En cours au Siège de l'ONU

8877e séance
CS/14659

Conseil de sécurité: le succès des processus de paix dépend d’une bonne gestion de la diversité et de l’inclusivité

Le Conseil de sécurité a tenu aujourd’hui, sous la houlette du Président du Kenya, M. Uhuru Kenyata, un débat sur la consolidation de la paix, avec un accent sur « la diversité, l’édification de l’État et la recherche de la paix ».  Le Président rwandais, M. Paul Kagame, a en profité pour expliquer que le Rwanda post-génocide est marqué par une attention constante à l’unité nationale et à l’inclusivité.  Aucun processus de paix ne peut réussir sans une implication de toutes les composantes de la société, ont dit en écho les autres intervenants, dont la Vice-Présidente du Parlement afghan et l’ancien Président de l’Afrique du Sud et Président de la Fondation Thabo Mbeki.  

L’histoire récente a démontré que là où l’équilibre fait défaut, où les revendications identitaires et politiques ne sont pas satisfaites, des troubles internes naissent, sous la forme de rebellions, de guerres civiles, de coups d’état et même pire, de génocides.  De la Bosnie-Herzégovine au Rwanda, en passant par le Myanmar, l’on voit comment l’identité peut être « militarisée » pour marginaliser des populations déjà vulnérables, alimenter l’extrémisme, violer les droits de l’homme et déclencher les guerres, ont rappelé en guise d’illustration le Royaume-Uni et le Niger.  

La paix ne se trouve pas sur un morceau de papier.  Elle se trouve chez les gens et, plus précisément, dans une diversité de personnes d’horizons différents qui s’unissent pour tracer une voie commune, a souligné le Secrétaire général de l’ONU, M. António Guterres.  Sans l’implication d’un large éventail de voix à chaque étape des processus, la paix ne peut être que de courte durée.  Le Secrétaire général a cité l’étude conjointe ONU-Banque mondiale « Pathways for Peace » qui indique que de nombreux conflits sont profondément enracinés dans les inégalités persistantes.  Les pays qui sortent de plusieurs années d’instabilité ne peuvent se permettre d’ignorer l’opinion de pans entiers de la population au risque d’attiser les rancœurs.    

Comme les autres intervenants, le Secrétaire général a cité les femmes, les jeunes et les plus marginalisés.  Cette idée est au cœur de mon nouvel agenda pour la paix explicité dans « Notre Programme commun », a souligné M. Guterres.  La communauté internationale, a renchéri la Vice-Présidente du Parlement afghan, Mme Fawzia Koofi, doit « clairement » indiquer qu’elle ne collaborera pas avec les « autorités de Kaboul » tant qu’elles ne travailleront pas avec toutes les parties pour tracer une voie claire au respect des droits fondamentaux de tous les segments de la société.

Il faut investir dans la capacité des individus d’obtenir les résultats qu’ils attendent et méritent, a préconisé le Président rwandais, M. Paul Kagame, au nom d’un pays qui place l’unité nationale, l’inclusivité et la prestation des services, au centre de toutes ses politiques.  L’expérience du Rwanda nous a appris que, quelle que soit la gravité de la situation, le succès est toujours possible, a affirmé M. Kagame.  Entre-temps, l’expérience du Cameroun ou de l’Éthiopie illustre l’échec à gérer la diversité de la population, a fait observer l’ancien Président de l’Afrique du Sud et Président de la Fondation Thabo Mbeki (TMF).  

La vérité « incontestable » est que le succès dans la gestion de la diversité ne peut venir et ne viendra pas des armes.  À la fin de la guerre du Biafra en 1970, a rappelé l’ancien Président sud-africain, ceux qui ont remporté la mise ont déclaré qu’il n’y aurait « ni vainqueur ni vaincu », et c’est exactement ce qu’il faut en Éthiopie aujourd’hui.  Il a également conseillé au Conseil de sécurité d’accepter la primauté de la dimension politique pour assurer une paix durable et contribuer à l’édification des États, en relevant le défi de la gestion efficace de la diversité.  

Aux niveaux national et local, l’État doit protéger l’unité et la cohésion nationales, et respecter la différence, a prescrit le Président du Kenya, M. Uhuru Kenyatta.  Il a rappelé qu’alors que le Kenya était confronté, au début de l’année 2018, à une dangereuse division politique, la poignée de main qu’il a échangée avec le chef de l’opposition a rétabli la cohésion et l’unité du pays.  C’était plus qu’un geste politique: nous proposions d’insérer l’unité, la sécurité et la prospérité du Kenya au cœur de notre politique.  

Le Président a réclamé une analyse des institutions internationales pour voir si elles sont aptes à construire un monde plus inclusif et à gérer la diversité.  L’ONU et la Commission de consolidation de la paix doivent inclure la gestion de cette diversité comme composante de la stabilisation d’un État.  Le système des Nations Unies doit travailler en étroite collaboration avec les États et les organisations régionales, conformément à leurs exigences et besoins nationaux.  On ne saurait imposer des solutions de l’extérieur, a martelé le Ministre des affaires étrangères de l’Inde, M. Shri V. Muraleedharan.   

La gestion de la diversité est un défi encore plus évident en Afrique, où les frontières ont été arbitrairement tracées par les anciennes puissances coloniales, a souligné le Niger dans des propos repris par la Chine et la Fédération de Russie.  La viabilité et la stabilité politique de ces nouvelles entités ont été fonction de la capacité des gouvernants à tenir compte de sensibilités ethniques, raciales et tribales dans un système politique capable de procurer aux citoyens un sentiment d’appartenance et de participation dans la gouvernance politique et économique de leur nation.    

Aujourd’hui, a constaté le Niger, avec les effets de la pandémie de COVID-19 et l’utilisation abusive des nouvelles technologies de l’information, il est démontré que, même dans les pays à tradition démocratique bien établie, la problématique de la gestion de la diversité reste un sérieux problème avec la montée de la xénophobie, le racisme et la stigmatisation des minorités, notamment du fait de la propagation de fausses informations et des discours de haine à travers les médias sociaux.  

