Coup d’envoi du deuxième round de négociations du futur traité sur la protection et l’utilisation durable de la biodiversité marine de la haute mer
Ce matin, le coup d’envoi a été donné aux travaux de la deuxième session de fond de la Conférence intergouvernementale chargée d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des « zones ne relevant pas de la juridiction nationale », c’est-à-dire la haute mer. L’année 2019, qui connaîtra deux sessions de négociations, est d’autant plus importante pour les océans qu’elle marque le vingt-cinquième anniversaire de l’entrée en vigueur de ladite Convention.
C’est dans une salle pleine à craquer que les délégations ont fait part de leurs positions générales avant de passer au vif du sujet des négociations sur les quatre thèmes de ce futur accord, qui se feront dans le cadre de groupes de travail informels, soit les ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au partage des avantages; les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées; l’étude d’impact sur l’environnement; le renforcement des capacités et le transfert de techniques marines.
Résumant l’essence même de ce processus, le Secrétaire général de la Conférence, M. de Serpa Soares, qui est à la tête du Département juridique de l’ONU, a espéré que l’objectif commun de « donner aux générations futures des océans sains et productifs » guidera les négociations, sachant que les zones de haute mer représentent 64% des océans.
Comme lors de la première session en septembre 2018, la Présidente de la Conférence, Mme Rena Lee, de Singapour, a préparé un document* pour faciliter les négociations qui a été fort bien accueilli par l’ensemble des délégations. Ce document regroupe des propositions de formulation pour le texte du futur accord et reprend des options pour les quatre thèmes retenus, qui se fondent sur les débats tenus jusqu’à présent dans le cadre de ce processus.
Au sujet de ces négociations, la Présidente a invité les délégations à faire preuve de souplesse et d’esprit de coopération pour remplir leur mandat. À la première session en septembre dernier, certaines délégations ont souligné que « nous sommes tous engagés sur un canoë géant », a-t-elle rappelé en invitant les représentants d’États Membres à être « prêts à ramer » au cours de cette session.
Pour les intervenants, le document de la Présidente a le mérite de centrer les discussions sur un texte. Comme l’ont dit la Chine et l’Inde, il constitue une bonne base pour reprendre les négociations là où elles en sont, sachant que « le temps presse ». Un sentiment d’urgence exprimé haut et fort par les représentants des petits États insulaires en développement (PEID), en particulier ceux de la CARICOM, du Forum des îles du Pacifique et de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), qui attendent avec intérêt l’accord sur un texte qui doit être finalisé d’ici à la deuxième moitié de 2020. Pour les PEID, il est impératif que le nouvel instrument tienne compte de leurs besoins spécifiques notamment en termes de transfert de techniques marines et de renforcement de leurs capacités.
À l’instar des membres du Groupe des 77 et la Chine, le Groupe des États d’Afrique a plaidé pour des progrès équilibrés sur les quatre segments des discussions. Rappelant qu’il existe déjà certains mécanismes et cadres internationaux et régionaux qui traitent du droit de la mer et de la préservation de la biodiversité, de nombreuses délégations ont insisté sur le fait que le présent processus doit venir compléter ces cadres existants sans les remettre en cause et sans qu’il y ait des chevauchements. La Chine a tranché en affirmant qu’il s’agit en fait de faire avancer le droit de la mer en se fondant sur ce qui existe déjà.
Les États non parties à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer ont revendiqué leur place dans ce processus, se basant sur l’argument qu’il y est question du patrimoine commun de l’humanité et de sa conservation et protection pour les générations futures, une question qui concerne tous les pays. Ainsi, la Colombie, l’Érythrée et la Turquie, pour n’en citer que certains, ont défendu l’idée qu’il ne sera pas possible de parvenir à un instrument internationalement légitime et universel à travers ce processus si les États non parties à la convention sont aliénés dès le départ. Concrètement, ces pays espèrent pouvoir adhérer au futur accord sans que cela compromette leur position vis-à-vis de la Convention, comme l’a précisé la Turquie.
Pour le Japon, les différences de vues qui persistent sont souvent liées à des divergences dans l’interprétation de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. En cette deuxième session de fond, ce pays a appelé à ne pas consacrer trop de temps aux détails et à donner la priorité aux questions de fond dans l’espoir de pouvoir arriver à terme à un consensus. Un point de vue partagé par la République de Corée pour laquelle il ne faut pas se hâter dans un simple souci d’efficacité pour parvenir à ce consensus, car les enjeux sont importants.
Après le débat général, le Groupe de travail informel sur « les ressources génétiques marines, y compris le partage des avantages », a commencé ses travaux qui se poursuivront demain, mardi 26 mars, à partir de 10 heures.
* A/CONF.232/2019/1
CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE SUR UN INSTRUMENT INTERNATIONAL JURIDIQUEMENT CONTRAIGNANT SE RAPPORTANT À LA CONVENTION DES NATIONS UNIES SUR LE DROIT DE LA MER ET PORTANT SUR LA CONSERVATION ET L’UTILISATION DURABLE DE LA BIODIVERSITÉ MARINE DES ZONES NE RELEVANT PAS DE LA JURIDICTION NATIONALE: (A/CONF.232/2019/L.1, A/CONF.232/2019/L.2, A/CONF.232/2019/1 et A/CONF.232/2019/INF.2)
Déclarations liminaires
Mme RENA LEE (Singapour), a ouvert les travaux en sa qualité de Présidente de la Conférence intergouvernementale chargée d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Elle s’est réjouie du fait que la première session en septembre 2018 a été « un excellent début qui aura permis de progresser sur la voie de l’élaboration de l’instrument escompté ». Elle a affirmé que 2019 est une année importante pour les océans, étant donné que sera commémoré le vingt-cinquième anniversaire de l’entrée en vigueur de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Au sujet des négociations qui s’ouvrent, elle a invité les délégations à faire preuve de souplesse et d’esprit de coopération pour remplir leur mandat. À la première session en septembre dernier, certaines délégations, a-t-elle rappelé, ont rappelé que « nous sommes tous engagés sur un canoé géant ». Dès lors, elle a dit espérer que les délégués arrivent à cette seconde session en étant « prêts à ramer ».
