En cours au Siège de l'ONU

8657e séance – matin
CS/14010

Après une visite conjointe ONU/UA, le Conseil de sécurité insiste sur le rôle des femmes pour consolider les progrès dans la Corne de l’Afrique

Les perspectives de paix dans la Corne de l’Afrique sont palpables et demandent l’appui de la communauté internationale pour être confortées, notamment avec la participation des femmes, a reconnu le Conseil de sécurité ce matin, à l’issue d’une séance d’information sur la paix et la sécurité en Afrique marquée par des exposés de l’ONU et de l’Union africaine (UA). 

De retour d’une troisième visite conjointe avec l’Union africaine (UA)dans quatre pays de la région -Éthiopie, Djibouti, Érythrée et Somalie– et centrée sur l’appui aux initiatives et à la participation des femmes aux processus de paix, la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Mme Amina J. Mohammed, a fait part de sa confiance et de son optimisme en appelant les dirigeants à donner davantage de responsabilités aux femmes.

La Vice-Secrétaire générale a appelé à approfondir le partenariat de l’ONU avec l’Union africaine et à l’utiliser pour stabiliser les progrès engrangés.  D’après elle, chaque pays va dans le bon sens et il faut saisir cette opportunité pour appuyer la paix par des actions immédiates et à long terme concernant les processus de paix, la justice transitionnelle mais aussi les réformes économiques.  S’agissant du Soudan en particulier, Mme Mohammed a appelé à lever les sanctions et à envisager une forme de « Plan Marshall ».  

Avec la solidarité et le soutien de la communauté internationale, ces pays peuvent relever leurs défis et créer une région de croissance et de stabilité au sein du continent africain, a-t-elle prédit.  Selon le représentant sud-africain, le « vent nouveau » qui souffle dans la Corne de l’Afrique donne l’espoir de voir les armes se taire d’ici à 2020.

Mais il y reste beaucoup à faire, a rappelé Mme Fatima Kyari Mohammed, Observatrice permanente de l’Union africaine auprès des Nations Unies, notamment pour appuyer et garantir la participation des femmes à tous les processus de prise de décisions et aux initiatives de paix et de développement.  La Corne de l’Afrique doit être encouragée à miser sur les femmes et les jeunes avec l’assistance des donateurs internationaux, a-t-elle insisté.

Au fil de leur prise de parole, des délégations, dont l’Allemagne, sont apparues marquées par l’intervention devant elles, la semaine dernière, de la jeune Soudanaise Alaa Salah qui rapportait comment les femmes, en première ligne lors de la révolution, ont été depuis écartées du processus politique.  Le représentant du Pérou a même demandé « davantage d’informations sur le sujet ».  La représentante du Royaume-Uni, qui préside le Conseil ce mois-ci, a également dit attendre une pleine et meilleure participation des femmes aux affaires publiques, comme s’y est engagé le Premier Ministre soudanais à la tribune de l’Assemblée générale.  Pour la France, les femmes soudanaises, qui ont en effet joué un rôle déterminant dans la révolution, ont « mérité leur place dans la transition ». 

La Pologne a rappelé que la participation des femmes était indispensable pour garantir le succès des processus de paix dans la région.  La question de leur participation à la vie publique n’est pas seulement quantitative mais aussi qualitative, a insisté le représentant.  Pour le Koweït et la Chine, la région tout entière doit faire l’objet de davantage d’attention notamment en matière de développement, dont l’absence est la cause profonde de conflits.

La participation des femmes aux prochains processus électoraux, comme en Somalie, en 2020, a aussi été largement soulignée, notamment par l’Afrique du Sud.  Relevant qu’il s’agira des premières élections au suffrage universel organisées dans ce pays depuis des décennies, la Belgique a indiqué qu’elle sera particulièrement attentive.

Le Conseil de sécurité a été également interpellé sur la place des femmes dans les opérations de maintien de la paix.  La Vice-Secrétaire générale a ainsi rappelé que seules 4% de femmes étaient actuellement déployées sur le terrain.  Les soldates qu’elle a rencontrées lui ont rapporté diverses formes de harcèlement.  « On leur demande de servir le thé ou le café plutôt que de patrouiller dans les communautés », a-t-elle regretté.  Elle a signalé l’absence de services concrets pour faciliter leur déploiement, comme des toilettes séparées, des congés adaptés à leurs obligations maternelles ou encore la fourniture de serviettes hygiéniques.

