Conseil de sécurité: à trois mois de l’élection présidentielle, l’Afghanistan à l’épreuve du processus de paix avec les Taliban
Les cessez-le-feu unilatéraux inédits en 2018 n’ayant pas été renouvelés cette année, « le chemin de la paix est toujours long en Afghanistan », a reconnu, cet après-midi au Conseil de sécurité, le Représentant spécial du Secrétaire général, M. Tadamichi Yamamoto, qui a vu dans l’élection présidentielle prévue le 28 septembre 2019 un « moment clef » pour réaffirmer la légitimité de la structure politique démocratique du pays.
Mais le calendrier est serré, compte tenu des difficultés opérationnelles et techniques qu’il faut encore surmonter pour organiser des élections crédibles dans les temps. La tâche la plus conséquente consiste à rétablir la confiance de l’opinion publique dans les organes de gestion électorale, après les controverses qui ont entouré les élections législatives l’an dernier. La Commission électorale indépendante doit encore améliorer les procédures de publication de la liste des électeurs, former le personnel, mener des campagnes de sensibilisation et maîtriser la technologie électorale, a expliqué le haut fonctionnaire, qui est également le Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA).
Les élections doivent être justes, a renchéri la Présidente de la Commission indépendante afghane des droits de l’homme, Mme Sima Samar, première femme à diriger cet organe. Avec le soutien de la MANUA, elle a promis de surveiller les droits politiques et les libertés d’expression, d’association et de mouvement. Nous avons bien l’intention, a affirmé à son tour l’Afghanistan, d’organiser l’élection présidentielle à la date prévue. Des arrangements sécuritaires et techniques ont d’ailleurs été pris en ce sens, en coopération avec les partenaires internationaux, a-t-il précisé, en promettant un processus « crédible, transparent et inclusif ».
De l’avis du Secrétaire général, dont M. Yamamoto a présenté le dernier rapport en date, ces préparatifs pourraient être compliqués par la poursuite des combats malgré les négociations en cours entre les États-Unis et les Taliban et le report du dialogue intra-afghan. « Les espoirs de voir la violence s’atténuer ne se sont toujours pas concrétisés », écrit-il. « C’est avec un sentiment d’urgence renouvelé que j’appelle à l’engagement de pourparlers directs entre le Gouvernement afghan et les Taliban et que je soutiens l’action actuellement menée en faveur de la tenue d’un dialogue ouvert à toutes les parties prenantes nationales », insiste le Chef de l’Organisation.
Nous pourrions être bientôt en mesure, ont annoncé les États-Unis, de conclure un projet de texte décrivant les engagements pris par les Taliban pour que le territoire afghan ne soit plus jamais utilisé pour des actes de terrorisme international, une analyse à laquelle s’est rallié le Pakistan, qui a vu des « raisons d’espérer ». La Fédération de Russie a toutefois demandé davantage d’objectivité, jugeant intolérable d’« enjoliver » la réalité. Nous ne pouvons ignorer, a alerté l’Inde, que des groupes bénéficiant d’un soutien et de sanctuaires sûrs lancent depuis l’étranger des attaques terroristes. On ne saurait les laisser négocier avec « la main haute ». Pour une paix durable, il faut d’abord traiter de la question des refuges offerts aux réseaux terroristes. « Les activités des Taliban, de Daech, d’Al-Qaida ou encore du réseau Haqqani doivent cesser », a tranché l’Inde.
Le processus de paix continue de susciter en Afghanistan un engouement manifeste, comme en témoigne la loya jirga consultative pour la paix qui a réuni, il y a six semaines, des milliers de personnes pour échanger des idées, a observé le Représentant spécial. Cette consultation, s’est enorgueilli l’Afghanistan, a abouti à l’adoption d’une déclaration qui a fixé les paramètres et la feuille de route des pourparlers avec les Taliban et appelle à un cessez-le-feu immédiat et permanent, entre autres priorités.
L’engagement pris par l’Allemagne et le Qatar de convoquer à Doha début juillet un dialogue « entre Afghans et Afghans », a été salué les États-Unis qui ont dit préparer le terrain pour que les négociations intra-afghanes puissent débuter dans les meilleurs délais. La Fédération de Russie a insisté sur l’importance « cruciale » du dialogue intra-afghan lancé à Moscou en février dernier, appelant les autres acteurs internationaux à prendre en compte le « format de Moscou », sans faire jouer de « concurrence artificielle ». Nous ne revendiquons « aucun monopole sur la diplomatie de la paix », ont assuré les États-Unis. Si l’on s’attend à ce que nous apportions notre appui financier, politique ou de développement à l’issue d’un accord de paix, a prévenu l’Union européenne, nous devons être impliqués « à tous les stades » du processus de paix.
Dans ce processus de paix, a averti le Représentant spécial, les Afghans devront répondre à des questions difficiles dont, comme l’ont souligné plusieurs intervenants, les acquis de ces 18 dernières années, y compris les droits des femmes afghanes. Nous insistons, et nous devrions tous insister, pour que les femmes, les minorités et d’autres groupes soient représentés dans les pourparlers, ont affirmé les États-Unis.
LA SITUATION EN AFGHANISTAN (S/2019/493)
Déclarations
Il y a un an, a rappelé, M. TADAMICHI YAMAMOTO, Représentant spécial pour l’Afghanistan et Chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), le peuple afghan célébrait trois jours inédits de cessez-le-feu pendant l’Eid al-Fitr 2018. Mais les 12 mois qui ont suivi ont montré combien la voie de la paix reste difficile. Le cessez-le-feu n’a pas été renouvelé cette année mais les fondations, qui ont été jetées l’année dernière, tiennent toujours, a affirmé le Représentant spécial. Il y a six semaines, s’est-il expliqué, des milliers de personnes se sont réunies pour échanger des idées lors de la loya jirga consultative pour la paix.
Le Représentant spécial a parlé de l’élection présidentielle prévue pour le 28 septembre comme d’un moment clef pour réaffirmer la légitimité de la structure politique démocratique de l’Afghanistan. Mais a-t-il prévenu, le calendrier est serré, compte tenu des problèmes opérationnels et techniques qu’il faut encore surmonter pour avoir des élections crédibles dans les temps. La tâche la moins difficile n’est pas le rétablissement de la confiance dans les organes de gestion électorale, après les controverses qui ont entouré les élections législatives, l’année dernière. La Commission électorale indépendante doit encore améliorer les procédures de la publication de la liste des électeurs, former le personnel, mener des campagnes de sensibilisation et maîtriser la technologie électorale.
Les enjeux politiques sont énormes et la compétition intense, a prévenu le Représentant spécial. Il a souligné la responsabilité de tous les acteurs politiques, y compris les candidats à l’élection présidentielle et les agences de sécurité et du Gouvernement, d’éviter toute contestation électorale. Il a appelé au respect du Code de conduite et des institutions publiques dont la Commission électorale indépendante et la Commission des plaintes électorales. Il a aussi appelé les acteurs à s’abstenir de toute action qui pourrait donner un avantage indu à tel ou tel candidat. Ce terrain politique doit être balisé maintenant pour assurer un scrutin crédible et l’acceptation des résultats, a pressé le Représentant spécial.
Aujourd’hui, a-t-il poursuivi, l’esprit des Afghans et des partenaires internationaux est plus que jamais tourné vers un règlement négocié. Les pourparlers directs entre les États-Unis et les Taliban se poursuivent avec un large appui international. L’Afghanistan et certains de ses partenaires étrangers, dont l’Allemagne et le Qatar, préparent le dialogue interafghan. Certains acteurs afghans importants ont déjà eu l’occasion d’échanger avec les représentants des Taliban à Moscou, à la fin du mois de mai. Tous les efforts doivent être dirigés vers un objectif commun: le lancement de négociations formelles entre le Gouvernement de l’Afghanistan et les Taliban pour parvenir à un accord de paix, a insisté le Représentant spécial.
