En cours au Siège de l'ONU

Soixante-quinzième session,
12e & 13e séances, Matin & après-midi
AG/12272

Assemblée générale: dans un monde déstabilisé par la pandémie, les États critiquent le manque d’unité et d’efficacité de la communauté internationale

La paralysie de la diplomatie en ces temps de pandémie de COVD-19 a continué de préoccuper les délégations au cinquième jour du grand rendez-vous qu’est le débat général de l’Assemblée générale, organisé virtuellement cette année.  Après neuf mois de lutte contre le virus, la notion même de communauté internationale est « franchement, plutôt en lambeaux  », s’est désolé le Premier Ministre du Royaume-Uni, M. Boris Johnson.  Où est l’ONU dans cette lutte commune contre la pandémie?  Où est l’efficacité de sa réponse? S’est demandé le Premier Ministre de l’Inde, M. Narendra Modi.  

Si la COVID-19 a uni l’humanité comme jamais auparavant, elle a surtout été une « force extraordinaire de division », a résumé le Premier Ministre britannique.  Il est « absurde », et à bien des égards, « scandaleux », que cet ennemi « microscopique » ait mis en déroute la communauté de la race humaine, s’est indigné M. Johnson.  «  Nous ne devons plus jamais mener 193  campagnes différentes contre le même ennemi  », a plaidé M. Johnson.  Pourquoi ne pas profiter de la situation  pour changer la donne  et oublier « les différends inutiles  »  entre multilatéralistes et unilatéralistes? a préconisé le Ministre fédéral des affaires européennes et internationales de l’Autriche, M. Alexander Schallenberg. 

Face à une pandémie qui a exacerbé les vulnérabilités climatiques des pays du Sud en général, comme le Sénégal, le Bangladesh et plus particulièrement, les petits États insulaires, le Premier Ministre des Bahamas, M. Hubert Alexander Minnis, dont le pays a subi en 2018, avec l’ouragan Dorian, « la plus grande tempête de l’histoire de l’Atlantique », a demandé, une nouvelle fois, aux institutions financières internationales d’instituer «  un indice de vulnérabilité  ».   Cet appel a été relayé par les Fidji et Vanuatu, frappés par des cyclones de niveaux 4 et 5 au mois d’avril.  Le Premier Ministre de Samoa, M. Tuilaepa Sailele Malielegaoi, a exigé que cesse immédiatement «  la procrastination climatique  », au risque d’annihiler toute possibilité de stabiliser le climat de la planète.  

Les petits États insulaires ont tout de même apporté quelques bonnes nouvelles: le Premier Ministre des Îles Salomon, M. Manasseh Sogavare a annoncé que son pays reste l’une des 12 nations sans cas de COVID-19.  Son homologue de Saint-Kitts-et-Nevis, M. Timothy Harris, a parlé d’un pays qui a enregistré un faible taux d’infection et aucun décès.  Grand État insulaire, Madagascar, par la voix de son Premier Ministre, M. Christian Ntsay, a vanté le « Covid-Organics (CVO)  » qu’il a décrit comme un « remède traditionnel amélioré pour lutter efficacement » contre le virus.  

Pour la trentaine de délégations qui sont intervenues à l’Assemblée aujourd’hui, la priorité a tout de même été la recherche d’un vaccin sûr et efficace et son accès « équitable et abordable ».  Le vaccin attendu dans les prochains mois sera-t-il disponible pour tous les peuples du monde ou seule comptera la vie des riches? s’est en effet inquiété le Premier Ministre de Saint-Vincent-et-les  Grenadines, M. Ralph Gonsalves.  

Il serait vain, a prévenu son homologue britannique, ex-patient de la COVID-19, de voir dans la quête d’un vaccin une course à des bénéfices « étroits et immoraux » servie par « des moyens sournois  ».  Pour M. Boris Johnson, comme pour l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), qu’il a défendue, notre santé dépend de l’accès « du monde entier » à un vaccin sûr et efficace.  Au Royaume-Uni, où le vaccin de l’Université d’Oxford est au stade 3, nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour y parvenir, a-t-il promis. 

Outre la recherche d’un vaccin, la pandémie, a estimé le Premier Ministre de la Suède, M. Stefan Lofven, est aussi l’occasion de s’attaquer collectivement à d’autres défis mondiaux, dont le creusement des inégalités, l’aggravation des violations du droit international et, bien sûr, les menaces à la paix internationale. 

Le Premier Ministre malaisien Muhyiddin Mohd Yasa a en effet dénoncé « les atrocités  » commises contre les Rohingya dans l’État rakhine, au Myanmar, rappelant qu’elles ont provoqué une migration massive aux « répercussions importantes » sur son pays et États pays voisins.  Le Bangladesh a, a rappelé sa Première Ministre, Mme Sheikh Hasina, a accueilli plus de 1,1 million de ressortissants du Myanmar mais après plus de trois ans, pas un seul Rohingya n’a été rapatrié.  « Le problème a été créé par le Myanmar et la solution doit être trouvée par le Myanmar  », a tranché Mme  Hasina qui a demandé à la communauté internationale de s’impliquer. 

Une autre situation vulnérable a été mise en avant par la Première Ministre de la Norvège: les quelque 500 000 marins dans le monde qui attendent d’être autorisés à débarquer ou à embarquer, en raison de la pandémie.  Mme Erna Solberg a plaidé pour que les gens de mer soient reconnus comme « travailleurs essentiels ».  

Une nouvelle fois, le rôle « central » de l’ONU dans l’atténuation de la crise sanitaire et les efforts pour reconstruire en mieux a été souligné.  La foi et le respect dont jouit l’ONU auprès de 1,3 milliard d’Indiens sont sans précédent, a affirmé le Premier Ministre de l’Inde, M. Modi.  Mais le peuple indien attend depuis longtemps que le processus de réforme de l’ONU soit mené à bien : « pendant combien de temps l’Inde sera-t-elle tenue à l’écart des structures décisionnelles de l’Organisation? » s’est-il impatienté.   

L’Assemblée générale poursuivra son débat général le mardi 28 septembre, à partir de 9 heures.

Suite du débat général

M. NARENDRA MODI, Premier Ministre de l’Inde, a rappelé qu’au cours des derniers mois, le monde entier avait lutté contre la pandémie du coronavirus.  Où est l’ONU dans cette lutte commune contre la pandémie?  Où est sa réponse efficace? a-t-il demandé. 

La foi et le respect dont jouit l’ONU parmi le 1,3 milliard d’habitants de l’Inde sont sans précédent, a reconnu M. Modi.  Mais le peuple indien attend depuis longtemps que le processus de réforme de l’ONU soit mené à bien.  « Pendant combien de temps l’Inde sera-t-elle tenue à l’écart des structures décisionnelles de l’ONU? » a-t-il demandé. 

Le Premier Ministre a rappelé que l’Inde était la plus grande démocratie du monde.  C’est un pays qui compte plus de 18% de la population mondiale.  Un pays avec des centaines de langues et de dialectes, de nombreuses sectes et idéologies.  Un pays qui a été une économie mondiale de premier plan pendant des siècles.  « Quand nous étions forts, nous n’avons jamais été une menace pour le monde; quand nous étions faibles, nous ne sommes jamais devenus un fardeau pour le monde », a résumé M. Modi. 

L’Inde a également envoyé ses soldats dans une cinquantaine de missions de maintien de la paix dans le monde, a rappelé le Premier Ministre.  « Aujourd’hui, tout Indien, tout en voyant la contribution de l’Inde à l’ONU, aspire au rôle élargi de l’Inde aux Nations Unies », a insisté le Premier Ministre. 

L’Inde a toujours pensé aux intérêts de l’humanité tout entière et non à ses propres intérêts, et cette philosophie reste le moteur des politiques du pays, a assuré M. Modi, qu’il s’agisse de ses relations de voisinage ou de sa politique « Agir à l’Est », en passant par l’idée de sécurité et de croissance pour tous dans la région, ou ses points de vue sur la région indopacifique. 

À partir de janvier 2021, l’Inde s’acquittera également de ses responsabilités en tant que membre non permanent du Conseil de sécurité, a rappelé le Premier Ministre.  L’Inde parlera toujours en faveur de la paix, de la sécurité et de la prospérité, a-t-il assuré.  Mais elle « n’hésitera pas à élever sa voix contre les ennemis de l’humanité, de la race humaine et des valeurs humaines - parmi lesquels le terrorisme, la contrebande d’armes illégales, la drogue et le blanchiment d’argent », a prévenu M. Modi. 

Le Premier Ministre a ensuite expliqué que, suivant le mantra « Reform-Perform-Transform », l’Inde avait consacré de grands efforts à transformer la vie de millions de ses ressortissants.  En à peine quatre à cinq ans, l’Inde a permis à plus de 400 millions de personnes d’accéder au secteur financier formel, a-t-il souligné.  Dans le même temps, 600 millions de personnes ont été libérées de la défécation à l’air libre.  Et en à peine deux à trois ans, plus de 500 millions de personnes ont pu obtenir des services de santé gratuits. 

Aujourd’hui, s’est enorgueilli M. Modi, l’Inde est l’un des leaders des transactions numériques.  Un vaste projet de connexion de 600 000 villages à la fibre optique à large bande a été lancé il y a quelques jours à peine.  Le pays a également lancé une campagne ambitieuse pour une Inde sans tuberculose d’ici à 2025 et met en œuvre un programme de fourniture d’eau potable courante pour 150 millions de foyers ruraux. 

Dans l’ère post-pandémique, nous avançons avec la vision d’une « Inde autonome », a déclaré M. Modi.  Des efforts à grande échelle sont ainsi déployés pour promouvoir l’entrepreneuriat et le leadership des femmes.  Les femmes indiennes, aujourd’hui, sont les principales bénéficiaires du plus grand programme de microfinancement du monde, a-t-il encore fait valoir. 

M. PRAVIND KUMAR JUGNAUTH, Premier Ministre, Ministre des affaires intérieures, des communications externes et du groupe chargé du développement national et Ministre des finances et du développement économique de la République de Maurice, s’est félicité du thème retenu pour cette Assemblée générale, affirmant que faire face à la COVID-19 au moyen d’une réelle action multilatérale, « c’est exactement ce dont nous avons besoin ». 

Pour faire barrage au virus, a expliqué M. Jugnauth, Maurice a dû prendre des mesures drastiques, imposant un confinement à sa population dès le 20 mars et mettant en œuvre une réponse complète de santé publique qui a permis au pays de contenir de manière significative la propagation de la maladie.  À ce jour, nous n’avons que quelques cas importés qui font l’objet d’un suivi attentif, a précisé le dirigeant, avant d’exprimer sa gratitude à l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) pour ses directives avisées. 

Cette pandémie, qui s’ajoute à d’autres crises mondiales de l’inégalité et des changements climatiques, a exacerbé les vulnérabilités des pays du Sud en général et des petits États insulaires comme Maurice en particulier.  Pour eux, a constaté M. Jugnauth, des décennies de progrès en développement ont été érodées et les moyens de subsistance des populations ont été mis à mal. 

S’agissant de Maurice, l’industrie des services et les secteurs des voyages, du tourisme et de l’hôtellerie ont été gravement touchés.  À court terme, il s’agit de préserver l’emploi, avant de tracer une voie menant à un développement plus inclusif et durable, a indiqué le Premier Ministre.  Mais la priorité absolue est pour l’heure d’éviter le risque d’une deuxième vague de COVID-19, qui serait catastrophique pour l’économie de l’île. 

Au niveau mondial, la pandémie a fait apparaître que plus de 4,4 milliards de personnes sont privées de toute forme de filet de sécurité sociale ou de soins de santé, a fait observer M. Jugnauth.  De ce fait, la poursuite de la couverture sanitaire universelle doit être au centre du développement humain, a-t-il plaidé.  Quant au futur vaccin contre la COVID-19, il faut veiller à ce qu’il soit distribué équitablement et à un prix abordable pour tous.  « Nos besoins collectifs doivent être pris en compte et ce n’est que grâce à notre attachement au multilatéralisme que nous pourrons réussir », a ajouté le Premier Ministre. 

Évoquant ensuite la marée noire provoquée par le naufrage d’un pétrolier sur des récifs de l’île le 25 juillet, M. Jugnauth l’a qualifiée de « pire catastrophe environnementale que Maurice n’ait jamais connue ».  Remerciant le système onusien et tous les pays et qui se sont précipités pour aider son pays, il a indiqué qu’une grande campagne de nettoyage et d’évaluation était entreprise.  Toutefois, a-t-il ajouté, les mangroves mettront du temps à retrouver leur état d’origine et les personnes impliquées dans les activités côtières ont perdu leurs moyens de subsistance. 

Un deuxième incident naval survenu au large des côtes de Sri Lanka, quelques semaines plus tard, a mis en évidence la nécessité de mettre en place un système régional de prévention et de gestion des catastrophes, a encore souligné le Premier Ministre.  Pour M. Jugnauth, il faut aussi revoir la gouvernance concernant les pétroliers et les régimes de responsabilité en cas de déversement d’hydrocarbures.  Il a appelé l’Organisation maritime internationale (OMI) à traiter ces questions de toute urgence. 

Dans l’optique de l’après-pandémie, M. Jugnauth a jugé impératif que soient prises toutes les mesures nécessaires pour garantir que l’économie mondiale ne sombre pas dans la dépression.  Il est aussi essentiel que les pays se remettent sur les rails des objectifs de développement durable et qu’ils se réengagent au titre de l’Accord de Paris.  « C’est le moment où le multilatéralisme ne peut être mis en péril ni remis en question », a-t-il martelé. 

Enfin, le Premier Ministre a salué l’important travail entrepris pour parvenir à un instrument juridiquement contraignant sur la biodiversité au-delà de la juridiction nationale.  Il a cependant souhaité plus de clarté, lors de l’étape de la rédaction, sur la question des organismes marins dans le plateau continental étendu des États côtiers.

M. XAVIER ESPOT ZAMORA, Chef du Gouvernement de la Principauté d’Andorre, a rappelé qu’avant la pandémie de COVID-19, 2020 était censée être une année charnière pour l’action climatique, à l’image des nouveaux objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre qui devaient être adoptés dans le cadre du Sommet sur le climat (COP26). 

Crise sanitaire oblige, l’événement, qui devait avoir lieu au Royaume-Uni à l’automne, a finalement été reporté.  M. Zamora a toutefois appelé les États Membres à ne pas reléguer les efforts contre les changements climatiques « au second plan ».  Dans cette perspective, il a rappelé que l’Andorre avait approuvé « sans hésitation ni délai » l’Accord de Paris de 2015, ainsi qu’une loi sur la transition énergétique et la lutte contre les changements climatiques.  « Nous avons d’ailleurs été l’un des premiers pays à définir un plan de réduction des émissions », a-t-il affirmé. 

Entre autres preuves de l’engagement environnemental de l’Andorre, M. Zamora a indiqué que la Principauté assumait, pour une période de deux ans, le secrétariat pro tempore du Sommet ibéro-américain, dont le thème est « L’innovation pour le développement durable – Objectif 2030 ».  Selon lui, la déclaration conjointe qu’ont adoptée, le 16 septembre dernier, les ministres de l’environnement des 22 États membres de la Conférence ibéro-américaine permettra à ces derniers de définir un agenda environnemental. 

Toutefois, le Chef du Gouvernement andorran a reconnu que la crise provoquée par la COVID-19 avait contraint la Principauté à revoir sa feuille de route pour la présente législature, via l’élaboration d’un plan d’action plus « réaliste ».  M. Zamora a ainsi rappelé que, quelques semaines à peine après la notification de la première victime de la COVID-19, le monde s’était arrêté net: les écoles, les usines de fabrication, les bureaux, les routes et les stades sont tous « devenus silencieux » pour permettre la lutte contre cet « ennemi invisible ». 

