En cours au Siège de l'ONU

Soixante-seizième session,
8e séance plénière – après-midi
AG/J/3638

La Sixième Commission débat de l’opportunité d’une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité

La Sixième Commission, chargée des affaires juridiques, a entamé cet après-midi un débat contrasté sur la question des crimes contre l’humanité, après avoir terminé l’examen de son point relatif à la responsabilité pénale des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies. 

Malgré le dévouement du personnel onusien, salué encore aujourd’hui par la Jordanie, Madagascar ou le Maroc, et la politique de tolérance zéro promue par l’Organisation, la question de la suite donnée par les États aux allégations crédibles laissant présumer que leurs ressortissants ayant la qualité de fonctionnaires ou d’experts en mission ont commis une infraction continue de se poser.  Haïti a ainsi regretté que plus de 250 allégations parmi les 286 spécifiées dans les rapports du Secrétaire général soient restées sans réponse. 

Une trentaine de délégations ont ensuite examiné l’opportunité d’élaborer une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, en se fondant sur le projet d’articles adopté en 2019 par la Commission du droit international (CDI).

« Nous sommes convaincus qu’il existe un consensus autour des aspects essentiels du projet d’articles qui permette la négociation d’une convention », a déclaré la représentante de l’Union européenne, appuyée notamment par les pays nordiques et la Suisse.  Elle a souligné que les crimes contre l’humanité n’étaient pas régis par des conventions, contrairement au génocide et aux crimes de guerre, alors qu’ils peuvent être plus répandus.  Comprenant que certaines délégations hésitent à convoquer une conférence diplomatique à ce stade, elle a néanmoins rappelé qu’il existe des cadres institutionnels appropriés dans lesquels un débat préparatoire pourrait avoir lieu.  L’Union européenne recommande un mandat clair et un calendrier précis pour l’achèvement de ses travaux. 

Dans le même esprit, les États-Unis ont déploré que, 75 ans après les procès de Nuremberg, il n’existe aucun traité multilatéral spécifique sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  Faire avancer la discussion du projet de la CDI vers l’élaboration d'une convention sur ce sujet devrait être notre objectif commun, a ainsi estimé le délégué américain.   

Pourtant, l’idée d’aller de l’avant, soutenue encore par la Sierra Leone, le Bangladesh, le Brésil et le Mexique, ou prise en considération par l’Afrique du Sud et l’Inde qui y sont ouvertes, ne fait pas consensus au sein des États Membres. 

Plusieurs États, à l’instar de l’Égypte ou du Pakistan, ont jugé « prématuré » pour la Sixième Commission de se prononcer sur le projet d’articles de la CDI.  Sans être contre, l’Égypte demande ainsi davantage de temps pour étudier ledit projet.  Pour leur part, les Philippines jugent que l’élaboration d’une convention par l'Assemblée générale doit faire l’objet d’une délibération plus approfondie à la fois au niveau national et par la Sixième Commission, le temps de parvenir à un consensus. 

Par ailleurs, si le fait que le projet d’articles de la Commission du droit international se réfère au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) a été salué par le Liechtenstein et le Brésil, d’autres États ont souligné leur claire divergence à ce propos.  En effet, la Chine, l’Iran ou encore Cuba ont rappelé que le Statut de Rome n’est pas universel, un tiers des États Membres de l’ONU n’y étant pas parties.  Aussi, pour l’Iran, les tentatives visant à intégrer des définitions émanant d’instruments qui ne sont pas universels a encore éloigné les États du consensus.

Enfin, certaines délégations ont également craint la « politisation » de la convention.  La possibilité d’une application sélective au profit de certains pays d’un tel instrument, s’il venait à exister, préoccupe nombre de pays indépendants, a résumé l’Iran.  La Chine a redouté une pratique de deux poids, deux mesures, après avoir déploré que des pays l’aient accusée de crimes contre l’humanité tout en ayant eux-mêmes commis de tels crimes.  La Syrie, quant à elle, a dit que toute convention future doit tenir compte des buts et principes de la Charte, notamment la non-ingérence dans les affaires internes des pays.  De son côté, Israël a convenu qu’il fallait mettre en place des garanties efficaces pour empêcher les tentatives d’abuser du projet d’articles à des fins politiques.

La Sixième Commission poursuivra son débat au cours de sa prochaine séance, vendredi 15 octobre à 10 heures.

RESPONSABILITÉ PÉNALE DES FONCTIONNAIRES ET DES EXPERTS EN MISSION DES NATIONS UNIES - A/76/205A/76/208  (SUITE ET FIN)

Déclarations

M. WISNIQUE PANIER (Haïti) a regretté que plus de 250 allégations d’infractions parmi les 286 spécifiées dans les rapports du Secrétaire général soient restées sans réponse de la part des pays de nationalité des personnes mises à l’index. Il a espéré que les suites nécessaires seront données aux 67 affaires renvoyées aux États de nationalité des fonctionnaires ou experts en mission impliqués sur la période allant du 1er juillet 2020 au 30 juin 2021. M. Panier a également regretté que si des mesures disciplinaires ont été prises à l’égard de certains agents de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH), les poursuites pénales aient été tout simplement abandonnées par les autorités de leur pays de nationalité.  Par ailleurs, « le peuple haïtien se souviendra longtemps que l’épidémie de choléra avait été introduite dans le pays par des Casques bleus en 2010 », a-t-il prédit. Un fait que l’ONU n’a reconnu qu’en 2016, sans pour autant reconnaître la responsabilité juridique de l’Organisation. 

