Somalie: le Conseil de sécurité étudie une plus grande participation des femmes à la vie politique du pays, dans un contexte sécuritaire précaire
Comment rendre une société plus inclusive et favorable aux femmes alors qu’elle tient fragilement sur ses bases? C’est ce défi, posé actuellement au Gouvernement fédéral somalien et aux États membres de la fédération, qui a été présenté au Conseil de sécurité cet après-midi par la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina J. Mohamed, après sa visite à Mogadiscio le 12 septembre dernier.
Avec l’aide de l’ONU, le Gouvernement somalien tente, dans un contexte politique et sécuritaire tendu, d’organiser des élections législatives en temps voulu, tout en parvenant à un quota de 30% de femmes parlementaires. Les femmes ont demandé à leurs dirigeants d’appliquer intégralement tous les accords politiques liés aux élections, a rapporté Mme Mohamed, dont l’appel à l’inclusion des femmes a fait l’unanimité au Conseil. Au titre de mesures concrètes en ce sens, elle a évoqué la réduction des frais de candidature pour les femmes, ainsi que la nomination d’ambassadeurs de bonne volonté, chargés de soutenir et de défendre ce quota auprès des dirigeants des États membres fédérés.
Toutefois, a rapporté la Vice-Secrétaire générale, des défis subsistent. Les femmes rencontrées lui ont parlé d’obstacles « permanents » : elles ont du mal à obtenir un soutien financier pour organiser des campagnes et ne disposent pas non plus des réseaux et des relations politiques de leurs homologues masculins. Dans certains États fédérés, les candidates ne peuvent pas louer de bureaux de campagne – « un moyen simple et efficace de les empêcher d’être élues ». Dans tous les cas, les femmes ont évoqué avec Mme Mohamed la nécessité d’être mieux protégées contre les intimidations, le harcèlement et la violence.
Car le quotidien des femmes politiques somaliennes reste dangereux. Il y a quelques jours à peine, une conseillère pour les affaires féminines et les droits de l’homme au sein du cabinet du Premier Ministre, Mme Hibaq Abukar, a été tuée dans un attentat à la bombe à Mogadiscio. Mme Mohamed et plusieurs délégations lui ont rendu hommage, ainsi qu’à toutes les femmes somaliennes qui prennent des risques chaque jour en se battant pour leurs droits. Pour les femmes vivant dans les zones contrôlées par le groupe terroriste des Chabab, les problèmes de sécurité sont encore plus aigus, les empêchant de faire campagne ouvertement.
À l’écoute de la Directrice exécutive du Centre d’études des femmes somaliennes, Mme Shukria Dini, le Conseil a appris que les femmes somaliennes n’avaient pas baissé les bras, tirant même profit de leur marginalisation au sein du système clanique pour « gagner la confiance de tous les clans » et s’unir, transformant leur handicap en force. L’intervenante a témoigné que la condition des femmes avait changé en Somalie à cause du conflit, les femmes étant celles qui « mettent le pain sur la table et protègent les familles ».
Le fait de ne parler que des quotas électoraux « nous aveugle », a pourtant observé le Kenya. Souhaitant élever le débat « au-delà de la seule dimension parlementaire et électorale », il a jugé le sort réservé aux femmes en Somalie comparable à celui d’autres pays au contact de groupes terroristes comme Al-Qaida. Si, dans des pays comme les États-Unis, on parle de « masculinité toxique » pour décrire les comportements d’hommes dommageables pour les femmes, le Kenya a appelé le Conseil à se souvenir de Daech, des Taliban d’avant 2001 et des zones tombées sous le contrôle des Chabab. « Vous comprendrez alors que promouvoir le programme femmes, paix et sécurité est une nécessité pour s’opposer aux Chabab. »
La Fédération de Russie a averti à son tour que les efforts d’inclusion seront impossibles si les conditions de sécurité ne sont pas renforcées dans le pays. Les Chabab continuent de perpétrer des attaques et d’avoir recours à des tactiques de guerre asymétriques, s’en prenant aux forces de l’ordre et à la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM). Et la situation humanitaire demeure difficile avec un nombre croissant de réfugiés et de personnes déplacées. L’Estonie, préoccupée par le désaccord entre le Président Farmajo et le Premier Ministre Roble, a exhorté les parties à résoudre leur différend par le dialogue et à assurer la tenue d’élections transparentes et crédibles selon le calendrier défini.
