La Sixième Commission conclut son débat sur l’état de droit et reporte, au nom du consensus, l’adoption du reste de son programme de travail
La Sixième Commission, chargée des questions juridiques, a reporté, aujourd’hui, l’adoption du reste de son programme de travail, après que la République islamique d’Iran a marqué, une nouvelle fois, son opposition. Plus tôt dans la journée, la Commission a achevé son débat sur l’état de droit aux niveaux national et international, marqué par les appels de nombreuses délégations contre toute « instrumentalisation » et « sélectivité » de l’état de droit.
« Malgré des discussions de haut niveau qui se sont déroulées, nous n’avons pas eu connaissance d’évolution dans les difficultés que nous avons déjà évoquées », a déclaré le délégué iranien. Il a dénoncé, une nouvelle fois, les restrictions, en particulier le refus de visas par le pays hôte, qui empêchent une pleine participation de l’Iran aux travaux de la Commission.
« Mon pays ne peut s’acquitter de ses tâches », a-t-il dit. L’Iran a reçu l’appui de ses homologues de Cuba, du Nicaragua, de la Fédération de Russie ou bien encore de la Syrie, pays qui font partie des « sept à huit pays lésés » par les agissements du pays hôte, selon l’expression du délégué syrien.
Ce dernier a détaillé les restrictions de visas auxquelles il est assujetti et qui l’ont notamment empêché de se rendre aux funérailles de son « seul neveu », tué lors du bombardement de son école à Alep. « Notre délégation n’a toujours pas reçu les 18 visas qu’elle attend », a renchéri le délégué russe.
La représentante des États-Unis a indiqué que l’enceinte idoine pour discuter de ces questions n’est pas cette Commission mais le Comité des relations avec le pays hôte, qui doit se réunir d’urgence demain à 15 heures. Alors que le délégué iranien s’est plaint des restrictions qui frappent ses déplacements, elle a mentionné les 400 pâtés de maison de Manhattan, ainsi que les quartiers du Queens, dans lesquels il peut se rendre.
Les délégations, dont celles de l’Union européenne, d’Oman et de la Chine, ont souhaité que la règle du consensus soit préservée au sein de la Commission. « Nous sommes devant un dilemme, soit mettre aux voix le programme, soit poursuivre les consultations », a résumé le représentant russe. Pour l’Union européenne, « un vote remettrait en question une tradition bien établie de la Commission ». Car ses travaux « passent par le multilatéralisme et l’utilisation du consensus y contribue ».
C’est la voie des consultations qui a donc été choisie, le Président de la Commission, M. Michal Mlynár, soulignant lui aussi son attachement « à ce mot qui commence par la lettre C, et qui n’est pas commission ni comité ».
Premier orateur de la matinée sur l’état de droit, le délégué du Népal a d’emblée déclaré que « l’état de droit ne peut être utilisé comme paravent par un État pour exercer une domination sur un autre ». Même son de cloche du côté de la délégation de la Croatie qui a insisté sur l’importance d’une « interprétation rigoureuse » par les tribunaux de l’application des instruments internationaux.
Toute autre approche « sélective » dans la poursuite des auteurs des crimes les plus graves présente un risque sérieux pour la paix et la stabilité et n’apporte ni justice ni réconfort aux victimes et à leurs familles, a déclaré le délégué croate. Son homologue de la Fédération de Russie n’a, lui, pas ménagé ses critiques contre la Cour pénale internationale (CPI).
Les mécanismes « illégitimes » d’enquête imposés à la Syrie et à Myanmar « participent à des violations honteuses du droit international », a-t-il ajouté. Le représentant de l’Azerbaïdjan a, pour sa part, rejeté toute « instrumentalisation » des mécanismes de résolution des conflits dans le but d’entériner des situations résultant du recours illégal à la force, ainsi que de crimes de guerre, crimes contre l’humanité, génocide et nettoyage ethnique.
