Conseil de sécurité: le Coordonnateur spécial du processus de paix met en garde contre le « cocktail explosif » créé par les dernières tensions au Moyen-Orient
Dans un contexte marqué par la récente multiplication des incidents violents entre Israéliens et Palestiniens, en Cisjordanie mais aussi à Gaza, le Coordonnateur des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient s’est livré, aujourd’hui, devant le Conseil de sécurité, à un plaidoyer en faveur de « mesures concrètes » susceptibles d’inverser cette tendance négative, faute de quoi, a-t-il averti, un « cocktail explosif » risque d’embraser la région.
Intervenant par visioconférence depuis Jérusalem, M. Nickolay Mladenov n’a pas caché que le processus de paix se trouve aujourd’hui dans une « impasse complète », sans perspective de relance. Il a rappelé à cet égard que le Secrétaire général et lui-même avaient prévenu à multiples reprises qu’en l’absence d’un horizon politique pour résoudre le conflit israélo-palestinien sur la base de la solution des deux États, « les initiatives unilatérales, notamment les constructions et l’expansion des colonies de peuplement, les attaques terroristes et la multitude d’autres facteurs, créent un cocktail explosif ».
Ce cocktail, a estimé le Coordonnateur spécial, ne peut être contrecarré que par un leadership soucieux de revenir à la table des négociations et capable de se lever contre les extrémistes et les radicaux pour faire valoir ce que la communauté internationale, le Conseil de sécurité et la région ont dit si souvent, à savoir qu’« une paix durable ne peut se fonder que sur l’idée qu’Israéliens et Palestiniens vivent côte à côte dans la paix, la sécurité et la reconnaissance mutuelle, parce que les deux peuples ont un droit légitime et historique à un État ».
Condamnant « sans équivoque » les attaques « lâches et dangereuses » perpétrées contre des civils palestiniens et israéliens ainsi que l’expansion des colonies de peuplement, laquelle n’a, selon lui, « aucun effet juridique », le haut fonctionnaire a aussi fait état de signes d’espoir. Il a notamment relevé que, le 22 août, après des mois de blocage et de consultations, Israël et l’Autorité palestinienne ont fini par se mettre d’accord sur le transfert des recettes fiscales de cette dernière. L’Autorité recevra à peu près 568 millions de dollars des taxes sur le carburant perçues par Israël, a-t-il précisé, appelant les deux parties à surmonter les désaccords persistants et à respecter le Protocole de Paris sur les relations économiques.
Au rang des évolutions positives, la Guinée équatoriale s’est également félicitée de l’extension de la zone de pêche de Gaza, de la restitution de 44 bateaux de pêche préalablement confisqués par Israël et l’assouplissement des conditions de voyage pour les hommes d’affaires basés dans ce territoire.
Reste qu’en promouvant l’annexion de fait de la Cisjordanie, l’expansion des colonies poursuivie par Israël compromet les chances d’un État palestinien fondé sur les résolutions des Nations Unies, a insisté M. Mladenov, rejoint dans son analyse par une majorité de délégations. Parmi elles, la France a fermement condamné la décision israélienne de construire 2 500 logements en Cisjordanie, en plus des 4 500 nouvelles unités approuvées depuis début 2019. Une politique d’autant plus inquiétante qu’elle s’accompagne de déclarations sur « l’annexion de tout ou partie des territoires occupés », a-t-elle relevé, non sans rappeler que, comme le stipule la résolution 2334 du Conseil, la colonisation est illégale en droit international et doit cesser.
« Nous ne reconnaîtrons aucune annexion unilatérale des territoires occupés et rappelons qu’Israël est tenu d’assurer la protection des droits de la population », a renchéri la Belgique, tandis que l’Indonésie, à l’instar de la Chine, appelait à s’attaquer aux causes profondes du conflit, « à savoir l’occupation illégale du territoire palestinien par Israël », jugeant déplorable que le Conseil ait été incapable de répondre à de tels agissements, « au détriment de la sécurité internationale ».