M. Zamora a noté que cette situation avait entraîné une accélération de la transformation numérique, la généralisation du télétravail et de l’enseignement à distance, ainsi que « l’alphabétisation technologique » de millions de personnes.  Mais, a-t-il ajouté, ce processus a également révélé des failles importantes.  M. Zamora a notamment appelé à reconsidérer les valeurs sur lesquelles se fondent les soins aux personnes âgées, principales victimes de ce virus; à reconnaître que le télétravail ne permet pas une meilleure conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale lorsque les espaces ne sont pas adaptés; à agir face aux inégalités profondes entre familles, mis en évidence par l’éducation à distance, lorsque ces dernières n’ont pas accès aux services; et à encadrer la surexposition à l’information qui, « en plus de freiner le contact humain, a créé parfois des environnements manipulables et non sécurisés ». 

Le Chef de Gouvernement a cependant appelé à ne pas perdre l’espoir.  Il s’est notamment dit encouragé par les nombreuses manifestations de solidarité et d’empathie, la reconnaissance sincère envers tous les professionnels du secteur médico-social et de la santé, ainsi que le civisme et la conscience écologique des populations dans l’intérêt commun. 

M. Zamora a appelé à prendre appui sur ces éléments positifs pour relever les défis mondiaux tels que la persistance de conflits « sans solution », d’actions « sanglantes » et d’un monde « déséquilibré » où la pauvreté perdure, où la faim augmente de nouveau, où l’accès à la santé n’est pas universel, où les changements climatiques témoignent de carences structurelles, « en bref, un monde où la Déclaration universelle des droits de l’homme présente plusieurs lectures et applications ».  Il a appelé à renverser cette situation « tous ensemble » dans un esprit d’ouverture. 

Dans ce cadre, M. Zamora a salué le travail du Secrétaire général concernant la réforme du système de développement, la participation des États aux résolutions et les propositions d’amélioration.  « Nous devons maîtriser les procédures et faire preuve d’efficacité pour respecter notre engagement envers la Charte et atteindre nos objectifs de paix, de sécurité, de respect des droits et de développement », a-t-il estimé. 

Pour y parvenir, M. Zamora a réaffirmé que l’Andorre, « fidèle à sa trajectoire de paix », se tenait « plus que jamais » aujourd’hui aux côtés des Nations Unies afin de reformuler un ordre multilatéral capable de relever les défis à surmonter, réaliser les changements possibles et concevoir l’urgence sanitaire comme une opportunité de mettre fin à un modèle de développement et de mondialisation « épuisé et insoutenable ». 

À la faveur d’un véritable plaidoyer pour davantage de solidarité, le Chef du Gouvernement de l’Andorre a déclaré en conclusion: « Soixante-quinze ans après, nous devons, plus que jamais, avoir à l’esprit les raisons pour lesquelles les Nations Unies ont été créées. »

Pour M. BORIS JOHNSON, Premier Ministre, Premier Lord du Trésor et Ministre de la fonction publique du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, « jamais dans l’histoire de notre espèce -pas depuis que le Tout-Puissant a abattu la tour de Babel- la race humaine n’a été aussi obsédée par un seul sujet de conversation ».  Nous avons suivi les mêmes débats, recherché les mêmes médicaments, et nous avons tapé à maintes reprises le même mot dans nos moteurs de recherche: la COVID-19 a uni l’humanité comme jamais auparavant, a-t-il affirmé. 

Et pourtant, la crise a également été une force extraordinaire de division, s’est désolé le Premier Ministre.  Nous avons tous affronté « le même petit adversaire menaçant », mais les Membres de l’ONU ont mené 193 campagnes distinctes, comme si chaque pays contenait en quelque sorte une espèce humaine différente.  Partout dans le monde, il y a eu une variété infinie de couvre-feux, de restrictions et de fermetures, et nous nous sommes battus dans un esprit de « sauve qui peut », a déploré M. Johnson. 

« Après neuf mois de lutte contre la COVID-19, la notion même de communauté internationale est, franchement, plutôt en lambeaux », a constaté le Premier Ministre, pour qui « nous savons que nous ne pouvons tout simplement pas continuer ainsi ».  À moins de nous unir contre notre ennemi commun, nous savons que tout le monde perdra, a-t-il averti, estimant que le résultat inévitable serait de prolonger cette calamité et d’augmenter le risque d’une autre calamité.  Il est temps que l’humanité répare « ces vilaines fractures », a-t-il réagi, en espérant que ce sera la première et la dernière fois que l’Assemblée générale se réunira ainsi en format « Zoom ».  « Guérissons le monde - littéralement et métaphoriquement », a plaidé M. Johnson. 

Avec près d’un million de morts et des souffrances économiques colossales, il y a un « impératif moral » pour l’humanité d’être honnête et de parvenir à une compréhension commune de la façon dont la pandémie a commencé et comment elle a pu se propager, a poursuivi le Premier Ministre, et ce, « non parce que je veux blâmer n’importe quel pays ou gouvernement, ou marquer des points ».  « Je crois simplement -en tant qu’ancien patient COVID- que nous avons tous le droit de savoir, afin que nous puissions collectivement faire de notre mieux pour éviter une récidive », a-t-il précisé. 

« Le Royaume-Uni soutient les efforts de l’OMS et de mon ami Tedros, pour explorer l’étiologie de la maladie car, quelle que soit la nécessité d’une réforme, l’OMS reste la seule organisation qui rassemble l’humanité contre des légions de maladies », a assuré M. Johnson.  C’est pourquoi le Royaume-Uni est l’un des plus grands bailleurs de fonds de l’OMS, avec une contribution de 340 millions de livres sterling prévue pour les quatre prochaines années, soit une augmentation de 30%. 

« Comme nous envoyons maintenant nos détectives médicaux interroger les témoins et les suspects -chauves-souris, pangolins, qui que ce soit-, nous devrions avoir assez d’humilité pour reconnaître que la sonnette d’alarme a été tirée avant que cette calamité ne se produise », a poursuivi le dirigeant britannique.  Au cours des 20 dernières années, il y a eu huit éclosions d’un virus mortel, dont chacune aurait pu dégénérer en pandémie, a-t-il fait observer.  Il a notamment rappelé que Bill Gates avait lancé l’alerte en 2015, et que « nous avons répondu comme à un message d’erreur Microsoft persistant en cliquant sur OK ». 

Désormais, a poursuivi le Premier Ministre, nous nous efforçons de nous rattraper et, avec une lenteur « angoissante », nous progressons.  Les épidémiologistes de l’Université d’Oxford ont ainsi identifié le premier traitement de la COVID-19.  Ils ont constaté qu’un médicament bon marché appelé dexaméthasone réduisait le risque de décès de plus d’un tiers pour les patients sous ventilateurs.  Le Royaume-Uni a immédiatement partagé cette découverte avec le monde, de sorte que jusqu’à 1,4 million de vies pourraient être sauvées dans les six prochains mois grâce à cette seule avancée. 

Au moment où je parle, a ajouté le Premier Ministre, il y a 100 vaccins potentiels qui tentent de surmonter les obstacles de la sécurité et de l’efficacité, « comme dans un steeple-chase mondial géant ».  Nous ne savons pas si l’un d’entre eux réussira.  Le vaccin d’Oxford est maintenant au stade 3 des essais cliniques, et prêt pour une distribution rapide en cas de succès, l’entreprise AstraZeneca a déjà commencé à fabriquer des millions de doses et conclu un accord avec le Serum Institute of India pour fournir un milliard de doses à des pays à revenu faible et intermédiaire. 

« Mais il serait vain de traiter la quête d’un vaccin comme un concours pour un avantage national étroit et immoral de chercher une longueur d’avance en obtenant des recherches par des moyens sournois », a fait valoir M. Johnson.  Pour lui, la santé de chaque pays dépend de l’accès du monde entier à un vaccin sûr et efficace.  Au Royaume-Uni, a-t-il promis, nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour y parvenir.  Le Premier Ministre a annoncé que le Royaume-Uni contribuera jusqu’à 571 millions de livres sterling à l’initiative COVAX conçue pour distribuer un vaccin contre la COVID-19 à travers le monde.  Sur cette somme, 500 millions iront aux pays en développement pour leur permettre de se protéger.  Le Royaume-Uni est déjà le plus gros donateur de GAVI, l’Alliance du Vaccin.

Mais même si nous aspirons à un vaccin, nous ne devons jamais sacrifier la sécurité à la vitesse, a martelé le Premier Ministre.  « Parce que ce serait une tragédie absolue si dans notre empressement, nous devions relancer les fous -les anti-vaxxers-, de dangereux obsessionnels qui font campagne contre le concept de vaccination et qui risqueraient encore des millions de vies ». 

Le moment est venu de regarder vers l’avenir et de réfléchir à la manière d’empêcher une pandémie de se reproduire et « nous ne devons plus jamais mener 193 campagnes différentes contre le même ennemi », a répété le Premier Ministre. 

Le Royaume-Uni entend utiliser sa présidence du G7 en 2021 pour créer une nouvelle approche mondiale de la sécurité sanitaire basée sur un plan en cinq points pour protéger l’humanité contre une autre pandémie: forger un réseau mondial de centres de recherche sur les zoonoses afin de repérer les agents pathogènes animaux dangereux qui pourraient traverser la barrière des espèces et infecter les êtres humains; développer la capacité de fabrication de traitements et de vaccins afin que l’humanité tout entière puisse les tenir « comme des missiles dans des silos » en cas d’attaque; concevoir un système mondial d’alerte précoce en cas de pandémie; avoir tous les protocoles prêts pour une réponse d’urgence; lever les contrôles à l’exportation dans la mesure du possible et annuler toutes les taxes douanières sur les outils vitaux de notre lutte contre la COVID-19: gants, équipements de protection, thermomètres et autres produits critiques.  C’est ce que fera le Royaume-Uni dès l’entrée en vigueur de son nouveau régime tarifaire indépendant le 1er janvier 2021. 

Aussi tragiques que soient les conséquences de la COVID-19, elles n’ont pas été aussi destructrices que d’autres fléaux - sans parler de la grippe d’il y a un siècle, a remarqué M. Johnson.  Mais « il est absurde, et à bien des égards, scandaleux, que cet ennemi microscopique ait mis en déroute l’unité de la race humaine », a conclu le Premier Ministre. 

Mme SHEIKH HASINA, Première Ministre du Bangladesh, a averti d’entrée que la pandémie de COVID-19 avait entravé le progrès économique de son pays.  Dès le début, a-t-elle expliqué, nous avons pris des initiatives mettant l’accent sur la vie et les moyens de subsistance de notre peuple.  De la nourriture et d’autres aides ont ainsi profité à près de 10 millions de familles sans emploi et des bourses ont été offertes à quatre millions d’étudiants.  Le Gouvernement a accordé des primes en espèces à cinq millions de personnes, dont des agriculteurs et des ouvriers touchés par la pandémie.  Pour assurer la santé des gens ordinaires, nous fournissons 30 types de médicaments gratuitement à travers 18 000 cliniques communautaires et centres de santé syndicaux, a précisé Mme Hasina. 

« J’ai moi-même collecté des fonds et distribué plus d’un montant de 2,5 milliards de taka (environ 29,5 millions de dollars des États-Unis) à des orphelins, étudiants pauvres, madrasas, mosquées, aux temples, enseignants, artistes, ou journalistes qui ne seraient pas inclus dans les programmes d’aide du Gouvernement », a témoigné la Première Ministre.  En conséquence, l’impact de la pandémie sur la population a été minime, a-t-elle assuré. 

Peu de temps après la détection des cas de COVID-19 dans le pays, le Gouvernement a lancé des campagnes de sensibilisation et distribué des kits de protection individuelle, qui ont aussi permis de contenir des maladies saisonnières.  Pas moins de 21 plans de relance ont été annoncés pour le secteur financier.  Encore une fois, la plus grande importance a été accordée à la production alimentaire, a affirmé Mme Hasina.  Malgré la stagnation induite par la COVID-19 de la production industrielle mondiale, notre PIB a enregistré un taux de croissance de 5,24% et qui devrait être de 7% au cours du prochain exercice, contre 8,2% en 2018-2019, a-t-elle noté. 

La Première Ministre a souhaité que le vaccin contre la COVID-19 soit bientôt disponible dans le monde et a jugé impératif de le traiter comme un bien public mondial.  « Si l’on nous fournit le savoir-faire technique et les brevets, l’industrie pharmaceutique du Bangladesh a la capacité de produire des vaccins à grande échelle », a-t-elle assuré. 

Mme Hasina a présenté sa vision pour le Bangladesh: un pays à revenu intermédiaire d’ici à 2021, un pays développé d’ici à 2041 et un delta prospère d’ici à 2100. 

La Première Ministre a évoqué le sort des travailleurs migrants, qui sont les principaux contributeurs à l’économie de leurs pays d’accueil et d’origine.  Beaucoup d’entre eux ont perdu leur emploi pendant la pandémie tandis que beaucoup ont été renvoyés chez eux.  Elle a dit avoir alloué 361 millions de dollars des États-Unis aux travailleurs migrants rapatriés.  Ajoutant qu’il était essentiel de les aider à retrouver un emploi sur le marché du travail post-COVID-19, Mme Hasina a exhorté la communauté internationale et les pays d’accueil à « traiter les travailleurs migrants de manière équitable et avec empathie ». 

La pandémie aggrave également la situation des pays vulnérables au climat, a relevé Mme Hasina.  Au Bangladesh, nous sommes confrontés au double impact des récentes inondations et du cyclone Amphan, a-t-elle expliqué.  En tant que président actuel du Forum de la vulnérabilité climatique (Climate Vulnerable Forum - CVF) et du Groupe V-20 des ministres des finances, le Bangladesh propose de tracer une voie qui soit résiliente face aux changements climatiques pour sortir de la crise. 

La contribution des femmes, qui sont à l’avant-garde des efforts de riposte à la pandémie et de relèvement, reste au cœur de notre développement national, a poursuivi Mme Hasina.  Au Bangladesh, s’est-elle félicitée, nous avons comblé 72,6% de notre écart global entre les sexes. 

Mme Hasina a rappelé que son pays était actuellement le plus grand pays contributeur de troupes et de policiers aux missions de maintien de la paix de l’ONU.  Nos soldats de la paix mettent leur vie en jeu pour garantir et maintenir la paix dans les pays ravagés par les conflits, a-t-elle dit, ajoutant que la communauté internationale devait assurer leur sûreté et leur sécurité. 

Enfin, la Première Ministre a tenu à souligner que le Bangladesh avait fourni un abri temporaire à plus de 1,1 million de ressortissants du Myanmar déplacés de force.  Après plus de trois ans, pas un seul Rohingya n’a pu être rapatrié, a-t-elle déploré.  Estimant que « le problème a été créé par le Myanmar et sa solution doit être trouvée au Myanmar », Mme Hasina a toutefois demandé à la communauté internationale de jouer un rôle plus efficace pour trouver une solution à cette crise.

M. JOSAIA VOREQE BAINIMARAMA, Premier Ministre et Ministre des questions iTaukei, de l’industrie sucrière et des affaires étrangères des Fidji, a rappelé que son pays avait été frappé par un cyclone de niveau 4, le cyclone Harold, au mois d’avril, alors même qu’il s’évertuait à lutter contre l’épidémie de COVID-19. 