Les États-Unis ont quand même tenu à saluer les progrès « considérables » enregistrés par les élections en Somalie au cours des trois derniers mois. Dans cet esprit, l’Inde a jugé rassurantes les élections en cours à la chambre haute, espérant que les élections à la chambre basse se tiendront aux dates convenues.
Alors que les tensions politiques augmentent, la Somalie ne doit pas retomber dans les divisions et les conflits du passé, a enfin mis en garde la Vice-Secrétaire générale. Elle a encouragé les parties à trouver une solution de compromis et à tenir des élections qui renforceraient la stabilité de toute la Corne de l’Afrique. Se voulant optimiste, elle a constaté elle aussi que le processus électoral en Somalie avait pris « un élan considérable ».
LA SITUATION EN SOMALIE
Déclarations
Selon Mme AMINA J. MOHAMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, la Somalie a franchi une étape importante lors des élections de 2016, avec 24% des sièges parlementaires occupés par des femmes. Des chiffres qui démontrent que des progrès sont possibles, même dans les circonstances les plus difficiles. Ils demeurent cependant en deçà de l’engagement pris par les dirigeants politiques somaliens d’atteindre 30% de représentation des femmes au parlement. Or, « chaque femme compte », a plaidé Mme Mohamed, s’inquiétant que les niveaux de représentation des femmes aillent en diminuant, malgré les promesses, à l’issue des prochaines échéances électorales.
Durant son récent séjour à Mogadiscio, la Vice-Secrétaire générale a rencontré MM. Farmajo et Roble, respectivement Président et Premier Ministre somaliens, ainsi que des membres du Conseil consultatif national. Elle les a entendus s’engager avec force en faveur du principe de la participation égale des femmes et du quota de 30%.
Elle a également apprécié des mesures concrètes prises pour renforcer la représentation des femmes. Ces mesures comprennent la réduction des frais de candidature pour les femmes, ainsi que la nomination d’ambassadeurs de bonne volonté, chargés de soutenir et de défendre le quota de 30% auprès des dirigeants des États membres fédérés. Elle s’est aussi réjouie d’avoir entendu des figures tutélaires reconnaître le rôle central des femmes dans la promotion de la paix et de la sécurité en Somalie: « tous se sont engagés sur la question de l’inclusion des femmes ».
Pourtant, selon Mme Mohamed, les défis subsistent. Les Somaliennes lui ont d’ailleurs parlé d'obstacles « permanents ». Elles ont du mal à obtenir un soutien financier pour organiser des campagnes; elles ne disposent pas non plus des réseaux et des relations politiques de leurs homologues masculins. L'environnement politique en général n’est pas propice à la représentation des femmes et de nombreux dirigeants masculins continuent de promouvoir des candidats masculins.
Ces difficultés, a poursuivi Mme Mohamed, sont aggravées par la violence et la discrimination à l’encontre des femmes. Concrètement, certaines ont signalé que, dans certains États fédérés, les candidates ne peuvent pas louer de bureaux de campagne - un moyen simple et efficace de les empêcher d’être élues. Dans tous les cas, les femmes ont évoqué avec la Vice-Secrétaire la nécessité de mieux les protéger contre les intimidations, le harcèlement et la violence. Il y a quelques jours à peine, une conseillère pour les affaires féminines et les droits de l’homme au sein du cabinet du Premier Ministre, Mme Hibaq Abukar, a été tuée dans un attentat à la bombe à Mogadiscio. Mme Mohamed a rendu hommage à Mme Abukar, ainsi qu’à toutes les femmes somaliennes qui prennent des risques chaque jour en se battant pour leurs droits. Pour les femmes vivant dans les zones contrôlées par les Chabab, les problèmes de sécurité sont encore plus aigus, sapant leurs efforts pour faire campagne ouvertement.
