En cours au Siège de l'ONU

8745e séance – matin
CS/14142

Yémen: le Conseil de sécurité exhorte les parties au conflit à progresser vers une désescalade afin de permettre une relance du processus politique

Le Yémen se trouve à un « moment critique », a averti aujourd’hui l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour ce pays, devant le Conseil de sécurité, appelant les parties au conflit à renoncer à l’option militaire pour progresser vers une désescalade et relancer un processus politique « qui n’a que trop tardé ».  Les derniers développements sur le terrain et leurs conséquences humanitaires ont également conduit plusieurs délégations à élever le ton à l’égard des houthistes, accusés d’ignorer les accords signés, de faire obstruction à l’aide et de se livrer à une guerre de la monnaie. 

De retour d’un déplacement au Yémen, la semaine dernière, M. Martin Griffiths a souligné que l’escalade observée à Jaouf, dans le nord du pays, risque de s’étendre à d’autres provinces, notamment celle de Mareb, et entraîner le Yémen dans un « nouveau cycle de violence irresponsable ».  Cela aurait des conséquences humanitaires catastrophiques et mettrait gravement en danger les civils, tout en retardant le processus politique aujourd’hui dans l’impasse, a-t-il prévenu, exhortant les parties à faire preuve de retenue afin que Mareb ne devienne pas « le nouvel épicentre du conflit ». 

Plus à l’ouest, la province de Hodeïda continue, elle aussi, d’être le théâtre d’affrontements meurtriers, tout particulièrement dans la ville et la partie sud du territoire, a ajouté l’Envoyé spécial.  Se déclarant inquiet de l’incident survenu au point d’observation conjoint de Hodeïda, qui menace de saper le mécanisme de désescalade et les avancées du Comité de coordination du redéploiement, il a déploré que la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH) ne puisse accéder à la ville depuis le 20 octobre dernier.  Il a par ailleurs fait état de combats à Sanaa, ainsi que dans les provinces de Dalea, Chaboua, Taëz et Saada, qualifiant de « réel » le risque de propagation de cette escalade à l’ensemble du Yémen. 

Dans ce contexte, et malgré quelques mesures de renforcement de la confiance prises de part et d’autre, à l’image de l’accord conclu à la mi-février pour un échange de prisonniers d’ampleur, M. Griffiths a reconnu qu’il y a « une limite à ce qui peut être atteint en l’absence de processus politique », appelant de ses vœux la relance de ces discussions afin de faire entrer le Yémen dans une phase de transition.  Mais avant cela, davantage doit être fait pour réduire l’impact sur les populations, a-t-il plaidé, appuyé par M. Ramesh Rajasingham, Sous-Secrétaire général aux affaires humanitaires et Coordonnateur adjoint par intérim des secours d’urgence, qui a sommé les parties de protéger les civils, conformément à leurs obligations en droit international. 

La situation sur le terrain demeure en effet alarmante.  Si les chiffres de 2019 font apparaître une baisse d’un tiers des victimes civiles par rapport à 2018, les enfants représentent désormais une victime civile sur quatre, contre une sur cinq en 2018, a relevé M. Rajasingham, ajoutant que plus de la moitié des décès sont survenus dans des habitations, soit une augmentation de 40%.  En 2020, les pertes civiles repartent à la hausse, avec en moyenne plus de six personnes tuées chaque jour, en partie en raison des combats à Jaouf et Mareb, lesquels ont déplacé des dizaines de milliers de personnes. 

S’agissant de l’accès humanitaire, le Sous-Secrétaire général a estimé que les restrictions imposées dans le nord du pays sont maintenant « intenables ».  L’objectif commun étant de maintenir l’aide aux millions de personnes qui en dépendent, il a indiqué qu’à cette fin, l’ONU avait intensifié le dialogue avec les autorités de facto.  Il leur a notamment été demandé de faire aboutir 71 projets d’aide en attente d’approbation, a-t-il précisé, avant de plaider pour l’envoi urgent de missions d’évaluation afin de garantir le maintien des programmes d’aide. 

Cette situation de blocage a fait réagir plusieurs délégations, à commencer par les États-Unis.  « Le temps presse.  Veuillez ne pas nous empêcher de continuer à fournir de l’aide dans les régions où vous êtes présents », a lancé la représentante à l’adresse des houthistes.  Appelant la milice soutenue par l’Iran à lever les restrictions d’accès et à permettre des évaluations et une surveillance sans entrave des projets humanitaires, elle l’a directement mise en demeure: en l’absence d’actions crédibles, Washington suspendra son aide aux zones contrôlées par les houthistes à la fin du mois de mars, à l’exception de certains programmes essentiels. 

À l’instar de plusieurs autres pays, dont la France, le Royaume-Uni s’est félicité que des signes d’amélioration se fassent jour sur le plan humanitaire dans le nord du pays, avant d’appeler les houthistes à respecter les exigences minimales établies par la communauté internationale.  La Belgique a, quant à elle, souhaité que soient supprimées les restrictions et obstructions qui violent les principes humanitaires, exhortant par ailleurs les houthistes à lever l’interdiction d’utilisation de nouveaux billets de banque dans les zones sous leur contrôle.  Une majorité de délégations ont, d’autre part, exigé de la milice qu’elle permette enfin aux équipes de l’ONU d’accéder au pétrolier Safer afin d’éviter une catastrophe environnementale. 

« Les miliciens houthistes sont allés trop loin », a renchéri le représentant du Yémen, accusant les houthistes de ne pas respecter l’Accord de Stockholm et d’entraver l’acheminement de l’aide vers des millions de Yéménites tout en s’en prenant aux zones résidentielles et aux lieux de culte, et en ciblant des femmes et des enfants.  Déplorant à son tour l’absence de mise en œuvre des accords conclus, tant à Stockholm qu’à Riyad, malgré les efforts de l’Envoyé spécial, la Fédération de Russie a plaidé pour un renforcement de la confiance entre les parties, d’autant plus que, selon elle, des « terroristes » profitent du chaos pour renforcer leur position dans le centre du pays. 