M. MIGUEL DE SERPA SOARES, Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, s’exprimant en tant que Secrétaire général de la Conférence intergouvernementale chargée d’élaborer un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, a estimé que la première session de la Conférence avait fourni une bonne base pour les travaux à venir. Le document d’aide aux négociations préparé par la Présidente de la Conférence reflète l’ampleur et la qualité des discussions, a-t-il relevé. Le Secrétaire général a également souligné l’importance des ateliers régionaux et techniques qui se sont tenus sur les différentes questions à l’ordre du jour de la Conférence, ainsi que d’autres évènements tels que la Conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique, en novembre 2018. De plus, pour la toute première fois, le thème de la Journée mondiale de la vie sauvage était centré sur les espèces marines.
M. de Serpa Soares s’est également réjoui de l’amélioration des connaissances scientifiques sur les océans, citant notamment le rapport d’évaluation mondiale de 2019 sur la biodiversité et les services écosystémiques, établi par la Plate-forme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) qui couvre non seulement les écosystèmes terrestres mais aussi les océans ouverts. Ce rapport, qui a été établi par 150 experts de 50 pays différents, avec la contribution de 250 autres experts, doit fournir une synthèse mondiale de l’état de la nature, des écosystèmes et des contributions de la nature en faveur des populations.
Un autre rapport important à paraître cette année est celui du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sur l’océan et la cryosphère dans le cadre d’un climat en évolution. Plus de 100 scientifiques de plus de 80 pays ont évalué les dernières connaissances scientifiques en matière d’impact des changements climatiques sur les océans, les écosystèmes côtiers, polaires et montagneux, ainsi que sur les communautés humaines qui en dépendent. Ces rapports doivent être utilisés dans les préparatifs de la deuxième évaluation mondiale des océans que l’Assemblée générale doit examiner en 2020. Plusieurs chapitres de cette évaluation auront trait à la biodiversité marine pour les zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Étant donné qu’il faut de nombreux rédacteurs pour cette évaluation, le Secrétaire général de la Conférence a lancé un appel aux États Membres pour qu’ils nomment des experts supplémentaires, précisant que les organisations intergouvernementales concernées par ces questions peuvent aussi recommander des experts.
M. de Serpa Soares a ensuite mentionné la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable qui contribuera aux progrès dans les connaissances sur les océans, y compris sur la biodiversité marine pour les zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Une réunion aura lieu du 10 au 14 juin au Siège des Nations Unies sur ce thème.
« On ne doit pas sous-estimer l’importance des progrès de la science des océans », a poursuivi le Secrétaire général de la Conférence en évoquant les travaux d’une équipe de chercheurs qui a annoncé, le mois dernier, avoir réussi à établir la séquence du génome du grand requin blanc. Ils ont identifié en particulier certains gènes qui pourraient contribuer à la guérison de ces requins, comme la coagulation ou la régénérescence de la chair, ou encore l’élimination de tumeurs. Des découvertes qui pourraient avoir des applications cliniques, par exemple pour le traitement du cancer chez les humains.
Au moment où commencent les discussions de cette deuxième session de fond, le Secrétaire général de la Conférence a espéré que l’intérêt commun de donner aux générations futures des océans sains et productifs, guidera les négociations. Il a appelé les délégations à garder l’esprit constructif et ouvert qu’ils ont eu lors de la première session.
Débat général
M. FUAD BATEH, de l’État de Palestine, qui s’exprimait au nom du Groupe des 77 et la Chine, a jugé très utile le guide préparé par la Présidente de la Conférence pour centrer les négociations de fond sur les quatre grands sujets identifiés en 2011. Notant que le processus d’élaboration d’un instrument international juridiquement contraignant est passé par de nombreuses étapes, il a estimé que cela témoigne de la détermination des États Membres et d’autres parties prenantes pour lesquels la préservation et l’utilisation durable des océans est une nécessité. L’objectif de ce processus est la mise au point et l’adoption d’un instrument juridiquement contraignant pour la conservation et l’utilisation durable des zones marines qui ne dépendent de juridictions nationales, a martelé le représentant.
Le G77, a-t-il poursuivi, est fier de son rôle de force motrice pour parvenir à cette étape importante. Il a dit que le Groupe avait étudié avec soin le document soumis par la Présidente et tenait à contribuer aux progrès du processus. Il a souligné la nécessité d’avancer de manière équilibrée sur les quatre sujets à l’étude, mettant l’accent sur l’importance d’un partage juste des ressources génétiques marines. Le Groupe répète que le nouvel instrument doit tenir compte des besoins particuliers des pays en développement de façon à leur permettre d’assumer leurs responsabilités découlant du nouvel instrument, a conclu M. Bateh.
M. MEHDI REMAOUN (Algérie), s’exprimant au nom du Groupe des États d’Afrique, a demandé que les discussions de cette seconde session soient « ciblées et directes ». Il a plaidé pour des progrès équilibrés sur les quatre segments des discussions. Il a salué le fait qu’un texte a été établi par la Présidente pour guider les travaux, avant de remercier la Division des affaires maritimes et du droit de la mer pour son appui à la participation d’experts de pays en développement aux présents travaux. Il a aussi dit espérer des négociations fructueuses et le même niveau d’engagement dont les délégations avaient fait preuve par le passé.
Mme JANINE ELIZABETH COYE-FELSON (Belize) qui s’exprimait au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), a remercié la Présidente d’avoir fourni un document qui doit guider les négociations. Il faut faire preuve de détermination pour parvenir à un accord sur un texte d’instrument juridique dans la deuxième moitié de 2020, a-t-elle déclaré en rappelant que cet accord universel doit mettre en place les normes et mécanismes internationaux, ainsi que les arrangements institutionnels nécessaires pour atteindre l’objectif fixé. Les membres de l’AOSIS insistent sur le fait qu’il faut traiter de la question des capacités des petits États insulaires en développement (PEID), de manière à ce que le processus d’élaboration d’un instrument international juridiquement contraignant aboutisse à des avantages équitables pour tous les pays. L’AOSIS espère qu’un projet de document sera soumis d’ici la Troisième session de la Conférence intergouvernementale.