Il a exhorté les pays qui ont des contacts directs avec les Taliban et une influence tout aussi directe sur eux d’intensifier leurs efforts pour parvenir à cet objectif. Mais rien, a-t-il souligné, ne peut remplacer les Afghans. Le Gouvernement et les leaders politiques doivent donc dégager un consensus et créer des arrangements structurés pour représenter effectivement les intérêts de leur peuple dans leur rencontre avec les Taliban. Les préparatifs de l’élection présidentielle ne devraient pas les distraire de ce « travail nécessaire ».
Dans ce processus de paix, a conclu le Représentant spécial, les Afghans devront répondre à des questions difficiles: la préservation des acquis de ces 18 dernières années, le rôle des femmes, les questions de responsabilité et la réintégration de ceux qui ont porté des armes. Rappelant le prix que les Afghans payent à cause du conflit, il a reconnu que le chemin de la paix est toujours long mais qu’avec « notre appui collectif » à la pleine appropriation du processus par les Afghans, « j’ose croire que nous prenons la bonne direction ».
Mme SIMA SAMAR, Présidente de la Commission indépendante des droits de l’homme de l’Afghanistan, a évoqué « l’espoir et l’optimisme » qui animent ce pays en matière de respect des droits de l’homme, après 18 ans de soutien de la communauté internationale. Elle a fait part en même temps d’une certaine peur de revenir en arrière. Les pourparlers avec les Taliban ont, en effet, fait naître des inquiétudes quant à l’engagement des parties à préserver les progrès en matière de droits de l’homme, de liberté, de démocratie et de développement économique.
Cette année, a poursuivi Mme Samar, la Commission a lancé une enquête nationale sur le thème « femmes, paix et sécurité », qui a été menée dans 30 provinces en sondant 3 400 femmes. Les résultats montrent que les Afghanes veulent une paix durable et souhaitent jouer un rôle dans le processus. Elles exigent le respect de leurs droits, des droits de l’homme en général et de la démocratie, des principes qui ne doivent pas être remis en question dans les négociations et les pourparlers politiques. Les femmes veulent un système de responsabilité, une justice sociale et en finir avec la culture d’impunité.
Mme Samar a appelé à faire preuve d’un engagement soutenu et d’une volonté politique forte pour que les femmes puissent continuer de progresser. Les femmes, a-t-elle précisé, doivent surmonter les défis d’une société traditionnelle et conservatrice en plus de la discrimination historique.
« L’Afghanistan est en conflit. » En 41 ans, a rappelé Mme Samar, le peuple a fait l’expérience de l’extrême gauche et de l’extrême droite, subissant des disparitions, des meurtres, des destructions, des déplacements ainsi que la violation de leurs droits et libertés. Ce sont les femmes et les autres groupes vulnérables qui ont souffert le plus. Pour faire des progrès, il faut réviser les lois en fonction des conventions internationales des droits de l’homme, a recommandé Mme Samar tout en regrettant que le conflit et l’insécurité causent encore tant de morts et de déplacements, ce dont elle a accusé en priorité les Taliban et Daech, ainsi que les forces de sécurité afghanes et ses partenaires internationaux qui sont aussi impliqués, selon elle.
Il faut, a-t-elle demandé, un mécanisme pour panser les blessures des victimes, ainsi que des institutions solides et des mesures de prévention des violences et des violations de droits de l’homme, sans compter un développement économique. Mme Samar a aussi plaidé pour que se tiennent des élections justes, exigeant la coopération des candidats, des partis politiques et de la société civile, ainsi que le soutien du Gouvernement et de la communauté internationale. « Je suis heureuse de dire que la Commission afghane indépendante des droits de l’homme, avec le soutien de la MANUA, surveillera les droits politiques » ainsi que les libertés d’expression, d’association et de mouvement, a-t-elle déclaré.
La Présidente de la Commission a ensuite abordé la question de la torture en rappelant que, récemment, les forces spéciales afghanes avaient secouru des centaines de prisonniers détenus par les Taliban. Elle a dit que ces derniers avaient systématiquement torturé, maltraité ou tué des détenus, appelant à rendre la justice pour ces crimes. Elle s’est aussi inquiétée des cas de torture qui auraient encore lieu dans les prisons du Gouvernement.
Mme Samar a aussi appelé à assurer la sécurité des défenseurs de la société civile et des droits de l’homme, avant de demander des progrès pour garantir la justice, l’état de droit et la lutte contre la corruption, car, a-t-elle souligné, c’est encore difficile pour nos mécanismes judiciaires nationaux. Si la décision de la Cour pénale internationale (CPI) d’enquêter sur la situation en Afghanistan avait suscité de l’espoir l’an dernier, cet espoir s’est évaporé lorsque la Chambre préliminaire a rejeté la demande du procureur de mener une enquête. Pourtant, « l’accès à la justice n’est pas un luxe; c’est un droit de l’homme fondamental ».
S’agissant des affaires de corruption, elle a cité quelques progrès mais précisé que le public restait sceptique, une perception qu’il faut arriver à changer. D’après une étude sur la discrimination raciale menée par la Commission l’an dernier, plus de 20% des Afghans se sentent discriminés, a-t-elle indiqué.
Par ailleurs, Mme Samar a salué la scolarisation de millions d’enfants, mais déploré que beaucoup soient contraints d’abandonner l’école pour travailler ou subir différentes formes d’abus. Elle a mentionné une enquête menée par la Commission à cet égard qui révèle que les Taliban et Daech continuent d’utiliser les enfants dans le conflit et de viser les écoles de filles. Quant aux millions de personnes handicapées et de personnes droguées, Mme Samar a appelé le Gouvernement à leur allouer un budget suffisant.
Enfin, elle a invité les parties à se mettre d’accord sur un cessez-le-feu et à mettre un terme à la guerre. La justice ne se fera pas seulement sur la base de la justice pénale mais aussi grâce à un mécanisme permettant une réconciliation durable.
En conclusion, elle a appelé le Conseil de sécurité et les Nations Unies à renforcer leurs efforts pour garantir une paix durable, des normes démocratiques et les droits de l’homme. Il faut, a-t-elle recommandé, impliquer tous les groupes ethniques, religieux et de la société civile, en garantissant une participation significative des femmes, des jeunes et des victimes dans la négociation et la mise en œuvre d’un plan de paix pour l’Afghanistan. Elle a insisté sur la transparence de ce processus pour un meilleur soutien du public. L’ONU, a-t-elle conclu, doit appuyer le processus de justice transitionnelle.
Mme ADELA RAZ (Afghanistan) a déclaré que la réunion d’aujourd’hui se déroule à un moment crucial, alors que nous sommes engagés dans la délicate tâche de prendre la tête de deux processus nationaux d’importance, l’élection et les pourparlers de paix. « Nous désirons mettre fin à un conflit vieux de plusieurs décennies en parvenant à un accord global accepté par tous les Afghans, et à l’organisation d’une élection présidentielle, pour consolider et garantir la continuité de la démocratie, de la gouvernance et de l’état de droit dans notre société », a annoncé la représentante. À cette jonction cruciale, nous sommes confiants que ces deux objectifs peuvent être atteints, avec un soutien international adéquat, a-t-elle ajouté.
S’agissant des efforts de paix, le Gouvernement d’unité nationale est convaincu depuis longtemps que les perspectives de paix ne peuvent être atteintes que dans le cadre d’un processus bénéficiant du soutien de tous les Afghans. L’élan pour la paix n’a cessé de croître, en raison d’un engagement accru dans le pays et à l’étranger. Le mois dernier, la loya jirga consultative pour la paix a rassemblé 3 200 membres élus à travers tout le pays, issus de partis politiques, d’organisations religieuses ou de tribus, et de la société civile, dont des femmes, des enfants et des jeunes, s’est félicitée la représentante, en expliquant que cette consultation a abouti à l’adoption d’une déclaration qui a fixé les paramètres et la feuille de route des pourparlers avec les Taliban et qui appelle à un cessez-le-feu immédiat et permanent, entre autres priorités.
Protéger l’« essence » de notre Constitution, en particulier en garantissant les mêmes droits aux hommes et aux femmes, est un élément fondamental de l’Afghanistan d’aujourd’hui, a assuré la représentante, qui a expliqué que tout accord politique, quelle qu’en soit la nature, devra élargir et renforcer les droits des femmes. Nous sommes toujours prêts à nous engager dans des pourparlers qui reflètent la position générale partagée du peuple afghan. Mme Raz a remercié la communauté internationale, en particulier les États-Unis et d’autres partenaires à l’appui de la paix, dont l’Allemagne, qui a annoncé son intention de jouer un rôle davantage proactif dans les efforts de paix et d’aider à faciliter les pourparlers directs, « dont nous pensons qu’ils débuteront sous peu ».
