie, ainsi que de l’exploitation, des abus et du harcèlement sexuels », a-t-elle insisté, avant de souligner aussi la dimension essentielle de la protection des femmes, de la justice et des réparations. Face à l’impunité persistante des violences sexuelles liées aux conflits, elle a invité le Conseil de sécurité à ajouter la violence sexuelle comme critère des régimes de sanction. Elle a expliqué que l’UE met actuellement à jour sa politique et ses normes en matière de désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) afin de les aligner sur les normes de l’ONU et de promouvoir un engagement accru en faveur d’approches DDR tenant compte du genre et de l’âge.
Enfin, elle a réitéré l’engagement de l’UE à continuer de renforcer ses partenariats avec la société civile, les organisations de défense des droits des femmes et féministes, les défenseurs des droits humains, les artisans de la paix et les dirigeants locaux et religieux pour faire entendre leur voix et éclairer nos propres positions. À cet égard, la délégation a salué le lancement du Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire, lors du Forum Génération Égalité à Paris.
M. MITCH FIFIELD (Australie) a déclaré que la réalisation du programme « femmes, paix et sécurité » nécessite une action inclusive et soutenue à tous les niveaux. Il faut soutenir et travailler avec les femmes de la société civile, les défenseuses des droits de l’homme et les bâtisseuses de la paix, a précisé le représentant pour qui leurs voix et leur légitimité doivent être soutenues et défendues à tous les niveaux. Pour que la paix et la sécurité remplacent les crises et les conflits, nous avons besoin de plus de femmes dans les rôles d’analyse et de prise de décision, a encore dit M. Fifield. Il a encouragé les hommes à faire avancer ce programme.
Le représentant a informé qu’en avril, l’Australie avait lancé son deuxième plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité. C’est notre guide vers 2031, a annoncé le représentant qui a promis de protéger et de promouvoir les droits fondamentaux des femmes et des filles, de prévenir les conflits, ainsi que d’établir une paix durable. Il a indiqué que l’Australie se focalise également sur la réduction de la violence sexuelle et sexiste, et qu’elle soutient la résilience, la sécurité et des réponses justes aux crises et aux conflits. L’élimination des inégalités entre les sexes et de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et des filles est notre objectif commun dans tous les contextes, a rappelé M. Fifield.
Au nom Groupe des pays nordiques (Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède), Mme ANNA KARIN ENESTRÖM (Suède) a attiré l’attention sur le fait que les femmes et les représentantes de la société civile au niveau local doivent nourrir les efforts de paix et de sécurité. Au Mali, les expériences de la MINUSMA montrent d’ailleurs que les équipes équilibrées entre hommes et femmes ont nettement amélioré les échanges de la mission avec les femmes locales et permis des dialogues plus inclusifs. De telles pratiques doivent être davantage institutionnalisées et lier les initiatives locales aux négociations de paix formelles, a plaidé la déléguée.
Par ailleurs, le lien inextricable entre participation et protection doit être nettement renforcé, ont considéré les pays nordiques, appelant l’ONU et les États Membres à adopter des mécanismes de prévention et de lutte contre les représailles contre des actrices de la société civile.
Le programme pour les femmes et la paix et la sécurité joue un rôle essentiel pour renforcer la définition de la sécurité, mettant en évidence qu’une compréhension militaire de la sécurité n’aborde que l’un des nombreux facteurs composant la sécurité humaine. Aussi, le Groupe des pays nordiques a demandé d’investir dans le bien-être socioéconomique, les droits humains, l’égalité entre les sexes, ainsi que le désarmement, le développement, l’aide humanitaire et l’action climatique. Il a exhorté tous les acteurs, et en particulier le Conseil de sécurité, à adopter cette approche holistique.
Pour conclure, la délégation n’a pas caché sa frustration de constater que, 21 ans après l’adoption de la résolution 1325 (2000), on demande toujours aux femmes de justifier leur inclusion dans les efforts de paix et de sécurité.
M. PARK JANG-HO (République de Corée), a noté que, depuis son admission à l’ONU en 1991, la République de Corée, ainsi que d’autres États Membres de l’ONU, avait connu un progrès normatif significatif dans la manière dont les processus de prise de décision en matière de paix, de politique et de sécurité sont effectués. Cela comprend l’adoption de la résolution historique du Conseil de sécurité 1325 (2000) et de ses résolutions ultérieures et connexes. Cependant, il reste beaucoup à faire pour lutter contre le risque accru de violence sexuelle et d’inégalité entre les sexes dans le monde, a relevé le représentant, qui a pris comme exemple la situation des femmes afghanes, empêchées non seulement de négocier la paix mais aussi de participer à la vie publique. Dans d’autres parties du monde, notamment au Myanmar et au Bélarus, des femmes sont agressées, torturées ou détenues pour leur participation à des manifestations politiques.
Compte tenu de ces faits, les efforts et partenariats visant à assurer une participation pleine, égale et significative des femmes aux processus de paix sont d’autant plus importants, a souligné le représentant, qui a réaffirmé l’engagement de la République de Corée à participer aux efforts mondiaux pour mettre en œuvre l’agenda « Femmes, Paix et Sécurité ». Concrètement, a précisé M. Park, la République de Corée a été un ardent défenseur de l’approche centrée sur les survivants dans la réponse aux violences sexuelles liées aux conflits. Plus tard cette année, dans le cadre d’une campagne mondiale en cours « Action avec les femmes et la paix », elle accueillera la troisième Conférence internationale sur les violences sexuelles liées aux conflits, à Séoul, le 25 novembre, dans un format hybride. Le thème de cette conférence sera « le renforcement du rôle et du leadership des femmes dans la construction et le maintien de la paix grâce à une approche centrée sur les survivants ». Le souhait de la délégation est que la conférence fournisse une plateforme pour faire résonner les voix des femmes et des survivants des violences sexuelles liées aux conflits à travers le monde.