M. ALAA NAYEF ZAID AL-EDWAN (Jordanie) a salué le dévouement du personnel onusien et indiqué que le succès du maintien de la paix dépend de la crédibilité des fonctionnaires et experts des Nations Unies. Leur conduite doit suivre les normes de professionnalisme les plus élevées et respecter les réalités locales. Il a salué les progrès accomplis dans la réponse apportée sur ce dossier, tout en appelant les États à améliorer leur réponse pour que les responsables rendent des comptes. Le délégué a indiqué que le code pénal de son pays prévoit que les Jordaniens servant sous pavillon onusien soient bien traduits en justice pour les infractions commises. Des peines ont ainsi été prononcées, a-t-il dit. En conclusion, le délégué s’est dit en faveur d’un cadre international complet pour combler les lacunes juridictionnelles.

 M. DIAKITE (Sénégal) a rappelé la directive présidentielle de son pays du 24 mars 2016, qui appelait toutes les forces de défense et de sécurité engagées dans les missions de paix à observer rigoureusement les règles d’éthique en la matière, tout en instruisant les chefs de contingents à veiller à ce que tout manquement à ces règles fasse l’objet d’une enquête diligente et, le cas échéant, d’une sanction appropriée, dûment notifiée aux Nations Unies.  Au-delà de cet engagement politique, a poursuivi le délégué, le Sénégal est doté d’une législation pénale adaptée qui facilite les enquêtes et les poursuites à l’encontre des nationaux ayant commis des infractions graves hors du territoire sénégalais, dans le respect des règles et normes internationales.  Il a également évoqué l’importance de la formation des forces avant et pendant le déploiement, tout comme les sanctions disciplinaires et judiciaires à l’encontre des soldats impliqués.  À ce sujet, il a appelé à développer et renforcer les capacités nationales en matière d’enquêtes et de poursuites.

M. JAMES WARUI KIHWAGA (Kenya) a estimé qu’il fallait continuer à se concentrer sur la prévention des quelques incidents de conduite déplorables qui risquent de miner la crédibilité, la confiance et l'intégrité de l'Organisation.  À ce titre, il a salué les mesures déjà prises et les efforts du Secrétaire général en matière de sensibilisation, de vérification et de formation du personnel des Nations Unies.  Le délégué a également approuvé la directive interne instituant la tolérance zéro pour tous les comportements fautifs, en particulier en cas d'abus et d'exploitation sexuels.

Pour Mme JORGE (Angola), une façon d’atténuer le problème des infractions pénales des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies serait d'augmenter le nombre de conseillers pour la protection des femmes dans les opérations de maintien de la paix ; de suivre, d'analyser et de signaler les violences sexuelles liées aux conflits ; et d'améliorer la prévention, l'alerte précoce et les réponses rapides aux violences sexuelles liées aux conflits.  D'autre part et afin de s'assurer que les personnes accusées d'avoir commis de tels crimes soient traduites en justice, les États qui ne l'ont pas encore fait doivent établir leur compétence pour les crimes commis au cours des missions, a soutenu le délégué.  L'Angola a pour sa part exhorté les États fournisseurs de contingents à prendre toutes les mesures nécessaires pour s'assurer que des mécanismes disciplinaires internes sont en place.  Elle a également prié les États de coopérer pour fournir une assistance dans les enquêtes pénales ou les procédures d'extradition concernant des infractions mineures commises par des fonctionnaires et experts en mission, ainsi qu'à assurer la protection des victimes.

Mme MIANGOLA RAJAONA (Madagascar), représentant un pays fournisseur de contingents et de personnels de police, a salué le travail qu’elle a qualifié d’héroïque des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies. Néanmoins, elle s’est inquiétée du nombre d’allégations d’infractions pénales visant certains d’entre eux et a réitéré l’engagement total de son pays en faveur de la politique de tolérance zéro. « Nous nous devons d’assurer que les privilèges et immunités ne puissent entraver la compétence des États à poursuivre ces crimes », a-t-elle ajouté.

Mme LBADAOUI (Maroc) a salué le dévouement du personnel onusien. Elle a indiqué que les infractions pénales sont condamnables et que l’immunité des fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies ne peut être une excuse si leur responsabilité pénale est engagée. La déléguée a prôné une politique de tolérance zéro vis-à-vis de l’exploitation et des atteintes sexuelles. Elle a demandé que toute allégation fasse l’objet d’une enquête sérieuse avant que l’auteur des faits ne soit traduit devant les tribunaux de l’État dont il est ressortissant. La déléguée a demandé des actions de prévention et plaidé pour une formation du personnel onusien aux réalités locales afin de prévenir toute infraction.  Les contingents marocains font l’objet de formations ciblées en matière de droit de l’homme et de droit humanitaire avant tout déploiement, a-t-elle relevé. Il est essentiel d’épuiser les voies de recours internes et de ne pas créer de concurrence entre instances internationales et juridictions nationales, car c’est à ces dernières de se saisir des infractions commises par leur ressortissant, a-t-elle insisté. En conclusion, elle a demandé un renforcement des capacités nationales en matière de justice, estimant qu’il s’agit d’un élément primordial de la quête de justice.

M. LIU YANG (Chine)a souligné la nécessité d’appliquer une politique de tolérance zéro pour lutter contre l’impunité. L’État de nationalité devrait prendre toutes les mesures judiciaires et législatives nécessaires, a-t-il insisté. Il a également appelé les Nations Unies à renforcer les mesures à sa disposition pour appliquer la politique de tolérance zéro et garantir l’obligation de rendre des comptes. De même, il faut se concentrer sur le renforcement de l’éducation et la formation, sur la sensibilisation à titre préventif. Le délégué a également attiré l’attention sur la nécessité de promouvoir la coopération et de dégager des synergies internationales ; l’État de nationalité et l’État hôte doivent coopérer en matière d’extradition et d’entraide judiciaire. De son côté, le système de l’ONU doit améliorer la coordination et la cohérence des politiques et procédures pour éviter toute infraction. Évoquant ensuite la politique chinoise, le délégué a cité le code pénal du pays. Si des fonctionnaires de nationalité chinoise sont soupçonnés, la Chine peut exercer sa compétence pénale, a-t-il expliqué. Enfin, il a mentionné les nombreux traités multilatéraux et d’entraide judiciaire existant entre la Chine et d’autres États.