La Côte d’Ivoire a pour sa part exhorté la communauté internationale à intensifier ses efforts de médiation afin de favoriser des pourparlers de paix sans préalable et sous l’égide des Nations Unies. Un appel entendu par les États-Unis, qui ont rappelé leur engagement à appuyer des négociations directes dans le cadre d’une nouvelle initiative de paix. Le Royaume-Uni les a vivement encouragés à faire cette « proposition » en vue d’un accord tenant compte des aspirations légitimes des deux parties.
Reprochant de son côté aux États-Unis d’agir de manière unilatérale, au risque de remettre en cause l’objectif d’une solution des deux États, la Fédération de Russie a jugé urgent d’envoyer une mission du Conseil de sécurité en Palestine, et ce, afin de rétablir la confiance et de relancer les pourparlers. « Cela montrerait que la communauté internationale ne se lave pas les mains du plus vieux conflit au Moyen-Orient », a abondé l’Afrique du Sud, selon laquelle le dialogue est « la seule façon de régler de manière efficace la question de l’autodétermination du peuple palestinien ».
LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE
Déclarations
Par visioconférence depuis Jérusalem, M. NICKOLAY MLADENOV, Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient , a regretté d’avoir à mettre l’accent sur le spectre grandissant de la violence en Cisjordanie et à Gaza et sur la menace d’une escalade régionale, et ce, sur fond d’une impasse politique complète du processus de paix et de l’absence de toute perspective de le relancer. À plusieurs reprises, a-t-il rappelé, le Secrétaire général et moi-même avons prévenu que l’absence d’un horizon politique pour résoudre le conflit israélo-palestinien sur la base de la solution des deux États, les initiatives unilatérales, notamment les constructions et l’expansion des colonies de peuplement, les attaques terroristes et la multitude d’autres facteurs créent « un cocktail explosif ». Un cocktail, a averti le Coordonnateur spécial, qui ne peut être contrecarré que par un leadership soucieux et capable de revenir à la table de négociations en vue d’une paix juste et durable. Un leadership, a précisé M. Mladenov, qui peut se lever contre les extrémistes et les radicaux et faire valoir ce que la communauté internationale, le Conseil de sécurité et la région ont dit si souvent à savoir qu’une paix durable ne peut se fonder que sur l’idée qu’Israéliens et Palestiniens vivent côte-à-côte dans la paix, la sécurité et la reconnaissance mutuelle, parce que les deux peuples ont un droit « légitime et historique » à un État. Ceci peut être accompli sur la base des résolutions des Nations Unies et des accords réciproques. Si nous nous écartons de ce cadre, nous assisterons à une « inévitable » radicalisation, a encore averti M. Mladenov, estimant qu’on ne peut renoncer à l’objectif d’un règlement pacifique du conflit. « Imaginer l’alternative serait trop horrible. »
Au cours de ce dernier mois écoulé, a-t-il indiqué, nous avons été les témoins d’une multiplication des incidents violents, notamment des violences impliquant des colons en Cisjordanie et des tensions à l’intérieur et autour de Gaza. Le Coordonnateur spécial a dit condamner « sans équivoque » toutes les attaques contre les civils palestiniens et israéliennes. Lâches et dangereuses, ces attaques ne servent que ceux qui recherchent l’escalade. La violence et le terrorisme doivent être condamnés par tous et leur glorification par le Hamas, le Jihad islamique et les autres factions palestiniennes est tout simplement « déplorable », a tranché M. Mladenov. Il a aussi souligné que l’expansion des colonies de peuplement n’as aucun effet juridique et constitue une violation flagrante du droit international. En promouvant l’annexion de fait de la Cisjordanie, cette expansion compromet les chances d’un État palestinien fondé sur les résolutions des Nations Unies, partie intégrante de la solution des deux États. Le Coordonnateur spécial a aussi réitéré son appel au maintien du statu quo dans les lieux saints, conformément au rôle spécial et historique du Roi de Jordanie, gardien des lieux saints musulmans et chrétiens à Jérusalem.
