Sixième Commission: les délégations saluent le retour à « la riche tradition » d’échanges avec la Commission du droit international
La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a entendu, ce matin, le Président de la Commission du droit international (CDI), M. Mahmoud Daifallah Hmoud, présenter le dernier rapport de la CDI adopté à l’issue de sa soixante-douzième session. Un retour à « un semblant de normalité » puisqu’il n’avait pas été possible pour la Commission de tenir sa session en 2020, ni d’adopter un rapport, en raison de la pandémie de COVID-19. À l’instar de la Sierra Leone, les délégations ont, elles aussi, salué ce retour à la « riche tradition » des échanges entre la CDI et la Commission.
À l’entame de son propos, le Président a rappelé que c’est la Sixième Commission qui donne son « imprimatur » aux instruments négociés sur la base des projets rédigés par la CDI. M. Hmoud a précisé que la CDI a tenu sa soixante-douzième session à Genève, du 26 avril au 4 juin 2021 pour la première partie de la session et du 5 juillet au 6 août 2021 pour la seconde partie. La pandémie a continué d’affecter le déroulement de la session, puisque la CDI s’est réunie sous forme hybride et n’a pu accueillir le séminaire de droit international pour la deuxième année consécutive.
Détaillant ce rapport long de 227 pages chapitre par chapitre, le Président a fait état de progrès substantiels lors de la session. La Sixième Commission a ensuite entamé l’examen d’un premier groupe (Cluster one) de chapitres du rapport de la CDI: chapitres I à III (chapitres introductifs), chapitre IV (Protection de l’atmosphère), chapitre V (Application à titre provisoire des traités) et chapitre X (Autres décisions et conclusions de la Commission).
La CDI a ainsi adopté en seconde lecture l’ensemble du projet de directives sur la protection de l’atmosphère, composé d’un projet de préambule et de 12 projets de directive. Ce projet a été au cœur des interventions de la quinzaine de délégations à s’être exprimées. « Nous sommes convaincus que ces directives seront un ajout précieux au droit international de l’environnement », a déclaré la Suède, au nom des pays nordiques.
Même son de cloche du côté de l’Égypte, qui a salué le projet de directive 4 qui dispose que les États ont l’obligation de procéder à une évaluation de l’impact sur l’environnement des activités projetées relevant de leur juridiction. Un bémol est venu de la Sierra Leone qui a regretté l’exclusion de principes consacrés en droit international de l’environnement: « pollueur payeur », « principe de précaution » ou « responsabilités communes mais différenciées ». « Cette approche est hautement regrettable et ne doit pas constituer un précédent. »
L’Union européenne a, elle aussi, insisté sur « l’importance du principe de précaution », en recommandant de l’appliquer à tous les domaines. De son côté, la délégation de l’Iran, si elle a marqué son accord avec la CDI sur l’obligation de coopérer pour la protection de l’atmosphère, a dénoncé « les mesures coercitives unilatérales inhumaines et illégales » imposées contre son pays, principal obstacle à une coopération dans ce domaine. Les délégations ont aussi abondamment discuté de l’application à titre provisoire des traités.
Avant d’entrer plus en détail cette semaine dans le contenu de ce rapport, les délégations ont formulé des commentaires d’ordre général sur le fonctionnement de la CDI. Le délégué du Ghana, au nom du Groupe des États d’Afrique, appuyé par la Sierra Leone, a ainsi plaidé pour une représentation géographique équitable en son sein, en notant qu’un seul membre africain est rapporteur spécial. « Il y a une grave sous-représentation de membres africains depuis 72 ans. » Le délégué de la France a, lui, souligné l’importance de la diversité linguistique au sein des travaux de la CDI, « le droit international ne devant être le reflet d’une langue unique ».
L’Australie a demandé à la CDI d’expliquer le format de ses travaux sur un sujet donné et de préciser s’il s’agit d’un développement progressif du droit international ou alors d’une codification. Le Portugal a demandé des précisions sur le rôle des décisions judiciaires et des enseignements les plus qualifiés dans la détermination des règles existantes du droit international. Plusieurs délégations ont pris note des difficultés financières de la CDI et, à l’instar de la Suède, appuyé la recommandation de créer un fonds d’affectation spéciale pour y remédier.