Mme ALESSANDRA FALCONI (Pérou) a condamné toute conduite allant à l’encontre des législations nationales et internationales, non seulement de la part du personnel en uniforme, mais de tous les fonctionnaires et experts en mission des Nations Unies. Elle a précisé que les signalements de certains Péruviens font l’objet d’enquêtes et que le Pérou prend des mesures pour éviter que ces situations ne se reproduisent. Pour la déléguée, les priorités devraient être de fournir un soutien aux victimes, une aide aux enfants en cas de paternité contestée, des enquêtes rapides et rigoureuse sur les cas signalés, des sanctions pénales et le renforcement des mesures de prévention.

CRIMES CONTRE L’HUMANITÉ

Déclarations

Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour prévenir les crimes contre l’humanité et garantir qu’ils ne restent pas impunis, a appelé Mme SIMONA POPAN, déléguée de l’Union européenne (UE), s’exprimant également au nom de certains pays candidats.  Pour la délégation, une nouvelle convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité constituerait une étape supplémentaire dans cette direction.  « Cela fait partie intégrante de nos efforts communs pour renforcer la responsabilité des violations graves du droit international. »  Mme Popan a souligné que les crimes contre l’humanité n’étaient pas régis par des conventions, contrairement au génocide et aux crimes de guerre, alors qu’ils peuvent être plus répandus que le génocide ou les crimes de guerre. Une nouvelle convention offrirait, selon elle, un outil juridique important pour prévenir et punir les crimes contre l’humanité, ainsi qu’une nouvelle base juridique pour la coopération interétatique.  À cet égard, la déléguée a tenu à rappeler l’initiative d’entraide judiciaire soutenue par l’UE qui vise à renforcer la coopération interétatique dans la poursuite des auteurs de crimes internationaux.  

Mme Popan a ensuite salué l’adoption du projet d’articles sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité par la Commission du droit international (CDI).  « Nous sommes convaincus qu’il existe un consensus autour des aspects essentiels du projet d’articles qui permette la négociation d’une convention. »  Si elle a compris que certaines délégations hésitent à convoquer une conférence diplomatique à ce stade, elle a néanmoins rappelé qu’il existe des cadres institutionnels appropriés dans lesquels un débat préparatoire pourrait avoir lieu.  Un comité ad hoc pourrait offrir un cadre idéal à cet effet mais ne devrait pas être une fin en soi. Il faut donc un mandat clair et un calendrier précis pour l’achèvement de ses travaux, a-t-elle conclu. 

Au nom des pays nordiques, Mme FIELDING OBO NORDIC (Suède) a rappelé qu’il n’existe pas encore d’instrument sur les crimes contre l’humanité, avant d’ajouter qu’un tel instrument contribuerait à la lutte contre l’impunité.  Elle a indiqué que le projet d’articles préparé par la Commission du droit international (CDI) recèle « un potentiel » pour aboutir à une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, qui serait d’une grande importance pratique. « Cela serait un ajout appréciable au cadre international existant et promouvrait la coopération entre États et des enquêtes efficaces. »  La déléguée a estimé qu’il y a soutien substantiel pour une telle convention. « Le processus ne doit pas être retardé. » Elle a enfin estimé que les préoccupations de certains États Membres en ce qui concerne le projet d’articles pourrait être réglé grâce à des discussions transparentes et inclusives entre experts. « Un comité ad hoc avec un mandat clair et un calendrier défini pourrait être un bon format pour ces discussions. »

M. YONG-ERN NATHANIEL KHNG (Singapour) a déclaré que le projet d’articles de la Commission du droit international (CDI) sur les crimes contre l’humanité peut contribuer à l’établissement des responsabilités et salué les efforts de la CDI. Néanmoins, ce projet peut encore être amélioré et clarifié, notamment en ce qui concerne la manière de régler les conflits de compétence, a-t-il argué. Le délégué a ensuite renvoyé aux commentaires faits par sa délégation sur ledit projet d’articles. En conclusion, il a pris note des divergences sur la suite à donner à ce projet d’articles.

M. ALHAJI FANDAY TURAY (Sierra Leone) a appelé la Sixième Commission à pleinement respecter le travail de la Commission du droit international (CDI) et son rôle dans la codification et le développement du droit international. Nous réitérons notre soutien à l’élaboration d’une convention pour lutter contre les crimes contre l’humanité, a affirmé le représentant. Cela obligera les États à prévenir ces crimes plutôt que de sanctionner les auteurs, a-t-il insisté, appelant les États à élaborer leurs propres législations et systèmes judiciaires. C’est à la Sixième Commission d’agir face aux crimes contre l’humanité qui continuent à être perpétrés en toute impunité, a-t-il fait valoir. D’après lui, la Sixième Commission doit recourir aux nombreux outils dont elle dispose pour progresser sur les recommandations de la CDI. La meilleure façon d’utiliser le temps qui lui est imparti serait de se consacrer sur les modalités de la marche à suivre sur le sujet.