La représentante a toutefois regretté des actions prises par les Taliban qui échouent à manifester « ne serait-ce que le plus infime degré d’engagement en faveur de la paix ». « Les Taliban, il n’y a pas si longtemps, avaient annoncé leur campagne d’attaques du printemps et commencé d’attaquer des civils, alors que leurs représentants étaient engagés dans des pourparlers de paix. Cela a été encore plus évident pendant le ramadan, lorsqu’ils s’en sont pris à des citoyens ordinaires et à des leaders religieux qui dénonçaient la violence et amplifiaient le message de paix dans différentes parties du pays. Nous sommes convaincus, a dit la représentante, que seule une approche faisant simultanément appel à la pression et aux incitations pourra être couronnée de succès. Alors que le Gouvernement afghan exerce désormais son contrôle sur 85% à 90% de son territoire, ses forces de sécurité, afin de dissuader les éléments extrémistes de commettre de nouvelles attaques meurtrières, ont réussi à repousser la présence des Taliban dans deux districts de la province de Ghazni. Mme Raz a, cependant, fait état de changements tactiques par les Taliban qui recourent à des engins explosifs improvisés et à des explosifs dissimulés dans des zones où il y a des civils, y compris les écoles. La MANUA a identifié les attaques perpétrées par les Taliban comme la première cause des pertes civiles, qui s’élèvent à 698 jusqu’à présent, a-t-elle relevé.
En dépit des défis auxquels il fait face, le Gouvernement a bien l’intention d’organiser l’élection présidentielle en septembre 2019. Des arrangements sécuritaires et techniques ont d’ailleurs été pris en ce sens, en coopération avec les partenaires internationaux, a assuré la représentante, qui a promis un processus crédible, transparent et inclusif. Elle s’est d’ailleurs félicitée de l’émergence d’une nouvelle génération et de la résilience démontrée par les Afghanes comme agentes de changement, de progrès et de la transformation. Mme Raz s’est enorgueillie de ce que deux femmes soient à la tête de la Commission électorale indépendante et de la Commission des plaintes électorales. Elle a annoncé, en conclusion, le lancement prochain du Groupe des amis des femmes afghanes, ici même à New York, avec le soutien de la Mission permanente du Royaume-Uni.
En tant que deuxième plus grand donateur et contributeur de troupes, l’Allemagne se tient fermement aux côtés de l’Afghanistan, a précisé son représentant, M. JUERGEN SCHULZ. Mon pays, a-t-il dit, compte faire en sorte qu’en septembre, la MANUA soit dotée d’un mandat « concis ». La dynamique actuelle du processus de paix crée des chances « qui doivent être saisies », a estimé le représentant, qui a salué les « efforts courageux » du Gouvernement afghan et les initiatives internationales. Il est désormais urgent d’aller de l’avant dans le dialogue intra-afghan, qui doit inclure, selon l’Allemagne, le Gouvernement afghan, les Taliban et d’autres acteurs clefs de la scène afghane, dont une forte proportion de femmes.
L’Allemagne, qui est prête à contribuer à ces efforts, a d’ailleurs exploré au cours des dernières semaines et en étroite collaboration avec les États-Unis, la possibilité d’organiser une conférence sur le dialogue intra-afghan, en coopération avec le Qatar, à Doha. L’objectif de la conférence serait d’agir comme catalyseur d’un processus de négociation global, a précisé M. Schulz. Cette idée, a-t-il affirmé, a déjà reçu l’aval du Gouvernement afghan et de certaines parties prenantes de la scène politique et de la société civile. Il reste des obstacles à dépasser mais le succès du processus de paix en Afghanistan dépendra d’une action collective de la communauté internationale et de sa capacité à envoyer un message « clair » aux parties afghanes, y compris aux Taliban, pour dire que le moment est venu de parler de l’avenir commun.
La participation des femmes sera cruciale, a insisté le représentant qui s’est félicité de constater la présence de femmes à la dernière loya jirga. Un processus de paix viable suppose en outre la continuité et la stabilité des institutions publiques et de la Constitution, a poursuivi le représentant, qui a insisté sur la protection des droits des hommes et des femmes. Le Conseil de sécurité peut jouer un rôle important en stipulant clairement ses attentes à cet égard, a-t-il pressé, et pour éviter le vide constitutionnel, il a jugé de tenir une élection présidentielle juste, démocratique et dans les délais, en tirant les leçons des élections législatives. Le représentant a conclu en soulignant l’importance qu’il y a à atténuer les effets des changements climatiques et de lutter plus efficacement contre la corruption.
M. MUHSIN SYIHAB (Indonésie) a estimé que l’élection présidentielle de septembre prochain va renouveler l’espoir des populations et imprimer « un élan d’unité ». Il a salué la participation renforcée des femmes aux divers processus de construction de la nation. Même si l’on note une baisse des incidents sécuritaires, le représentant s’est dit d’avis que la situation demeure volatile. Il a déploré le fait que les Taliban aient confirmé l’offensive annuelle du printemps en plein milieu du processus de paix. Il est important, a jugé M. Syihab, que l’élection se passe dans la sécurité pour que tous les Afghans puissent s’impliquer dans l’avancement de leur pays. Malgré les efforts internationaux, la paix ne sera possible que si tous les Afghans s’approprient l’action et s’acquittent de leur responsabilité politique s’agissant de l’émergence d’un Afghanistan démocratique et uni. Cela passe, a-t-il insisté, par un processus de paix mené par les Afghans grâce au dialogue.
M. XOLISA MFUNDISO MABHONGO (Afrique du sud) a appelé les parties à veiller au bon déroulement de l’élection dans les temps impartis, soulignant qu’il est essentiel pour renouveler la confiance de la population et progresser vers un Afghanistan stable, pacifique et prospère. Il a qualifié d’encourageants les efforts déployés dans le contexte de la loya jirga pour tracer la voie vers des pourparlers de paix avec les Taliban. Il a souligné que seule une participation pleine et sans exclusive peut assurer une paix durable pour le pays et la région. M. Mabhongo s’est ensuite inquiété du niveau élevé de violence dans le pays et des attaques aveugles contre les civils, avertissant du risque de voir les avancées réalisées dans les sphères sécuritaires et politiques mises à mal, notamment à l’approche de l’élection. Il a aussi appelé les parties à veiller à la protection des femmes et des enfants, notamment contre la violence sexuelle et fondée sur le sexe et réclamer la libération des enfants soldats.
M. RODNEY M. HUNTER (États-Unis) a exprimé l’attachement de son pays à l’instauration d’une paix durable en Afghanistan qui garantisse que le terrorisme transnational ne sera plus jamais une « plateforme ». Notre Représentant spécial, a-t-il dit, travaille en étroite coordination avec le Président Ghani, le chef de l’exécutif Abdullah et d’autres dirigeants afghans, ainsi qu’avec le Représentant spécial Yamamoto et les membres du Conseil de sécurité. Nous informerons d’ailleurs très prochainement ce dernier des progrès, a-t-il annoncé. Comme vous le savez, a-t-il rappelé, les États-Unis et les Taliban sont parvenus à un accord de principe en janvier dernier selon lequel tout accord de paix global doit traiter de quatre questions interdépendantes: la lutte antiterroriste, la présence de troupes étrangères, le dialogue intra-afghan menant à des négociations intra-afghanes et un cessez-le-feu permanent. En ce qui concerne le terrorisme, nous avons réalisé des progrès et pourrions être bientôt en mesure de conclure un projet de texte décrivant les engagements pris par les Taliban de veiller à ce que le territoire afghan ne soit plus jamais utilisé pour des actes de terrorisme international. Bien entendu, nous devons être attentifs à la mise en œuvre et au respect de ces engagements, a reconnu le représentant.