Mais la charge la plus virulente est venue du délégué de l’Iran, qui a dénoncé la « sélectivité » du rapport du Secrétaire général sur le sujet. Il a en particulier regretté que le rapport omette le récent rejet par une chambre de la Cour pénale internationale de la demande de la Procureure d’ouvrir une enquête sur la situation en Afghanistan.
Le représentant iranien a dénoncé l’unilatéralisme, qui menace l’état de droit au niveau international, cristallisé par le retrait de différents accords internationaux, par une vague de conflits commerciaux lancés contre plusieurs pays et par l’imposition de sanctions extraterritoriales illégales. « Ces menaces et sanctions appellent plutôt à l’affrontement qu’à la coopération », a-t-il dit. Le délégué a accusé les États-Unis de voir dans les « sanctions, menaces et ultimatums » des solutions « magiques » à tous les défis et de se livrer à une « vengeance économique » contre les pays qui continuent d’avoir des liens économiques avec l’Iran.
La Commission reprendra ses travaux demain, mardi 15 octobre, à 10 heures.
L’ÉTAT DE DROIT AUX NIVEAUX NATIONAL ET INTERNATIONAL - A/74/139
Déclarations
M. GHANSHYAM BHANDARI (Népal) a insisté sur l’engagement sans faille de son pays en faveur de l’état de droit. Les discriminations sont prohibées. L’état de droit a été renforcé par la récente adoption d’un nouveau code pénal, a-t-il dit. Le délégué a ajouté que le principe de bonne gouvernance sous-tend toutes les politiques du Gouvernement, la lutte contre la corruption étant une priorité. Il a appelé de ses vœux un ordre mondial régi par l’état de droit. « L’état de droit ne peut être utilisé comme paravent par un État pour exercer une domination sur un autre. » C’est un processus qui n’est jamais achevé et doit être amélioré, a conclu le délégué.
Selon M. ZACHARIE SERGE RAOUL NYANID (Cameroun), « l’état de droit ne doit pas être l’état de n’importe quel droit » et doit accorder aux citoyens des libertés fondamentales. « L’État ne doit pas être un monstre froid. » Le droit est la condition de la démocratie et consacre une hiérarchie des normes, a-t-il insisté. Le représentant a souhaité que l’état de droit perde son « caractère d’objet de luxe » et soit partagé par tous, condition de la croissance économique et du développement durable.
Au Cameroun tout le monde est égal devant la loi grâce à l’assistance judiciaire, a expliqué M. Nyanid. Un nouveau conseil constitutionnel, une commission nationale des droits de l’homme et un conseil national de la jeunesse contribuent au renforcement des institutions, a-t-il continué en citant la réforme carcérale, la lutte contre la corruption, la décentralisation, autant d’efforts qui impliquent l’assistance des Nations Unies et une collaboration internationale. Au niveau international, le représentant a réitéré son souhait que l’on évite « le chaos » car, même si le monde est en pleine mutation, sa stabilité et sa sécurité sont garanties par la capacité des États à rester disciplinés et à agir dans le cadre de la Charte des Nations Unies, « sans ingérence ni clientélisme », avec plus d’égalité entre pays riches et pauvres.
M. LUIS XAVIER OÑA GARCES (Équateur) a affirmé que son pays accorde la priorité absolue à la mise en œuvre et au respect des conventions et instruments du droit international qui garantissent les droits de l’homme et rappelé qu’il est signataire de l’ensemble de ces textes, car il estime qu’ils sont un élément central de la coexistence pacifique et du plein exercice de la démocratie. Pour cette raison, l’état de droit doit accompagner l’évolution des sociétés et répondre aux questions émergentes qu’elles soient sociales, économiques ou environnementales. L’Équateur réaffirme également son plein appui aux juridictions internationales. M. Garces a considéré qu’il est indispensable de renforcer les mécanismes régionaux d’appui à la démocratie et d’apporter des solutions politiques et sociales aux pays en proie à de graves crises humanitaires et politiques quand elles affectent des régions entières.