Cette séance était aussi la dernière à laquelle participait Mme Karen Pierce, Représentante permanente du Royaume-Uni, appelée à d’autres fonctions à Washington.  L’une après l’autre, les délégations lui ont rendu un hommage appuyé.  Reprenant la parole en fin de réunion, la représentante les a remerciées pour leurs propos aimables à son endroit, se disant « fière » de faire partie de la famille des Nations Unies, « force du bien ».

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT

Déclarations

M. MARTIN GRIFFITHS, Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, a estimé d’emblée que le pays se trouve aujourd’hui à un « moment critique ».  En effet, a-t-il averti, les parties au conflit vont soit progresser vers une désescalade et une reprise du processus politique, soit –ce qui est à craindre- opter pour davantage de violence et de souffrances, ce qui rendra plus ardu le retour à la table des négociations.  L’escalade militaire la plus alarmante s’est produite à Jaouf, a précisé M. Griffiths, indiquant que des milliers de familles ont été déplacées par les récents combats et ont urgemment besoin d’assistance et d’abris.  Cette escalade pourrait déclencher des conflits dans d’autres provinces et entraîner le Yémen dans un nouveau cycle de violence irresponsable.  Cela aurait des conséquences humanitaires catastrophiques mais aussi politiques et mettrait gravement en danger les civils, tout en retardant le processus politique qui n’a que trop tardé, a-t-il souligné.  Pour l’Envoyé spécial, les parties doivent donc faire preuve de retenue pour éviter une telle situation.  Il est, selon lui, impératif qu’elles respectent leurs obligations en droit international humanitaire. 

M. Griffiths a rappelé qu’il s’est rendu au Yémen la semaine dernière pour appeler à un arrêt des combats.  À Mareb, il rencontré des responsables locaux et de partis, des chefs tribaux et des représentants de la société civile ainsi que des personnes déplacées.  Il a dit avoir pris acte de leurs inquiétudes et les avoir assurés de son engagement à soutenir la paix au Yémen.  À Sanaa, il a également évoqué la nécessité de stopper les hostilités dans la province de Mareb, allant à la rencontre de représentants de tribus et de responsables communautaires pour entendre leurs vues.  À ses yeux, il est clair qu’il n’y a aucune justification à l’escalade militaire à Mareb.  Cette province ne doit pas devenir le nouvel épicentre du conflit, a-t-il insisté. 

Par ailleurs, a-t-il poursuivi, la province de Hodeïda continue d’être le théâtre d’affrontements, tout particulièrement dans la ville et la partie sud de ce territoire.  En conséquence, le nombre des victimes civiles s’alourdit.  Les événements survenus depuis l’incident d’hier au point d’observation conjoint de la ville de Hodeïda menace de saper le mécanisme de désescalade et les avancées du Comité de coordination du redéploiement.  Dans ce contexte, la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH), placée sous le commandement du général Guha, s’emploie à mener des médiations et à rétablir la confiance entre les parties, a-t-il indiqué, exhortant les belligérants à se plier aux mécanismes agréés pour permettre un retour au calme.  Il a également noté que la MINUAAH continue d’être confrontée à de graves limitations de mouvement.  Ses patrouilles n’ont pas été autorisées à accéder à la ville de Hodeïda depuis le 20 octobre 2019, ce qui l’empêche de mener à bien à son mandat. 

Dans le reste du pays, a poursuivi M. Griffiths, des combats se poursuivent dans le district de Nehm, à Sanaa, ainsi que dans les provinces de Dalea, Chaboua, Taëz et Saada.  De fait, il existe un réel risque de propagation de l’escalade militaire à l’ensemble du Yémen, a-t-il soutenu, jugeant que tout doit être fait pour aider les parties à inverser la trajectoire actuelle. 

Rappelant qu’il appelle, depuis le 1er janvier, à une désescalade immédiate et inconditionnelle et à une coopération avec son Bureau pour atteindre ce but, l’Envoyé spécial a estimé qu’il est impératif que les parties acceptent de participer à un mécanisme public et national de désescalade afin de sortir le pays de cette logique de guerre.  Il a indiqué avoir réitéré cet appel lors de son déplacement à Mareb et avoir reçu des réponses positives des parties.  Ces réactions doivent maintenant se traduire en engagements tangibles sur le terrain, a-t-il ajouté.  Ces discussions doivent en outre être renforcées par les efforts visant à relancer le processus politique, et ce, tout en prenant en compte les questions qui ont un impact sur la vie des personnes. 

L’Envoyé spécial s’est d’autre part joint au Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) pour condamner les sentences de mort prononcées par un tribunal de Sanaa, ce mois-ci, à l’encontre de 35 parlementaires yéménites.  La fragmentation et la politisation de la justice sont pour lui des sources de préoccupation importantes. 

Il a ensuite exprimé la conviction que la reprise rapide du processus politique est à portée de main.  Les 26 et 27 février, a-t-il indiqué, son Bureau a réuni un groupe de personnalités publiques et politiques.  Toutes ont estimé qu’une paix durable ne pourra résulter que d’un règlement politique négocié.  De nombreux participants à ces réunions ont appelé à une reprise des discussions sans conditions.  Certains ont toutefois fait part de leur frustration face à l’impasse dans laquelle se trouve le processus politique depuis les premiers pourparlers au Koweït en 2016.  M. Griffiths a également assuré qu’il avait entendu les appels lancés à l’occasion de ces réunions en faveur d’une participation des femmes aux consultations politiques. 