Les femmes rencontrées par la Vice-Secrétaire générale ont demandé la mise en place d’un mécanisme « concret » pour garantir la mise en œuvre du quota de 30%, ainsi qu’une évolution vers des élections directes sur le format « une personne, une voix ». En effet, le format actuel de sélection indirecte laisse la prise de décision politique entre les mains des anciens des clans, qui sont tous des hommes.
Les femmes ont demandé à leurs dirigeants d’appliquer intégralement tous les accords politiques liés aux élections, a rapporté Mme Mohamed. Il s’agit notamment de l’accord du 17 septembre, de l’accord du 27 mai et du communiqué du 22 août, dans lequel les dirigeants du Gouvernement fédéral de Somalie et des États membres fédérés se sont engagés à respecter le quota de 30% de femmes. Elles ont également appelé à des réformes constitutionnelles pour réserver une proportion de sièges parlementaires aux femmes, et pour inclure des femmes dans les comités électoraux, en tant que déléguées et candidates. Au niveau de l’État, les ministres de la condition féminine rencontrées sur le terrain ont encouragé l’ONU à continuer de soutenir ce processus de révision constitutionnelle et un système électoral multipartite, pour accroître la participation des femmes aux futures élections et processus politiques.
Alors que les tensions politiques augmentent, la Somalie ne doit pas retomber dans les divisions et les conflits du passé, a mis en garde la Vice-Secrétaire générale. Elle a encouragé les parties à trouver une solution de compromis et à tenir des élections qui renforceraient la stabilité de toute la Corne de l’Afrique. Se voulant optimiste, elle a constaté que le processus électoral en Somalie avait pris « un élan considérable ».
En conclusion, Mme Mohamed a exhorté les dirigeants à donner la priorité à la mise en œuvre intégrale de l’accord électoral, et à établir des mécanismes concrets pour appliquer le quota de 30% tout en renforçant les efforts visant à protéger les femmes contre la violence.
Mme SHUKRIA DINI, Directrice exécutive du Centre d’études des femmes somaliennes, a centré son intervention autour de l’importance de la participation des femmes aux processus politiques et de parvenir à 30% de femmes parlementaires. La condition des femmes a changé en Somalie en raison du conflit, les femmes étant celles qui mettent le pain sur la table et protègent les familles. Elles ont été aux premières loges de la consolidation de la paix et de la prévention des conflits en Somalie, a témoigné l’intervenante, avant de regretter qu’elles ne soient pas suffisamment représentées dans le processus de paix. Elle a qualifié d’historique la récente visite de la Vice-Secrétaire générale, avant de rappeler l’importance de ce quota de 30% de femmes parlementaires.
« La participation des femmes aux processus électoraux et politiques est cruciale pour bâtir une Somalie pacifique et inclusive », a poursuivi Mme Dini, en insistant sur l’occasion à saisir que constitue les prochaines élections. Elle a indiqué que les femmes ont une expertise et des qualités qui peuvent enrichir le processus politique en le démocratisant. Les femmes ont tiré profit de leur marginalisation au sein du système clanique pour gagner la confiance de tous les clans et s’unir tout en venant en aide aux plus vulnérables. Elle a aussi estimé que la présence des femmes permettra de réduire les tensions entre les candidats. « Les femmes ont appelé toutes les parties prenantes à mettre de côté leurs rivalités politiques et à appuyer une élection pacifique pour le bien du pays. »
La mise en œuvre du quota de 30% doit être la priorité de ce processus électoral, a-t-elle appuyé, avant de se dire préoccupée par sa réalisation, malgré les promesses des dirigeants politiques. Ces préoccupations se sont confirmées avec les résultats des élections sénatoriales. Elle a insisté sur l’importance des ambassadrices de bonne volonté pour parvenir à ce quota. « Nous nous sommes rendues dans les États fédérés et avons engagé directement les parties prenantes pour réaliser ce quota. » Elles ont également offert des recommandations en vue d’instaurer un mécanisme pour la réalisation de ce quota, a-t-elle dit. Mme Dini a exhorté le Conseil à convaincre les dirigeants somaliens que la solution politique est la seule possible, que les élections doivent se dérouler sans délais et que ce quota doit voir le jour. À cette fin, elle a demandé de réserver 83 sièges pour les femmes lors des élections à la Chambre du peuple et 10 sièges sur les 25 sièges au Sénat restants. Elle a aussi demandé des mesures de protection pour les femmes pendant le processus électoral. Enfin, Mme Dini a exhorté la communauté internationale à ne pas appuyer les élections si ce quota n’est pas respecté.