Que pouvons-nous faire? a demandé en retour l’Indonésie, l’un des principaux pays fournisseurs de troupes avec lesquels Mme Mohammed juge important d’ouvrir des consultations sur le sujet.

Par ailleurs, les États-Unis ont attiré l’attention sur la situation au Soudan du Sud qui dispose d’encore neuf jours pour former un gouvernement d’union nationale d’ici à l’échéance du 12 novembre.  Un échec constituerait « une catastrophe pour la population », a averti leur représentante.  « Toutes les parties doivent adhérer à cette date », a renchéri l’Afrique du Sud, appuyée par la Fédération de Russie.

Le représentant russe a par ailleurs appelé l’Érythrée et Djibouti à régler leur différend frontalier par le dialogue et la médiation.  À son avis, ce dossier ne représente plus une menace à la paix et la sécurité régionales et ne devrait, par conséquent, plus figurer à l’ordre du jour du Conseil.

PAIX ET SÉCURITÉ EN AFRIQUE                                       

Déclarations

Les perspectives de paix dans la région de la Corne de l’Afrique sont bien réelles, a estimé Mme AMINA J. MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, à l’issue de sa visite conjointe avec l’Union africaine, la troisième de ce type, en Éthiopie, à Djibouti, en Érythrée et en Somalie. 

Chaque pays avance à son rythme dans un processus de réforme complexe et, dans chaque pays, les femmes jouent un rôle, a rapporté la Vice-Secrétaire générale.  Les dirigeants consacrent davantage d’efforts pour donner aux femmes des responsabilités accrues.  Ainsi, en Éthiopie, la moitié des ministres sont des femmes et le Gouvernement prévoit des réformes de grande ampleur en faveur de l’égalité hommes-femmes.  L’initiative « Mères pour la paix » travaille pour réparer le tissu social. 

En Somalie, où les femmes de la société civile luttent contre la propagation de l’extrémisme violent, les efforts de la communauté internationale doivent se concentrer sur le financement et le soutien aux élections prévues l’an prochain, a poursuivi Mme Mohammed.  Il y a en Somalie « des îlots de stabilité » sur lesquels s’appuyer, mais il faudra davantage de coopération de la part du Gouvernement central et « une feuille de route » pour la justice transitionnelle.

En Érythrée, l’égalité hommes-femmes est une réalité incontestable, s’est félicitée la Vice-Secrétaire générale.  En outre, des progrès ont été faits pour améliorer les relations avec les pays voisins.  « C’est le début, mais il y a des occasions à saisir », a-t-elle encore souligné.  À Djibouti aussi, des femmes ont lancé des centres communautaires pour prendre en charge les enfants réfugiés et migrants et une loi a été adoptée pour garantir un quota de femmes au Parlement.  Enfin au Soudan, les femmes ont été « le moteur du changement » et réclament l’égalité et leur inclusion à tous les niveaux de la société.

Cette région du monde est pleine de promesses, avec l’une des croissances les plus rapides d’Afrique, a relevé Mme Mohammed.  Cependant, a-t-elle averti, la route de la Corne de l’Afrique reste remplie d’obstacles.  Il faut faire front sur des fondations fragiles, ce qui suppose l’unité de la région pour s’occuper notamment des dizaines de milliers de réfugiés et de personnes déplacées, menacées par la traite des personnes, dans les zones où les conflits continuent de faire rage.

Les pays de la région ont beaucoup de points communs, même si chacun a ses spécificités, mais une véritable coopération est essentielle, notamment via la relance de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).  À ce titre, a rappelé la Vice-Secrétaire générale, il était crucial que la mission entreprise soit une mission conjointe avec l’Union africaine.  Désormais, ce qu’il faut c’est approfondir et utiliser ce partenariat pour renforcer l’unité nationale dans chaque pays.

« Au Soudan, grâce aux efforts de femmes extraordinaires, un nouveau jour se lève et il faut appuyer cet élan. »  Mme Mohammed a salué à cet égard le renouvellement du mandat de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (MINUAD) pour un an et dit qu’il faudra continuer d’appuyer le Gouvernement soudanais.  Stabiliser les progrès nécessitera des activités immédiates et à long terme, incluant le processus de paix, les réformes économiques, la réinsertion des déplacés et une justice de transition, a-t-elle recommandé.  Sachant que ce ne sera pas facile, et qu’il faudra « gérer les attentes dans l’intervalle », la Vice-Secrétaire générale a appelé la communauté internationale à identifier les mesures à prendre dans les trois prochains mois pour consolider la paix, en particulier dans les domaines du développement et des droits de l’homme, et à envisager « un Plan Marshall pour le Soudan ».

