Commission du développement social: hausse de l’investissement dans le capital humain et la protection sociale égale baisse de la pauvreté et des inégalités
La Commission du développement social a achevé aujourd’hui sa session annuelle et a envoyé au Conseil économique et social (ECOSOC) pour adoption, quatre résolutions dont une pose l’équation: hausse de l’investissement dans le capital humain et la protection sociale égale baisse de la pauvreté et les inégalités.
Axée sur le thème de la « lutte contre les inégalités et les obstacles à l’inclusion sociale au moyen des politiques budgétaires et salariales et des politiques de protection sociale », la session, qui a commencé le 11 février dernier, a donné lieu à l’adoption sans vote de la résolution phare* aux termes de laquelle l’ECOSOC est appelé à souligner que l’investissement dans le capital humain et la protection sociale s’est révélé efficace pour réduire la pauvreté et les inégalités. L’ECOSOC devrait donc inviter les États Membres à mobiliser des ressources pour garantir des niveaux de dépenses sociales permettant de généraliser l’accès à l’alimentation et à la nutrition, à la santé, à l’éducation, à l’innovation, aux nouvelles technologies et à la protection sociale de base, et à s’attaquer aux problèmes des flux financiers illicites et de la corruption.
Pour assurer cet investissement, le texte de 39 paragraphes de fond met l’accent sur des systèmes fiscaux plus équitables, transparents, efficaces et efficients, sur l’importance de faire des choix judicieux permettant d’élargir la marge de manœuvre budgétaire et sur le rôle primordial des dépenses publiques et de la solidité des comptes de l’État. Dans ce cadre, les systèmes de protection sociale, dont les socles de protection, doivent tenir compte de la viabilité budgétaire et s’appliquer aux secteurs structuré et non structuré de l’économie. Le texte réaffirme le Programme d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement et appelle à la mobilisation des moyens financiers auprès de toutes les sources, publiques et privées, nationales et internationales. Il encourage les pays développés à honorer les engagements qu’ils ont pris en matière d’aide publique au développement (APD), notamment celui pris par nombre d’entre eux de consacrer 0,7% de leur revenu national brut à cette aide et 0,15% à 0,20% pour les pays les moins avancés (PMA).
Le Mexique a regretté que la résolution fasse référence à des textes « obsolètes ». Nous devons, a-t-il dit, réfléchir à « l’inertie » qui empêche les progrès vers une vision « moderne » du développement social. Après l’adoption du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et la mise à jour des documents de travail de la Commission, les dogmes du passé sont toujours là. Le principe de « ne laisser personne sur le côté » doit imprégner tout le travail de la Commission sinon ce sera elle qui sera « laissée sur le côté », a alerté le Mexique. Les États-Unis ont insisté sur le fait que, conformément aux recommandations de l’Organisation internationale du Travail (OIT), chaque pays a sa propre définition du terme « socles de protection sociale ». Alors que le Saint-Siège se félicitait des dispositions du texte sur l’éducation, les États-Unis ont rappelé que chez eux, les programmes d’enseignement ne sont pas élaborés au niveau fédéral. S’agissant de l’appel à l’universalisation de l’accès à la santé, ils ont précisé que leur système obéit aux règles du marché. Djibouti a salué, pour sa part, la place que fait la résolution au rôle fondamental de la famille dans l’inclusion sociale et la réduction des inégalités sociales.
La Commission a aussi adopté sans vote la résolution** sur les « aspects sociaux du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) ». Ce texte de 60 paragraphes de fond a été présenté par l’État observateur de Palestine. Il a expliqué que la résolution salue le fait que l’Union africaine ait proclamé 2018-2027 « Décennie africaine pour la formation et l’emploi des jeunes dans les domaines technique, professionnel et entrepreneurial », l’accent étant mis sur la création d’emplois décents pour les jeunes et les femmes, dans l’optique de garantir une croissance plus inclusive et d’éliminer durablement la pauvreté.
La résolution appelle aussi à des efforts plus poussés pour promouvoir l’agriculture durable, améliorer l’accès des petits exploitants agricoles, en particulier des femmes, aux ressources agricoles nécessaires, moyens de production inclus, et aux infrastructures, à l’information et aux marchés. La résolution se félicite aussi du lancement de la Stratégie de l’Union africaine en matière de genre et d’autonomisation des femmes et souligne l’importance de promouvoir une mise en œuvre et un suivi intégrés de l’Agenda 2063 et du Programme 2030. Elle prend note de la décision de transformer l’Agence de planification et de coordination du Nouveau Partenariat en « Agence de développement de l’Union africaine » qui sera le mécanisme de mise en œuvre de la stratégie de développement de l’Agenda 2063.