M. ANDREAS PAPACONSTATINOU de l’Union européenne a estimé que la deuxième session de la Conférence est essentielle pour l’élaboration du texte du futur accord. « Nous partageons l’intérêt de la mise en place d’un cadre solide et viable qui permette d’assurer efficacement la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité des zones situées au-delà de la juridiction nationale », a indiqué le délégué. Cet objectif commun doit se traduire tout au long du processus de négociation en dispositions juridiques concrètes. Le représentant a attiré l’attention sur certaines questions à discuter au cours de la session, notamment les fonctions essentielles et les principaux résultats attendus pour chaque chapitre. Il a également mentionné la nécessité pour les processus et mécanismes du nouvel instrument d’être capables de remplir efficacement les fonctions traitées.
Autre sujet important pour la délégation de l’Union européenne, le développement de domaines de convergence autour des fonctions et dispositions du futur traité. Au cours de la présente session, il faudra aussi essayer de réduire la gamme d’options dans les domaines où les délégations ont toujours des points de vue multiples. Le représentant a également recommandé de rechercher un équilibre entre, d’une part, les détails nécessaires et les orientations dans le texte du traité lui-même et, d’autres détails, qui devront être développés par la Conférence des parties ou un autre organe désigné, selon le cas, une fois que l’instrument sera entré en vigueur.
Mme MARGO REMINISSE DEIYE (Nauru) qui parlait au nom des membres du Forum des Îles du Pacifique, a rappelé que le Forum avait soumis sa vision pour un instrument robuste lors de la session précédente. Il a réaffirmé que ses membres prennent très au sérieux cet instrument juridiquement contraignant qui doit permettre d’améliorer la gouvernance mondiale des océans et mettre fin à la perte de ressources précieuses de biodiversité marine. Elle a évoqué les nombreux articles de presse sur les dégâts du plastique dans les mers. Cet instrument doit prendre en compte les intérêts spécifiques des PEID, a-t-elle exigé. Les membres du Forum estiment que l’instrument qui sera élaboré doit venir compléter les instruments juridiques pertinents existants ainsi que les mécanismes internationaux sectoriels existants, afin de ne pas saper leur pertinence, a-t-elle précisé. « Même si nous avons le bon cap, nous devons travailler d’arrache-pied pour ramer de façon concertée », a-t-elle conclu.
Mme JULIETTE ROSITA RILEY (Barbade), s’exprimant au nom de la Communauté des Caraïbes (CARICOM), a salué le document de travail élaboré par la Présidente pour guider les discussions. Elle a promis que les pays des Caraïbes, en tant que petits États insulaires en développement (PEID), sont déterminés à voir naître un instrument juridique qui renforcera la conservation des ressources marines biologiques. Elle a aussi remercié les pays ayant contribué au fonds d’affectation spéciale volontaire destiné à faciliter la participation aux présents travaux de représentants des pays en développement.
M. PETER EMBERSON (Fidji), qui parlait au nom des Petits États insulaires en développement du Pacifique, a salué le fait que le document de la présidence reflète l’impératif, pour ce processus de négociation, de parvenir à un solide système de partage équitable des bénéfices. Il a aussi apprécié qu’il prenne en compte les besoins particuliers des PEID. Cet instrument doit être plus cohérent et doit venir compléter les cadres juridiques et mécanismes déjà en place, a-t-il toutefois tenu à préciser en parlant au nom des « États océaniques ». Rappelant que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer fournit le cadre juridique de ces négociations, il a précisé qu’il s’agit aujourd’hui de combler les lacunes du droit de la mer. Sur les modalités pratiques de la présente session, le représentant a demandé que l’on évite de tenir des réunions en parallèle, compte tenu des contraintes de personnel.
M. MILENKO ESTEBAN SKOKNIC TAPIA (Chili), s’exprimant également au nom d’un groupe de pays (Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, Équateur, El Salvador, Guatemala, Honduras, Mexique, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine et Uruguay), a promis que ces délégations étaient résolues à travailler avec détermination au cours des travaux de la Conférence. Elles souhaitent que les espaces de dialogue soient créés pour renforcer les convergences déjà développées au cours de précédentes discussions. Pour le Chili, toutes les délégations devraient partager leur avis en mettant l’accent sur les mécanismes institutionnels. Il a terminé en souhaitant que les deux prochaines semaines de travaux soient fructueuses.
Mme MANA JULIANA TENONO (Colombie), qui parlait au nom de certains États non parties à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (Colombie, El Salvador, Érythrée, République islamique d’Iran et Turquie), a expliqué qu’ils participent à ces négociations en partant du principe que c’est dans l’intérêt commun de veiller à la protection, la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine dans les zones en dehors des juridictions nationales. Elle a toutefois réitéré que ni leur participation à ces négociations, ni le résultat de celles-ci ne sauraient affecter leur statut juridique d’États non parties à la Convention, ou à d’autres instruments y relatifs. La Colombie, à l’instar d’autres délégations, demande qu’on établisse clairement le lien entre ce nouvel accord et la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer ainsi que d’autres cadres internationaux, régionaux, et sectoriels.
Pour les pays non parties à la Convention, cette position, qui est reflétée dans le projet de texte de l’accord mais seulement à titre d’option, ne devrait pas l’être si l’on souhaite réellement parvenir à un instrument universel dans lequel aucun pays « n’est laissé de côté ». Par conséquent, la représentante a demandé que l’option de ne pas avoir de langage du tout sur cette position, dans le texte du futur instrument, soit abandonnée. Elle a même été jusqu’à préconiser que ce langage figure dans le préambule. En conclusion, la représentante a estimé qu’il n’est pas possible de parvenir à un instrument internationalement légitime à travers ce processus si les États non parties à la convention sont aliénés dès le départ.