M. SYED MOHAMAD HASRIN AIDID (Malaisie) a dit l’attachement de son pays à l’état de droit et indiqué que la Malaisie a siégé à quatre reprises au Conseil de sécurité. La Malaisie soutient le multilatéralisme, l’ONU étant l’enceinte idoine pour le promouvoir. Il a plaidé pour le règlement pacifique des différends et rappelé que de nombreux soldats de la paix malaisiens sont déployés au sein des missions onusiennes. Le délégué a par ailleurs souhaité une révision du droit de veto, qui continue selon lui d’entraver la réalisation des buts de l’Organisation, ainsi qu’une réforme de la composition du Conseil.
En étudiant le rapport du Secrétaire général, M. ALEXANDER S. PROSKURYAKOV (Fédération de Russie) a noté une multiplicité de mesures touchant des domaines aussi divers que les droits des femmes et la peine de mort. Voyant là « une forme classique de chevauchement des compétences », il a dit ne pas être convaincu que la Sixième Commission soit la meilleure enceinte pour leur examen. Il a également insisté sur le fait que l’assistance de l’ONU dans ces domaines ne doit avoir lieu qu’à la demande des États et qu’elle exige une prise en compte des « particularités culturelles » de chacun d’entre eux.
La Russie soutient le droit international et marque son appréciation pour la Cour internationale de Justice (CIJ), a rappelé le représentant. Il s’est toutefois étonné de l’importance accordée à la Cour pénale internationale (CPI) et du manque de critiques à l’égard de cette institution. De même, il a critiqué les mécanismes « illégitimes » d’enquête imposés à la Syrie et à Myanmar « qui participent à des violations honteuses du droit international ». Il a néanmoins assuré apprécier les échanges de bonnes pratiques pour l’amélioration des systèmes judiciaires.
M. MLADEN BRUČIĆ-MATIC (Croatie) a jugé indispensable que les juridictions internationales répondent aux normes les plus élevées: indépendance, impartialité et intégrité. Toute violation de ces principes fondamentaux entrave l’état de droit et rend les décisions caduques, de même qu’elle n’encourage pas les États à envisager un règlement des différends par une tierce partie. En tant que victime des crimes les plus graves commis sur le sol européen depuis la Seconde Guerre mondiale, la Croatie a insisté sur l’importance d’une interprétation rigoureuse par les tribunaux de l’application des instruments internationaux. Toute autre approche « sélective » dans la poursuite des auteurs des crimes les plus graves présente un risque sérieux pour la paix et la stabilité et n’apporte ni justice ni réconfort aux victimes et à leurs familles, a déclaré M. Bručić-Matic. À cet égard, il a appuyé la Cour pénale internationale (CPI), qu’il considère comme « l’instrument le plus important dans la lutte contre l’impunité ». Il a également appelé tous les États à coopérer avec tous les tribunaux pénaux internationaux et avec le Mécanisme résiduel.
M. MILLOGO (Burkina Faso) a mentionné le processus d’élaboration d’une nouvelle constitution en cours dans son pays, mené sur la base d’une approche participative et inclusive, et qui sera bientôt soumise à référendum. Malgré les attaques terroristes, les forces de sécurité poursuivent leurs opérations dans le respect des droits de l’homme, a-t-il assuré. Au niveau international, le Burkina Faso œuvre « inlassablement » à la mise en œuvre des instruments juridiques internationaux auxquels il a souscrit. Face à la prolifération de discours haineux, la montée de l’intolérance et les attaques contre les lieux de culte, le délégué a salué le lancement par le Secrétaire général du Plan d’action pour la protection des sites religieux.
