En cours au Siège de l'ONU

Soixante-quinzième session,
100e séance plénière – matin
AG/12355

Malgré les réserves de plusieurs États Membres, l’Assemblée générale entérine les modalités des célébrations du vingtième anniversaire des textes de Durban

À l’occasion de la 100e séance de sa soixante-quinzième session, l’Assemblée générale a adopté, ce matin et par consensus, deux résolutions, dont une définit la portée, les modalités, la forme et l’organisation de sa réunion de haut niveau prévue le 22 septembre pour la célébration du vingtième anniversaire de l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  Un paragraphe traitant de la participation des ONG a toutefois suscité les réserves appuyées de plusieurs États Membres, notamment la Fédération de Russie et la Chine.  Le second texte entérine l’action de l’ONU concernant l’exploitation et les atteintes sexuelles. 

Déposée par le Président de l’Assemblée générale, M. Volkan Bozkir, et avalisée dans l’état, la première résolution a rassemblé les délégations sur ses intentions quant à l’élimination de toute forme de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et d’intolérance.  La formulation du paragraphe 10 de son dispositif, relatif au mode de sélection des ONG et organisations de la société civile susceptibles de participer à la réunion commémorative de septembre, a cependant créé la division.  Faute d’avoir vu ses propositions retenues, le G-77 (Groupe des 77 et la Chine) aurait ainsi préféré que ce paragraphe soit purement et simplement supprimé. 

Par la voix de la Guinée, le G-77 a rappelé qu’il avait suggéré que les ONG puissent participer à cet événement non seulement à partir d’une sélection par accord tacite, comme le prévoit le texte, mais également sur la base d’un consensus préalable, afin d’assurer la présence d’organisations n’ayant pas obtenu le statut consultatif auprès du Conseil économique et social (ECOSOC).  Pour la Chine, les États Membres auraient pu parvenir à un consensus sur cette question pour garantir la participation des ONG tout en préservant la nature intergouvernementale de l’Assemblée générale. 

De son côté, la Fédération de Russie s’est dissociée du paragraphe 10 au motif que son libellé ne correspond pas au règlement intérieur et aux pratiques de l’Assemblée générale.  Tout en se félicitant de la contribution de la société civile à la lutte contre le racisme et aux efforts des gouvernements pour la mise en œuvre du Programme d’action de Durban, la délégation a argué que cette participation ne doit pas aller à l’encontre de la nature de l’ONU et des processus intergouvernementaux établis.  Le Bélarus a, quant à lui, regretté que des États Membres continuent d’appuyer des mesures allant à l’encontre de la souveraineté de certains pays au nom de l’inclusion de la société civile aux travaux de l’ONU. 

L’Assemblée générale a également fait sienne une résolution qui réaffirme son attachement à la politique de tolérance zéro à l’égard de l’exploitation et des atteintes sexuelles dans l’ensemble du système des Nations Unies et prend acte du rapport du Secrétaire général sur cette question.  Bien qu’adopté par consensus, le texte a lui aussi cristallisé des oppositions sur son contenu. 

Le Mexique a déploré que le texte ne se concentre pas sur « les survivantes », les femmes et les filles étant pourtant les principales victimes de l’exploitation et des atteintes sexuelles.  Une position partagée par les États-Unis qui ont fait valoir qu’en complément de la notion juridique de victime, celle de survivant permet d’évoquer « la résilience et la capacité de se relever ».  Les deux délégations ont aussi regretté que le texte se limite aux opérations de maintien de la paix, alors que des violations sont commises dans un cadre plus large, à l’échelle de toute l’Organisation.  Pour y remédier, la mission américaine a souhaité que l’ONU travaille sur les facteurs qui sous-tendent ce phénomène et appuie les processus de reddition de comptes. 

L’Égypte, qui a présenté ce projet de résolution au nom d’un groupe de pays, a tenu à préciser que l’objectif du texte est précisément de garantir que les auteurs de crimes sexuels soient traduits en justice.  À cette fin, a-t-elle souligné, il garantit que des comptes soient rendus à tous les niveaux des Nations Unies, depuis le Siège jusqu’au terrain.  Le projet accorde aussi la priorité aux mesures de prévention des violences sexuelles, ainsi qu’à la mise en place de bonnes pratiques et à l’échange d'expériences, a-t-elle relevé.  