M. SIRA SWANGSILPA (Thaïlande) a dit qu’en matière de partage des bénéfices biologiques de la haute mer, les discussions actuelles doivent tenir compte des instruments et accords déjà adoptés en matière de gestion des ressources génétiques. Au sujet des aires marines protégées, la Thaïlande souhaite que des mesures particulières soient prises dans le futur instrument, par exemple pour qu’il prévoie la création d’un réseau mondial des aires marines protégées. En plus, la Thaïlande rappelle que le transfert des technologies devrait tenir compte des besoins spécifiques des pays en développement, afin de favoriser leur développement socioéconomique, en même temps que la conservation de la biodiversité marine.
M. KOKOU KPAYEDO (Togo) a expliqué que son pays avait adopté le 30 mars 2016 la Loi 2016-007 relative aux espaces maritimes sous sa juridiction nationale, conformément à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. De plus, le 21 septembre 2018, le Togo et le Bénin ont déposé auprès du Secrétaire général de l’ONU une demande conjointe en vue de la délimitation de la limite extérieure de leur plateau continental respectif au-delà des 200 milles marins.
M. Kpayedo a réaffirmé l’attachement du Gouvernement togolais à l’élaboration d’un instrument juridiquement contraignant se rapportant à la Convention précitée et traitant de la conservation et de l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale. Il a aussi pris note du contenu et de l’architecture du document établi par la Présidente de la Conférence. Ce processus de négociation « ne sera pas un long fleuve tranquille », a-t-il prévenu en imaginant que « nous ne suivrons pas toujours le même cap, mais, à force de coopération, de souplesse et de détermination, nous finirons par arriver à bon port ».
M. PEYAMI KALYONGU (Turquie) a rappelé que son pays accueillerait en 2022 la seizième conférence des parties de la Convention sur la diversité biologique. Il a dit souhaiter que le futur instrument en discussion soit conforme aux principes de conservation des ressources génétiques marines tel que prévu par ladite Convention. Le représentant a dit aussi espérer que cet instrument tienne compte des priorités et préoccupations de tous les États, car « on ne doit pas négocier un accord qui laisse certains États de côté ». Il a ainsi évoqué ces pays qui ne sont pas parties à la Convention sur le droit de la mer, avant de rappeler que la position de la Turquie au sujet de cette convention ne constitue pas un rejet de tous ses préceptes, notamment ceux en rapport avec la protection de l’environnement marin et la gestion durable des océans et de leurs ressources. Le représentant a ainsi rappelé l’attachement de son pays à la conservation et l’utilisation durable des océans et de leurs ressources, tout en soulignant l’importance de la coopération régionale et internationale à cette fin. La Turquie promet donc de continuer à prendre activement part aux présentes négociations, tout en espérant que les États non parties à la Convention sur le droit de la mer puissent y adhérer sans que cela compromette leur position vis-à-vis de la Convention.
Le représentant a estimé par ailleurs que le document de base des négociations, préparé par la Présidente, aurait dû définir un cadre géographique clair. La délégation souhaite donc que l’expression « zones ne relevant pas de la juridiction nationale » soit redéfinie au préambule du futur instrument afin d’éviter toute équivoque. Cela est d’autant plus important que certains États côtiers n’ont pas encore identifié de zone économique exclusive ou des zones de ce genre dans des eaux internationales, en accord avec le droit international en la matière. Cela ne signifie donc pas que ces zones pourraient constituer des « zones ne relevant pas de la juridiction nationale » selon l’entendement de l’instrument en préparation. La Turquie rappelle aussi qu’il existe déjà des instruments internationaux et régionaux sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine de ces zones. Il faut donc, a-t-il rappelé, une définition claire de « zones ne relevant pas de la juridiction nationale ». Pour la Turquie, cette expression signifie « la haute mer au-delà de 200 milles marins des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale ».
M. GENEROSO CALONGE (Philippines) est intervenu simplement pour exprimer son soutien aux méthodes de travail proposées par la Présidente pour ce cycle des négociations intergouvernementales d’un instrument juridiquement contraignant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale.
M. U. HAU DO SUAN (Myanmar) a remercié la Présidente pour son document d’aide aux négociations, estimant qu’il facilitera la tenue de discussions fructueuses et permettra de parvenir à éliminer certaines options. Rappelant qu’il existe déjà certains mécanismes et cadres internationaux qui traitent de la préservation de la biodiversité marine, il a estimé que le présent processus devait venir compléter ces cadres existants sans les remettre en cause. Dans la rédaction d’un instrument juridiquement contraignant, les options doivent tenir compte des droits souverains des États qui sont ancrés dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, a-t-il conclu.
M. MATTHIAS PALSSON (Islande) a recommandé que les délégations, au cours des travaux de la session, évitent de camper sur des positions tranchées. Il a demandé que le temps nécessaire soit accordé aux discussions, et que le consensus soit de mise pour arriver à un résultat agréé par tous.
M. MOHAMMED ATLASSI (Maroc) a remercié la Présidente pour la publication en temps voulu du document devant servir de base aux discussions. Il a souhaité que cette seconde session se déroule dans la même dynamique que la précédente. Il a plaidé pour des négociations ciblées et demandé que le temps nécessaire leur soit consacré. La définition des concepts, a-t-il estimé, doit se faire en se référant aux instruments et accords déjà en vigueur. Il a terminé en soulignant l’importance du transfert des technologies marines en faveur des pays en développement.
M. LUIS XAVIER OÑA GARCÉS (Équateur) a salué le document d’aide aux négociations préparé par la présidence de la Conférence qui reprend les différents points de vue exprimés par les délégations sur les quatre grands thèmes du processus en cours. Il a fait valoir que la dynamique côtière et océanique est une source importante de la biodiversité de son pays, qui a misé sur des systèmes favorisant la protection de l’environnement. Il a cité à cet égard la gestion de la réserve des Galapagos. Cependant, même dans cette réserve, on observe aujourd’hui des déchets plastiques apportés par les courants marins, ce qui souligne bien la pertinence de la responsabilité partagée dans la protection de la biodiversité marine.