Mme AL ALI (Émirats arabes unis) s’est félicitée de l’attention unique accordée par son pays à l’état de droit comme le prouve sa constitution, vecteur de justice, de bonne gouvernance et d’un investissement dans l’humain qui promeut les valeurs de tolérance. La représentante a loué l’Agenda national 2020 de son pays visant une « société vertueuse », dénuée de crime, qui renforcera encore plus la qualité d’un système judiciaire « connu comme l’un des plus efficaces au monde et consacré premier au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ». Elle s’est néanmoins attachée à décrire les risques de déstabilisation au niveau international et a craint « l’effondrement » de pays en butte au terrorisme, fustigeant ceux qui financent les mouvements extrémistes et fomentent des manifestations terroristes. Elle a conclu en rappelant la nécessité d’un appui à l’investissement propice au développement et l’attachement de son pays aux multiples conventions et partenariats assurant la paix et la sécurité.
La promotion de l’état de droit au niveau international doit reposer sur les principes fondamentaux de la Charte, y compris le respect de la souveraineté et de l’indépendance des États, a indiqué M. DANG DINH QUY (Viet Nam). Il a insisté sur le rôle fondamental joué par la Cour internationale de Justice (CIJ) dans le règlement pacifique des différends. Il a appelé les États parties en mer de Chine méridionale à respecter le droit international, en particulier la Convention sur le droit de la mer. Dans un contexte marqué par de complexes développements en mer de Chine méridionale, y compris de sérieux incidents qui sapent les droits souverains du Viet Nam dans les zones maritimes visées par ladite Convention, le représentant a appelé toutes les parties à faire montre de retenue et à « s’abstenir de tout acte unilatéral qui pourrait alimenter les tensions ».
M. MAMADOU RACINE LY (Sénégal) a affirmé qu’une justice indépendante et impartiale constitue l’instrument par excellence de la réalisation de l’état de droit. C’est là, a-t-il ajouté, toute l’importance d’une sécurité juridique, exigence fondamentale de l’état de droit en tant que « garantie contre l’arbitraire et d’une sécurité judiciaire fondée sur la compétence, l’indépendance et l’intégrité des juges à même d’assurer l’effectivité et la soumission de tous ». Face aux défis du monde contemporain, il a souligné que « l’état de droit repose sur une culture et une mentalité qu’il faut entretenir en permanence ». Le représentant a appuyé le programme d’assistance en matière d’enseignement, d’étude, de diffusion et de compréhension du droit international.
Le pays a traduit les principes de l’état de droit dans sa charte fondamentale et dans le Plan Sénégal émergent qui vise l’amélioration de l’accès à la justice, de sa qualité et de son efficacité, y compris de proximité, a expliqué M. Ly. Ainsi, les « maisons de justice », qui utilisent des langues locales, font de l’information juridique, règlent les petits conflits en utilisant les modes alternatifs de règlement des différends comme la médiation et la conciliation, et aident les citoyens à obtenir certains actes délivrés par la justice. En plus de rapprocher la justice des justiciables, ce concept l’humanise à travers une approche plus souple, moins coûteuse et plus adaptée aux réalités socioéconomiques des bénéficiaires, s’est félicité le représentant. Le Sénégal a également mis en place un système d’aide juridictionnelle en faveur des plus démunis, dont l’enveloppe augmente d’année en année, a-t-il encore indiqué. Au niveau international, il a appelé à l’universalité du Statut de Rome.
M. NGOFA (Nigéria) a souligné l’importance de l’adhésion à l’état de droit, en particulier au niveau international, pour réguler les comportements des États, et les rendre responsables en vertu des normes et des idéaux les plus élevés de paix et de développement, conformément à la Charte des Nations Unies. Il y a toujours selon lui un lien entre l’état de droit et d’autres problématiques à l’ordre du jour de l’ONU, comme le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Tous les instruments régissant l’état de droit se sont révélés bénéfiques pour la coexistence pacifique, selon le Nigéria. Tout comme le respect de l’intégrité, de la souveraineté territoriale et de l’indépendance des États, la résolution pacifique des conflits, le respect des droits des peuples à l’autodétermination sous occupation coloniale, ainsi que le droit au développement. L’état de droit est un principe fondamental de la jurisprudence nationale nigériane, pays doté d’une constitution amendée en 1999: il est ancré dans ses principes démocratiques, a encore expliqué M. Ngofa. Le Nigéria le met en pratique via sa politique sur les questions de genre et pour promouvoir l’autonomisation des femmes.