Dans ce contexte, l’Envoyé spécial s’est félicité que les parties continuent de prendre des mesures de renforcement de la confiance.  Il a ainsi salué les avancées dans la mise en œuvre de l’accord conclu à la mi-février sur un échange de prisonniers de grande ampleur.  Dans le même temps, des efforts se poursuivent pour s’assurer du bon fonctionnement du pont aérien médical qui doit permettre à des patients yéménites d’aller se faire soigner à l’étranger.  Toutefois, a-t-il admis, davantage doit être fait pour réduire l’impact sur les civils.  Les parties doivent notamment travailler assidûment à l’organisation d’échanges de prisonniers, à l’ouverture de routes d’accès à Taëz, Hodeïda et Mareb, et au paiement des salariés du secteur public dans tout le pays.  De plus, l’aéroport de Sanaa doit rouvrir, a-t-il plaidé, souhaitant que ces mesures humanitaires ne soient pas politisées.  Mais il y a une limite à ce qui peut être atteint en l’absence de processus politique, a-t-il conclu, appelant de ses vœux la relance de ces discussions afin de faire entrer le Yémen dans une phase de transition et de partage du pouvoir. 

M. RAMESH RAJASINGHAM, Sous-Secrétaire général aux affaires humanitaires et Coordonnateur adjoint par intérim des secours d’urgence, a relevé que la reprise des combats souligne l’urgence des cinq questions prioritaires que son Bureau soumet à l’appréciation du Conseil de sécurité depuis un an: premièrement, la protection des civils et le respect du droit international humanitaire; deuxièmement, l’accès et la livraison humanitaires; troisièmement, le financement de l’assistance des Nations Unies; quatrièmement, l’état de l’économie yéménite; et cinquièmement, les progrès vers la paix.

En ce qui concerne la protection des civils, une exigence du droit international humanitaire, il a rappelé que le nombre de victimes civiles avait diminué d’un tiers entre 2018 et 2019.  Même si c’est une bonne nouvelle, il a souligné qu’il existe aussi plusieurs tendances alarmantes.  Par exemple, les enfants représentent désormais une victime civile sur quatre, contre une sur cinq en 2018.  Plus de la moitié des victimes civiles sont faites maintenant dans les habitations, soit une augmentation de 40% par rapport à 2018.  En d’autres termes, même si la violence a globalement fait moins de victimes, elle est désormais plus susceptible de frapper aux endroits où les gens devraient se sentir le plus en sécurité.  Il n’est donc pas surprenant de constater que 90% de ces incidents entraînent un traumatisme psychosocial qui peut durer longtemps après la guérison des blessures physiques, a souligné le Sous-Secrétaire général.

En outre, les chiffres de 2020 laissent voir que les pertes civiles augmentent de nouveau.  En février, 187 civils ont été tués ou blessés à travers le Yémen, soit plus de six personnes par jour et une augmentation de 20% depuis janvier.  Une grande partie de cette augmentation est due aux combats qui ont lieu à Jaouf et Mareb, lesquels ont déplacé des dizaines de milliers de personnes au cours des dernières semaines.  Il a rappelé que Mareb est une zone qui accueille déjà plus de 750 000 déplacés, avant d’appeler à un cessez-le-feu dans tout le pays et d’inviter les parties à protéger les civils, conformément à leurs obligations en droit international. 

Il a ensuite évoqué la question de l’accès humanitaire sûr, rapide et sans entrave.  Dans le nord du pays, les restrictions sont devenues intenables, a-t-il reconnu, avant de souligner que tout le monde convient que de nouvelles approches sont nécessaires.  L’objectif commun étant de maintenir l’aide aux millions de personnes qui en dépendent pour survivre, il a dit que l’ONU a intensifié le dialogue avec les autorités de facto, afin de garantir que les conditions soient réunies pour faciliter ce travail. 

Le mois dernier, ces autorités de facto ont accepté de supprimer leur prélèvement de 2% sur les projets d’ONG.  Depuis lors, elles ont convenu d’un modèle de contrat d’accord avec les ONG.  Pour sa part, le Programme alimentaire mondial (PAM) est parvenu à un accord avec les autorités pour lancer immédiatement le reciblage et l’enregistrement biométrique.  M. Rajasingham a déploré le fait que de nouvelles conditions soient apparues en dernière minute, après plus de huit mois de difficiles négociations avec les autorités.  Il a dit que les Nations Unies ont fait savoir aux autorités de facto que les actions valent plus que les mots, leur demandant par exemple de faire aboutir ces 71 projets d’aide en attente d’approbation.  Nous avons besoin que plus de missions de suivi soient approuvées, a-t-il aussi plaidé, avant de demander des missions humanitaires d’évaluation en urgence afin de pouvoir maintenir des programmes d’aide respectant les normes internationales.  Tout cela devrait, a-t-il affirmé, permettre de maintenir des programmes d’aide dont les gens ont besoin.

Il a ensuite évoqué la question du pétrolier Safer qui n’a connue aucun progrès.  Des experts techniques indépendants ont récemment estimé qu’en dépit du scénario modélisé, presque tout le pétrole risque de s’échouer sur les côtes de Hodeïda et Hajja, et de dévaster les communautés côtières du nord, ainsi que les pêcheries et les zones marines dont elles dépendent.  Les pays voisins seraient également touchés, a-t-il mis en garde.  L’ONU entend donc prévenir une telle catastrophe et souhaite, comme première étape, mener une évaluation technique.