Mme BARBARA WOODWARD (Royaume-Uni) a commencé par relever que les femmes et les filles somaliennes ne sont pas seulement affectées passivement par la politique et la sécurité, elles peuvent aussi être de « puissants agents de changement ». Elle a constaté que la pandémie de COVID-19 et les crises politiques persistantes en Somalie ont empêché des progrès substantiels sur les autres priorités du pays, notamment le programme « femmes, paix et sécurité ». Or, l’inégalité entre les sexes et le cycle perpétuel de violence contre les femmes et les filles contribuent à l’insécurité prolongée, à l’instabilité et à l’insurrection des Chabab, a-t-elle noté, avant d’appeler les dirigeants somaliens à donner la priorité à l’adoption du projet de loi sur les infractions sexuelles dès que possible et à mettre en œuvre ses dispositions.
Pour résoudre ces problèmes, a poursuivi la représentante, il convient que les femmes aient « une place à la table lorsque les décisions sont prises ». Saluant l’intervention de Mme Shukria à cet égard, elle a exhorté les dirigeants somaliens à veiller à ce qu’un minimum de 30% des sièges parlementaires reviennent aux femmes lors des élections en cours, conformément aux accords électoraux de 2020 et 2021. Elle a toutefois jugé décevant qu’alors que le processus électoral de la Chambre haute approche de sa conclusion, ces mêmes dirigeants somaliens n’aient pas respecté leur engagement. Elle les a donc enjoints à respecter leur engagement lors des prochaines élections à la Chambre basse.
Enfin, Mme Woodward a encouragé la Somalie à accélérer la finalisation, l’adoption et la pleine mise en œuvre de son plan d’action national sur les femmes, la paix et la sécurité, en étroite coopération avec la société civile. Il s’agit, selon elle, d’un élément essentiel des efforts visant à renforcer la participation des femmes à la consolidation de la paix et au progrès socioéconomique.
M. BING DAI (Chine) a salué les efforts concrets du Gouvernement somalien pour encourager la représentation des femmes en politique, efforts que la communauté internationale doit encourager. L’unité nationale en Somalie devrait créer les conditions propices à la participation des femmes, a-t-il ajouté, citant en exemple les mesures de financement des frais encourus par les candidates somaliennes.
Cependant, beaucoup de problèmes n’ont pas été réglés en Somalie: la situation sécuritaire difficile, notamment, inquiète la Chine. Le représentant a espéré que l’Union africaine et l’ONU continueront leurs efforts de médiation. Au cours des prochaines élections, toutes les parties doivent respecter les engagements pris au courant de l’année, a-t-il appuyé tout en encourageant la Somalie à respecter le calendrier établi par celles-ci. Enfin, a-t-il conclu, la communauté internationale doit fournir l’aide financière et technique malgré les difficultés, et le Conseil de sécurité doit poursuivre les efforts qui devraient permettre à la Somalie d’avancer.
Mme HALIMAH AMIRAH FARIDAH DESHONG (Saint-Vincent-et-les Grenadines) s’est félicitée de l’engagement pris par le Gouvernement fédéral somalien d’atteindre le quota de 30% pour la participation des femmes au processus électoral. Elle a toutefois pris note des préoccupations exprimées quant à la nécessité d’un accord des États Membres fédérés et des chefs de clans sur les sièges réservés aux femmes, appelant les différentes institutions somaliennes à garantir que l’objectif relatif à l’élection de femmes au Parlement soit « atteint ou dépassé ». Pour la représentante, la transformation de la société somalienne nécessite la participation politique et le leadership des femmes.
La déléguée a ensuite salué le soutien fourni au pays par la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) et la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM). Selon elle, les visites récentes effectuées dans les États Membres fédérés par les chefs de ces Missions ainsi que par des représentants de l’Union européenne et de la Suède ont joué un rôle crucial dans la préparation des élections et l’appui à la participation politique des femmes. Elle s’est également réjouie qu’en soutien du Comité national de sécurité des élections, l’Union africaine s’emploie aux côtés des forces de sécurité somaliennes à empêcher les Chabab de perturber les opérations électorales.