Mme LANA ZAKI NUSSEIBEH (Émirats arabes unis) a convenu avec le Secrétaire général et les autres délégations du rôle que peuvent jouer les femmes dans les opérations de paix de l’ONU, leur présence pouvant contribuer de manière significative à leur efficacité. De fait, il faut que ces missions intègrent leur expertise et pour y parvenir et la délégation a plaidé en faveur de procédures opérationnelles harmonisées pour tenir compte de leur apport. La participation des femmes dans les processus de paix doit en outre se préparer en amont et de manière cohérentes. En la matière, les États Membres aussi doivent jouer leur rôle, dans un contexte où seuls 8% des hauts responsables sont des femmes, a dit la représentante.
Mme MATHU JOYINI (Afrique du Sud) a déclaré que l’agenda « femmes, paix et sécurité » reste l’un des programmes de transformation, car le pays reconnaît le rôle crucial que les femmes jouent dans les processus de paix, la consolidation de la paix, la prévention des conflits, la médiation et la négociation. Selon elle, l’égalité des sexes doit être partie intégrante des processus et accords de paix. L’Afrique du Sud a dit soutenir l’amélioration de l’aspect « femmes, paix et sécurité » dans les opérations de maintien de la paix. Il serait par exemple louable d’augmenter la participation des femmes aux opérations de maintien de la paix. À travers son plan d’action national, l’Afrique du Sud intensifie le soutien au renforcement du rôle des femmes dans les processus de consolidation de la paix. Nous le faisons par le biais d’initiatives locales et régionales de consolidation de la paix, notamment des programmes de renforcement des capacités des femmes et des jeunes médiateurs, a révélé Mme Joyini.
M. NEVILLE GERTZE (Namibie) a fait savoir qu’un centre international des femmes pour la paix avait été ouvert à Windhoek, le 31 octobre 2020, manière de célébrer le vingtième anniversaire de la résolution 1325 (2000), que la Namibie a initiée. Ce centre, qui vise l’excellence, s’est donné pour objectif de mieux conceptualiser et opérationnaliser l’influence des femmes dans les processus de paix. Il a pour principales fonctions le plaidoyer pour le programme pour les femmes et la paix et la sécurité, le réseautage et les partenariats, ainsi que le renforcement des capacités et la formation.
Au niveau national, la Namibie a mis en place des quotas dans les politiques nationales, ce qui a permis aux femmes d’occuper 47% des sièges à l’Assemblée, a fait savoir le représentant. Le Gouvernement compte procéder de même dans le secteur de la sécurité. M. Gertze a plaidé pour des stratégies visant à promouvoir la participation des femmes dans la prise de décisions, y compris au niveau des systèmes électoraux et des partis politiques, afin de les mettre sur un pied d’égalité avec les hommes. Quant à leur participation aux processus de paix, non seulement elle devrait être élargie, mais aussi s’accompagner de formations à la médiation et d’un plaidoyer pour des mesures d’égalité entre les sexes comme éléments indispensables des politiques et pratiques en matière de sécurité.
M. CRISTIAN ESPINOSA CAÑIZARES (Équateur) a déploré que la violence domestique, la violence sexuelle liée aux conflits, la traite, le harcèlement et l’exploitation aient augmenté durant la pandémie. Selon lui, seule la participation des femmes dans les réponses aux crises favorisera la cohésion sociale, le développement et la prévention de la violence. Il a regretté que le pourcentage de médiatrices reste peu élevé, alors même qu’il a été prouvé que les accords de paix facilités ou négociés par des femmes durent plus longtemps. De même, la participation des femmes aux opérations de paix est faible, bien qu’elle ait légèrement augmenté au premier trimestre 2021, a noté le représentant. Face aux réussites bien plus modestes que les défis restant à relever, M. Espinosa a rappelé qu’il ne fallait plus perdre de temps et qu’il fallait investir dans ce domaine.
M. ALEXANDER MARSCHIK (Autriche) a regretté le sombre tableau de la situation des femmes et des filles dans les zones de conflit qui ressort du dernier rapport annuel du Secrétaire général. Il a d’ailleurs prié ce dernier d’apporter, dans son prochain rapport, des détails sur la situation des Afghanes. Il a rappelé, à cet égard, que l’Autriche a d’ores et déjà débloqué 20 millions d’euros pour l’aide à la population afghane, dont 5 millions spécifiquement gérés par ONU-Femmes. Mettant l’accent sur les dégâts causés par les engins explosifs, il a demandé au Conseil de sécurité une déclaration politique « forte » sur cette question.
Pour l’Autriche, le programme pour les « femmes et la paix et la sécurité » est à envisager dans un lien entre coopération au développement, maintien et consolidation de la paix et il doit s’appuyer sur la société civile et les médiatrices. Le représentant a ainsi salué le Réseau mondial des consolidatrices de la paix et a fait savoir que l’Autiche continuera d’appuyer ONU-Femmes et le Fonds « femmes, la paix et sécurité ». Il a également demandé que l’aspect « protection » soit inscrit dans tous les mandats des opérations de paix, ce qui exige une formation adéquate des Casques bleus avant et pendant le déploiement. Il faut, a conclu le représentant, promouvoir une participation plus significative des femmes à ces opérations, et ce, à tous les niveaux
M. LUIS ANTONIO LAM PADILLA (Guatemala) a qualifié « d’historique » l’adoption, en l’an 2000, de la résolution 1325 et des autres résolutions sur la participation des femmes dans les processus de paix qui l’on suivie. Il revient donc aux États de mettre en œuvre ces résolutions, a souligné le Guatemala, qui a estimé faire sa part, notamment en déployant 300 femmes au sein des opérations de paix de l’ONU. Elles sont présentes parmi les personnels civils mais aussi ceux en uniforme, a précisé la délégation, pour qui l’expérience montre que les femmes sont capables, autant que les hommes, d’intervenir et d’agir en toute situation, y compris les plus difficiles et complexes.
