En cours au Siège de l'ONU

SC/13876

Déclaration publique du Président du Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé

À sa 82e séance, le 9 juillet 2019, le Groupe de travail du Conseil de sécurité sur le sort des enfants en temps de conflit armé a décidé, à l’occasion de l’examen du deuxième rapport du Secrétaire général sur les enfants et le conflit armé en République arabe syrienne (S/2018/969), d’adresser, sous la forme d’une déclaration publique de son Président, le message suivant:

À toutes les parties au conflit armé en République arabe syrienne qui sont mentionnées dans le rapport du Secrétaire général, à savoir les forces gouvernementales, y compris les forces de défense nationale et les milices progouvernementales, ainsi que les groupes armés non étatiques, tels que le Mouvement islamique Ahrar el-Cham, les groupes auto-affiliés à l’Armée syrienne libre, l’État islamique d’Iraq et du Levant, Jeïch el-Islam, Hay’at Tahrir el-Cham et les Unités de protection du peuple et les Unités féminines de protection:

a) Se déclare vivement préoccupé par l’ampleur, la gravité et la récurrence des violations et des atteintes subies par les enfants en République arabe syrienne, condamne fermement toutes les violations et atteintes qui continuent d’être commises sur la personne d’enfants en République arabe syrienne et prie instamment toutes les parties au conflit de prévenir et de faire cesser immédiatement toutes les violations du droit international applicable concernant le recrutement et l’utilisation d’enfants, les enlèvements, les meurtres et atteintes à l’intégrité physique, les viols et autres formes de violence sexuelle, les attaques lancées contre des établissements scolaires et hospitaliers et le refus de l’accès humanitaire, et de s’acquitter des obligations que leur impose le droit international;

b) Prie les parties de continuer à donner suite aux conclusions précédentes du Groupe de travail sur le sort des enfants en temps de conflit armé en République arabe syrienne (S/AC.51/2014/4);

c) Constate avec une profonde préoccupation que les parties n’ont pris aucune mesure concrète et effective pour faire en sorte que les auteurs de violations répondent de leurs actes, comme le leur impose le droit international, et souligne que tous les auteurs de telles violations doivent être rapidement traduits en justice et amenés à répondre de leurs actes, notamment par la conduite systématique et diligente d’enquêtes et, s’il y a lieu, l’ouverture de poursuites judiciaires et l’établissement de leur culpabilité;

d) Exhorte toutes les parties au conflit armé à libérer immédiatement et sans conditions préalables tous les enfants qui leur sont associés et à faire cesser et prévenir les recrutements et l’utilisation d’enfants, conformément aux obligations que leur fait le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et à la Déclaration faite par la République arabe syrienne lors de son adhésion à celui-ci en 2003; constate avec préoccupation que des enfants sont privés de liberté, par des acteurs tant étatiques que non étatiques, au motif qu’ils sont associés ou soupçonnés d’être associés à des forces armées ou à des groupes armés, y compris des groupes armés qui perpètrent des actes de terrorisme, et exhorte toutes les parties au conflit à traiter ces enfants avant tout comme des victimes qui ont été recrutées et utilisées, à les remettre immédiatement et sans conditions préalables aux instances civiles compétentes chargées de la protection de l’enfance, à œuvrer pour qu’ils réintègrent la société au moyen de programmes de réhabilitation et de réintégration, y compris en leur apportant un appui psychosocial, à permettre à l’Organisation des Nations Unies d’accéder à tous les centres de détention à des fins de surveillance et de protection et à faire en sorte qu’en cas de poursuites engagées contre des enfants soupçonnés d’avoir commis des crimes, les droits de ces derniers soient respectés; prie instamment toutes les parties et autorités compétentes, y compris les pays d’origine des enfants étrangers privés de liberté en République arabe syrienne, de coopérer avec l’Organisation des Nations Unies pour rechercher des solutions durables qui tiennent compte du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant et soient conformes à ses droits;

e) Se déclare profondément préoccupé par le nombre alarmant et croissant d’enfants tués et mutilés, notamment dans le cadre d’attaques aveugles ou disproportionnées lancées en violation du droit international, y compris dans des zones fortement urbanisées, ainsi que par suite d’actes de torture ou d’exécutions sommaires ou lors des attentats-suicides dans lesquels ils sont utilisés; condamne avec la plus grande fermeté l’emploi d’armes chimiques, qui fait de nombreuses victimes, dont beaucoup d’enfants; engage vivement toutes les parties à respecter les obligations que leur impose le droit international humanitaire, en particulier les principes de discrimination et de proportionnalité et l’obligation de prendre toutes les précautions possibles pour éviter ou, en tout état de cause, réduire au minimum les dommages causés aux civils et aux biens de caractère civil;

f) Se déclare gravement préoccupé par le grand nombre de cas de viols et d’autres formes de violence sexuelle commis sur la personne d’enfants, notamment la traite d’enfants aux fins d’esclavage sexuel, exhorte toutes les parties au conflit à prendre immédiatement des mesures concrètes pour prévenir et faire cesser les viols et autres formes de violence sexuelle commis sur la personne d’enfants par des membres de leurs groupes respectifs, et souligne qu’il importe de faire en sorte que les survivants aient accès à des services spécialisés et que les auteurs de violences sexuelles et fondées sur le genre commises contre des enfants et les personnes autrement responsables de tels actes soient amenés à en répondre;