L’Union européenne a regretté que ses propositions n’aient pas été prises en compte, au risque de briser le consensus. La résolution, s’est-elle expliquée, est trop longue et fait double emploi avec d’autres textes dont la résolution annuelle de l’Assemblée générale sur le NEPAD. Elle a encouragé le Groupe des 77 et la Chine à reconsidérer la périodicité de ce genre de texte. Ce texte, a embrayé le Mexique, doit être reformulé pour mieux refléter les développements nouveaux et éliminer les redondances. Les États-Unis se sont dissociés du libellé sur le commerce international inclus dans le Programme d’action d’Addis-Abeba auquel la résolution fait référence. Ils ont aussi émis des réserves sur les références à « la crise financière » qui n’a eu, selon eux, aucune incidence sur la situation en Afrique et aux « flux financiers illicites » dont aucune définition agréée, sur le plan international, n’existe. Les États-Unis ont soutenu, une nouvelle fois, que les sanctions économiques ciblées, décriées dans la résolution, sont une alternative au recours à la force pour promouvoir des objectifs nobles tels que la protection des droits de l’homme.
La Commission a également adopté sans vote une résolution*** sur « les politiques et programmes mobilisant les jeunes » qui, en 19 paragraphes de fond, recommande, entre autres, à l’ECOSOC de demander aux États Membres de tirer parti du dividende démographique à l’heure où les jeunes n’ont jamais été aussi nombreux et de poursuivre la mise en œuvre du Programme d’action mondial pour la jeunesse, notamment ses 15 domaines d’activité prioritaires interdépendants. L’ECOSOC devrait aussi demander aux États Membres de promouvoir l’égalité des sexes, l’autonomisation des jeunes femmes et des filles et la pleine réalisation, sur un pied d’égalité de tous leurs droits fondamentaux. Les États devraient également être appelés à promouvoir les organisations de jeunes et d’aide à la jeunesse en leur apportant un appui financier, pédagogique et technique. Quant aux donateurs, ils sont priés de contribuer activement au Fonds des Nations Unies pour la jeunesse afin de faciliter la participation des jeunes des pays en développement aux activités de l’ONU.
Les États-Unis se sont dissociés du paragraphe 16 du préambule qui se lit: « Considérant le lien important qui unit migration et développement ». S’agissant de l’accès à l’enseignement scolaire et non scolaire, ils ont souligné, une nouvelle fois, le rôle limité du Gouvernement fédéral en la matière.
J’espère, a conclu le Président de la Commission, M. Cheikh Niang, du Sénégal, que cette session vous aura apporté de nouvelles perspectives et de nouveaux outils pour lutter contre les inégalités sous tous ses formes et surmonter les obstacles à l’inclusion sociale. J’espère également, a-t-il conclu, que les discussions contribueront de manière significative aux débats sur les aspects sociaux du Programme 2030 lors du Forum politique de haut niveau, du Sommet sur les objectifs de développement durable, du Sommet sur le climat, du Dialogue de haut niveau sur le financement du développement et de la Réunion de haut niveau sur la couverture sanitaire universelle qui se tiendront en septembre prochain.
La Commission a aussi adopté une résolution**** sur sa future session qui aura pour thème « Lutter contre le sans-abrisme en garantissant des logements abordables et de systèmes de protection sociale pour tous ». Elle a décidé, à la grande satisfaction des États-Unis, de recommander à l’ECOSOC « d’accroître l’efficacité de ses travaux en adoptant pour sa Commission des résolutions biennales pour donner plus de poids à la résolution sur le thème prioritaire, éliminer les redondances et les chevauchements et promouvoir la complémentarité des travaux et des négociations portant sur des questions connexes ou similaires dont l’Assemblée générale et lui-même sont saisis ». Les États-Unis ont également conseillé à la Commission de réduire de 50% le nombre des rapports qu’elle demande au Secrétariat de l’ONU afin d’économiser les ressources.
* E/CN.5/2019/L.6
** E/CN.5/2019/L.4
*** E/CN.5/2019/L.3
**** E/CN.5/2019/L.5