M. OSAMA MAHMOUD ABDELKHALEK MAHMOUD (Égypte) qui assure la Présidence de la Commission de consolidation de la paix, a rappelé l’importance du programme sur les « femmes et la paix et la sécurité » et a insisté sur un financement adéquat de sa mise en œuvre. Pour sa part, a-t-il affirmé, l’Égypte poursuit sa politique de formation des soldats de la paix, y compris ceux d’autres pays, tout en accordant du prix aux modules sur la protection des femmes et les abus et atteintes sexuelles. L’Égypte insiste sur le rôle des organisations régionales comme l’Union africaine et la Ligue des États arabes, dans la mise en œuvre du programme sur les « femmes et la paix et la sécurité », a ajouté le représentant.
M. ANDREJS PILDEGOVIČS (Lettonie) s’est particulièrement inquiété de la situation en Afghanistan, où femmes et filles risquent de perdre des droits durement acquis au cours des 20 dernières années. Il a dit qu’il était de la responsabilité collective de la communauté internationale et, en particulier, du Conseil de sécurité, d’empêcher ce scénario, dans lequel les femmes perdraient de manière irréversible l’égalité d’accès à l’éducation, à l’emploi et à la participation à la prise de décision. « Cela aggravera non seulement le statut des femmes et des filles, mais compromettra également les perspectives de stabilité à long terme et de développement futur de l’Afghanistan », a dit M. Pildegovičs. Dans ce contexte, le représentant de la Lettonie a appelé à intensifier les efforts visant à garantir le rôle des femmes dans le maintien et la consolidation de la paix dans toutes les situations de conflit et soutenir l’engagement démontré dans l’initiative Action pour le maintien de la paix (A4P+) pour rationaliser la perspective de genre dans tous les aspects du maintien de la paix. En outre, il a appelé à maintenir l’accent sur la responsabilité des soldats de la paix, notamment en ce qui concerne toutes les formes d’abus et d’exploitation sexuels.
Le représentant de la Lettonie a salué les efforts déployés au sein de la Commission de consolidation de la paix (CCP) pour renforcer le rôle des femmes dans la phase post-conflit. « L’adoption de la stratégie de genre de la CCP en 2016, ainsi que son plan d’action constituent une étape importante à cet égard », a-t-il estimé, avant de préciser que le Fonds pour la consolidation de la paix a alloué 40% de son investissement annuel à l’égalité entre les sexes et à l’autonomisation des femmes pour la troisième année consécutive. Rappelant que les efforts visant à inclure les femmes dans le maintien et la consolidation de la paix commencent au niveau national, la Lettonie a indiqué avoir mis en œuvre un plan d’action national « femmes, paix et sécurité » pour la période de 2020 à 2025. Elle a précisé que 15% du personnel militaire et 30% du personnel de la police sont des femmes en Lettonie.
M. GHALAM ISACSAI (Afghanistan) a déclaré que, durant les 20 années qui ont suivi l’adoption de la résolution 1325 (2000), les femmes en Afghanistan avaient pu faire d’importants progrès, confirmés par une série d’indicateurs, dont il a cité quelques exemples: un taux d’alphabétisation passé de 17% à 30%; le nombre des fillettes scolarisées en primaire, passé de « quelques milliers » à 2,5 millions en 2018; la proportion des femmes enseignantes, passée de 27% en 2007 à 36% en 2018; et la part des femmes au Parlement, passée de 4% en 1990 à 28% en 2017. Il a donc déploré que ce débat intervienne à un moment où s’ouvre un nouveau chapitre sombre pour les Afghanes, qui, a-t-il dit, sont sur le point de perdre les gains qu’elles avaient réalisés avec l’aide de la communauté internationale.
Le représentant a déclaré qu’avant « la prise illégale du pouvoir par les Taliban », son pays avait démontré son plein engagement à appliquer la résolution 1325 (2000), et ce, dès la Loya Jirga constitutionnelle de 2002, à laquelle avaient participé quelque 220 femmes sur 1 500 représentants, après quoi le pays avait été « l’un des premiers en Asie » à adopter un plan national d’action pour mettre en œuvre la résolution 1325 (2000). Il a notamment rappelé que les femmes avaient depuis lors joué un rôle dans le domaine judiciaire, été nommées pour la première fois à des ministères de souveraineté et que 5 000 femmes avaient servi dans la police et 3 000 dans l’armée nationale afghane. Il a également rappelé que le Gouvernement afghan avait inclus quatre femmes dans les pourparlers de paix avec les Taliban, alors que ceux-ci les avaient exclues de leur propre équipe de négociation.
L’Afghanistan risque de faire un retour en arrière dans le temps, a averti M. Isacsai, qui a présenté quatre recommandations pour contrer ce risque. Il a demandé que la communauté internationale reste unie et ferme pour préserver les progrès accomplis au profit des femmes. Il a appelé la communauté internationale à cibler les femmes vulnérables dans ses programmes humanitaires et à inclure des femmes dans leur mise en œuvre. Il a estimé que les femmes devaient participer au processus de réconciliation nationale: les Taliban ont gagné la guerre, mais ils doivent savoir qu’il leur reste à gagner la paix, a-t-il averti. Enfin, le représentant a estimé qu’il ne pourrait y avoir de retour à la paix sans un gouvernement réellement représentatif et inclusif qui donne toute leur place aux femmes en tant qu’actrices du processus de paix et de stabilisation du pays.
À défaut, non seulement nous mettrions 50% de la population à l’écart mais nous risquerions de faire descendre l’Afghanistan dans une nouvelle spirale de violence, a averti M. Isacsai, qui a demandé à la communauté internationale de se montrer financièrement généreuse dans son soutien inconditionnel aux femmes afghanes.