M. GIORGI MIKELADZE (Géorgie) a noté les efforts de son pays pour assurer les droits de l’homme et la bonne gouvernance, citant la création d’un bureau de protection des données personnelles, et d’un département des droits de l’homme au sein du Ministère des affaires étrangères qui couvre aussi tous les crimes liés au genre, à la discrimination et aux mauvais traitements aux mineurs. En matière de droit international, le représentant a réaffirmé le soutien de la Géorgie à la Cour internationale de Justice (CIJ), mais aussi l’accord pour l’application des sentences signé par son pays avec la Cour pénale internationale (CPI) qui permet à la Cour de procéder à la détention des individus condamnés dans les prisons géorgiennes. De plus, M. Mikeladze a rappelé que la CPI traitait des crimes commis en Géorgie « pendant l’agression Russe de 2008 », présentant l’action de la Cour comme une première sur le territoire européen.
Aux yeux de M. TOFIG MUSAYEV (Azerbaïdjan), l’irrecevabilité du recours à la force pour acquérir des territoires est la pierre angulaire du droit international. Ce principe et son corolaire, à savoir l’obligation de ne reconnaître aucune situation découlant d’une violation sérieuse du droit international, doivent être respectés coûte que coûte, a estimé le représentant. En outre, les mécanismes de prévention ou de résolution des conflits doivent impérativement être compatibles avec les règles du droit international, a-t-il ajouté. De sorte qu’aucun accord conclu entre deux parties pour résoudre leur différend ne doit, selon lui, porter atteinte aux normes fondamentales du droit international, y compris les notions de souveraineté et d’intégrité territoriale des États. Le représentant a par conséquent rejeté toute instrumentalisation des mécanismes de résolution des conflits dans le but d’entériner des situations résultant du recours illégal à la force, ainsi que de crimes de guerre, crimes contre l’humanité, génocide et nettoyage ethnique. « Il est inacceptable que des agressions armées contre des États souverains et l’acquisition de territoires qui en découlent perdurent, nonobstant l’existence de résolutions du Conseil de sécurité », a-t-il insisté.
M. HALEN ARMANDO NAPOCO (Guinée-Bissau) a salué la référence faite dans le rapport du Secrétaire général aux progrès de son pays dans la promotion de l’état de droit. En ce qui concerne l’accès à la justice, un appui juridique gratuit est fourni aux femmes victimes de violence, a-t-il dit. Le délégué a insisté sur les progrès accomplis par la Guinée-Bissau dans l’égalité entre les sexes, une loi récente ayant prévu d’allouer 36% des fonctions soumises à élection à des femmes. Aujourd’hui, pour la première fois, le Gouvernement de mon pays est composé à parité d’hommes et de femmes, a déclaré M. Napoco. Enfin, le délégué a indiqué que la Guinée-Bissau, avec le concours de ses partenaires, veille à renforcer les capacités de ses institutions, afin notamment de lutter contre la corruption.
M. PHONESAVATH PHONEKEO (République démocratique populaire lao) a déclaré que le Plan directeur pour le secteur juridique, établi en 2009, avait jeté les bases du premier cadre de développement juridique du pays, dont la mise en œuvre a permis d’améliorer les procédures juridiques et la coordination de l’ensemble du système judiciaire. Le plan de travail 2016-2020 a également accru les capacités, procédures et normes législatives et institutionnelles, aidé à la promotion des droits juridiques auprès de la population, y compris en vue de sa participation, et amélioré l’application des instruments internationaux auxquels le pays a souscrit. La République démocratique populaire lao a notamment déposé, en septembre 2019, les instruments de ratification du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et de la Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale des marchandises, dont les dispositions ont été transposées en droit interne.