Chaque pays va dans le bon sens et il faut saisir cette occasion pour investir dans la paix, a insisté Mme Mohammed.  Avec la solidarité et le soutien de la communauté internationale, ces pays peuvent relever leurs défis et devenir une région de croissance et de stabilité au sein du continent africain. 

Revenant toutefois sur le rôle des femmes au sein des opérations de paix, qui n’emploient que 4% d’entre elles, elle a souligné les difficultés qu’elles rencontrent avant leur déploiement, puis sur le terrain.  Les femmes se heurtent au harcèlement, « on leur demande de servir le thé ou le café plutôt que de patrouiller dans les communautés » et les outils qui leurs sont fournis ne sont pas adéquats, a-t-elle déploré.  En Somalie, par exemple, les serviettes hygiéniques ne font pas partie des kits de déploiement.

Mme FATIMA KYARI MOHAMMED, Observatrice permanente de l’Union africaine auprès des Nations Unies, est revenue sur la mission conjointe menée dans la Corne de l’Afrique par les deux organisations.  Le but de cette mission était d’appuyer les initiatives et la participation des femmes aux processus de paix.  Il est apparu lors des visites que le développement et la paix ne pourraient être atteints sans une pleine participation des femmes et des filles à ces processus, a-t-elle dit.

Présentant rapidement le déroulé des visites, Mme Mohammed a indiqué avoir rencontré des groupes de femmes dans chaque pays.  En Éthiopie, pays dont le Président est une femme, Mme Sahle-Work Zewde, la mission a pu notamment rencontrer les femmes leaders de l’initiative « Mères pour la paix », qui a pour mission de sensibiliser les communautés aux risques des divisions ethniques. 

À Djibouti, la délégation s’est entretenue avec des femmes des médias et médecins qui « changent la vie sur le terrain », a rapporté l’Observatrice.  En Somalie, la mission conjointe a pu discuter de la participation des femmes aux élections.  Elle a également été à la rencontre de femmes soldats de la paix et a pu mesurer les initiatives communautaires menées par la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) pour la participation des femmes aux élections. 

En Érythrée, la délégation a constaté que l’autonomisation des femmes est fortement encouragée par une interaction entre des groupes de jeunes femmes ingénieures afin de fournir les communautés en eau.  La mission conjointe a également rencontré l’Union nationale des femmes de l’Érythrée, un groupe qui a participé à la lutte pour l’indépendance. 

Poursuivant son intervention, Mme Mohammed a estimé qu’en dépit des progrès constatés sur le terrain, il y a encore des choses à faire, notamment pour appuyer et garantir la participation des femmes à tous les processus de prise de décisions et aux initiatives de paix et de développement.  Selon elle, « il faut encourager la Corne de l’Afrique à miser sur les femmes et les jeunes ». 

Or, un tel appui nécessite l’assistance des donateurs internationaux.  Pour l’Observatrice, il faut profiter de « la nouvelle ère de paix » qui s’ouvre dans la Corne de l’Afrique.  Et l’ONU et l’Union africaine doivent être en première ligne de cet appui, a-t-elle conclu. 

Pour Mme KELLY CRAFT (États-Unis), il est temps de rompre le cycle de la violence dans la Corne de l’Afrique et le processus en cours au Soudan est selon elle l’occasion à saisir.  Si une participation accrue des femmes est nécessaire en soi, l’engagement du Conseil consiste aussi à permettre aux missions de paix d’être plus efficaces avec l’inclusion des femmes: il faut ainsi veiller à avoir davantage de femmes dans les contingents militaires, policiers et civils.  Elle a donc appelé les pays fournisseurs de contingents à accroître le nombre des femmes.  Tout en appuyant les processus en cours dans chacun des pays de la région, Mme Craft les a appelés à améliorer leurs relations entre États, une donnée qu’elle considère comme essentielle.  Elle a invité le représentant du Secrétaire général dans la région à engager des initiatives en faveur du développement.  Au Soudan du Sud, les dirigeants doivent faire des compromis pour former un gouvernement d’union nationale, a exhorté la représentante, sinon ce sera la catastrophe pour la population , a-t-elle mis en garde: les yeux de la communauté internationale sont rivés sur la date-butoir du 12 novembre.  Le Conseil peut garantir l’inclusion des femmes dans les processus politiques et s’il veut mettre en œuvre son principal mandat sur la paix et la sécurité, il doit investir dans des solutions qui donnent davantage de voix aux femmes, a-t-elle estimé.