Les délégations ont aussi appuyé certaines candidatures pour les prochaines élections à la CDI. La France a ainsi soutenu la candidature de M. Mathias Forteau, tandis que la Sierra Leone a souhaité que M. Charles Chernor Jalloh soit réélu. Enfin, la Commission a observé une minute de silence à la mémoire de James Crawford, de l’Australie, ancien juge à la Cour internationale de Justice (CIJ) et membre de la CDI, Rapporteur spécial sur la responsabilité des États pour fait internationalement illicite, disparu en mai dernier.
La Commission poursuivra ses travaux demain, mardi 26 octobre, à 15 heures.
RAPPORT DE LA COMMISSION DU DROIT INTERNATIONAL SUR LES TRAVAUX DE SA SOIXANTE-DOUZIÈME SESSION - A/76/10
M. MAHMOUD DAIFALLAH HMOUD (Jordanie), Président de la Commission du droit international (CDI), a présenté le rapport de la soixante-douzième session de la CDI, qui s’est tenue à Genève du 26 avril au 4 juin 2021 pour la première partie de la session, et du 5 juillet au 6 août 2021 pour la seconde partie.
Le Président a salué la tenue de ce débat à la Sixième Commission et le retour d’un semblant de normalité après une période difficile. « Le droit international nous rapproche même par temps de péril. » Il a indiqué que la Commission et la CDI ont un intérêt partagé en ce qui concerne le développement progressif et la codification du droit international. La Commission donne ainsi son imprimatur aux instruments négociés sur la base des projets rédigés par la CDI. Il a indiqué que la session de la CDI s’est déroulée selon un format hybride, avant de noter les progrès substantiels accomplis pendant ladite session.
M. Hmoud a repris le résumé des travaux de la Commission qui figure au chapitre II du rapport. La CDI a ainsi adopté en seconde lecture l’ensemble du projet de directives sur la protection de l’atmosphère, composé d’un projet de préambule et de 12 projets de directive, ainsi que les commentaires y relatifs. La CDI a également adopté en seconde lecture l’ensemble du Guide de l’application à titre provisoire des traités, composé de 12 projets de directive et d’un projet d’annexe contenant des exemples de dispositions relatives à l’application à titre provisoire d’un traité, ainsi que les commentaires y relatifs.
En ce qui concerne le sujet « Immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État », avec l’adoption de 6 projets d’articles sur les aspects procéduraux, la CDI est proche d’achever sa première lecture. La CDI a également enregistré des avancées substantielles sur les sujets « Succession d’États en matière de responsabilité de l’État », « Principes généraux du droit » et « L’élévation du niveau de la mer au regard du droit international ». La CDI a, par ailleurs, décidé d’inscrire le sujet « Moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international » à son programme de travail à long terme, a précisé le Président.
M. Hmoud a attiré l’attention sur la question des ressources budgétaires en ce qui concerne les prochaines sessions, en proposant la création d’un fonds d’affectation spéciale, avant de souligner l’adaptation de la CDI aux contraintes imposées par la pandémie. La Présidente de la Cour internationale de Justice (CIJ), Mme Joan Donoghue, s’est ainsi exprimée devant la CDI de manière virtuelle le 22 juillet dernier, tandis que la CDI n’a pas pu accueillir pour la deuxième année consécutive le Séminaire de droit international.
Avant de détailler ce rapport de 227 pages chapitre par chapitre, le Président a précisé que la prochaine session de la CDI se déroulera à Genève du 18 avril au 3 juin et du 4 juillet au 5 août 2022.
M. HAROLD ADLAI AGYEMAN (Ghana), au nom du Groupe des États d’Afrique, a remercié la Commission du droit international (CDI) pour le travail qu’elle a effectué. Il a rappelé que le processus de développement du droit international doit toujours être « un processus inclusif » et il a suggéré à la CDI de renforcer la coopération avec les commissions régionales du droit international. Il s’agit également de s’inspirer des systèmes juridiques du monde entier, a-t-il souligné. Le délégué a mis l’accent sur l’importance d’une représentation géographique équitable dans les travaux de la CDI, regrettant que celle-ci n’ait qu’un seul rapporteur spécial africain. « Assurer une représentation géographique équitable renforcera la légitimité de la Commission du droit international et de ses travaux », a-t-il estimé.