Le haut fonctionnaire a noté que les agences humanitaires sont également confrontées à des défis dans les zones contrôlées par le Gouvernement, mais pas dans la même mesure que dans le nord du pays.  Il a précisé que l’insécurité reste également un défi dans certaines parties du sud, rappelant que plusieurs incidents récents ont affecté l’action humanitaire. 

Au sujet du financement des opérations d’aide des Nations Unies, le Sous-Secrétaire général a affirmé que ces opérations au Yémen sauvent des millions de vies.  Plus de 13 millions de personnes reçoivent chaque mois une aide alimentaire et d’autres types d’assistance, a-t-il précisé.  Mais avec des retards dans les évaluations clefs dans le nord et le sud, il n’est pas encore possible de quantifier tout changement par rapport à l’année dernière ou de confirmer s’il existe des poches de besoins importants et non satisfaits.  Au fur et à mesure des évaluations, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) entend reconduire le plan d’intervention 2019 pour maintenir les programmes qui ont contribué à prévenir la famine, à faire reculer le choléra et à sauver des millions de vies.  Ce roulement technique nécessitera un financement considérable, mais probablement un peu moins que le plan de l’année dernière.  Si cette année a débuté avec une base financière très solide, les projections de revenus montrent que plus de 30 grands programmes seront réduits ou commenceront à fermer d’ici à la fin avril sans des fonds supplémentaires.  La réunion du 2 avril, à Riyad, pour mobiliser des fonds sera l’occasion de montrer l’engagement du monde envers le peuple yéménite, a dit le haut fonctionnaire. 

Sur le plan économique, il a noté que les importations commerciales de produits alimentaires et de combustibles continuent d’entrer dans le pays par les ports et conformément aux moyennes établies.  Néanmoins, peu de gens sont en mesure d’acheter ces produits du fait de la chute de la monnaie, le rial yéménite, dont la valeur reste bien en dessous de celle d’avant la crise.  Or cette dépréciation rapide a été un facteur clef qui a poussé le Yémen vers la famine en 2018.  L’une des solutions les plus efficaces au problème du taux de change est l’injection de devises étrangères pour renforcer la monnaie locale, a-t-il préconisé.

Enfin, il a parlé des progrès vers la paix, appelant à prendre des mesures audacieuses, comme l’ouverture de l’aéroport de Sanaa, afin de donner l’espoir au peuple que le dialogue politique prévaudra.  Même si les humanitaires ont remarquablement réussi à atténuer certaines des pires conséquences de cette crise pour les civils, M. Rajasingham a souligné que seule une solution politique pourra mettre fin la crise.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) s’est déclarée abasourdie du fait que les combats décrits aujourd’hui persistent au Yémen.  Elle a appelé les parties à promouvoir publiquement la désescalade, à l’échelle du pays.  Les négociations doivent s’intensifier et s’élargir pour pouvoir déboucher sur de réels progrès, a-t-elle ajouté.  Agissez de bonne foi pour que 2020 soit l’année où on mettra fin à ce conflit cataclysmique, a-t-elle lancé, engageant également les parties à appuyer les initiatives de l’Envoyé spécial.  Elle a aussi « imploré » toutes les parties à coordonner leurs efforts avec le général Guha.

S’agissant de l’accès humanitaire, elle a relevé des petits signes d’amélioration dans le nord, pour ensuite appeler les houthistes à respecter les exigences minimales établies par la communauté internationale.  Elle a de plus espéré que les résultats de la conférence du 13 février pourront se concrétiser.  La représentante s’est aussi inquiétée de l’état du pétrolier Safer.  On en entend parler chaque mois, et pourtant rien n’est fait, a-t-elle décrié, dénonçant l’inaction en la matière.  Les dégâts environnementaux doivent être évités à tout prix.

Mme Pierce s’est en outre inquiétée de la diminution des devises détenues par la Banque centrale et a estimé qu’un appui à hauteur de « un à deux milliards » semble nécessaire.  La monnaie doit se stabiliser pour permettre au Yéménites d’acheter vivres et médicaments, a-t-elle dit, avant d’avertir: « Nous nous rapprochons toujours plus du précipice. »  La représentante a aussi parlé de la COVID-19, notant les restrictions croissantes imposée dans la région et appelant à veiller à ce que celles-ci n’entravent pas l’action des agences.

M. ADEL BEN LAGHA (Tunisie) a commencé par saluer sa collègue britannique, dont cette réunion était la dernière.  Il lui a souhaité un plein succès dans ses nouvelles responsabilités à Washington.  Revenant à la situation au Yémen, le représentant a noté qu’un calme relatif y règne, signalant la possibilité d’avancées positives.  Cela étant, a-t-il déploré, des complications menacent le règlement politique et empêchent la mise en œuvre des accords.  La poursuite de cette escalade militaire aggrave la situation humanitaire et par voie de conséquence les souffrances de la population civile, a-t-il souligné.  Il a donc appelé à un accord de cessez-le-feu immédiat et à la poursuite des efforts permettant la reprise de discussions politiques, lesquelles constituent la seule voie pour un règlement durable. 

Le délégué a aussi demandé que les parties gèlent toute opération militaire, assurant soutenir sans conditions les efforts de l’Envoyé spécial et du Conseil pour renforcer le processus politique dans ce « pays frère ».  Dans ce contexte, les Yéménites continuent de souffrir d’une crise humanitaire sans précédent qui s’élargit du fait des combats, a-t-il souligné.  De fait, il faut lever tout obstacle à l’acheminement de l’aide, a-t-il insisté, félicitant les pays donateurs qui ont convenu de se retrouver le mois prochain.  Il a conclu en réaffirmant l’importance de permettre l’accès d’experts de l’ONU au pétrolier Safer pour éviter une catastrophe environnementale. 