Pour Mme DeShong, les élections à venir sont cruciales pour normaliser la situation sécuritaire, répondre aux besoins humanitaires urgents et accélérer le développement socioéconomique du pays. Mais si les femmes n’ont pas accès aux postes décisionnels à tous les niveaux, « la possibilité d’un développement équitable et juste restera insaisissable », a-t-elle averti, non sans rappeler que la Somalie a réalisé en 2016-2017 ce qu’une majorité de pays, y compris développés, n’ont pas réussi à faire: 24% des sièges parlementaires occupés par des femmes. Les prochaines élections sont, par conséquent, « une autre étape importante » dans la réalisation des aspirations des femmes somaliennes.
M. MARTIN KIMANI (Kenya) s’est félicité de la tenue de cette réunion sur la situation des femmes somaliennes mais il a souhaité aller au-delà de la seule dimension parlementaire et électorale. Selon lui, le sort réservé aux femmes en Somalie est comparable à celui qui prévaut dans d’autres pays où sévissent des organisations terroristes. En Afghanistan, a-t-il relevé, nous avons entendu des promesses sur le statut des femmes depuis la prise du pouvoir par les Taliban, mais nous n’avons obtenu aucune garantie. Exprimant sa crainte des idéologies extrémistes, le représentant a jugé que la situation des femmes afghanes est comparable à celle des femmes de Somalie, du Kenya, du Sahel et de la Corne de l’Afrique qui sont au contact de groupes tels qu’Al-Qaida. Alors que, dans des pays comme les États-Unis, on parle de « masculinité toxique » pour décrire les comportements des hommes qui sont dommageables pour les femmes, « souvenez-vous de Daech, des Taliban d’avant 2001, des zones tombées sous le contrôle des Chabab et vous comprendrez que promouvoir le programme femmes, paix et sécurité est une nécessité pour s’opposer aux Chabab », a martelé le délégué.
À ses yeux, il est essentiel que le Conseil de sécurité prête attention à cette question car le fait de ne parler que des quotas électoraux « nous aveugle ». Bien entendu, a ajouté le délégué, nous soutenons ces quotas de représentation des femmes mais nous voulons aussi que ces dernières soient davantage intégrées aux efforts militaires et de police, qu’elles accèdent à des postes à responsabilité et qu’elles soient mieux protégées de l’influence des Chabab et de leur idéologie. Précisant s’être entretenu personnellement avec des femmes tombées sous le joug des Chabab, il a indiqué que toutes ont fait état de violences sexuelles graves. De fait, a-t-il déclaré en conclusion, infliger une défaite militaire aux Chabab et les priver de leurs ressources financières est d’une importance capitale si l’on veut protéger les femmes de la région.
Mme TRINE SKARBOEVIK HEIMERBACK (Norvège) a regretté le nombre insuffisant de femmes élues en Somalie, y compris à la Chambre haute après les récentes élections. Elle a demandé que ce quota de 30% de femmes soit respecté dans les deux chambres du Parlement somalien. La déléguée de la Norvège a ensuite encouragé la MANUSOM à participer à la mise sur pied du Conseil national des femmes. Les femmes somaliennes ont montré leurs capacités à jeter des passerelles entre les différents clans, a déclaré la déléguée. Elles ont de l’influence et des ressources, a-t-elle continué. Enfin, elle a déclaré que la Norvège appuie le plan des femmes somaliennes pour la réconciliation en Somalie.
M. ADEL BEN LAGHA (Tunisie) a exprimé ses condoléances aux familles des victimes ainsi qu’au peuple et au Gouvernement somaliens, à la suite de l’attaque terroriste de la semaine dernière, près du palais présidentiel à Mogadiscio, revendiquée par les Chabab. Réitérant l’importance de la tenue d’élections libres, équitables et inclusives en Somalie, il a espéré que l’accord conclu sur le quota minimum de 30% de femmes dans les élections parlementaires serait respecté et ouvrirait la voie à une plus forte représentation et participation des femmes à l’avenir. Il a salué à cet égard les efforts déployés par le Gouvernement somalien, tels que la réduction des frais d’inscription pour les femmes candidates, ainsi que la nomination d'ambassadeurs chargés de promouvoir une plus grande inclusion.