M. NICOLAS DE RIVIÈRE (France) a qualifié la situation au Soudan d’encourageante.  Les femmes soudanaises, a-t-il précisé, ont joué un rôle déterminant dans la révolution et « mérité leur place dans la transition ».  Il a appelé au respect des quotas fixés pour les femmes dans la Déclaration constitutionnelle.  Malgré cette dynamique positive, le représentant a noté que des défis importants demeuraient au Soudan du Sud, où il a espéré que le quota de 35% de femmes dans les organes de transition, conformément à l’Accord de paix revitalisé, soit respecté.  

M. de Rivière a en outre appelé à un rapprochement entre Djibouti et Érythrée pour que les problématiques persistantes entre les deux pays soient résolues, et considéré que le Conseil de sécurité devait continuer à suivre la question des relations entre ces deux pays. 

M. PAUL DUCLOS (Pérou) a réaffirmé l’engagement de son pays en faveur d’une participation accrue des femmes non seulement aux processus de paix, mais également à la vie économique et politique des pays de la Corne de l’Afrique.  En Somalie, les femmes sont appelées à exercer un rôle de leadership à la fois dans le développement du pays et dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, a notamment estimé le représentant.  C’est précisément dans cette optique, a-t-il ajouté, que le Conseil de sécurité a organisé, la semaine passée, une réunion de son Comité contre le terrorisme, afin qu’il adopte davantage une perspective de genre dans ses travaux.  S’agissant toujours de la Somalie, le représentant a appelé les femmes du pays à participer de manière effective aux élections fédérales de 2020 et 2021, ainsi qu’à la promulgation de la nouvelle Constitution.  Il a demandé des informations sur la place occupée par les associations de femmes dans ces différents processus.   Au Soudan, le représentant a rappelé que les femmes avaient joué un rôle clef dans les mouvements sociaux ayant conduit au renversement de l’ex-Président du pays, M. Omar Al-Bashir.  Il s’est toutefois dit préoccupé face aux rapports faisant état d’une exclusion des femmes soudanaises du processus politique dans les mois qui ont suivi le renversement de M. Al-Bashir.  Le représentant a jugé que la participation des femmes aux décisions politiques et à la vie économique du pays était fondamentale.  Il a par conséquent appelé à nommer davantage de femmes à la tête du pays, mais également au sein des Gouvernements de Djibouti, de l’Érythrée et du reste de la sous-région. 

Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique)s’est réjouie de l’initiative des missions communes avec l’Union africaine, soulignant qu’elle appréciait particulièrement l’accent mis par celles-ci sur les problématiques de paix et sécurité, de développement, et de questions humanitaires.  Elle s’est déclarée favorable à une coopération accrue entre les Nations Unies et l’Union africaine, et à une approche intégrée des pays en crise et en transition.

La représentante l’a rappelé, la participation significative des femmes aux processus politiques est essentielle pour consolider ces résultats.  Donnant l’exemple de nominations de femmes ministres ou encore de l’adoption de législation relative à l’égalité entre les sexes, elle a salué l’engagement de la Présidente éthiopienne, seule femme chef d’État en exercice en Afrique, pour la cause des femmes dans son pays et sur le continent africain.  Appelant à poursuivre dans la même voie et à mettre en œuvre les décisions, Mme Van Vlierberge a souligné que les échéances électorales sont des opportunités à saisir pour assurer une participation significative des femmes en tant que candidates.  La Belgique sera attentive à cet aspect, en particulier pour les premières élections au suffrage universel depuis des décennies qui seront organisées l’an prochain en Somalie.

Concluant, Mme Van Vlierberge a appelé l’ONU et les pays contributeurs de troupes à montrer l’exemple et à œuvrer à une réelle parité au sein des opérations de paix et représentations.  Elle a demandé à la Secrétaire générale adjointe le suivi qui serait donné à cette mission commune et le soutien que le Conseil de sécurité pourrait apporter afin d’encourager les partenaires de la région à maintenir leurs engagements.