CONSOLIDATION ET PÉRENNISATION DE LA PAIX

Diversité, édification de l’État et recherche de la paix - S/2021/854

La paix ne se trouve pas sur un morceau de papier, a prévenu M. ANTÓNIO GUTERRES, Secrétaire général de l’ONU.  Elle se trouve chez les gens et, plus précisément, dans une diversité de personnes d’horizons différents qui se réunissent pour tracer une voie commune pour leur pays.  Sans l’implication d’un large éventail de voix à chaque étape des processus, la paix ne peut être que de courte durée.  Les anciens griefs, les inégalités, la méfiance et les divisions sociales ne disparaissent pas quand les combats cessent.  Ils peuvent facilement s’embraser de nouveau et s’aggraver si les personnes et les groupes avides de changement ne voient pas leurs besoins et leur vision de l’avenir pris en compte.  Nous voyons ce cycle se dérouler tout autour de nous, a fait observer le Secrétaire général. 

M. Guterres a relevé la tendance « indéniable » de la forte augmentation du nombre de groupes armés non étatiques au cœur des conflits, composés de rebelles, d’insurgés, de milices, de gangs criminels, de trafiquants armés et de groupes terroristes et extrémistes.  Beaucoup s’unissent autour d’identités communes ou de croyances partagées.  D’autres sont des opportunistes, poussés par le profit du crime ou la tentation du pouvoir.  Nous assistons également, a ajouté le Secrétaire général, à une augmentation des coups d’état militaires.  L’étude conjointe ONU-Banque mondiale « Pathways for Peace » indique que de nombreux conflits sont profondément enracinés dans les inégalités persistantes entre les groupes.  Les gens se sentent exclus et marginalisés et se voient refuser les mêmes opportunités et la même justice que leurs voisins, en raison de leur culture, de leur race, de leur couleur de peau, de leur origine ethnique ou de leurs revenus.  

Si les inégalités existent dans tous les pays, elles sont particulièrement endémiques dans ceux où les services sociaux de base comme la santé, l’éducation, la sécurité et la justice font défaut.  Ces inégalités existent aussi là où les cicatrices du colonialisme sont encore visibles, et quand elles sont combinées à des structures de gouvernance faibles, elles créent un vide facilement exploitable comblé par les voix de l’intolérance et de l’extrémisme qui peuvent conduire à des conflits violents.  Dans ce contexte, a préconisé le Secrétaire général, les pays qui cherchent à construire une paix durable doivent le faire en incluant et en impliquant tous les segments de la population.  Cette idée est au cœur des résolutions jumelles que l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité ont adoptées, en 2015 et en 2020, sur l’architecture de consolidation de la paix de l’ONU mais aussi au cœur de mon nouvel agenda pour la paix explicité dans « Notre Programme commun », a souligné le Secrétaire général.  

Les institutions et les lois nationales doivent fonctionner pour tout le monde et cela veut dire, protéger et promouvoir les droits de l’homme, y compris les droits à la santé, à l’éducation, à la protection et aux opportunités.  Cela signifie aussi mettre en œuvre des politiques et des lois qui protègent les groupes vulnérables ou encore travailler avec tous les partenaires pour développer des capacités nationales plus fortes.  Parallèlement, les pays devraient envisager de donner plus de place aux régions infranationales.  Ceux qui sortent de plusieurs années d’instabilité ne peuvent se permettre d’ignorer l’opinion de pans entiers de la population au risque d’attiser les rancœurs.  

Les femmes, les jeunes et les plus marginalisés doivent dûment être impliqués.  En tant que communauté mondiale, nous devons continuer à encourager et à soutenir la participation pleine et active des femmes et des jeunes dans ce voyage.  La diversité ne doit pas être considérée comme une menace.  C’est une source de force.  Un ancrage de paix et de stabilité, a conclu M. Guterres.   

La condition préalable à une paix durable est une compréhension commune des causes profondes d’un conflit par tous les segments de la société, a estimé M. PAUL KAGAME, Président du Rwanda.  Tirant les enseignements de l’expérience du Rwanda, il a souligné que la consolidation de la paix doit être comprise comme un processus continu et une recherche constante de solutions par le dialogue et le consensus.  S’il n’est toujours pas possible d’empêcher entièrement tous les conflits, leur intensité et leur impact peuvent néanmoins être atténués, grâce à des efforts pour satisfaire les besoins et les attentes des populations.  Cela signifie, s’est expliqué le Chef d’État, investir dans la capacité des institutions et des individus d’obtenir les résultats que les citoyens attendent et méritent.

Il n’est pas de modèle universel qui puisse être transféré automatiquement d’un contexte à un autre, a poursuivi M. Kagame.  Les conseils et les exemples de l’extérieur peuvent être utiles pour encourager la réflexion et trouver de nouvelles approches, et le Rwanda a bénéficié de ces partenariats.  Le Président a ensuite attiré l’attention sur la faculté croissante des médias sociaux d’exploiter les vecteurs de division qui peuvent rapidement effilocher le tissu social.  La consolidation de la paix n’est pas une entreprise purement technique, a averti le Président.  Elle est profondément politique et humaine et elle doit tenir compte de l’émotion et de la mémoire collectives que chaque partie met sur la table.