M. GUSSETTI, délégué de l’Union européenne, s’est félicité du contenu du chapitre IV intitulé « Protection de l’atmosphère », particulièrement de sa recommandation d’une « approche intégrée » pour lutter contre la pollution de l’air, et de ses « directives équilibrées ». L’Union européenne (UE) insiste sur « l’importance du principe de précaution », recommandant de l’appliquer à « tous les domaines ». Le délégué a salué le contenu du paragraphe 4 de la directive 3, qui dit que « la référence aux États aux fins du projet de directive traduit le fait que les États ont la possibilité d’agir individuellement ou conjointement, selon qu’il convient ». L’Union européenne va appliquer ces directives pour produire des normes, et pour en garantir la mise en œuvre, a-t-il assuré.
Concernant le chapitre V intitulé « Application à titre provisoire des traités », l’UE se félicite des recommandations du Guide de l’application à titre provisoire des traités. Ayant activement participé aux débats autour du Guide, elle apprécie que ses observations aient été suivies dans le texte final, comme la mention que le champ d’application ne se limite pas aux États mais inclut aussi les organisations internationales, et l’accent mis sur la « nature souple » des traités. Cependant, il a regretté que la Commission du droit international (CDI) n’ait pas fourni de précisions concernant « l’exigence d’acceptation expresse et de l’inapplicabilité du régime juridique ».
M. NESSER (Suède), au nom des pays nordiques, a salué les résultats substantiels obtenus par la CDI en dépit du format hybride de ses travaux imposé par la pandémie. La CDI n’a pas été en mesure d’avoir ses échanges habituels avec les parties prenantes, a-t-il regretté, en espérant qu’ils reprennent lors de la prochaine session. Il a aussi souligné les préoccupations exprimées par la CDI sur le plan financier et noté la proposition de créer un fonds d’affectation spéciale afin d’y remédier. Le délégué s’est dit ouvert à cette idée, tout en notant que les ressources nécessaires à l’exécution du mandat de la CDI doivent être apportées par le budget ordinaire de l’ONU. Il a salué l’inscription du sujet « Moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international » au programme de travail à long terme de la CDI.
En ce qui concerne le sujet « Protection de l’atmosphère », le délégué a loué le travail accompli compte tenu « du mandat limité » conféré sur ce sujet. Il a salué l’inclusion de l’expression « sujet de préoccupation pour l’humanité tout entière » dans le préambule des projets de directive, qui reprend le libellé de l’Accord de Paris et autres instruments internationaux. Il a également salué la recommandation faite à l’Assemblée générale de prendre acte du projet de préambule et de directives sur la protection de l’atmosphère dans une résolution, d’annexer le projet de directives à la résolution et d’en assurer la plus large diffusion possible. « Nous sommes convaincus que ces directives seront un ajout précieux au droit international de l’environnement. »
S’agissant du sujet « Application à titre provisoire des traités », les pays nordiques se félicitent de l’adoption du Guide de l’application à titre provisoire des traités, composé du texte des projets de directive et du projet d’annexe contenant des exemples de dispositions relatives à l’application à titre provisoire, qui est d’une grande importance pratique. Leur délégué a salué la référence à l’article 24 de la Convention de Vienne sur le droit des traités contenue dans le commentaire aux projets de directive 3 et 5. Il a aussi salué le libellé de la directive 4 qui dispose que l’application à titre provisoire d’un traité peut être convenue au moyen d’un traité distinct ou de « tout autre moyen ou arrangement ». Enfin, il appuyé le projet de directive 7 sur les réserves qui dispose que « les projets de directive sont sans préjudice de toute question concernant les réserves relatives à l’application à titre provisoire d’un traité ».