À Jérusalem-Est, a-t-il rappelé, après la démolition des habitations palestiniennes dans les zones A, B et C, le Président Mahmoud Abbas avait décidé le 25 juillet de suspendre la mise en œuvre des accords signés avec Israël. Depuis six mois, le Gouvernement palestinien refuse donc le transfert par Israël des revenus fiscaux. Mais le 22 août, après des mois de consultations, Israël et l’Autorité palestinienne se sont mis d’accord: l’Autorité recevra à peu près 568 millions de dollars des taxes sur le carburant perçus par Israël. Mais des désaccords persistent, a dit le Coordonnateur qui a appelé les deux parties à se montrer constructifs et à respecter le Protocole de Paris sur les relations économiques.
Des mesures concrètes, a-t-il conclu, peuvent et doivent être prises pour inverser la tendance négative du conflit israélo-palestinien. Les Nations Unies, a-t-il assuré, sont prêtes à aider Palestiniens et Israéliens à régler le conflit sur la base du droit international, des résolutions pertinentes et des accords précédents et à réaliser la vision des deux États: Israël et la Palestine, vivant côte à côte dans la paix et la sécurité.
M. KRZYSZTOF SCCZERKI (Pologne) a regretté que les perspectives de paix semblent s’éloigner encore et que s’installe une méfiance mutuelle entre Israéliens et Palestiniens. « Il y a encore quelques jours des roquettes ont été tirées à partir de Gaza vers le sud d’Israël et nous avons été informés de tentatives d’infiltration », a ajouté le représentant. Il s’est également dit préoccupé par les actions unilatérales d’Israël en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Ces initiatives sont un obstacle à la paix car elles sapent tout espoir d’un État palestinien. Le représentant a félicité l’Égypte pour son rôle de facilitation et jugé urgent de rétablir un climat politique sain afin d’éviter le point de non-retour. Nous continuerons de défendre la solution des deux États sur la base des paramètres agrées au niveau international, a insisté le représentant. Cela exige, a-t-il prévenu, une vision à long terme de la part des deux parties.
M. JONATHAN R. COHEN (États-Unis) a prévenu que des attaques comme celles dont a été victime Rina Shnerb en Cisjordanie ne font que compromettre toutes les tentatives de trouver une solution au conflit et de restaurer la confiance entre les parties. Les auteurs de ces meurtres brutaux doivent être traduits en justice. Le représentant a dénoncé le fait que le Hamas continue de glorifier ces attaques, ce qui est « profondément troublant ». Pourquoi êtes-vous si nombreux ici aux Nations Unies à refuser de condamner le Hamas dont les leaders « bénissent » les attaques et « baisent les mains » de leurs auteurs? s’est demandé le représentant. Il s’est attardé sur les roquettes tirées à partir de Gaza vers Israël par le Hamas et les autres factions terroristes, sans compter les tentatives d’infiltration. C’est une escalade « alarmante », a-t-il prévenu. Il est plus que temps que le Hamas place les intérêts du peuple de Gaza avant toute chose et rejette la violence au lieu de rechercher des concessions par des attaques et des menaces, s’est impatienté le représentant
Il a affirmé qu’il vient de s’entretenir avec la famille d’Hadar Goldin dont le corps est retenu par le Hamas comme monnaie d’échange. « Hadar a été tué pendant le cessez-le-feu à la fin du conflit à Gaza en 2014. » « Cela fait presque cinq ans que sa famille se bat pour la restitution de son corps », a rappelé le représentant. Nous ne pouvons pas non plus oublier Avaraham Mengistu et Hisham Al-Sayed, toujours détenus par le Hamas, une organisation terroriste brutale dont les actes doivent être condamnés. Cela fait des années, a conclu le représentant, que cet organe se réunit pour discuter de cette question difficile sans faire de progrès réels vers un avenir durable, sûr et prospère pour les Israéliens et les Palestiniens. Les États-Unis demeurent engagés en faveur d’une paix globale grâce à des négociations directes. Nous vous encourageons à appréhender nos efforts avec un esprit ouvert, a-t-il plaidé.
