Le Conseil de sécurité proroge pour une nouvelle période de 12 mois l’embargo sur les armes en Libye
Le Conseil de sécurité a adopté à l’unanimité la résolution 2473 (2019) par laquelle il proroge pour une nouvelle période de 12 mois les autorisations visées dans la résolution 2420(2018) pour faire respecter l’embargo sur les armes imposé au pays en 2011.
Ces autorisations remontent à la résolution 2292(2016) adoptée le 14 juin 2016, par laquelle le Conseil autorisait les États à faire inspecter en haute mer, les navires à destination ou en provenance de la Libye, s’ils ont des motifs raisonnables de penser que ces navires transportent des armes ou du matériel connexe en violation de l’embargo. Les États sont également autorisés à saisir et à éliminer les armes et matériels en question. La résolution 2292 fixe des conditions très strictes à ces autorisations afin de limiter au maximum les atteintes au principe de libre circulation dans les eaux internationales.
Les sept délégations, qui ont pris la parole, se sont toutes félicitées de l’adoption unanime de la résolution. Comme l’ont souligné le Royaume-Uni et la France, la prolongation de cet embargo est indispensable compte tenu de la violence armée qui perdure sur le terrain. L’Allemagne a prévenu que les violations flagrantes de l’embargo érodent la crédibilité du Conseil de sécurité et de l’ONU tout entière.
Alors que l’Afrique du Sud s’inquiétait de la suspension depuis le 27 mars dernier des moyens maritimes de l’opération SOPHIA, « essentiels » pour la mise en œuvre de l’embargo, la France a précisé que l’opération a recentré son action. Elle contribue à la formation des garde-côtes libyens et mobilise ses moyens aériens pour collecter des informations pertinentes sur la mise en œuvre de l’embargo.
LA SITUATION EN LIBYE (S/2019/380)
Texte du projet de résolution (S/2019/470)
Le Conseil de sécurité,
Rappelant sa résolution 1970 (2011) imposant l’embargo sur les armes à la Libye et toutes ses résolutions ultérieures sur la question,
Rappelant également ses résolutions 2292 (2016), 2357 (2017) et 2420 (2018) concernant le strict respect de l’embargo sur les armes en haute mer au large des côtes libyennes,
Conscient que la Charte des Nations Unies lui confie la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales,
Réaffirmant que le terrorisme, sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations, constitue une des menaces les plus graves pour la paix et la sécurité,
Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies,
1. Décide de prolonger les autorisations visées dans la résolution 2420 (2018) pour une nouvelle période de 12 mois à compter de la date de la présente résolution;
2. Prie le Secrétaire général de lui faire rapport, dans les onze mois suivant l’adoption de la présente résolution, sur l’application de celle-ci;
3. Décide de rester activement saisi de la question.
Déclarations
Pour le porte-plume de la résolution, M. STEPHEN HICKEY (Royaume-Uni), l’embargo sur les armes est l’un des éléments clefs de la stabilisation de la situation en Libye. Il a rappelé à tous les États leurs obligations au titre de l’embargo et averti que toute arme qui entre en Libye mine les perspectives du cessez-le-feu et sape celles d’une solution politique. Le cessez-le-feu n’est qu’un aspect de la stabilisation, a-t-il poursuivi, tout comme le dialogue sur la solution politique. Le représentant a soutenu les efforts inlassables de l’Envoyé spécial car un dialogue politique sous l’égide des Nations Unies est le seul moyen de sortir la Libye de la crise.
M. MARCE PECSTEEN DE BUYTSWERVE (Belgique) a soutenu, à son tour, la prolongation de l’embargo sur les armes. Il a dénoncé les violations systématiques de cet embargo « indispensable », compte tenu de la violence armée qui perdure. Il a appelé tous les acteurs de la crise à respecter l’embargo, au risque de contribuer encore d’avantage à la détérioration de la situation. Il n’y a pas de solution militaire à la crise, a martelé le représentant qui a appelé à un cessez-le-feu immédiat et à un retour au dialogue, sous l’égide des Nations Unies. Il a demandé au Conseil de sécurité de s’exprimer en ce sens dès que possible.
