Conseil de sécurité: le Président du Comité 1591 sur le Soudan signale des retards dans la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba
Le Président du Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 1591 (2005) concernant le Soudan a indiqué ce matin, au Conseil de sécurité, que l’insécurité persiste dans plusieurs régions du Darfour. Il a également souligné que les sanctions ciblées visent à contrecarrer ou à empêcher des actions susceptibles de nuire à la paix, une position contestée par le Soudan qui a réclamé leur levée, estimant que celles-ci ne sont plus conformes à la réalité qui prévaut actuellement sur le terrain au Darfour.
Dans un premier temps, M. Sven Jürgenson (Estonie), a informé le Conseil de sécurité des travaux de l’organe qu’il préside pour la période allant du 14 juin 2021 à aujourd’hui et au cours de laquelle le Comité a tenu sa première consultation informelle en personne depuis le début de la pandémie de COVID-19, réunion au cours de laquelle le Groupe d’experts pour le Soudan a informé le Comité de son rapport intérimaire.
Le Groupe d’experts a notamment rendu compte de la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba, précisant qu’à l’exception des accords de partage du pouvoir, son application avait connu des retards. Des combats sporadiques ont éclaté dans le nord du Jebel Marra entre les forces du Gouvernement et celles de l’Armée de libération du Soudan-Abdul Wahid qui, grâce aux revenus miniers, a augmenté ses capacités en termes de recrutement, d’entraînement et d’armement. Les mouvements signataires de l’Accord de paix sont retournés au Darfour, certains se livrant à des activités de recrutement, tout en gardant également un certain nombre de troupes et d’armes en Libye. Les mouvements armés non-signataires se trouvant en Libye ont également continué à recruter et à se développer, bien que plusieurs d’entre eux aient exprimé le souhait de rejoindre le processus de paix et de retourner au Soudan.
En outre, le Groupe a noté qu’en raison des retards dans la mise en œuvre de l’Accord de paix de Djouba, en particulier du chapitre sur la sécurité, l’insécurité persiste dans de nombreuses régions du Darfour. Malgré l’engagement du Gouvernement à améliorer la sécurité, le Groupe d’experts a signalé que des violences intercommunautaires, des attaques menées contre des civils par l’Armée de libération du Soudan-Abdul Wahid, et des violations des droits humains, y compris des actes de violence sexuelle en période de conflit, avaient été enregistrées. Le recours à davantage de mesures pour renforcer la protection des civils au Darfour reste d’une importance primordiale et doit être accéléré, a plaidé le Groupe qui a en outre relevé que certains facteurs sous-jacents du conflit au Darfour ont été exacerbés par la concurrence pour les rares ressources locales. En outre, le gel des avoirs demeure un défi et un nouveau cas de violation d’une interdiction de voyager a été constaté avec le voyage de Musa Hilal au Tchad en avril 2021.
Le Président du Comité a par ailleurs rappelé que les mesures ciblées et l’embargo sur les armes au Darfour ont pour seul objectif d’aider le Soudan à parvenir à la paix. Les sanctions ciblées visent à contrecarrer ou à empêcher des actions susceptibles de nuire à la paix, tandis que l’embargo sur les armes actuellement en vigueur au Darfour sert en définitive à empêcher une nouvelle prolifération des armes, a notamment affirmé M. Jürgenson.
« Les sanctions ne sont plus conformes à la réalité qui prévaut actuellement sur le terrain au Darfour », a rétorqué le Représentant du Soudan. Vu que la situation sécuritaire s’améliore régulièrement au Darfour, où un cessez-le-feu est respecté dans toutes les zones de la région, le Conseil de sécurité doit reconsidérer ces mesures, a insisté M. Mahmoud Youssef Ahmed Al-Hussein. L’Accord de paix de Djouba est en cours de mise en œuvre et le Gouvernement soudanais procède notamment à la collecte des armes non autorisées, s’attaque aux problèmes des personnes déplacées et des réfugiés, et met en œuvre le plan national de la protection des civils. Il intègre en outre le Mouvement Abdul Wahid au processus de paix et prend des mesures pour empêcher le déclenchement de combats tribaux, a détaillé le diplomate.
Pour M. Al-Hussein, la levée des mesures imposées en application de la résolution 1591 et des résolutions connexes permettra au Gouvernement soudanais de reconstituer la capacité des forces de sécurité et des forces de l’ordre à maintenir et à consolider la paix non seulement au Darfour, mais dans toute les régions où des groupes criminels organisés sont impliqués dans le trafic d’êtres humains et d’armes et d’autres activités criminelles transnationales. La levée de ces mesures rendra ainsi le Soudan plus capable de devenir un pays en paix avec lui-même et avec son environnement régional, a-t-il plaidé.
Le délégué a ensuite noté, « avec une grande préoccupation », les négociations en cours au Conseil de sécurité sur le projet d’une déclaration présidentielle, porté par certains membres qui entendent « imposer des normes déraisonnables et étendre la portée des mesures imposées par la résolution 1591 pour inclure toutes les régions du Soudan en plus du Darfour ». Alors qu’il procède à un changement global, pas uniquement au Darfour, mais dans toutes les régions du pays, le Soudan devrait être traité équitablement et objectivement par certains États membres du Conseil de sécurité, a-t-il estimé.