À la lumière des progrès réalisés, il sera bientôt temps d’entamer des discussions avec les Taliban sur la présence militaire étrangère, qui reste conditionnelle, a-t-il précisé. Les États-Unis ont clairement indiqué aux Taliban qu’ils sont prêts à réduire leurs forces. Mais, a rassuré le représentant, nous n’avons pas arrêté de chiffres ni de calendrier. La disposition finale des forces étrangères sera déterminée par le gouvernement « post-paix », a-t-il ajouté avant de décrire « ce que nous voyons comme la voie à suivre ». Tout d’abord, toutes les parties conviennent que la conclusion d’un accord entre les États-Unis et les Taliban sur le terrorisme et la présence de troupes étrangères ouvrira la porte à un dialogue et à des négociations intra-afghanes. À cette fin, M. Hunter s’est félicité de l’engagement pris par l’Allemagne et le Qatar de convoquer à Doha début juillet un dialogue « entre Afghans et Afghans », qui offre l’occasion de reconnaître le besoin urgent de négociations intra-afghanes. Dans le même temps, les États-Unis préparent le terrain pour que les négociations intra-afghanes puissent commencer le plus rapidement possible. L’objectif de ces négociations est de permettre aux Afghans de convenir un calendrier et d’une feuille de route politique pour parvenir à un accord de paix global.
Les États-Unis, a poursuivi le représentant, soutiennent la volonté des Afghans d’obtenir une paix qui préserver les acquis des droits et fondamentaux de ces 18 dernières années. Nous insistons et nous devrions tous insister, pour que les femmes, les minorités et d’autres groupes soient représentés dans les pourparlers. En outre, les États-Unis consultent la région sur la manière dont ils peuvent soutenir la paix. Le consensus trilatéral publié par les États-Unis, la Fédération de Russie et la Chine, ainsi que les principes énoncés par le Groupe États-Unis-Europe, constituent des avancées importantes. Washington, a indiqué le représentant, ne revendique aucun monopole sur la diplomatie de la paix. Il a remercié le Comité des sanctions d’avoir appuyé une exemption temporaire de l’interdiction de voyager imposée à certains individus et une exemption correspondante au gel des avoirs pour faciliter les pourparlers intra-afghans. Si la paix reste notre priorité, nous pensons aussi, a dit le représentant, que la planification des élections doit aller de l’avant. La Commission électorale indépendante a annoncé la tenue de l’élection présidentielle le 28 septembre et nous exhortons cette Commission, le Gouvernement afghan et tous les acteurs politiques à prendre les mesures nécessaires pour une élection crédible.
M. MARIUSZ LEWICKI (Pologne) a indiqué que tout processus de paix devrait veiller à ce que les intérêts des femmes, des jeunes et des minorités soient pris en compte. En ce qui concerne un éventuel accord de paix avec les Taliban, il a insisté sur la protection des droits humains fondamentaux et estimé que la paix ne doit pas se faire au détriment des acquis de ces 18 dernières années. Le représentant a aussi appelé à des mesures pour garantir que les prochaines élections soient sûres, transparentes et crédibles. Dans le même temps, il faut préserver le rôle vital des agences humanitaires pour répondre aux besoins urgents des plus vulnérables. Il a apporté son soutien à la mission « Soutien résolu » qui devrait apporter davantage de formation, de conseil et d’assistance aux forces de sécurité et aux institutions afghanes. Enfin, le représentant a plaidé pour le renforcement de la lutte contre la corruption, l’élimination de la violence à l’encontre des femmes et la mise en œuvre du Plan d’action national relatif à la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité.
M. VLADIMIR K. SAFRONKOV (Fédération de Russie) a souhaité qu’à l’avenir, l’évaluation de la situation en Afghanistan se fonde davantage sur l’objectivité et l’identification des défis, le plus considérable étant le terrorisme. « Il est intolérable de se taire et d’enjoliver la réalité », a tranché le représentant, en citant les attaques commises dans le nord du pays par Daech et des combattants d’autres organisations terroristes. « Daech n’a pas renoncé à sa logique expansionniste », a mis en garde le représentant, qui a expliqué que ce groupe se propage par l’entremise de ses filiales. S’il s’est félicité de la décision adoptée par consensus d’inscrire certains individus sur la liste des sanctions du Comité des sanctions concernant Daech et Al-Qaïda, le représentant a toutefois considéré ce « premier pas » comme « insuffisant ». Il a attiré l’attention sur la nécessité de se focaliser sur la lutte contre les stupéfiants, dont les revenus financent le terrorisme. « Comme pour toute autre menace internationale, cela exige une coopération importante et collective », a-t-il exhorté.
M. Safronkov a ensuite déclaré que son Gouvernement soutient l’aspiration du peuple afghan à la paix. « Nos pays sont liés par une histoire riche de covoisinage qui remonte à 1919 », a-t-il rappelé, en assurant que la Fédération de Russie veut contribuer au processus de stabilisation nationale, « convaincue que tout le monde à y gagner », dont les pays voisins. Il a également réitéré son souhait d’un processus de paix le plus inclusif possible, y compris l’opposition. Il a estimé que le dialogue intra-afghan lancé à Moscou en février dernier est d’une importance « cruciale » à cet égard, avant de souligner que les autres acteurs internationaux doivent prendre en compte ce qui a été accompli dans le « format de Moscou », sans faire jouer une « concurrence artificielle ». Dans ce contexte, le représentant a demandé que soient associées aux démarches en cours les structures qui ont fait leur preuve, comme l’Organisation du Traité de sécurité collective et l’Organisation de coopération de Shanghai. « Il n’y a pas d’alternative à la coopération et au bon voisinage », a-t-il insisté, en plaidant pour une « patience stratégique ». « Nous sommes convaincus que les Afghans unis pourront mettre leur pays sur la voie de la paix et du développement durable. L’élection présidentielle doit consacrer cette union, dans lesquelles toutes les sensibilités doivent être tolérées », a conclu M. Safronkov.
Mme MADUISCA BATISTA DÍAZ (République dominicaine) a salué la bonne conduite des élections législatives en Afghanistan, à la suite desquelles un nouveau parlement a été formé pour la première fois depuis 2011. Elle a appelé à dépasser l’instabilité créée par les différentes plaintes et irrégularités survenues dans le cadre de ces élections, notamment dans la perspective du futur scrutin présidentiel. La représentante a, par ailleurs, déploré l’augmentation du nombre de victimes civiles en raison des opérations aériennes et de l’usage d’engins explosifs improvisés par les forces antigouvernementales. « Les appels aux armes, lancés aussi bien par le Gouvernement que par les Taliban, sont également inquiétants », a-t-elle ajouté, appelant à ouvrir des enquêtes sur les allégations d’attaques perpétrées contre des civils par des forces progouvernementales.
La représentante a, en outre, appelé les Taliban et le Gouvernement à continuer de prendre des initiatives positives pour restaurer la confiance, telles que l’annonce d’un cessez-le-feu unilatéral en juin 2018 et la tenue à Kaboul d’une « loya jirga » sur la paix en avril dernier. La représentante a soutenu le principe d’un dialogue interafghan, à l’initiative des acteurs internationaux et régionaux. Tout en saluant les avancées récentes en matière de participation des femmes à la vie politique et au processus de paix, notamment dans le cadre de la loya jirga, la représentante s’est dit préoccupée par la persistance de cas de violence sexuelle et par les pratiques discriminatoires, comme le « bacha bazi ». Elle a appelé les autorités afghanes à interdire et punir de telles pratiques, ainsi qu’à ouvrir des enquêtes, y compris lorsque les auteurs présumés sont des membres de l’armée ou de la police.
Mme ANNE GUEGUEN (France) a appelé à redoubler d’efforts pour protéger les civils en Afghanistan, où l’on recense le plus grand nombre de victimes parmi la population, dont 11 000 morts pour la seule année 2018. Quant aux attaques prenant spécifiquement pour cible des agents humanitaires, elles ont augmenté de plus de 150% en un an, a poursuivi la représentante, jugeant cette évolution « inacceptable ». Outre le devoir de protection des civils, la représentante a appelé à tout faire pour répondre aux besoins croissants des 6,3 millions d’Afghans qui dépendent de l’aide humanitaire, en garantissant notamment un accès humanitaire sûr et sans entrave sur l’ensemble du territoire.