Mme ANNE GUEGUEN (France) a salué l’adoption à l’unanimité de la résolution « afin de mettre en œuvre de manière efficace l’embargo sur les armes en Libye ». Elle s’est dit extrêmement préoccupée par la situation actuelle et ses répercussions possibles sur les pays de la région. Pour la France, une solution militaire n’est pas envisageable. Par conséquent, la représentante a appelé à la mise en œuvre d’un cessez-le-feu immédiat et sans condition. Notant que le respect de l’embargo sur les armes est plus que jamais une priorité, elle a souligné le rôle de l’opération Sophia qui cherche à limiter les flux d’armes par voie maritime. Cette opération a recentré son action et contribue à la formation des gardes côtes libyens, a précisé Mme Gueguen, soulignant qu’elle mobilise également ses moyens aériens pour collecter des informations pertinentes sur la mise en œuvre de l’embargo sur les armes.
M. JERRY MATTHEWS MATJILA (Afrique du Sud) s’est dit profondément préoccupé par le fait que les opérations militaires en cours se seraient intensifiées à cause des transferts d’armes par voies maritime et aérienne. Il s’est dit tout autant plus préoccupé par la suspension des moyens maritimes de l’opération Sophia, essentiels pour la mise en œuvre de l’embargo. Cela fait deux mois, s’est impatienté le représentant, que la crise en Libye s’est aggravée et que les acteurs restent sourds aux appels du Conseil de sécurité à un cessez-le-feu. Il n’y a pas de solution militaire en Libye, a-t-il insisté, à son tour, en prônant le dialogue national, la coopération et la réconciliation. Il a exhorté les États Membres à respecter strictement l’embargo qui est d’une importance « capitale » pour la protection des civils et le rétablissement de la sécurité et de la stabilité en Libye comme dans la région. Les sanctions sont là pour promouvoir le processus politique ou faciliter le changement. Elles ne devraient pas entraver l’aide humanitaire, a souligné le représentant.
M. KACOU HOUADJA LÉON ADOM (Côte d’Ivoire) a estimé que l’adoption de la résolution intervient à un moment important pour la Libye. Il a appelé toutes les parties à respecter l’embargo sur les armes et instaurer un cessez-le-feu. Cette résolution, a-t-il jugé, devrait aider à la mise en œuvre du cessez-le-feu qui est un préalable au dialogue et au processus politique. Le représentant a appelé tous les pays concernés à aider l’opération Sophia à briser le flux d’armes en Libye et le cercle vicieux du conflit. Il faut stopper les actes mafieux en Libye, a-t-il martelé.
M. JUERGEN SCHULZ (Allemagne) s’est lui aussi félicité de l’adoption à l’unanimité de la résolution et a appelé le Conseil de sécurité à redoubler d’efforts pour en assurer la mise en œuvre sur le terrain. Il s’agit, a-t-il souligné, de mettre fin dès que possible aux violations flagrantes de l’embargo. Le représentant a fait observer que l’opération Sophia est un mécanisme clef pour la pleine mise en œuvre de l’embargo « ce qui est plus urgent que jamais ». Il a soutenu les efforts de l’Envoyé spécial et constaté que le flux des armes fait craindre un penchant pour une solution militaire, une option, a-t-il prévenu, qui risque de déstabiliser toute la région. Les violations flagrantes de l’embargo érodent, a mis en garde le représentant, la crédibilité du Conseil de sécurité et de l’ONU tout entière.
M. DIAN TRIANSYAH DJANI (Indonésie) a lancé un appel à la cessation des hostilités et à la reprise du dialogue. Il a apporté son appui aux efforts de l’Envoyé spécial et s’est dit préoccupé par la sûreté du personnel de l’ONU et des agents humanitaires. Le représentant a conclu en se félicitant que la résolution adoptée aujourd’hui montre l’unité du Conseil de sécurité face à la situation en Libye.