Les organisations multilatérales telles que l’ONU et l’Union africaine jouent un rôle central dans de nombreuses situations.  Les groupes de la société civile, en particulier ceux dirigés par des femmes, jouent également un rôle crucial tout comme les chefs d’entreprise.  Toutefois, a nuancé le Président, même si nous avons eu l’occasion de tirer les leçons des échecs et des succès des processus de consolidation de la paix, la boîte à outils de la communauté internationale n’a guère changé.  Le Rwanda post-génocide est marqué par une attention constante portée à l’unité nationale, à l’inclusion et à la prestation de services.  L’Afrique recèle d’autres exemples positifs, a dit M. Kagame insistant sur le caractère essentiel d’un partenariat pratique et tangible.  Il a terminé en disant que l’expérience du Rwanda nous a appris que, quelle que soit la gravité de la situation, le succès est toujours possible.

M. THABO MBEKI, ancien Président de l’Afrique du Sud et Président de la Fondation Thabo Mbeki (TMF), a attiré l’attention sur l’étude qu’a publiée, il y cinq ans, « World Peace Foundation produced », intitulée « La politique africaine, la paix africaine ».  L’étude dit que placer au centre des réponses de l’Union africaine « la primauté de la dimension politique » est essentiel.  Elle insiste sur cette primauté dans l’élaboration et la mise en œuvre des opérations de paix.  L’étude dit aussi que l’action préventive est la seule tâche essentielle des missions de paix de l’Union africaine et qu’elle exige un accès « exceptionnel » au plus haut niveau du processus de prise de décisions, ainsi que de la crédibilité et de la discrétion.  L’accent mis sur la primauté de la dimension politique, a expliqué M. Mbeki, veut dire que le règlement des conflits ne doit pas seulement être motivé par les considérations sécuritaires.  Cet accent veut dire que le règlement d’un conflit doit comprendre des solutions à leurs causes sous-jacentes, à savoir ne pas se contenter de faire taire les armes mais assurer véritablement une paix durable.

L’ancien Président sud-africain a invoqué sa propre expérience de médiateur pour affirmer que l’échec à gérer la diversité est l’une des causes sous-jacentes des conflits et de la violence.  Citant les cas de la République démocratique du Congo, du Burundi, de la Côte d’Ivoire ou encore du Soudan, M. Mbeki a attiré l’attention sur le Rapport qu’a publié en 2004 la Commission Vérité et Réconciliation de la Sierre Leone qui dit sans ambages que c’est l’échec à gérer la diversité qui a plongé le pays dans une guerre meurtrière de 11 ans.  Aujourd’hui, a dit M. Mbeki, nous voyons les conséquences de cet échec au Cameroun et en Éthiopie.  La vérité « incontestable » est que le succès dans la gestion de la diversité ne peut venir et ne viendra pas des armes. 

En Éthiopie, a préconisé l’ancien Président, les parties prenantes doivent s’engager en faveur d’un cessez-le-feu permanent, se lancer dans un dialogue inclusif et se mettre d’accord sur ce qu’il faut faire pour parvenir à l’objectif noble et important de « l’unité dans la diversité ».  À la fin de la guerre du Biafra en 1970, ceux qui ont remporté la mise ont déclaré qu’il n’y aurait « ni vainqueur ni vaincu » et c’est exactement ce qu’il faut en Éthiopie aujourd’hui, a insisté M. Mbeki.  Il a également conseillé au Conseil de sécurité d’accepter la primauté de la dimension politique pour assurer une paix durable et contribuer à l’édification des États, en relevant le défi de la gestion efficace de la diversité.

Mme FAWZIA KOOFI, Vice-Présidente du Parlement d’Afghanistan, a déclaré que l’avenir de l’Afghanistan est « le dernier test » de notre capacité à nous rassembler pour défendre les principes de la Charte des Nations Unies face à l’adversité.  À l’heure où nous parlons, a-t-elle dit, les femmes et les hommes qui ont consacré leur vie à la réalisation de la paix et à la promotion de l’état de droit, de la justice et de l’égalité, des personnes qui ont sacrifié leur vie pour protéger et servir les autres vivent sous une grave oppression imposée par « le pouvoir d’exclusion et de tyrannie ».  Ce qui se passe en Afghanistan devrait nous préoccuper tous et nous devons nous unir pour tenir les Taliban responsables de ce qui se passe aujourd’hui.  

Mme Koofi a estimé que la situation afghane montre à quel point les déséquilibres du pouvoir sont à l’origine de tant de conflits et d’inégalités.  Les règles du jeu ont été écrites « principalement » pour l’intérêt des hommes et leur permettre de garder plus facilement le pouvoir.  Or, pour construire des sociétés pacifiques, prospères et inclusives, l’égalité des sexes doit être « un objectif en soi » et « la clef » pour atteindre les 16 autres objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Nos processus politiques, nos structures et nos méthodes de travail doivent être plus réactifs aux besoins des femmes. 

L’autre domaine où les déséquilibres du pouvoir peuvent faire beaucoup de mal, c’est la mise à l’écart des minorités.  Trop souvent, s’est expliquée la parlementaire, les minorités sont confrontées à de multiples formes de discrimination, entraînant la marginalisation et l’exclusion, au risque de menacer la société tout entière.  La communauté internationale doit « clairement » indiquer qu’elle ne collaborera pas avec les « autorités de Kaboul » tant qu’elles ne travailleront pas avec toutes les parties pour tracer une voie claire au respect des droits fondamentaux de tous les segments de la société, en particulier les femmes et les filles, et tant qu’elles n’assureront pas un retour rapide à l’ordre constitutionnel par le biais d’élections auxquelles chacun doit pouvoir participer.  N’oublions pas qu’un Afghanistan sûr, stable et juste, c’est un monde sûr, a-t-elle résumé. 

La mauvaise gestion de la diversité entraîne de graves menaces pour la paix et la sécurité internationales, a d’emblée alerté M. UHURU KENYATTA, Président du Kenya.  Les inégalités dans les États et entre eux sont trop souvent le résultat de l’exclusion sur la base de l’identité, une exclusion souvent institutionnalisée dans la gouvernance et les relations économiques nationales et internationales.  Il en résulte un profond sentiment d’injustice et de rancœur exploitable par les populistes et les démagogues lorsqu’il est véhiculé par les médias sociaux.  Le Président y a vu la cause du déficit de confiance dans les institutions et de l’affaiblissement de la légitimité de l’État.  