Jugeant important, à ce stade, de s’accorder sur la manière précise dont le quota de 30% serait mis en œuvre, le représentant tunisien a encouragé le Gouvernement somalien à continuer de plaider pour la pleine représentation des femmes à tous les niveaux de prise de décision. Il a aussi jugé nécessaire de répondre aux préoccupations relatives à la situation générale des femmes somaliennes, notamment concernant le niveau élevé de violence et d’insécurité auquel elles sont confrontées. Cette violence, a-t-il insisté, entrave leur pleine participation à la vie politique et économique.
Selon Mme ANNA M. EVSTIGNEEVA (Fédération de Russie), le Conseil de sécurité doit tenir compte des réalités politiques de chaque pays, et établir des priorités adéquates. Il incombe aux Somaliens d’achever le processus électoral et d’organiser des élections nationales. Malheureusement, dans un contexte d’instabilité politique, les élections nationales ont dû être reportées, et ne devraient pas se tenir avant la fin du mois de novembre, au mieux.
La déléguée russe a indiqué que pour son pays la priorité actuelle est d’éviter la dégradation des conditions de sécurité. Le Gouvernement fédéral a pris des mesures en ce sens. Mais le groupe des Chabab continue de perpétrer des attaques et d’avoir recours à des tactiques de guerre asymétriques, s’en prenant aux forces de l’ordre et à la Mission d’assistance des Nations Unies en Somalie (MANUSOM), comme cette récente attaque ayant fait 10 victimes dirigé contre le palais présidentiel de Mogadiscio. En outre, a-t-elle poursuivi, la situation humanitaire demeure difficile dans le pays: quatre millions de personnes vivent dans une zone dangereuse, et le nombre de déplacés et de réfugiés est en hausse. La mission de Mme Mohamed dans le contexte de la Somalie concerne aussi le développement: cet aspect devrait être renforcé et intensifié, a conclu la déléguée.
M. SRINIVAS GOTRU (Inde) a considéré que la tenue d’élections et la formation d’un nouveau gouvernement sont aujourd’hui une priorité absolue pour la Somalie. Il a souhaité que les dirigeants somaliens continuent d’aller de l’avant avec le processus électoral en cours, la tenue pacifique des scrutins dans les délais convenus et conformément aux accords du 17 septembre et du 27 mai étant d’une importance cruciale pour l’avenir démocratique de la Somalie. Au vu des récents développements reflétant le désaccord au sein du Gouvernement somalien, les élections en cours à la chambre haute sont rassurantes, a ensuite relevé le représentant, qui a espéré que les élections à la chambre basse se tiendront également aux dates convenues.
L’Inde a par ailleurs déclaré soutenir l’appel à l’inclusion des femmes dans tous les secteurs de la société pour faire progresser la paix et la stabilité en Somalie. « Nous espérons que le quota de 30% de représentation des femmes au parlement sera réalisable étant donné que les candidates ont remporté 24% du total des sièges parlementaires lors de ses dernières élections. » La délégation a en outre regretté que les retards pris dans l’organisation des élections aient permis aux Chabab de consolider leur emprise et de gagner encore du terrain.
Mme TRA PHUONG NGUYEN (Viet Nam), a insisté sur les progrès notables enregistrés en ce qui concerne la participation et la représentation des femmes dans le processus politique en Somalie. Les élections parlementaires sont l’occasion de faire fond sur ces progrès et de contribuer à une plus grande stabilité du pays, a dit la déléguée. Elle a demandé que la proportion minimale de 30% de femmes parlementaires soit garantie et demandé la création d’un mécanisme spécifique à cette fin. La déléguée a aussi appelé au renforcement des mesures de protection des civils pendant le processus électoral. « Les préparatifs de ces élections doivent être vus selon ces deux prismes de protection et de participation. »
La déléguée a condamné les violences, y compris sexuelle, commises contre les civils, en particulier les femmes et les enfants, et demandé que leurs auteurs soient traduits en justice. Elle a exhorté la communauté internationale à davantage appuyer la Somalie afin de surmonter ses nombreux défis, socioéconomiques et environnementaux. Nous appuyons tous les efforts internationaux visant à faire entendre la voix des femmes, a conclu la représentante du Viet Nam.