M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a dit attendre avec impatience le prochain rapport du Coordonnateur spécial sur la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016). Il a rappelé qu’il y a un an, le Président Mahmoud Abbas avait voulu savoir comment éviter des actions que nul ne veut voir se concrétiser. Cet appel a été lancé il y a un an mais rien n’a changé depuis lors, a constaté le représentant. Israël continue de mener sa politique de colonisation et, ce faisant, sape les espoirs de parvenir à la solution des deux États. De plus, les autorités israéliennes ont annoncé l’établissement prochain de 2 300 unités de construction en Cisjordanie, tout en expulsant des Palestiniens. Ces actes s’ajoutent aux attaques perpétrées contre les sanctuaires de l’Islam, au gel des recettes fiscales palestiniennes et au refus de la présence internationale à Hébron. Israël continue ainsi à établir sa souveraineté sur les territoires occupés, a dénoncé le représentant. Il a en outre observé que les violations quotidiennes contre le peuple palestinien s’aggravent. La reconnaissance par certains de Jérusalem comme capitale d’Israël a contraint les autorités palestiniennes à se délier des accords passés avec la Puissance occupante. Le délégué a appelé cette dernière à cesser toutes ses attaques contre les Palestiniens et à respecter le droit international humanitaire et les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Il a enfin exhorté la communauté internationale à maintenir son soutien à l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient (UNRWA) pour l’aider à poursuivre son action.
Mme EVA NIAMKE (Côte d’Ivoire) s’est dit préoccupée par l’impasse du processus de paix israélo-palestinien. L’absence d’un cadre viable de concertation entre les parties israélienne et palestinienne concourt à creuser davantage le fossé de méfiance qui alimente les épisodes de violence. Face à cette impasse, la représentante a invité les parties concernées à prêter une oreille attentive aux appels au dialogue lancés par la communauté internationale. Les deux parties doivent se garder de tout acte de nature à susciter une résurgence d’affrontements meurtriers qui ruineraient les espoirs de paix et plongeraient la région dans un engrenage de conflits aux conséquences désastreuses. La Côte d’Ivoire, a ajouté sa représentante, exhorte la communauté internationale à intensifier ses efforts de médiation afin de ramener les deux parties à la table des négociations, pour de nouveaux pourparlers de paix sans préalables et sous l’égide des Nations Unies. Elle a aussi parlé de la situation humanitaire à Gaza qui ne cesse de se dégrader et de l’opposition persistante entre le Fatah et le Hamas qui complique davantage la formulation de réponses adaptées aux nombreuses difficultés que vivent les populations palestiniennes. Elle a réitéré son appel à la convergence de vues du Conseil de sécurité et l’a encouragé à œuvrer à la mobilisation de l’assistance nécessaire à la couverture des besoins essentiels des populations affectées.
M. JUN ZHANG (Chine) a déploré que le processus de paix soit dans l’impasse. Préserver les droits du peuple palestinien relève de la responsabilité commune de l’ensemble de la communauté internationale, a-t-il souligné en prônant le multilatéralisme et le dialogue. La menace de recourir à la force ne peut résoudre le conflit, a-t-il prévenu, avant d’inviter les parties à cesser toute violence et toute rhétorique belliqueuse. Il faut, a-t-il insisté, promouvoir un règlement juste et durable: la solution des deux États, Israël et Palestine, vivant côte à côte, dans la paix et la sécurité, dans des frontières sûres et reconnues, avec Jérusalem comme capitale, est la seule manière de mettre fin à ce conflit. Cela passe, a précisé le représentant, par le rétablissement d’un État palestinien souverain dans ses frontières de 1967. Il a appelé à la pleine mise en œuvre de la résolution 2334 du Conseil de sécurité et exhorté les Israéliens à cesser toutes leurs activités de colonisation. Il a attiré l’attention sur la « Proposition en 4 points » de son Président et annoncé que son pays vient de signer le 30 juillet dernier, avec la Palestine un accord sur l’accès de tous les enfants palestiniens à l’éducation.