Les images d’hommes et de femmes désespérés sur des radeaux à la recherche d’opportunités économiques mettent en lumière le caractère inadéquat du système politique et économique international.  Ce système n’est plus adapté à la réalisation des objectifs de développement durable (ODD), a averti le Président, dénonçant les modèles préconisés par les institutions internationales qui ne tiennent pas compte de la diversité, des besoins et des différences entre les situations.  Le nationalisme vaccinal, les interdictions de voyager et les listes rouges attisent davantage les divisions entre les États riches et les États pauvres, montrant l’incapacité à faire face à un monde diversifié.  Ce sont aussi des facteurs majeurs dans la plupart des situations de conflit dont le Conseil de sécurité est saisi, a souligné le Président.

« Nous devons nous en occuper », a lancé M. Kenyatta.  Aux niveaux national et local, a-t-il préconisé, l’État doit protéger l’unité et la cohésion nationales, et respecter la différence.  Le Président a rappelé qu’alors que le Kenya était confronté, au début de l’année 2018, à une dangereuse division politique, la poignée de main qu’il a échangée avec le chef de l’opposition a rétabli la cohésion et l’unité du pays.  C’était plus qu’un geste politique: nous proposions d’insérer l’unité, la sécurité et la prospérité du Kenya au cœur de notre politique. 

Parmi ses recommandations, le Président a réclamé une analyse des institutions internationales pour voir si elles sont aptes à construire un monde plus inclusif et à gérer la diversité, en particulier durant cette crise de COVID-19.  Il a aussi dit attendre beaucoup de la COP26 à Glasgow, le mois prochain, qui doit offrir, avec des mesures fortes sur l’adaptation, une voie claire et viable pour une industrialisation verte de l’Afrique et des pays du Sud.  Pour le Président, l’ONU, les organisations régionales et les donateurs devraient se concentrer sur le renforcement des capacités nationales et arrêter de mettre « exclusivement » l’accent sur la bonne gouvernance comme norme universelle.  L’ONU et la Commission de consolidation de la paix doivent inclure la gestion de la diversité comme composante de la stabilisation d’un État.  Le Président a conclu en prônant une approche commune entre les États, le système des Nations Unies et les médias sociaux pour lutter contre le discours de haine.  Il a dit espérer un code de conduite mondial pour détecter les incitations à l’affrontement et faciliter les mesures préventives. 

Mme LINDA THOMAS-GREENFIELD (États-Unis) a dit qu’il n’y a pas de société, pas de région, pas de pays qui ne soit confronté à du racisme.  Nous ne prétendons pas être parfaits et quand la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme a publié un rapport, en juillet 2021, sur le racisme et la brutalité policière contre les personnes d’ascendance africaine, nous avons, a dit la représentante, non seulement reconnu les faits mais nous avons invité les deux rapporteurs spéciaux sur les formes contemporaines de racisme et les droits des minorités.  Lutter contre la brutalité et faire progresser l’équité raciale est une priorité essentielle de l’Administration Biden-Harris, a insisté Mme Thomas-Greenfield. 

Elle a donc exhorté tous les États Membres à faire progresser la diversité et l’inclusion, à être totalement transparents devant ces « formidables » défis et à travailler sans relâche pour mettre fin au racisme, au sexisme, à la discrimination religieuse et à la xénophobie.  Nous devons mettre en place de plus grandes protections pour toutes les minorités raciales, ethniques et religieuses, les personnes handicapées, les personnes LGBTQI+, ainsi que les peuples autochtones, a insisté la représentante.  Elle a souligné la valeur ajoutée des organisations régionales et sous-régionales dans la prévention, le maintien, le rétablissement et la consolidation de la paix ainsi que dans la lutte contre le terrorisme. 

Nous devons, a poursuivi la représentante, tous travailler ensemble pour promouvoir les droits de l’homme, la démocratie et l’état de droit et nous devons le faire en particulier ici, au Conseil de sécurité.  Elle a noté que la Commission de consolidation de la paix a un rôle rassembleur important à jouer dans ce travail, pour mobiliser l’attention et l’engagement en faveur des efforts internationaux de consolidation de la paix.  Des partenariats locaux et une coopération internationale solides sont des éléments essentiels pour favoriser la stabilité et la résilience, en particulier dans les États fragiles.  La représentante a mis l’accent sur le rôle vital du programme pour les femmes et la paix et la sécurité, en ajoutant que comme les femmes rendent le monde plus pacifique, elles devraient, à ce titre, être habilitées à participer de manière significative aux efforts de paix.  

Sans les femmes, nous ne réaliserons pas les progrès que nous recherchons, a prévenu Mme Thomas-Greenfield avant de s’inquiéter, à son tour, des médias sociaux et de leur capacité d’amplifier les forces négatives, dont les phénomènes de haine.  En travaillant ensemble, nous pouvons vaincre ces forces de la division.  Embrasser la diversité et célébrer son identité et celle des autres, c’est le meilleur moyen de propager la paix et la sécurité dans le monde, a affirmé la représentante. 

M. SHRI V. MURALEEDHARAN, Ministre d’État, en charge des affaires étrangères et des relations avec le Parlement de l’Inde, a déclaré que son pays, qui suit les leçons du père de la Nation, Mahatma Ghandi, a beaucoup à offrir sur la façon dont la diversité des identités, qu’elles soient ethniques, régionales, religieuses, linguistiques ou autres, peuvent se réunir et vivre comme une seule nation.  L’Inde sait aussi que plusieurs pays ont réussi à surmonter les défis postconflit, notamment l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire, le Libéria, la Sierra Leone, le Rwanda et le Burundi, qui ont chacun été des exemples de transition réussie, et le Soudan du Sud qui se lance aujourd’hui dans une transition.  