L’Équateur salue toutes les propositions visant à mettre en œuvre des mécanismes de gestion des zones marines qui n’entrent pas dans les juridictions nationales, mais il faut, selon le représentant, que cela se fasse sans pour autant empêcher que la pêche s’y poursuive conformément aux juridictions existantes.
M. OMAR CASTAÑEDA SOLARES (Guatemala) a estimé que le document d’aide aux négociations de la Présidente va permettre de centrer les débats de cette session. Accordant la plus haute importance à la gestion durable des ressources marines, le représentant a fait valoir que cela pouvait contribuer à l’élimination de la pauvreté et à la résilience des sociétés par rapport aux impacts des changements climatiques. C’est pourquoi un instrument juridiquement contraignant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale pourra contribuer à atténuer les effets adverses de certaines activités qui mettent en péril la biodiversité marine. Toutefois, a noté le représentant, l’efficacité de cet instrument dépendra du renforcement des capacités et des transferts de technologies marines, sans quoi il ne pourra pas être efficacement mis en œuvre. Les négociations de ce document doivent viser à renforcer les cadres existants ainsi que la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, a-t-il conclu, en appelant à parvenir à son universalisation dans les plus brefs délais.
M. HASSAN ELSADIG AHMED ABDALHY (Soudan) a remercié la Présidente de la Conférence pour le document de travail qu’elle a mis à disposition des délégations pour guider les discussions. Le délégué a dit espérer que les travaux de la présente session n’empiéteraient pas sur d’autres processus intergouvernementaux.
L’Observateur du Saint-Siège, Mgr TOMASZ GRYSA, a relevé cinq lacunes dans le document établi par la Présidente pour les négociations. La première, fondamentale, est le manque de clarté en matière d’étude d’impact environnemental et sur le transfert de technologies. Il a aussi souligné une lacune juridique, étant donné que la juridiction applicable est celle du pays dont le navire bat pavillon ou le pays dans lequel il est enregistré. Pour le Saint-Siège, cela ne suffit pas pour établir la responsabilité juridictionnelle. Le représentant a donc invité à poursuivre la réflexion sur le sujet. De même, une lacune d’applicabilité juridique a été soulignée par la délégation qui estime qu’en plus d’un organe scientifique prévu dans le futur instrument, on pourrait ajouter un organe traitant de questions économiques et sociales pour veiller à la bonne gestion de ressources de la haute mer.
Ensuite, le représentant du Saint-Siège a identifié une lacune économique: on a peu d’éléments sur les affaires et l’économie concernant la haute mer, alors même que c’est une zone où on s’attend à voir prospérer des activités commerciales. La cinquième lacune concerne l’héritage commun de l’humanité et la liberté en haute mer. Pour le Saint-Siège, il est peu probable que le futur instrument apporte des garanties sur le respect de ces aspects. La délégation a donc suggéré un langage de compromis sur ces deux questions.
Mme ARNAZ GHOBADI IANGROUDI (République islamique d’Iran) a souligné que l’utilisation durable de la biodiversité marine est une responsabilité collective. Elle a regretté que l’on n’accorde toujours pas assez d’attention à la menace qui pèse sur les zones marines échappant au contrôle des juridictions nationales. L’Iran se félicite des progrès accomplis dans le processus actuel de négociation d’un instrument juridiquement contraignant, a-t-elle dit, en estimant que le régime juridique qui doit sous-tendre cet instrument est celui du patrimoine de l’humanité, sans préjuger des obligations des États non-partie à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. La représentante a également insisté sur l’importance du renforcement des capacités et des transferts de technologie, affirmant que le succès du processus en cours en dépendra. Le nouvel accord devrait en outre éviter les chevauchements avec les cadres et mécanismes internationaux existants dans le domaine de la conservation de la biodiversité marine, a précisé la représentante.
Pour Mme PENI JUSTICIA MEIDIWATY (Indonésie), la conservation et l’utilisation durables de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale est une question du vingt-et-unième siècle qui exige une approche coopérative pour respecter les intérêts de l’ensemble de l’humanité. L’Indonésie, en tant qu’État côtier, est directement concernée par les conséquences potentielles des activités menées dans les zones de haute mer, notamment pour ce qui est de la pollution marine, et, par conséquent, elle demande que ce nouvel instrument juridiquement contraignant tienne compte des droits souverains des pays. S’agissant de la gestion des ressources génétiques marines, la représentante a estimé qu’il fallait appliquer le principe de la transparence.
M. KHURSHED ALAM (Bangladesh) a dit que cet instrument tant attendu permettrait d’en finir avec les vides juridiques au sujet de l’exploitation de la haute mer. Ce nouvel instrument juridique contraignant viendra rompre avec un « statu quo peu reluisant », a-t-il ajouté. Avec de la bonne volonté, « nous arriverons en 2019 à un accord sur le futur instrument », a-t-il espéré.
M. ESSAM YASSIN MOHAMMED (Érythrée) a estimé que le statut quo n’est plus tenable en matière de gestion des ressources de la haute mer. Dès lors, a-t-il affirmé, tout retard dans l’élaboration d’un instrument international est préjudiciable aux ressources biologiques de la haute mer. Il a démonté l’argument laissant croire que la haute mer n’est pas importante pour les communautés côtières. Il a donc plaidé pour que les gens vivant dans ces écosystèmes côtiers, notamment dans les pays en développement, soient écoutés. En effet, la santé des océans est cruciale pour la vie des communautés côtières déjà mises à mal par les changements climatiques, a-t-il rappelé, avant de demander que les négociations soient axées sur la population.
M. HAIBO GOU (Chine) a noté que le document d’aide à la négociation soumis par la Présidente de la Conférence reprend les points de vue exprimés par les délégations dans la session précédente. Il s’est dit prêt à reprendre les négociations sur cette base. Soulevant la question de savoir de quel type d’accord « nous avons besoin », le représentant a estimé qu’il fallait le développer de façon graduelle en tenant compte des liens avec les cadres juridiques existants. Il faut que le futur instrument s’inscrive dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et qu’il ne sape pas d’autres mécanismes régionaux notamment en matière de pêche, a exigé le délégué pour lequel ce nouvel accord doit aussi être « juste » et tenir compte de « tous les intérêts de l’humanité » notamment ceux de nombreux pays en développement.