M. MĀRTIŅŠ PAPARINSKIS (Lettonie), au nom de la Lituanie, de l’Estonie et de la Lettonie, a apprécié que l’ensemble du projet de directives sur la protection de l’atmosphère prenne en compte le fait que l’atmosphère est d’une importance essentielle pour le maintien de la vie sur Terre, la santé et le bien-être humains, ainsi que pour les écosystèmes aquatiques et terrestres. « L’atmosphère est la plus grande ressource naturelle de la Terre et l’une des plus importantes », a-t-il déclaré, avant de rappeler que l’objectif du droit international est de faire en sorte que la planète reste habitable, ce qui nécessite de prendre en compte les intérêts des générations futures.
Concernant le Guide de l’application provisoire des traités de la CDI, adopté en deuxième lecture cette année, M. Paparinskis a rappelé que l’application provisoire se caractérise par la capacité de s’adapter à diverses circonstances pour donner effet immédiat à un traité, mais sans se substituer à l’entrée en vigueur des traités ni contourner les procédures internes. Le Guide est susceptible d’être d’une aide considérable aux praticiens, a-t-il estimé, puisque le Guide et ses commentaires répondent à un certain nombre de questions importantes concernant l’application provisoire. Le délégué a cependant souligné que l’application provisoire est essentiellement volontaire et facultative, et que les États et les organisations internationales peuvent convenir de solutions plus appropriées non identifiées dans le Guide. Les pays baltes auraient apprécié que les commentaires du projet de directive 4b contiennent davantage de précisions sur l'exigence énoncée d'acceptation expresse et sur l’inapplicabilité du régime juridique des déclarations unilatérales concernant l’application provisoire au moyen d’une déclaration, un point soulevé à plusieurs reprises dans les déclarations de l’Union européenne, a rappelé le délégué. Par ailleurs, il a salué la décision de la Commission d’inclure dans son programme à long terme le sujet des moyens subsidiaires pour la détermination des règles du droit international.
Commentant le chapitre IV sur la « Protection de l’atmosphère », M. BURHAN GAFOOR (Singapour) a noté que l’impact de la pollution atmosphérique pouvait souvent être ressenti dans plusieurs États. Il s’agit d’un « problème à multiples facettes » ne pouvant être résolu d’une seule manière. Le délégué a appuyé la recommandation de la Commission du droit international (CDI) sur les projets de directive, qui fournissent, selon lui, des orientations précieuses et auront une utilité concrète pour les États. M. Gafoor a pris pour exemple le projet de directive 8 sur la coopération internationale, affirmant que les États ont l’obligation de coopérer, selon qu’il convient, entre eux et avec les organisations internationales pertinentes pour protéger l’atmosphère contre la pollution atmosphérique et la dégradation atmosphérique. Les principes d’égalité souveraine et de bonne foi, tels que cités par la Commission dans le commentaire du projet de directive 8, guident cette coopération, a ajouté le délégué.
Concernant le chapitre V, « Application à titre provisoire des traités », le délégué de Singapour a salué l’approche globale encouragée par le Guide de l’application à titre provisoire des traités. Ce Guide fournit des indications pratiques, importantes et concises aux États et aux organisations internationales sur la manière dont les traités peuvent être appliqués à titre provisoire, et sur les effets juridiques de cette application provisoire, a-t-il commenté. Au sujet du projet de directive 4 sur la « Forme de l’accord », il a apprécié que la CDI ait répondu aux préoccupations que Singapour avait auparavant soulevées. M. Gafoor a ici fait référence à des amendements soulignant « l’exigence du consentement à l’application provisoire d’un traité ou d’une partie d’un traité entre les États et les organisations internationales concernés ». Concernant le projet de directive 6 sur l’« Effet juridique », Singapour est d’avis qu’un accord entre États ou organisations internationales pour appliquer provisoirement un traité ou une partie d’un traité pourrait « créer une obligation juridiquement contraignante ». La création d’une telle obligation dépend, en définitive, de l’intention des parties, et de ce qu’elles ont convenu, a analysé M. Gafoor.