Les Fidji sont prêtes à reconstruire après le cyclone Harold et à renforcer sa résilience aux tempêtes futures et à la montée du niveau de la mer, a ajouté le Premier Ministre, affirmant: « Nous devons continuer à tracer la voie vers l’émission zéro et les objectifs du Programme de développement durable à l’horizon 2030. »  Ce sont là, a-t-il insisté, des questions de survie. 

Si les changements climatiques et le coronavirus sont des « monstres très différents », le Premier Ministre a estimé que les insuffisances de moyens restaient les mêmes pour les petits États en développement.  Affirmant que le fossé entre ces derniers et les pays développés n’avait jamais été aussi marqué, M. Bainimarama a vu dans la Charte des Nations Unies des motifs d’espoir.  « Si notre réponse aux changements climatiques est à l’image de l’incohérence de notre réponse mondiale à la pandémie de COVID-19, alors nos enfants verront des horreurs bien plus grandes », a-t-il toutefois prévenu.  Dans ces conditions, a-t-il ajouté, nous n’arriverons pas à limiter la hausse de la température mondiale à l’objectif de 1,5 degré Celsius ou de 2 degrés, nous n’empêcherons pas nos écosystèmes océaniques de devenir inhospitaliers, et nous n’empêcherons pas une sixième extinction de masse. 

M. Bainimarama a jugé indispensable que le rétablissement après cette pandémie marque la transition vers un système économique décarboné et résilient face aux changements climatiques.  Les Fidji ont travaillé en ce sens en étroite collaboration avec les Nations Unies et ses partenaires du Canada, de la Jamaïque, du Royaume-Uni, de l’Union européenne et du Rwanda grâce à un engagement de haut niveau sur le financement du développement, afin d’explorer comment faire en sorte que ce rétablissement soit le plus rapide possible.  « Récupérer mieux, récupérer plus bleu, récupérer plus vert et récupérer ensemble », a-t-il insisté. 

M. MUHYIDDIN MOHD YASSIN, Premier Ministre de la Malaisie, s’est inquiété de l’impact économique et financier de la pandémie, qui a mis à genoux les petites et grandes entreprises.  Constatant que des décennies de travail acharné avaient été réduites à néant, il a estimé qu’une dévastation économique de cette ampleur exigeait l’action collective de la communauté internationale et qu’il était nécessaire d’atténuer l’impact sur les moyens de subsistance de toutes les personnes touchées.  Mettant l’accent sur les stratégies d’atténuation mise en place par le Gouvernement de la Malaisie pour faire face aux impacts socioéconomiques de la COVID-19, M. Yassin souhaité que son pays sorte plus fort de la pandémie. 

Abordant la question de la réforme du système des Nations Unies, le Premier Ministre de la Malaisie a jugé urgent de modifier la composition du Conseil de sécurité afin que celui-ci reflète mieux la diversité des membres actuels de l’ONU.  Limiter le nombre de sièges permanents du Conseil de sécurité aux cinq vainqueurs de la guerre mondiale, seuls détenteurs d’un droit de veto, n’a rien de démocratique à ses yeux.  Notant que le veto avait été exercé plus de 200 fois depuis 1946, le Premier Ministre a appelé certains États Membres à cesser de penser qu’ils avaient davantage que les autres le droit de prendre des décisions. 

M. Yassin s’est inquiété de la situation des Palestiniens.  Estimant que la situation qui prévaut dans le territoire palestinien occupé constituait l’un des échecs les plus flagrants de l’ONU, il a rappelé que l’acquisition d’un territoire par la force était inadmissible et illégale.  Dans ce contexte, il a réaffirmé le soutien de la Malaisie à la réalisation de l’État de Palestine sur la base des frontières d’avant 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale. 

Le Premier Ministre a ensuite dénoncé les atrocités commises contre les Rohingya dans l’État rakhine, au Myanmar, rappelant qu’elles avaient provoqué une migration massive aux répercussions importantes sur la Malaisie et les pays voisins.  Il a indiqué que la Malaisie accueillait actuellement le plus grand nombre de réfugiés en Asie du Sud-Est, en assurant le coût de la gestion et de la protection de près de 180 000 réfugiés, dont 86% en provenance du Myanmar.  Bien que la Malaisie ne soit pas partie à la Convention de 1951 sur les réfugiés et à son Protocole de 1967, elle a pris la responsabilité sociale et financière de fournir une aide humanitaire et une protection aux réfugiés rohingya pour des raisons humanitaires, a-t-il expliqué. 

S’agissant enfin des objectifs de développement durable, le Premier Ministre de la Malaisie a cité la mise en œuvre de plans nationaux de développement quinquennaux.  M. Yassin a indiqué que ces plans avaient été inclus dans la Vision de prospérité partagée 2030 de son pays, qui vise à développer une répartition juste et équitable du développement. 

M. SAMDECH AKKA MOHA SENA PADEI TECHO HUN SEN, Premier Ministre du Cambodge, a déclaré que le monde faisait face à une métamorphose irréversible vers une structure polycentrique, caractérisée par l’adversité entre les superpuissances et la proéminence des puissances intermédiaires qui prennent les devant de la scène au niveau des politiques régionales.  L’unilatéralisme et l’usage de la force à l’encontre des pays plus faibles sont en hausse; le système de contrôle des armements se détériore et le risque nucléaire augmente de manière significative, sans oublier l’évolution des doctrines militaires qui privilégient l’idée de faire la guerre pour maintenir sa suprématie.  Les risques d’une nouvelle guerre froide sont également très préoccupants, a averti le Premier Ministre. 

S’agissant de la pandémie, et pour permettre à l’économie mondiale de se relever plus rapidement, M. Hun Sen a appelé à travailler de manière plus rapprochée avec les institutions internationales sur la base de la transparence et de l’efficacité.  Il faut renoncer au « moi d’abord », a-t-il lancé, avant de rappeler que le Cambodge, dans un geste humanitaire, avait autorisé cette année le navire de croisière MS Westerdam à accoster et ses passagers et équipages à débarquer. 

Le Premier Ministre s’est inquiété de l’impact de la pandémie sur la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.  Il a aussi dénoncé le manque d’action des États Membres pour honorer leurs engagements concernant le climat pris lors de la COP21.  Il a ensuite souligné que l’action climatique était un élément essentiel de la politique de développement du Cambodge, qui remettra à jour sa contribution, déterminée au niveau national, à l’approche de la COP26. 

Après avoir insisté sur l’importance de la lutte contre le terrorisme non étatique et de la fourniture de ressources adéquates aux opérations de maintien de la paix, M. Hun Sen a dénoncé la suspension de son pays par l’Union européenne de son programme Everything But Arms (EBA) alors que le Cambodge, a-t-il affirmé, peine à survivre face à la pandémie.  Il a comparé la décision de l’Union européenne à l’isolement dans lequel les survivants du régime des Khmers rouges qui tentaient de reconstruire leur pays avaient été placés il y a 40 ans, quand la majorité des États Membres de l’ONU avait continué, pendant 12 ans, de laisser les Khmers rouges à occuper le siège du Cambodge aux Nations Unies.

Mme ERNA SOLBERG, Première Ministre de la Norvège, a expliqué qu’à la lumière des leçons tirées d’autres crises et maladies infectieuses, la Norvège maintenait son engagement indéfectible en faveur des Nations Unies et de solutions multilatérales.  En réponse à la pandémie, elle a ainsi pris l’initiative de créer un fonds de réponse et de relève des Nations Unies contre la COVID-19, et elle copréside l’effort mondial pour l’accès aux tests, aux traitements et aux vaccins COVID-19 -l’accélérateur ACT-, a précisé la Première Ministre, pour qui les problèmes mondiaux ont besoin de solutions mondiales. 

Alors qu’elle s’apprête à entrer au Conseil de sécurité, la Norvège entend aborder les situations nationales inscrites à son ordre du jour en se concentrant sur quatre domaines thématiques en particulier, a expliqué Mme Solberg.  Premièrement, elle utilisera son expérience de la diplomatie de paix pour aider à réaliser le potentiel inexploité des Nations Unies pour prévenir et résoudre les conflits et maintenir la paix.  Deuxièmement, elle insistera sur le programme relatif aux femmes, la paix et la sécurité.  La Norvège se concentrera aussi sur la protection des civils, y compris des enfants, sur la base du droit international humanitaire et des droits de l’homme. Enfin, elle intégrera les menaces à la sécurité liées au climat dans les débats du Conseil. 

Constatant la tendance actuelle vers plus d’autoritarisme et de populisme, Mme Solberg a regretté que la pandémie n’ait fait que l’amplifier.  Nous avons vu des exemples où la pandémie a été utilisée comme prétexte pour affaiblir les principes démocratiques et les droits de l’homme, a-t-elle déploré, soulignant que cette pandémie constituait un examen de gouvernance pratique pour tous les États et que le « bulletin de note » serait vu par le monde entier.  Nous devons veiller à ce que les droits de l’homme, la démocratie, l’état de droit et l’égalité des sexes soient au cœur de nos efforts de réponse et de relèvement, a-t-elle insisté, car ce n’est qu’alors que nous pourrons espérer non seulement atténuer la chute, mais aussi reconstruire en mieux.  Se disant choquée et attristée, la Première Ministre a condamné l’augmentation de la violence contre les femmes et les filles à la suite des confinements en cours dans le monde.  La Norvège a une longue tradition de promotion des droits des femmes et de l’égalité entre les sexes, a-t-elle rappelé, affirmant que ce n’est pas seulement la bonne chose à faire, mais aussi la chose intelligente à faire. 

Alors que de nombreux États Membres sont confrontés à des catastrophes liées au climat -plus fréquentes et plus dangereuses que jamais- et que les plus vulnérables sont les plus durement touchés, la Norvège a appelé à investir dans la résilience, en particulier dans les régions du monde les plus durement affectées par les changements climatiques.  L’année 2020 reste une année cruciale pour que les pays mettent à jour et renforcent leurs objectifs climatiques nationaux dans le cadre de l’Accord de Paris, a rappelé la Première Ministre, un exercice que la Norvège a fait en février cette année.  Le pays est activement engagé sur la route de l’économie verte, a assuré la Première Ministre, qui a aussi appelé à ne pas perdre de vue l’importance des océans et à reconstruire à la fois plus vert et plus bleu.  Une économie océanique durable présente des avantages pour la santé et la société, ainsi que pour l’économie et l’environnement, a-t-elle précisé, ajoutant que chaque dollar investi dans des actions océaniques clefs rapportait en moyenne 5 dollars en retour. 

Mme Solberg a saisi cette occasion pour attirer l’attention sur les quelque 500 000 marins qui attendent actuellement à travers le monde d’être autorisés à débarquer ou à embarquer, en raison de la pandémie.  Près de 80% du commerce mondial est transporté par bateau, y compris la nourriture, le matériel médical et les produits énergétiques, a-t-elle rappelé, avertissant que, si cette crise devait persister, elle pourrait entraîner une perturbation majeure du commerce mondial, des chaînes d’approvisionnement et de l’économie mondiale.  Mme Solberg a encouragé les États Membres à désigner les gens de mer comme « travailleurs essentiels » et à mettre en œuvre les Protocoles de l’Organisation maritime internationale pour les changements d’équipage.

M. MANASSEH SOGAVARE, Premier Ministre des Îles Salomon, a déclaré que jamais auparavant il n’y a eu un moment où l’action collective de tous les États Membres de l’ONU était apparue aussi nécessaire que face à la pandémie mondiale de COVID-19.  Il a tout de même eu « le plaisir » d’annoncer que les Îles Salomon restent l’une des 12 nations indemnes de COVID-19, « sans cas signalé », aux côtés de neuf autres petits États insulaires en développement du Pacifique.  Ce qui ne signifie pas que nous ne sommes restés sans rien faire, a-t-il assuré, en dressant la liste des mesures prises par son gouvernement.  Mais la COVID-19 a provoqué la fermeture des frontières, qui a eu un impact négatif sur l’économie mondiale.  « Notre pays ne fait pas exception, nous traversons une période difficile, cependant, nous avons lancé un paquet de relance économique pour réinitialiser et stimuler notre économie », a fait valoir M. Sogavare, qui a annoncé la création de la Banque de développement des Îles Salomon, destinée à fournir des services financiers durables axés sur le développement des zones rurales, en particulier pour les petites et moyennes entreprises qui exercent principalement des activités commerciales et industrielles.

Parallèlement, les Îles Salomon continuent de lutter contre les effets incrémentiels des changements climatiques et les impacts négatifs qu’il a sur leurs moyens de subsistance, leur sécurité et leur bien-être.  Les Îles Salomon restent déterminées à réduire leur empreinte carbone et à doubler ses contributions déterminées au niveau national grâce à ses travaux en cours sur le projet hydroélectrique de Tina, a indiqué le Premier Ministre.  « Ce projet hydroélectrique de 15 watts réduira notre dépendance aux combustibles fossiles de 70%.  Malgré les défis posés par la COVID-19, nos efforts pour que le projet soit mis en service d’ici à 2024 restent sur la bonne voie et nous continuons d’appeler les partenaires au développement à rester avec nous sur cette trajectoire régulière », a précisé le Premier Ministre. 

Il a également appelé tous les États à se fixer des contributions ambitieuses au niveau national.  En tant que grand État océanique d’une superficie de 1,5 million de kilomètres carrés, la conservation et la préservation de l’océan et de ses ressources restent une priorité pour les Îles Salomon, a souligné le Chef de Gouvernement en indiquant que son industrie du thon génère environ 60 millions de dollars de revenus par an et fournit des emplois à 2 000 habitants.  Il a cependant alerté sur la menace pour ces ressources que représente la pêche illégale non déclarée et non réglementée, dans sa juridiction maritime.  Près de 150 millions de dollars de valeur économique directe pour les petits États insulaires en développement sont perdus en raison de cette pêche dans le Pacifique, a-t-il signalé, avant d’appeler les pays de pêche hauturière à en réduire les incidences dans les eaux de son pays.

Son gouvernement, a-t-il poursuivi, reste déterminé à négocier un instrument juridiquement contraignant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones situées au-delà de la juridiction nationale.  Assurer la souveraineté sur nos zones maritimes demeure important pour les Îles Salomon, a-t-il assuré: « Nous œuvrons activement à l’achèvement de la délimitation de toutes nos zones maritimes et n’avons plus qu’une frontière maritime à conclure. »  La position de son gouvernement est qu’une fois que les zones maritimes nationales seront déposées auprès des Nations Unies, elles ne devraient pas être sujettes à changement « même avec l’élévation du niveau de la mer ».  Les Îles Salomon sont un État océanique, le territoire souverain du pays ne devrait pas changer en raison des effets des changements climatiques et de l’élévation du niveau de la mer, a-t-il insisté.

Le retrait de la catégorie des pays les moins avancés (PMA) est une étape importante dans la trajectoire de développement d’un pays en développement, a rappelé le Premier Ministre en rappelant que les Îles Salomon devraient ainsi changer de catégorie d’ici à 2024.  Cependant, les deux seules fois où les Îles Salomon ont subi l’examen triennal, elles n’ont pas satisfait au critère de vulnérabilité, celle-ci étant d’autant plus évidente maintenant avec la COVID-19.  M. Sogavare a salué l’intention de la Commission des politiques de développement de tenir compte des impacts de la COVID-19 sur tous les secteurs lors du prochain examen triennal en 2021. 