M. OMAR KADIRI (Maroc) a réitéré son plein soutien au programme « femmes, paix et sécurité », soulignant que son pays a fait de l’égalité des sexes une priorité de sa politique nationale. Plusieurs réformes ont été lancées pour ancrer ce principe et à en faire une réalité concrète et effective. La présence des femmes dans les opérations de paix est « stratégique », a estimé le délégué. Il a d’ailleurs rappelé que la première participation des soldates marocaines remonte à 1992. Aujourd’hui, les Marocaines sont déployées dans trois opérations de paix. Relevant que les femmes mettent davantage l’accent sur la réconciliation, le délégué a vu là une raison de leur donner un rôle plus important. Il a donc plaidé pour une meilleure formation des femmes Casques bleus et une meilleure préparation à leur déploiement. Il a aussi plaidé pour une diversification accrue des fonctions dans les opérations de l’ONU.
Mme LACHEZARA STOEVA (Bulgarie) a déclaré que son pays attache une grande importance au rôle des organisations de la société civile et reconnaît leur rôle crucial dans la mise en œuvre de l’agenda FPS. En 2020, la Bulgarie a adopté son premier plan d’action national sur les FPS (pour la période 2020-2025), qui inclut la contribution des organisations de la société civile à un processus de consultations ouvertes. Les femmes enrôlées en service actif et de réserve en Bulgarie ont créé l’« Association des femmes des forces armées bulgares » - une ONG destinée à promouvoir et à améliorer le statut social des femmes au sein des forces armées et à mettre en œuvre l’agenda FPS. La Bulgarie a dit attacher une grande importance à la participation pleine, égale et significative des femmes à tous les processus décisionnels en matière de paix, de politique et de sécurité, a poursuivi la représentante. Elle a condamné les représailles et les menaces contre les femmes défenseuses des droits humains, les femmes artisanes de la paix, les femmes leaders politiques et les militantes. Les femmes doivent jouer un rôle essentiel dans la paix et les transitions politiques, le règlement des conflits et les efforts de consolidation de la paix, a tranché Mme Stoeva, en exhortant l’ONU à assurer leur participation significative à tous les processus sous sa direction.
Pour sa part, la Bulgarie intègre la perspective de genre dans toutes ses structures politiques et militaires et le nombre de femmes dans ses forces armées est en constante augmentation, ainsi que leur participation aux missions et opérations internationales sous les drapeaux de l’ONU, de l’OTAN, de l’UE et de l’OSCE. En 2019, la part du personnel militaire féminin actif dans des opérations à l’étranger était de 11,1%, a précisé la représentante. Elle a également expliqué que dans les Forces armées bulgares, les stratégies et politiques de lutte contre le harcèlement sexuel sont soutenues par des programmes et des formations sur la prévention. Alors que le rapport de cette année fournit une fois de plus la preuve de l’efficacité du leadership des femmes aux plus hauts niveaux, la Bulgarie est profondément préoccupée par la détérioration de la situation en Afghanistan et les violations et limitations des droits des femmes. Elle s’est engagée à fournir 100 000 euros à l’Afghanistan par le biais de son aide publique au développement et encouragé la communauté internationale à investir dans le programme FPS.
Mme POLLY IOANNOU (Chypre) a déclaré que plus important que les quotas de participation, est la tâche d’assurer la contribution qualitative des femmes aux questions de fond examinées dans le cadre d’un processus de paix. Cet objectif peut être atteint par l’examen de propositions concrètes, soumises par des femmes, concernant le cadre constitutionnel, la législation dans un environnement post-conflit, y compris, mais sans s’y limiter, les questions de genre. L’ONU peut jouer un rôle déterminant à cet égard grâce à son implication dans de tels processus et à son interaction avec les acteurs locaux. De plus, les opérations de maintien de la paix peuvent contribuer à créer l’environnement sûr et nécessaire pour que les femmes participent au rétablissement et à la consolidation de la paix, un élément qui pourrait être explicitement inclus dans leurs mandats, a-t-elle dit.
La représentante a également déclaré que si l’égalité entre les sexes est inscrite dans les instruments de paix, ce n’est que le premier pas vers l’égalité de statut dans une société post-conflit. Avec la violence sexuelle toujours répandue comme arme de guerre, la responsabilité et les réparations pour de tels crimes sont nécessaires pour mettre une société sur une voie égalitaire. Une fois de plus, les opérations de l’ONU ont un rôle à jouer à cet égard. Elles peuvent et doivent rechercher des preuves permettant d’ouvrir des poursuites nationales ou internationales. Par ailleurs, s’attaquer à la culture du patriarcat qui continue d’affliger le secteur de la sécurité est une priorité, même s’il ne résoudra pas à lui seul les problèmes profondément enracinés dans le domaine des femmes et de paix et de sécurité, qui sont une autre manifestation d’inégalités plus larges, a conclu la représentante.
Mme PASCALE BAERISWYL (Suisse) a indiqué que son pays s’investit pour qu’il y ait plus de femmes à la table des négociations, la participation pleine, égale et significative des femmes aux processus politiques et de paix étant un des points clefs de la stratégie suisse de politique extérieure. Elle a expliqué que la Suisse soutient un processus de dialogue entre des femmes de différents partis politiques et celles actives dans les mouvements d’opposition. Elle a cité la création d’un réseau composé de femmes médiatrices et artisanes de paix en Suisse avant de se féliciter du nombre record de femmes de la société civile intervenues devant le Conseil de sécurité le mois dernier.
L’Afrique du Sud et la Suisse assureront en 2022 la coprésidence du Réseau de points focaux « Femmes, paix et sécurité » dans le souci de faire appliquer systématiquement les outils existants, comme les Plans d’action nationaux, a annoncé Mme Baeriswyl. Elle a ajouté que la Suisse renforcera, en priorité, ses activités en faveur de la participation des femmes, la coopération avec la société civile et la protection contre les violences sexuelles et basées sur le genre, avant de préciser que la Suisse est signataire du « Compact Femmes, Paix et Sécurité et Action Humanitaire ». Enfin, elle a dit que la Suisse investit dans le lien à faire entre la question « Femmes, paix et sécurité » et la numérisation. La Suisse a notamment soutenu une étude sur les défis et les opportunités de la numérisation pour les femmes artisanes de la paix, réalisée par le Global Network of Women Peacebuilders et ICT4Peace, basé à Genève. Elle a aussi annoncé avoir relancé, cette semaine, une application digitale avec la « Women’s International League for Peace and Freedom ».