Ces sociétés sont diverses et elles ont réussi à maintenir la paix grâce à une approche inclusive.  Le défi sera toujours de trouver un compromis entre le court et le long terme.  Le système des Nations Unies doit donc travailler en étroite collaboration avec les États et les organisations régionales, conformément à leurs exigences et besoins nationaux.  On ne saurait imposer des solutions de l’extérieur, a martelé le Ministre.

Il a également souligné que le terrorisme est « une manifestation claire » de la manière dont les forces hostiles à l’unité et à la diversité peuvent chercher à détruire la cohésion sociale et le tissu démocratique, en fomentant, entre autres, la désaffection, la haine et la violence.  La propagation croissante du terrorisme en Afrique devient de ce fait « un grave sujet de préoccupation », d’autant plus « plus regrettable », que ces forces et groupes terroristes reçoivent les encouragements des États Membres qui cherchent à diviser les communautés en légitimant les activités terroristes.  Il devient alors important que les organisations des Nations Unies prennent appui sur la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies et ne donnent aucun encouragement ou excuse, même indirectement, aux efforts des États Membres pour justifier le terrorisme de quelque manière que ce soit, a tranché le Ministre.  

En ce qui concerne les identités religieuses, l’Inde, a-t-il affirmé, constate une nouvelle forme de phobie religieuse.  Alors que l’antisémitisme, l’islamophobie et la christianophobie sont condamnés, l’on ne reconnaît toujours pas qu’il existe des formes « plus virulentes » de phobies religieuses qui émergent et prennent racine, notamment les phobies anti-hindoues, anti-bouddhistes et anti-sikhs.  L’on voit la destruction de temples, la glorification de la destruction d’idoles dans les temples, la violation des locaux des gurudwaras, le massacre de pèlerins sikhs dans les gurudwaras, la destruction des bouddhas de Bamyan et d’autres sites religieux emblématiques.  Or l’incapacité de la communauté internationale à reconnaître ces « atrocités » ne fait qu’encourager les « forces » qui les commettent à penser que leurs actes contre certaines religions sont plus acceptables que celles contre d’autres.  Si nous choisissons d’être sélectifs dans la critique de ces phobies ou de les ignorer, nous le faisons à nos risques et périls, a prévenu le Ministre. 

Qu’il s’agisse aujourd’hui de l’Afghanistan, de la Bosnie-Herzégovine, du Mali ou de la République arabe syrienne, la gestion de la diversité reste un défi pour la stabilité et la viabilité de l’État moderne, a observé à son tour, M. ABDOU ABARRY (Niger).  Cette assertion, a-t-il estimé, est aujourd’hui encore plus évidente en Afrique, où les frontières ont été arbitrairement tracées par les anciennes puissances coloniales.  La viabilité et la stabilité politique de ces nouvelles entités ont été fonction de la capacité des gouvernants à tenir compte de sensibilités ethniques, raciales et tribales dans un système politique capable de procurer aux citoyens un sentiment d’appartenance et de participation dans la gouvernance politique et économique de leur nation.

L’histoire politique récente du continent montre que là où cet équilibre a fait défaut, la non-satisfaction des revendications identitaires, politiques et de participation économique et politique légitimes a conduit à des troubles internes, qui ont pris la forme de rebellions, de guerres civiles, de coups d’état et même pire, des génocides.  Aujourd’hui, avec les effets de la pandémie de COVID-19 et l’utilisation abusive des nouvelles technologies de l’information, il est démontré que même dans les pays à tradition démocratique bien établie, la problématique de la gestion de la diversité reste un sérieux problème avec la montée de la xénophobie, le racisme et la stigmatisation des minorités, notamment du fait de la propagation de fausses informations et des discours de haine à travers les médias sociaux.

Pour faire face à ces défis de gestion de leurs diversités, les États, a conseillé le représentant, doivent résolument s’engager à asseoir un système de gouvernance politique et économique inclusif qui garantisse la participation de toutes les composantes nationales dans la gestion de la chose publique à travers un cadre démocratique.  Tirant les leçons de son passé politique et sécuritaire, le Niger, a affirmé le représentant, s’est résolument engagé à asseoir et consolider ses institutions démocratiques pour donner la chance à tous ses filles et fils de participer à la vie politique et économique.  Il a rappelé la première alternance politique pacifique qui a vu, cette année, la passation de pouvoir entre un président élu et son successeur, lui-même démocratiquement élu.  Le pays a aussi mis en place la Haute autorité de la consolidation de la paix afin d’assurer le suivi et le traitement des causes profondes de conflit de manière durable.  Cette instance, qui se veut un instrument de dialogue entre les communautés nationales et de promotion de l’inclusion et de la participation des communautés à la vie politique et économique, a renforcé la cohésion et l’unité nationales.  Le représentant a conclu en soulignant le rôle des organisations régionales et en arguant que l’implication de la communauté internationale, incarnée par les Nations Unies, dans les conflits internes ne doit intervenir qu’en dernier ressort.  

Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a déclaré que l’histoire a démontré, de la Bosnie au Rwanda, comment l’identité peut être « militarisée » pour marginaliser des populations déjà vulnérables, alimenter l’extrémisme, violer les droits de l’homme et déclencher les guerres.  Au Myanmar, l’exclusion des Rohingya s’est transformée en violences systématiques et en déplacements forcés.  La représentante a fustigé les politiques identitaires et les discours de haine qui divisent les communautés en Éthiopie et exacerbent un conflit qui plonge 400 000 personnes dans la famine.  Elle a exhorté le Conseil de sécurité à ne pas rester « les bras croisés » alors que la violence s’intensifie.   