Mme Gueguen a, par ailleurs, appelé à faire aboutir les efforts de paix dans le pays. Elle a tenu à saluer les travaux menés en ce sens par les États-Unis, le Qatar et l’Allemagne, qui ont entamé des discussions avec les Taliban pour les convaincre de prendre part à des pourparlers de paix avec le Gouvernement afghan. Elle a ainsi appelé les Taliban à entamer des pourparlers directs avec les autorités du pays et à déclarer un cessez-le-feu. Elle a jugé essentiel que le processus de paix soit mené par et pour les Afghans de façon ouverte, afin notamment de garantir une participation directe et significative des femmes. Dans ce cadre, la préservation des acquis en matière de justice, d’état de droit et de droits de l’homme sera fondamentale pour ne pas décourager l’appui financier de la communauté internationale, a-t-elle mis en garde.
Mme Gueguen a enfin appelé à assurer la tenue et le bon déroulement de l’élection présidentielle du 28 septembre 2019, en corrigeant les faiblesses identifiées lors des précédents scrutins et en intensifiant les préparatifs. Elle a invité la Commission électorale indépendante à garantir la participation la plus large possible de la population, notamment les femmes. Compte tenu de la menace élevée qui plane sur l’élection, notamment à Kaboul, Mme Gueguen a également appelé les forces afghanes à redoubler d’efforts pour sécuriser le scrutin, comme lors des élections législatives.
Mme KAREN VAN VLIERBERGE (Belgique) a d’abord parlé du processus pour saluer l’intensification des efforts nationaux et internationaux visant à mettre fin à un conflit long et dévastateur. Un accord de paix ne pourra être atteint qu’au moyen d’un dialogue intra-afghan global et inclusif, a-t-elle souligné, en réitérant son appel aux Taliban pour qu’ils s’engagent dans des pourparlers de paix directs. La représentante a ensuite appelé toutes les parties à promouvoir la participation « significative et égale » des femmes à toutes les étapes du processus de paix. Une paix durable, a-t-elle précisé, commence par la nomination d’une équipe de négociation représentative et inclusive. Nous insistons, a-t-elle dit, sur le fait que tout accord de paix doit préserver les acquis politique, économique et social de ces 18 dernières années, en particulier les droits des femmes, des enfants et des minorités. La construction de la paix, a-t-elle conclu, est un processus à long terme. Pour qu’un accord soit durable, la communauté internationale doit être unie dans son soutien. La représentante a appelé tous les partenaires internationaux à coordonner étroitement leurs efforts afin de lancer un dialogue intra-afghan et parvenir à un processus de paix dirigé et contrôlé par les Afghans.
M. NARCISO SIPACO RIBALA (Guinée équatoriale) s’est inquiété du nombre élevé de victimes civiles provoqué par les attaques à grande échelle lancées par les forces antigouvernementales et les terroristes, notamment à l’aide d’engins explosifs improvisés. Il s’est aussi soucié du recrutement et de la violence sexuelle à l’égard des enfants et a espéré que la nouvelle loi du 5 mai sur la protection de l’enfance permettra de leur assurer davantage de protection. Il a également condamné dans les termes les plus fermes les attaques commises pendant le mois sacré du ramadan.
Le représentant a ensuite salué les efforts déployés par les autorités afghanes pour faire progresser le processus de paix, citant notamment la convocation, le 29 avril, de la loya jirga consultative pour la paix. Il les a encouragées à poursuivre leurs efforts, insistant par ailleurs sur l’importance vitale que revêt dans ce contexte le renforcement de la coopération régionale, notamment sur les plans politique, économique, social et sécuritaire. Il a aussi appelé les États Membres de la région à honorer leurs engagements découlant de la résolution 1988 portant sur les sanctions. Le représentant a appelé au respect du calendrier électoral et à une élection présidentielle transparente, crédible et inclusive. Il s’est félicité de la nomination de deux femmes aux deux Commissions électorales et appelé le Gouvernement à lever les obstacles qui entravent la pleine participation des femmes dans toutes les sphères de la vie publique et politique.
M. GBOLIÉ DÉSIRÉ WULFRAN IPO (Côte d’Ivoire) a indiqué que les progrès enregistrés dans le processus électoral afghan doivent être renforcés par l’engagement de toutes les parties prenantes à créer un environnement favorable à la tenue d’une élection présidentielle libre, transparente et crédible. Il a noté avec préoccupation la persistance des menaces et attaques meurtrières des Taliban et de la branche locale de Daech, ce qui pourrait avoir un impact négatif sur le taux de participation au scrutin, comme cela avait été constaté lors des élections législatives. Il a appelé, par conséquent, à la vigilance de la communauté internationale et des troupes de la mission « Soutien résolu », afin de prendre des mesures préventives de sécurité pendant cette période électorale « cruciale » pour l’avenir du pays. Il a exhorté les candidats à s’abstenir de toute action de nature à susciter des tensions qui pourraient compromettre le processus électoral. M. Ipo s’est félicité de la nomination de femmes à la tête de la Commission électorale indépendante et de la Commission des plaintes électorales.
Il s’est aussi félicité de toutes les initiatives visant à faciliter le dialogue entre l’ensemble des parties afghanes. Il a salué les efforts consentis par l’Envoyé spécial des États-Unis pour l’Afghanistan, M. Zalmay Khalizad, en vue d’entamer des pourparlers de paix entre le Gouvernement afghan et les Taliban. Il a également salué l’assistance que l’ONU et ses partenaires apportent aux populations affectées et exhorté la communauté internationale à maintenir son soutien financier au Plan humanitaire pour l’Afghanistan. Enfin, le représentant a appelé au maintien des troupes de la mission « Soutien résolu » et à la matérialisation des promesses de financement en faveur des Forces de sécurité et de défense afghanes jusqu’en 2024.
M. ZHAOXU MA (Chine) a estimé que le processus de paix en Afghanistan est à un stade crucial. Selon lui, la communauté internationale devra s’acquitter de ses obligations en l’aidant à organiser son élection présidentielle à partir des leçons tirées des scrutins législatifs de l’an dernier. Il faut également appuyer le processus de paix mené par les Afghans, en particulier les pourparlers directs avec les Taliban. Si le représentant s’est félicité de la baisse du nombre des pertes civiles provoquées par le terrorisme, il a cependant constaté que les victimes des frappes aériennes menés par les forces étrangères sont en hausse. Il a appelé la communauté internationale à s’acquitter de ses engagements sur le plan humanitaire et aider les réfugiés à rentrer chez eux. Ce mois-ci, la dix-neuvième réunion de l’Organisation de coopération de Shanghai a permis à ses États membres de réitérer leur soutien au processus de paix et de réconciliation, a conclu le représentant. La Chine continuera de promouvoir son initiative « Une Ceinture, une Route », a souligné le représentant.
M. PAUL DUCLOS (Pérou) a appelé les Taliban et le Gouvernement afghan à entamer des négociations de paix directes, notamment dans la perspective de l’élection présidentielle du 28 septembre 2019. Il est nécessaire que le scrutin se déroule dans un esprit de dialogue, de tolérance et de respect mutuel, a insisté le représentant, appelant à faire en sorte que des retards de nature politique ne viennent pas s’ajouter aux difficultés techniques et sécuritaires existantes. Il a exprimé sa profonde préoccupation face à la situation sécuritaire du pays. « Les morts dans des attaques aériennes menées par des forces associées au Gouvernement ont atteints des niveaux historiques », a-t-il déploré, notant également la persistance des attaques terroristes contre des civils à travers tout le pays. Il a ainsi appelé à intensifier les efforts internationaux pour lutter contre Daech et contre le partenariat du groupe avec les narcotrafiquants. Le représentant a enfin salué les avancées récentes du Gouvernement afghan, s’agissant de la lutte contre la corruption, de la réforme du secteur de la justice et de l’autonomisation des femmes.