Mme KELLY CRAFT (États-Unis) a regretté que la violence se soit intensifiée au Yémen, notamment lorsque les houthistes ont pris la ville de Hazm dans la province de Jaouf.  Elle a espéré que les parties se réengageront en faveur d’une désescalade suivie d’une reprise des pourparlers en vue d’une solution politique et a demandé instamment la pleine mise en œuvre de l’Accord de Riyad.  Lorsque l’ONU sera prête à convoquer des pourparlers, les parties devront être prêtes à constituer des délégations fortes et à représenter tous les Yéménites, y compris les femmes, a-t-elle prévenu.

Mme Craft s’est concentrée sur l’obstruction par les houthistes des opérations humanitaires, qui est devenu « le refrain inacceptable de ces séances d’information ».  Les États-Unis réitèrent leur message du mois dernier aux houthistes: « Le temps presse.  Veuillez ne pas nous empêcher de continuer à fournir de l’aide dans les régions où vous êtes présents. »  La représentante a regretté notamment que les entraves à l’aide aient déjà entraîné la fermeture de nombreux programmes d’aide.  Elle a donc exhorté les houthistes à lever les restrictions d’accès, à permettre des évaluations et une surveillance sans entrave des projets, à approuver les accords en retard avec les ONG, à mettre en œuvre l’enregistrement biométrique et à maintenir l’élimination des prétendues « taxes » sur les projets d’aide.  Les déclarations et les accords à eux seuls ne sauveront pas des vies, a-t-elle souligné en demandant aux houthistes de faire des progrès vérifiables et de s’engager à garantir les conditions de fonctionnement minimales pour la fourniture d’une assistance.  En l’absence d’actions crédibles de leur part, les États-Unis suspendront leur aide aux zones contrôlées par les houthistes au Yémen à la fin du mois de mars, à l’exception de certains programmes essentiels de sauvetage, a-t-elle mis en garde.

Parallèlement, les États-Unis sont activement engagés avec d’autres donateurs dans cet effort visant à créer un environnement propice à la fourniture de l’aide humanitaire -conformément au principe de l’indépendance- dans « la plus grande urgence humanitaire du monde ».  Ils reconnaissent cependant que chaque agence doit prendre sa propre décision concernant la suspension ou la réduction de l’aide.  Les États-Unis se félicitent de l’adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 2511 (2020) le 25 février, renouvelant le régime de sanctions au Yémen, et réitèrent l’obligation de tous les États Membres d’appliquer intégralement les sanctions.  Enfin, les États-Unis exhortent une fois de plus les houthistes à autoriser l’inspection et l’entretien par l’ONU du pétrolier Safer, leur demandant aussi de cesser d’utiliser le Safer comme monnaie d’échange.

Après avoir salué à son tour la représentante du Royaume-Uni, appelée à d’autres fonctions, M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) a exhorté une nouvelle fois les parties yéménites à la désescalade.  Il s’est dit extrêmement inquiet que les combats se poursuivent dans le nord du pays et que ces manœuvres militaires alimentent un cycle de violences toujours croissantes.  À ses yeux, une attaque sur Mareb serait particulièrement préoccupante.  Il a par conséquent appelé la partie houthiste à renoncer à vouloir s’emparer de cette province par la force, ce qui aurait des conséquences pour des milliers de civils et menacerait la sécurité de quelque deux millions de personnes déplacées.  Par ailleurs, a-t-il ajouté, la frappe aérienne qui a récemment touché le nord de Hodeïda est un rappel de la fragilité de la situation dans cette région et au-delà.  De fait, toutes les parties doivent se conformer au droit international humanitaire et protéger les populations et les infrastructures civiles, a souligné le délégué, rappelant que les femmes et les enfants paient le plus lourd tribut de ce conflit.  Toutes les parties doivent s’employer à alléger les souffrances des personnes les plus vulnérables et en faire leur priorité. 

M. Schulz a ensuite dit soutenir les efforts de l’Envoyé spécial qui visent à mettre en place un mécanisme de désescalade.  Sa visite à Mareb, le week-end dernier, est un signal très clair à cet égard, a-t-il commenté, exhortant toutes les parties à œuvrer à des mesures de confiance et à faire montre de bonne volonté.  Pour le représentant, les échanges de prisonniers sont des mesures cruciales pour parvenir à la reprise des discussions politiques.  Il a enfin demandé aux parties de coopérer pleinement avec la Mission des Nations Unies en appui à l’Accord sur Hodeïda (MINUAAH) et de permettre un accès sans entrave au pétrolier Safer afin d’éviter des dommages environnementaux. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) s’est dit toujours préoccupé par l’intensification des hostilités depuis le début de l’année, ce qui met en péril les progrès réalisés sur le plan politique.  Il s’est aussi inquiété des tensions dans le sud du Yémen.  Vu les conséquences dévastatrices de la situation sur la population civile, il faut de toute urgence un cessez-le-feu au niveau national et la reddition de la justice, a-t-il recommandé.  Le représentant a condamné les actions arbitraires commises contre les civils dans les zones contrôlées par les houthistes.  Il a appelé les parties en conflit à respecter le droit international, y compris le droit international humanitaire et les droits de l’homme. 

Le représentant a aussi attiré l’attention sur la détérioration de la situation humanitaire et exhorté les parties à fournir un accès sûr à l’aide.  Le problème des criquets pèlerins a aussi inquiété le représentant qui a souligné la menace que cela représente pour la sécurité alimentaire et demandé un appui de la communauté internationale à cet égard.  Il a insisté pour que les parties facilitent l’accès aux organisations pertinentes, pour éviter une situation encore plus catastrophique.  En outre, il a souligné les problèmes économiques que connaît actuellement le Yémen et appelé à trouver une solution pour éviter un effondrement de l’économie.  Pour conclure, il a réitéré la nécessité d’arriver à un accord politique large et inclusif, basé sur le respect mutuel et la mise en œuvre des engagements.