De l’avis de la Chine, les ressources génétiques maritimes doivent être facilement accessibles et leurs avantages partagés. Le représentant a également mis l’accent sur l’importance des transferts technologiques dans ce contexte et a appelé à une participation universelle à cet instrument, ce qui justifie une approche consensuelle dans ses négociations. Les États doivent diriger ce processus, a-t-il précisé, en rappelant que le but est de parvenir à un accord « raisonnable et équitable ».
M. UMA SHANKAR YEDLA (Inde) s’est félicité de la participation d’un plus grand nombre de pays à cette session. Il s’est dit confiant que l’on pourra parvenir à un texte acceptable pour tous sur l’utilisation durable des ressources marines au profit de toute l’humanité. Le document d’aide aux négociations, soumis par la Présidente de la Conférence, constitue une bonne base pour aller de l’avant, a-t-il estimé. L’Inde est confiante que cette Conférence s’acquittera du mandat qui lui a été confié et espère que ses résultats seront conformes aux dispositions de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et des cadres régionaux existants dans le domaine de la conservation de la biodiversité marine.
M. KJELL KRISTIAN EGGE (Norvège) a dit souhaiter que le futur instrument soit une valeur ajoutée par rapport aux instruments internationaux et autres accords régionaux existants. Il a dit espérer que cet instrument soit ouvert et permette la contribution des organisations non gouvernementales dans la gestion de la haute mer. De même, l’instrument doit prévoir la responsabilité des États à l’égard de la communauté internationale en cas de manquement de leur part. Il faut donc qu’il contienne « des principes, des procédures et un système efficaces permettant de mettre en œuvre les obligations des États ».
Il faut aussi, a plaidé la Norvège, des éléments de renforcement de la confiance entre États afin de permettre une bonne mise en œuvre de l’instrument juridiquement contraignant. Ce dernier donne l’occasion de renforcer les systèmes actuels de transfert de technologies en faveur de pays en développement, a expliqué le représentant. Enfin, la Norvège a rappelé que ces négociations doivent rechercher « un accord pour l’avenir » qui soit assez souple pour s’adapter aux contextes futurs.
M. ALAIN JELLIER (Canada) a demandé que les délégations collaborent au mieux pour atteindre des objectifs communs. Il a jugé très importante la diversité marine de la haute mer, plaidant pour que sa protection ne soit pas prise à la légère. Le Canada estime qu’il faut maintenant, pour cette seconde phase des négociations, se mettre d’accord sur des éléments spécifiques et rédiger un document qui s’appuiera sur le projet établi par la Présidente. Il a dit espérer que les deux semaines de travaux pourraient se conclure sur un document de consensus.
M. RENE FIGUEREDO (Paraguay), qui s’exprimait au nom du Groupe des pays en développement sans littoral, a réaffirmé l’importance que revêt la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer pour les pays enclavés, car elle leur garantit des droits. Il a saisi cette occasion pour encourager les pays en développement sans littoral qui ne l’ont pas encore fait à devenir partie à cette Convention. Celle-ci, ainsi que la Convention sur la biodiversité biologique, sont des instruments essentiels, selon le Paraguay. Ils pourraient être le cadre juridique international adéquat pour parvenir à l’objectifs de développement durable 14 sur la vie aquatique. Il faut compléter ces instruments par des cadres sur la bioprospection et la gestion durable des ressources génétiques marines, a-t-il suggéré en insistant sur le partage des bénéfices de ces ressources par tous les pays, y compris ceux qui n’ont pas de littoral.
M. RISHY BUKOREE (Maurice) a salué le document d’aide aux négociations préparé par la Présidente de la Conférence, le qualifiant d’essentiel pour des négociations ciblées. En tant que PEID et État africain, l’île Maurice accorde beaucoup d’importance à la protection de la biodiversité en haute mer et saisit cette occasion pour souligner que « le temps nous presse ».
M. JUN-SHIK WANG (République de Corée) a remercié la Présidente pour son document d’aide aux négociations qui reflète néanmoins, comme il l’a remarqué, le manque de consensus sur beaucoup de sujet. Compte tenu de cela, la Corée est d’avis qu’il ne faut pas se hâter dans un simple souci d’efficacité, car les enjeux sont importants.
M. TETSUYA YOSHIMOTO (Japon) a lui aussi exprimé sa reconnaissance à la Présidente pour le document de facilitation des négociations. Les différences de vues qui persistent sont, à son avis, souvent liées à des divergences dans l’interprétation de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. En cette deuxième session de fond, il a appelé à ne pas consacrer trop de temps aux détails et à donner la priorité aux questions de fond dans l’espoir de pouvoir arriver à terme à un consensus.
M. JEEM LIPPWE (États fédérés de Micronésie) a salué l’inclusion des méthodes traditionnelles de conservation de la biodiversité marine dans le document de base que la Présidente a soumis aux délégations. Il a indiqué que la science et les savoirs traditionnels peuvent se compléter pour l’utilisation rationnelle de la biodiversité marine dans des zones de haute mer. Il a en outre insisté sur le fait que le renforcement des capacités et le transfert des technologies marines sont essentiels pour tirer parti des ressources maritimes de la haute mer.
M. JEAN KENFACK (Cameroun) a remercié la Division des affaires maritimes et du droit de la mer des Nations Unies pour avoir facilité l’organisation de cette session. Le Cameroun, a-t-il indiqué, est attaché à la conservation de la biodiversité marine, car c’est l’affaire de tous. M. Kenfack a dit espérer que les négociations aboutiraient à un instrument valorisant le patrimoine commun de l’humanité qu’est la haute mer. Il a également souhaité que le futur instrument tienne compte des savoirs traditionnels et favorise le renforcement des capacités et le transfert des technologies. Le Cameroun espère que le nouvel instrument viendra compléter ceux qui existent déjà, tout en les améliorant.