M. KAREN PIERCE (Royaume-Uni) a parlé d’une initiative conjointe de l’Afghanistan et du Royaume-Uni visant à former un groupe des amis des femmes afghanes qui va permettre de faire fonds sur les progrès. Elle a appelé à des pourparlers de paix intra-afghans qui intègrent toutes les parties prenantes du pays. Elle a aussi invité les parties ayant de l’influence à plaider afin que les Taliban fassent preuve de responsabilité. En ce qui concerne les élections, Mme Pierce a rappelé qu’elles sont cruciales pour la stabilité du pays et a invité tous les acteurs politiques à faire preuve de responsabilité. Elle a aussi souhaité que la MANUA assiste le pays dans ce processus. Le nombre des victimes civiles, a-t-elle conclu, montre l’impact négatif du conflit. Le Royaume-Uni entend poursuivre son soutien au peuple et au Gouvernement afghans pour parvenir à la sécurité et à la prospérité.
M. MANSOUR AYYAD SH. A. ALOTAIBI (Koweït) a encouragé l’Afghanistan à « aller de l’avant » avec l’élection présidentielle, dont il a espéré que les préparatifs seraient couronnés de succès. Il s’est ensuite dit préoccupé par l’instabilité sécuritaire, en dépit d’une baisse de 72% des attentats-suicides. Parler de réconciliation politique exige cependant d’élargir la focale à la coopération internationale, a souligné le représentant, qui s’est félicité des efforts déployés par les États-Unis auprès du Gouvernement afghan. Il a, par ailleurs, demandé que cessent les attaques contre les personnels de santé, en soulignant qu’il est plus que temps de parvenir à un règlement pacifique du conflit.
M. FERIDUN HADI SINIRLIOĞLU (Turquie) a souligné que la stabilité de l’Afghanistan, et par ricochet de la région, va dépendre de l’amélioration de la situation sécuritaire. Toute tentative de paix devrait tenir compte de tous les segments de la société afghane, a-t-il martelé, en mettant aussi en garde contre le risque de compromettre les acquis obtenus à coût de grands sacrifices. Par exemple, a dit le représentant, depuis 2001, le statut de la femme afghane a profondément changé et aujourd’hui, les Afghanes appellent, à juste titre et de manière inflexible, à un processus de paix qui protège les acquis. « Tous nos efforts en faveur de l’autonomisation des filles et femmes doivent être préservés », a insisté le représentant, avant d’affirmer qu’assurer la participation des femmes aux élections, aux négociations de paix et globalement à la gouvernance va contribuer à préserver les acquis.
La paix et la stabilité durables ne peuvent non plus être possibles sans le soutien des pays voisins et ceux de la région. Les relations de la communauté internationale avec les acteurs régionaux sont donc essentielles. Depuis 2011, le Processus d’Istanbul « Au cœur de l’Asie » sur la sécurité et la coopération régionales pour la paix et la stabilité en Afghanistan est une plateforme « unique » qui réunit les pays de la région et les partenaires internationaux. La prochaine réunion de cette plateforme aura lieu le 25 juin à Ankara, a annoncé le représentant qui a aussi estimé que le renforcement de la confiance entre le Pakistan et l’Afghanistan est « impératif ». Il a exprimé la disposition de son pays à organiser un sommet avec ces deux pays, et a dit craindre qu’une décision sur un éventuel retrait des troupes ne vienne donner le sentiment d’un désengagement de la communauté internationale. « Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser l’Afghanistan dans un vide de pouvoir », a déclaré le représentant, avant de rappeler qu’un processus de paix et de réconciliation mené par les Afghans eux-mêmes est « crucial » pour une paix durable.
Mme GILLIAN BIRD (Australie) a encouragé le Gouvernement afghan à persévérer dans ses efforts pour dégager un consensus national sur les termes d’un règlement du conflit. Elle a aussi salué les efforts du Représentant spécial des États-Unis dans les négociations avec les Taliban. Les progrès réalisés sont importants et nous espérons que l’élan se poursuivra vers un accord global, a-t-elle ajouté. Les négociations ne sont jamais faciles mais nous sommes déçus que les Taliban refusent les pourparlers directs avec le Gouvernement afghan, a avoué Mme Bird. Un règlement politique durable n’est pas viable sans de telles discussions, a-t-elle prévenu, appelant les Taliban et les autres parties à commencer immédiatement les discussions sans condition préalable. Elle a en outre encouragé le Gouvernement afghan à veiller à ce que le peuple puisse voter librement le 28 octobre et sans menace de violence. Elle a appelé les Taliban à s’engager dans ce processus.
M. MARC-ANDRÉ BLANCHARD (Canada) a souligné que la tenue d’une élection transparente et équitable en septembre est essentielle pour la consolidation des acquis. Il a accueilli favorablement la décision de la Commission électorale indépendante de reporter les autres élections qui étaient prévues afin de se concentrer sur l’élection présidentielle. Il s’est aussi réjoui de ce que les autorités électorales tirent les leçons des élections législatives d’octobre 2018, surtout en ce qui concerne l’utilisation de la biométrie.
Le représentant s’est dit préoccupé de l’augmentation du nombre d’attaques contre des écoles afghanes, en raison de leur utilisation comme bureaux de vote. Afin de réduire l’incidence des élections sur l’éducation et les enfants, il a exhorté le Gouvernement afghan à chercher d’autres lieux. Il a aussi souligné l’importance d’assurer la sécurité des électeurs pour que les femmes soient capables de participer aux élections de manière tangible. Les femmes afghanes, a-t-il poursuivi, ne sont pas prêtes à sacrifier des gains durement acquis dans leurs droits pour un règlement politique avec les Taliban. Pour garantir la préservation de ces droits, de la démocratie et de la Constitution au-delà du processus de paix, les femmes et les filles doivent jouer un rôle prépondérant dans toutes les négociations, a souligné le représentant.
Il a rappelé que son pays offre des prêts aux organisations de femmes pour améliorer leur faculté de s’impliquer dans les processus de paix locaux et nationaux. Le Canada a aussi versé 8,4 millions de dollars au projet « Voix et leadership des femmes en Afghanistan ». M. Blanchard a relevé que le taux de violence à l’égard des femmes dans le pays est parmi les plus élevés au monde et que la justice pour les victimes reste gravement insuffisante. Il a fortement découragé le recours à la médiation dans les cas de violence faite aux femmes et a encouragé le Gouvernement à faire preuve d’une meilleure « diligence raisonnable » pour assurer l’égalité entre les sexes devant la loi.
Mme MALEEHA LODHI (Pakistan) a jugé qu’à côté des combats, du grand nombre de victimes civiles et de la détérioration de la situation humanitaire, il y a aussi des raisons d’espérer. Après des décennies de guerre, on voit des pourparlers de paix entre les États-Unis et les Taliban qui ont ouvert une réelle chance de parvenir à la paix. Le Pakistan, a-t-elle rappelé, a toujours estimé qu’aucune solution militaire ne pouvait mettre fin au conflit afghan et que seul le dialogue pourrait mener à une paix durable. Nous sommes donc satisfaits de voir ce chemin emprunté. À part l’Afghanistan, aucun autre pays que le Pakistan n’a autant souffert du conflit afghan, a souligné la représentant. Nous avons donc répondu favorablement à la demande américaine, en apportant notre contribution au processus de paix. Le Pakistan a libéré le chef taliban, Abdul Ghani Baradar à la demande des partenaires internationaux et entend faire tout ce qui peut promouvoir un accord politique.
Il est temps, a pressé la représentante, de passer à l’étape suivante qui est celle du dialogue intra-afghan. Elle a invité toutes les parties, à s’y engager, y compris les Taliban. Elle a espéré que le septième tour des négociations entre les États-Unis et les Taliban, prévu en début du mois prochain, conduira à un réel dialogue intra-afghan. Elle a aussi noté que la coopération entre le Pakistan et l’Afghanistan est « vitale » et annoncé que le Président afghan sera en visite au Pakistan ce mois-ci. De même, l’extension du commerce, de la coopération énergétique et la mise en œuvre de divers projets transrégionaux déjà identifiés pourraient, a-t-elle affirmé, renforcer la paix et la prospérité dans toute la région.