M. ALHAJI FANDAY TURAY (Sierra Leone) s’est félicité du retour à cette « riche tradition » d’échanges entre la Commission et la CDI, malgré les contraintes imposées par la pandémie. Il a rappelé que le processus de codification du droit international doit être « inclusif » et considérer les traités et la pratique des États tout comme la doctrine. Il doit s’appuyer sur les principaux systèmes juridiques dans le monde, y compris le droit coutumier africain, a dit le délégué. Il a salué les résultats obtenus par la CDI lors de sa toute première session hybride. En ce qui concerne le sujet « Protection de l’atmosphère », il a salué le fait que le préambule reconnaisse les besoins des pays en développement, ainsi que la situation spécifique des États côtiers et des petits États insulaires en développement face à l’élévation du niveau de la mer. Il a néanmoins regretté l’exclusion du projet de directives sur des principes consacrés en droit international de l’environnement, tels que le « principe de précaution » ou les principes de « pollueur payeur » et de « responsabilités communes mais différenciées ». Cette approche est hautement regrettable et ne doit pas constituer un précédent, a-t-il dit.
M. Turay s’est ensuite félicité de l’adoption du Guide de l’application à titre provisoire des traités, composé du texte des projets de directive et du projet d’annexe. Il a commenté le projet de directive 7 qui dispose que « les présents projets de directive sont sans préjudice de toute question concernant les réserves relatives à l’application à titre provisoire d’un traité ». Le délégué a ainsi noté l’absence d’une pratique pertinente à ce sujet. Il a ensuite plaidé pour une représentation géographique équitable au sein de la CDI en notant qu’un seul membre africain est rapporteur spécial. Il a donc souhaité une approche équilibrée en ce qui concerne la sélection des rapporteurs spéciaux, en soulignant la grave sous-représentation de membres africains depuis 72 ans. Il a salué l’inscription du sujet « Moyens auxiliaires de détermination des règles de droit international » au programme de travail à long terme de la CDI et demandé qu’il soit inscrit à son actuel programme de travail le plus rapidement possible. Enfin, la Sierra Leone souhaite que le professeur Charles Jalloh soit réélu pour un second mandat au sein de la CDI pour les années 2023 à 2027.
M. NASER ASIABI POURIMANI (République islamique d’Iran) a marqué son accord avec la Commission du droit international (CDI) sur l’obligation de coopérer pour la protection de l’atmosphère, avant de dénoncer « les mesures coercitives unilatérales inhumaines et illégales imposées à la République islamique d’Iran comme le principal obstacle à toute coopération dans ce domaine ». Sur le sujet de l’application à titre provisoire des traités, M. Pourimani a félicité la Commission pour l’adoption du Guide de l’application à titre provisoire des traités et des commentaires y relatifs. Il a souligné que l’article 25 de la Convention de Vienne sur le droit des traités offrait simplement aux États la possibilité d’une application provisoire sans l’imposition d’aucune obligation. Rappelant que le principe du consentement prévaut en droit international, il a estimé que définir un régime de « responsabilité en cas de violations » par analogie, dans la directive 8, est incompatible avec la nature du régime de l’application provisoire. Pour lui, cette directive saperait la volonté des pays d’appliquer les traités à titre provisoire. Enfin, s’agissant des autres décisions et conclusions de la Commission et de l’inscription du sujet « Moyens subsidiaires pour la détermination des règles du droit international » dans son programme de travail à long terme, le représentant a salué les études de la Commission sur les sources du droit international.
M. ALABRUNE (France) a soutenu la candidature de M. Mathias Forteau à la Commission du droit international (CDI) pour les prochaines élections. Le délégué a ensuite appelé à la poursuite du dialogue entre la Sixième Commission et la CDI, et promu la diversité linguistique durant les travaux, « le droit international ne sachant être le reflet d’une langue unique ». Il a encore appelé à un esprit « constructif et collectif » s’agissant de négocier une convention internationale, comme sur la base du projet d’articles de la CDI consacré à la prévention et à la répression des crimes contre l’humanité, que la France considère comme un modèle du genre.
Concernant le chapitre IV sur la protection de l’atmosphère, le délégué a jugé le sujet important pour l’humanité dans son ensemble et pour les générations futures. Pleinement engagée dans ce domaine, la France se réjouit d’un projet « utile » et « équilibré ». Le délégué a aussi fait observer que les directives n’avaient pas vocation à créer des obligations internationales, mais qu’elles servaient à « clarifier » et à « donner des directives » aux États. C’est en ce sens que la France comprend la directive 10 sur la mise en œuvre.