Mme ANNE GUEGUEN (France) a appelé les parties à la retenue afin d’éviter toute nouvelle victime. Les tensions actuelles sont le reflet de la crise plus vaste que traverse Gaza. Il n’y aura de stabilité durable à gaza que dans le cadre d’un accord plus large. La poursuite de la politique de colonisation à Jérusalem et en Cisjordanie nous éloigne toujours un peu plus de la solution des deux États, a insisté la représentante de la France avant de condamner les dernières décisions des autorités israéliennes de permettre la construction de 2 500 logements en Cisjordanie qui viennent s’ajouter aux 4 500 nouvelles unités approuvées depuis le début 2019. Cette politique est d’autant plus inquiétante qu’elle s’accompagne de déclarations préoccupantes sur l’annexion de tout ou partie des territoires occupés. La représentante s’est inquiétée de ce que les démolitions en Cisjordanie et à Jérusalem-Est se poursuivent en parallèle à un rythme soutenu. Ces démolitions en zones A et B sont inédites, illégales en droit international et marquent une nouvelle étape dans la remise en cause de l’acquis d’Oslo. Elle a rappelé, à l’instar de la résolution 2334 du Conseil de sécurité, que la colonisation est illégale en droit international et qu’elle doit cesser.
La représentante s’est aussi inquiétée des affrontements qui ont eu lieu sur l’esplanade des mosquées le 11 août dans le contexte des fêtes musulmanes et juives. Elle a appelé au maintien du statu quo de 1967 sur les lieux saints de Jérusalem. En lien avec ses partenaires européens, la France, a-t-elle assuré, est prête à soutenir tous les efforts, y compris économiques, du moment qu’ils s’inscrivent dans cette perspective définie ensemble, à savoir l’établissement des deux États, Israël et Palestine, vivant côte à côte, dans la paix et la sécurité et dans des frontières sûres et reconnues, avec Jérusalem comme capitale.
M. MARC PECSTENN DE BUYTSWERVE (Belgique) a condamné la politique de colonisation ainsi que toute initiative visant à sa consolidation. Nous ne reconnaîtrons aucune annexion unilatérale des territoires occupés et rappelons qu’Israël est tenu d’assurer la protection des droits de la population, a dit le représentant. En vue du briefing de septembre 2019 sur la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016), a-t-il poursuivi, nous réitérons notre requête d’avoir un rapport écrit. Le représentant a ajouté que depuis 12 ans, la vie à Gaza est dominée par l’occupation. Les femmes et les enfants sont particulièrement affectés. Saluant les efforts des acteurs humanitaires, le délégué a aussi souligné l’importance du mandat de l’UNRWA. Au-delà du soutien humanitaire, il n’y aura de stabilité durable à Gaza que dans le cadre d’un règlement négocié qui passe par la levée du blocus et l’ouverture des points de passage, tout en tenant compte des préoccupations légitimes d’Israël quant à sa sécurité. En attendant, a indiqué le représentant, nous appelons les autorités israéliennes à garantir un accès sans entrave aux acteurs et biens humanitaires et de développement. Estimant en outre qu’une solution politique de la crise exige le retour complet de l’Autorité palestinienne à Gaza, il a appelé les parties à relancer le processus de réconciliation intrapalestinienne. Avant de terminer, le représentant a déploré que les enfants continuent à être gravement affectés par le conflit. Il a exhorté Israël à mettre en place des mesures de prévention et de protection et appelé les mouvements palestiniens à s’abstenir d’encourager les enfants à participer à la violence.
M. PAUL DUCLOS (Pérou) a condamné les attaques aveugles perpétrées pour partie par le Hamas et d’autres acteurs palestiniens radicaux contre la population, ainsi que la disproportion des ripostes israéliennes et les discours conflictuels de leurs autorités respectives. Il a décrié en même temps l’inaction du Conseil de sécurité et la passivité de certains acteurs cruciaux, soulignant l’urgence de la situation. Après avoir réaffirmé sa position en faveur d’une solution des deux États, le représentant a reconnu le droit d’Israël à préserver sa sécurité et son existence par le biais de la légitime défense, dans le respect des droits de l’homme et des principes de légalité, de proportionnalité et de précaution. Il a rappelé à Israël son obligation de respecter les résolutions du Conseil de sécurité, en particulier en mettant fin aux pratiques de colonisation et de destruction de maisons dans les territoires palestiniens occupés.