M. NASIR UDDIN (Bangladesh) a rappelé que les crimes contre l’humanité constituent l’un des crimes les plus graves, et que le Bangladesh en a fait l’expérience en 1971, lorsque 3 millions de civils ont perdu la vie, et que des femmes ont été victimes de violences sexuelles.  Le Bangladesh reste donc attaché à la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  Le Bangladesh coopère avec la Cour Pénale internationale (CPI), notamment en ce qui concerne les Rohingya, victimes de déplacements forcés de la part du Myanmar, a rapporté le délégué.  Il a rappelé que la responsabilité principale en matière de protection incombe aux États eux-mêmes.  Dans la mesure où les crimes contre l’humanité mettent en péril la paix et la sécurité internationales, le Conseil de sécurité devrait jouer un rôle important dans la prévention de tels crimes, a fait valoir le délégué.  Il a salué le rôle joué par la CPI, chargée de sanctionner les auteurs de crimes contre l’humanité.  Enfin, le Bangladesh aimerait qu’une convention devienne réalité et considère que le projet d’articles de la Commission du droit international (CDI) est un bon point de départ.

M. NASER ASIABIPOUR (République islamique d’Iran) a indiqué que les vues fragmentées sur le projet d’articles de la CDI montre qu’il n’y a pas de consensus. D’après lui, les tentatives visant à intégrer des définitions émanant d’instruments qui ne sont pas universels a encore éloigné les États du consensus. Il a déclaré qu’il y a une accumulation d’instruments sur le sujet plutôt « qu’un vide normatif » en citant le Statut de Rome de la Cour pénale internationale ou bien encore la multiplicité des pratiques nationales et internationales. « Nous doutons qu’une nouvelle convention sera un développement positif », a-t-il dit, en ajoutant qu’elle ne fera qu’ajouter à l’accumulation de normes existantes.  L’idée d’une application sélective et politisée au profit de certains pays d’une telle convention, si elle venait à exister, préoccupe nombre de pays indépendants, a conclu le délégué.

D’après M. ABDELAZIZ ELGHARIB (Égypte), le projet d’articles de la Commission du droit international (CDI) reprend des éléments très utiles, mais il contient de nombreux problèmes juridiques soulevés précédemment par sa délégation, notamment le fait qu’il fasse référence au Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) qui n’est pas universel.  Le délégué a donc jugé prématuré pour la Sixième Commission de se prononcer sur le projet d’articles. Selon lui, pour appeler une conférence diplomatique en vue de l’adoption d’une convention, il faudrait que tous les États Membres aient assez de temps pour étudier ledit projet et harmoniser leur législation nationale. En bref, l’Égypte n’est pas contre une convention sur le principe à condition de disposer de davantage de temps pour la tenue d’un débat de fond sur ce projet d’articles. « Un calendrier ne peut pas être imposé. »

 Mme ARUMPAC-MARTE (Philippines) a salué une nouvelle fois le travail de la Commission du droit international (CDI) et le projet d’articles, « contribution importante aux efforts collectifs de la communauté internationale pour lutter contre les crimes d’atrocité ». Pour les Philippines, les crimes les plus graves ne doivent pas rester impunis, chaque État ayant le devoir d’exercer sa compétence pénale en la matière. Les Philippines, a-t-elle rappelé, ont promulgué dès 2009 une loi nationale sur les crimes contre le droit international humanitaire, le génocide et autres crimes contre l’humanité. « Les crimes contre l’humanité y sont définis comme une liste d’actes commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique dirigée contre toute la population civile. » Une définition en accord avec celle du projet d’articles, a-t-elle souligné, ajoutant cependant que le concept de persécution était élargi. Notre loi mentionne spécifiquement la persécution sur la base de l’orientation sexuelle, a-t-elle indiqué. À ce stade, l’élaboration d’une convention par l'Assemblée générale doit faire l’objet d’une délibération plus approfondie à la fois au niveau national et par cette Commission, a jugé la déléguée. Elle a mis en garde contre un lancement prématuré des négociations à cette fin. Elle a rappelé les préoccupations soulevées par les États concernant leur souveraineté et la politisation des droits humains. La question du renforcement des capacités nationales en la matière ainsi que les implications des articles sur l’extradition et l’entraide juridique sont également essentielles à la mise en œuvre des engagements. Pour les Philippines, la Sixième Commission est le principal forum pour l’examen des questions juridiques à l'Assemblée générale. Elle ne doit donc pas se hâter pour organiser une conférence diplomatique si aucun consensus n’a été atteint à ce jour. 

M. YUSNIER ROMERO PUENTES (Cuba)a dit que la lutte contre l’impunité en ce qui concerne les crimes contre l’humanité est essentielle, avant de saluer le projet d’articles de la Commission du droit internationale (CDI). Il a estimé qu’aucun État n’est plus efficace pour réprimer de tels crimes que l’État de lieu de commission ou l’État de nationalité des victimes. Ce n’est que lorsque ces États ne veulent pas ou ne peuvent pas exercer leurs compétences qu’il convient d’explorer d’autres pistes, a dit le délégué. Notant les divergences qui subsistent autour de ce projet d’articles, il a préconisé la constitution d’un groupe de travail afin d’aller de l’avant.  La définition de crimes contre l’humanité du projet d’articles s’appuie sur le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) alors même que plusieurs pays n’ont pas rejoint cet instrument. Il a estimé que toute convention sur le sujet ne devra pas entrer en conflit avec les législations nationales ou tout instrument international existant. « Il convient de ne pas se disperser. » Le délégué a mis en garde contre toute adoption prématurée dudit projet, en rappelant que le caractère contraignant d’un instrument découle du consensus forgé lors des négociations. On ne peut dire que la CPI soit un organe législatif chargé d’élaborer des instruments du droit international, a-t-il tranché, tout en saluant sa contribution. « Ce projet d’articles n’est pas une codification du droit mais un effort de développement progressif du droit. »