Mme Woodward a salué l’importance des opérations de paix des Nations Unies, dont la fonction de surveillance des droits de l’homme est critique pour l’alerte précoce.  Elle a rendu hommage aux dirigeants politiques, médiateurs et conseillers des Nations Unies qui facilitent les processus de paix inclusifs.  Elle a noté la pertinence de la Commission et du Fonds de consolidation de la paix.  Elle a tout de même reconnu que le système des Nations Unies peut faire un meilleur travail dans l’anticipation des menaces à la paix.  Elle a conseillé aux entités onusiennes qui s’occupent du développement d’intégrer les approches de consolidation de la paix maintenant, pour éviter les crises humanitaires plus tard.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a estimé que c’est « d’abord » par la parole politique au plus haut niveau que se construit la paix.  Pour preuve, l’ancien Président sud-africain et l’actuel Président du Rwanda ont tous deux su, dans leurs pays, trouver les mots justes et prendre les actions nécessaires pour réconcilier et reconstruire, a-t-il relevé.  Pour la France, la lutte contre toutes les formes de discrimination doit s’inscrire dans une approche universelle et indivisible, c’est-à-dire fondée sur l’égalité de tous les individus, sans distinction.  De la même manière, le règlement des conflits « ne peut » passer que par des processus politiques inclusifs, tandis que l’éducation et l’inclusion de toutes les composantes de la société doivent être au cœur de ces efforts pour permettre une réconciliation durable. 

La France estime par ailleurs, a poursuivi le représentant, que la consolidation de la paix doit préserver la diversité.  C’est « d’abord et avant tout », la responsabilité de chaque État.  C’est le sens de la démarche menée par la France pour une compréhension historique partagée du génocide des Tutsis.  C’est aussi le sens de son engagement à ce qu’aucune personne soupçonnée de crimes de génocide ne puisse échapper à la justice, notamment pour les crimes commis en Iraq.  La France soutient le Fonds de consolidation de la paix qui doit continuer à appuyer la redevabilité et la lutte contre l’impunité, comme il le fait déjà en République démocratique du Congo à travers son programme Paix, Justice, Réconciliation et Reconstruction au Kasaï Central.  La France, a conclu le représentant, a multiplié par quatre ses contributions en 2021 pour atteindre 4,6 millions de dollars et continuera de tout mettre en œuvre pour faire de la diversité un facteur de paix. 

S’appuyant sur une étude conjointe des Nations Unies et de la Banque mondiale, M. JUAN RAMÓN DE LA FUENTE RAMÍREZ (Mexique) a relevé que les conflits violents ont atteint les niveaux les plus élevés au cours de ces 30 dernières années et qu’il est prévu que, d’ici à 2030, les deux tiers des personnes vivant dans l’extrême pauvreté habiteront dans des situations de fragilité, de conflit et de violence.  L’exclusion, les inégalités, la discrimination systémique, la désinformation et l’incitation à la haine alimentent les cycles de violence, a noté le représentant, avant de rappeler les tensions religieuses ou ethniques qui ont été à l’origine de génocides au Rwanda et à Srebrenica. 

D’autres facteurs, tels que la pandémie de COVID-19, les changements climatiques, l’insécurité alimentaire, les transformations technologiques incontrôlées qui aggravent l’exclusion, l’extrémisme et le commerce « irresponsable des armes », ainsi que l’extrême pauvreté, exacerbent les conditions propices à la violence et aux conflits.  Les minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques, et autres personnes en situation de vulnérabilité, sont souvent les plus touchées par l’exclusion et les conflits.  Il faut donc, a dit le représentant, créer une culture de la coexistence qui valorise la diversité et dans laquelle chacun se sente intégré. 

Soulignant l’importance d’une approche préventive, le représentant a estimé que le respect des droits de l’homme, de l’égalité des sexes, de l’état de droit et de l’inclusion sont des piliers essentiels de la diversité.  Il a appelé au renforcement des mécanismes d’alerte précoce pour identifier les risques et les facteurs de risque.  Il a aussi souligné l’importance d’une participation pleine et effective des femmes, des jeunes et de la société civile au travail de prévention.  Enfin, le représentant a exhorté le Conseil de sécurité à renforcer le dialogue avec d’autres organes principaux tels que l’Assemblée générale, le Conseil économique et social (ECOSOC), le Conseil des droits de l’homme et la Commission de consolidation de la paix pour éviter que les problèmes de développement et les violations des droits de l’homme ne se traduisent en conflit.  La paix durable ne peut être atteinte qu’en mettant la prévention des conflits, le développement durable et le respect des droits humains au centre de l’action des Nations Unies et des politiques nationales. 

S’attaquer aux causes des conflits, c’est lutter contre la pauvreté, le chômage et la marginalisation socioéconomique et politique, c’est éradiquer la faim et l’insécurité alimentaire aiguë, et c’est lutter contre les changements climatiques et la dégradation de l’environnement, a énuméré Mme HALIMAH AMIRAH FARIDAH DESHONG (Saint-Vincent-et-les Grenadines).  Elle a attiré l’attention sur l’héritage durable du sous-développement et des traumatismes nés des violations des droits de l’homme, y compris les crimes historiques, l’esclavage, le génocide et la colonisation, lesquels ont entraîné un racisme « systémique » qui persiste à ce jour. 

Mme DeShong a demandé aux organes et institutions spécialisés de l’ONU de travailler ensemble pour renforcer et accélérer la réalisation des objectifs de développement durable.  Des solutions pratiques, centrées sur les personnes et respectueuses du climat, doivent être mises en œuvre conformément aux besoins particuliers, aux perspectives culturelles et aux priorités nationales de tous les pays concernés.  Les institutions financières internationales et les pays du Nord doivent intensifier leurs initiatives de renforcement des capacités et d’aide au développement, a ajouté la déléguée, qui a aussi réclamé une action multilatérale contre le terrorisme, la cybercriminalité, la COVID-19 et les changements climatiques.  Elle a en outre dénoncé les campagnes de désinformation, de manipulation et les discours de haine qui sapent les processus de consolidation de l’État.  La prévention des conflits et la consolidation de la paix doivent respecter les principes du droit international et être sensibles à la diversité démographique, aux sensibilités culturelles et au niveau de développement de chaque pays, a conclu la représentante.