Mme VANESSA FRAZIER (Malte) a plaidé pour que les femmes soient pleinement impliquées en tant que partenaires égaux dans la paix dès les premières étapes de tout processus politique. Il est encourageant, a-t-elle estimé, que des femmes aient été inclues en tant que déléguées dans tous les processus dirigés ou codirigés par les Nations Unies, soit 75% en 2020. En revanche, a dénoncé la représentante, ce n’était pas le cas pour les délégués des parties au conflit. Nous devons donc créer sur le terrain les conditions propices à la participation pleine, efficace et significative des femmes et des filles, et ce faisant, identifier et lever les obstacles aux droits des femmes et des filles et insister sur l’inclusion de dispositions relatives au genre dans les accords de paix, et ce, à un stade précoce.
Il faut veiller, a poursuivi la représentante, à ce que le programme « femmes, paix et sécurité » comprenne également la protection, la prévention, les secours et le rétablissement, car on ne peut parler de la participation des femmes et des filles, dans un contexte de violence contre les artisanes de la paix, les dirigeantes politiques, les militantes et les femmes défenseuses des droits humains. Elle a souhaité que les opérations de paix de l’ONU mettent en avant les bonnes politiques et aient les ressources nécessaires à la promotion de la dimension genre. Une formation régulière et des relations solides avec les organisations locales de femmes peuvent aider à renforcer l’appropriation nationale des principes pertinents. Le programme « femmes, paix et sécurité », a conclu la représentante, concerne également les filles mais aussi les garçons et les hommes. Il concerne les filles parce que si elles ne sont pas impliquées, elles n’auront pas les outils et les compétences nécessaires pour poursuivre le travail de leurs prédécesseurs, et il concerne les garçons et les hommes parce qu’ils doivent faire partie de la solution aux problèmes liés au patriarcat et aux inégalités et vulnérabilités qu’il entraîne.
Mme ALYA AHMED SAIF AL-THANI (Qatar) a assuré que le programme « femmes, paix et sécurité » fait partie des priorités de son pays qui est fermement convaincu de l’importance de garantir les droits des femmes et de faire progresser leur statut en tant que partenaire principal à diverses étapes du rétablissement, du maintien et de la consolidation de la paix. L’État du Qatar accorde, en outre, la priorité aux femmes et aux filles dans les situations de conflit, comme en atteste les programmes de soutien à l’éducation qu’il finance. Le Qatar soutient la Déclaration de Charlevoix sur l’éducation des filles dans les situations d’urgence et en 2022, il accueillera la Conférence mondiale de haut niveau sur la paix inclusive en faveur des jeunes, en coopération avec la Finlande, la Colombie, le Bureau de l’Envoyé du Secrétaire général pour la jeunesse et la Fondation « Education Above All ». Cette rencontre se concentrera, entre autres, sur la participation des jeunes femmes aux processus de paix.
La représentante a également assuré que, compte tenu de son rôle actif de médiateur pour l’organisation d’un dialogue sur la paix en Afghanistan, le Qatar a tenu à insister sur la participation des femmes. Il consacre une attention particulière à la préservation des acquis des dernières décennies, notamment ceux réalisés par les Afghanes, lesquelles sont vitales pour le développement de leur pays. Le Qatar a par exemple facilité la communication entre les fonctionnaires des Nations Unies et les autorités de Kaboul, ce qui a abouti à des garanties pour la fourniture de l’aide humanitaire. Il travaille également sur des mesures en faveur des équipements scolaires et de la scolarisation des filles. Il a également contribué à l’évacuation et à l’accueil de milliers de personnes au cours des dernières semaines, avec un accent particulier sur les femmes et les filles. L’État du Qatar se coordonne, en outre, activement avec des partenaires internationaux, notamment dans le cadre du Groupe des Amis des femmes de l’Afghanistan, pour s’efforcer de donner la parole aux femmes afghanes et de protéger leurs droits, a conclu la représentante.
M. AMRIT BAHADUR RAI (Népal) a fait observer que le Népal avait vécu l’expérience traumatisante de l’impact d’un conflit sur les femmes avant de rappeler que, dans les années suivant la signature de l’Accord de paix en 2006, le pays avait procédé à une transformation historique en veillant à ce que les femmes soient représentées en politique et dans la vie publique. Aujourd’hui, la Constitution leur garantit 33% des sièges aux parlements fédéral et provinciaux, une représentation de 40% dans les gouvernements locaux, ainsi qu’une alternance entre hommes et femmes aux postes les plus élevés tels que ceux de Président et Vice-Président, a détaillé le représentant.
En outre, le Népal a adopté en 2011 un plan d’action national pour mettre en œuvre les résolutions 1325 (2000) et 1820 (2008). Il a été le premier à le faire en Asie du Sud et le deuxième en Asie, s’est félicité M. Bahadur Rai. La hausse de la participation des femmes dans la prise de décision, la protection des femmes et des filles contre la violence sexuelle et sexiste et la fin de l’impunité figurent parmi les priorités de ce plan. Un Plan II a été préparé en consultation avec les acteurs pertinents, dont des victimes du conflit. Il se concentre sur les questions de justice pour les femmes et les filles touchées par le conflit, l’amélioration de leurs moyens de subsistance, et la sécurité des femmes et des enfants. Par ailleurs, le Népal a augmenté le nombre de femmes dans son contingent de soldats de la paix, lesquelles ont utilisé leurs compétences pour s’engager auprès des communautés locales et établir un lien de confiance pour protéger les femmes et les civils, a encore précisé le représentant.