M. JEFFREY DELAURENTIS (États-Unis) s’est félicité des progrès considérables enregistrés par les élections en Somalie au cours des trois derniers mois, jugeant toutefois impératif que le différend actuel entre le Président et le Premier Ministre ne perturbe pas le processus et qu’il soit résolu de manière pacifique. « Parce que les femmes sont souvent victimes de discrimination et d’oppression, il est vital que leurs voix soient entendues aux plus hauts niveaux du gouvernement », a-t-il ensuite plaidé. C’est pourquoi il est essentiel de finaliser les dispositions pour atteindre le quota de 30% de représentation des femmes au parlement, conformément aux accords politiques somaliens. Comme l’Irlande et le Mexique l’ont souligné dans leur lettre du 19 juillet au Secrétaire général, les femmes actives dans le système politique sont plus susceptibles que les hommes d’être victimes de harcèlement et de violence pendant la période électorale, a souligné le représentant. Aussi les efforts visant à promouvoir la participation devraient inclure la finalisation des préparatifs de la sécurité électorale avec « une optique centrée sur le genre » pour garantir que le vote puisse avoir lieu dans un environnement sûr et sécurisé.
Nous savons que les sociétés qui autonomisent les femmes sont plus stables, pacifiques et prospères à la fois économiquement et politiquement, a fait valoir M. Delaurentis. Les États-Unis sont activement engagés avec des partenaires du monde entier pour soutenir les efforts visant à faire progresser la participation des femmes à la prise de décision politique et sécuritaire. Les États-Unis ont donc appelé tous les États Membres à adopter et à mettre en œuvre des plans d’action et des stratégies nationales sur les femmes, la paix et la sécurité. « Ensemble, nous devons nous donner comme priorité d’élever et d’amplifier la voix des femmes, de veiller à ce qu’elles soient entendues, de garantir la sûreté et la sécurité des femmes et des filles et de veiller à ce qu’elles puissent jouer un rôle moteur dans la promotion de la paix et de la sécurité internationales », a ajouté le délégué américain.
M. NIANDOU AOUGI (Niger) a brièvement salué les avancées dans la mise en œuvre du quota de 30% de femmes parlementaires, avant d’appeler les dirigeants somaliens à y parvenir. Le délégué a insisté sur l’importance d’un processus politique inclusif et participatif et exhorté la communauté internationale à l’appuyer.
Mme ALICIA GUADALUPE BUENROSTRO MASSIEU (Mexique) a considéré que l’avenir de la Somalie dépend de la participation pleine et égale des femmes au processus politique et aux autres sphères de la vie publique. Leur implication est essentielle pour parvenir à une paix et un développement durables. Dans ce contexte, le Mexique souligne l’importance d’intensifier les efforts pour respecter l’engagement pris par les Somaliens eux-mêmes à atteindre au moins 30% de représentation féminine au sein de leurs institutions.
Il est toutefois inquiétant qu’à ce jour, aucun État fédéré n’ait atteint le quota de 30% lors des élections à la chambre haute, a poursuivi la déléguée. Outre des contraintes financières, les candidates sont confrontées à d’autres défis, notamment sur le plan sécuritaire. « Il est donc impératif de renforcer leur protection afin de garantir leur participation au processus électoral. Il est tout aussi important qu’un soutien et des ressources soient fournis aux femmes nouvellement élues pour qu’elles remplissent un rôle législatif efficace et courageux », a insisté Mme Buenrostro Massieu. Elle a condamné tout type de violence et d’insécurité envers les femmes.
Mme NATHALIE BROADHURST ESTIVAL (France) a partagé les préoccupations exprimées et les recommandations formulées, à savoir que l’augmentation des violences sexuelles et fondées sur le genre est inadmissible et que les responsables de ces violences doivent répondre de leurs actes. La « diplomatie féministe » poursuivie par la France fait de la mise en œuvre universelle de l’agenda « Femmes, paix et sécurité » une priorité, a déclaré la représentante en rappelant l’organisation du Forum Génération Égalité, avec ONU-Femmes et le Mexique, à Paris, en juin 2021.