g) Condamne fermement les attaques perpétrées contre des établissements scolaires et hospitaliers, en violation du droit international, y compris les attaques aveugles ou disproportionnées, et déplore que les forces armées et les groupes armés non étatiques, y compris les groupes armés désignés comme terroristes par le Conseil de sécurité de l’ONU, utilisent les écoles à des fins militaires, notamment comme lieux d’entraînement, de stockage de munitions, de détention, d’hébergement et comme bases militaires; appelle toutes les parties au conflit armé à respecter le droit international et le caractère civil des établissements scolaires et hospitaliers, y compris leur personnel, conformément au droit international humanitaire, et à faire cesser et à prévenir les attaques ou menaces d’attaques délibérées, disproportionnées ou autrement indiscriminées contre ces établissements et leur personnel, ainsi que l’utilisation d’établissements scolaires et hospitaliers à des fins militaires en violation du droit international, et souligne qu’il importe que les auteurs des attaques perpétrées contre de tels établissements en violation du droit international répondent de leurs actes;

h) Condamne fermement l’enlèvement d’enfants par les parties au conflit et appelle ces dernières à y mettre un terme, à libérer immédiatement tous les enfants enlevés et à permettre à ceux-ci, dans leur intérêt supérieur, de retrouver rapidement leur famille, ou à donner des informations sur leur sort s’ils ne sont plus en vie;

i) Condamne énergiquement le recours systématique aux sièges constaté tout au long de la période considérée, pratique contraire au droit international humanitaire dont il a été démontré qu’elle présentait une corrélation avec les violations et atteintes commises contre les enfants, et condamne fermement le refus d’accès humanitaire, notamment le refus d’aide humanitaire, et les attaques contre les installations, le personnel et les transports humanitaires, et demande à toutes les parties au conflit de permettre et faciliter un accès sûr, rapide et sans entrave aux enfants, conformément aux principes directeurs de l’Organisation des Nations Unies relatifs à l’aide humanitaire, et de respecter le droit international humanitaire et le travail de tous les organismes des Nations Unies et de leurs partenaires humanitaires sans discrimination, tout en soulignant la nécessité de respecter la nature exclusivement humanitaire et impartiale de l’aide humanitaire;

j) Note que le Gouvernement syrien a publié en février 2017 un plan de travail national visant à prévenir et à combattre le recrutement de mineurs et créé en mars 2018 un comité national chargé de le mettre en œuvre, demande au Gouvernement syrien de fournir davantage de renseignements sur l’exécution de ce plan et l’engage à adopter et appliquer avec l’ONU un plan d’action global, conformément à la résolution 1612 (2005) du Conseil de sécurité et à ses résolutions ultérieures, visant les six violations graves commises contre les enfants touchés par le conflit armé;

k) Prend note de la signature, en 2017, par sept groupes affiliés à l’Armée libre syrienne, des Actes d’engagement auprès de l’Appel de Genève pour la protection des enfants contre les effets des conflits armés, qui interdisent notamment à chaque groupe de recruter des enfants de moins de 18 ans et de les utiliser dans les hostilités, ainsi que de la signature d’un acte d’engagement similaire par les Unités de protection du peuple et les Unités féminines de protection; et exhorte ces groupes armés et les autres groupes armés non étatiques à élaborer, adopter et mettre à exécution, avec l’ONU, des plans d’action visant à faire cesser et prévenir la commission des six violations graves contre les enfants touchés par le conflit armé;

l) Se félicite de la création, en Jordanie, à titre informel, d’un groupe des amis des enfants touchés par le conflit armé qui appuie les activités de sensibilisation menées par l’équipe spéciale de surveillance et d’information de l’ONU et toutes les autres parties luttant contre les violations et atteintes commises contre des enfants en République arabe syrienne;

m) Demande instamment à ceux qui sont engagés dans les pourparlers de paix et la négociation d’accords, en particulier dans le cadre du processus politique sans exclusive conduit et pris en main par les Syriens, conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité et au Communiqué de Genève, de veiller à ce que, le plus tôt possible, dans tous les pourparlers de paix et tous les accords négociés, une place soit faite à la protection des enfants, notamment leur libération et leur réintégration, au recours à des mesures de substitution aux poursuites, et aux droits et au bien-être des enfants, et de tenir compte autant que possible des vues de ces derniers;

n) Exige que les parties au conflit facilitent l’accès complet, sûr et sans entrave du personnel de surveillance et d’information des Nations Unies à des fins de surveillance et d’information;

Aux notables locaux et aux chefs religieux

a) Souligne la contribution importante des notables locaux et des chefs religieux au renforcement de la protection des enfants en temps de conflit armé;

b) Exhorte les notables locaux et les chefs religieux à condamner publiquement les violations et les atteintes commises sur la personne d’enfants, en particulier le recrutement et l’utilisation d’enfants, le meurtre et la mutilation d’enfants, le viol et les autres formes de violence sexuelle, les enlèvements, les attaques et les menaces d’attaques dirigées contre des établissements scolaires et hospitaliers, tout en continuant de militer pour les faire cesser et les prévenir, et à se concerter avec le Gouvernement, l’Organisation des Nations Unies et les autres parties prenantes compétentes pour appuyer la réinsertion et la réadaptation, dans leurs communautés respectives, des enfants touchés par le conflit armé, notamment par une campagne de sensibilisation visant à prévenir toute stigmatisation de ces enfants.

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