M. DIALLO HASSANE (Mali) a expliqué que son pays, en tant qu’État partie à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, accorde une importance capitale à la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine. Pour la délégation, le futur accord doit se fonder sur une approche inclusive et tenir compte des aspirations de tous les États Membres, y compris les pays sans littoral. Le représentant a mis l’accent sur l’importance du partage équitable des ressources marines et du transfert des techniques marines au pays en développement.
M. EVAN BLOOM (États-Unis) a espéré qu’il sera possible d’avancer vers l’objectif commun de conservation et d’utilisation durable de la biodiversité marine dans les zones situées en dehors des juridictions nationales. Pour le représentant, le nouvel accord doit être conforme au régime actuel du droit de la mer et ne doit pas compromettre les mandats des instances ou cadres qui s’occupent de ces questions. Les États-Unis estiment que le document distribué par la Présidente est une bonne base de négociation, mais soulignent qu’il ne s’agit pas de négocier un texte acceptable pour la majorité sans tenir compte des aspirations de tous. Ainsi, la délégation a proposé de négocier sur des textes spécifiques à inclure dans le nouvel instrument, et s’est dit prête à y participer.
M. ALFONSO ASCENCIO-HERRERA, de l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM), a rappelé que l’Autorité est l’une des institutions créées par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Il a aussi rappelé qu’en vertu de la résolution 72/249 de l’Assemblée générale, le futur instrument juridiquement contraignant en cours d’élaboration doit être conforme à la Convention. Il a donc insisté sur l’importance de préserver le caractère universel de la Convention. Il faut donc adopter une approche prudente afin de ne pas fragmenter le droit de la mer, a-t-il recommandé. La Convention prévoit par exemple, en sa partie XI, que la Zone (haute mer) et ses ressources sont « le patrimoine commun de l’humanité » et, de ce fait, que des mesures doivent être prises pour sa protection.
Ces mesures sont du ressort de l’Autorité internationale des fonds marins, a précisé le représentant, qui a également insisté sur le fait que le futur instrument ne doit pas saper les obligations des États parties découlant de la partie XI de la Convention. Il a expliqué que les 168 États parties à la Convention sont également membres de l’Autorité. Ils prennent donc part à ses processus de prise de décisions, soit par le biais du Conseil de l’Autorité, soit à travers les réunions des États parties.
Mme LYDIA SLOBADIAN de l’Union internationale pour la conservation de la nature et des ressources naturelles – UICN, a souligné que les océans appartiennent à tous. Il faut donc que la société civile et la communauté scientifique prennent part à sa gestion, a-t-elle estimé. Elle a souhaité qu’il n’y ait pas de division, au cours des négociations, mais plutôt des délégations qui fassent preuve d’imagination et d’engagement forts en faveur de processus justes et équilibrés. Pour accompagner ce processus et informer les participants aux présentes négociations, l’UICN a mis à disposition des données probantes sur son site Internet.
Le représentant du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), M. TAICEHIRO NAKAMURA, a rappelé que le PNUE a reçu mandat de l’Assemblée générale de promouvoir la coopération internationale dans le domaine de la protection de l’environnement. Il participe activement au processus en cours de négociation de l’instrument juridique et reste prêt à fournir des informations techniques aux délégations de la Conférence intergouvernementale. Par le biais de la coordination des programmes environnementaux, le PNUE a notamment traité de questions relatives aux transferts de technologies, y compris en collaboration avec l’Autorité internationale des fonds marins. Les coopérations ainsi que les dialogues intersectoriels du PNUE pourraient être utiles à ce processus de négociation, a soutenu le représentant.
Le représentant de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), M. ALEJANDRO ANGANUZZI, a placé les débats d’aujourd’hui dans le contexte plus large de la réalisation des objectifs de développement durable et en particulier ceux relatifs à la pêche et à la sécurité alimentaire au niveau mondial. Dénonçant les pratiques de pêche non durable, il a indiqué que la FAO cherche à relever ce défi. La FAO reconnaît également la nécessité d’inclure les aspects liés à la protection de la biodiversité marine dans ses travaux et actions en faveur d’une gestion durable des ressources. La FAO a coopéré par le biais des organisations régionales de gestion des pêches ou encore de ses programmes d’assistance technique dans le but d’assurer une gestion durable des pêches. Ses conclusions pourraient enrichir les débats en cours dans le contexte du processus actuel de négociation d’un instrument juridique, a conclu le représentant.
M. FREDRIK HAAG de l’Organisation maritime internationale, a indiqué que la plupart des traités établis par son organisation sont de nature juridiquement contraignante. De même, des directives, pratiques recommandées et codes sur la bonne gestion de la haute mer font déjà l’objet d’accords. Il a par exemple rappelé que son organisation avait permis la création de zones maritimes dites sensibles dont la biodiversité fait l’objet de mesures spécifiques de protection. L’Organisation maritime internationale souhaite donc que le futur instrument ne vienne pas saper les instruments et accords qui existent déjà.
Pour M. ARIEL TROISI, de la Commission océanographique intergouvernementale de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), il est important de s’assurer que les connaissances scientifiques soient mises au service du futur instrument. Ainsi, non seulement « la science océanographique doit être ici convoquée », mais également « les sciences humaines », a-t-il dit. Il a également plaidé pour le renforcement des capacités dans ces domaines et le transfert des techniques marines.
Le représentant de l’Alliance pour la haute mer, une organisation non gouvernementale qui travaille activement pour des océans en bonne santé, a salué le document soumis par la Présidente de la Conférence. L’organisation non gouvernementale a soumis des recommandations en vue de l’adoption du futur accord sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones en dehors des juridictions nationales, qui se trouvent sur son site Internet, a-t-il indiqué. Le représentant espère qu’en 2020, un traité international pourra être adopté en vue de la création de zones marines protégées en haute mer.