Mme INGA RHONDA KING (Saint-Vincent-et-les Grenadines) s’est dite préoccupée par la détérioration de la situation humanitaire au Yémen et par la lenteur des progrès sur le plan politique.  « Mais nous ne devons pas nous décourager », a-t-elle dit, ajoutant que le Conseil peut avoir de l’influence sur le terrain.  Elle a insisté sur la nécessité d’un dialogue mené par les Yéménites eux-mêmes, avec l’appui de l’ONU, loin de tout « aventurisme militaire ».  Un tel dialogue ne doit pas dépendre de la mise en œuvre des différents accords signés mais viser à instaurer la confiance pour conduire à une diminution des souffrances, a-t-elle dit.  Si elle a reconnu l’utilité des Accords de Stockholm et de Riyad, elle a affirmé qu’attendre une mise en œuvre plus complète desdits accords pour commencer des pourparlers de paix relève de l’inaction. 

« Sans progrès sur le plan politique, le conflit ne sera pas réglé », a prévenu la représentante.  Mme King a donc appelé les parties yéménites à œuvrer en faveur d’un cessez-le-feu et invité le Conseil de sécurité à, « au minimum », décourager tout acte susceptible de menacer la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays.  Enfin, Mme King a souligné le besoin d’une association de toutes les communautés du pays, y compris les plus marginalisées, au processus politique en vue d’une paix durable. 

M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a constaté que le processus de règlement politique piétine et que la situation humanitaire au Yémen se dégrade.  Ces facteurs nous rapprochent d’un point de non-retour et il sera alors impossible de reconstruire la mosaïque de l’État yéménite, a–t-il averti.  Il s’est inquiété des dégâts irréparables déjà subis par le pays et sa population.  Il faut absolument assainir la situation humanitaire, notamment en ouvrant l’aéroport de Sanaa, et dégager une solution politique au conflit, car, a-t-il souligné, les approches militaristes ne fonctionnent pas.

Poursuivant, le représentant a déploré que les Accords de Stockholm et de Riyad ne soient toujours pas mis en œuvre et a appelé à appuyer les efforts de l’Envoyé spécial.  Il a aussi averti que les terroristes profitent du chaos pour renforcer leur position dans le centre du pays.  Des mesures de confiance s’imposent, de même que l’imposition d’un cessez-le-feu à l’échelle du pays, a-t-il insisté, affirmant être convaincu que le renforcement de la confiance est encore possible.

Aux yeux de M. Safronkov, le conflit au Yémen ne pourra pas être résolu par des tentatives d’identification des coupables, car cela ne contribue, selon lui, qu’à compliquer la situation.  Il a attiré l’attention sur le concept russe de sécurité collective dans le golfe Persique, avant de mentionner les « idées intéressantes » de la France pour se rapprocher du Gouvernent iranien.  Le représentant russe a ensuite appelé les Yéménites à constituer de toute urgence, sous l’égide de l’ONU, un « dossier » complet sur le Yémen pour remettre le pays sur les rails.

Mme ANNE GUEGUEN (France) a réaffirmé que seule une solution politique globale et inclusive peut permettre une sortie de crise au Yémen.  Elle a appelé les parties à mettre un terme sans délais à l’escalade dans le nord du Yémen et à choisir la voie de la négociation.  Elle a espéré que les contacts directs et la médiation menée par l’Envoyé spécial permettront d’aboutir le plus rapidement possible à un cessez-le-feu, en particulier à Jaouf et à Mareb.  Dans le sud, l’Accord de Riyad doit être pleinement et rapidement mis en œuvre, a insisté la représentante avant d’appeler à la reprise des discussions pour parvenir à un accord politique global et pleinement représentatif de l’ensemble des Yéménites.

Par ailleurs, Mme Gueguen a déclaré que le respect du droit international humanitaire n’est pas négociable et qu’il s’impose à tous.  « La protection des civils, y compris celle des personnels humanitaires et médicaux, ainsi que des infrastructures civiles doit être une priorité absolue », a-t-elle insisté en précisant que les enfants avaient en 2019 représenté un quart des victimes civiles.  Elle a rappelé que toutes les parties sont tenues de respecter le droit international humanitaire.

Tout en se félicitant des récents développements en matière d’accès humanitaire, Mme Gueguen a jugé indispensable que soient accomplis beaucoup de progrès pour garantir un accès humanitaire sûr et sans entrave.  En outre, elle a jugé essentiel que les Nations Unies puissent avoir accès au pétrolier Safer, qui représente une grave menace potentielle pour l’environnement, puisqu’une fuite de pétrole aurait un impact dramatique sur toute la région. 

Aujourd’hui, a dit M. NIANDOU AOUGI (Niger), le tableau qui vient d’être présenté est loin d’être des plus reluisants.  « C’est pourquoi nous condamnons toute escalade et appelons les parties à s’abstenir de toute action pouvant compromettre les progrès accomplis, vers la reprise des pourparlers et la mise en œuvre des différents accords pour un règlement politique du conflit », a déclaré le représentant.  Il a réitéré l’appel lancé par l’Envoyé spécial pour une cessation immédiate des combats et la reprise, sans conditions, des pourparlers de paix.  Ces pourparlers doivent être inclusifs de toutes les couches sociales notamment les femmes.  M. Aougi a ajouté qu’il était préoccupé par la poursuite des violations des droits de l’homme ainsi que des violations des principes fondamentaux du droit international humanitaire, dans ce pays où au moins un civil est tué toutes les huit heures, et où sévit l’une des prises crises humanitaires au monde.  Il a espéré que la résolution 2511 (2020) jouera un rôle déterminant pour accélérer le processus politique, éliminer les obstacles à l’acheminement de l’aide internationale et à la poursuite des évacuations sanitaires. 