APPLICATION INTÉGRALE ET SUIVI DE LA DÉCLARATION ET DU PROGRAMME D’ACTION DE DURBAN

Présentation de la résolution L.128 

Explications avant le vote

L’Afrique du Sud, expliquant sa position avant le vote, a souligné la nature procédurale de la résolution.  Le texte reconnaît la contribution essentielle des parties prenantes de tous les secteurs à l’élimination du racisme, a-t-elle déclaré, en ajoutant qu’il cherche à rassembler les gouvernements, les universités et la société civile pour s’aligner vers cet objectif commun.  Remerciant les États Membres pour leur soutien et leur engagement constructif, elle a précisé que le paragraphe 10, relatif à la société civile et aux organisations non gouvernementales, avait été longuement débattu afin de dégager un consensus.

Explications après le vote

La Guinée, au nom du Groupe des 77 et la Chine (G-77), a expliqué sa position, et mis en avant l’appui indéfectible du groupe à l’égard de la déclaration du Programme d’Action pour éliminer toute forme de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et d’intolérance.  Qualifiant la Déclaration de « feuille de route holistique », elle a rappelé que le G-77 est uni par ses valeurs.  Elle a invité toutes les délégations à commémorer l’anniversaire de la déclaration et à prendre position contre les discriminations raciales exacerbées par la COVID-19.  Le G-77 a cependant exprimé un bémol concernant la rédaction du paragraphe 10 de la résolution, dont il aurait souhaité voir supprimée la fin, ainsi que sa note de bas de page. 

Dans sa version finale, le paragraphe 10 se lit comme suit: « Prie son président de dresser une liste de représentants d’autres organisations non gouvernementales concernées et d’organisations de la société civile, d’établissements universitaires et du secteur privé intéressés qui pourraient participer à la réunion de haut niveau, y compris aux tables rondes, compte tenu des principes de transparence, de représentation géographique équitable et de parité des genres, de soumettre cette liste aux États Membres pour examen selon la procédure d’approbation tacite et de la porter à son attention afin qu’elle puisse se prononcer sur la participation à la réunion de haut niveau. »

Le G-77 avait fait une autre proposition, parce qu’il souhaitait que les ONG participent aux événements sur la base d’un accord tacite des États Membres, et que la participation des ONG soit basée sur un consensus préalable, dans le but d’assurer la présence d’ONG n’ayant pas obtenu le statut consultatif.  Le groupe pense que les modalités qu’il avait proposées étaient équilibrées et encourageaient la participation de toute la société civile.  C’est pourquoi le groupe a exprimé sa déception.  Les membres du G-77, malgré leur position, se sont montrés souples, et ont accepté les propositions des cofacilitateurs, tout en les regrettant, a-t-il expliqué. 

La Fédération de Russie a souhaité présenter sa position sur les aspects d’organisation de la réunion prévue par la résolution.  Elle a estimé que la formulation du paragraphe 10 du dispositif décrivant les modalités de participation des ONG ne correspond pas au règlement intérieur et aux pratiques de l’Assemblée générale.  Tout en se félicitant de la contribution de la société civile à la lutte contre le racisme et aux efforts des gouvernements pour la mise en œuvre du Programme action de Durban, elle a jugé que cette participation ne doit pas aller à l’encontre de la nature de l’ONU et des processus intergouvernementaux établis.  Il s’agit, selon elle, d’une question de principe, qui permet de conserver la coopération entre les différentes entités.  À cette aune, la Fédération de Russie ne peut appuyer le libellé du paragraphe 10 et ne se rallie pas au consensus sur ce dernier.  

Le Bélarus a estimé que le travail sur le texte de cette résolution a montré des divergences entre États Membres.  Il a relevé que certains pays qui avaient boycotté la Conférence de Durban avaient annoncé qu’ils ne participeraient pas à la réunion de septembre 2021.  Il a regretté que d’autres États Membres continuent de prendre des mesures à l’encontre de la souveraineté de certains pays au nom de l’inclusion de la société civile aux travaux de l’ONU.  Le Bélarus, qui n’est pas d’accord avec cette approche, a appelé à tenir compte de la relation des gouvernements souverains avec leur société civile.  Le pays a regretté qu’il n’ait pas été possible de parvenir à un consensus sur les modalités de participation des ONG aux travaux de l’Assemblée générale.  Le Bélarus s’est donc dissocié du paragraphe 10 du texte de la résolution.