M. ANDREW HOLNESS, Premier Ministre et Ministre de la défense, de la croissance économique et de la création d’emplois de la Jamaïque, a cité les conséquences de l’épidémie, affirmant que celle-ci avait remis en cause des années de progrès économiques et sociaux.  Il a décrit une économie maintenant confrontée au triple défi de la réduction des revenus, de l’augmentation des dépenses de santé et sociales, et de la crise climatique en cours, qui menace d’annuler des années de gains de développement durement gagnés.  « La pandémie a mis en évidence les vulnérabilités préexistantes et les multiples faiblesses structurelles au sein de nos économies –grandes et petites, riches et pauvres- et a clairement démontré la nature systémique du risque dans le monde entier », a insisté M. Holness. 

Face à ce défi, les pays en développement doivent concevoir des stratégies pour réagir efficacement, a poursuivi le Premier Ministre.  « Nous devons rééquilibrer nos économies et repenser la nature de la coopération mondiale afin que non seulement nous nous rétablissions plus fort, mais que nous nous positionnions pour devenir plus résilients aux chocs systémiques futurs », a insisté M. Holness. 

Si la pandémie de COVID-19 a mis en évidence l’interconnexion et l’interdépendance de notre monde, elle a aussi souligné la nécessité d’un multilatéralisme renforcé et renouvelé, a estimé le Premier Ministre.  Soulignant les difficultés particulières des petits États des Caraïbes, qui sont désignés comme pays à revenu intermédiaire, M. Holness a salué la création, par l’ONU, d’un fonds d’intervention et de relèvement COVID-19, qualifié d’excellent exemple de l’efficacité du « multilatéralisme à l’œuvre ». 

Le Premier Ministre a estimé que la « fracture numérique » était un domaine qui nécessite un soutien identique.  Notant que la pandémie a forcé les écoliers et les salariés à pratiquer la distanciation sociale et que la moitié de la population mondiale n’est toujours pas connectée à Internet, il a appelé à financer une connectivité universelle, sûre et abordable, qu’il a jugée essentielle pour une plus grande participation à l’économie numérique mondiale et pour la réalisation d’un développement inclusif et durable. 

Alors que la communauté internationale travaille sérieusement à la mise au point d’un vaccin contre la COVID-19, le Premier Ministre a salué les efforts visant à accélérer l’accès équitable aux vaccins, aux diagnostics et aux traitements.  Conformément à notre engagement en faveur de la pleine réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030, la Jamaïque est profondément investie dans la recherche de solutions aux niveaux national, régional et multilatéral pour répondre efficacement et de manière décisive à cette pandémie, a-t-il ajouté. 

M. TUILAEPA SAILELE MALIELEGAOI, Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères et du commerce du Samoa, a demandé que cesse immédiatement la procrastination climatique, avant que ne disparaisse toute possibilité de stabiliser le climat de la Terre.  Il a rappelé que des réunions cruciales telles que la COP26 de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, la Convention sur la diversité biologique et la Conférence des Nations Unies sur l’océan 2020 avaient été reportées. 

Ces reports ne devraient pas nous empêcher de respecter les engagements pris dans l’Accord de Paris et maintenir l’élan nécessaire pour une action ambitieuse sur le climat, a déclaré le Premier Ministre.  « L’ONU reste le meilleur espoir de fournir la volonté politique et l’engagement nécessaire pour éviter ce qui est une menace existentielle pour de nombreux petits États de cette famille des Nations Unies », a-t-il estimé. 

M. Malielegaoi a appelé à mobiliser tous les dirigeants des gouvernements, des ONG et du secteur privé afin de donner à nos jeunes et aux communautés rurales les moyens de lutter contre la menace constante des changements climatiques et contre la dégradation de l’environnement.  Il a souhaité que le soixante-quinzième anniversaire de l’ONU soit un point d’espoir pour les générations à venir plutôt qu’un point final du fait d’un héritage d’égoïsme, de déni et d’ignorance.  Bien que ce soient les petits États insulaires comme le Samoa qui sont les plus touchés par les impacts des changements climatiques, aucun État ne sera épargné à terme, a-t-il averti. 

Le Premier Ministre a indiqué que le Samoa avait présenté cette année au forum politique de haut niveau son deuxième examen national volontaire sur la mise en œuvre des objectifs de développement durable.  Il a aussi précisé que le Samoa avait accueilli, cette année, la quatre-vingt-quatrième session du Comité des droits de l’enfant des Nations Unies, une « première » historique.  Il a dit attendre avec intérêt l’impact positif de la réforme du système de développement des Nations Unies, qui promet une meilleure présence de l’ONU dans la région du Pacifique avec la création d’un bureau multipays pour les États du Pacifique-Nord. 

« En tant que petit État insulaire en développement (PEID), le Samoa a besoin d’une Organisation des Nations Unies qui produira un instrument juridiquement contraignant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones au-delà de la juridiction nationale (BBNJ) », a insisté le Premier Ministre du Samoa.  Il a enfin exhorté l’ONU à prendre en compte les vulnérabilités uniques des PEID aux impacts des changements climatiques en assurant la mise en œuvre efficace des Orientations de Samoa. 

M. MOEKETSI MAJORO, Premier Ministre du Lesotho, s’est inquiété des conséquences de la COVID-19 sur les capacités de son pays de réaliser les objectifs de développement durable liés à la santé.  M. Majoro s’est aussi dit convaincu que l’ONU était la seule institution universelle à même de sauvegarder la paix mondiale et d’assurer la survie de tous.  Parmi les plus importants défis pour la sécurité internationale, il a cité la prolifération des armes nucléaires et autres armes de destruction massive, le terrorisme, le commerce et trafic illicites d’armes, le trafic de drogue, les pressions sur la résolution des conflits et les efforts de consolidation de la paix, les menaces d’injustice sociale et économique et le sort des migrants, des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur du pays.  Dans le même temps, le Premier Ministre a regretté que « le racisme relève sa tête laide dans certaines parties du monde, menaçant les gains incommensurables de la civilisation ». 

Face à tous ces défis, M. Majoro a jugé raisonnable de suggérer que la composition du Conseil de sécurité inclue une proportion appropriée de pays en développement dans les catégories permanente et non permanente, conformément au Consensus d’Ezulwini. 

Parmi ses préoccupations au niveau international, le Premier Ministre du Lesotho s’est dit préoccupé de l’absence de progrès sur la question palestinienne.  Il a aussi regretté que, 29 ans après que le Conseil de sécurité a approuvé le Plan de règlement de la question du Sahara occidental puis créé la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) chargée de mettre en œuvre ce plan, le référendum d’autodétermination n’ait toujours pas eu lieu.  Il a regretté que le Conseil de sécurité semble réticent à utiliser tous les outils diplomatiques à sa disposition pour assurer le respect du plan de paix. 

Tout en saluant les efforts des pays africains pour lutter contre les conflits sur le continent, le Premier Ministre du Lesotho a rappelé à la communauté internationale le rôle premier des Nations Unies en tant que gardien de la paix et de la stabilité mondiales partout, y compris en Afrique. 

M. STEFAN LÖFVEN, Premier Ministre de la Suède, a souligné que la pandémie de COVID-19 était l’occasion de s’attaquer collectivement aux défis mondiaux, dont, outre la crise sanitaire, les changements climatiques, le creusement des inégalités, les violations du droit international et les menaces à la paix mondiale.  M. Löfven a renouvelé sa confiance dans les Nations Unies pour faire face à ces défis, à commencer par les efforts en cours de lutte contre la pandémie.  La Suède, a dit le Premier Ministre, a débloqué plus de 170 millions de dollars pour contribuer à ces efforts et appelle à garantir un accès « équitable et mondial » aux futurs vaccins contre la COVID-19, par l’entremise de la coopération internationale.

S’agissant de la crise climatique, le dirigeant suédois a appelé les États Membres à redéfinir leurs sociétés et diminuer leurs émissions de gaz à effet de serre, dans le respect des recommandations de la communauté scientifique.  Il a précisé que la Suède avait pour ambition de devenir la première nation à éliminer intégralement le recours à l’énergie fossile.  Parallèlement, M. Löfven a indiqué que son gouvernement travaillait main dans la main avec le secteur privé pour parvenir à l’objectif de neutralité carbone.  Dans la perspective de la future conférence sur le climat (COP26), qui se déroulera à Glasgow, il a exhorté les États Membres à définir des mesures ambitieuses pour mettre en œuvre l’Accord de Paris.

Le Premier Ministre a par ailleurs déploré la montée des discriminations sexuelles et de la violence de genre engendrée par la pandémie.  Cette dernière a également fourni un prétexte à de nombreux dirigeants du monde pour réduire au silence leur opposition, la société civile et les défenseurs des droits de l’homme, a-t-il dénoncé.

Quant aux millions de personnes dans le monde qui ont perdu leur emploi et leurs moyens de subsistance à cause de la pandémie, M. Löfven a estimé que le dialogue social sur le lieu de travail pouvait permettre d’infléchir cette tendance et d’élaborer des solutions.  « Nous avons besoin d’une transition durable sur le marché mondial du travail », a-t-il insisté, précisant avoir réfléchi à la question, en étroite collaboration avec le Président sud-africain, M. Cyril Ramaphosa, lors de leur rédaction conjointe du rapport de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur l’avenir du travail. 

Face à la montée du protectionnisme occasionnée par la crise sanitaire, le Premier Ministre a défendu les vertus du commerce libre, équitable et durable.  À ses yeux, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a un rôle essentiel à jouer pour le maintien d’un système commercial international fondé sur des règles.

Passant en revue l’actualité internationale, M. Löfven a appelé à l’instauration d’un cessez-le-feu doublé d’une augmentation du financement humanitaire au Yémen; à une transition démocratique rapide marquée par des élections libres au Mali; à une solution négociée, mettant fin à « l’occupation illégale » des territoires palestiniens sur la base de « paramètres convenus au niveau international », pour résoudre le conflit entre Israël et la Palestine; à une solution politique fondée sur la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité en Syrie; et à appuyer davantage le Soudan « sur le chemin difficile vers la démocratie ».

En Europe, le Premier Ministre a dénoncé « l’annexion illégale » de la Crimée et de Sébastopol par la Fédération de Russie, ainsi que « l’agression » dans l’est de l’Ukraine, qui constituent selon lui de graves violations du droit international et mettent en péril la sécurité mondiale.  Il a appelé, aux côtés de l’Union européenne (UE), à mettre en œuvre les accords de Minsk.  Condamnant l’empoisonnement du leader de l’opposition russe, M. Alexei Navalny, il a exhorté le Gouvernement russe à enquêter de manière approfondie et transparente sur la tentative d’assassinat.  Il s’est aussi inquiété de la situation au Bélarus et de la tenue d’élections, le 9 août, qui n’étaient selon lui ni libres ni équitables.  Il a jugé inacceptable « la répression accrue des manifestants pacifiques, des journalistes et des dirigeants de l’opposition » et appelé les dirigeants bélarussiens à mettre fin à la répression et à engager un véritable dialogue avec l’opposition. 

Le Premier Ministre a en outre exhorté les États-Unis et la Fédération de Russie à s’entendre sur une prorogation du « nouveau traité START », tout en invitant la Chine à se joindre aux discussions sur les arrangements de suivi.  En tant que dirigeant de l’un des 15 États non dotés d’armes nucléaires à poursuivre l’Initiative de Stockholm pour le désarmement nucléaire, M. Löfven a milité en faveur du succès de la future Conférence d’examen du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).  Enfin, s’agissant du dossier nucléaire iranien, le Premier Ministre a renouvelé son soutien et celui de l’UE en faveur de la mise en œuvre intégrale du Plan d’action global commun. 

M. RALPH E. GONSALVES, Premier Ministre, Ministre des finances, du service public, de la sécurité nationale, des affaires juridiques et des affaires intérieures de Saint-Vincent-et-les Grenadines, a souligné qu’en ces temps de pandémie, mais aussi de changements climatiques, de désertification, de défis pour la biodiversité, d’inégalités de l’économie mondiale et de contradictions d’un système multilatéral favorable aux puissants, « nous sommes en effet à un carrefour important ».  À ses yeux, « il nous faut d’urgence une ONU qui fonctionne bien et soit apte à sauvegarder les principes fondamentaux d’égalité souveraine, d’intégrité territoriale et d’indépendance politique de tous les États, tout en s’attaquant aux problèmes critiques de notre époque ». 

En effet, a poursuivi M. Gonsalves, les défis urgents de notre temps ne peuvent être résolus en construisant des murs, ni en se repliant dans l’isolationnisme nationaliste.  Tout au contraire, « nous devons construire des ponts », a-t-il lancé, plaidant pour davantage de solidarité face à la COVID-19.  À cet égard, s’est-il interrogé, le vaccin attendu dans les prochains mois sera-t-il disponible pour tous les peuples du monde?  Ou bien est-ce que seule la vie des riches compte?  Au-delà des « bonnes intentions » de l’ONU et de ses institutions spécialisées telles que l’OMS, il faut, selon le Premier Ministre, un « pacte international exécutoire fondé sur des règles entre tous les pays et les grandes sociétés pharmaceutiques, prévoyant la fourniture universelle et à moindre coût des fruits de la science et de l’ingéniosité humaine ». 

Tout en invitant les individus à renoncer à leur « individualisme atomisé », M. Gonsalves a souhaité que les pays lancent un « nouveau pacte de solidarité durable », à l’image de ce qu’a fait avec succès la Communauté des Caraïbes (CARICOM).  L’ONU doit être le lieu de ce « multilatéralisme de bonne foi », fondé sur le droit international, a-t-il ajouté.  Mais pour cela, les États puissants doivent faire reculer les contraintes « unilatérales, malsaines et préjudiciables » qu’ils imposent aux nations les plus faibles. 

En tant que petit État insulaire en développement (PEID), Saint-Vincent-et-les Grenadines s’efforce de mener un programme de développement progressiste et centré sur les personnes, a fait valoir son Premier Ministre.  Ces avancées sont aujourd’hui menacées par les conséquences économiques désastreuses de la récession mondiale due à la COVID-19.  Sans prêts concessionnels, sans une aide au développement accrue et sans un allégement de la dette, « nous risquons de prendre du retard », a-t-il averti, appelant à une « réforme ambitieuse » de l’architecture financière internationale, qui tienne compte de « l’exceptionnalisme » des PEID. 

Dénonçant par ailleurs l’embargo économique « illégal et inhumain » contre Cuba, ainsi que les sanctions unilatérales visant à renverser le « régime » de la République bolivarienne du Venezuela, M. Gonsalves s’est félicité de la solidarité dont font preuve ces deux pays en réponse à la COVID-19.  Il a vu une « absurde contradiction » dans le fait que « ceux qui emploient le mantra des droits de l’homme comme prétexte à une action unilatérale » privent des millions de personnes de leur droit à la dignité et au développement en déployant « les outils de politique étrangère les plus débilitants ». 

Dans ce contexte, a ajouté le Premier Ministre, il importe d’aborder la question de la réforme du Conseil de sécurité, notamment en élargissant le nombre des membres permanents pour y inclure « nos frères et sœurs du continent africain », en incorporant les « perspectives nuancées » des PEID et en améliorant les méthodes de travail de l’instance.  Actuellement et jusqu’à la fin de 2021 membre élu du Conseil de sécurité, Saint-Vincent-et-les Grenadines y veillera, dans le cadre du partenariat qu’elle a forgé au Conseil avec les trois membres non permanents de l’Afrique, a assuré M. Gonsalves. 

Enfin, alors que résonnent des appels à la justice raciale et sociale dans le monde entier, le Premier Ministre a réaffirmé que « la vie des Noirs compte ».  En cette Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, la campagne internationale pour la justice réparatrice doit faire partie de « tout effort sérieux visant à réaliser le programme de développement durable », a-t-il conclu.