Le représentant a également appelé à résoudre de toute urgence la crise humanitaire dans ces territoires, notamment en apportant le financement nécessaire aux programmes d’assistance. Il faut, a-t-il rappelé, pouvoir mener à bien les projets d’infrastructures et de développement promus par l’ONU à Gaza, faire avancer le processus de réconciliation intrapalestinien et mobiliser la communauté internationale pour financer l’UNRWA. Il a fait observer que le Gouvernement israélien était prêt à formuler des solutions pour rendre aux autorités palestiniennes les recettes fiscales qu’il a retenues.
Venant à la situation au Liban où ont eu lieu récemment des épisodes de violence, M. Duclos a mis l’accent sur le respect de l’intégrité territoriale de ce pays, conformément au droit international, avant d’exhorter les acteurs impliqués à agir avec modération et à éviter toute action qui pourrait faire escalader les tensions. Il faut donner la priorité aux canaux diplomatiques, a-t-il ajouté.
M. JONATHAN GUY ALLEN (Royaume-Uni) a commencé par condamner l’assassinat brutal d’un soldat israélien, le 8 août, et l’attentat à l’engin explosif improvisé, perpétré le 3 août, qui a coûté la vie à plusieurs adolescents israéliens. Il s’est également élevé contre la troisième tentative des militants palestiniens d’infiltrer Israël. Tous les groupes militants palestiniens, à commencer par le Hamas et le Jihad islamique, doivent cesser les actes de violence et de provocation, a martelé le représentant, encourageant tous les acteurs du conflit israélo-palestinien à présenter des propositions sur le long terme. Il est notamment important de lutter contre les causes profondes de la crise économique qui sévit à Gaza, a-t-il souligné. Sur le plan humanitaire, il a rappelé l’appui indéfectible qu’apporte le Royaume-Uni à l’UNRWA, qui est, selon lui, une force de stabilisation essentielle de la situation dans la région. Il s’est toutefois dit préoccupé par la crise financière que traverse l’Office et a exhorté la communauté internationale à y remédier sans délai.
Il s’est aussi déclaré inquiet des plans d’Israël prévoyant la construction de quelque 2 300 unités en Cisjordanie, synonyme à ses yeux d’une « annexion progressive de la Cisjordanie ». Cet acte endommagerait gravement les perspectives de paix au Moyen-Orient, a averti le délégué. Comme lors du débat mensuel du mois dernier, il a exprimé sa préoccupation face à la démolition des habitations palestiniennes et au déplacement forcé des populations en Cisjordanie, y voyant des souffrances inutiles pour les civils palestiniens. Il a d’autre part déploré les affrontements survenus sur le mont du Temple, le 11 août, avant d’appeler les parties à faire montre de calme et de retenue, en particulier lors des cérémonies religieuses. Réaffirmant par ailleurs le droit d’Israël à assurer sa protection, il a condamné les frappes israéliennes opérées sur des positions du Hezbollah, au Liban, qui constituent une violation de la souveraineté de ce pays. Enfin, se disant toujours préoccupé par la décision d’Israël de retenir les recettes fiscales de l’Autorité palestinienne, initiative contraire aux Accords d’Oslo, il a vivement encouragé les États-Unis à faire une proposition en vue de la conclusion d’un accord qui tiendrait compte des aspirations légitimes des deux parties.
M. JOB OBIANG ESONO MBENGONO (Guinée équatoriale) a déploré les dizaines de Palestiniens blessés à la suite de la réponse israélienne aux manifestations à Gaza, vendredi dernier. Ces victimes viennent s’ajouter aux centaines de morts et aux milliers de blessés dans l’enclave palestinienne depuis mars 2018, a poursuivi le représentant, renvoyant dos à dos les tirs de roquette lancés en direction d’Israël depuis le territoire palestinien et les raids aériens lancés par Israël contre Gaza. Parallèlement, le manque de progrès en faveur d’un règlement du conflit a de quoi « remettre en question le prestige et le leadership » de cette Organisation, a estimé le représentant, regrettant l’absence d’unité du Conseil de sécurité sur ce dossier.