La Chine a déclaré que son pays appuie la tenue d’une réunion de haut niveau, le 22 septembre, pour adopter une déclaration politique sur le vingtième anniversaire de l’adoption de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.  C’est pourquoi la Chine s’est ralliée au consensus sur le projet de texte.  Mais la délégation appuie également l’avis exprimé par la Guinée sur le paragraphe 10 du dispositif et déplore que la position du G-77 et de la Chine n’ait pas été retenue.  La Chine a rappelé que son pays accorde une grande valeur aux contributions de la société civile, notamment des ONG, pour éliminer le racisme et la discrimination raciale.  La Chine est favorable à une participation harmonieuse et ordonnée des ONG dans les travaux de l’Assemblée générale, a-t-elle insisté.  Elle a toutefois jugé que les États Membres auraient pu parvenir à un consensus sur cette question pour garantir la vraie participation des ONG tout en préservant la nature intergouvernementale de l’Assemblée générale.  Elle a regretté que certains pays s’efforcent de faire fi des règles et mettent en péril la pratique de la non-objection.  Cela mine l’unité entre les États Membres, a conclu la Chine, en précisant qu’elle se dissocie du paragraphe 10. 

EXPLOITATION ET ATTEINTES SEXUELLES: APPLICATION D’UNE POLITIQUE DE TOLÉRANCE ZÉRO

Présentation de la résolution L.129

Explications avant le vote

L’Égypte, qui a présenté le texte, en a expliqué son objectif: il vise à garantir que les auteurs de crimes soient traduits en justice.  Il garantit donc que des comptes soient rendus à tous les niveaux des Nations Unies, depuis le Siège jusqu’au terrain.  Le projet accorde aussi la priorité aux mesures de prévention des violences sexuelles, ainsi qu’à la mise en place de bonnes pratiques et à l’échange d’expériences, a-t-elle déclaré. 

Explications après le vote

Le Mexique a déploré que les priorités nationales du Mexique ne figurent pas assez dans le texte final.  Sa position est que sans parité et sans égalité, il n’est pas possible d’évoluer dans des sociétés prospères.  Les femmes et les filles sont les principales victimes du phénomène combattu par la résolution, a-t-il observé, jugeant donc essentiel de se concentrer sur les survivantes.  Leurs témoignages donneront davantage de courage aux autres victimes de ces actes atroces, selon lui.

Le Mexique a regretté qu’il n’y ait pas de perspective différenciée femmes-hommes dans le texte.  Or, le traitement des cas doit être différencié, a-t-il estimé répétant que les femmes sont les principales victimes du phénomène.  Le Mexique a travaillé dans ce sens, pour obtenir les droits au dédommagement des survivantes, afin « d’éviter de les victimiser une deuxième fois », a-t-il fait valoir.

Il a également regretté que le texte se limite aux opérations de maintien de la paix, alors que les violations sont commises dans un cadre beaucoup plus vaste, à l’échelle de toute l’Organisation.  Le Mexique a enfin regretté que l’approche préventive ne soit pas davantage mise en avant. 

Les États-Unis appuient le principe d’une politique de tolérance zéro pour prévenir l’exploitation et les atteintes sexuelles.  Les États-Unis soutiennent la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, ont-ils souligné, estimant que l’ONU se doit d’agir contre l’exploitation et les atteintes sexuelles qui vont jusqu’à miner ses opérations sur le terrain.  Les Nations Unies doivent, selon eux, travailler sur les facteurs qui sous-tendent ce phénomène et appuyer les processus de reddition de comptes.  À cet égard, les États-Unis ont regretté que la résolution adoptée ne mentionne pas les survivants et survivantes.  Si le terme de victime est une notion juridique, celui de survivant permet d’évoquer la résilience et la capacité de se relever, ont-ils fait valoir, estimant que ces deux termes devraient figurer dans le texte.  Les États-Unis soutiennent une approche centrée sur les survivants et sur le respect de leur dignité, de leur bien-être et de leurs droits.  C’est pourquoi ils appuient la tolérance zéro préconisée par le Secrétaire général et le programme de riposte pour lutter contre ce phénomène odieux. 

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