Rappelant qu’en 2019 la Commission du droit international (CDI) avait proposé un projet d’articles et recommandé l’adoption d’une convention, M. GENG SHUANG (Chine) a estimé qu’une convention doit se baser sur un consensus. Or, les positions divergent, a-t-il souligné. De plus, pour ce qui est de l’application, il n’y a pas de pratique étatique établie, a-t-il poursuivi. Enfin, le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) n’est pas international : un tiers des Membres des Nations Unies n’y ont pas souscrit.  Le délégué a déploré que des pays aient accusé la Chine de crimes contre l’humanité, tout en ayant eux-mêmes commis de tels crimes, suivant une démarche de « deux poids, deux mesures » et une pratique politisée.  La Chine est d’avis qu’il est trop tôt pour élaborer une convention dans les circonstances actuelles. Elle est favorable au débat sur les crimes contre l’humanité dans le cadre des comités existants sans imposer une convention ou un échéancier, le temps de dégager des consensus et de consolider la volonté internationale. 

Mme LUCIA TERESA SOLANO RAMIREZ (Colombie), soulignant l’importance du travail de la Cour du droit international (CDI), a insisté sur la nécessité d’avoir une coopération optimale entre la CDI et la Sixième Commission.  Évoquant ensuite l’élaboration d’une convention pour la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, la déléguée a estimé qu’un instrument juridiquement contraignant permettra de consolider le droit international.  Mais il pourrait y avoir quelques ajouts, a-t-elle souligné.  Même si dans notre droit pénal, nous n’avons pas la mention de crimes contre l’humanité, la Colombie a comblé cette lacune grâce à la jurisprudence de ses hautes cours et à des directives transmises aux procureurs, a expliqué la déléguée.  Elle a par ailleurs jugé essentielle la participation des victimes au processus pénal.  Il faut donc rajouter une définition de ce qu’est une « victime » dans le projet d’articles, a-t-elle proposé.  Sans cela les États ne seront pas en mesure d’identifier de façon systématique les victimes de crimes contre l’humanité.  

M. SINA ALAVI (Liechtenstein) a rappelé qu’il n’existe actuellement aucune convention internationale autonome consacrée à la prévention et à la répression des crimes contre l’humanité, alors qu'il existe des traités pertinents pour les autres crimes dits fondamentaux.  Travailler à une future convention sur les crimes contre l’humanité est donc essentiel pour garantir la justice pour les victimes de ces crimes atroces, a déclaré le représentant.  M. Alavi s’est aussi félicité du travail de projet d’articles sur les crimes contre l’humanité de la Commission du droit international (CDI), et du fait qu’elle ait utilisé le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) comme base, « la seule bonne chose à faire » selon lui.  Aussi, pour le délégué, l’élaboration d’une convention sur les crimes contre l’humanité est complémentaire et non concurrente des efforts visant à formaliser la coopération interétatique pour la poursuite nationale des crimes les plus graves de portée internationale par l’adoption d'un traité d’entraide judiciaire.

M. AMARAL ALVES DE CARVALHO (Portugal) a jugé impératif que les États tiennent compte de la recommandation de la Commission du droit international (CDI) et convoquent une conférence diplomatique pour négocier et adopter une convention sur la base du projet d’articles relatif à la prévention et à la répression des crimes contre l’humanité.  Le Portugal est fermement convaincu que la Sixième Commission doit remplir son rôle et progresser sur ce point de l’ordre du jour, tout en étant conscient des divergences d’opinion sur le calendrier et la forme d’une discussion qui pourrait conduire à l’élaboration d'une convention sur la base des travaux de la CDI.  « Ces différences ne doivent pas piéger la Sixième Commission dans une répétition stérile d'arguments conduisant à un cycle d’examen et de report des projets d'articles sans action concrète », a mis en garde le délégué.  Rappelant l’initiative d’entraide judiciaire, il a souhaité œuvrer ensemble vers un objectif commun à savoir un cadre juridique international efficace et complet pour la lutte contre ces crimes.  « L’existence des deux projets ne doit pas servir d'excuse pour ne faire avancer aucun d’entre eux », a-t-il plaidé.

M. MOLEFE (Afrique du Sud) a rappelé que l’Afrique du Sud était encore victime, il y a 27 ans, d’un crime commis contre sa diversité humaine. « 27, c’est aussi le nombre d’années passées en prison par Nelson Mandela. »  Il a appuyé l’idée d’élaborer une convention sur les crimes contre l’humanité, avant d’insister sur l’importance du principe de complémentarité dans le droit pénal international.  Si les cours nationales ont un rôle à jouer, c’est aux États qu’il revient d’enquêter et de poursuivre les auteurs d’infractions internationales, a dit le délégué.  Il a précisé que le droit sud-africain prévoit une infraction de crime contre l’humanité.  « Nous sommes ouverts quant à la voie à suivre en vue de l’élaboration d’une telle convention, pour autant que ce processus conduise au plus grand nombre de ratifications possibles. »  Il n’y a pas de guérison sans responsabilisation, a conclu le délégué.

 M. JULIAN SIMCOCK (États-Unis) a rappelé le rôle déterminant des États-Unis dans les premières poursuites pour crimes contre l’humanité à Nuremberg.  Les États-Unis ont également soutenu les efforts ultérieurs visant à poursuivre des auteurs de crimes contre l’humanité devant des tribunaux pénaux internationaux ad hoc, hybrides et les tribunaux nationaux d’un certain nombre de pays, a-t-il assuré.  Cependant, 75 ans après les procès de Nuremberg, il n’existe aucun traité multilatéral spécifique sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité, a-t-il dénoncé.  « En revanche, la prévention et la répression du génocide et des crimes de guerre font l’objet de traités multilatéraux largement ratifiés, ce qui a contribué au développement du droit international. »  Le délégué a donc appelé à combler le vide du cadre juridique international crée par l’absence d’un tel traité sur les crimes contre l’humanité. 