M. MARIUSZ LEWICKI (Pologne)a estimé que, avec l’accord de paix signé l’année dernière entre l’Éthiopie et l’Érythrée, la transition démocratique au Soudan, et la préparation d’élections fédérales en Somalie, attendues fin 2020-début 2021, la Corne de l’Afrique avait une opportunité unique de dépasser son histoire de conflits et de pauvreté et de travailler de conserve à un futur de paix et de progrès.  Le délégué a souligné que la participation des femmes était « indispensable » pour garantir le succès de ces processus et pour qu’une paix durable puisse s’établir dans la région.  Il a rappelé que la question de leur participation à la vie publique n’était pas seulement quantitative mais aussi qualitative. 

À cet égard, le représentant a salué la récente accession de femmes à des postes de décision au Soudan.  Concernant la Somalie, M. Lewicki a dit espérer que les autorités mettraient en place un quota de 30% de postes réservés aux femmes lors des prochaines élections, les premières élections au suffrage universel depuis 50 ans.  Il a aussi espéré que les évolutions actuelles permettraient au Soudan et à la Somalie de ratifier la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. 

M. JOSÉ SINGER WEISINGER (République dominicaine) a dit constater des progrès positifs en Éthiopie, avec une parité de genre au Gouvernement et une participation des femmes au Parlement fédéral qui a atteint les 40%.  Il faut encourager ce rôle de la femme ainsi que son leadership, y compris pour les jeunes femmes dans les processus de paix, a-t-il dit.  Pour cette raison, la délégation est préoccupée par le fait que le projet constitutionnel de la Somalie ne garantisse pas une pleine participation des femmes.  Pour autant, la délégation reconnaît comme un signe positif le fait que le Gouvernement somalien se soit engagé à assurer la participation des femmes aux prochaines élections. 

Concernant le Soudan, il a souhaité être informé des mesures prises par le Gouvernement pour mettre en application le Plan d’action national sur l’agenda femmes, paix et sécurité.  Enfin, il a dit espérer que les Nations Unies aideront l’Union africaine à mieux mettre en œuvre cet agenda dans la région, en soulignant la nécessité d’inclure les jeunes femmes dans ces processus. 

Pour M. WU HAITAO (Chine), compte tenu de la situation géographique de première importance de la Corne de l’Afrique il est essentiel de maintenir la stabilité dans la région.  Notant que des progrès ont été faits, il a cependant souligné que des défis persistent, en particulier quant au rôle des femmes dans la paix, la sécurité et le développement: ce rôle doit être garanti avec l’aide de la communauté internationale, a-t-il plaidé.  Il a aussi jugé nécessaire de régler les divergences par le dialogue et la concertation, tout en respectant la souveraineté des États.  Il faut, a-t-il précisé, aider les pays à renforcer leur confiance et à régler leurs différends par des moyens politiques.

La Chine soutient les pays africains dans leur volonté de trouver des solutions africaines aux conflits locaux, a affirmé le représentant qui a appelé la communauté internationale à pleinement respecter les pays africains et à leur faire confiance.  Le représentant a aussi demandé de leur fournir une aide constructive pour les aider à satisfaire les besoins de leur population.  Il faudrait, selon la Chine, accorder une grande importance au développement socioéconomique qui doit être une priorité pour traiter des racines profondes des conflits et traiter des principaux problèmes de la région.  Les Nations Unies doivent, pour ce faire, avoir pleinement recours au PNUD et aux équipes de pays.

M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a rappelé le « lien intime » qui existe entre la Corne de l’Afrique et les pays de la Ligue des États arabes, tant sur le plan géographique que sur les plans économique, sécuritaire et religieux.  Les pays arabes espèrent un accroissement de la coopération existante avec l’Afrique et souhaitent en discuter davantage lors du quatrième sommet arabo-africain qui doit se tenir fin novembre à Riyad, a-t-il dit.  Ces pays espèrent notamment pouvoir discuter et renforcer la coopération dans le domaine sécuritaire, compte tenu de l’importance de la mer Rouge et du golfe d’Aden dans le transport maritime.  Le représentant a ensuite salué les progrès intervenus dans ces pays en matière de promotion et de représentativité des femmes, notamment au Soudan, où, a-t-il dit, la femme sera mieux représentée à l’avenir.  L’ONU et l’Union africaine doivent continuer d’appuyer ces efforts, a demandé le représentant. 