Le délégué a toutefois salué les récentes évolutions positives à Gaza, dont l’extension de sa zone de pêche de 10 000 à 15 000 marins, la restitution de 44 bateaux de pêche préalablement confisqués par Israël et l’assouplissement des conditions de voyage pour les hommes d’affaires basés à Gaza. Il a également salué les résultats récemment obtenus par l’ONU et ses agences dans la zone, notamment en matière de création d’emplois. Le représentant a espéré que ces développements contribueront à l’instauration d’un climat de confiance propice au dialogue entre les parties. Il a réaffirmé l’appui de son pays à une solution des deux États négociée entre les parties, conformément aux résolutions pertinentes du Conseil.
Mme BERIOSKA ILUMINADA MORRISON GONZÁLEZ (République dominicaine) a appelé à mettre fin aux pratiques israéliennes de démolition et de confiscation de biens immobiliers palestiniens, une pratique qui aurait causé le déplacement de 90 Palestiniens, dont 58 enfants, selon l’OCHA. Si elle a noté la diminution de la violence à Gaza, elle s’est inquiétée de la poursuite des manifestations qui en sont à leur soixante-neuvième semaine et qui continuent à être réprimées par les forces israéliennes à l’aide d’armes à feu et autres moyens violents. Soulignant que cela aurait fait 64 blessés, dont 27 enfants, une femme, un ambulancier et deux journalistes, elle a appelé la communauté internationale à condamner toutes les violations du droit international qui garantissent la protection des manifestants civils.
La représentante a rappelé sa position en faveur d’une solution des deux États et, concernant les attaques palestiniennes contre Israël, sa condamnation de tout acte de violence. La représentante s’est également inquiétée de la situation humanitaire dans les territoires palestiniens, appelant à financer l’UNRWA pour que l’agence puisse répondre aux besoins de la population en danger. Elle a rappelé que des pays donateurs, comme la Suisse, les Pays-Bas et la Belgique, avaient suspendu leurs contributions respectives à l’UNRWA après les révélations de conduite sexuelle inappropriée, de népotisme et autres actes répréhensibles commis par la direction de l’agence.
M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a déploré les « violences et provocations » de la Puissance occupante à l’encontre des habitants de Gaza et sur les lieux saints à Jérusalem-Est, en violation, selon lui, du droit international humanitaire et des résolutions de l’ONU. Il a appelé le Gouvernement israélien à mettre immédiatement fin à ces exactions. Par ailleurs, le représentant a appelé à s’attaquer aux causes profondes du conflit, « à savoir l’occupation illégale du territoire palestinien par Israël ». Il a jugé déplorable que le Conseil ait été incapable de répondre à de tels agissements, au détriment de la sécurité internationale. « En d’autres termes le multilatéralisme est sous une menace constante », a-t-il tranché. Face à la détérioration de la situation humanitaire à Gaza et à la poursuite de la politique israélienne de colonisation en Cisjordanie, le représentant a plaidé pour le maintien d’un niveau suffisant d’aide aux Palestiniens, y compris en allouant davantage de fonds à l’UNRWA. Le rôle de cet Office est vital, a-t-il insisté, tout en reconnaissant le besoin d’améliorer sa gestion.
M. CHRISTOPH HEUSGEN (Allemagne) a dit que la solution des deux États, Israël et Palestine, vivant côte à côte, dans la paix et la sécurité, dans des frontières sûres et reconnues, avec Jérusalem comme capitale est la seule solution viable. Il n’y a pas d’autoroute de la paix et créer de nouveaux faits sur le terrain, dont la modification de frontières, ne contribue en rien à la solution, a-t-il prévenu. Les efforts conjoints visant à rétablir des possibilités de négociations sont essentielles, a-t-il souligné, appelant les parties à s’abstenir de toute mesure unilatérale. Nous sommes « effarés », a avoué le représentant, par l’ampleur des attaques meurtrières contre des civils israéliens ces dernières semaines. Il a tout de même souligné que les activités de colonisation dans le territoire palestinien occupé sont illégales au regard du droit international. Elles sapent tout espoir de paix et ne font qu’alimenter les tensions. À son tour, le représentant a insisté sur l’importance de l’UNRWA qui reste indispensable pour satisfaire les besoins fondamentaux des Palestiniens. Il n’a pas manqué de rappeler que l’Allemagne est le principal bailleur de fonds bilatéral de l’Office.