Mme MARIA ANGELA ZAPPIA (Italie) a souligné d’emblée que la MANUA reste essentielle pour la stabilisation et le développement de l’Afghanistan et s’est félicitée de changements rapides sur le terrain. Les développements diplomatiques, grâce notamment à l’action du Représentant spécial américain ont ouvert la voie aux négociations de paix et à une plus grande coopération régionale. C’est une opportunité qu’il faut saisir et toutes les parties prenantes doivent y contribuer, sous l’égide des Nations Unies, afin de s’orienter vers une solution cohérente et unifiée qui permette de rétablir la paix en Afghanistan.
Face aux défis sécuritaires et terroristes qui persistent, l’Italie est prête à poursuivre son soutien aux forces de sécurité afghanes, en particulier à travers ses contributions à la mission « Soutien résolu », a dit la représentante qui a estimé que les perspectives de paix n’ont jamais été plus tangibles qu’aujourd´hui. Elles sont le fruit des efforts en cours aux plans régional et international, que l’Italie soutient pleinement. Cependant « la part du lion » doit être assumée par les Afghans qui doivent s’engager dans un processus extensif et inclusif. À ce titre, la représentante a insisté sur l’importance de la participation des femmes pour que leurs droits soient ancrés dans la constitution et préserver les acquis civils et sociaux de ces dernières années.
La représentante a salué l’engagement en faveur de la paix du Président Ghani, qui a notamment proposé de faire la paix avec les Taliban, sans préconditions, en février 2018, une offre qui a été renouvelée dans la feuille de route pour la paix de Genève en décembre dernier. L’élection présidentielle sera le test décisif, a prévenu la représentante, en insistant sur la crédibilité et la transparence du processus. Elle a également exhorté tous les candidats à la présidence, du Président actuel aux membres de l’opposition, à s’engager à adopter une approche responsable qui garantira la protection des institutions de l’État. Mais, a-t-elle poursuivi, il faut veiller à ce que les considérations électorales ne prennent pas le dessus sur l’urgence d’engager un dialogue entre toutes les composantes de la société afghane et de faire les compromis nécessaires pour parvenir à un accord de paix. S’alignant sur la position de l’Union européenne, la représentante a voulu que l’on fasse la distinction entre le processus électoral et le processus de paix qui doivent poursuivre leur voie indépendamment l’un de l’autre.
M. MAHMAMADAMIN MAHMADAMINOV (Tadjikistan) a déclaré que l’aggravation de la situation politique en Afghanistan pose une menace réelle sur la sécurité de toute la région et trouble le fonctionnement des routes vers l’Asie centrale. Il est nécessaire de soutenir le Gouvernement afghan, en particulier durant la décennie de reconstruction de 2015-2024. L’aide de la communauté internationale doit faire naître l’espoir et promouvoir la créativité du peuple afghan afin qu’il puisse assurer paix, stabilité et relance socioéconomique. À cet égard, l’ONU peut jouer un rôle plus affirmé et plus efficace. Le représentant a soutenu les efforts du Gouvernement afghan et l’a exhorté à commencer le plus rapidement possible un processus de paix efficace. Il a aussi souligné la nécessité d’empêcher les groupes armés de l’opposition de commettre plus de violence et de casser leurs liens avec Al-Qaida et Daech.
Le processus de paix est un facteur important de la stabilité à long terme et de l’unité de l’Afghanistan. Mais la sécurité dans ce pays et dans toute la région ne peut se faire sans l’éradication du terrorisme et du radicalisme, a estimé le représentant pour qui les pays de la région doivent restreindre la circulation des terroristes sur leur territoire et détruire leurs sources de financement. Pour ce faire, le Tadjikistan, en coopération avec l’ONU, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l’Union européenne, a organisé une conférence sur la coopération régionale contre le terrorisme et le financement du terrorisme par le trafic de drogues, à Douchanbé en mai 2019. Ce mois-ci s’est aussi tenu le cinquième Sommet de la Conférence pour l’interaction et les mesures de confiance en Asie (CICA) au cours duquel le Président Emomali Rahmon a fait part de sa préoccupation face à la situation en Afghanistan et appelé à des mesures efficaces et à davantage de coordination de la part de la communauté internationale, y compris les pays membres de la CICA.
M. KORO BESSHO (Japon) s’est félicité de la finalisation des résultats des élections législatives d’octobre dernier et de l’inauguration du premier Parlement afghan depuis 2011. Avec la nouvelle Commission électorale indépendante et sur la base des leçons tirées des dernières, il est essentiel que l’élection présidentielle prévue pour fin septembre soit crédible pour que ses résultats soient largement acceptés. Le représentant a salué les efforts du Gouvernement afghan pour parvenir à la paix avec les Taliban et a rappelé l’importance d’engager dès maintenant un dialogue intra-afghan. Il a espéré que les efforts fait par les groupes « déterminants », y compris le dialogue entre les États-Unis et les Taliban et le dialogue trilatéral entre la Chine, les États-Unis et la Fédération de Russie, ouvriront la voie à ce dialogue et à son succès.
Le représentant s’est tout de même dit préoccupé par les attaques terroristes qui se poursuivent et a espéré que les développements positifs dans le processus de paix mèneront à la fin de la violence, à un cessez-le-feu et, à terme, à une paix durable. Il a insisté sur l’importance de la participation des femmes au processus de paix, en rappelant que le Japon avait déjà organisé plusieurs ateliers pour les femmes afghanes visant à améliorer leurs capacités de répondre aux violences sexistes. Une autre preuve de l’engagement du Japon aux côtés de l’Afghanistan est la somme de 96 millions de dollars qu’il a débloquée cette année pour financer des projets d’aide aux réfugiés, de réponse rapide à la sècheresse ou encore de déminage et de lutte contre les stupéfiants. Le représentant a assuré que le Japon continuera de travailler main dans la main avec le peuple afghan, y compris avec l’aide humanitaire.
Après s’être félicité des progrès accomplis par l’Afghanistan au cours de ces 18 dernières années, y compris à la Coupe du monde de cricket, qui s’y déroule actuellement, M. SYED AKBARUDDIN (Inde) a salué les opportunités créées par la mobilisation internationale. Toutefois, a-t-il tempéré, nous estimons que certains efforts pourraient obéir à un échéancier qui n’est peut-être pas intrinsèque aux besoins du peuple afghan. Nous devons garder à l’esprit que c’est le peuple afghan qui devra mettre en œuvre ces accords. La dignité de ce peuple et la viabilité des acquis devraient être « le paradigme central » pour déterminer le résultat le plus adéquat. Nous ne pouvons ignorer, a mis en garde, le représentant, que des groupes bénéficiant d’un soutien et de sanctuaires sûrs lancent depuis l’étranger des attaques terroristes. On ne saurait donc les laisser négocier avec « la main haute ». Pour une paix durable, il faut d’abord traiter de la question des refuges offerts aux réseaux terroristes. Les activités des Taliban, de Daech, d’Al-Qaida ou encore du réseau Haqqani doivent cesser, a martelé le représentant. Il a ensuite fait valoir les liens « profonds » qui unissent son pays à l’Afghanistan, notamment le partenariat économique pour améliorer la connectivité de ce pays sans littoral. Il a cité en particulier le projet du port de Chabahar et le corridor fret aérien entre qui a été opérationnalisé avec succès.
M. MIRGUL MOLDOISAEVA (Kirghizistan) a souligné le rôle central de l’ONU dans la paix et la stabilité en Afghanistan et rappelé le Cadre de responsabilité mutuelle de Genève, agréé en novembre 2018. En dépit des changements positifs survenus au cours des derniers mois, en particulier les réformes politiques, économiques, et sociales lancées par le Gouvernement, la situation politique dans le pays demeure fragile, a estimé le représentant. Il a mis en cause les activités incessantes des groupes extrémistes et terroristes et les trafics d’armes et de stupéfiants, ainsi que la traite humaine. « Nous sommes également préoccupés par la situation qui prévaut au niveau régional avec le retour des combattants terroristes étrangers », a alerté le représentant. Il s’est ensuite félicité de la tenue, le 19 avril à Bichkek, de la réunion du Groupe de contact sur l’Afghanistan et de l’Organisation de Shanghai pour la coopération, coprésidée par l’Afghanistan. À cette occasion, les participants ont abordé la question de la coopération avec Kaboul et des progrès accomplis dans le processus de paix, et examiné le projet de feuille de route du Groupe de contact pour les activités à venir. Le Kirghizistan avait par ailleurs accueilli, le 16 novembre dernier, la huitième réunion annuelle des Vice-Ministres des affaires étrangères des États d’Asie centrale. M. Moldoisaeva a de plus expliqué que son gouvernement promeut des initiatives en vue d’établir un consortium agro-industriel entre le Kirghizistan, le Tadjikistan et l’Afghanistan, ainsi qu’un centre international de recherche sur l’Afghanistan et la coopération régionale, dans la ville de Bichkek.