M. ALI ANDIKA WARDHANA (Indonésie) a assuré que l’état de droit est la solution aux problèmes du monde et félicité l’ONU pour son soutien technique aux pays en ce domaine. Il a réitéré son rejet de « tout acte belliqueux contre l’état de droit au niveau international, citant, à cet égard, l’occupation de la Palestine. Sur le plan interne a-t-il poursuivi, des améliorations ont été enregistrées, telles une nouvelle définition des traités dans le droit des accords internationaux par sa cour constitutionnelle et une législation nationale facilitant l’application du droit international dans les lois internes. Par ailleurs, le représentant a confirmé l’attachement de son pays à la peine de mort « comme une sentence de dernier recours et soumise à une procédure rigoureuse, qui montre son importance pour protéger la société et éviter de nouvelles victimes ».
M. ALI NASIMFAR (République islamique d’Iran) a regretté la « sélectivité » du rapport du Secrétaire général. Le récent rejet par une chambre de la Cour pénale internationale (CPI) de la demande de la Procureure d’ouvrir une enquête sur la situation en Afghanistan, assurant ce faisant l’impunité pour des auteurs de crimes de guerre, n’est pas mentionné. L’unilatéralisme, qui menace l’état de droit au niveau international, a été cristallisé par le retrait de différents accords et traités internationaux, par une vague de conflits commerciaux lancés contre plusieurs pays et par l’imposition de sanctions extraterritoriales illégales. Il a estimé que ces menaces et sanctions appellent plutôt à l’affrontement qu’à la coopération. « Aucune personne dotée de bon sens ne peut s’engager dans un véritable dialogue dans une telle ambiance », a asséné le délégué. Les sanctions, les menaces et les ultimatums sont des instruments depuis toujours de la politique étrangère américaine.
M. Nasimfar accusé les États-Unis de voir dans ces instruments des solutions « magiques » à tous les défis et de se livrer à une « vengeance économique » contre les pays qui continuent d’avoir des liens économiques avec l’Iran. « Cela n’est rien d’autre que du terrorisme économique pur et simple. » Il a rappelé ensuite l’ordonnance de la Cour internationale de Justice (CIJ) prise à la suite du retrait des États-Unis du Plan d’action global commun, « une autre preuve de l’illégalité des sanctions prises par les États-Unis contre l’Iran ». Malheureusement, ce pays n’a pas mis en œuvre les mesures demandées par la Cour, au contraire, il s’est lancé dans la direction opposée en adoptant de nouvelles sanctions, a-t-il regretté. Enfin, le délégué a regretté les « restrictions débilitantes » imposées par le pays hôte qui frappent la mission iranienne à New York.
Il est troublant, a déploré Mgr FREDRIK HANSEN, du Saint-Siège, de constater le retour d’une certaine tendance à « imposer et défendre des intérêts nationaux individuels, sans avoir recours aux instruments prévus par le droit ». Dans ce contexte, Mgr Hansen a appelé de ses vœux « un engagement plus fort en faveur d’un ordre mondial conforme au droit international, avec l’ONU en son centre ». Toutefois, à ses yeux, le cadre multilatéral des traités et accords conclus sous l’égide de l’ONU n’est pas suffisant. « L’état de droit ne peut être garanti que si le respect des droits de l’homme repose sur des procédures et institutions efficaces, responsables et ouvertes au niveau national », a-t-il estimé, appelant à redoubler d’efforts pour combler les lacunes du droit au niveau international et national. Le représentant a en outre fait part de sa consternation face à « la remise en cause croissante de l’indépendance des juges et des avocats ». Tout en saluant les efforts du Rapporteur spécial sur cette question, il a demandé qu’elle occupe une place plus centrale dans les travaux de la Sixième Commission sur l’état de droit.