S’agissant du chapitre V consacré à l’application à titre provisoire des traités, le délégué a loué le Guide de l’application à titre provisoire des traités. La France a compris, là aussi, qu’il s’agissait de fournir des directives, et non des obligations juridiques. Il a noté que la circulaire française du 30 mai 1997 relative à l’élaboration et à la conclusion des accords internationaux figure parmi les documents mentionnés par le Guide, un « outil pratique bienvenu ». En outre, il a souligné que l’application provisoire d’un traité devait « demeurer exceptionnelle et ne saurait se présumer ».
M. AHMED ABDELAZIZ AHMED ELGHARIB (Égypte) a loué les grands progrès accomplis par la Commission du droit international (CDI) malgré les difficultés liées à la pandémie. Il a souligné l’importance d’une pleine inclusion des États aux travaux de la CDI, notamment sur le sujet « Immunité de juridiction pénale étrangère des représentants de l’État ». Il a salué le travail accompli sur le sujet « Protection de l’atmosphère » et l’obligation de protection prévue dans le projet de directive 3. Il s’est félicité du libellé du projet de directive 4 qui dispose que les États ont l’obligation de veiller à ce qu’il soit procédé à une évaluation de l’impact sur l’environnement des activités projetées relevant de leur juridiction. Il a souligné l’engagement de l’Égypte en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique. Le délégué s’est enfin félicité de l’adoption du Guide de l’application à titre provisoire des traités, composé des projets de directive et d’un projet d’annexe contenant des exemples de dispositions relatives à l’application à titre provisoire. « Ce Guide sera d’une grande importance pratique pour les États. »
M. PAVEL EVSEENKO (Bélarus) a appuyé le projet de directives sur la protection de l’atmosphère adopté par la Commission du droit international (CDI). À l’heure d’interpréter et d’appliquer des normes du droit international, il a estimé utile que les normes régionales ne créent pas d’obligations pour les tiers sans leur consentement. Sur l’application à titre provisoire des traités et la directive 9 intitulée « Extinction », le délégué a proposé de donner aux parties contractantes le droit de demander à mettre fin à l’application provisoire d’un traité international, lorsque l’une d’entre elle a notifié son intention de ne pas devenir partie au traité international, et dans le cas où l’application provisoire d’un traité international aurait un caractère durable.
Abordant la question de la protection de l’atmosphère, Mme ARIANNA CARRAL CASTELO (Cuba) a estimé qu’il fallait approcher le sujet de manière globale compte tenu de toutes les sources possibles de pollution atmosphérique. Elle a exprimé son désaccord sur la mention des transports comme « source principale de pollution atmosphérique ». « Ce qui importe, c’est la cause », a-t-elle corrigé, appelant à imaginer d’autres mécanismes d’audit en matière de pollution atmosphérique. « C’est aux pays développés principaux émetteurs de pollution atmosphérique de s’engager en priorité sur le plan international », a-t-elle fait valoir. Au sujet de l’application à titre provisoire des traités, la déléguée a recommandé d’éviter un « usage excessif » du Guide. La Convention de Vienne fait une place d’honneur au consentement des parties, a-t-elle rappelé, en demandant que la signature des États demeure un critère. Ce sont les États qui décident d’assumer des obligations, a-t-elle souligné, avant de déclarer que « l’application à titre provisoire ne saurait se substituer à l’entrée en vigueur ».
Mme ALEXANDRA HUTCHISON (Australie) a loué les grands progrès accomplis par la Commission du droit international (CDI) malgré les difficultés liées à la pandémie, avant de plaider pour une composition plus inclusive de la CDI. La déléguée s’est félicitée de l’adoption du Guide de l’application à titre provisoire des traités, composé des projets de directive et d’un projet d’annexe. Elle a rappelé que l’un des objectifs d’une application à titre provisoire est de faciliter une entrée en vigueur ultérieure des traités. Le texte des projets de directive est parvenu à un bon équilibre entre respect des procédures internes aux États et facilitation de la vie conventionnelle, a-t-elle dit, en appelant les États à fournir davantage d’informations sur leur pratique dans ce domaine. Enfin, la déléguée a souhaité que la CDI précise les raisons qui ont présidé au format de ses travaux sur un sujet donné, en expliquant notamment s’il s’agit d’un développement progressif du droit ou d’une codification.