M. ARIEL RODELAS PENARANDA (Philippines) a déclaré que les femmes avaient un rôle indispensable dans la prévention et la résolution des conflits, ainsi que dans la consolidation et le maintien de la paix. La résolution 1325 (2000) consacre ce rôle. D’ailleurs, depuis 1997, les femmes philippines ont joué un rôle très important dans la médiation et le processus de paix de Mindanao, que ce soit en tant que membres du groupe de négociation du Gouvernement, de son secrétariat ou du groupe de travail technique.
Les Philippines sont le premier pays d’Asie à avoir adopté un plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité, a rappelé le représentant. Ce plan est le fruit d’un engagement constructif entre le Gouvernement et la société civile, et il a maximisé les gains de décennies de travail d’intégration de la dimension de genre dans le pays. Le Plan actuel fournit un cadre pour la promotion des droits des femmes et de leur rôle de leadership dans la consolidation de la paix, le maintien de la paix et les négociations de paix. Les femmes philippines ont contribué à mettre un terme au conflit de plusieurs décennies entre le Gouvernement philippin et le Front de libération islamique Moro, a encore indiqué le représentant, en expliquant que le panel gouvernemental était dirigé par une femme, la première femme négociatrice en chef au monde à signer un accord de paix avec un groupe rebelle. En outre, la Police nationale des Philippines (PNP) est mandatée par la loi pour donner la priorité au recrutement et à la formation des femmes et elle réserve au moins 10% de son quota annuel de recrutement, de formation et d’éducation aux femmes. La PNP a aussi mis en place plus de 2 000 bureaux de protection des femmes et des enfants dans tout le pays, dirigés par des enquêteuses formées.
Sur le plan régional, les Philippines soutiennent le travail de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) en intégrant le programme pour les « femmes et la paix et la sécurité » dans ses travaux. Le registre des femmes et de la paix de l’ASEAN, qui regroupe des femmes leaders des pays membres de l’ASEAN ayant une expertise dans divers aspects des processus de paix, notamment en tant que négociatrices, médiatrices, facilitatrices, chercheuses et autres, est une bonne pratique qui peut être partagée avec d’autres organisations, a suggéré le représentant. En guise de conclusion, il a répété que les Philippines étaient favorables au déploiement croissant de femmes Casques bleus à tous les niveaux et à des postes de direction.
M. OLIVIER MAES (Luxembourg) a déclaré que beaucoup restait à faire, la situation actuelle en Afghanistan montrant la vulnérabilité des droits des femmes. Il a estimé du devoir de chacun de traduire nos engagements de longue date en actions. Pour le Luxembourg, les différentes situations à l’ordre du jour du Conseil de sécurité témoignent de l’impératif d’inclure les femmes à tous les niveaux des processus de paix et du maintien de la paix comme condition indispensable pour le règlement des conflits et l’instauration d’une paix durable. M. Maes a ainsi fait valoir que, selon l’étude mondiale sur l’application de la résolution 1325 (2000), la participation des femmes accroît de 35% la probabilité de parvenir à un accord de paix qui durera 15 ans.
Pour M. Maes, le programme « Femmes, paix et sécurité » doit être pleinement intégré dans tous les efforts, que ce soit dans le cadre des mandats du Conseil de sécurité, dans les négociations budgétaires, au sein des organisations régionales, à travers les politiques nationales et dans les initiatives locales. Comme le souligne le Secrétaire général dans son rapport, un soutien accru doit être dédié aux organisations locales promouvant les droits des femmes. Pour sa part, le Luxembourg continue de mettre en œuvre son plan d’action national « Femmes, paix et sécurité » pour la période 2018-2023, en concertation aussi avec les organisations de la société civile.
M. ISHIKANE KIMIHIRO (Japon) a dit soutenir l’appel du Secrétaire général en faveur d’un « changement radical dans la participation significative des femmes à nos efforts de rétablissement, de maintien et de consolidation de la paix ». Le Japon, a-t-il assuré, est disposé à partager les connaissances acquises grâce à son soutien aux activités de l’ONU et à d’autres. Le Gouvernement japonais a également soutenu les activités de l’Équipe d’experts des Nations Unies sur l’état de droit et la violence sexuelle en période de conflit en République démocratique du Congo, en République centrafricaine, en Somalie et en Iraq. Ces efforts visent à renforcer les institutions nationales et la réponse judiciaire pour lutter contre les violences sexuelles liées aux conflits et améliorer l’accès à la justice pour les victimes et les survivants. Le Japon estime que ces efforts créent un environnement propice pour que les femmes locales soient autonomisées sans crainte et retrouvent leur dignité, afin qu’elles puissent pleinement s’approprier la consolidation de la paix et la reconstruction de leur propre nation.
Dans le cadre de l’Initiative de partenariat « femmes, paix et sécurité » du G7, le Japon s’est associé à ONU-Femmes pour promouvoir la participation des femmes à la réconciliation nationale et à la consolidation de la paix à Sri Lanka. Le projet, a rappelé le représentant, comporte trois volets principaux: sensibiliser, soutenir la planification politique du Gouvernement sri-lankais et fournir des installations d’entrepreneuriat aux femmes. Ce projet a permis aux femmes et aux filles de participer directement au processus de consolidation de la paix, de relèvement et de reconstruction des communautés après 26 ans de conflit.
Le Japon soutient, en outre, par des moyens bilatéraux, les efforts des pays en développement pour améliorer la participation des femmes à la prévention et à la résolution des conflits, au maintien et à la consolidation de la paix. Bien que la nature des projets mentionnés diffère les uns des autres, la clef de leur succès est la même: assurer la participation effective du Gouvernement hôte et de sa population, a précisé M. Kimihiro.
M. PETER MOHAN MAITHRI PIERIS (Sri Lanka) a appelé à renforcer la participation des femmes au maintien de la paix, soulignant l’importance de tenir compte des pesanteurs culturelles. De même, s’il est vrai qu’il faut renforcer la participation des femmes à la résolution des conflits, il ne faut non plus oublier que cela doit dépendre de la nature du conflit en question. Le représentant a relevé que tous les conflits n’impliquent pas toujours les soldats formés, et que parfois on a affaire aux narcotrafiquants et à des seigneurs de guerre. De même, le délégué a mis en garde contre l’idée dominante qui fait croire que par leur nature « douce et pacificatrice », les femmes seraient toujours enclines à promouvoir la paix. Il a estimé que certaines sont à l’origine ou la base de conflits, et les impliquer dans leur résolution n’est pas forcément une bonne idée.