En l’espace de 75 ans, la communauté internationale a réalisé de grandes avancées sous les auspices de l’ONU, a observé M. THONGLOUN SISOULITH, Premier Ministre de la République démocratique populaire lao.  Le mécanisme de résolution des conflits par des moyens pacifiques est devenu un principe dominant et les lois et traités internationaux ont servi d’outil pour prévenir et résoudre des problèmes dans des domaines tels que le désarmement, la discrimination raciale, la religion et les différences culturelles, la promotion et la protection des droits de l’homme et l’égalité des sexes, a-t-il énuméré. 

Plus important encore, a poursuivi le dirigeant, la coopération multilatérale sous le drapeau de l’ONU a mis en synergie les efforts collectifs pour relever les grands défis communs qu’aucun pays ne peut relever seul, notamment les changements climatiques, les pandémies et le terrorisme.  En outre, dans le cadre des objectifs de développement durable (ODD), des efforts collectifs ont aidé des millions de personnes à sortir de la pauvreté et de la faim et à avoir accès à l’éducation et aux services de santé. 

Il n’en demeure pas moins que, compte tenu de l’évolution de l’environnement régional et international, l’ONU doit « s’adapter et se renforcer » si elle veut s’acquitter de ses mandats en matière de paix et de sécurité internationales ainsi que de développement de la coopération, a nuancé M. Sisoulith.  À ses yeux, une réforme de l’Organisation est indispensable pour parvenir au règlement de problèmes tels que la question palestinienne ou encore l’embargo économique contre Cuba.  L’ONU doit également élever la coopération pour le développement au rang de priorité, ce qui implique d’agir collectivement. 

Face à la pandémie de COVID-19, qui frappe les populations, impacte les économies et efface les progrès accomplis dans la lutte contre la pauvreté et la réalisation des ODD, la priorité est, selon lui, de contenir la progression du virus et de prendre des mesures strictes de prévention.  C’est ainsi que la République démocratique populaire lao n’a enregistré que 23 cas d’infection et aucun décès lié au virus, un succès en dû à la coopération et à l’assistance de pays amis et d’organisations internationales. 

Le Premier Ministre a déclaré avoir bon espoir qu’un vaccin sûr et efficace soit développé sous peu.  Toutefois, a-t-il souligné, il convient qu’un accès universel à ce vaccin soit assuré, faute de quoi nous ne serons pas en mesure de répondre effectivement à la pandémie.  Il a remercié à cet égard l’OMS et les pays qui viennent en aide aux États Membres en difficulté. 

Pour M. Sisoulith, une autre priorité est le redressement économique post-COVID-19.  Pour revitaliser l’économie mondiale et stimuler la croissance, il a appelé la communauté internationale à s’attaquer à ce qui fait obstacle au commerce international, tout en contribuant à une coopération gagnant-gagnant et en trouvant des solutions au problème de la dette. 

Il importe aussi, selon lui, de construire une société résiliente aux changements climatiques, dont l’impact est énorme sur la sécurité alimentaire et le développement.  À cette fin, la communauté internationale doit fournir un soutien financier et un savoir-faire technologique aux pays les moins avancés pour qu’ils puissent répondre aux catastrophes naturelles, a plaidé le dirigeant.  De même, il a appelé tous les pays à consommer les ressources naturelles de manière durable, à recourir davantage aux énergies alternatives et à honorer les engagement pris dans le cadre de l’Accord de Paris. 

Mme SOPHIE WILMÈS, Première Ministre de la Belgique, a parlé des trois piliers sur lesquels la Belgique bâtit l’entraide et la coopération avec des pays partenaires pour parvenir à un multilatéralisme efficace: « confiance, responsabilité et engagement ».  L’année 2020 restera dans nos mémoires comme une année douloureuse, a dit Mme Wilmès en faisant référence à un virus qui a emporté des centaines de milliers de personnes et brisé de nombreuses familles à travers le monde, avec un impact économique colossal.  La COVID-19 ne doit pas nous aveugler mais nous ouvrir les yeux sur les faiblesses que cette pandémie a mises à nu, a-t-elle recommandé, évoquant les modèles de société et les sources de tensions géopolitiques et des conflits. 

S’agissant des tensions géopolitique, Mme Wilmès a noté que la situation dans le Golfe reste une source de grave préoccupation et exige une grande prudence.  Elle a dit que le Plan d’action global commun restait crucial pour garantir le caractère exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien, avant de souhaiter que la levée prochaine de l’embargo sur les armes classiques ne mette pas en péril l’accord.  Au Moyen-Orient, l’objectif à atteindre est une perspective de paix juste et durable, a-t-elle poursuivi, rappelant qu’il ne peut y avoir de paix au Moyen-Orient sans une solution permanente et juste à la question palestinienne. 

En Afrique, elle a jugé très préoccupante la situation sécuritaire dans une grande partie du Sahel, malgré les nombreux efforts déployés et une mobilisation internationale accrue.  Elle s’est également inquiétée des conséquences du coup de force mené par des membres mutins des Forces armées maliennes, qui a remis en cause l’ordre juridique et constitutionnel du Mali. 

Par ailleurs, la Première Ministre a estimé que l’urgence climatique est un défi pour la paix, sachant que de plus en plus de régions du monde subissent les implications sanitaires, sécuritaires et humanitaires du dérèglement climatique et de la dégradation de la biodiversité.  Elle a jugé que la poursuite des objectifs de développement durable et plus généralement du Programme 2030 sont des outils essentiels pour répondre aux défis mondiaux auxquels nous sommes confrontés, qu’il s’agisse de pauvreté, d’inégalités, de climat ou encore de dégradation de l’environnement.

En outre, Mme Wilmès a appelé à faire confiance à la justice qui doit être bâtie sur la conviction inébranlable que tous les individus sont égaux et qu’aucune forme de discrimination ne peut altérer cette égalité.  « En tant que Nations Unies, nous avons la responsabilité de faire fonctionner la gouvernance mondiale », a-t-elle insisté, avant d’appeler à une réforme en vue de gagner en efficacité, en vue d’une plus grande transparence et en vue d’une meilleure réactivité et adaptabilité.  « Faire fonctionner la gouvernance mondiale et le multilatéralisme implique aussi de ne pas entraver le fonctionnement de ses organes existants », a insisté la Première Ministre, avant de réaffirmer son ferme soutien à la CPI, organe essentiel dans la lutte contre l’impunité des crimes les plus graves. 

Soulignant que l’attachement au multilatéralisme fait partie de l’ADN du Royaume de Belgique, Mme Wilmès a indiqué que cet engagement avait aidé la Belgique à obtenir son sixième mandat au Conseil de sécurité de l’ONU pour l’exercice 2019-2020.  Un Conseil qu’elle a trouvé « imparfait » et dont les 15 États membres ne sont, à son avis, pas toujours capables de résoudre tous les conflits. 

En outre, elle a estimé que les Nations Unies pouvaient faire preuve d’ambition en matière de justice transitionnelle, en adoptant une approche globale axée sur les droits humains, la centralité de la justice et de la reddition des comptes.  Elle a dit que l’engagement était le moteur de la coopération au développement et de l’aide humanitaire de son pays, avant de plaider en faveur d’un cadre politique mondial pour les droits des femmes, soit la moitié de la population mondiale.

M. MICHEÁL MARTIN, Taoiseach de l’Irlande, a indiqué que son pays, qui vient d’être élu membre non permanent du Conseil, fera tout pour honorer la confiance placée en lui par l’Assemblée générale.  Trois principes guideront le mandat de l’Irlande: instaurer la paix, renforcer la prévention et assurer une reddition de comptes.  L’Irlande a l’intention d’améliorer tous les aspects du maintien de la paix, à la fois pour les Casques bleus et les communautés hôtes.  M. Martin a déclaré que la défense des droits de l’homme et de l’égalité entre les genres doit être au cœur de toutes les missions.  « Les processus de paix ne peuvent pas réussir sans une pleine implication des femmes. »  Il a jugé vitale la prévention des conflits, en exhortant l’ONU à intervenir de manière précoce, à mettre un terme aux violations des droits de l’homme et à appuyer les efforts de paix des acteurs locaux.  Il a rejeté l’argumentation selon laquelle les questions de changements climatiques, la famine et les droits humains ne sont pas du domaine du Conseil de sécurité.  « Je veux être très clair à ce sujet. »

M. Martin a aussi apporté son appui à la Cour pénale internationale, avant de dire sa préoccupation devant les atteintes portées à la Cour et à son personnel.  Il a insisté sur la responsabilité du Conseil de sécurité de prévenir les atrocités de masse, avant de dénoncer les abus dans l’usage du droit de veto.  Dans ce droit fil, M. Martin a plaidé pour une réforme de la composition du Conseil, afin d’assurer une meilleure représentation des pays africains. 

L’Irlande compte œuvrer sans relâche pour promouvoir des progrès tangibles en vue d’une solution à deux États entre Palestiniens et Israéliens, a-t-il dit, avant d’insister sur la nécessité de négociations directes.  Il a ensuite exhorté la République populaire démocratique de Corée à abandonner toutes ses armes de destruction massive de manière vérifiable et irréversible.  S’agissant de l’Iran, il a appelé à pleinement appliquer le Plan d’action global commun, avant d’exhorter ce pays à cesser ses activités déstabilisatrices dans la région. 

M. Martin a souhaité attirer l’attention sur les succès du Conseil de sécurité, notamment en Colombie, tandis que de nombreux accords de paix ont été négociés avec son appui.  « Mais nous avons besoin de résultats plus concrets, plus souvent. »  Enfin, M. Martin a rappelé que les petits pays comme l’Irlande dépendent d’un ordre international régi par des règles pour survivre et prospérer.  « En tant que membre du Conseil, nous défendrons inlassablement la primauté des Nations Unies et du multilatéralisme. »

M. SAAD-EDDINE EL OTHMANI, Chef du Gouvernement du Royaume du Maroc, a indiqué que la pandémie avait révélé trois vulnérabilités à cause des changements climatiques, des inégalités et d’une coopération internationale inefficace. Rappelant qu’il reste neuf ans pour réaliser le Programme 2030, il a indiqué que « si nous avions progressé dans la réalisation dudit Programme, les retombées de la pandémie auraient été moins graves ».  Il a appelé à un réexamen des plans de développement, comme cela va être le cas au Maroc.  Il a rappelé que le Maroc a rejoint l’ONU en 1956, l’une des premières décisions du pays après son indépendance, avant de plaider pour une réforme de l’ONU.  L’heure est à la prise de mesures concrètes, axées sur des résultats, a déclaré le Chef du Gouvernement. « Le multilatéralisme est toujours en vie et demeure une nécessité. »  

M. El Othmani a détaillé la réponse marocaine au virus, qui a mobilisé toute la société sous la direction du Roi, avant d’appeler à la fourniture de vaccins de manière juste et équitable.  Il s’est dit en faveur de l’adoption d’un instrument juridique souple pour une mobilisation internationale face à de futures urgences sanitaires.  La pandémie nous a montré que ce nous croyions était faux, a-t-il dit.  Il a en effet expliqué que les prédictions terribles sur les conséquences de la pandémie en Afrique ne se sont pas réalisées, grâce à la résilience de sa population et à la compétence des gouvernements.  M. El Othmani a appelé à une réduction de la dette des pays vulnérables, ainsi qu’à des solutions novatrices au financement du développement. 

Il a indiqué que la position de son pays sur le dossier du Sahara marocain demeure « sans ambiguïté ».  Il a précisé que tout règlement définitif devra respecter certains critères, tels que la reconnaissance de la pleine souveraineté du Maroc et de la validité de son plan d’autonomie, le respect des principes contenus dans les résolutions du Conseil en vue d’une solution réaliste et le rejet de toute proposition contraire auxdits principes.  Il a noté que toutes les propositions susceptibles de jeter le trouble ont été rejetées, avant de se féliciter du nouvel élan pris par le processus sous les auspices de l’ONU.  M. El Othmani a cité la tenue récente de deux tables rondes à Genève. 

Il s’est ensuite dit vivement préoccupé par la situation dans les camps de Tindouf et déploré le fait que le pays hôte ait placé à leur tête « un groupe armé sécessionniste » en violation des normes internationales.  Il s’est dit soucieux du sort des personnes prises au piège dans ces camps et exhorté le pays hôte à permettre l’accès du Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) à ces camps afin de procéder à l’enregistrement de leur population.  Un tel enregistrement est crucial pour mettre un terme au détournement de l’aide humanitaire, a déclaré M. El Othmani.  

Enfin, rappelant que la sécurité du Maroc est liée à celle de la Libye, le Chef du Gouvernement a plaidé pour une solution politique, sans ingérence extérieure.  Il a aussi défendu une solution juste et durable au Moyen-Orient, permettant aux Palestiniens d’établir un État indépendant. 

M. TIMOTHY HARRIS, Premier Ministre de Saint-Kitts-et-Nevis, a présenté son pays comme un exemple mondial en matière de lutte contre la COVID-19 puisqu’il a réussi à contenir la propagation, avec un faible taux d’infection et aucun décès.  Par ailleurs, il a déclaré que l’assistance multilatérale est essentielle pour des pays comme le sien lorsqu’ils sont confrontés à des défis mondiaux.  « Nos ressources fiscales sont limitées et ont été sévèrement mises à l’épreuve », a-t-il dit avant d’exhorter les pays avancés et les institutions financières internationales à répondre positivement à l’appel des pays en développement.  

Compte tenu des vulnérabilités économiques et environnementales des petits États insulaires en développement, il a fait remarquer que ces pays seront probablement confrontés à l’effet multiplicateur de la pandémie, en particulier lorsque ces pays devront faire face aux ouragans.  Le Premier Ministre a ajouté que l’impact des changements climatiques pèse lourdement sur la vie quotidienne des habitants de Saint-Kitts-et-Nevis qui est la plus petite nation indépendante de l’hémisphère occidental.  

Alors que l’ONU a averti, le mois dernier, que les pays risquent de ne pas atteindre les objectifs cruciaux de préservation et de protection de la biodiversité de la terre, le Premier Ministre a souligné la pertinence de l’Objectif 15 de développement durable 15, qui nous demande de protéger, de restaurer et de promouvoir l’utilisation durable des écosystèmes terrestres, de gérer durablement les forêts, de lutter contre la désertification, d’arrêter et d’inverser la dégradation des terres et de stopper la perte de biodiversité.  Il a dit son impatience de se joindre à ses collègues des petits États insulaires en développement au Sommet de haut niveau sur la biodiversité pour défendre la cause de la biodiversité non seulement sur terre, mais aussi en haute mer.  Le Premier Ministre a appelé à protéger l’océan qui est une force vitale pour les petits États insulaires.  

Dans ce contexte, il s’est réjoui de la tenue, en 2021, du Sommet sur les systèmes alimentaires, disant qu’il arrivera à point nommé.  Il a estimé que les insuffisances actuelles, exposées par la pandémie, exigent un examen rigoureux de nos stratégies de production alimentaire et de sécurité nutritionnelle.  Il s’est dit particulièrement encouragé par la réponse positive des habitants de Saint-Kitts-et-Nevis à l’appel du Gouvernement à renforcer la sécurité alimentaire en intensifiant les investissements dans l’agriculture et la pêche.  

M. ALLEN MICHAEL CHASTANET, Premier Ministre de Sainte-Lucie, a rappelé que les petits États insulaires en développement (PEID) comme le sien étaient particulièrement sujets aux chocs environnementaux, économiques et financiers.  « Nos circonstances uniques et les vulnérabilités qui en résultent nous ont exposés aux ravages de la double crise de la pandémie et des changements climatiques », a-t-il déclaré. 