La représentante du Conseil international du droit de l’environnement a salué le fait que l’on se concentre désormais sur les aspects opérationnels du futur traité, ce qui devrait contribuer, selon elle, à faire avancer les négociations. Elle a rappelé que l’objectif du droit de l’environnement est de permettre aux êtres humains de vivre en harmonie avec la nature et de protéger les écosystèmes de la planète.
Mme JESSICA BATTLE du Fonds mondial pour la nature (WWF) a dit que ces négociations nous permettent de faire un « new deal avec la nature ». Le WWF est inquiet de voir certaines lacunes qui restent à combler par les États. Ainsi, pour le WWF, il faut que l’instrument prévoie un régime de coopération accrue avec des accords et même rendre la coopération obligatoire. Il faut aussi un cadre de supervision pour une mise en œuvre régionale des directives internationales. Enfin, il faut que l’instrument contienne une partie séparée traitant des aires maritimes protégées, tout en prévoyant des accords intersectoriels pour assurer que les évaluations environnementales soient prises en compte dans « la gestion que nous souhaitons de la haute mer ».
Groupe de travail sur les ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au « partage des avantages »
Les discussions et échanges entre délégations se sont appuyés sur le Document établi par la Présidente de la Conférence pour faciliter les négociations. Notons que ces négociations, prévues pour durer deux semaines, porteront sur l’ensemble des questions retenues en 2011, à savoir la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, en particulier les ressources génétiques marines, prises conjointement et dans leur ensemble, y compris les questions telles que:
1. Les ressources génétiques marines, y compris les questions relatives au partage des avantages;
2. Les mesures telles que les outils de gestion par zone, y compris les aires marines protégées;
3. L’étude de l’impact sur l’environnement;
4. Le renforcement des capacités et le transfert de techniques marines.
La première séance consacrée aux discussions portait donc sur « le partage des avantages », sous la conduite de la facilitatrice, Mme JANINE COYE FELSON (Belize), qui a rappelé aux délégations la possibilité de choisir parmi les options suggérées dans le document de base des négociations, ou alors proposer des amendements du texte, ou encore faire de nouvelles suggestions pour modifier le libellé.
La Palestine, s’exprimant au nom du Groupe des 77 et la Chine (G77), a préconisé la fusion de certains paragraphes sur la question du partage des avantages. Le représentant de l’Algérie, parlant au nom du Groupe des États d’Afrique, a demandé des éclairages sur certains concepts du document. Par exemple, il serait opportun, a dit le délégué, de préciser de quels organes il est question dans le texte suivant: « les avantages acquis sont utilisés aux fins suivantes: financer les activités des organes prévus à la partie [...] ».
La déléguée de Bélize, au nom de l’Alliance des petits États insulaires (AOSIS), a souhaité que les priorités des PEID soient clairement mentionnées quand on parle du partage des avantages. Elle a estimé que ces pays connaissent des « circonstances exceptionnelles » du fait de leur isolement géographique et parce qu’ils sont entièrement dépendant de la biodiversité marine pour leur survie.
La Barbade, s’exprimant au nom de la CARICOM, a choisi l’option du document qui prévoit que « les avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques marines des zones ne relevant pas de la juridiction nationale sont partagés avec les États parties en développement, une part étant spécifiquement réservée aux petits États insulaires en développement et, en priorité, aux États adjacents parmi eux. Ils peuvent également être attribués à des établissements universitaires, des centres de recherche ou d’autres entités non gouvernementales, ainsi qu’aux populations côtières ». La déléguée des Fidji, parlant au nom de PEID du Pacifique, a choisi la même option, tout en insistant pour voir inclure des dispositions sur la lutte contre la pollution marine dans cette partie, avant de faire mention de ses préférences au sujet des options proposées par le document.
Le Brésil, parlant au nom d’un groupe de pays d’Amérique latine et centrale, a insisté pour que les avantages à partager, pécuniaires ou non, soient énoncés dans une liste qui serait annexée à l’instrument et sujette à révision. Son homologue de la Turquie a suggéré que le partage des avantages pécuniaires soit fait en droite ligne du « Protocole de Nagoya sur l’accès aux ressources génétiques et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation relatif à la Convention sur la diversité biologique ». L’Union européenne a précisé pour sa part que ce partage peut se faire en s’inspirant de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Le partage des avantages doit se réduire aux avantages non pécuniaires, a insisté la République de Corée.
L’Union européenne a ajouté qu’une partie importante du partage des avantages concerne les informations obtenues après les recherches scientifiques. L’Union est donc d’avis que les résultats de ces recherches doivent être publiés comme le prévoit le document de la Présidente, mais il faudrait préciser que les chercheurs auraient un délai maximum de trois ans pour partager leurs résultats avec le centre d’échange prévu pour l’instrument. « Un tel délai va mettre la pression sur les chercheurs et éventuellement les décourager », a rétorqué le Japon. Le délégué japonais a aussi argumenté que les chercheurs publient les données selon un calendrier qui leur est propre, avant de marquer sa préférence pour des avantages non pécuniaires.
Au nom des pays en développement sans littoral, le Paraguay a rappelé que le droit de ce groupe de pays est spécifiquement reconnu dans la Convention sur le droit de la mer, souhaitant ainsi que les avantages particuliers leur reviennent comme le prévoit le document des négociations. La Fédération de Russie a également choisi des options du document qui lui apparaissent pertinents, alors que la Suisse a fait observer que les avantages doivent bénéficier à tous et non pas à un groupe de pays donnés. C’est pourquoi le pays penche pour l’option d’avantages non pécuniaires. Cette dernière option est partagée par les États-Unis pour qui le partage des avantages doit se faire sur une base volontaire. De plus, la délégation n’est pas très enchantée des mesures proposées sur le transfert des techniques marines et demande également une reprise de nombreux libellés jugés « flous » ou « peu pertinents ».
Enfin, le Mexique a estimé qu’il pourrait bien s’accommoder des deux types d’avantages si et seulement si on en modifiait le libellé pour mentionner juste des « avantages », sans y adjoindre un qualificatif.