À cet égard, le projet final d’articles de la Commission du droit international (CDI) sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité constitue une étape importante, a-t-il noté, saluant le travail du Rapporteur spécial pour ce projet, M. Sean Murphy.  Une interaction solide entre les États et la CDI est d’une importance vitale, a souligné M. Simcock.  Il a ensuite reconnu que les États avaient un éventail de points de vue sur le projet final d’articles.  Nous pensons que les articles peuvent et doivent être modifiés sur certains points essentiels, a indiqué le délégué.  Toutefois, a-t-il estimé, la meilleure façon d’y parvenir est de poursuivre les discussions au sein d’un comité ad hoc doté d’un mandat suffisamment solide qui reconnaît la gravité de ce sujet.  Pour les États-Unis, cette approche serait la plus à même de garantir l’efficacité dans la pratique de toute future convention et sa large ratification par les États.  Faire avancer la discussion de ce projet vers l’élaboration d’une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité devrait être notre objectif commun, a conclu le délégué. 

Mme SARAH WEISS MA’UDI (Israël) a rappelé les discussions concernant les projets d’articles qui ont eu lieu lors des soixante-quatorzième et soixante-quinzième sessions de la Sixième Commission et a noté les points de vue très divergents des États Membres, à la fois en ce qui concerne le contenu substantiel des projets d’articles, ainsi que leur forme future.  Compte tenu de ces différences, Israël estime que des discussions significatives et inclusives entre les États devraient avoir lieu, en vue de parvenir à un consensus sur cette question.  Parmi les domaines qui restent à traiter à cet égard, figure la nécessité de mettre en place des garanties efficaces pour empêcher les tentatives d’abuser des projets d’articles à des fins politiques, a poursuivi Mme Weiss.  Israël estime notamment que plusieurs des projets d’articles ne reflètent pas correctement le droit international coutumier, y compris, entre autres, le projet d’article 6 (5), qui concerne l’immunité des représentants de l’État; et le projet d’article 6 (8), qui traite des mesures visant à établir la responsabilité pénale, civile ou administrative des personnes morales.

M. FOX DRUMMOND CANÇADO TRINIDADE (Brésil) a salué le travail de la Commission du droit international (CDI) sur le sujet des crimes contre l’humanité.  Le résultat est un document bien charpenté qui constitue une bonne base pour la négociation d’une convention, a jugé la délégation.  Nous avons noté que le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI) a inspiré une grande partie du projet d’articles, a-t-il salué, tout en rappelant la suggestion du Brésil d’inclure dans le préambule une référence au Statut de Rome sur l’interdiction générale du recours à la force en droit international.  Mais nous avons remarqué de manière positive que les commentaires des articles mentionnent que les États doivent s’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de la force contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, a-t-il reconnu.  Par ailleurs, le Brésil aurait souhaité voir dans le produit final un commentaire sur les questions de compétence.  Car s’il est nécessaire de garantir la responsabilité des crimes contre l’humanité, les moyens d’atteindre cet objectif doivent tenir compte de l’évolution du droit international, a expliqué le délégué.  Il a souligné que le projet d’articles sur les crimes contre l’humanité était postérieur à la mise en place du Statut de Rome.  Ses dispositions doivent donc renforcer ce système, a-t-il appelé, en donnant la priorité à la CPI lorsque l’État de détention n’a aucun lien avec le crime, les suspects ou les victimes. 

M. GIRET SOTO (Paraguay) a déclaré que le génocide, la torture et les disparitions forcées sont des infractions imprescriptibles dans son pays.  Il a salué le projet d’articles de la Cour du droit international (CDI) sur le sujet. Dans le contexte juridique actuel, l’adoption d’une convention sur la base dudit projet serait un grand pas en avant.  En effet, un tel instrument permettrait de redoubler les efforts des États contre de tels crimes, a expliqué le délégué.  Il a aussi souligné l’importance d’instaurer les conditions propices pour que de tels crimes ne se produisent pas.  Selon lui, il est « possible » de parvenir au consensus sur une telle convention, à condition de suivre un processus permettant à tous les pays de donner leur point de vue et de respecter un calendrier préalablement défini.

Mme FLORES SOTO (El Salvador) a salué les recommandations de la Cour du droit international (CDI), notamment quant à l’élaboration d’une convention sur la prévention et la répression des crimes contre l’humanité.  Nous souhaitons donner suite à ces recommandations grâce à des délibérations, a-t-elle indiqué.  Le code pénal salvadorien prévoit de statuer sur les infractions individuelles relatives à des crimes contre l’humanité.  Notre législation nationale prévoit aussi des dispositions relatives à la reconnaissance du principe de juridiction universelle concernant des infractions mettant à mal de manière importante les droits humains, a-t-elle précisé.  Elle a appelé la communauté internationale à ne pas laisser la paralysie due à la pandémie détourner son attention de l’objectif fixé, à savoir le renforcement du cadre international du droit pénal. 