Mme ISMAEL (État de Palestine) a reconnu l’importance du rapport du Secrétaire général et constaté qu’un état de droit juste implique le soutien à la Charte de l’ONU et aux juridictions internationales. À cet égard, la représentante a souligné le rôle joué par la Palestine dans la mise en œuvre de la juridiction de la Cour pénale internationale (CPI) sur le crime d’agression. Elle a rappelé que la Palestine a remis ses rapports initiaux sur les droits de l’homme, un processus qui a été qualifié de bonne pratique par le Bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme et prouve que la Palestine ne considère pas cet exercice « comme une simple opération de relations publiques ». Elle a ainsi décrit divers efforts d’harmonisation de ses lois avec le droit international, participant au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, au Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort, et au Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. La représentante a assuré que l’État de Palestine, « qui continue de souffrir dans sa chair des conséquences de l’injustice, du deux poids, deux mesures, et du déni de justice, ne négligera aucun effort pour assurer le triomphe de l’esprit de multilatéralisme et d’état de droit qui a présidé à la création de l’ONU ».
Mme GÉRARDINE GOH ESCOLAR, Première secrétaire de la Conférence de La Haye de droit international privé (HCCH), une organisation intergouvernementale qui milite en faveur de l’harmonisation progressive du droit international public et privé, a précisé que le HCCH était composé de 82 pays et de l’Union européenne (UE). L’objectif fondamental de son organisation, a-t-elle poursuivi, est de fournir « un degré élevé de certitude juridique et de prévisibilité » aux particuliers, familles, entreprises et investisseurs qui vivent ou exercent leurs activités dans un contexte transfrontalier, le tout dans le respect de la diversité des systèmes et traditions juridiques d’un pays à l’autre. Pour se faire, a indiqué la Première secrétaire, le HCCH promeut le développement et la codification du droit international privé; plaide en faveur de l’élaboration de traités bilatéraux et multilatéraux pour renforcer la coopération internationale; et appuie l’assistance aux États pour la mise en œuvre de leurs obligations du point de vue du droit international. À titre d’exemple, la Première secrétaire a indiqué que le HCCH tentait actuellement de faire avancer la codification du droit international privé en matière de filiation légale et de statut des enfants, y compris s’agissant des accords internationaux de gestation pour autrui.
M. DJORDJE DJORDJEVIC, délégué de l’Organisation internationale de droit du développement (OIDD), a rappelé que le mandat de l’Organisation est essentiellement de faire avancer l’état de droit et sa contribution au développement. Il a détaillé les axes retenus par son organisation pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030: améliorer l’accès à la justice, en particulier pour les femmes; aider les pays fragiles ou en proie à un conflit à renforcer leur secteur judiciaire; engager les systèmes judiciaires coutumiers et informels pour garantir un accès à la justice et, enfin, convoquer un forum sur ces sujets, sur le modèle de la conférence qui s’est tenue à Rome en 2019.
Droits de réponse
Le délégué de Maurice a exercé son droit de réponse en rappelant la « déception » d’une délégation à l’encontre de la compétence exercée par la Cour internationale de Justice (CIJ) s’agissant de l’archipel des Chagos. La Cour est bien compétente pour émettre un avis consultatif, a-t-il fait valoir. Il a accusé la Puissance coloniale de vouloir hâtivement clore ce chapitre et de s’abriter du changement. « L’archipel des Chagos fait partie de Maurice. » Il a rappelé que l’Assemblée générale a entériné l’avis de la CIJ. « Il n’y a pas de personne plus aveugle que celle qui ne veut pas voir. » Enfin, il a exhorté la Puissance coloniale à rendre des comptes pour la situation dans l’archipel des Chagos.
Le représentant de la Fédération de Russie a répondu à son homologue de la Géorgie en disant « éviter les commentaires sur la Cour pénale internationale (CPI) malgré les critiques et les déceptions qu’elle suscite ». Il a rappelé que « c’est l’ancien régime de Mikheil Saakashvili qui avait attaqué l’Ossétie du Sud causant par cette action de nombreux morts civils ».