CCP/139

Le nouveau Président de la Commission de consolidation de la paix entend renforcer son rôle pour reconstruire en mieux après la pandémie de COVID-19

Élu par acclamation, ce matin par le Comité d’organisation de la Commission de consolidation de la paix, à la présidence de la CCP, le Représentant permanent de l’Égypte, M. Mohamed Edrees, a présenté les 10 priorités sous lesquelles il entend placer son mandat, dont le renforcement du rôle de la CCP dans la perspective de reconstruire en mieux après la pandémie de COVID-19. 

Les délégations, qui s’étaient réunies en présentielle, ont du reste salué une année 2020 au cours de laquelle la CCP a réussi non seulement à garantir la continuité de ses travaux mais aussi à les élargir en convoquant 37 réunions, malgré des restrictions imposées par la pandémie COVID-19, comme l’a témoigné le Président sortant, M. Bob Rae, Représentant permanent du Canada, qui a terminé le mandat de son compatriote M. Marc-André Blanchard.  Le Canada restera membre du bureau puisqu’il a été élu à sa vice-présidence, aux côtés de la Slovaquie.

En outre, les pays suivants ont été réélus, par acclamation, à la présidence des formations pays de la Commission jusqu’au 31 décembre 2021: le Brésil pour la Guinée-Bissau; le Maroc pour la République centrafricaine; la Suède pour le Libéria; et la Suisse pour le Burundi. 

Le nouveau Président de la CCP a indiqué que l’Égypte entend en premier lieu s’assurer que l’appui de la consolidation et du maintien de la paix en Afrique continue de recevoir toute l’attention requise.  En 2020, a rappelé M. Edress, la CCP s’est intéressée à 15 contextes dans des pays et des régions, dont 12 en Afrique. 

Assurer un financement adéquat, prévisible et durable est une haute priorité pour l’efficacité du travail de la CCP, étant donné que le financement reste le défi le plus critique auquel est confrontée l’architecture de consolidation de la paix de l’ONU, a-t-il enchaîné, définissant sa troisième priorité après la reconstruction post-COVID-19.  Quatrièmement, il sera essentiel de poursuivre tous les efforts visant à renforcer le rôle consultatif de la CCP auprès du Conseil de sécurité, en particulier dans le contexte du renouvellement du mandat des opérations de maintien de la paix et de l’appui aux transitions des opérations de paix.

L’Égypte souhaite aussi, en cinquième priorité, que la CCP insiste sur les moyens pratiques pour que la collaboration entre le système de l’ONU et l’Union africaine (UA) permette de soutenir les efforts d’appropriation de cette dernière de sa reconstruction et du développement postconflit, ainsi que des politiques et efforts de prévention structurelle.  Sixièmement, l’Égypte entend continuer à promouvoir les partenariats avec des organisations régionales et sous-régionales, ainsi que des institutions financières internationales, en vue d’assurer plus d’efficacité et cohérence à l’appui des efforts de consolidation de la paix. 

La septième priorité de la présidence égyptienne sera de renforcer la cohérence et la performance globale du système onusien de consolidation de la paix, a poursuivi M. Edress.  La huitième sera de renforcer la capacité de la CCP à booster le multilatéralisme, alors que la neuvième met l’accent sur le renforcement du rôle des femmes et des jeunes dans la consolidation de la paix.  Enfin, par la dixième priorité, la présidence égyptienne entend veiller à ce que les débats de la CCP soient focalisés sur les contextes nationaux et régionaux, afin que les contributions de la Commission soient davantage axées sur l’impact. 

De son côté, le Président sortant s’est réjoui, dans son bilan, d’une année 2020 au cours de laquelle de nouveaux entretiens ont été amorcés avec l’Afrique centrale, les îles du Pacifique et la Somalie.  La CCP a aussi donné son avis 12 fois au Conseil de sécurité -« un record »- et publié de nombreux communiqués de presse.  Presque tout ce travail a été effectué sur des plateformes virtuelles, s’est enorgueilli M. Rae qui a précisé que la Commission fut le premier organe de l’ONU à adapter ses méthodes de travail en réponse à la pandémie.