M. DINH QUY DANG (Viet Nam) a prévenu que, sans inclusion, la diversité peut conduire à des tensions, à des troubles sociaux et même à la violence et aux conflits, compte tenu des incitations, des discours de haine et de la désinformation.  Il a donc voulu que l’on mette l’accent sur la prévention des conflits dont la responsabilité première revient à l’État.  Les États, a-t-il précisé, doit travailler à une stratégie de prévention efficace qui exige des mesures à court et à long terme dans les domaines politique, diplomatique, humanitaire, du développement et des institutions.  En la matière, le rôle des Nations Unies et de la communauté internationale est d’appuyer les efforts nationaux de prévention des conflits et de renforcement des capacités.  

Les États doivent aussi, a poursuivi le représentant, prendre des mesures pour promouvoir la réconciliation et l’unité nationales par un dialogue inclusif avec la participation de tous, y compris des femmes, des jeunes, des personnes âgées et des groupes vulnérables, de manière à réduire le fossé entre les différences ethniques, religieuses et culturelles.  Les États doivent enfin renforcer la coopération avec les Nations Unies et les organisations régionales et sous-régionales de consolidation de la paix et accorder toute l’attention requise à la mobilisation des ressources.  Le représentant a appelé à des efforts plus coordonnés, plus cohérents et plus intégrés entre les missions et les équipes de pays des Nations Unies, les organisations régionales et les acteurs du développement.  En toute chose, a-t-il conclu, il faut respecter les principes de non-ingérence dans les affaires intérieures et l’indépendance politique des États, et garder l’œil sur le niveau de développement des pays, leurs contextes historiques et leurs particularités, a conclu le représentant, au nom d’un pays aux 54 groupes ethniques.

Mme MONA JUUL (Norvège) a d’abord prévenu qu’il n’y aura pas de stabilité, de prospérité et de paix durable en Afghanistan sans une participation significative des femmes.  Elle a donc regretté que la Haute-Commissaire aux droits de l’homme n’ait pas été en mesure d’intervenir aujourd’hui.  La représentante a ensuite fait état de trois leçons tirées de l’expérience et d’abord que les institutions politiques inclusives sont essentielles au maintien de la paix.  Garantir l’inclusion et la participation peut prévenir l’exploitation de l’éventuelle frustration des groupes marginalisés.  Il faut donc des processus et des mécanismes parfaitement inclusifs, tenant compte des différentes cultures, races, ethnies, langues et religions mais aussi de la voix des femmes, dans toutes les phases des processus de paix. 

La deuxième leçon est l’importance de parler à tous les acteurs concernés pour résoudre les conflits, dont les acteurs armés non étatiques.  Les contacts favorisent la confiance et une meilleure compréhension des intérêts sous-jacents, s’est-elle expliquée, en mettant en avant une méthodologie qui a bien fonctionné avec l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), les Forces armées révolutionnaires de Colombie–Armée populaire (FARC) et l’Armée de libération nationale (ELN) en Colombie et les Maoïstes au Népal.  La troisième leçon est que l’engagement avec les parties ne s’arrête pas à la signature d’un accord de paix.  La représentante a jugé que la Commission de consolidation de la paix est particulièrement bien placée pour comprendre comment les modèles d’exclusion et les revendications d’inclusion sont liés à son travail. 

La représentante a donc jugé utile une collaboration plus étroite entre la Commission et le Conseil de sécurité et de manière plus générale entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales.  L’inclusion, a-t-elle dit, ce n’est pas dire qui doit ou ne doit pas s’asseoir à la table des négociations.  C’est faire de la place à tous ceux qui veulent participer à la réalisation de la paix.

M. TAREK LADEB (Tunisie) a reconnu que beaucoup de conflits sont liés à des questions d’identités ethniques, religieuses, sectaires, sexuelles et culturelles ainsi qu’aux inégalités socioéconomiques.   Les efforts de consolidation de la paix en pâtissent, a fait remarquer le représentant, dénonçant, à son tour, les groupes terroristes et extrémistes qui exploitent les divisions et la crise sanitaire provoquée par la COVID-19.  Pour résoudre ces conflits, a suggéré le délégué, il faut mettre la diversité dans tous les aspects des efforts.  Les processus d’édification de l’État doivent être inclusifs et garantir la participation de toutes les parties prenantes à la vie politique, en particulier des femmes.  Le représentant a également demandé un appui en matière de renforcement de capacités pour que les États puissent mieux intégrer la diversité.  

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a déclaré que maintenir la stabilité sera encore plus difficile, si l’on ne démantèle pas « à temps » les identités radicalisées, en particulier dans le contexte où des groupes extrémistes utilisent le cyberespace pour mobiliser leurs partisans.  Pour autant, le respect de la diversité ne signifie pas tolérer les tentatives autoritaires de limiter la liberté d’expression et de supprimer d’autres droits de l’homme et libertés fondamentales.  La promotion et la protection des droits de l’homme comptent parmi les moyens les plus efficaces de prévention des conflits, a souligné le représentant.  Non seulement l’Estonie rappelle le rôle important des femmes dans la consolidation de la paix, mais elle appuie pleinement l’Appel à l’action du Secrétaire général pour les droits de l’homme, a souligné le représentant, en estimant que cette vision « transformatrice » sous-tend le travail de l’ensemble du système des Nations Unies.  Le respect des droits de l’homme est essentiel pour s’attaquer aux causes générales de toutes les crises complexes et pour construire des sociétés durables, sûres et pacifiques, a-t-il insisté. 