M. MICHAL MLYNAR (Slovaquie) a estimé que le projet d’articles et ses commentaires constituent une base solide pour une codification ultérieure.  Nous avons également écouté avec attention les préoccupations de certains États sur des articles spécifiques, les faisant hésiter à organiser une conférence diplomatique, a ajouté le représentant.  Pour dissiper ces préoccupations, la Slovaquie est prête à travailler avec toutes les délégations pour mettre en place un processus concret et prévisible permettant des discussions de fond, a-t-il annoncé.  « Mais un tel processus ne sert toutefois à rien s’il ne débouche pas à un résultat concret. »  Le délégué a ensuite appelé à choisir le « bon scénario ».  Cela signifie ne pas tourner le dos aux victimes de crimes odieux, malgré la menace que représente la pandémie de COVID-19, a-t-il expliqué.  Il faut une réponse forte de la part de l’ONU renforçant la justice pénale internationale et la lutte contre l’impunité.  Il existe aujourd’hui un accord commun sur l’obligation fondamentale de prévenir et de punir les crimes contre l’humanité et sur la nécessité de combler un vide juridique, a souligné M. Mlynar en appelant les États à mettre de côté leurs différends politiques. 

M. ARROCHA OLABUENAGA (Mexique) a dit que la position de son pays sur le sujet reste inchangée.  Il a espéré que les discussions se concentreront sur la négociation d’un processus incluant tous les États et qui permettra d’étudier la recommandation de la Cour du droit international (CDI).  Le délégué a souhaité que ce processus aboutisse à une convention sur la base du projet d’articles afin de combler les lacunes juridiques existantes.  Il a appelé à se saisir de l’occasion qui se présente de « sortir de l’inertie » et de progresser dans le développement du droit international: la relation entre la Sixième Commission et la CDI en sortira renforcée.  Enfin, le délégué mexicain a invité à balayer les « positions manichéennes » sur ce sujet et à progresser dans la voie d’une convention.

M. QUYEN NGUYEN (Viet Nam) s’est dit convaincu que les États doivent assumer la responsabilité première de la prévention et de la répression des crimes graves.  Il ne faut ménager aucun effort pour renforcer la capacité des États à assumer cette responsabilité, notamment par le biais de la coopération internationale et l'entraide judiciaire, a-t-il insisté.  Le recours aux mécanismes pénaux internationaux ne devrait avoir lieu qu’après épuisement de toutes les mesures nationales.  Dans ce contexte, le délégué du Viet Nam a estimé que la nécessité d’une nouvelle convention sur les crimes contre l’humanité ainsi que son processus d’élaboration devraient être soigneusement examinés, y compris dans le contexte des défis auxquels sont actuellement confrontées les institutions pénales internationales.  Il faut étudier en profondeur les projets d’articles pour garantir leur conformité avec les principes du droit international, notamment avec la Charte, ainsi que leur compatibilité avec les législations nationales.  Si une convention internationale doit être élaborée sur cette base, il est essentiel que les différentes expériences et pratiques nationales soient pleinement prises en compte, a poursuivi le délégué. 

 La prévention des crimes contre l’humanité et leur répression sont essentielles, a martelé Mme SCHNEIDER RITTENER (Suisse).  Malheureusement, des décennies après l’adoption des conventions traitant le génocide et les crimes de guerre, il n’existe toujours pas de convention universelle sur les crimes contre l’humanité, a-t-elle regretté.  Nous avons maintenant l’opportunité de combler cette lacune, a-t-elle insisté, approuvant la recommandation de la Commission du droit international (CDI) d’élaborer une convention sur la base de son projet d’articles.  De plus, la convention aidera les États à mettre en œuvre leur responsabilité première d'enquêter sur ces crimes et favorisera la coopération interétatique, a-t-elle poursuivi.  Employons-nous donc à négocier des solutions aussi concrètes que possibles, a plaidé la déléguée.  Elle a attiré l’attention sur la nécessité d’un calendrier clair et la mise en place d’un comité ad hoc doté d’un mandat clair et spécifique.  La déléguée a également appelé la Sixième Commission à se montrer à la hauteur des enjeux.  C’est une question de crédibilité et d’efficacité.  Rappelant que le projet final d’articles avait été reçu en 2019, elle s’est dit convaincue que la Sixième Commission a les outils en mains pour décider des modalités et du calendrier nécessaires pour mettre en place un processus de négociation. 

Mme ZSUZSANNA HORVÁTH (Hongrie) a déclaré que compte tenu que les crimes contre l’humanité constituent une menace sérieuse pour la communauté internationale et l’ordre international fondé sur des règles, des mesures juridiques « fortes et efficaces » sont souhaitables pour les prévenir et traduire les auteurs en justice.  Cela est d’autant plus important que, contrairement aux crimes de guerre et au génocide, les crimes contre l'humanité restent pour la plupart en dehors du cadre des traités.  Par conséquent, a-t-elle estimé, il faut combler ce vide juridique avec une convention qui, par sa seule existence, contribuerait à lutter contre l’impunité et refléterait la forte détermination de la communauté internationale à cet égard.  La Hongrie est donc d’avis que le temps est, plus que jamais, venu de prendre de nouvelles mesures en vue de négocier et d’adopter un instrument international juridiquement contraignant basé sur le projet d’articles de la Cour du droit international (CDI).  Sa délégation appuie la création d’un comité ou d’un groupe de travail ad hoc au sein de la Sixième Commission, ouvert à tous les États Membres, observateurs et membres des institutions spécialisées, avec un double mandat: régler les problèmes qui entravent l’accord sur le projet d’articles et envisager d’autres mesures pour élaborer une convention, soit par l’Assemblée générale, soit par une conférence diplomatique internationale sur la base du projet d’articles. 