« Le rapprochement entre l’Éthiopie et l’Érythrée, l’an dernier, a permis d’initier des contacts entre l’Érythrée, Djibouti et la Somalie, mettant la région dans une situation propice à l’établissement de relations d’amitié et de coopération », s’est félicité M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie).  Selon lui, ces rapprochements démontrent la valeur de « solutions africaines aux problèmes africains ».  Le représentant a estimé que la coopération économique est la clef d’une paix durable, insistant sur la nécessité de développer le commerce entre les pays de la Corne de l’Afrique en s’appuyant sur le lancement de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf).  Il a enfin souligné la nécessité que les femmes participent aux négociations afin d’accroître leurs chances de succès, avant de saluer la composition pour moitié féminine du Gouvernement éthiopien. 

Pour M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire), la visite conjointe de solidarité organisée par l’ONU et l’Union africaine a été, au-delà de son caractère politique, « le signe tangible de la nécessaire coordination des efforts des deux institutions pour adresser les défis multidimensionnels de la région ».  En effet, en dépit des progrès enregistrés, l’ensemble des pays de la Corne de l’Afrique reste confronté à des défis majeurs liés à la paix, la sécurité et au développement.  C’est pourquoi M. Adom a souhaité l’éclairage des intervenantes sur les enseignements de cette visite et les domaines où les efforts doivent être renforcés, notamment en vue d’une forte implication des femmes dans les activités en faveur de la restauration d’une paix pérenne.  Enfin, il a voulu savoir quelles étaient les principales attentes des femmes.

M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a salué l’importance des missions conjointes ONU-Union africaine, devenues une tradition qui prouve la proximité et la complémentarité des deux organisations.  La paix et la sécurité n’aboutiront pas tant que les femmes seront exclues, a-t-il insisté: au Soudan du Sud, si les femmes pouvaient participer davantage, la situation serait toute autre, a-t-il jugé.  L’Éthiopie, a-t-il relevé à l’instar de la Belgique, est le seul pays africain à avoir élu une femme Présidente et, pour lui, il y a des constitutions qui doivent être amendées, car elles ne permettent pas aux femmes de devenir chefs d’État ou de gouvernement.  Au Soudan, il a salué la déclaration d’Alaa Salah devant le Conseil la semaine dernière, qui déplorait que les femmes ne soient pas associées au processus politique après avoir été en première ligne des manifestations qui ont renversé la dictature.  En Érythrée, certes il y a des changements, a-t-il convenu, mais les frontières ne sont toujours pas ouvertes et de nombreux citoyens sont encore soumis au service national.  À Djibouti, a ajouté la délégation, il faut faire davantage pour contrer la violence faite aux femmes et lutter contre l’impunité.  Et en Somalie, les femmes devront jouer leur rôle dans la prévention des conflits, leur forte participation aux élections de 2020-21 étant essentielle pour mesurer les progrès dans la mise en œuvre du programme de paix et sécurité, a-t-elle conclu.

M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a assuré que son pays continuerait d’appuyer les initiatives onusiennes visant à lutter contre les violences sexuelles et à promouvoir la participation des femmes dans les processus de prise de décisions.  Il estime que les visites conjointes de l’ONU et l’UA sont à encourager, tant cette coopération est fructueuse.  Sa délégation estime cependant qu’elle devrait être davantage transversale.  S’agissant de la Corne de l’Afrique, le représentant a salué les visites conjointes ONU-UA, qui « deviennent la norme », avant de saluer le rôle de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).  Il a ajouté que la participation des femmes et des jeunes devait être soutenue, compte tenu de leur rôle dans la construction de la paix, a dit le représentant.

M. DMITRY A. POLYANSKIY (Fédération de Russie) a souligné l’utilité des visites conjointes Union africaine/Nations Unies alors que la Corne de l’Afrique traverse une période cruciale de son histoire permettant de régler les différends entre les pays, comme l’a attesté la remise du prix Nobel de la paix au Premier Ministre éthiopien.  Le représentant a appelé l’Érythrée et Djibouti à régler leur différend frontalier par le dialogue et la médiation.  Il a toutefois estimé que ce dossier ne représente plus une menace à la paix et la sécurité régionales: il ne devrait par conséquent plus figurer au programme du Conseil selon la Russie.