Mme MATHU JOYIN (Afrique du Sud) s’est félicitée des projets de directive élaborés par la Commission du droit international (CDI). Sur la protection de l’atmosphère, elle a rappelé que ses effets dépassent le cadre national, avant de souligner que la cohérence des régimes juridiques est essentielle pour que les règles élaborées soient efficaces. Aussi, la déléguée a-t-elle estimé que les directives présentées sont une référence constructive. Concernant l’application à titre provisoire des traités, elle a indiqué que pour sa délégation, le Guide adopté par la CDI et les commentaires y relatifs comptent beaucoup. Selon elle, les lignes directrices pourront contribuer à l’application rapide de certaines dispositions des traités.
Mme LUCIA TERESA SOLANO RAMIREZ (Colombie) a apparenté les recommandations du rapport de la Commission du droit international (CDI) à ce qu’elle a qualifié de « soft law », à savoir des directives et non des obligations. Notant que le format des travaux de la CDI a été modifié par la pandémie, elle a salué le caractère malgré tout convivial des réunions hybrides mais espéré qu’elles pourront de nouveau se tenir en présentiel. La déléguée a invité la Sixième Commission à envisager des mécanismes qui lui permettraient d’étudier de manière globale les travaux de la CDI, afin de rendre leur collaboration plus efficace.
Mme VAZ PATTO (Portugal) a appuyé la recommandation de la Commission du droit international (CDI) d’inclure dans son programme de travail le sujet « Moyens subsidiaires de détermination des règles de droit international ». La Commission a consacré une grande partie de ses travaux au sujet classique des sources du droit international, en s’écartant de l’énoncé faisant autorité sur ces sources qui figure à l’Article 38, paragraphe 1 du Statut de la Cour internationale de Justice (CIJ), a relevé la déléguée. Cependant son alinéa (d) reste largement non traité par la Commission. La représentante a donc demandé à la Commission des précisions sur le rôle des décisions judiciaires et des enseignements les plus qualifiés dans la détermination des règles existantes du droit international, car ces références sont loin d’être cohérentes dans l’interprétation des cours et tribunaux, ce qui peut conduire à une fragmentation du droit international.
S’intéressant au chapitre IV, la déléguée a estimé que l’étude de la protection de l’atmosphère d’un point de vue juridique serait une bonne contribution à la recherche de solutions dans un cadre diplomatique plus large. Elle s’est dite heureuse de constater que les paragraphes du préambule de l’ensemble du projet de directives reconnaissent le rôle essentiel de l’atmosphère dans la protection et le maintien de la vie sur notre planète, et le fait qu’il s’agit d’une ressource naturelle à la capacité d’assimilation limitée. « Nous soutenons la doctrine reconnaissant que le droit de l’homme à l’environnement est en train de devenir un élément essentiel du droit international des droits humains. » La CDI a également réussi à donner des conseils sur l’un des plus grands défis sur ce sujet, a poursuivi la déléguée, à savoir la clarification des relations entre les règles pertinentes de différents domaines du droit international. Ainsi, ce projet de lignes directrices constitue une importante source d’inspiration pour les États afin qu’ils envisagent l’adoption de normes et de pratiques pour favoriser la protection de l’atmosphère, tout en tenant compte des domaines pertinents du droit international, comme le droit du commerce international et le droit des investissements.
S’agissant du chapitre V, le Portugal accueille favorablement le Guide de l’application à titre provisoire des traités, d’autant plus important que la violation d’une obligation découlant d’un traité ou d’une partie de ce traité appliqué à titre provisoire engage la responsabilité internationale. Insistant sur la nature volontaire du mécanisme d’application provisoire, la déléguée a noté que la directive 7 laissait la possibilité aux États ou organisations internationales de formuler une réserve relative à l’application provisoire d’un traité ou d’une partie d’un traité, notamment dans le but de se soustraire à ses effets juridiques. Elle a jugé ce Guide particulièrement pertinent du fait que le Portugal, conformément à son cadre constitutionnel, ne peut appliquer les traités à titre provisoire.