M. GEORG CHRISTIAN KLUSSMANN (Allemagne) a salué le projet d’articles de la CDI, en remerciant celle-ci d’avoir tenu compte des observations des délégations.  Il s’est dit en faveur de l’élaboration d’une convention sur la base dudit projet.  « C’est une bonne base pour des négociations fructueuses. »  Il a rappelé qu’il n’y a pas de convention spécifique sur le sujet, contrairement au crime de génocide et aux crimes de guerre.  Une nouvelle convention permettrait de donner un nouvel élan dans la répression de ces crimes et la lutte contre l’impunité, a conclu le délégué allemand.

 M. EDGAR DANIEL LEAL MATTA (Guatemala) a estimé que les crimes contre l’humanité revêtent une importance toute particulière pour la communauté internationale à cause de leurs conséquences sur la population civile, notamment les femmes et les enfants.  La responsabilité pénale de poursuivre les auteurs de ces crimes incombe aux États, a-t-il estimé, appelant à prévenir ces crimes en adoptant des mesures judiciaires et administratives.  Le travail du système international des droits humains aide également tous les États à prévenir ces crimes, a-t-il indiqué, soulignant notamment le rôle de la Cour pénale internationale (CPI).  L’engagement, le soutien et la coopération des États parties est incontournable pour renforcer les capacités de la CPI afin de garantir l’obligation de rendre des comptes, de rendre justice et de venir en aide aux victimes, a-t-il souligné.  Ma délégation juge prudent de convoquer une conférence intergouvernementale pour élaborer une convention sur les crimes contre l’humanité, dès lors qu’il s’agit d’une contribution importante au développement du droit international, a conclu le représentant. 

M. QASIM AZIZ BUTT (Pakistan) a déclaré que le projet d’articles de la CDI peut donner des orientations intéressantes pour les États.  C’est un bon point de départ mais il est encore trop tôt pour élaborer une convention sur la base dudit projet, a-t-il dit, en appelant à des discussions approfondies.  Les projets d’articles 7, 8 et 9 soulèvent toujours des préoccupations en faisant une large place au principe de juridiction universelle.  Les États ont besoin de plus de temps, a-t-il conclu, jugeant prématurée l’élaboration d’une convention.  Enfin, le délégué a souhaité que les discussions sur le sujet évitent l’écueil de la politisation.

M. MAREK ZUKAL (République tchèque) a souligné que les crimes contre l’humanité n’étaient pas suffisamment réglementés au niveau international.  Les règles couvrant d’autres crimes tel que le génocide ont déjà été codifiés, a-t-il rappelé, ce qui n’est pas le cas des crimes contre l’humanité.  De telles atrocités devraient nous amener à adopter des normes, a-t-il estimé.  « Nous souscrivons pleinement à des négociations pour l’élaboration d’une Convention sur les crimes contre l’humanité. »  L’heure est venue de décider de la marche à suivre, a insisté M. Zukal, estimant que le projet d’articles représente un modèle de traité de droit pénal moderne.  Il s’est également dit conscient que le contenu des articles nécessite une délibération approfondie.  Nous sommes d’avis que la Sixième Commission devrait convenir de la création d’un comité spécial chargé de délibérer, a-t-il précisé.  Le délégué a exprimé son espoir que la Sixième Commission décide de la marche à suivre. 

Mme KAJAL BHAT (Inde) a déclaré que les instruments existants couvrent déjà les crimes contre l’humanité, « comme en ont bien conscience les États parties au Statut de Rome ».  Une convention n’est pas nécessaire mais si les membres de l’ONU en éprouvaient le besoin alors le projet d’articles devrait être examiné, a-t-elle dit, en appelant à éviter les doublons.  « Il est trop tôt pour se prononcer sur ledit projet parce que les discussions approfondies manquent. »  Notant que le projet d’articles n’est « ni nouveau ni universel », la déléguée a mis en garde contre toute imposition d’instruments ne faisant pas l’objet d’un consensus.

M. ALTARSHA (République arabe syrienne) a condamné les crimes contre l’humanité sous toutes leurs formes. « Les délibérations sur les crimes contre l’humanité supposent que l’on réaffirme un principe fondamental: la responsabilité de la prévention et de la répression incombe au premier chef aux pays. »  Ces pays ont le droit souverain d’exercer leur compétence dans leurs tribunaux nationaux, a-t-il estimé.  Il est opportun de renforcer les institutions nationales en ce sens, a-t-il appelé, notamment grâce à l’entraide judiciaire à la demande du pays en question.  Toute convention future doit tenir compte des buts et principes de la Charte, notamment le principe de non-ingérence dans les affaires internes dans les autres États, a-t-il insisté.  Il faut également qu’elle soit adoptée par consensus.  Le délégué a approuvé la demande de certains États de procéder à un examen plus approfondi de cette question.  Cela doit se faire de façon « objective ».  Le délégué a appelé à condamner tous les crimes contre l’humanité, y compris ceux perpétrés par certains gouvernements à l’encontre d’autres pays dans le cadre de coalitions illicites et selon une interprétation « fallacieuse » de la Charte, sans le consentement de l’État en question.  C’est l’une des formes les plus modernes de crimes contre l’humanité perpétrés par certains gouvernements, a-t-il accusé.  « Il conviendrait que les pays qui s’érigent en défenseurs des victimes de crimes contre l’humanité évitent la politisation des questions des droits humains », a insisté le délégué.  

M. GALSTYAN (Arménie) s’est prononcé en faveur d’une nouvelle convention sur les crimes contre l’humanité en vue d’édifier un monde protégeant les droits humains.  C’est une obligation morale de notre pays, frappé par une telle tragédie, que d’encourager les efforts en la matière, a témoigné le délégué, en insistant sur le rôle préventif d’une telle convention.  En conclusion, il a condamné « les épurations ethniques conduites par des acteurs étatiques » et souligné de nouveau l’importance d’efforts de prévention de tels crimes.

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