Mme MARÍA DEL CARMEN SQUEFF (Argentine) a souligné, à son tour, la nécessité de renforcer la participation des femmes dans tous les processus de prévention des conflits, de maintien et de consolidation de la paix. Elle a appelé à une meilleure coordination entre tous les acteurs de la promotion de la parité pour appliquer les recommandations des organismes compétents dans le programme « femmes, paix et sécurité ». Elle a aussi souligné l’importance des réseaux de médiatrices et expliqué que l’Argentine est en train de mettre en œuvre son deuxième Plan national d’application de la résolution 1325 du Conseil de sécurité. Nous voulons, a-t-elle précisé, augmenter le pourcentage de femmes dans nos effectifs dans les opérations de l’ONU et déjà 50% des formateurs au maintien de la paix sont des femmes. L’Argentine s’emploie aussi, a ajouté la représentante, à appuyer la mise en œuvre du programme « femmes, paix et sécurité » au niveau régional, comme en atteste ses efforts auprès du MERCOSUR.
M. BOŠTJAN MALOVRH (Slovénie) a indiqué qu’une participation égale et significative des femmes doit figurer au cœur de toutes les activités et processus décisionnels liés à la paix. Il a réaffirmé son plein soutien aux femmes et aux filles d’Afghanistan. Pour sa délégation, la participation libre et égale des femmes à la société afghane, le respect de leurs droits humains et leur accès aux services de santé, à l’emploi et à l’éducation sont essentiels. L’engagement de la Slovénie envers l’agenda « femmes, paix et sécurité » est reflété dans le programme national pour l’égalité des chances pour les femmes et les hommes pour la période 2021-2030 qui est en cours d’élaboration. Le document réaffirme que l’agenda est l’un des domaines prioritaires de la politique étrangère et d’égalité entre sexes de la Slovénie. Son gouvernement déploie régulièrement des femmes en tant que personnels en uniforme au sein d’opérations et de missions de paix, y compris à des postes de direction. Elles occupent actuellement plusieurs postes de direction dans les domaines fonctionnels des Forces armées slovènes et commandent les unités tactiques et les contingents à l’étranger. L’an dernier, 20% des policiers slovènes participant à des missions internationales de maintien de la paix étaient des femmes, a précisé le représentant.
Mme VALENTINE RUGWABIZA (Rwanda) a mis l’accent sur la situation et l’investissement des femmes locales dans les zones de conflit. En tant que l’un des plus grands contributeurs de troupes aux opérations de maintien de la paix, le Rwanda est très attaché à la compréhension du contexte local et à la protection des civils, a-t-elle précisé. Sur la base de sa propre expérience, le Rwanda est aussi attaché au rôle essentiel des femmes à toutes les étapes de consolidation de la paix et de la réintégration. En effet, après le génocide au Rwanda de 1994, le Gouvernement a opté pour une démarche sexospécifique, et transféré aux civils la responsabilité des programmes de DDR avec aux premières lignes des femmes qui ont facilité le processus de réintégration. Aujourd’hui, 50% des médiateurs rwandais sont des femme et 48% des magistrats. La représentante s’est dite d’avis que pour faire face aux difficultés des femmes dans le contexte du programme FPS, il faut forger des partenariats efficaces, en particulier avec la société civile. Elle a également plaidé pour une plus forte participation des femmes à toutes les étapes et à tous les niveaux dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU.
Pour M. KRZYSZTOF MARIA SZCZERSKI (Pologne), vu le nombre de défis sécuritaires que la communauté internationale doit résoudre à travers le monde, il n’est plus possible de se contenter de paroles, de mots ou de promesse pour le programme « paix, femmes et sécurité ». La Pologne, elle, a augmenté le nombre de femmes dans ses unités de police, ainsi que le nombre de femmes polonaises dans les opérations de paix des Nations Unies, a fait valoir le représentant. Par ailleurs, en tant que membre du Conseil des droits de l’homme et du Groupe des Amis des femmes de l’Afghanistan, la Pologne ne peut se résoudre à voir détruire 20 ans d’efforts consentis dans ce pays, a-t-il ajouté, appelant à une réaction appropriée de la part de la communauté internationale.
M. FRANCISCO DUARTE LOPES (Portugal) a souligné que le recours aux réseaux de femmes a joué un rôle déterminant dans l’instauration de la paix dans certaines régions. Le représentant a souligné que son pays est déjà activement engagé dans la promotion de la participation des femmes au rétablissement de la paix duquel elles sont d’ailleurs souvent absentes. Les Nations Unies doivent adopter une approche plus ambitieuse, a-t-il estimé, en attirant l’attention sur les réseaux locaux de femmes et de médiatrices que son pays privilégie. Le représentant a conclu en rappelant que le Portugal a mis en œuvre trois plans d’action successifs pour accroître la participation des femmes. Il s’est dit persuadé que l’ONU peut améliorer l’efficacité de ses activités de maintien de la paix, en y renforçant la participation des femmes, « de manière graduelle mais déterminée ».
M. JOSÉ ALFONSO BLANCO CONDE (République dominicaine) a regretté que les progrès soient toujours menacés par une réalité obstinée: les inégalités entre les sexes et l’exclusion des femmes. Convaincu qu’elles doivent jouer un rôle prépondérant dans les processus de paix, le délégué a invité à les placer au cœur même des décisions du Conseil. Les États doivent investir dans la participation des femmes à la vie publique, a-t-il martelé. Il a aussi déploré que la violence sexuelle liée aux conflits soit fréquente mais qu’elle reste invisible, car non signalée. Il a plaidé pour des ressources humaines et financières suffisantes pour les composantes de genre des opérations de maintien de la paix. Malgré les avancées, les difficultés restent énormes, a dit l’orateur, invitant la communauté internationale à joindre le geste à la parole pour véritablement mettre en œuvre le Programme « femmes, paix et sécurité ».