M. Rae a indiqué que la COVID-19 a mis à nu le fait que la réussite des efforts de consolidation de la paix déployés par l’ONU est souvent plus fragile qu’on ne veut l’admettre.  En effet, même après des décennies de travail accompli en faveur de la consolidation de la paix, « de nombreux pays ne sont qu’à un ou deux contrecoups de retomber dans une crise profonde », a-t-il prévenu.

Le Président sortant a aussi insisté sur l’importance de l’inclusion des femmes et des jeunes dans la consolidation de la paix, se déclarant fier du fait que, cette année, un nombre record de 25 femmes ont présenté des exposés devant la Commission.

Il a également appelé la CCP à continuer d’écouter ceux qui œuvrent pour la paix au niveau local, afin d’apprendre d’eux, de les soutenir et de les autonomiser dans leur travail.  Il a d’ailleurs fait observer que le mode de travail virtuel imposé en raison de la pandémie avait permis à la CCP d’avoir plus de contact avec les ONG et les personnes sur le terrain, et a espéré que lorsque les travaux en présentielle reprendront, la CCP ne renoncera pas à cette « souplesse technologique » qui « lui permet d’entendre la voix de personnes qu’elle n’a pas l’habitude d’entendre ».

En 2021, le travail de la Commission en 2021 doit être davantage focalisé sur les populations, en mettant en avant les « 3 c » et les « 3 p », a estimé pour sa part l’autre Vice-Président, la Slovaquie.  Il s’agit, a expliqué la délégation, de la cohérence, la coordination, la complémentarité, la participation, les partenariats et les populations.  Vice-Présidente du bureau sortant, la Colombie a dit avoir elle-même fait des avancées dans son processus national de consolidation de la paix, déplorant toutefois que ses efforts aient été plombés par la pandémie de COVID-19 et les impacts négatifs des changements climatiques.

Pour sa part, le Sous-Secrétaire général chargé du Bureau d’appui à la consolidation de la paix, M. Oscar Fernandez-Taranco, a salué l’achèvement réussi du troisième examen de l’architecture de consolidation de la paix de l’ONU ainsi que l’engouement suscité par la récente Conférence de haut niveau de reconstitution du Fonds pour la consolidation de la paix qui a vu un nombre record de 92 États Membres représentés et 439 millions de dollars d’engagements et de promesses faits pour la Stratégie 2020-2024 du Fonds.  Il s’agit d’une augmentation de 25% par rapport aux contributions reçues au cours des trois années précédentes, s’est-il félicité, et cette somme représente presque le tiers de l’objectif de mobilisation de 1,5 milliard de dollars sur cinq ans.  Intervenant par visioconférence depuis Buenos Aires, le haut fonctionnaire a également salué l’élargissement de la base de donateurs du Fonds, soulignant que d’anciens bénéficiaires ont même rejoint le camp de donateurs, notamment la Sierra Leone, le Burkina Faso, la Gambie et les Philippines.

Les présidents de formations pays ont ensuite brièvement pris la parole pour décrire la situation dans les pays à leur examen.  Pour le Maroc qui préside la formation République centrafricaine, il est important de noter que la RCA vit un moment critique avec une nouvelle coalition de groupes rebelles qui déstabilisent le pays.  L’urgence est donc la sauvegarde des acquis et la poursuite du processus de paix.  Le Brésil, Président de la formation Guinée-Bissau, a rappelé que ce pays connaît désormais une nouvelle phase de la présence onusienne, même si de nombreux défis demeurent pour assurer la stabilité dans le pays.  Dans l’immédiat, des efforts doivent être faits pour atténuer les répercussions socioéconomiques de la pandémie de COVID-19.  À sa suite, la Suède, qui préside la formation Libéria a milité pour la multiplication des partenariats avec les organisations régionales, les institutions financières, les organisations des jeunes et des femmes.  La Suède a notamment indiqué que le Libéria, qui a beaucoup avancé sur la voie de la paix, est désormais focalisé sur la réconciliation nationale avec en toile de fond des chantiers tels que la promotion de l’autonomisation des femmes et l’égalité des genres.