En Somalie, a poursuivi Mme Broadhurst Estival, la pleine et égale participation des femmes dans toutes les sphères pertinentes est une urgence: le changement doit intervenir dans tous les pans de la société. « Aujourd’hui, en Somalie, une jeune fille sur trois a subi des mutilations génitales, et une jeune fille sur 12 est mariée avant ses 15 ans », a-t-elle souligné. Elle a enjoint la Somalie à mettre en œuvre ses engagements internationaux et régionaux, en adoptant les textes législatifs appropriés pour la protection des femmes et des filles et pour judiciariser, condamner et réprimer les auteurs de violences sexuelles. Respecter le quota de 30% de femmes élues au parlement facilitera la prise de conscience de la nécessaire, légitime et juste inclusion de la moitié de la population dans les décisions du pays, a-t-elle ajouté.
S’agissant de la crise politique actuelle paralysant la Somalie, la représentante a déploré que comme souvent, les femmes étaient impactées « de façon disproportionnée ». Selon elle, les élections doivent être organisées sans délai, conformément aux accords de septembre 2020 et mai 2021, comme rappelé par ce Conseil le 18 septembre dernier. Le Gouvernement fédéral somalien et les États membres de la Fédération doivent œuvrer conjointement pour que les échéances électorales soient respectées, a-t-elle déclaré. Sur le plan sécuritaire, la présence des Chabab sur une vaste partie du territoire somalien représente une menace constante pour tous les Somaliens, en particulier les femmes, victimes de violences et de mariages forcés, a poursuivi Mme Broadhurst Estival, appelant à poursuivre les efforts pour lutter contre ce groupe et à mettre en œuvre le plan de transition somalien, avec l’appui des partenaires régionaux et internationaux de la Somalie. Comme le prévoit la résolution 2568 (2021), la lutte passe également par la mise en place d’une mission reconfigurée de l’Union africaine à compter de 2022, a-t-elle conclu.
M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) s’est dit très préoccupé par le désaccord entre le Président Farmajo et le Premier Ministre Roble. Il a exhorté les parties à éviter toute action susceptible d’engendrer de la violence, à résoudre leur différend par le biais du dialogue et à assurer la tenue d’élections transparentes et crédibles selon le calendrier défini. La tenue fructueuse d’élections est le seul moyen permettant la poursuite des efforts de consolidation des institutions étatiques.
Le représentant a invité les dirigeants à honorer leurs engagements en ce qui concerne la participation politique des femmes et à respecter le quota de 30% de femmes parlementaires. Il a ensuite dénoncé la persistance de la violence sexuelle et en raison du genre et appelé les autorités à y remédier. « Il est capital que les droits des femmes soient consacrés par la constitution révisée. » Enfin, jugeant que la priorité du Gouvernement doit être de vaincre les Chabab, il a demandé une accélération de la mise en œuvre du plan de transition somalien.
Mme GERALDINE BYRNE NASON (Irlande) a insisté sur la corrélation qui existe entre la participation politique des femmes et la paix et la stabilité. « La participation des femmes à tous les aspects de la vie publique est un impératif. » Elle a estimé que les prochaines élections en Somalie sont l’occasion de progresser davantage dans cette voie, en appelant à assurer une proportion de femmes parlementaires d’au moins 30%, comme convenu par les dirigeants somaliens. Il manque encore un mécanisme pour assurer une telle proportion, a-t-elle regretté, en appelant lesdits dirigeants à y remédier. Elle a dénoncé les informations faisant état d’intimidations à l’endroit de femmes candidates et exhorté le Gouvernement à instaurer un environnement sûr.
La déléguée a également dénoncé l’augmentation alarmante de la violence sexuelle et en raison du genre. Elle a exhorté le Gouvernement à y répondre et à conduire immédiatement une enquête approfondie sur la disparation de Mme Ikran Tahlil. En conclusion, Mme Byrne Nason a invité les dirigeants somaliens à, de toute urgence, mettre en œuvre le processus politique, y compris en assurant une proportion de 30% de femmes parlementaires. « La population somalienne ne mérite rien de moins. »