M. VASSILY A. NEBENZIA (Fédération de Russie) a fustigé la responsabilité et les conséquences de la colonisation qui ont perturbé les processus naturels de formation des États en Afrique où les frontières tracées arbitrairement ont divisé les peuples.  Une telle politique, dont l’imposition de langues et coutumes étrangères, ne pouvait que contribuer à l’émergence des conflits interconfessionnels et interethniques, a estimé le représentant qui a aussi reproché « aux empires coloniaux » d’avoir laissé délibérément derrière eux des lignes de division artificielles, dans l’espoir de maintenir leur influence, selon le principe « diviser pour mieux régner ». 

Ces processus néocoloniaux sont malheureusement toujours en cours dans de nombreux pays africains, caractérisés par un contrôle financier direct ou indirect, ainsi que des relations bilatérales « asymétriques ».  L’exploitation des ressources naturelles se poursuit, conjuguée désormais à de nouvelles règles inventées par l’Occident, dont les sanctions unilatérales, les guerres commerciales et même les « changements de régime » violents.  Les élections et les tribunaux spéciaux « imposés » ne font souvent qu’exacerber les contradictions existantes lorsqu’ils sont utilisés pour consolider la victoire d’une partie aux dépens de l’autre et pour permettre à des puissances étrangères de s’ingérer dans les affaires intérieures d’États affaiblis par les conflits. 

Nous sommes convaincus, a dit le représentant, que l’instauration d’une paix durable n’est pas possible sans la prise en compte des traditions et spécificités locales.  Il a d’ailleurs cité en exemple les juridictions locales comme les gacaca au Rwanda.  Les enjeux de la justice transitionnelle au Conseil de sécurité ne devraient pas conduire à « une formule universelle » mais à un travail concret avec les spécificités des pays.  Le représentant a exhorté l’ONU à éviter de dicter mais plutôt à appuyer et compléter les initiatives nationales.  

Les lois doivent préserver les caractéristiques ethniques et religieuses de tous.  La Fédération de Russie, a-t-il rappelé, est un État multinational et multiconfessionnel qui a traversé des périodes difficiles dans son histoire et qui respecte le droit de chaque nation de choisir sa propre voie de développement, « sans recette imposée de l’extérieur ».  Nous sommes prêts à partager notre expérience « unique et vaste » de la coexistence pacifique entre diverses civilisations, religions et cultures, a assuré le représentant, avant de saluer les efforts de l’Union africaine pour bâtir une société africaine inclusive.  

Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a dit au Conseil que lorsqu’il cherche à consolider et à maintenir la paix, le plein respect des droits de l’homme de tous les peuples doit être son mot d’ordre, y compris les droits des groupes marginalisés, des femmes, de la communauté LGBTQI+, des groupes ethniques et religieux.  Citant John Hume, artisan de la paix irlandais, la représentante a dit que « la différence est l’essence de l’humanité.  La différence est un accident de naissance et elle ne devrait donc jamais être une source de haine ou de conflit ».  La différence seule ne provoque pas de conflit, a-t-elle ajouté.  Le Conseil doit reconnaître que les violations des droits de l’homme peuvent être le prélude et même le moteur d’un conflit.  La représentante a rappelé que, bien souvent, ce sont des femmes courageuses, comme Fawzia Koofi en Afghanistan, Hala Al Karib au Soudan et Shukria Dini en Somalie, qui vont au-delà des divisions communautaires pour faire la paix, comme l’a d’ailleurs fait la Coalition des femmes d’Irlande du Nord.  Le courage de ces femmes, a déclaré la déléguée, montre que la paix doit être inclusive et fondée sur des partenariats.  

Comme le retrait d’une opération de maintien de la paix est un test décisif pour la durabilité de la paix, toute présence reconfigurée de l’ONU doit, en coopération avec les institutions financières internationales et les organisations régionales et sous-régionales, être prête à intervenir et préserver la paix.  Il s’agit d’un point d’inflexion essentiel, en particulier lorsqu’il s’agit de ne pas rouvrir les plaies de la division, y compris celles fondées sur l’identité.  L’adoption à l’unanimité par le Conseil de la résolution 2594 (2021) est la reconnaissance du fait que les transitions doivent être inclusives, menées et dirigées par les pays eux-mêmes, a rappelé la représentante. 

M. ZHANG JUN (Chine) a estimé que la diversité est une force perpétuelle qui favorise le développement humain mais qui peut parfois être une source de tensions et de conflits.  Les fragilités de nombreux pays, a-t-il tranché à son tour, sont la conséquence de l’histoire coloniale, dont les frontières tracées arbitrairement et les structures économiques qui sont l’héritage des « empires coloniaux » sans lien aucun avec la réalité et les besoins des pays décolonisés.  Nous devons envisager les moyens de faire de la diversité un vecteur positif, a encouragé le représentant, avant d’appuyer les efforts de développement fondés sur l’unité nationale et le respect de la diversité.  Ces deux objectifs ne s’excluent pas et ne sont pas incompatibles, a-t-il dit.  Il a d’ailleurs estimé que les questions inscrites à l’ordre du jour du Conseil de sécurité sont le fruit des identités nationales « affaiblies, en mal de consensus politique ».  

Le représentant a salué l’expérience du Kenya comme l’exemple « louable » d’un pays qui avance vers le développement inclusif.  Il a appelé à une meilleure gouvernance internationale qui permettrait aux pays en développement de bénéficier d’une distribution plus équitable des progrès économiques.  Nous devons appuyer les pays du Sud qui rejettent les ingérences étrangères dans leurs affaires intérieures.  Le représentant a d’ailleurs fustigé les tentatives d’imposer des modèles prétendument démocratiques qui ont plongé la Libye dans le chaos et l’Afghanistan, dans un cercle vicieux.  Chaque pays doit respecter la liberté de l’autre de choisir son propre modèle politique et s’abstenir de manipuler les médias sociaux pour diviser les autres.

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