À son tour, la Suisse, qui est à la tête de la formation Burundi, a rappelé que les effets dévastateurs de la pandémie de COVID-19 s’ajoutent aux risques qui pèsent sur les gains en matière de consolidation de la paix et de développement dans les pays touchés par un conflit.  Il est temps d’investir sérieusement dans le facteur humain de la consolidation de la paix, soit les leaders de tous les âges œuvrant pour la paix sur le terrain, et tout particulièrement les femmes, qui sont les premières à répondre à l’appel, et les dernières à quitter le camp, a-t-elle dit.

De nombreuses autres délégations sont également intervenues pour insister à leur tour sur l’importance de doter les activités de consolidation de la paix d’un financement adéquat.  L’Allemagne a souligné avoir consenti 50 millions d’euros au Fonds pour la période 2021-2022.  L’Éthiopie a aussi insisté sur un financement pérenne de la CCP, tandis que le Royaume-Uni s’est réjoui de voir que de nouveaux pays contribuent au Fonds, y compris des pays qui dans le passé bénéficiaient de celui-ci.

L’Afrique du Sud a souhaité que le principe d’appropriation nationale soit privilégié dans les activités mises en œuvre par la CCP, tandis que le Pakistan a appelé à mettre l’accent sur les partenariats, notant que la CCP parvient à de meilleurs résultats quand elle coopère avec les acteurs de terrain et tient davantage compte des priorités nationales.  Pour le Kenya, qui a déploré le manque de continuité des solutions proposées aux pays en conflit, il serait de bon aloi de soutenir le secteur privé afin qu’il crée des emplois et assure l’essor économique du pays sortant d’un conflit.  Le pays a également appelé à une collaboration plus étroite entre la CCP et le Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine. 

La Norvège a appelé à renforcer le rôle de conseil de la CCP auprès du Conseil de sécurité, tandis que pour la Sierra Leone, il importe de favoriser une approche régionale de consolidation de la paix, en tenant notamment compte des problèmes spécifiques du Sahel et des membres de l’Union du fleuve Mano.  Les États-Unis ont pour leur part salué le fait que la CCP soit devenue une véritable instance de dialogue en s’ouvrant davantage à la société civile. 

Les Pays-Bas, comme bon nombre de pays, ont insisté sur la participation des jeunes et des femmes aux efforts de consolidation de la paix.  La délégation a aussi demandé d’établir un système de justice fonctionnel dans les pays sortant de conflit.  Le Nigéria a aussi souhaité que les jeunes soient davantage intégrés dans les activités de consolidation de la paix, « afin d’en faire de véritables agents de la paix dans leur communauté ».

L’accent doit être mis sur les changements climatiques, a plaidé à son tour le Liban qui, appuyé par Saint-Vincent-et-les Grenadines, la France et la République de Corée, a insisté sur la prise en compte de la problématique écologique dans la consolidation de la paix. 

En tant que l’un des principaux fournisseurs de contingents, le Bangladesh a insisté sur les efforts de renforcement de capacités dans les pays sortant de conflit.  La Gambie, qui sort d’un conflit, a justement magnifié sa collaboration avec la CCP, avant que le Burundi ne souhaite la poursuite des activités de la CCP en faveur de la paix et la réconciliation qui font partie des priorités du nouveau Président burundais.  La Thaïlande a promis de poursuivre son soutien aux travaux de la CCP, et la Chine s’est réjouie de constater que la CCP remplit le mandat qui lui avait confié à sa création.

En début de séance, la CCP a également adopté, tacitement, le rapport de ses travaux pour l’année écoulée.  Le rapport sera considéré comme définitivement adopté après la fin de la procédure de silence qui régit désormais, COVID-19 oblige, les procédures d’adoption de documents officiels par les organes onusiens.

La CCP est un organe consultatif intergouvernemental de l’ONU, créé en 2005, avec pour objectif principal l’appui aux efforts de paix dans les pays touchés par un conflit.  Elle est composée de 31 États Membres, élus au sein de l’Assemblée générale, du Conseil de sécurité et du Conseil économique et social (ECOSOC), mais aussi des principaux contributeurs financiers et contributeurs de troupes aux opérations de maintien de la paix.

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