Or, selon lui, l’architecture économique mondiale créée après la Seconde Guerre mondiale n’a jamais pris en compte les PEID.  Et malgré « l’empathie et la compréhension des technocrates » du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale et de notre propre Banque de développement des Caraïbes, ainsi que d’autres institutions financières internationales », M. Chastanet a estimé que ces organismes demeuraient régis par leurs « structures de gouvernance inflexibles ». 

Le Premier Ministre a ensuite énoncé une série de paradoxes dont sont, selon lui, victimes les PEID.  Ces pays sont les plus endettés, mais les moins susceptibles d’obtenir un allégement de la dette ou un financement concessionnel.  Ce sont les plus petits producteurs de biens et services mondiaux, mais les plus limités par les règles du commerce international.  Ce sont les plus faibles contributeurs au financement du terrorisme ou aux infractions bancaires, mais les plus ciblés par les « listes grises et listes noires placardées dans le monde entier, sapant notre réputation ».  Ce sont, enfin, les plus faibles émetteurs de carbone, mais les plus touchés par les changements climatiques. 

M. Chastanet a rappelé que, ces dernières années, les PEID avaient plaidé pour la création d’un indice de vulnérabilité, afin de déterminer avec plus de précision l’éligibilité d’un pays à l’aide au développement et à des conditions préférentielles.  « Pourtant, rien n’a changé », a-t-il constaté.  Notre richesse est toujours déterminée en fonction du PIB par habitant, même si nous savons désormais avec certitude que ce n’est pas une mesure précise.  « Réunion après réunion, tout ce que nous recevons, ce sont des platitudes et toujours plus de discussions », s’est impatienté le Premier Ministre.  « Et pendant ce temps, les tempêtes et les ouragans, les crises et les pandémies continuent de se produire. »

Après chaque nouveau choc, a poursuivi M. Chastanet, les PEID sont contraints de s’endetter encore davantage.  «  Il nous sera bientôt impossible de survivre avec ces règles figées qui ont été créées sans tenir compte de nos circonstances exceptionnelles », s’est insurgé le dirigeant, appelant à créer un nouvel ordre mondial pour permettre aux PEID de s’en sortir par eux-mêmes. 

Il est par ailleurs temps de lever l’embargo économique imposé à Cuba, a déclaré le Premier Ministre.  Selon lui, cette mesure touche non seulement le peuple cubain, mais également la région des Caraïbes tout entière.  Il est également temps, selon lui, de « reconnaître sur le plan international des États tels que Taiwan », afin qu’ils puissent s’engager de manière significative dans des processus mondiaux et partager leurs meilleures pratiques.  « Taiwan a ses propres élections, sa propre monnaie, contrôle son propre espace aérien et possède sa propre force militaire », a insisté M.  Chastanet.  « Une population de près de 24 millions de personnes est trop nombreuse pour être laissée de côté. »  Au point qu’aux yeux du Premier Ministre, l’exclusion continue de Taiwan remet en question les principes mêmes sur lesquels l’ONU est fondée. 

M. KEITH ROWLEY, Premier Ministre de Trinité-et-Tobago, a indiqué qu’en tant que petit État insulaire en développement (PEID) frappé par la pandémie de COVID-19, son pays était obligé de trouver l’équilibre entre sauver des vies et préserver les moyens de subsistance avec des moyens limités.  Les frontières ont été fermées dès mars de cette année, ainsi que les services non essentiels afin d’empêcher l’importation et la propagation du virus, a-t-il dit en expliquant les ajustements apportés pour remédier aux conséquences économiques sur les populations les plus vulnérables qui ont perdu les moyens de subvenir à leurs besoins.  Cette expérience, a relevé le Premier Ministre, témoigne de la nécessité pour les PEID d’être soutenus par un environnement économique international favorable, par l’activité et le financement des entreprises, par le commerce international, ainsi que par la coopération technique et, surtout, le multilatéralisme. 

La pandémie de COVID-19 menace d’inverser les gains réalisés pour atteindre les Objectifs de développement durable (ODD), a reconnu M. Rowley.  Elle accentue les menaces posées par le trafic illicite d’armes légères et de petit calibre, la piraterie, le trafic d’êtres humains et la cybercriminalité.  C’est la raison pour laquelle Trinité-et-Tobago reste attachée au Traité sur le commerce des armes, un instrument indispensable pour faire face au commerce illicite des armes, a indiqué le Premier Ministre.  Trinité-et-Tobago soutient aussi le mandat de la Cour pénale internationale (CPI), qui a été créée pour tenir responsables ceux qui commettent des crimes en vertu du droit international.  Le Premier Ministre a exhorté les États, qui ne l’ont pas encore fait, à soutenir la CPI.  

M. Rowley a dit que son pays s’est rapidement adapté à l’utilisation de plates-formes à distance pour travailler.  Cette dépendance aux plates-formes numériques devra se traduire par des possibilités pour les jeunes dans des domaines liés à la cyber technologie et à la cybersécurité, a-t-il espéré.  Face au risque élevé pour Trinité-et-Tobago d’être affectée par les effets néfastes des changements climatiques, le Premier Ministre a dit que le pays continue de mettre l’accent sur des approches à plusieurs volets pour l’adaptation future et l’atténuation, dans les limites de ses capacités financières.  

La pandémie de COVID-19, conjuguée à la baisse importante des prix de l’énergie, a accéléré les efforts de diversification de l’économie du pays, a-t-il poursuivi en signalant que le Gouvernement avait alloué des ressources et augmenté les investissements dans les secteurs de l’agriculture et du tourisme.  Le Premier Ministre a rappelé que la Commission économique des Nations Unies pour l’Amérique latine et les Caraïbes (ECLAC) a averti qu’une crise de la dette se profile pour les économies de la sous-région avant d’exhorter la communauté internationale à apporter son aide financière aux pays en développement, y compris aux pays à revenu intermédiaire comme Trinité-et-Tobago.  

Concernant les Nations Unies, M. Rowley a soutenu la réforme du Conseil de sécurité et l’adaptation de l’ONU à l’environnement géopolitique en constante évolution.  Le Conseil doit refléter la diversité qui caractérise et représente vraiment l’ONU, a-t-il demandé.  Il a également appelé à la levée inconditionnelle de l’embargo économique, commercial et financier contre Cuba, et demandé aux États Membres de soutenir les initiatives de la CARICOM, encouragées par la Norvège et la Barbade, pour amener tous les parties au Venezuela à accepter le dialogue et à respecter les droits de l’homme. 

M. HUBERT  ALEXANDER MINNIS, Premier Ministre des Bahamas, a rappelé que la dernière fois qu’il s’est adressé à l’Assemblée, au lendemain de l’ouragan Dorian, il avait imploré les dirigeants mondiaux de traiter l’urgence climatique mondiale comme le plus grand défi auquel l’humanité est confrontée.  « Nous ne savions pas que quelques mois plus tard à peine, un défi encore plus grand émergerait, forçant le monde à s’arrêter brutalement », a-t-il regretté en parlant de la pandémie de COVID-19.  Alors que le tourisme est la principale source de l’économie des Bahamas, le Premier Ministre a expliqué que le pays avait dû fermer temporairement ses frontières et réglementer la circulation des personnes pour limiter la propagation de la maladie, la priorité étant de protéger les vies et d’assurer la sécurité des habitants de l’île.  Cela a provoqué l’une des baisses les plus importantes du nombre de visiteurs depuis l’avènement du tourisme moderne aux Bahamas, a-t-il indiqué en parlant des conséquences du ralentissement de l’activité économique, dont une augmentation sans précédent du chômage.  Cela a conduit le Gouvernement à mettre en place un programme d’allocations chômage et d’aide aux travailleurs indépendants, ainsi que d’autres programmes de sécurité sociale, y compris le Programme national de distribution alimentaire, le plus grand programme d’alimentation de l’histoire de son pays, a-t-il expliqué. 

Les petits pays insulaires en développement comme les Bahamas semblent toujours opérer dans un cercle vicieux: la reprise est toujours confrontée à des chocs exogènes et à des événements climatiques successifs.  Les Bahamas, a poursuivi M.  Minnis, ont connu des ouragans majeurs en 2015, 2016, 2017 et en septembre 2018 avec l’ouragan Dorian, la plus grande tempête de l’histoire de l’Atlantique.  Les évaluations initiales de l’ONU des pertes et dommages étaient de 3,4 milliards de dollars.  Aujourd’hui, les projets d’infrastructure et de logement sont en cours, tandis que les Bahamas luttent contre l’impact de la COVID-19 et continuent à tendre la main aux partenaires internationaux pour obtenir l’aide indispensable à la restauration et à la reconstruction de l’île. 

La question cruciale qui demeure, pour le Premier Ministre, c’est de savoir pourquoi les pays à revenu intermédiaire sont toujours évalués par les institutions financières internationales en utilisant des méthodologies dépassées qui ne tiennent pas compte du niveau d’exposition, de vulnérabilité et de capacité d’un pays à se remettre de chocs exogènes.  Il convient de noter que l’examen par la CEPALC de l’impact de la COVID-19 conclut que les réalisations en matière de développement dans les Caraïbes et en Amérique latine ont été inversées d’au moins une décennie, a souligné le Premier Ministre, alors que les projections de la Banque mondiale indiquent qu’au moins 100 millions de personnes vont tomber dans l’extrême pauvreté.  Il a donc réitéré son appel à l’institutionnalisation d’un indice de vulnérabilité dans les processus décisionnels des institutions financières internationales et de la communauté internationale des donateurs.  Il a également fait écho à l’appel de la région pour la capitalisation d’un fonds pour la résilience caribéenne.  Saluant la décision du groupe G20 de suspendre les paiements du service de la dette pour les pays les moins avancés, le Premier Ministre a proposé que cette concession soit étendue à d’autres groupements économiques. 

Pour ce qui est de la relève post-COVID-19, le Ministre a demandé que les pays en développement aient accès aux vaccins via un processus d’achat transparent et à des prix abordables.  Alors que les Bahamas commencent prudemment à rouvrir le pays aux visiteurs, M. Minnis a déclaré que «  même si nous nous adaptons à cette nouvelle normalité, aucun pays ne peut survivre seul à cette pandémie  ». 

M. ABDALLA HAMDA HAMDOK, Premier Ministre du Soudan, a salué le rôle joué par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et le soutien technique qu’elle a apporté à son pays dans le cadre de la lutte contre la pandémie de COVID-19.  Une aide d’autant plus appréciée, a-t-il observé, que des pluies torrentielles ont provoqué depuis le mois d’août de gigantesques crues dans la vallée du Nil.  Évoquant ensuite la situation politique au Soudan, le Premier Ministre s’est enorgueilli de la signature, le 31 août à Djouba, au Soudan du Sud, d’un accord de paix qui a pris en compte toutes les causes profondes du conflit et qui a été paraphé par son gouvernement et plusieurs groupes rebelles avant sa ratification prévue le 3 octobre prochain, a-t-il annoncé.  Le Chef de gouvernement a exprimé ses remerciements à l’ONU et à ses agences humanitaires, ainsi qu’à la communauté des donateurs pour leurs efforts en vue de faciliter le retour des personnes qui avaient fui les violences.  Le « Gouvernement de la révolution », a-t-il assuré, a levé tous les obstacles à l’acheminement de l’aide aux populations dans les zones de conflit.  

Mettant en cause le précédent Gouvernement, le Premier Ministre a affirmé que le sien a entrepris des réformes visant à corriger les « malformations de la structure économique » qui avaient contribué à l’inflation, avec l’impact négatif que l’on sait sur les populations locales.  L’objectif recherché est de renforcer la production et la productivité aussi bien dans les villes que les zones rurales.  M. Hamdok a aussi évoqué les grandes lignes de la future constitution soudanaise, qui consacre un chapitre entier aux droits de l’homme.  Afin de pouvoir la mettre en œuvre, son gouvernement a entrepris d’évaluer les dommages causés par le précédent « régime totalitaire ».  Le texte, a-t-il promis, garantira les droits de la femme et les libertés d’expression et de réunion.  Il a précisé qu’en septembre 2019, le Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a rouvert et débuté son travail en janvier 2020.  

Après avoir salué l’initiative de l’Allemagne, qui a établi le Groupe des Amis du Soudan après un isolement « de plus de 30 ans », le Premier Ministre a soutenu que son pays n’a cessé de contribuer positivement à la stabilité de l’Afrique, particulièrement dans la sous-région, notamment en tant que Président de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).  Tout en plaidant pour l’annulation de la dette extérieure et un « traitement préférentiel » de la part des institutions financières internationales, M. Hamdok a demandé que les États-Unis retirent le Soudan de leur liste des pays qui parrainent le terrorisme.  Khartoum est de retour dans le giron de la communauté internationale, a-t-il souligné. 

M. BOB LOUGHMAN WEIBUR, Premier Ministre de Vanuatu, a déploré qu’en cette époque d’incertitude et de danger, pendant laquelle les États auraient tout à gagner à se réunir en personne, ils ne peuvent le faire.  Il faut, a-t-il dit auxdits États, s’unir pour vaincre le fléau qu’est la COVID-19 et pour aider les familles séparées, baisser les taux de chômage, atténuer l’impact de la fermeture des entreprises et fournir des soins à tous, tout en compensant la chute drastique des revenus. 

La pandémie creuse les divisions communautaires, attise les tensions géopolitiques, modifie les relations commerciales et menace la paix, a prévenu le Premier Ministre.  Il est particulièrement inquiétant, a-t-il estimé, de voir ces problèmes complexes s’aggraver dans le monde alors que le multilatéralisme subit de graves pressions.  M. Weibur a appelé à un multilatéralisme « sans exclusive », à la solidarité mondiale et à une coopération internationale concertée, insistant sur le rôle « central » de l’ONU. 

Pour le moment, s’est réjoui le Premier Ministre, aucun cas du virus n’a été détecté à Vanuatu, mais la fermeture précoce des frontières, qui a permis de préparer la riposte sanitaire, a eu de graves répercussions économiques et sociales.  Vanuatu a également été frappé, en avril dernier, par un cyclone tropical de catégorie 5 et reste menacé par d’autres phénomènes climatiques extrêmes.  

Pour autant, l’année 2020 est importante car elle marque le quarantième anniversaire de l’indépendance et le retrait du pays de la liste des pays les moins avancés (PMA).  Vanuatu est donc à la recherche de partenaires au développement et commerciaux aux niveaux bilatéral, régional et multilatéral pour mener sa stratégie de transition, dont les mesures prioritaires exigeant un appui ciblé sur une période de cinq ans et celles visant à appuyer le commerce et la participation aux fora internationaux. 

M. Weibur a jugé impératif de mettre en place l’architecture internationale nécessaire pour faire face aux changements climatiques et assurer une bonne gestion des océans.  Il a appelé les institutions financières multilatérales à annuler et alléger la dette et à créer des programmes de financement concessionnels et de subventions sur mesure.  Ces programmes offriraient aux pays concernés l’espace budgétaire nécessaire pour faire face à la crise actuelle, tout en finançant la mise en œuvre des priorités liées au développement durable, a-t-il estimé. 