En Somalie, il a jugé que les Chabab constituent toujours la principale menace et que la mission de l’Union africaine est le meilleur moyen de contrer cette menace.  Il a appelé à aider les réfugiés somaliens dans les pays limitrophes grâce à des contributions ciblées.  Au Soudan, la normalisation est en cours, a noté le représentant: à présent la communauté internationale doit aider le pays à se redresser sur le plan économique et il est temps de faire cesser les sanctions contre ce pays, a-t-il plaidé.  Au Soudan du Sud, il a souhaité qu’un accord intervienne dans les délais convenus pour la formation d’un gouvernement d’union nationale d’ici au 12 novembre.  Enfin, le développement économique étant un relai essentiel dans les relations entre la Russie et les pays du continent, il a indiqué que son pays avait augmenté son soutien via des contributions ciblées aux programmes internationaux.

M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a salué la visite conjointe de l’Union africaine et de l’ONU dans la Corne de l’Afrique, de la même façon qu’il a salué le rôle de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) dans cette région. Selon le représentant, le « vent nouveau » qui souffle dans la Corne de l’Afrique donne l’espoir de voir les armes se taire d’ici à 2020.  Il s’est également félicité des progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’Accord de revitalisation au Soudan du Sud.  Sa délégation insiste sur la date butoir du 12 novembre pour la formation d’un gouvernement d’unité nationale.  « Toutes les parties doivent adhérer à cette date. »  

Enfin, l’Afrique du Sud est d’avis que, pour être durables, les processus politiques dans la Corne de l’Afrique requièrent le dialogue et la coopération entre les pays de la région. Les étapes franchies à ce jour sont des étapes majeures pour promouvoir l’intégration régionale et continentale dans la droite ligne de l’Agenda 2063, a conclu le représentant.

Mme KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a déclaré que son pays soutenait l’éducation des femmes et des filles, ainsi que la lutte contre les violences sexuelles et pour le droit à la santé sexuelle et reproductive dans un certain nombre de pays. Le Royaume-Uni fournit une assistance à la Somalie en matière de violence sexuelle et de renforcement des capacités pour le maintien de la paix.  La délégation appelle les autorités somaliennes à respecter leur engagement à accorder 30% des sièges aux femmes aux prochaines élections.

Le Royaume-Uni appuie également des programmes au Soudan.  Mme Pierce a dit attendre une pleine et meilleure participation des femmes aux affaires publiques, comme s’y est engagé le Premier Ministre soudanais devant la tribune de l’Assemblée générale.  Par ailleurs, si elle s’est réjouie que 50% des postes soient réservés aux femmes en Éthiopie, elle a espéré que ce pays fera fond sur ces acquis pour garantir la représentation des femmes dans les élections.

Mme MOHAMMED, Vice-Secrétaire générale de l’ONU, a repris la parole pour répondre aux questions posées par les membres du Conseil.  Selon elle, il ne faut pas forcément attendre les visites sur le terrain pour prendre ces situations en compte.  Elle a préconisé d’aider davantage les soldates de la paix et, si elles n’ont pas été assez formées, de renforcer leurs compétences.  La Somalie, a-t-elle noté, a ouvert un centre de formation dédié à ce sujet.  Elle a appelé les États Membres à inscrire des formations sexospécifiques dans leurs contributions. 

De même, il existe de nombreuses médiatrices formées au maintien de la paix mais qui n’ont pu être déployées faute de moyens.  Que peuvent apporter les femmes à ces processus?  Tous doivent se poser la question et insister sur le fait que les femmes doivent être présentes autour de la table des négociations, dès le départ et non ultérieurement.  C’est ce que souhaiterait le Premier Ministre soudanais, a indiqué Mme Mohammed, mais les autres acteurs doivent aussi prendre ce souhait en compte.  De plus, « l’éducation des filles est indispensable pour faire taire les armes ».  Il faut donc commencer par garantir leur droit à l’éducation pour les associer aux processus de prise de décisions.

Mme KYARI MOHAMMED a fait valoir que l’une des manières d’aider le Soudan est de lever les sanctions.  En ce qui concerne le Soudan du Sud, il est important que l’Accord de revitalisation soit mis en œuvre, a-t-elle insisté, ajoutant que ce n’est que comme cela que les femmes pourront pleinement participer.  Pour ce qui est de la Somalie, en particulier s’il faut encourager les femmes à rejoindre les soldats de la paix, il est crucial de tenir compte de leurs besoins élémentaires, comme celui de disposer de toilettes pour femmes.  Ce sont de telles mesures qui pourraient les inciter à rester sur le terrain, a dit Mme Mohammed.

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