Mme MARITZA CHAN VALVERDE (Costa Rica) a déclaré qu’au cours des 21 dernières années, la communauté internationale s’était réunie chaque année devant le Conseil de sécurité pour commémorer l’adoption de la résolution 1325 (2000), une résolution qui n’a même pas encore tenu sa promesse. Cependant, ce n’est pas le manque d’intérêt ou de capacité qui retient les femmes de la pleine participation envisagée par cette résolution, mais la discrimination pure et simple, a-t-elle affirmé. Selon la représentante, la discrimination est au cœur de tous les problèmes auxquels sont confrontées les femmes, indépendamment de leur identité ou de leur statut. Elle opère dans toutes les sphères de la vie des femmes et n’est en aucun cas accidentelle, puisque la discrimination est en effet à la fois politique et systémique.
Aborder le problème de l’inclusion des femmes dans les processus politiques et de paix doit aller au-delà de la création d’un espace physique pour les femmes ou de s’assurer qu’il y a « suffisamment » de femmes dans la salle, a poursuivi la représentante. Il doit s’agir de démocratiser et de recadrer notre discours sur les femmes et les filles, et de transformer ces espaces afin qu’ils soient vraiment capables d’honorer nos différents rôles, expériences et contributions à la société.
En outre, Mme Chan a regretté que le fait que les résolutions adoptées sous l’égide du programme « Femmes, paix et sécurité » définissent le genre dans un sens binaire, ignorant la vulnérabilité des personnes trans et non conformes au genre, ainsi que celle des individus d’orientation sexuelle, d’identité de genre, d’expression de genre et de caractéristiques sexuelles diverses. Le cadre binaire est particulièrement préoccupant, car nous savons que les personnes LGBTI sont particulièrement exposées tout au long du cycle de conflit, a encore déclaré la représentante, pour qui il est essentiel d’intégrer une compréhension plus large du genre dans le programme.
Mme MYRIAM OEHRI (Liechtenstein) a déploré le fait que les femmes restent largement sous-représentées dans les opérations de maintien de la paix et celles relatives à la consolidation de la paix, où leur contribution est souvent négligée et sous-étudiée. De même, la relation entre le programme « Femmes, paix et sécurité » et le respect de l’aide humanitaire internationale est un domaine qui mérite des recherches plus approfondies, surtout compte tenu de l’érosion croissante du respect de cet ensemble de lois, ces derniers temps.
À cette fin, et à la lumière du vingtième anniversaire du Programme, le Liechtenstein a lancé un projet de recherche avec le « Georgetown Institute for women, peace and security » afin de mieux comprendre les effets de la présence des femmes dans les forces armées sur le respect du droit international humanitaire, a expliqué la représentante. L’étude récemment lancée montre comment l’évolution de la composition des hommes et des femmes dans l’armée affecte ses opérations et sa culture, ce qui peut également avoir un impact sur le respect du droit international humanitaire.
Enfin, évoquant des conflits qui ont cours dans divers pays, Mme Oehri a appelé ceux qui contrôlent effectivement l’Afghanistan à se conformer à leurs obligations, en vertu du droit international des droits de l’homme et des résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité. La paix ne peut pas être construite en imposant une société patriarcale aux femmes et aux filles, a-t-elle dit.
Pour M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie), la pleine participation des femmes est la clef du succès et de la longévité des processus de paix. Sa délégation continue d’appuyer les efforts visant à améliorer la performance du maintien de la paix en garantissant la participation pleine et entière des femmes aux opérations de maintien de la paix, a-t-il indiqué, en rappelant que la Malaisie vient de déployer 85 femmes soldats de la paix au Liban. En outre, elle a fait une mise à jour de ses programmes de formation pour que les Casques bleus malaisiens aient toutes les qualifications nécessaires et soient formés au problème des atteintes sexuelles. La Malaisie a dit appuyer ONU-Femmes pour promouvoir la participation des femmes et l’intégration de la sexospécificité aux processus de paix. Sur le plan régional, le représentant a fait savoir que l’ASEAN est en train de finaliser son plan d’action régional FPS.
M. ZAKIA IGHIL (Algérie) a assuré que l’expérience montre que les opérations de paix sont plus efficaces lorsque les femmes sont plus intégrées. C’est pour cette raison que l’Algérie a adopté son plan national de mise en œuvre de la résolution 1325, qui réfléchit, entre autres, aux meilleurs moyens d’intégrer les femmes dans les processus de paix. Au plan continental, l’Algérie a accueilli la première réunion des femmes médiatrices de paix, afin de réfléchir sur les moyens d’assurer le succès de leur travail et de formuler des recommandations à l’Union africaine. Du point de vue de l’Algérie, pour atteindre les objectifs visés, il faudrait prendre un certain nombre de mesures, notamment renforcer la présence des femmes dans les processus de paix, et fournir des formations adéquates aux médiatrices de paix. Il faudrait, en outre, les intégrer dans les activités de prévention et les mécanismes de suivi des cessez-le-feu. Il faudrait, par ailleurs, promouvoir l’inclusion des femmes dans les accords de paix, comme c’est le cas pour l’Accord d’Alger, également connu sous le nom d’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, a dit le représentant.
M. JAMAL FARES ALROWAIEI (Bahreïn) a dit soutenir tous les efforts véritables faits dans les circonstances difficiles actuelles et a annoncé des ambitions élevées en matière d’égalité des chances pour les femmes. Le Gouvernement du Bahreïn fait des efforts constants pour faire en sorte que les femmes prennent une part active au développement durable, a insisté le représentant, citant par exemple la mise en place d’un Conseil suprême pour les femmes, qui promeut le développement sur la base de la justice et de l’égalité et la participation des femmes dans tous les forums régionaux.