M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a observé qu’en dépit des efforts de l’Envoyé spécial et des personnels humanitaires, la situation reste précaire au Yémen.  La situation est encore plus inquiétante alors que le monde est aux prises avec la crise liée au coronavirus, qui limite drastiquement les possibilités de déplacements dans le monde.  Sur le plan politique, le représentant s’est déclaré préoccupé par le manque de progrès dans les discussions entre les parties.  Il a aussi exprimé son inquiétude concernant les combats pour la prise de Mareb, rappelant que ces faits de violences ont pour conséquence le déplacement de milliers de personnes.  Si l’on veut progresser vers un accord de paix, il est impératif de geler les opérations militaires afin de mettre en œuvre le mécanisme de désescalade et reprendre le dialogue.  Sur le plan militaire, les combats entravent les efforts humanitaires et risquent de ramener le Yémen à la situation d’avant 2018, a averti le délégué.  Il est également essentiel que les houthistes permettent aux responsables de l’ONU d’accéder au pétrolier Safer qui menace l’environnement. 

Évoquant ensuite les accords ainsi que les obstacles à leur mise en œuvre, le représentant s’est ému de la récente frappe aérienne près de Hodeïda, qui menace cette région devenue le « centre de gravité pour le Yémen ».  Réitérant l’appel du général Guha, chef de la MINUAAH, il a exhorté les parties à respecter leurs engagements pour garantir la désescalade.  Quant à l’Accord de Stockholm, le représentant a demandé sa mise en œuvre pleine et entière, notamment pour ce qui concerne les échanges de prisonniers et la statut de Taëz.  Tous les acteurs doivent s’engager dans la désescalade afin d’éviter de plonger le pays dans un conflit généralisé, a-t-il conclu, avant de saluer à son tour Mme Pierce pour ses travaux au Conseil. 

M. SVEN JÜRGENSON (Estonie) a fait part de son inquiétude au sujet de l’escalade du conflit dans le nord du Yémen, rappelant que ce sont les civils qui en payent le prix fort, avant d’appeler les parties en conflit à accorder la priorité à la protection des civils et à respecter le droit international humanitaire et le droit international.  Le délégué les a également invitées à se garder de saper le cessez-le-feu concernant Hodeïda, tout en les appelant à mettre en œuvre les accords de Stockholm.  Selon lui, il n’y a pas de solution militaire au conflit et seul un compromis politique inclusif, global et obtenu par le biais des Nations Unies peut conduire à une solution durable.

Le représentant a aussi déploré la situation humanitaire qui ne cesse de se détériorer, s’inquiétant notamment d’une possible épidémie de choléra.  Il a salué l’initiative de l’Arabie saoudite qui entend organiser un événement de haut niveau d’appel à contributions pour le Yémen le 2 avril, à Riyad.  Il a en outre rappelé aux parties en conflit leur obligation de permettre un accès humanitaire sûr et sans entrave.  Il a demandé aux houthistes de permettre que les personnels des Nations Unies aient accès au pétrolier Safer sans délai afin d’empêcher une catastrophe environnementale.  Il leur a également demandé de permettre l’accès au Représentant du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du Sud), alarmé par la situation humanitaire au Yémen où 24 millions de personnes ont besoin d’une assistance d’urgence, a exprimé également sa consternation face à l’escalade récente des hostilités, ce qui entrave l’avancement d’une solution politique.  Il est d’autant plus inquiet que ces derniers mois, les parties avaient manifesté un véritable intérêt pour la désescalade.  Pour l’Afrique du Sud, il serait judicieux que toutes les parties observent une cessation des hostilités à l’échelle nationale et reviennent au processus de négociation en vue de parvenir à une solution politique globale pour le Yémen.

L’Afrique du Sud déplore l’impact de cette crise sur les civils, d’autant plus que le nombre de victimes de la guerre a augmenté dans les provinces de Hazm, Mareb et Jaouf.  Les femmes et les filles sont particulièrement exposées puisque 3,25 millions d’entre elles connaissent des risques croissants de santé et de protection, a-t-il rappelé.  Dès lors, l’Afrique du Sud salue les efforts de l’Envoyé spécial et d’ONU-Femmes pour promouvoir la participation des femmes au processus de paix à travers des initiatives comme le Pacte pour la paix et la sécurité des femmes yéménites.

Avant de conclure, M. Mabhongo a appelé à la pleine mise en œuvre de l’Accord de Riyad entre le Gouvernement yéménite et le Conseil de transition du Sud ainsi qu’à celle de l’Accord de Stockholm de décembre 2018.  Il a exigé, en outre, que les entraves à l’acheminement de l’aide humanitaire soient levées, soulignant combien l’aide est nécessaire à la population.

M. DANG DINH QUY (Viet Nam) s’est inquiété de l’escalade militaire dans la province de Jaouf et de l’aggravation de la situation humanitaire dans le nord du Yémen suite à une nouvelle vague d’hostilités.  Il a appelé les parties à parvenir à un cessez-le-feu permanent et sans conditions, les invitant aussi à déployer des efforts supplémentaires pour mettre en œuvre les Accords de Stockholm et de Riyad.  Il a aussi voulu que les pourparlers de paix reprennent sous les auspices de l’ONU.

M. Dang a aussi exhorté les parties à faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire, se félicitant dans la foulée du lancement du pont aérien pour les évacuations médicales.  Il a aussi appelé les parties concernées à autoriser l’inspection du pétrolier Safer.  Le représentant a ensuite appelé l’ONU et les pays de la région à continuer d’engager les parties yéménites à participer à un dialogue constructif.