M. BAKHTIYOR IBRAGIMOV (Ouzbékistan) a dit suivre de très près la situation en Afghanistan parce que le développement stable et durable de l’Asie centrale est étroitement lié à la paix dans ce pays. Le Gouvernement afghan doit être le principal acteur de tout le processus de paix, lequel devrait englober toutes les forces politiques et tous les groupes ethniques du pays. L’Ouzbékistan contribue à ce processus, a ajouté le représentant qui a annoncé que son pays a rencontré des représentants de la Commission politique, l’année dernière. Durant ces rencontres, l’Ouzbékistan a souligné l’importance de faire respecter le cessez-le-feu, de faciliter l’aide humanitaire et de mettre en œuvre des projets économiques à grande échelle. Les Taliban, a affirmé le représentant, ont salué les efforts de l’Ouzbékistan qui a d’ailleurs participé à diverses négociations internationales sur l’Afghanistan avec pour objectif de soutenir les efforts internationaux pour trouver une solution réaliste au conflit afghan. « Nous sommes prêts, à tous les niveaux du processus de paix, à créer les conditions nécessaires à l’organisation sur notre territoire, de négociations directes entre le Gouvernement de l’Afghanistan et les Taliban », a annoncé le représentant, en transmettant ainsi l’invitation de son Président.
M. KAIRAT UMAROV (Kazakhstan) a fait part de l’inquiétude de son pays devant l’augmentation du nombre de victimes civiles du fait des attaques à grande échelle de forces antigouvernementales, y compris les terroristes, et l’utilisation d’engins explosifs improvisés, sans oublier les kamikazes. Il s’est dit inquiet de la détérioration de la situation humanitaire et a déploré le fait que Daech poursuive ses recrutements. Avec l’approche de l’élection présidentielle de septembre, il a voulu que l’on fasse fonds des dernières élections afin de sauvegarder la crédibilité et la légitimité du système politique afghan. Tout en saluant les pourparlers engagés avec les Taliban, il a jugé crucial un dialogue direct à brève échéance entre le Gouvernent et les Taliban.
Compte tenu des difficultés économiques de l’Afghanistan, le représentant a estimé qu’il faut privilégier la coopération régionale et renforcer l’intégration économique avec les pays voisins, afin de mettre en œuvre des projets dans les secteurs des infrastructures, du commerce, des investissements, du transit et des transports. Ces diverses initiatives devraient permettre de créer des emplois et de réduire le recrutement des populations par les groupes terroristes. Le représentant a invité les donateurs à augmenter leurs contributions à la paix et au développement dans et autour de l’Afghanistan. Le Kazakhstan s’évertue d’ailleurs à établir un centre interrégional sur les objectifs de développement durable, sous les auspices des Nations Unies. Cette structure devrait aider les pays de la région et au-delà à la mise en œuvre du Programme 2030.
M. JOÃO PEDRO VALE DE ALMEIDA, de l’Union européenne, a indiqué que les six premiers mois de l’année ont été importants pour les relations entre l’UE et l’Afghanistan, comme en atteste le nombre important de réunions et de visites de dignitaires, dont la Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Mme Federica Mogherini, qui s’est rendue à Kaboul au mois de mars. Il a aussi parlé de la réunion tenue le 8 avril par le Conseil des affaires étrangères de l’UE au cours de laquelle les attentes de l’UE eu égard au processus de paix ont été détaillées. Celle-ci, a-t-il précisé, est fermement convaincue que tout accord de paix doit préserver les acquis politiques, économiques et sociaux réalisés au cours des 18 dernières années.
Il a estimé que le dialogue entre le Gouvernement et les Taliban doit commencer dès que possible et que les négociations actuellement en cours entre les Taliban et les États-Unis doivent être intégrés aux consultations intra-afghanes. L’UE, a-t-il ajouté, est prête à faciliter tout processus de consultation et de dialogue qui contribuera à l’inclusivité en assurant la participation des groupes de femmes et de jeunes. Si on s’attend à ce que l’UE apporte un appui financier, politique ou de développement à l’issue d’un accord de paix, on doit l’impliquer à tous les stades du processus de paix, a prévenu le représentant.
Il a voulu que l’on mette l’accent sur les négociations intra-afghanes, dont la loya jirga, à condition d’élargir les consultations à d’autres parties prenantes et d’obtenir l’appui des principaux acteurs politiques et de la société civile . La classe politique afghane doit faire de la paix sa priorité, a-t-il martelé. M. Vale De Almeida a ensuite indiqué qu’au cours de la deuxième réunion du Comité conjoint EU-AFG, le Gouvernement afghan a présenté sa stratégie de croissance et son plan d’autonomie budgétaire d’ici à 2024. La bonne mise en œuvre de la législation en matière de droits de l’homme et de démocratie a été soulignée et un accord s’est également dégagé sur la préservation de l’ordre constitutionnel et l’inclusion des femmes à toutes les étapes des négociations et du processus de paix.
Le représentant a, par ailleurs, annoncé que l’UE compte organiser très prochainement, à Kaboul, la cinquième Conférence anticorruption. Il a indiqué que la réintégration durable des déplacés et rapatriés afghans demeure un défi de taille pour l’Afghanistan. L’UE compte donc continuer de renforcer son appui dans ce domaine. Elle fournira également un appui de 18 millions d’euros pour surmonter certaines des difficultés techniques rencontrées lors des élections législatives d’octobre 2018.
M. MAJID TAKHT RAVANCHI (République islamique d’Iran) a estimé que l’appel du peuple afghan pour la paix n’a jamais été aussi fort qu’aujourd’hui, et cet appel doit être entendu. Pour être durable, cette paix doit être rétablie par et pour les Afghans. Elle ne doit pas leur être dictée ni ignorer les véritables préoccupations et intérêts de tous les Afghans. La communauté internationale doit, selon le représentant, se contenter d’appuyer les aspirations de cette « grande nation », en facilitant un processus de paix dirigé et contrôlé par les Afghans. Le représentant a salué la dernière loya jirga consultative pour la paix et a jugé malheureux qu’au lieu de reconnaître le rôle positif de l’Iran dans le maintien de la paix et de la stabilité en Afghanistan, les États-Unis l’accusent d’alimenter l’insécurité. L’unique propos de cette assertion « injustifiée » est de couvrir les échecs que la politique américaine a multipliés ces 18 dernières années en Afghanistan, a tranché le représentant.
Si le retrait responsable et assorti d’un calendrier de toutes les forces étrangères est réclamé avec force par les Afghans, il faut néanmoins, a prévenu le représentant, l’accompagner du renforcement des institutions et des forces nationales de défense et de sécurité. Cela est d’autant plus important que le pays subit toujours la présence et les activités criminelles de groupes terroristes dangereux comme Daech que l’on a aidé à rapatrier ses éléments de la Syrie et de l’Iraq. Daech n’est pas seulement un élément déstabilisateur pour l’Afghanistan, mais c’est aussi une menace grave pour certains pays d’Asie centrale. Renforcer les forces de sécurité afghanes est tout aussi nécessaire pour s’attaquer au trafic de stupéfiants qui détruit également le tissu social des pays voisins et finance les activités terroristes et autres activités criminelles. Après avoir appelé à des efforts internationaux pour appuyer l’économie afghane, le représentant a rappelé que son pays abrite des millions de réfugiés afghans et combat le trafic de stupéfiants vers l’Europe « sans réelle aide internationale ». Il est temps que la communauté internationale assume ses responsabilités et aide l’Afghanistan dans ce domaine, a-t-il conclu.