M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) a entamé son intervention en rappelant au Conseil de sécurité le contenu de la résolution 242 (1967), laquelle prie Israël de retirer ses forces armées des territoires occupés. Réitérant le soutien indéfectible de son pays à la solution des deux États et au processus de paix visant à garantir deux États, Israël et la Palestine, coexistant côte à côte dans l’intérêt de tous les peuples de la région, il s’est déclaré préoccupé par le mépris affiché pour le processus de paix au Moyen-Orient, s’agissant notamment des questions liées au statut final et aux frontières. Dans ce contexte, l’Afrique du Sud estime que l’expansion des colonies par Israël est une atteinte au droit international, sape les perspectives de paix et porte atteinte aux décisions du Conseil, ce qui nuit à sa crédibilité. « Nous continuons d’appeler à la mise en œuvre de la résolution 2334 (2016) et constatons que les violations flagrantes des résolutions entraînent généralement des mesures plus sévères à l’encontre des auteurs des infractions », a-t-il souligné, jugeant que le Conseil doit aujourd’hui œuvrer en priorité au rétablissement de la confiance et éviter une recrudescence des tensions.
Pour le représentant, les roquettes tirées sur Israël depuis Gaza et les ripostes israéliennes sont autant d’indications que, tant que le processus sera dans l’impasse, l’instabilité durera et d’autres vies seront perdues. En conséquence, il a appelé à la publication de rapports du Secrétaire général sur cette question, conformément à la résolution 2334, et a dit attendre avec impatience la diffusion d’un rapport écrit avant celui programmé en septembre. Il a d’autre part souhaité dire sa préoccupation face aux violations continues des droits de l’homme dans les territoires occupés, ce qui, selon lui, ne fait qu’attiser « les flammes de la haine entre Israël et la Palestine ». À l’opposé des actes consistant à bâtir des murs, à fermer des écoles et à tuer des civils, le Conseil devrait inciter les parties à prendre des mesures d’espoir et de confiance, a plaidé le délégué. Il a ajouté que sa délégation propose que le Conseil envisage à nouveau sa visite dans la région, reportée à plusieurs reprises. Si tous les membres ne veulent y participer, une « mini-mission » pourrait être organisée, a-t-il suggéré. Cela montrerait, a-t-il dit, que « la communauté internationale ne se lave pas les mains du plus vieux conflit au Moyen-Orient ». Ce serait aussi l’occasion de rencontrer les principaux protagonistes de cette crise sur le terrain. En conclusion, le représentant s’est dit convaincu que le dialogue est « la seule façon de régler de manière efficace la question de l’autodétermination du peuple palestinien » et a appelé le Conseil à mettre en œuvre ses propres résolutions.
M. DIMITRY A. POLYNASKIY (Fédération de Russie) a observé avec préoccupation que la situation est compliquée par les activités de colonisation d’Israël. La seule façon de sortir de cette impasse est d’unir les efforts régionaux et internationaux. Il s’est inquiété des dernières déclarations de responsables américains sur la nécessité de revenir sur les décisions du passé et de proclamer caduques certaines résolutions du Conseil de sécurité. Compte tenu de ces déclarations, le représentant a demandé à ses collègues américains s’ils étaient prêts à remettre en cause la résolution 181 du Conseil de sécurité qui porte création le 29 novembre 1947 de l’État d’Israël? Il a jugé urgent d’envoyer une mission du Conseil de sécurité en Palestine, ce qui permettait de rétablir la confiance et de relancer les pourparlers en vue d’un règlement viable de ce conflit.
Le représentant a prévenu qu’aucune action unilatérale ne saurait remettre en cause l’objectif d’une solution des deux États, le Principe de Madrid, l’Initiative de paix arabe et le statut des territoires occupés y compris du Golan. Il a dit la volonté de son pays de mettre en place un mécanisme de sécurité durable dans la région. Il a aussi jugé urgent d’éradiquer le terrorisme dans toute la région en respectant la Charte des Nations Unies, les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et surtout l’intégrité territoriale de tous les États. Il s’est inquiété des deux attaques apparemment menées par les Israéliens dans la banlieue de Beyrouth au Liban et dans la région de Damas en Syrie le 25 août.