M. MARC PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) s’est dit extrêmement préoccupé par l’escalade de la violence au Yémen depuis la mi-janvier.  Il a appuyé les efforts de l’Envoyé spécial qui a l’intention d’établir un mécanisme transparent et responsable pour « geler » le recours à la violence et garantir que les parties cessent les hostilités dans le nord.  Plus que jamais, le processus politique doit reprendre, a-t-il insisté, notant que toute désescalade restera fragile si elle n’est pas consolidée par un processus politique.  Les pourparlers entre l’Arabie saoudite et les houthistes constituent une bonne base, mais à un moment donné, le Gouvernement du Yémen devra être impliqué dans les pourparlers et le processus devra être dirigé par l’ONU, a en outre estimé le représentant.

M. Pecsteen de Buytswerve a ensuite appelé à la mise en œuvre des accords de Stockholm, et à supprimer les restrictions, obstructions et interférences violant les principes humanitaires.  Il s’est aussi préoccupé de la situation économique et financière, notant que celle-ci a été exacerbée par la décision des houthistes d’interdire l’utilisation et l’échange de nouveaux billets de banque dans les zones sous leur contrôle.  Le délégué a, de plus, exigé des houthistes qu’ils donnent « enfin » accès au pétrolier Safer afin de permettre l’évaluation de la situation et éviter toute catastrophe écologique.

M. ZHANG JUN (Chine) s’est inquiété des nouvelles escalades militaires au Yémen et a appelé les parties à parvenir à un accord de cessez-le-feu le plus rapidement possible.  Il souligné que seule une solution politique permettra de mettre un terme au conflit, pour ensuite appeler à la pleine mise en œuvre des Accords de Stockholm et de Riyad.  Il a espéré que l’échange de prisonniers prévu pourrait avoir lieu.  Le représentant s’est ensuite préoccupé de la situation humanitaire qui sévit dans le pays et a appelé l’ensemble des parties à garantir l’acheminement sans entrave de l’aide.  Il aussi invité les agences concernées à suivre le prêt les conséquences de la prolifération de criquets pèlerins et de la pandémie de COVID-19.

Après avoir, lui aussi, rendu hommage à Mme Karen Pierce pour son action au Conseil, M. ABDULLAH ALI FADHEL AL-SAADI (Yémen) a constaté que les milices houthistes continuent de faire obstruction aux efforts des Nations Unies pour avancer vers la paix au Yémen.  Elles refusent d’honorer les engagements pris dans le cadre de l’Accord de Stockholm parrainé par l’ONU, a-t-il dénoncé, rappelant que le Gouvernement a paraphé cet accord de bonne fois afin de trouver une solution politique et de mettre fin aux souffrances des Yéménites.  Pour le représentant, l’escalade militaire à Jaouf est un signal grave qui signifie que les milices houthistes n’ont jamais pensé sérieusement à la paix et ignorent les souffrances endurées par la population depuis cinq ans.  En poursuivant sur la voie militaire, les milices continuent de cibler des hôpitaux et des camps de réfugiés.  Elles procèdent à une escalade armée sans mettre en œuvre l’Accord de Hodeïda et limitent la liberté de mouvement de la MINUAAH, ciblant même des postes d’observation.  Dans ces conditions, a-t-il dit, le Gouvernement a suspendu le travail de son équipe au Comité conjoint de coordination pour le redéploiement.  Déplorant que les milices houthistes ne veuillent pas entendre la voix de la raison, il a appelé la communauté internationale à être la hauteur de ses responsabilités et à forcer les houthistes à respecter cet accord.  Selon lui, aucune consultation politique ne pourra connaître le succès si les accords précédemment signés ne sont pas mis en œuvre et tant qu’il y aura un pillage des denrées humanitaires au détriment de ceux qui en ont besoin. 

Le délégué a par ailleurs réitéré la condamnation de son gouvernement face aux « interférences iraniennes » dans les affaires yéménites.  L’Iran, a-t-il accusé, continue d’alimenter les milices houthistes et de faire obstruction aux efforts de l’ONU et des pays partenaires en ciblant l’Arabie saoudite et la paix régionale.  De fait, a-t-il plaidé, la communauté internationale et le Conseil de sécurité doivent exercer des pressions sur l’Iran pour qu’il cesse ses agissements au Yémen.  De son côté, le Gouvernement du Yémen fait tout son possible pour mettre en œuvre l’Accord de Riyad afin d’unifier tous les pans politiques sous une seule et même bannière.  Le représentant a exprimé à cet égard l’appréciation de son gouvernement pour le travail effectué à cette fin par ses « frères » de l’Arabie saoudite qui parrainent cet accord.  Dans le même temps, le Gouvernement s’emploie à relancer l’économie, à donner des moyens aux services sociaux et à payer les fonctionnaires.  Ces efforts sont néanmoins contrariés dans les zones contrôlées par les houthistes, a-t-il regretté, avertissant que, sans un soutien international, les choses pourraient encore s’aggraver. 

Les miliciens houthistes sont allés trop loin, a renchéri M. Al-Saadi.  Ils entravent les mesures humanitaires, imposent de taxes et menacent l’acheminement de l’aide vers des millions de Yéménites en s’en prenant aux zones résidentielles et aux lieux de cultes, en ciblant des enfants et en continuant de harceler les femmes.  Il a ajouté que le Gouvernement yéménite condamne la peine de mort prononcée contre 35 parlementaires et la confiscation d’avoirs yéménites à l’étranger.  Enfin, s’agissant du pétrolier Safer contrôlé par les houthistes, il a appelé à ce que l’équipe de l’ONU puisse y accéder sans entrave afin d’éviter une marée noire. 

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