Le Premier Ministre a également plaidé pour la recapitalisation des instruments financiers tels que le Fonds vert pour le climat mais pour la simplification du processus d’accès à ce type de fonds.  L’ONU, a ajouté le Premier Ministre, doit trouver les moyens de traiter des mesures d’atténuation des risques prises par les grandes banques internationales qui empêchent les banques nationales, en particulier celles des petits États insulaires en développement, à nouer des relations de correspondance bancaire.  Il a aussi insisté sur la nécessité pour chaque pays d’avoir un accès équitable, juste et opportun au futur vaccin contre la COVID-19.  L’ONU devra notamment veiller à ce que les pays les plus vulnérables y aient accès, a-t-il insisté. 

M. Weibur s’est par ailleurs attardé sur les liens culturels qui unissent Vanuatu et les îles Umaenupne et Umaeneag, plus communément connues sous le nom de Matthew et Hunter.  Il a dénoncé les revendications de la France, alors que ces îles faisaient déjà partie de Vanuatu pendant la période coloniale.  Aujourd’hui les Ni-Vanuatu ne peuvent même y effecteur leurs rites culturels et religieux.  Il s’est félicité de la perspective de la restitution de ces territoires, grâce à l’aide de l’ancien Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones. 

M. JOSÉ ULISSES CORREIA E SILVA, Premier Ministre et Ministre de la réforme de Cabo Verde, a estimé que la pandémie a aggravé encore les inégalités entre pays développés et en développement.  Peu de pays dans le monde ont les ressources pour faire face aux pertes « extraordinaires » occasionnées par la pandémie de COVID-19 et aux dépenses nécessaires pour relancer les économies. 

Il a cité l’exemple de l’Union européenne, qui a débloqué une enveloppe de 750 milliards d’euros pour soutenir ses États membres.  Les stimuli financiers des pays les plus riches dépassent les centaines de milliards de dollars, a-t-il observé.  Mais qu’en est-il de l’Afrique et des petits États insulaires en développement?  Sont-ils en mesure de supporter les coûts, la reprise et la relance sur la seule base de leurs économies? «  Bien sûr que non!  », s’est résigné le Premier Ministre. 

Il a par conséquent plaidé en faveur d’une « collaboration  mondiale  » et insisté pour que l’accès au futur vaccin soit «  équitable et universel  ».  Il n’a pas oublié de réclamer l’annulation pure et simple de la dette extérieure des pays comme le sien, arguant tout cela doit faire l’objet d’un «  pacte de responsabilité globale » pour ne laisser personne de côté. 

L’annulation de la dette extérieure, a insisté le Premier Ministre, est « essentielle », non seulement pour faire face à la récession et aux déséquilibres macroéconomiques provoqués par la crise sanitaire, mais également pour relancer le développement durable des pays africains. 

Le dirigeant s’est prononcé en faveur d’une approche qui tienne compte des spécificités des petits États insulaires en développement (PEID), à savoir leur grande vulnérabilité aux chocs économiques et écologiques et leur dépendance au secteur du tourisme, «  dévasté par la pandémie mondiale  ».  Il a jugé «  parfaitement logique » de multiplier les initiatives d’annulation ou d’allégement de la dette.  Pour les PEID, a-t-il dit, la réponse de la communauté internationale ne saurait se borner à un problème de revenu par habitant.  Il faut plutôt se concentrer sur « les preuves ». 

En ce soixante-quinzième anniversaire de l’ONU, le dirigeant a appelé à poursuivre la réforme de l’Organisation, notamment en ce qui concerne la composition et le fonctionnement du Conseil de sécurité, la revitalisation de l’Assemblée générale, le renforcement du Conseil économique et social (ECOSOC) et l’alignement des méthodes de travail entre ces principaux organes.  «  Il est urgent de mener à bien ces réformes pour la consolidation de la paix et la promotion du développement  », a-t-il insisté. 

M. CHRISTIAN NTSAY, Premier Ministre de Madagascar, a réaffirmé que, dans le contexte d’incertitude instauré par la pandémie, les valeurs partagées de l’Organisation telles que « l’unité, la solidarité entre les peuples et la coopération entre les nations » doivent prévaloir. 

Depuis l’annonce officielle de la pandémie du COVID-19 en mars 2020, Madagascar, a dit le Premier Ministre, a rapidement mis en œuvre une « stratégie de riposte multisectorielle ».  Les trois objectifs du Gouvernement ont été de « juguler la propagation de la COVID-19 », de « venir en aide aux populations vulnérables, de répondre efficacement aux besoins vitaux » et de «  protéger et stimuler l’économie pour maintenir le capital humain et faciliter la relance ».  

Le Gouvernement a également mis en place un centre de commandement opérationnel aux niveaux national et régional, et développé des « aides sociales multiples » pour soutenir les familles impactées par la crise sanitaire.  L’État malgache aide par ailleurs le secteur privé à préserver les emplois et les outils de production à travers des allègements fiscaux « sans précédent  ».  Il appuie les différents secteurs impactés pour mieux faire face aux conséquences de la crise sanitaire, grâce à des palettes d’aides, comme la dotation de semences et intrants aux paysans, l’octroi de « packs-vivres » à certains travailleurs impactés, la commande de plus de 5  millions de masques auprès des entreprises franches et des petites entreprises privées, et le lancement d’un grand projet d’infrastructures.  

Dans le domaine de la recherche et l’innovation, le Premier Ministre Ntsay a vanté la fabrication d’un produit nommé le « Covid-Organics (CVO) », qu’il a décrit comme un « remède traditionnel amélioré pour lutter efficacement contre la Covid-19 ».  Fruit d’importants travaux de recherche effectués par l’Institut Malagasy de Recherche Appliquée (IMRA), le produit profite du statut reconnu de Madagascar comme sanctuaire de la biodiversité mondiale, déployant une pharmacopée traditionnelle très variée et riche.  Le CVO, « aux vertus préventives et curatives », a pu « sans nul doute » éviter à Madagascar « une tragédie humaine » puisque le pays a procédé à une distribution massive du traitement, couplée à la prise de multiples mesures sanitaires et sociales.  

Le Premier Ministre a rendu hommage à l’ensemble du corps médical de Madagascar, aux forces de défense et de sécurité, à tous les volontaires et bénévoles, et à tous les acteurs des services essentiels publics et privés.  Grace à eux, l’île affiche un taux de guérison de 93%, et un taux de létalité de 1,2%, a affirmé le Premier Ministre. 

Selon M. WALID AL-MOUALEM, Vice-Premier Ministre et Ministre des affaires étrangères et des expatriés de la République arabe syrienne, l’ONU s’éloigne de ses principes fondateurs car certains gouvernements ont « illégalement imposé leurs propres intérêts à d’autres », en utilisant les Nations Unies pour faire avancer leurs intérêts.  Déplorant une réalité « aux antipodes » du multilatéralisme et la « primauté du politique sur l’humanitaire », M. Al-Moualem a dénoncé les mesures coercitives unilatérales imposées au peuple syrien alors que la pandémie fait rage. 

Il a particulièrement insisté sur les conséquences de la nouvelle loi américaine, le « Caesar Syria Civilian Protection Act », sur la population civile syrienne.  Il a décrit le blocus des médicaments et équipements médicaux « vitaux », une entrave, a—t-il souligné, aux efforts de reconstruction « après les destructions causées par les terroristes », les « champs de blé incendiés » et les « champs de pétrole pillés  » du fait de cette loi.  Cette loi, a-t-il insisté, aggrave les conditions de vie des Syriens et empêche le retour des réfugiés et des déplacés.  

Il est clair, a constaté le Vice-Premier Ministre, que le véritable objectif du « Caesar Act » est de faire pression sur les Syriens, sur leurs moyens de subsistance et sur leur vie quotidienne.  C’est une « tentative inhumaine » d’étouffer les Syriens, comme l’a été George Floyd et les autres victimes de la police américaine.  Nous sommes étouffés comme Israël étouffe les Palestiniens « au quotidien » , a ajouté le Vice-Premier Ministre.  Ce type de mesures coercitives unilatérales, a-t-il dit, viole clairement le droit international.  Il a aussi dénoncé l’échec de la mise en en œuvre des résolutions du Conseil contre le terrorisme.  

Le Vice-Premier Ministre s’est particulièrement montré virulent contre la Turquie qu’il a accusée de « financer le terrorisme » et de « sponsoriser la terreur » dans la région.  La Turquie, a-t-il accusé, « a facilité le passage de dizaines de milliers de combattants terroristes étrangers en Syrie ».  Elle  continue à soutenir sous diverses formes le Front el-Nosra et les groupes terroristes affiliés.  Le Vice-Premier Ministre a utilisé le néologisme de « turquification » pour qualifier « la politique de déplacement forcé » dans les territoires syriens contrôlés par la Turquie.  M. Al-Moualem a qualifié les actes turcs dans la ville d’Hasakeh et une douzaine d’autres localités, de « crimes de guerre » et de crimes contre l’humanité ». 

Selon lui, la « présence illégitime » des forces américaines et turques sur le sol syrien répond à toutes les conditions légales d’une « occupation » : la Syrie y mettra fin « par tous les moyens possibles » en vertu du droit international, a prévenu le Vice-Premier Ministre.  Concernant les pourparlers de paix, il a affirmé que son gouvernement participe bien aux conférences de Genève, aux consultations à Moscou, au processus d’Astana ou encore au Congrès du dialogue national syrien de Sotchi.  Les discussions avec l’Envoyé Spécial des Nations Unies pour la Syrie sont « sérieuses et constructives », comme en atteste la création de la Commission constitutionnelle, a rappelé le Vice-Premier Ministre.  Il a tout de même prévenu que le succès ne sera possible que s’il n’y a « aucune ingérence étrangère ».  L’ensemble du processus, a-t-il martelé, doit être « exclusivement dirigé et contrôlé par les Syriens », qui jouissent du « droit exclusif » de déterminer l’avenir de leur pays. 

La Ministre des affaires étrangères de Singapour, Mme VIVIAN BALAKRISHNAN’S, a constaté d’emblée que le système multilatéral est confronté aujourd’hui au nationalisme, à la xénophobie, au rejet du libre-échange et de l’intégration économique mondiale et au détournement des technologies et des chaînes d’approvisionnement.  Même si ces menaces ne sont pas nouvelles, la COVID-19 n’a fait que les accélérer et les intensifier.  Mais, a prédit la Ministre, le protectionnisme et l’unilatéralisme finiront par « s’autodétruire », compte tenu de la « complexité » des chaînes d’approvisionnement modernes.  C’est parce que les pays sont ouverts au partage des connaissances scientifiques que nous avons pu produire des kits de test rapidement pendant cette pandémie, a-t-elle rappelé, affirmant que ce dont nous avons besoin maintenant c’est d’une coopération internationale accrue pour garantir un accès équitable et universel aux futurs vaccins contre la COVID-19.  

La Ministre a dénoncé le non-respect des obligations contractuelles s’agissant de la libre circulation des biens et des personnes, ce qui érode la confiance dans les relations entre États.  Fort de ce constat, la Ministre a pronostiqué que le chemin du « nouveau normal » ne sera pas linéaire.  À chaque étape du processus, il faudra trouver un équilibre entre les préoccupations sanitaires, économiques et sociales, et faire des compromis en fonction des situations particulières.  Une coopération internationale renforcée est essentielle pour surmonter les effets dévastateurs de la pandémie, reconstruire et recommencer à voyager. 

La Ministre a réaffirmé son attachement au multilatéralisme même si le système actuel n’est pas parfait.  Il reste encore beaucoup à faire, s’est-elle expliquée, pour renforcer et réformer le système multilatéral fondé sur des règles, lequel doit pouvoir s’adapter à la réalité changeante du monde actuel. 

Pour ce qui est de la relance et de la reconstruction post-COVID-19, l’une des priorités, a estimé la Ministre, est de promouvoir le multilatéralisme dans la recherche d’un vaccin et d’en garantir un accès universel et équitable.  Singapour et la Suisse ont d’ailleurs travaillé avec 13  autres partenaires qui partagent les mêmes idées en tant qu’Amis du Centre d’accès mondial aux vaccins contre la COVID-19.  Il va falloir aussi remédier aux inégalités de nos sociétés que la pandémie a révélées, a poursuivi la Ministre.  Un système commercial ouvert est la clef des efforts de reconstruction et aucun pays ne peut être totalement autosuffisant.  Il est dans l’intérêt de tous de maintenir et de renforcer la connectivité de la chaîne d’approvisionnement, a insisté la Ministre. 

Elle a également plaidé pour la poursuite du travail important de renforcement face aux problèmes liés à la révolution numérique, aux menaces à la cybersécurité, aux changements climatiques et à la pollution transfrontière.  Les changements climatiques sont « un danger évident et réel » pour Singapour.  C’est pourquoi, a expliqué la Ministre, Singapour prend ses obligations climatiques très au sérieux et a d’ores et déjà soumis, en mars 2020, à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, sa contribution nationale à l’horizon  2030, à l’Accord de Paris et à la stratégie de développement à faible émission d’ici à 2050.  

« L’infiniment petit a eu donc raison de nous », a constaté M. AMADOU BA, Ministre des affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur du Sénégal, au sujet de la pandémie.  « Cela est inédit en 75 ans d’existence de notre Organisation commune.  »  Appelant à la mise en œuvre effective de la résolution adoptée par la soixante-treizième  Assemblée mondiale de la santé en vue d’ assurer un accès rapide, abordable, sûr et de qualité aux produits et technologies de santé essentiels que sont les tests diagnostiques, les médicaments et les vaccins, le Sénégal, a confié le Ministre, a acquis la conviction que tout potentiel vaccin ou traitement contre la COVID 19 devrait être considéré comme un « bien public mondial ».  

Alors qu’elle avait amorcé des dynamiques de croissance soutenue, l’Afrique subit de plein fouet les graves conséquences de cette crise. Pour garantir un rétablissement correct des économies et assurer la stabilité sociopolitique mondiale, il faudra, selon le Ministre, davantage faire jouer la carte de la solidarité et de la coopération internationales. Il a donc appelé, en plus du respect des engagements des pays développés en faveur de l’aide publique au développement (APD), à l’annulation de la dette publique et à la restructuration de la dette privée. Ce dont l’Afrique a vraiment besoin, a précisé le Ministre, « ce n’est pas seulement d’un moratoire de la dette mais plutôt son effacement ». 

Soutenant l’appel du Secrétaire général de l’ONU à une « réponse multilatérale à grande échelle », en vue de mobiliser des ressources financières d’au moins 10% du PIB mondial, le Ministre a réaffirmé le besoin pour l’ONU d’un « multilatéralisme revigoré ».  Il serait d’ailleurs légitime, selon lui, de se demander « pourquoi l’Afrique demeure le seul Continent à ne pas disposer de siège permanent au Conseil de Sécurité, qui lui consacre pourtant une large part de son agenda ».  Le terrorisme et l’extrémisme violent frappant le Sahel ne devraient pas occulter «  l’autre Afrique », celle qui «  entreprend, innove, invente, réussit », fait face à la pandémie de COVID-19 et aux prévisions les plus alarmistes, « suscitant l’admiration ». 

Face à la pandémie, le Sénégal, a dit le Ministre, a lancé un Programme de résilience économique et sociale d’un montant de 1,6 milliard de dollars ayant permis de prendre en charge les besoins d’urgence et d’équipements sanitaires, d’assister les ménages et la diaspora, de soutenir le secteur privé, y compris à travers des incitations fiscales, et d’assurer l’approvisionnement correct en hydrocarbures.  Un plan d’investissements d’environ 900 millions de dollars pour la période 2020-2024 a été lancé pour rendre le système national de santé résilient et pérenne.  

Quant à la protection de la biodiversité, une somme de 90 millions de dollars a été dédiés à la reforestation durable du territoire national ainsi qu’à la création d’un Institut national de recherche forestière et à l’Agence sénégalaise de protection forestière.  Le Sénégal, a conclu le Ministre, renouvelle son « engagement constant » pour un retour définitif de la paix et de la stabilité au Mali, comme en atteste sa participation à la Mission des Nations Unies (MINUSMA).   

Mme KATRIN EGGENBERGER, Ministre des affaires étrangères, de la justice et de la culture du Liechtenstein, a estimé que la pandémie en cours constitue une « expérience difficile et humiliante » pour nous tous, ce qui explique la forte tentation de souhaiter le retour le plus rapide possible au statu quo ante.  Mais c’est impossible, « il n’y a aucun moyen de retourner là où nous étions ».  La pandémie a changé notre réalité et nos conditions de vie de manière fondamentale et a eu un impact profond.  Elle a aussi exacerbé les inégalités existantes au sein des nations et entre les nations, en particulier dans le domaine de la santé et de l’éducation.  C’est pourquoi la Décennie d’action revêt une importance encore plus grande.  En effet, a insisté Mme Eggenberger, si nous avions fait mieux pour atteindre les objectifs de développement durable du Programme 2030, nous aurions été beaucoup mieux préparés à lutter efficacement contre la pandémie, dans un esprit de solidarité authentique.  Mettre l’accent sur le Programme 2030 doit donc être au sommet de notre ordre du jour. 

La Ministre a rappelé que l’érosion de la confiance dans les institutions et l’état de droit a été signalée par le Secrétaire général comme un risque majeur pour les sociétés pacifiques.  Or, la réponse à la pandémie ne peut être coordonnée, unifiée et efficace que lorsque la confiance dans les institutions est élevée.  Le manque d’accès aux institutions pertinentes, les inégalités de traitement et la corruption sapent fondamentalement cette confiance.  Le Liechtenstein estime, a dit la Ministre, que la prochaine session extraordinaire de l’Assemblée générale sur la corruption est encore plus pertinente dans le contexte de la pandémie.  

Mme Eggenberger a qualifié l’ONU d’« un des plus beaux triomphes de l’état de droit » et salué les règles communes sur lesquelles elle repose.  C’est pourquoi elle a déploré le fait que « certains de nos partenaires » aient tendance à remettre en question la centralité de l’état de droit et la nécessité de lutter « collectivement » contre les menaces à la paix internationale et à notre planète. Le respect des règles sur lesquelles nous nous sommes mis d’accord et du droit international est d’une importance « capitale » pour les petits États, qui constituent la majorité des membres de cette Assemblée, a ajouté la Ministre, qui a rappelé que son pays, entré il y 30 ans à l’ONU, a fait du renforcement du droit international une de ses priorités. 

Le Liechtenstein, a-t-elle promis, continuera de défendre l’état de droit et le multilatéralisme et surtout de promouvoir le respect des règles qui régissent l’usage de la force entre États.  La Ministre a reconnu qu’elles sont claires mais « de plus en plus diluées dans la pratique ».  Le Liechtenstein, a-t-elle martelé, déplore la manière dont les règles de légitime défense sont interprétées et une situation particulièrement dangereuse à une époque de militarisation accrue et de cyberguerre.  

Mme Eggenberger a encore rappelé l’implication du Liechtenstein dans la lutte contre les formes d’esclavage modernes et la traite des êtres humains, « l’un des modèles de crime organisé les plus rentables », et en particulier le travail forcé.  Mais elle a fait observer que si les États avaient adopté depuis 75 ans des normes élevées et universelles en matière de droits de l’homme, leur mise en œuvre avait souvent été un point faible.  Elle a salué la création de la Cour pénale internationale (CPI) et souligné tout autant que la CPI, le Conseil de sécurité est d’une importance cruciale.  Mais Mme Eggenberger a accusé le Conseil d’appliquer « une notion dépassée de la sécurité » qui nuit à la pertinence de ses travaux.  Elle a qualifié d’« effet pernicieux omniprésent » le droit de veto.  Elle a répété l’appui du Liechtenstein à un renforcement de la responsabilité de l’Assemblée générale en cas de blocage au Conseil de sécurité.  L’Assemblée doit débattre de chaque situation où le droit de veto est invoqué au Conseil de sécurité.  La pandémie, a conclu la Ministre, a souligné « de manière impressionnante » la nécessité pour cette Assemblée de fonctionner pleinement à tout moment.   

Pour M. ALEXANDER SCHALLENBERG, Ministre fédéral des affaires européennes et internationales de l’Autriche, comme toute organisation, l’ONU n'est pas sans défauts. Souvent écartée du règlement des conflits et avec un Conseil de sécurité qui peine trop souvent à parvenir à un consensus, il a toutefois concédé que dans l'ensemble, en comparant les normes actuelles à celles d’il y a 75 ans, par exemple sur l’éducation des enfants, les droits des femmes, la mortalité infantile, l’accès à l'eau potable ou l’extrême pauvreté et la faim, l'ONU peut vraiment être « fière » de ses résultats.  Cependant, a-t-il poursuivi, le monde est toujours confronté à de nombreuses menaces: les dizaines de conflits armés; les près de 80 millions de personnes déplacées; le terrorisme; la répression politique; l’extrême pauvreté auxquelles s’ajoutent des menaces émergentes comme la cyber-guerre et le risque d'échec de la gouvernance technologique, le bioterrorisme, les nouvelles tensions géopolitiques dues à un système mondial de plus en plus polycentrique, le changement climatique et la COVID-19.  

Cette pandémie COVID-19 nous a appris ce que nous prenions pour acquis est plus vulnérable que nous ne le pensions, a constaté le Ministre citant les restrictions à la libre circulation et l’impact de la COVID-19 sur la réalisation des objectifs de développement durable.  Près de 24 millions d’enfants et de jeunes abandonneront ou n’auront plus accès à l’école l’année prochaine et nous voyons déjà un record négatif dans les taux de croissance négative, le chômage et les inégalités, s’est-il alarmé.  Le Ministre s’est aussi inquiété des retombées de la pandémie sur les relations internationales, en pointant du doigt la résurgence du nationalisme, du protectionnisme et du populisme; l’érosion de la confiance dans le système international et l’intensification de la désinformation, dont « les faits alternatifs ». 

Si les progrès technologiques ont fait un bond en avant, le Ministre a regretté qu’une grande partie de la population mondiale soit laissée sur le côté. Aux fléaux du déclassement humain, de la cybercriminalité, du commerce des données et de la protection des données personnelles et de la vie privée, il faut ajouter, a dit le Ministre, les systèmes d’armes autonomes « ces machines qui dont le pouvoir de décider de la mort et de la vie ».  «  Ce n’est pas de la science-fiction, s’est fait sérieux le Ministre, cela devient rapidement la réalité », une réalité que le Secrétaire général a qualifié de « politiquement inacceptable et moralement répugnante ».  

IL faut agir maintenant, a pressé le Ministre, avant que la survie des civils dans une zone de conflit ne soit déterminée par « un algorithme », que toutes les contraintes fixées par le droit international humanitaire ne deviennent « superflues » et que les décisions soient prises par « des robots tueurs sans humanité ni éthique ».  L’Autriche, a annoncé le Ministre, organisera l’année prochaine à Vienne une conférence internationale sur cette question urgente, « si la COVID-19 le permet ».  

Lorsque le virus a frappé, s’est-il souvenu, même les multilatéralistes les plus fervents se sont concentrés sur la protection de leurs populations, la fermeture des frontières et le stockage des masques et du matériel médical. Pendant ce temps-là, a relevé le Ministre, les unilatéralistes les plus durs recherchaient la coopération internationale pour obtenir fournitures médicales et assistance à la relance économique.  Alors, s’est interrogé le Ministre, pourquoi ne pas profiter cette pandémie « pour changer la donne » et simplement oublier ce « différend inutile » entre multilatéralistes et unilatéralistes.  Choisissons la coopération dans la prévention et le traitement de la COVID-19.  Les futurs vaccins doivent être des « biens publics mondiaux », accessibles et abordables, a plaidé le Ministre. 

Des experts et analystes de premier plan pérorent sur les conséquences politiques et économiques mondiales de la pandémie, allant jusqu’à parler de «  changements de paradigme  », voire de «  mouvements tectoniques  », a noté M. Vladimir Makeï, Ministre des affaires étrangères du Bélarus.  « C’est possible. Seul l’avenir nous le dira ».  Pour l’heure, a poursuivi le Ministre, force est de constater que la communauté internationale n’a pas été à la hauteur des espoirs placés en elle dans sa réponse à la crise sanitaire.  De toute évidence, la logique selon laquelle il est plus facile de relever seul le défi a pris le dessus.  La plupart des États Membres se sont replié « dans leur coquille nationale  », fermant les frontières et se coupant du monde extérieur. 

M. Makeï a affirmé que le Bélarus a rejeté ce « choix douteux ».  Au départ, a-t-il dit, nous avons cru et continuons de croire au succès des efforts collectifs.  Mais face à l’absence d’une position commune, nous avons défini notre propre approche.  Le Ministre a parlé d’une approche qui repose sur deux éléments: la préservation, dans toute la mesure du possible, de la viabilité de l’État et de son économie et, la garantie d’une protection maximale de la population.  La situation actuelle du Bélarus et la propagation de l’épidémie dans le monde a démontré le bienfondé de cette approche, s’est enorgueilli le Ministre.  

Tirant les leçons de la crise sanitaire, le Ministre a estimé que cette crise a révélé « sans la moindre équivoque » le  besoin urgent d’un État fort.  La crise a également démontré à quel point le monde est interconnecté.  Aucun pays, a dit avoir constaté le Ministre, ne peut trouver seul des solutions à un problème mondial, sans prendre en considération les autres nations, dans le cadre d’un dialogue constructif et d’efforts collectifs. 

Le Ministre a donc déploré les tentatives d’un certain nombre d’États « d’abuser de la tribune » de l’ONU et du Conseil de sécurité, « pour défendre leurs ambitions politiques étroites  ».  Il a regretté l’attention portée par « les pays occidentaux » à la situation dans son pays.  Cette situation est « difficile », a-t-il reconnu mais « principalement à cause de certaines circonstances imposées de l’extérieur ». 

M. Makeï a rappelé qu’en août dernier, à l’issue de l’élection présidentielle, le peuple du Bélarus a fait le choix « clair » d’un État « stable et prospère », soucieux de la paix, des relations de bon voisinage et du développement durable.  Or, a-t-il déploré, plutôt que de respecter ce choix, certains tentent de « déstabiliser » le pays.  Après une tentative « infructueuse » de nous imposer une «  révolution de couleur », a poursuivi le Ministre, nous subissons une ingérence étrangère visant à saper notre régime politique. 

Le Ministre a fustigé le « cynisme  » d’un certain nombre de « voisins occidentaux » du Bélarus qui, sous prétexte de se préoccuper de la souveraineté et de la prospérité du pays, tentent en réalité de le plonger «  dans le chaos et l’anarchie ».  M. Makeï a appelé les partenaires du Bélarus à faire preuve de sagesse, de retenue et d’impartialité.  Il a averti que l’ingérence dans les affaires intérieures du Bélarus et l’imposition de sanctions ou autres mesures coercitives ne peuvent qu’avoir l’effet inverse et porter préjudice à toutes les parties. 

L’avenir de la République du Bélarus sera décidé par son peuple, a martelé M. Makeï, « pas sur les barricades », mais par le biais d’un « dialogue civilisé ».  Il a fermement rejeté les mesures coercitives unilatérales dans les relations internationales et estimé que le blocus commercial, financier et économique imposé à Cuba par les États-Unis depuis plusieurs décennies, est un exemple flagrant des effets « néfastes » de ce type de mesures.  Pour le Ministre, les « moyens d’asphyxie » pour faire pression de manière « arbitraire  » sur des États souverains sont « inacceptables » et doivent cesser immédiatement. 

Droits de réponse 

Répondant à l’intervention de l’Azerbaïdjan, l’Arménie a rejeté les « discours répétitifs » qui ne cessent de défendre des interprétations « biaisées » des causes profondes du différend dans le Nagorno-Karabakh.  Le régime azerbaïdjanais, a-t-elle accusé, brosse un tableau trompeur de la situation, en oubliant opportunément de dire que la population du Nagorno-Karabakh a obtenu son indépendance dans le cadre de la dissolution de l’ex-Union soviétique.  Un référendum a eu lieu en 1991, a souligné l’Arménie, arguant que le peuple du Nagorno-Karabakh a toujours aspiré à la paix, ce à quoi l’Azerbaïdjan a répondu par la violence et des crimes de masse.  L’Arménie a accusé les autorités d’Azerbaïdjan d’avoir par le passé chercher à exterminer totalement les Arméniens. Cette ambition, a estimé l’Arménie, reste au cœur de la politique d’un État qui propage la haine et l’« arméniophobie ».  L’Arménie a affirmé que les atrocités de masse commises par l’Azerbaïdjan sont largement documentées.  Ce pays, a-t-elle affirmé, a réduit à néant toute trace de civilisation arménienne, préférant rejeter toutes les demandes du Parlement européen d’envoyer des missions d’établissement des faits. 

Le discours de l’Azerbaïdjan à l’Assemblée générale cette année, a poursuivi l’Arménie, n’est que l’interprétation biaisée habituelle des résolutions de l’ONU. Si l’Azerbaïdjan veut vraiment appliquer ces résolutions, elle devrait commencer par contacter les dirigeants « élus » du Nagorno-Karabakh et discuter d’un accord de paix.  L’Arménie a reproché à l’Azerbaïdjan de ne pas respecter ses obligations en vertu de l’Accord de cessez-le feu de 1994, et de refuser de répondre à l’appel à un cessez-le-feu mondial lancé par le Secrétaire général en ces temps de COVID-19.  Le droit inaliénable à l’autodétermination du peuple du Nagorno-Karabakh est « incontestable » au regard du droit international, a martelé l’Arménie, soulignant que les représentants élus de ce territoire ont été reconnus par la communauté internationale.  L’Azerbaïdjan, a tranché l’Arménie, devrait renoncer à ses tentatives de déstabiliser la région.  Elle devrait renoncer à la force, a-t-elle ajouté. 

Reprenant également la parole, l’Indonésie a jugé « honteux » que Vanuatu continue d’entretenir une «  obsession malsaine » sur la gouvernance indonésienne.  Faire ce qui est juste, c’est respecter le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des États et c’est respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale d’un pays, a martelé l’Indonésie, en ajoutant: «  veuillez donc garder vos sermons pour vous  ».  Le pays a reproché à Vanuatu de vouloir « semer la discorde » et de promouvoir des inimitiés, en faisant mention de « soi-disant violations des droits de l’homme ».  Riche de centaines d’ethnies, s’est défendue l’Indonésie, notre archipel est caractérisé par la « tolérance » et l’égalité des droits.  À l’opposé, a attaqué le pays, Vanuatu ne se préoccupe pas vraiment du sort de ses peuples autochtones, comme en atteste le fait qu’il n’a pas daigné signer plusieurs des traités internationaux sur les droits de l’homme.  

Les accusations « typiques » qu’il profère une nouvelle fois aujourd’hui au sujet de ces droits ne valent rien.  Vous ne représentez pas le peuple de Papouasie  a lancé l’Indonésie.  « Les Papous sont des Indonésiens, et jouent un rôle important dans le développement du pays ».  Le respect de la souveraineté territoriale est un principe de la Charte et nous nous défendrons contre toute tentative séparatiste « masquée derrière les droits de l’homme », a prévenu l’Indonésie.

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.